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L'ART

DU CHANT
L'ART

DU CHANT
SUIVI D'UN TRAITÉ

DE MAINTIEN THÉATRAL
AVEC FIGURES EXPLICATIVES

PAR

PARIS
BRANDUS El' Cie., ÉDITEURS
103, RUE DE RICHELIEU

1876

Tous droits réservés.

a
A MONSIEUR

AMBROISE THOMAS
PRÉFACE

Un ouvrage d'enseignement n'a sa raison d'être que. par l'exposition


d'une méthode rationnelle et la mise en lumière de points laissés obscurs
par les controverses des devanciers.
Il existe sur l'art du chant un certain nombre de traités ; chacun
d'eux renferme d'excellentes leçons 5 mais si l'on veut les consulter, la
diversité des opinions trouble l'esprit au lieu de l'éclairer.
L'art du chant n'a pas encore su tirer profit de la méthode si exacte
des sciences d'observation. A part les recherches de Ch. Bataille sur la
phonation, c'est à des physiologistes, à des savants, à des médecins, que l'on
est redevable de l'explication de faits qui intéressent principalement les
artistes i mécanisme de la voix, émission du son, jeu des différents regis-
tres, questions capitales, point de départ de tout l'enseignement.
Frappé de trouver dans leurs écrits la raison scientifique de phéno-
mènes qui jusqu'alors n'avaient donné lieu qu'à des suppositions, je me
suis attaché à suivre, autant que possible les procédés d'observation aux-
quels on doit la connaissance des faits; il en résulte quelques change-
ments dans la méthode et un [certain nombre d'aperçus nouveaux.
Ainsi, après l'exposé des conditions nécessaires pour chanter, il
est parlé de la nature des voix, à commencer par la voix de l'enfant; il -est
établi que même chez les jeunes sujets on peut reconnaître les aptitudes
du chanteur par l'examen des cordes vocales, vues au laryngoscope;
viennent ensuite des observations sur les moyens de développer l'organe
vocal sans le fatiguer, et l'analyse des procédés de respiration auxquels
les plus grands artistes doivent leur puissance et leur succès.
Dès les premières leçons il est donné une grande importance à la
recherche du timbre naturel de chaque voix.
Pour faire valoir les richesses du timbre, les exercices de voix blanche
et de voix sombrée sont alternés sur les voyelles qui en assurent immé-
diatement l'émission et en préviennent les défauts.
En même temps sont indiqués les moyens de corriger les voix guttu-
rales et nasales, et de faire cesser le tremblement et le chevrotement.
La question si controversée des registres est traitée à l'aide des tra-
vaux de MM. Béclard, Diday et Pétrequin, Fauvel, Ch. Bataille. —
L'étude en est rendue moins complexe par l'indication précise et des notes
sur lesquelles s'opère la liaison, et des voyelles qui la rendent plus
facile1.
La vocalisation est préparée par une série d'arpèges sur la plupart
des accords de notre système musical ; ces exercices ont pour effet de
développer l'étendue de la voix, d'assurer la justesse de l'intonation et
de donner quelques notions d'harmonie.
La vocalisation rapide est décomposée suivant ses espèces et facilitée
par des formules qui en rendent l'exercice familier. En peu de temps
l'élève sera capable d'exécuter le battement si difficile de la vocalisation
martelée, le lié des différents groupes et de produire le mouvement
oscillatoire de la glotte qui constitue le trille. — L'abus de la roulade pou-
vant entraîner au chevrotement, les exercices de vocalisation sont alter-
nés avec les exercices de sons soutenus.
C'est alors seulement qu'il est question du son filé, si difficile lorsque
l'on commence; — en effet, cette mise de voix résume toutes les études
relatives à l'émission et n'est possible qu'après une certaine pratique des
exercices vocaux.
L'étude du mécanisme se termine par une analyse du genre chroma-
tique, rendu facile par le retour constant à la tonalité.
Comme résumé se trouve l'indication de l'ordre méthodique des dix-
sept voyelles et des quinze consonnes sur lesquelles tous les exercices
devront se répéter.
La deuxième partie est une théorie de l'exécution. L'élève y trouvera
moins un système que des aperçus qui l'éclairent et lui permettent d'avoir
un style à lui.
Tous les chapitres de l'ouvrage sont complétés par des exemples au
nombre de cent trente tirés de quarante-sept opéras modernes des plus
célèbres.

(1) Voir plus loin la lettre de M. le docteur Fauvel.


Le petit traité de maintien théâtral accompagné de figurines, qui fait
suite à l'Art du chant, est en partie la reproduction écrite du cours pro-
fessé au Conservatoire par M. Élie. En établissant quelques règles géné-
rales sur le maintien, le geste et la physionomie, si j'ai pu faire com
prendre la nécessité d'étudier avec méthode la mimique théâtrale, j'aurai
rempli le but que je me suis proposé.
En terminant cette préface, je suis heureux de témoigner mes
sentiments aux excellents maîtres et aux bons amis qui m'ont donné
les moyens de revoir et d'améliorer mon ouvrage.
Je prie MM. François Bazin, Henri Reber, Félicien David, de vouloir
bien agréer l'expression de ma reconnaissance pour leurs bienveillantes
critiques, mes amis Barthélemy Laurent et Arrenaud pour leur collabora-
tion désintéressée.

v
LETTRE

DE M. LE DOCTEUR FAUVEL

Après avoir"lu les parties de votre ouvrage qui se rapportent plus spécialement
à mes études laryngoscopiques, je me plais à vous dire que je partage les opinions par
vous exprimées dans les chapitres relatifs à la voix des enfants, la mue, la respiration
et la position de la langue.
On ne saurait, je crois, trop insister sur l'obstacle que la langue oppose à l'émis-
sion de certaines voyelles et sur la nécessité du travail qui a pour but de le surmonter.
N'est-ce pas un étrange parti pris que l'usage adopté par la plupart de nos
professeurs de chant à Paris de faire étudier les vocalises sur la voyelle a et de
-négliger,les autres, notamment la voyelle è?
C'est un fait de nature à frapper tous ceux qui se servent du laryngoscope.
Pour qui veut amener les cordés vocales en vue du miroir laryngien, le choix de la

voyelle n'est pas indifférent, l'è se trouve être la plus favorable; mais faute d'habi-
tude, -pour émettre cette voyelle, presque tous les sujets soulèvent entièrement la
langue, qui remplit alors toute la cavité buccale et obstrue le passage de la voix.
Avec de pareils contre-sens, il est impossible d'émettre le son clair et de le
porter au loin.
Il serait trop long d'entrer dans plus de détails sur ce sujet.
J'ai aussi beaucoup remarqué votre chapitre si important des registres, de la
iaison des registres et de la classification des voix.
Je suis heureux que vous partagiez l'avis de mon bien regrettable et savant ami
Ch. Bataille, qui n'admettait que deux registres : voix de poitrine et voix de tête.
La lumière est loin d'être absolument faite sur ce point; lot cap ita, tôt sensus.
Et ce n'est pas étonnant. C'est là un des arcanes de l'art du chant, et dans
l'étude du mécanisme, le passage d'un registre à l'autre est la grande difficulté.
Vous admettez, comme tout le monde, la classification des voix en soprano,
mezzo-soprano et contralto pour les enfants et les femmes, et en voix de ténor,
baryton et basse pour les hommes. Depuis quinze ans, j'ai passé en revue sous le
miroir laryngien les cordes vocales d'un grand nombre d'artistes lyriques des théâtres
de Paris et d'élèves voués à l'art du chant; j'ai été étonné de la diversité innombrable
- dans la forme des cordes
vocales. Il est certain qu'on peut classer toutes les voix en
trois grandes divisions pour chaque sexe ; mais malheureusement il est des voix qui
tiennent le milieu entre ces divisions. Pour être franchement ténor, il faut avoir des
cordes vocales très-courtes et un peu étroites. Si l'on a des cordes courtes mais larges,
on se rapproche du baryton sans être cependant un vrai baryton. Avec des cordes un
peu plus longues et plus larges que celles du ténor, on a une voix de baryton; mais
si les cordes vocales n'étaient pas d'une largeur proportionnée à leur longueur, on ne
serait ni franchement ténor ni franchement baryton.
Il faut donc que la longueur et la largeur des cordes vocales soient dans des
rapports constants. C'est faute de réunir ces conditions que parfois un débutant, un
élève du Conservatoire s'imagine être tantôt ténor et tantôt baryton. Sa voix passe d'un
timbre à l'autre et on croit y reconnaître un des effets de la fatigue. Pour peu qu'on
atteigne les notes élevées on veut être ténor et on se gouverne en conséquence. En
tendant vigoureusement les cordes vocales on obtient d'abord des sons purs de ténor,
mais bientôt on est forcé de faire effort pour arriver à tendre les cordes, puis les
muscles cessent de se tendre aussi vigoureusement-et la voix reprend avec son timbre
naturel la place que la nature lui a assignée.
On peut dire qu'il en est de la voix humaine, sous certains rapports, comme
des instruments à cordes, violons, altos, violoncelles et contre-basses, qui empruntent
leur timbre spécial au plus ou moins de longueur et d'épaisseur de leurs cordes.
Le travail peut à certain point se jouer de la nature. On a vu un virtuose exécuter
sur la contre-basse des concertos écrits pour le violon. Mais ce sont là de vrais tours de
force. L'exécutant se fatigue et l'instrument reste insuffisant.
Je n'ai pas à me prononcer sur les autres parties de votre ouvrage ; bien que les
ayant lues avec soin, je ne dois pas oublier qu'elles sont en dehors de ma spécialité.
Je me borne à vous dire ce dont je suis convaincu, c'est que grâce à vos études,
grâce à vos recherches, on verra faire un grand pas à cet art si noble et si beau, mais
en même temps si difficile, l'Art lyrique, qui sert à adoucir et à élever nos mœurs.

CH. FAUVEL.
L'ART DU CHANT

PREMIÈRE PARTIE

CONDITIONS ESSENTIELLES POUR CHANTER

Pour s'adonner à l'étude du chant, il faut avoir des dispositions naturelles,


eu égard à la justesse, à l'étendue, au timbre et à l'égalité de la voix.
Il n'est pas nécessaire de savoir d'abord lire la musique. En général, le pro-
fesseur de solfége ne s'occupe pas de la qualité du son, mais seulement de la
ju-stesse. Ses élèves, livrés à eux-mêmes, contractent le plus souvent des défauts
d'émission très-difficiles à corriger. Nous donnons donc le conseil de ne mettre
au solféga que des élèves déjà familiers avec les principes et la pratique de
l'émission du son. Ils peuvent alors, sans risques pour leur voix, mener de front
les deux études.

DE LA JUSTESSE

Pour bien chanter, il faut d'abord avoir la voix juste, c'est-à-dire pouvoir
parcourir les degrés de la gamme, en conservant entre chaque note la distance
que lui assigne notre système musical.
Les chanteurs inexpérimentés chantent quelquefois faux, soit parce qu'ils for-
cent leur voix, soit au contraire parce qu'ils ne la soutiennent pas assez ; dans le
premier cas, la voix monté, dans le second elle descend. Ces défauts se corrigent
par l'étude.
\
Il est assez rare que la voix soit fausse par nature. Il est probable que ce
vice provient d'une mauvaise conformation de l'appareil auditif. La voix chantante
et la voix parlante d'un même individu n'ont quelquefois aucune analogie entre
elles. Ce n'est donc pas d'après la voix parlante qu'il faut juger de l'instrument
du chant. On peut être bon chanteur et avoir un parler d,éteslable." eJt vice versa;
c'est pourquoi, si l'on a la voix fausse quoique sonore; si, bien que sensible aux
inflexions de la musique, on se trouve incapable de les imiter ou de les suivre
en chantant; si on est sujet à attaquer une note éloignée ou baroque en croyant
donner l'unisson, il est inutile de chercher à se vaincre. Le résultat ne répondrait
jamais à la peine. Il faut avoir la sagesse de renoncer au chant.

DE L'ÉTENDUE

L'étendue des voix non cultivées est en général d'une octave et demie. Cette
étendue serait trop restreinte et insuffisante pour le théâtre; mais, par l'étude, la
voix acquiert un grand développement.
Les voix cultivées possèdent le plus souvent deux. octaves moins une note.
Certains virtuoses dépassent ces limites, mais ce sont là des exceptions.

' -1" «T
DU TIMBRE

Le timbre est la résonnance du son.


Toute voix a son timbre particulier plus ou moins beau.
Le timbre peut être métallique, argentin, cuivré, plein, sonore, vibrant,
puissant, éclatant, corsé, mordant, pénétrant, doux, tendre, grave, mixte, cou-
vert, de poitrine, de tête, cristallin, voilé, fêlé, creux, vide, sourd, strident, rauque,
guttural, nasal, etc,
Le mot timbre se dit encore pour désigner la nature des différentes voix hu-
maines : timbre de ténor, de baryton, de basse, de soprano, de mezzo-soprano, de
contralto. La différence du timbre est frappante entre tous'les sujets; il est aussi.
facile de distinguer l'individu par son timbre qu'il est facile de le distinguer par sa
physionomie.
Un timbre de voix sensiblement sourd, guttural ou nasal, est toujours
mauvais,
élevées (1)..
On peut toutefois tirer parti du timbre nasal. Dans une certaine mesure, il
prête un certain éclat aux voix sourdes ou cotonneuses, surtout dans les notes

Quand on émet un son, il faut pouvoir juger soi-même des qualités du tim-
bre; cette faculté s'acquiert également par l'étude.

DE L'ÉGALITÉ

Quand une voix parcourt son étendue en passant successivement par tous
les degrés de la gamme, elle doit conserver la même sonorité. Une voix dans ces
conditions est égale.
S'il arrivait qu'une, deux ou trois notes du médium (milieu de la voix) ne
retentissent que faiblement ou même point du tout, on aurait ce qui s'appelle un
trou dans la voix. C'est un défaut qui cède presque toujours à un travail intelligent
et soutenu.

DU SON

Le chant est une suite de sons musicaux dont chacun doit remplir certaines
conditions : d'abord, se poser fixement, c'est-à-dire se maintenir sur le même
degré de l'échelle vocale, soit qu'il augmente soit qu'il diminue d'intensité (2) ;
ensuite, avoir. une résonnance suffisante; enfin, demeurer homogène, c'est-à-dire
conserver ses qualités individuelles, quel que soit le degré de l'échelle vocale sur
lequel il est placé.
Outre la différence des timbres, le son a des qualités ou des défauts qui lui
sont propres. Il peut être fort ou faible, clair ou sombre, chevrotant ou sec, etc.
La beauté du son est la première qualité du chant.

(1) Un des plus grands chanteurs du siècle, qui s'est retiré du théâtre à l'apogée de sa réputation,
Barroilhet, avait un timbre nasal très-prononcé, surtout dans les passages de force. Cependant sa voix
avait un charme incontestable et incontesté. *
(2) Ne pas confondre intensité avec volume : le son intense est fort, le son volumineux est gros.
VOIX DES E N F A N T S (t)
L'enfant dps deux sexes peut chanter dès l'âge de neuf ans. C'est une erreur
de croire que les études précoces épuisent les ressources d'un âge plus avancé. Il
en est de l'exercice du chant comme de tous les exercices du corps, plus on les
commence de bonne heure, plus on a chance de conserver la souplesse des mus-
cles et des cartilages. ~
C'est au professeur à connaître les moyens de son élève. Pour plus de sûreté,
il devrait examiner au laryngoscope les cordes vocales du sujet, ou les faire
examiner par un docteur. De cet examen, on tire des pronostics à peu près certains
sur la nature de la voix. Les deux cordes de la glotte varient par leur longueur
et leur épaisseur; elles sont longues ou courtes, grosses ou fines. Suivant leurs
proportions on peut classer les voix.

CLASSIFICATION DES VOIX D'APUÈS LA LONGUEUR ET L'ÉPAISSEUR

DES CORDES VOCALES.

LONGUEUR ÉPAISSEUR

i|
DES CORDES. DES CORDES.

ri)
I ( Fines Soprano aigu.
.
2 I
Courtes !
Moyennes Soprano fort.
I ( Soprano grave.
® Grosses
h | / Fines. Mezzo-soprano élevé.
^ '
o Moyennes Moyennes Mezzo-soprano franc.
H \
> ri)
l
Grosses Mezzo-soprano grave.
« l Fines Contralto élevé.
*^î 1
£ Longues < Moyennes Contralto franc.
-Q y [ Grosses
..... Contralto grave.

Fines Ténor Mger.


I
Courtes Moyennes Ténor fort.
( Grosses Ténor grave.
Fines Baryton élevé.
Moyennes |, Moyennes Baryton franc.
> | Grosses Baryton grave.
*.

! Fines Basse élevée.


- Basse chantante.
Longues
............ Moyennes
Basse taille.
Grosses ............
(1) Ce chapitre est fait pour les professeurs plutôt que pour les élèves, qui pourraient ne pas
comprendre certains termes techniques ou ne pas en apprécier la portée.
Voici encore quelques observations de nature à servir à la direction des études.
Une voûte palatine très-élevée indique l'ampleur des sons, que la voix soit grave
ou aiguë. Une mâchoire bien déliée et de bonnes dents permettent une belle arti-
culation. Un nez inspirant librement fait espérer une émission franche et l'absence
des sons nasals. Une épiglotte se soulevant facilement fera obtenir une bonne
émission. Des amygdales trop gonflées nuiraient à l'émission de la voix.
La voix des garçons est vibrante et sonore; elle ressemble à la voix de femme,
mais le timbre en est plus argentin et plus pur... N'est-il pas ravissant d'entendre
ces belles voix d'enfant qui se prêtent si merveilleusement à l'exécution de la
musique religieuse?
La plupart des enfants de chœur chantent d'instinct, sans jamais avoir entendu
parler d'émission de voix, de marlellement, de vocalisation, de trille, de sons
filés, etc., etc. La beauté du timbre supplée à tout. Mais que ne deviendraient-
ils pas, si .on les habituait graduellement aux exercices du chant? Après la mue,
ils pourraient se servir immédiatement de leur voix, et posséderaient en peu de
temps un talent si difficile à acquérir, lorsque les organes vocaux n'ont plus la
souplesse du jeune âge.
A neuf ans, la voix des filles a peu de force et peu de timbre. Elle doit être
ménagée; mais en l'exerçant tous les jours avec modération, on facilite le dévelop-
pement de l'organe vocal, sans danger de le fatiguer. Bien que leur voix ne soit
pas employée utilement à l'église ou au théâtre, les filles ont une très-grande apti-
tude pour le chant, et lorsqu'elles en ont appris les principes de bonne heure, elles
arrivent rapidement à des résultats inattendus, aussitôt que la mue a cessé.
CLASSIFICATION DES VOIX D'ENFANT

Les voix d'enfant se divisent en trois classes : le soprano, le mezzo-soprano,


l'alto ou contralto.
ÉTENDUE

SOPRANO.

MEZZO SOPRANO.

ALTO OU CONTRALTO.

DES REGISTRES CHEZ L'ENFANT

La voix des enfants, filles ou garçons, a deux registres. Le registre de poitrine


ou voix de poitrine et le registre de tête ou voix de tête (1).
Le registre de poitrine ou voix de poitrine occupe la partie basse de la voix;
son timbre est plus sonore que celui de la voix de tête.
On ne peut pas fixer l'étendue du registre de poitrine. On sait que la voix
des enfants est continuellement à l'état de formation. De sept à neuf ans, le registre
de poitrine est très-faible. De neuf à onze ans, il prend de la consistance et s'étend

du si 0,
| & De onze à quinze ans, le registre de
au sol,
^ b-u ^ Q
poitrine prend une force et une étendue étonnantes. Certains enfants de chœur

arrivent à monter en voix de poitrine jusqu'au fa, ^° Ces sons

extrêmes du registre de poitrine sont d'une grande sonorité et d'un certain effet à
l'église, mais les efforts qu'ils nécessitent fatiguent beaucoup le sujet et compro-
mettent l'avenir de sa voix.
Le registre de tête ou voix de tête, comprend les notes élevées de la voix. Le
timbre de ce registre est doux et flûté.

(1 ) Voyez Des registres chez la femme, page 41.


ÉTENDUE GÉNÉRALE DES VOIX D'ENFANTS

SANS DISTINCTION DE CLASSE

Les deux registres coïncident sur une certaine partie de leur parcours ; mais
on ne doit chanter les notes coïncidentes en voix de poitrine et en voix de ldte, que
sur l'intervalle d'une tierce, selon la nature de la voix.
La dépense de l'air est moindre pour le registre de poitrine que pour le registre
de tète. On peut donc soutenir les sons plus longtemps en voix de poitrine qu'en
voix de tête.

DE LA LIAISON DES REGISTRES CHEZ L'ENFANT

Ce que nous dirons de la liaison des registres chez la femme, peut s'appliquer
lt la voix d'enfant. (Voyez page 4à.)

Chez les garçons, le travail de la liaison des registres devra se faire du

mi,
^ 1
au sol,
^ pour les soprani et les mezzo-soprani, et
p Q

du fa, ^ | au la3
^ pour les alti ou contralti.
t>

Chez les jeunes filles, le travail de la liaison des registres devra se faire du


^ |
au fa 3
^ j
pour les soprani et les mezzo-soprani, et
3
^
du mi, ^ au sol,
^ j
pour les alti ou contralti.
^ Q

Les exercices que nous donnerons pour lier les registres des voix de femme
aux pages 48, h9, 53, 5h, 58, 59, pourront sérvir aux voix d'enfant, en se
conformant à ce que nous venons de recommander.
En commençant les études du solfége, on doit s'occuper de la respiration, de
la position que doivent prendre la bouche et la langue, de l'émission de la voix, du
martellement, des registres et de l'articulation d-e l'r lorsqu'on prononce la note ré.
Au début, on doit faire vocaliser les enfants sur la -voyelle é, afin d'obtenir plus faci-
lement le soulèvement de l'épiglotte. En vocalisant sur la voyelle â,-il arrive sou-
vent que l'épiglotte est- trop abaissée et nuit à l'émission du son. Cette recomman-
dation est d'une importance extrême, surtout pour les garçons, qui ont l'épiglotte
plus abaissée que les jeunes filles. ~

Les exercices devront être chantés dans le médium des cordes vocales, de
manière à ne pas atteindre aux notes extrêmes de chaque registre.
De tous les écarts, le plus dangereux est,de chanter trop dans le haut du
^
registre de poitrine. Les garçons ne doivent pas dépasser le sol3 ~~
0
et le la. '
^
Ll
|| de ce registre. Les jeunes filles le faz
^ et le
^

sol
^ | Faute d'observer ce principe, on expose les -enfants à forcer
3 o
leurs cordes vocales, qui se courbent alors par.la fatigue, et ne peuvent plus
vibrer d'une façon normale. C'est ce qu'on appelle vulgairement se casser fa voix.
A Paris, la plupart des enfants souffrent de l'anémie ; l'excès du travail peut
étioler encore leur nature chétive. Nous recommandons les plus grands soins pour
ceux que l'on veut faire chanter. La nourriture doit suppléer fi. la dépense de forces.
Les professeurs auront soin de choisir, dans notre traité, les leçons qui
leur paraîtront les plus propres à la nature de leurs élèves, et de les faire
répéter tous les jours, mais avec modération. Un travail interrompu fatigue
l'organe sans profit.
DE LA MUE
On appelle mue, le cbangement que la nature opère dans la voix des individus
de 1ùn et l'autre sexe, à l'époque où ils passent de l'enfance à la puberté.
Chez l'homme, des sons graves et mâles succèdent aux sons aigus de la voix
d'enfant.
Chez la femme, la mue est moins sensible; elle ne déplace rien, elle dure peu
et se termine en laissant la voix plus forte.
Le traité de Garcia et la méthode du Conservatoire s'accordent pour reconnaître
en principe les inconvénients du chant durant la mue; seulement Garcia exclut le
chant d'une manière absolue, tandis que la méthode du Conservatoire admet des
exercices modérés. Voici, du re2te, les théories des deux auteurs :
« Pendant ce temps de crise, il faut laisser agir la nature, unique dispensa-
trice des forces de l'individu. A ceLte époque de régénération, le sujet ne saurait
être trop économe de ses forces, ni ménager trop sa constitution. Si l'on appauvrit
l'organe vocal par l'exercice du chant ou par des excès quelconques, on épuise la
plante avant qu'elle soit apte à donner des fruits; on fait succéder la caducité à
l'enfance : on tue la virilité. »
(Traité complet de l'art du chanta par Manuel GARCIA, page 7.)

«
Nous pensons cependant qu'avec beaucoup de précautions on peut faire
chanter l'élève, même pendant la mue, mais avec modération, sans forcer les
sons graves, et surtout les sons aigus de la voix.
« Par conséquent, le maître doit tous les jours observer et étudier la voix de
l'élève, afin de retrancher des exercices qu'il lui fera faire, les sons provenant de la
poitrine, que la mue lui aura fait perdre, et lorsqu'il ne restera plus à l'élève qu'une
octave de l'étendue de sa voix, alors il cessera tout à fait de le faire chanter.
« En suivant scrupuleusement cette méthode, soit à l'égard des garçons, soit
à l'égard des filles, mais plus particulièrement pour les premiers, au lieu de gâter la
voix des élèves, non-seulement on la leur conservera, mais aussi, par ce moyen, les
progrès de la mue seront plus rapides, et l'on en obtiendra plus promptement le
terme. » (lIJéthode du Conservatoire, page 7.)

En ce qui nous concerne, nous estimons que l'abstention complète du chant


pendant la mue doit être recommandée, au moins comme mesure de prudence, afin
de ne pas forcer les cordes vocales; car, s'il est vrai que des exercices modérés
peuvent abréger la durée de la mue, faute de connaître exactement les limites natu-
relles, l élève excède ses moyens, se fatigue le larynx et perd sa voix, ou pour
un
temps, ou pour toujours.
CLASSIFICATION DES VOIX

Distinguons d'abord les voix non cultivées et les voix cultivées


:

1° DES VOIX NON CULTIVÉES

ÉTENDUE

SOPRANO.

MEZZO SOPRANO.

CONTRALTO.

TÉNOR (1).

BARYTON.

BASSE.

(4) Rationnellement, la voix de ténor devrait être écrite en clef d'ut, quatrième ligne; pour
faciliter la lecture des partitions réduites, on a adopté la clef de sol. L'élève sait alors que les sons de
sa voix sont en réalité à une octave au-dessous des notes de cette clef. Les grandes partitions étant
écrites en clefs d'ut, la connaissance de ces clefs est indispensable aux artistes.
La voix ne se classe pas seulement par l'étendue, mais aussi et surtout par le
timbre. Il y a des voix d'homme qui ne descendent pas au-dessous du lat grave
~jjj|
et qui montent jusqu'au la3 aigu jj du ténor.

Néanmoins ce sont des voix de basse. On les reconnaît à la gravité du timbre et à


l'ampleur des sons.
D'autres voix, au contraire, d'un timbre éclatant et d'un petit volume,

descendent sans difficulté jusqu'au sol grave • et. ne peuvent


4

^ ""f
monter qu'avec peine au-dessus du fa 3 Ces voix n 'en appar-
tiennent pas moins au genre des ténors. L'étude développe le haut de la voix et
fait perdre les notes graves inutiles.
Les basses qui attachent une grande importance à leurs notes les plus graves,
ont souvent de la peine à les conserver.
On est toujours tenté de classer la voix d'après l'étendue primitive, c'est un
tort, car si l'on fait fausse route, on déclasse sa voix et on ne peut plus chanter
aucun genre.
En résumé, nous conseillons aux commençants de ne pas faire trop d'efforts
pour atteindre les limites extrêmes de leur voix, et de ne pas se presser de la classer.
Avec des exercices soutenus on obtient souvent des résultats bien meilleurs que
ceux auxquels on s'attendait.
Les femmes dont la voix n'est pas cultivée ont une tendance à ne chanter que
sur un seul registre (1), soit de poitrine, soit de tête; le travail développe progres-
sivement le registre paresseux, tout en augmentant les qualités naturelles de celui
dont on se sert le plus habituellement.
Chez l'homme, quelle que soit la nature de sa voix, le travail en développe
l'étendue et le volume, plus particulièrement dans les notes élevées du registre de
poitrine.
Dans le tableau suivant on observera le développement des voix cultivées, en
le comparant avec le tableau des voix non cultivées.

(4) Voir Des registres chez la femme, page 4*1.


2° DES VOIX CULTIVEES

Elles se classent comme les voix non cultivées dans les six genres généraux-
déjà énoncés.

SOPRANO.

MEZZO SOPRANO.

CONTRALTO.

TÉNOR.

BARYTON.

BASSE.

Cette étendue des voix est suffisante, néanmoins les compositeurs l'ont souvent
dépassée, soit dans le haut, soit dans le bas ; ils écrivaient alors pour des voix
exceptionnelles.
Telles sont de nos jours les voix de Mmes Alboni, Krauss, Lauters-Gueymard,
Miolan-Carvalho, Nillson, Patti, Stolz-Teresina, Viardot, Waldman-Maria ; de
MM. Duprez, Faure, Levasseur, Roger.
Généralement, lorsqu'un auteur écrit pour une voix exceptionnelle, il met des
variantes aux passages où se trouvent des difficultés insurmontables pour les voix
d'une étendue normale. Un commençant ne doit donc pas s'effrayer des notes qui
dépassent les limites de sa voix, il pourra presque toujours y suppléer.
DE LA RESPIRATION

La respiration est ou a.bdominale, ou pectoraleou tout à la fois abdominale


et pectorale.
La respiration abdominale produit l'abaissement du diaphragme (1) en même
temps qu'une proéminence plus marquée de l'abdomen et un très-léger soulèvement
des basses côtes. Là. cavité de la poitrine se trouve alors développée en son diamètre
vertical, et permet aux poumons de se dilater de haut en bas sans subir la moindre
compression.

(1) Béclard, Physiologie, page 305.


Le diaphragme est un muscle hémisphérique, convexe du côté de la poitrine, et concave du côté
de l'abdomen, dans son état de repos. Le diaphragme s'insère par sa circonférence à tout le pourtour
de la hase de la poitrine ; en arrière, sur le corps des trois premières vertèbres des lombes, par deux
faisceaux charnus, très-forts, désignés sous le nom de piliers, et à une arcade fibreuse étendue transver-
salement de l'apophyse transverse de la première vertèbre lombaire, au sommet de la dernière côte; sur
les côtés, à la face postérieure des cartilages des six dernières côtes; en avant, aux régions latérales de
la face postérieure du sternum.
Lorsque le diaphragme se contracte, sa convexité diminue, et il tend de plus en plus à former un
plan horizontal. La cavité de la poitrine se trouve augmentée de cette manière, suivant son diamètre
vertical. Au moment où le diaphragme se contracte, en tendant à transformer sa convexité en un plan
horizontal, les côtes.sur lesquelles il prend en avant ses insertions sont activement soulevées par leurs
élévateurs
j
on peut constater sur l'animal vivant que l'excursion par en haut des côtes inférieures est beaucoup
moindre que l'aplatissement du diaphragme par en bas
.

En même temps que le diaphragme s'aplatit activement, il repousse, en bas et en avant, vers la
région ombilicale, suivant la direction de son axe, les viscères abdominaux; les viscères abdominaùx,
à leur tour, poussent en avant la paroi abdominale, qui jouit d'une certaine élasticité. Aussi, au moment
de l'inspiration, le foie et l'estomac, abaissés, se dégagent de dessous les côtes, et il y a un léger soulè-

..................................
vement du ventre.

Au moment de sa contraction, le diaphragme tend à effacer sa convexité, et c'est ainsi qu'il


augmente le diamètre vertical de la poitrine. On a même cru autrefois qu'il pouvait, en ce moment,
devenir convexe en sens opposé, c'est-à-dire du côté de l'abdomen. Cette supposition irrationnelle est
tout à fait contraire à l'observation, et il est assez siffgulier qu'elle ait été un seul instant acceptée, quand
il suffisait d'ouvrir l'abdomen d'un animal vivant pour décider la question (page 307). Il est permis
d'affirmer aussi que c'est généralement à l'abaissement du diaphragme que la poitrine doit sa principale
augmentation de capacité au moment de l'inspiration.
-6
Cette manière de respirer ne fatigue pas la poitrine. Tout en permettant d'in-
spirer la plus grande quantité d'air possible, elle évite le soulèvement exagéré de la
cage thoracique et concourt au développement des poumons.
Au moyen de la respiration abdominale l'expiration peut être mieux réglée,
et se faire plus lentement que de toute autre manière, attendu qu'il est très-facile et
sans aucun inconvénient de maintenir le diaphragme dans son état de contraction.
Cette respiration est d'ailleurs la plus naturelle; on peut s'en convaincre en
l'observant chez une personne endormie. En effet, il suffit d'appuyer légèrement
la main sur l'abdomen, pour constater qu'à chaque inspiration il se gonfle comme
un soufflet, et qu'il se dégonfle à mesure que "l'air sort des poumons.
La respiration pectorale produit le soulèvement des côtes ; le diaphragme, au
lieu de s'abaisser, remonte en déterminant un aplatissement complet de l'abdo-
men ; les poumons, au lieu de se dilater de haut en bas, ne se dilatent que
suivant le diamètre transversal de la poitrine et par conséquent d'une façon plus
restreinte.
Cette manière de respirer a le triple inconvénient de ne permettre qu'une
inspiration insuffisante, de produire un mouvement disgracieux des épaules, enfin
de fatiguer le chanteur.
La respiration abdominale et pectorale s'obtient par le plus grand abaissement
du diaphragme, associé au plus grand soulèvement des côtes. Cette manière de res-
pirer emmagasine une grande quantité d'air, mais elle a l'inconvénient de fatiguer
beaucoup le chanteur, en le tenant, pour ainsi dire, dans un état continuel de gon-
flement, et de le rendre disgracieux par la raideur qu'elle impose à. toute la partie
supérieure du corps. La respiration abdominale est donc la plus favorable au
chant.
Ces principes sont en contradiction avec nombre d'auteurs. Garcia, Lablache,
Duprez, la méthode du Conservatoire prétendent que l'on doit respirer en gonflant
seulement la poitrine et en aplatissant l'abdomen. Par contre, il est des auteurs
d'une autorité incontestable, tels que Bérard (Art du chant, 1755), Béclard (Phy-
siologie) Louis Mandl (De la fatigue de la voix), qui sont en cela d'accord
,
avec nous.
De nos jours, les professeurs Delsarte, Masset, Faure, dont on ne peut nier
la compétence, ont soutenu, --à rencontre des auteurs ci-dessus nommés, l'avantage
de la respiration abdominale.
La femme a l'appareil de la respiration abdominale, mais elle est souvent
gênée par la compression qu'exerce le cdl'set sur la base de la poitrine. La confor-
mation particulière de la femme s'oppose aussi, dans certains cas, à l'abaissement
du diaphragme; mais comme compensation, la femme a les articulations costo-ver-
tébrales plus souples et plus mobiles que celles de l'homme, et, par conséquent,
elle n'éprouve pas la même fatigue que lui, lorsque la cavité de la poitrine
acquiert son plus grand développement. Cette conformation particulière permet
à la femme d'employer sans inconvénient la respiration pectorale; néanmoins nous
maintenons la préférence au mode abdominal. Nous recommandons aux chanteurs
des deux sexes de ne pas se serrer la taille, sous peine de restreindre consi-
dérablement leur respiration.
La respiration est un des principaux éléments du chant, il importe donc de la
rendre rationnelle : si elle est trop courte, on ne peut achever une phrase musicale
sans avoir l'air d'étouffer; si elle est bruyante ou sifflante, elle est d'un effet très-
désagréable et produit une impression pénible sur l'auditeur.
Au moment ou l'on s'apprête à chanter, il est bon de faire fonctionner la res-
piration avec force, sans produire de son. On évite ainsi le petit enrouement qui se
manifeste quelquefois après un long silence.
Pour acquérir l'habitude de la respiration naturelle, en chantant, c'est-à-dire
pour savoir aspirer l'air le plus rapidement possible, et l'expirer au contraire très-
lentement en dégonflant graduellement l'abdomen ; on devra faire une application
de l'exercice suivant :

PREMIÈRE PARTIE. - INSPIRATION.

S'accouder, de manière à ce que le corps porte sur les bras et tienne les
épaules immobiles ; ouvrir la bouche comme pour dire âa aspirer rapidement une
grande quantité d'air en gonflant ce qu'.on appelle le creux de l'estomac.

DEUXIÈME PARTIE. —
EXPIRATION.

Poser les dents sur la lèvre inférieure, comme pour dire v3 maintenir l'articu-
lation de cette consonne aussi longtemps que possible, en laissant sortir l'air lente-
ment, jusqu'à l'explosion de la voyelle.
DE L'ÉMISSION

Au point de vue du chant on distingue en français dix-sept sons ou voyelles.


Nous appelons toute l'attention de l'élève sur le tableau des sons que nous allons
lui soumettre. Il devra d'abord les émettre au moyen de la voix parlante et pro-
noncer avec la plus grande exactitude, les mots qui les contiennent. Ensuite il
émettra ces mêmes sons au moyen de la voix chantante (sous la direction expresse
du maître) comme nous allons l'indiquer, en observant avec le plus grand soin les
différentes positions de la bouche.
Ces exercices préliminaires devront être répétés aussi longtemps que l'on


éprouvera une difficulté quelconque d'émission sur un ou plusieurs sons.

1° TABLEAU DES SONS OU VOYELLES — LEUR ÉMISSION

1 a patte, étape. ]j

!
0 ,la bouche horizontalement
Ouvrir . avec une position
2 e présent etc.
sonnante, mais sans contraction, afin d'éviter
3 i ou y aris,
n nj/ure.
,
1 émission stridente (1).
4 o ,bol,..,
idole.
,

\ Ouvrir la bouche en forme d'ovale, diriger le


5 a„ pâtre,
A âtre.
< I
f son vers la voûte palatine, sans contraction de
6 è ,leq, des,
, „
effet. )
la langue et sans écartement exagéré des mâ-
7 ê tête,
„ tempête.
„ \
1 choires, afin d'éviter l'émission gutturale.
8 ô château, hôtel. j Ouvrir la bouche dans toute sa grandeur, en rap-
9 eu heureux, fameux. ) prochant les lèvres le plus possible.
10 ou oubli, ouvrage. ) La bouche moins ouverte que ci-dessus, mais les
11 u usure, mâture. ) lèvres également rapprochées.
12 e alarme, ils parlent. )
[ La bouche à peine ouverte.
13 eu pleurs, malheur.,. )

14 an ou en ancre, enfant. 1 Ouvrir la bouche horizontalement et porter le son


15 in \
pain, 1/n, essaim. vers les fosses nasales.
16 on vallon, conte. ) Allonger légèrementles lèvres et porter le son vers
17 un chacun, jeun. ) les fosses nasales. -

faudrait pas, pour éviter l'émission stridente de i't'., le prononcer avec le son
(1) Toutefois, il ne
de J'é fermé, ainsi que le conseillent certains auteurs, car il sera toujours désagréable à l'oreille
d'entendre prononcer Paré pour Paris, marée pour marie, pattée pour patrie, etc.
2° POSITION DE LA LANGUE

Lorsqu'on émet les voyelles, la langue doit rester inerte, c'est-à-dire sans
la moindre contraction, la pointe touchant légèrement les dents de là mâchoire
inférieure. Si l'on voulait exprimer par une image familière la position de la lan-
gue, on dirait qu'elle prend la forme d'une cuiller dont les bords toucheraient les
dents inférieures, et dont le creux, opposé au creux de la voûte palatine, formerait
avec lui une espèce d'entonnoir ou pavillon d'instrument.
Faute d'observer ce principe, notamment pour les voyelles â„ ê-, q-, la langue
serait naturellement portée à se contracter, c'est-à-dire à se ramasser au. fond de
la bouche, ce qui produirait ces sons désagréables qu'on appelle sons de gorge
ou sons gutturaux.
Du reste, il est à remarquer qu'un trop grand écartement des mâchoires ou
une contraction de la gorge produisent des sons plus ou moins gutturaux.
Il serait bon que l'élève observât avec attention, dans un miroir, la position
de sa bouche et de sa langue, lorsqu'il émet des sons.

' '
3° DE L'ÉMISSION DE LA VOIX

Avant d'émettre un son, il faut aspirer une quantité d'air proportionnée à sa


durée.
En aspirant l'air, la bouche doit prendre la position qui convient à l'émission
de la voyelle; il serait disgracieux d'ouvrir grandement la bouche pour aspirer
l'air, et de la fermer à demi en émettant le son; il serait encore plus mauvais de
serrer les dents en aspirant, ce qui produit toujours une espèce de sifflement.
Quand l'élève éprouve de la difficulté à ouvrir la bouche suffisamment pour
aspirer l'air et émettre le son, le professeur emploie avec succès une petite cheville
en bois d'un centimètre environ ; elle se place entre les incisives pour obtenir un
écartement constant des mâchoires.
Le son vocal s'émet de deux manières : en voix blanche et en voix sombrée..
h" DE LA VOIX BLANCHE

On appelle voix blanche la voix émise avec des sons clairs.


La voix blanche s'emploie dans les passages gracieux, les roulades légères, et
généralement lorsqu'on chante piano.
Sur les notes graves et dans le médium de la voix, on peut chanter forte en
voix blanche. Il n'en est pas de même sur les notes élevées; la voix y perdrait ses
qualités musicales et deviendrait criarde.
Une voix naturellement blanche, c'est-à-dire qui tend à chanter toujours
clair, devra employer comme correctif la voix sombrée, dont il sera parlé plus
loin.

5° ÉTUDE DE L'ÉMISSION EN VOIX BLANCHE

L'étude de cette émission doit se faire sur les voyelles é et a (nos 2 et 1 du


tableau des sons ou voyelles) et en projetant le son horizontalement.

On doit commencer par la voyelle é-, parce que, pour l'émettre, l'élève prend
instinctivement la position normale de l'émission en voix blanche; c'est là un point
essentiel sur lequel nous ne saurions trop insister. En effet, les autres voyelles se
prêtent facilement à l'émission gutturale, et toute voix gutturale peut être améliorée
par l'usage prolongé de la voyelle e.
Nous commençons donc par faire émettre le son en voix blanche sur la voyelle é.
Chaque son devra être émis avec une force moyenne, et soutenu également
depuis le commencement jusqu'à la fin, aussi longtemps que la respiration le per-
mettra.
La bouche devra conserver pendant toute la durée de l'émission la position
qu'exige la voyelle é.
Lorsque l'émission de la voix sur la voyelle é sera satisfaisante, on passera à
l'émission en voix blanche sur la voyelle a, et on observera les mêmes règles.
Au début des études, nous négligeonsl'émission sur les voyelles i et o clair, afin
d'éviter toute confusion.

6° DE LA VOIX SOMBRÉE

On appelle voix sombrée, la voix d'une émission moins claire et d'un volume
plus considérable. Cette voix s'emploie plus souvent que la voix blanche; elle sert à
exprimer la force et tous les sentiments dramatiques.
Elle peut chanter soit forte soit piano, sur tout le parcours de l'échelle vocale.
Une voix qui a naturellement le défaut d'être trop sombrée devra employer comme
correctif la voix blanche.
7° ÉTUDE DE L'ÉMISSION EN VOIX SOMBRÉE

L'étude de cette émission doit se faire sur les voyelles eû, ô„ et à (nos 9, 8 et
5 du tableau des sons ou voyelles) en projetant les sons obliquement vers la voûte
palatine.

Pour que l'élève comprenne mieux ce que l'on entend par voix sombrée, nous
faisons émettre le son sur la voyelle grave eû. Sur cette voyelle, on obtient des
sons pleins et volumineux qui, bien qu'assourdis au début, se modifient et se déve-
loppent avec l'étude.
L'émission de cette voyelle a l'avantage de faire prendre à la bouche la posi-
tion nécessaire pour chanter en voix sombrée.
Chaque son doit être émis avec toute la force de la voix et soutenu d'une
façon égale, aussi longtemps que la respiration le permet.
La bouche conserve pendant toute la durée du son la position qu'exige -la
voyelle eû.
Après s'être étudié à émettre la voix sur la voyelle eû, on reprendra un travail
identique sur la voyelle ô et la voyelle â. Le son devra être soutenu d'une manière
égale aussi longtemps que possible.
Pendant toute la durée du son, la bouche conservera la position qu'exige la
voyelle ô et la voyelle d, et le son sera dirigé vers la voûte du palais.
Si l'on écartait trop les mâchoires, si l'on poussait avec trop de force,
il se produirait une espèce de bâillement d'un effet détestable. L'exercice de la
voyelle é prévient ce défaut et le corrige.
Quand l'élève éprouvera une trop grande fatigue à soutenir les notes élevées,
et quand il chantera sombré à. pleine voix, il pourra porter le son vers les fosses
nasales, ou, en termes plus précis, vers les sinus frontaux, il en résultera un
repos immédiat des organes vocaux.
La voix que l'on obtient ainsi est d'un timbre plus clair et d'une qualité moins
belle que celle dont le son est dirigé vers la voûte palatine. Nous conseillons
cependant à l'élève de ne pas abuser de ce moyen. Qu'il sache que c'est en
combinant et en variant les voix qu'il obtiendra ses plus beaux effets.
Il ne faut pas confondre cette voix sombrée qui s'appuie sur les fosses nasales,
avec la voix nasillarde. La voix nasillarde est une chose affreuse qu'il faut éviter
avant tout.

8° DES SONS SOUTENUS.

Le son soutenu, qu'il soit fort ou faible, doit conserver la même intensité.
On aura soin de ne pas fermer la bouche immédiatement après l'expira-
tion du son; cette habitude, que les commençants contractent facilement, est
toujours d'un effet désagréable ou comique : par exemple, si l'on vocalise sur
la voyelle en fermant la bouche dès que le son finit, il semble que l'on pro-
nonce ap; il en est de même des autres voyelles, qui paraissent toujours suivies
de la lettre p.
Dès qu'on sera familiarisé avec l'émission du son et qu'on aura fait un tra-
vail sérieux de sons soutenus, on devra reprendre le même travail avec toutes les
voyelles, jusqu'à ce que l'on n'éprouve aucune difficulté ni sur les unes, ni sur les
autres.
Ces exercices devront être faits en observant toutes nos recommandations sur
la position de la bouche que nécessite chaque voyelle, et travaillés jusqu'à ce que
la voix ait pris une certaine assiette.
Les deux défauts les plus à craindre, au début des études de chant, sont
l'émission gutturale et l'émission nasale ; nous ne saurions trop insister là-dessus.
L'émission gutturale, qui est l'effet d'une contraction de la langue ou de l'arrière-
gorge, se corrige en émettant la voix en dehors sur des voyelles à résonnances claires.
L'émission nasale se produit en faisant concourir outre mesure les fosses nasales à
l'émission du son. Il est un moyen simple de s'assurer si l'on ne chante pas du
nez : on se pince les narines en émettant le son ; si le son reste clair et pur,
l'émission est bonne; si le son change de timbre et devient nasillard, l'émission est
nasale et l'on doit y veiller.
On prévient le défaut de l'émission nasale en projetant le son horizontalement
vers l'avant-bouche ; on obtient ainsi des sons blancs, il est vrai, mais d'une émis-
sion correcte et que l'on peut sombrer ensuite, après des exercices plus ou moins
répétés, suivant les dispositions de l'élève.
Lorsque les organes vocaux sont rebelles, nous conseillons de vocaliser à
bouche fermée ; on évite ainsi toute contraction de la langue ou de la gorge, et les
organes vocaux gardent leur position naturelle.
La vocalisation à bouche fermée peut être utile dans une foule de cas ; les
élèves feront bien de s'y exercer, surtout s'ils fredonnent en plein air.
Les principes que nous venons de poser sur l'émission de la voix devront
être appliqués à tous les exercices qui vont suivre, et chacun de ces exercices
devra être chanté forte en voix sombrée, piano en voix blanche.
En résumé, il faut que l'élève puisse chanter, à volonté, en voix blanche ou
en voix sombrée. C'est en tirant parti de ces émissions si différentes, qu'on
obtient les effets d'opposition qui font valoir une œuvre et un artiste.

OBSERVATION.

Pour éviter des répétitions volumineuses, on s'est borné
à donner un modèle de chaque exercice.
Chacun des exercices qui vont suivre devra donc se répéter en montant par
demi-ton jusqu'à la limite naturelle de la voix.

Les voix d'homme les plus graves commenceront au Sol


1

Les voix de femme les plus graves commenceront au Sol


2
9° ÉTUDE DU SON SOUTENU

EN VOIX BLANCHE ET EN VOIX SOMBRÉE

(1) ÉMISSION CLAIRE : Après avoir attaqué le son sur la voyelle e, on passera à la
voyelle a sans quitter le son, et, autant que possible, sans changer la position de la bouche.
(2) ÉMISSION SOMBRÉE : On attaquera le son à pleine voix sur la voyelle eû, en le
faisant aussi gros que possible; on passera à la voyelle 6, sans quitter le son ni reprendre
haleine, en conservant à la bouche la même- position. On substituera ensuite l'a à l'd, en
donnant à la bouche la forme ovale dans le sens horizontal.
10" DE L'ATTAQUE ET DU M ARTELLEMENT.

On pourrait donner une idée de l'attaque du son vocal, en la comparant à celle


du son des instruments à cordes ; l'archet met plus d'énergie à attaquer le son qu'à
le soutenir. De même la poussée d'air, chassée par les poumons, fait vibrer tout
d'un coup l'appareil vocal, avec plus de force que n'en demande la tenue du son.
Il y a donc une différence entre la voix humaine et l'orgue, auquel quelques
personnes pourraient l'assimiler. En effet, la glotte, restant ouverte comme un
tuyau d'orgue, reçoit du soufflet vivant une impulsion voulue que ne peut
donner le soufflet mécanique.
La poussée de l'air doit avoir lieu sans coup de glotte ni de poitrine.
Nous proscrivons, de la manière la plus absolue, l'attaque par le coup de
glotte, préconisé par Garcia, parce que cette manière d'attaquer le son fait entendre
une secousse, une espèce de hoquet, contraire aux principes de l'art musical.
L'attaque doit être franche, c'est-à-dire qu'il ne faut prendre le son ni au-
dessus, ni au-dessous de la note.
L'étude de l'attaque devra être faite en observant toutes nos recommandations
sur l'émission ; elle aura pour premier résultat de prévenir un défaut très-commun
chez les commençants, qui chantent avec mollesse.
En répétant l'attaque à plusieurs reprises sur le même son, 'sans le quitter, on
obtient ce que l'on appelle le martellement.
11° ÉTUDE DE L'ATTAQUE

Émettre chaque voyelle avec force et passer de l'une à l'autre sans lâcher
le son.

12° DE LA VOIX MIXTE.

Lorsque l'on chante piano en voix blanche, la voix est peu moelleuse, et
n'est pas toujours agréable. En sombrant légèrement, c'est-à-dire en dirigeant le
son vers la voûte palatine, tout en gardant la position de la voix claire, on obtient
ce qu'on appelle la voix mixte, et, par le travail, on arrive à une émission douce
qui charme l'oreille, et dont le timbre produit le meilleur effet.
La voix mixte est, on le voit, une moyenne de voix blanche et de.voix som-
brée. Elle n'est donc pas un composé de voix de poitrine et de voix de tête, ainsi
que quelques auteurs l'ont avancé.
Ce genre d'émission adoucit quelques tons criards de la voix blanche, et
arrive à la grâce et à la douceur qui manquent à la voix sombrée. Les sons pa-
raissent sortir d'eux-mêmes, sans le moindre effort. En effet, loin d'éprouver de
la difficulté à chanter en voix mixte, les voix travaillées s'en servent comme d'un
moyen de repos. Toutefois, nous ferons remarquer que par la légère contraction
qu'elle impose à la bouche et qui se communique à la gorge, l'abus de la voix
mixte, au lieu de délasser les organes vocaux, finirait par les fatiguer. Ce qui
nous ramène au principe déjà posé : on doit, autant que possible, alterner les
émissions.

130 DU TREMBLEMENT ET DU CHEVROTEMENT.

Le tremblement de la voix n'existe guère que chez les jeunes élèves qui n'ont
pas encore la voix posée. Les sons soutenus feront disparaître ce défaut.
Le chevrotement se manifeste, au contraire, chez les chanteurs qui ont forcé
leur voix '
Le moyen d'éviter le chevrotement est d'attaquer le son demi-fort et de l'aug-
menter insensiblement, jusqu'à ce qu'on sente que la voix oscille. Alors on s'arrête
et on recommence sur un nouveau son demi-fort. En résumé, c'est en émettant
des sons d'une intensité progressive qu'on se corrige du chevrotement.
Il est des chanteurs qui pour donner à leur voix un accent plus sympathique,
la rendent volontairement chevrotante; ce ne peut être que l'effet passager d'une
situation dramatique ; il serait du plus mauvais goût d'user continuellement d'un
tel moyen.

1 h° DE LA VOIX VOILÉE.

Il existe des voix d'un timbre couvert, qu'on appelle voilées, parce qu'il semble
en effet, quand elles chantent, que le son passe à travers un voile ; ces voix,
généralement agréables et sympathiques, sont très-susceptibles d'être améliorées.
Les sons voilés sont parfois la conséquence d'une respiration mal réglée, en
ce sens que la dépense d'air excède les besoins réels de l'émission. C'est pourquoi
dans les piano la voix est moins voilée; tandis que si l'on a à chanter fort, on
pousse l'air avec d'autant plus de puissance qu'on a l'espoir de donner plus de son,
et c'est le contraire qui arrive.
Il faut pour corriger ce défaut s'exercer suivant les principes déjà posés au
chapitre de la respiration.
Il ne faut pas confondre la voix voilée avec la voix sombrée ; l'une est le
fruit du travail, l'autre est un défaut d'expérience.
DES REGISTRES

Toutes les voix humaines ont deux modes d'émission que l'on appelle registres,
savoir :
Le registre de poitrine, ou voix de poitrine, et le registre de tête, ou voix de
tête.

la DES REGISTRES CHEZ L'HOMME.

D'accord avec Garcia, nous entendons par le mot registre une série de sons
consécutifs et homogènes, en montant comme en descendant, produits par le déve-
loppement du même principe mécanique, et dont la nature diffère essentiellement
d'une autre série de sons également consécutifs et homogènes, produits par un
autre principe mécanique. Tous les sons appartenant au même registre sont, par
conséquent, de la même nature, quelles que soient d'ailleurs les modifications de
timbre ou de force qu'on leur fasse subir.

20 DU REGISTRE DE POITRINE CHEZ L'HOMME.

La voix de poitrine est la plus naturelle, c'est-à-dire que c'est celle dont
l'homme se sert le plus ordinairement pour chanter. Le registre de poitrine, ou voix
de poitrine, ale timbre plein et sonore; l'émission y est accompagnée d'un frémis-
sement vibratoire de la poitrine. Ce registre comprend presque toute l'étendue de
la voix; ce n'est que dans les notes les plus élevées qu'il devient nécessaire d'aban-
donner la voix de poitrine pour passer à la voix de tête.
La résonnance de la voix de poitrine est déterminée par une vibration des
cordes vocales; au moment de l'émission, l'ouverture de la glotte affecte une forme
ovale dont les proportions diffèrent suivant que le son est plus ou moins élevé (1).

(1) Ch. Bataille a faitsur ce sujet un ouvrage très-sérieux qu'il est bon de consulter et dont voici
le titre : Nouvelles recherches sur la phonation, 4 861.
Les sons de la voix de poitrine peuvent, à la volonté du chanteur, augmenter
ou diminuer d'intensité. Quoique ce registre soit plus fatigant que le registre de
tête, la dépense de l'air y est moindre, et l'on peut soutenir un son de poitrine
plus longtemps qu'un son de tête.

3° DU REGISTRE DE TÊTE CHEZ L'HOMME.

Le registre de tête, ou voix de tête, a le timbre doux et flûté; il ne comprend


que les notes éleyées de la voix ; l'émission n'y est pas accompagnée de vibrations
comme pour la voix de poitrine, c'est la preuve que chacun de ces deux registres
a un mécanisme différent.
La glotte prend une forme ovale moins allongée que dans la voix de poitrine,
les cordes vocales n'entrent pas en vibration, ce qui semblerait indiquer que le son
est produit uniquement par le courant d'air. Telle est, du reste, l'opinion de quel-
ques grands physiologistes, notamment MM. Diday, Pétrequin et lléclard:
La voix de tête, ainsi que nous l'avons dit, exige une plus grande dépense
d'air que la voix de poitrine; il en résulte une force d'expiration qui amoindrit con-
sidérablement la puissance d'augmenter ou de diminuer le son.

fio ÉTENDUE GÉNÉRALE DES REGISTRES DE LA VOIX D'HOMME

SANS DISTINCTION DE CLASSE.

On voit que les deux registres coïncident sur une certaine étendue du parcours
de la voix. Par conséquent on peut, sur toutes les notes coïncidentes, employer
l'un ou l'autre de ces deux registres, sans crainte de nuire à l'organe vocal. Le
chant de poitrine n'altère pas la voix de tête et réciproquement.
Néanmoins il ne faut pas abuser de la voix de tête, cela pourrait rendre pares-
seuse la voix de poitrine.

5° DE LA LIAISON DES REGISTRES CHEZ L'HOMME.

L'homme a moins que la femme à se préoccuper de la voix de tête ; beaucoup


de chanteurs s'en servent peu, quelques-uns ne l'emploient pas du tout.
Ceux qui en ont besoin ne doivent pas reculer devant le travail, car la liaison
des registres de poitrine et de tête constitue l'homogénéité de la voix et l'identité
du timbre.
Mal liés, ces deux registres semblent appartenir à deux personnes différentes,
ainsi qu'on peut l'observer chez les commençants.
Le moyen de lier les deux registres est d'attaquer successivement en voix de
poitrine avec l'émission blanche chacune des notes coïncidentes, en passant au
registre de tête sans quitter la note; on arrive ainsi à l'homogénéité. Il faut adoucir
la voix de poitrine pour la ramener aux proportions de la voix de tête, qu'il n'est
guère possible de renforcer.
Au début des études, on ne doit pas craindre de faire sentir le soubresaut qui
résulte du passage d'un registre à l'autre, quelque désagréable que soit ce soubre-
saut. L'étude de la liaison des registres détruit ce défaut naturel au point d'en rendre
la transition insensible.

6° DE LA VOIX DE TÉNOR. *

La voix de ténor est la plus haute des voix d'homme.


Le ténor, chantant à pleine voix, a le timbre sonore et éclatant; quand il en
modère l'émission, ce timbre devient doux et tendre. C'est la voix qui se prête le
mieux aux accents de la passion. Mise en parallèle avec d'autres voix et à talent
égal, celle du ténor enlève généralement les suffrages; elle a des effets qui surpren-
nent et saisissent, et les efforts mêmes auxquels le chanteur est obligé pour
atteindre les notes élevées contribuent à doubler sa puissance.
Il y a deux genres de voix de ténor : le fort ténor et le ténor léger.
Le fort ténor, ou ténor d'opéra, a une grande puissance d'organe; il chante
presque toujours de poitrine et emploie rarement la voix de tête.
Le ténor léger peut chanter certains rôles d'opéra; mais l'opéra-comique lui
convient plus particulièrement. Sa voix a la même étendue que celle du fort ténor,
mais elle est moins puissante; par contre, elle est plus souple, et si les effets en
sont moins grandioses, ils n'en sont que plus gracieux.
Il existe encore, mais à titre d'exception, un genre de ténor que l'on appelle
ténor grave, et dont nous ne parlerons ici que pour mémoire. Le ténor grave se
rapproche beaucoup du baryton; sa voix, dans le médium, est volumineuse et bien
timbrée, mais dans l'aigu elle est dure et d'une émission difficile.

7° DES REGISTRES DE LA VOIX DE TENOR


«

ÉTENDUE DE LA VOIX DE TÉNOR AVEC SES REGISTRES

Il faut d'abord remarquer que cette étendue des deux registres du ténor n'est
pas absolue; elle peut varier chez certains sujets, mais c'est l'étendue normale et
par conséquent celle pour laquelle sont faites les études.
Nous appellerons d'abord l'attention sur la coïncidence des deux registres,
parce que c'est sur les notes coïncidentes de ces registres que doit en avoir lieu la
liaison.
Presque tous les ténors ont la voix de tête suffisamment développée; néan-
moins, il en est chez qui elle est tellement désagréable, qu'il leur est impossible
de s'en servir.
La voix de tête est d'une grande ressource; elle permet de chanter des
passages très-élevés, sans fatigue pour le chanteur, et par suite sans malaise pour
l'auditeur; le registre de tête a, de plus, l'avantage de reposer la voix de poitrine.
8° EXERCICES

POUR LIER LES REGISTRES DE LA VOIX DE TÉNOR

Adoucir le hoquet autant que possible et chercher une homogénéité relative entre les
deux registres.
Pour émettre la voix de tête avec la voyelle a et obtenir de jolis sons de tête, il est de
toute nécessité d'employer l'émission claire.

(4) La lettre P indique qu'on doit chanter avec rémission de poitrine, la lettre T indique qu'on doit chanter
avec l'émission de tête.
90 DE LA VOIX DE BARYTON

La voix de baryton tient le milieu entre le ténor et la basse. Elle représente


le terme moyen de la voix d'homme.
Cette voix est d'un timbre sympathique et se, prête également à la force et à
la douceur, aux accents gracieux et touchants, elle peut développer beaucoup
d'ampleur.
Le baryton doit pouvoir exécuter la roulade ou vocalisation rapide^ et chanter
indistinctement l'opéra et l'opéra-comique; cependant, il en est qui ne s 'y prêtent
pas; c'est pourquoi, dans certains théâtres où se jouent les deux genres, on engage
fréquemment deux barytons. Le baryton d'opéra a la voix très-corsée; le baryton
d'opéra-comique a la voix plus légère.

10° DES REGISTRES DE LA VOIX DE BARYTON

ÉTENDUE DE LA VOIX DE BARYTON AVEC SES REGISTRES

Le registre de tête a le timbre flûté de la voix de femme; il est rare que ce


registre soit agréable chez le baryton, et nous conseillons de ne pas en faire usage.
Les compositeurs ne l'emploient, du reste, que rarement, et sur des points d orgue
qu'il est possible de changer.
Les barytons italiens- ne se servent jamais de la voix de tête, qu'ils trouvent
ridicule, à cause du peu d'homogénéité entre les deux registres.
11° DE LA VOIX DE BASSE

La voix de basse est la plus grave des voix d'homme.


On divise la voix de basse en deux classes : la basse-taille et la basse chan-
tante.
La voix de basse-taille a un énorme volume; le timbre en est grave et cuivré;
les notes élevées sont d'autant plus difficiles à émettre que la voix est plus forte et
plus puissante.
Le chant de la basse-taille est lent et majestueux, les effets en sont saisis-
sants.
Cette voix est lourde et peu propre à la vocalisation rapide; cependant, avec
le travail, on peut acquérir une souplesse relative.
La basse chantante a la voix moins volumineuse que la basse-taille; par
contre, elle est plus souple; le timbre en est plus clair et moins cuivré.
On emploie de préférence la basse chantante dans l'opéra-comique.

12° DES REGISTRES DE LA VOIX DE BASSE

De même que les voix de ténor et de baryton, la voix de basse a deux regis-
tres : celui de poitrine et celui de te te.

ÉTENDUE DE LA VOIX DE BASSE AVEC SES REGISTRES

Le registre de poitrine est d'un timbre grave et cuivré, homogène en tout


son parcours; c'est le seul registre sur lequel les basses puissent chanter.
Le registre de tète est employé très-rarement par les basses chantantes.
13° DES REGISTRES CHEZ LA FEMME

voix de la femme possède, comme celle de l'homme, deux registres : le


1.0.

registre de poitrine ou voix de poitrine, et le registre de tête ou voix de tête.


Il est une erreur assez répandue, c'est de croire que la voix de femme se
compose de trois registres. On s'imagine que la voix de tête se subdivise en
deux
parties, et on suppose une voix de médium entre la voix de poitrine et la voix de
tête. Cette idée ne s'appuie sur aucun principe, sur aucun fait. En effet, quel est
l'indice de démarcation entre les registres d'une voix, sinon le déplacement complet
de l'organe? Après s'être d'abord élevé à mesure que la voix monte les degrés du
registre de poitrine, l'organe vocal est obligé de reprendre sa position basse pour
passer à la voix de tête; une fois là, il recommence un nouveau mouvement d'as-
cension, à mesure que la voix de tête monte elle-même, suivant ses notes aiguës,
jusqu'à sa limite extrême.
Il n'y a pas d'autre déplacement, il n'y a donc pas d'autre registre (1). Vou-
loir en imaginer un troisième, est troubler l'esprit des élèves par l'idée de difficul-
tés qui n'existent pas, et détourner leur attention du passage difficile qui a donné
lieu à cette erreur. A l'exception de quelques voix privilégiées, on remarque une

certaine faiblesse sur les notes de tête :


^fl f1 I
'f H
3 chez certaines
*)
même, ce passage est tellement faible que la voix semble éteinte. Au reste, chez les
ténors le même phénomène se produit et justement sur les mêmes notes :
~fj| "P
on n'a point songé pour cela à établir un troisième
registre de ténor.

(4) Voici, à ce sujet, l'opinion de Garcia dans son Traité de l'art du chant, page 14, 1re partie:
aNous pouvons ajouter que si les deux portions de la voix humaine qui nous occupent constituaient
deux registres différents, il faudrait que le larynx, pour les produire, agit d'après les lois qui règlent
des registres de nature et de mécanisme différents : c'est-à-dire que, pour articuler les sons bas de
chacune d'elles, le larynx devrait reprendre la position la plus basse, ainsi que nous l'avons vu entre le
registre de poitrine et de fausset ; il faudrait encore qu'entre les sons de fausset et de tête, il y eût
des notes communes ou bien, au contraire, que ces deux portions de voix fussent séparées par une
lacune; bien loin de là, les sons de fausset et de tête se suivent et forment une mutuelle prolongation
pendant laquelle le larynx opère comme l'exige la succession des sons d'un seul registre : donc il n'en
existe effectivement qu'un seul. »
fa —
f tf f
I : doit être combattue

par un travail sage, sans forcer les organes vocaux. Par conséquent, loin de
s'abstenir de chanter sur les notes faibles de la voix, il faut tâcher de les
conquérir lentement une à une.

1ho DU REGISTRE DE POITRINE CHEZ LA FEMME

Le registre de poitrine, ou voix de poitrine, occupe la partie basse de la voix;


il ressemble, par son timbre, aux notes de poitrine correspondantes de la voix
d'homme.
Au début de leurs études, beaucoup de jeunes filles, surtout celles dont le
registre de tête est très-développé, ont de la peine à émettre la voix de poitrine,
qui leur semble d'un son étrange ; cependant ce registre est essentiel ; on s'en sert
pour chanter avec force, sur les notes communes aux deux registres.
Il ne faut pas abuser du registre de poitrine, ni surtout en forcer les notes
extrêmes.

15" DU REGISTRE DE TÊTE CHEZ LA FEMME

Le registre de tête, ou voix de tête, comprend les notes élevées de la voix. Le


timbre de ce registre est doux et flûte, c'est le registre le plus étendu de la voix
de femme.
160 ÉTENDUE GÉNÉRALE DES REGISTRES

DE LA VOIX DE FEMME

SANS DISTINCTION DE CLASSE (1)

Les deux registres coïncident sur une certaine partie de leur parcours ; mais
on ne doit chanter les notes coïncidentes en voix de poitrine et en voix de tête
que sur l'intervalle d'une quarte au plus, selon la nature de la voix, ainsi qu'on
le verra plus loin.
Il est à remarquer que la dépense de l'air est moindre dans le registre de
poitrine que dans le registre de tête, ce qui explique la faculté de soutenir les
sons plus longtemps en voix de poitrine qu'en voix de tête. -

^
(1) Garcia fait monter le registre de poitrine de la femme jusqu'au ré
4 ~ et

descendre le registre de tête jusqu'au sol Cette étendue de chaque registre existe
2

3
en effet, mais ces notes extrêmes ne peuvent être considérées comme faisant partie de la voix normale,
puisqu'il serait impossible de s'en servir, surtout pour chanter en voix de tête grave, cette voix n'ayant

plus de timbre au-dessous de l'«/ 3


^ j j
170 DE LA LIAISON DES REGISTRES CHEZ LA FEMME

La liaison des registres est de la plus grande importance, au commencement


des études, particulièrement chez la femme.
Le registre de poitrine des voix de femme a le timbre sonore et vibrant, le
registre de tête est doux et flûté. Pour que ces deux voix ne soient pas brusque-
ment scindées, eu égard à leur timbre, il faut, quand on étudie la liaison des regis-
tres, adoucir sans mollesse les notes élevées de la voix de poitrine et renforcer
autant que possible les notes basses de la voix de tête. En un mot, on doit cher-
cher une certaine homogénéité entre les deux timbres, pour qu'ils ne paraissent
pas appartenir à deux voix différentes.
Garcia prétend que ce système tend à amoindrir la voix. C'est une erreur.
Si, dans le principe, il faut adoucir les notes élevées du registre de poitrine, cet
adoucissement, fait en vue de l'homogénéité des deux registres, est toujours pro-
portionné au degré de faiblesse des notes graves de la voix de tête; le tra-
vail développe considérablement la voix de tête ; par conséquent, lorsque l'élève
y a acquis toute la force désirable, il a dû naturellement et progressivement rendre
aux notes les plus élevées de la voix de poitrine toute l'ampleur dont elles sont
susceptibles.
D'accord avec nous, la méthode du Conservatoire dit ceci :
« La grande difficulté est d'opérer ce passage sans un certain hoquet très-
désagréable qui résulte de ce changement de registres. Pour l'éviter il faut adoucir
le plus qu'il est possible la voix de poitrine, et renforcer et nourrir la voix du
médium. »
Il ne faut pas craindre, au début des études, de laisser sentir le soubresaut qui
résulte du déplacement des organes vocaux, lorsqu'on passe d'un registre à l'autre.
Ce soubresaut est, il est vrai, fort désagréable, mais l'élève ne doit pas s'en effrayer ;
le travail adoucit tellement la transition, qu'il la rend imperceptible.
On peut admettre en principe que le registre de poitrine sert à chanter fort et
que le registre de tête sert à chanter piano, sur un même degré du passage où les
deux degrés coïncident.
Les exercices, que nous écrivons, devront être travaillés jusqu'à ce que l'élève
soit devenue parfaitement maîtresse de sa voix, dans l'un comme dans l'autre des
deux registres.
Chez les jeunes filles qui commencent à chanter, la voix est généralement
faible sur les notes basses du registre de tdie, mais il ne faut pas confondre cette
faiblesse avec ce qu'on appelle un trou. Le travail supplée toujours à ce qui peut
manquer de facultés primitives et il est fécond en résultats satisfaisants.
D'après le tableau général des registres que nous avons donné page 43, on a
l'étendue d'une octave. Elle
vu que la femme peut chanter avec deux registres sur
peut monter jusqu'à Vut k ^ en voix de poitrine, de même qu'elle peut

descendre à l'ut ppi :

en voix de tête. Mais ces deux registres


coïncidents ne sont pas bons sur tout leur parcours; certaines notes supérieures
de la voix de poitrine, ainsi que certaines notes inférieures de la voix de tête, sont
généralement mauvaises. Il faut donc chanter en voix de tête les notes défec-
©
tueuses de la voix de poitrine, et en voix de poitrine les notes défectueuses de la
voix de tête. Lorsqu'on passe de la voix de poitrine à la voix de tête en changeant
de degré, il faut chercher à obtenir la plus grande homogénéité de timbre et de
force.
Enfin, quand le travail des premières études est suffisamment avancé pour
permettre d'aborder un morceau de chant, on doit tirer parti avec discernement du
registre de poitrine et du registre de tête. Il serait de mauvais goût, par exemple,
de chanter une phrase douce avec la voix. de poitrine, tandis qu'au contraire on
chanterait un passage énergique en voix de tête.

180 DE LA VOIX DE SOPRANO

La voix de soprano est la plus élevée des voix de femme, et par conséquent
celle dont le timbre est le plus aigu.
Dans les traits ou roulades, on a écrit pour le soprano jusqu'au fa B suraigu :
£
^ =| mais jamais on n'a chanté sur ces cordes extrêmes de la voix ; si

parfois on monte jusqu'au fa


^ ~ziz c'est par un trait rapide, et pour
5J

redescendre aussitôt aux notes normales du chant.


Il est aisé de comprendre qu'en effet aucune voix ne pourrait se soutenir sur
des sons aussi aigus.
La voix de soprano, par le fait même de son acuité, est la plus légère des voix
de femme; elle se prête merveilleusement à la roulade et au trille; les effets en sont
brillants et gracieux, et elle étonne par la facilité avec laquelle elle surmonte toutes
sortes de difficultés. La musique écrite pour la voix de soprano est généralement
très-chargée de roulades.

19° DES REGISTRES DE LA VOIX DE SOPRANO

ÉTENDUE DE LA VOIX DE SOPRANO AVEC SES REGISTRES

Nous faisons coïncider les deux registres du ré3, au /hg, sur les notes ré39

ré Il,, mi3, faz9 fL -| c'est sur ces quatre notes que doit se

faire le travail de la liaison des registres; c'est-à-dire que ces quatre notes
peuvent être chantées indifféremment en voix de poitrine ou en voix de tête et que
l'on peut passer d'un registre à l'autre sur chacune de ces quatre notes.
Toutes les voix de soprani ne se ressemblant pas d'une manière absolue, leur
registre de poitrine n'a pas toujours la même étendue; c'est pour cela qu'il est de
la plus grande importance de bien discerner quelles sont les notes sur lesquelles on
doit exercer la voix de poitrine et travailler la liaison des registres. Le professeur
devient nécessaire, car il serait impossible à une élève de se juger elle-même.
La plupart des soprani ont le registre de tête très-développé, surtout lorsque
leur voix n'a pas encore été cultivée; par suite, elles évitent de chanter en voix de
poitrine, dont le timbre leur paraît d'un contraste si étrange avec le timbre de la
voix de tête; il faut combattre cette tendance à chanter toujours en voix de tête.
La voix de poitrine est, il est vrai, difficile à émettre pour les soprani, elle a besoin
d'être sagement travaillée; mais il est rare que les soprani aient le registre de tête
local; il leur est
assez timbré sur les notes graves pour être entendus dans un vaste
indispensable de posséder le registre de poitrine et par conséquent de l'étudier
avec soin.
Dans tous les cas, nous pouvons assurer que le travail du registre de poitrine
n'a aucun inconvénient pour les voix de soprano, s'il ne dépasse pas le
(a."
^ J J
L'émission de la voix de poitrine, loin de fatiguer les

organes vocaux, ne peut que les reposer, surtout lorsqu'on fait alterner les deux
registres.
Les exercices qui suivent ont pour but d'adoucir le soubresaut qui se mani-
feste lorsqu'on passe d'un registre à l'autre, soit sur des notes différentes, soit sur
la même note.
20° EXERCICES
POUR LIER LES REGISTRES DE ÈA VOIX DE SOPRANO

Travailler ces exercices avec toutes les voyelles, en ayant soin d'employer des voyelles à
résonnance grave lorsqu'on chante en voix de poitrine> et des voyelfs à résonnance claire
lorsqu'on chante en voix de tête.
** - -
EXERCICE
..

POUR LIER LES REGISTRES DE LA VOIX DE SOPRANO

SUR UNE MÊME NOTE.

Attaquer piano, en voix de tête, sur une voyelle à résonnance claire ; augmenter le

son jusqu'à ce que l'on sente la nécessité de passer au registre de poitrine; changer la
voyelle claire en une voyelle à résonnance grave, donner à la voix la plus grande force

possible, puis diminuer le son graduellement et revenir au registre de tête en reprenant

la voyelle claire avec laquelle on a fait l'attaque.

Travailler cet exercice avec toutes les voyelles.


24° DE LA VOIX DE MEZZO-SOPRANO

La voix de mezzo-soprano tient le milieu entre le soprano et le contralto;


c'est une voix de grand opéra ; on donne aux sujets qui la possèdent le nom de
fortes chanteuses.
La voix de mezzo-soprano est pleine, corsée, et d'une grande puissance. Elle
de sa force, elle est
se prête aux chants vigoureux et dramatiques. En raison
moins agile que la voix de soprano ; cependant, elle peut le devenir par un travail
soutenu.
Quand cette voix est moins corsée, on lui fait chanter l'opéra-comique.

220 DES REGISTRES DE LA VOIX DE MEZZO-SOPRANO

ÉTENDUE DE LA VOIX DE MEZZO-SOPRANO AVEC SES REGISTRES

Nous faisons coïncider les deux registres du mi^, au sol 3, sur les notes
mi '3' mi 3 fa3' sol b
c est sur ces quatre notes que
3, 3,
ï
doit se faire le travail de la liaison des registres; c'est-à-dire que ces quatre
notes peuvent être chantées indifféremment en voix de poitrine ou en voix
de tête, et que l'on peut passer d'un registre à l'autre sur chacune de ces quatre
notes.
La voix de mezzo-soprano est celle qui se prête le mieux à la liaison des
registres; elle a les notes coïncidentes naturellement égales et soutenues, et souvent
elle passe d'un registre à l'autre sans faire sentir la transition.
Les élèves qui, au début de leurs études, ne peuvent pas émettre le sol b
3

poitrine, devront le négliger momentanément, et ne chanter

que jusqu'au mi"


^ travail suffit pour développer le registre
insuffisant. Quant aux élèves qui ont la voix de poitrine très-facile, elles feront

bien de ne pas l'exercer au delà du sol b35


^ tyg~~~ sous peine des plus

graves accidents.
Loin de se fatiguer, les organes vocaux se reposent par l'exercice modéré des

deux registres.
23° EXERCICES
POUR LIER LES REGISTRES DE LA VOIX DE MEZZO-SOPRANO.
Travailler ces exercices avec toutes les voyelles, en ayant soin d'employer des voyelles
à résonnance grave, lorsqu'on chante en voix de poitrine * et des voyelles à résonnance
claire lorsqu'on chante en voix de tête.
EXERCICE

POUR LIER LES REGISTRES DE LA VOIX DE MEZZO-SOPRANO

SUR UNE MÊME NOTE,

Attaquer piano, en voix de tête, sur une voyelle à résonnance claire; augmenter le son
m
jusqu'à ce que l'on sente la nécessité de passer au registre de poitrine; changer la voyelle
claire en une voyelle à résonnance grave, donner à la voix la plus grande force possible,
puis diminuer le son graduellement et revenir au registre de tête en reprenant la voyelle claire

avec laquelle on a fait l'attaque.

Travailler cet exercice avec toutes les voyelles.


240 DE LA VOIX DE CONTRALTO

La voix de contralto est, des voix de femme, la plus basse et celle dont le
timbre est le plus grave.
Le contralto chante presque uniquement le grand opéra; l'opéra-comique lui
offre très-peu d'occasions de se produire.
Cette voix a le registre de poitrine d'une grande sonorité; en raison de sa
puissance et de son volume, elle a besoin d'un grand travail pour acquérir le trille
et la roulade; le registre de tête est capable de plus de souplesse et d'agilité.

25° DES REGISTRES DE LA VOIX DE CONTRALTO

ÉTENDUE DE LA VOIX DE CONTRALTO AVEC SES REGISTRES

Nous faisons coïncider les deux registres du 3' au sol3,


mi sur les notes
fui fa3, fa # sol
^ ,J==Ï—j c'est
sur ces quatre notes que
31 31 31 f)

doit se faire le travail de la liaison des registres; c'est-à-dire que ces quatre
notes peuvent être chantées indifféremment en voix de poitrine ou en voix de
tête, et que l'on peut passer d'un registre à l'autre sur chacune d'elles.
Chez les contralti, la transition des registres est d'autant plus sensible que le
registre de poitrine est plus vigoureux; il est même à remarquer que cette tran-
sition est d'autant plus marquée que la voix est plus belle.
Certaines voix de contralto, ayant le registre de poitrine très-développé, et
par contre le registre de tête faible, ont une tendance à monter plus haut que le
sol,
^ en voix poitrine. C'est un penchant pernicieux et qu'il faut

combattre, surtout au temps des études. Le chant de poitrine sur des notes
trop élevées retire à la voix ses qualités féminines, et le registre de tête
n'étant plus exercé devient d'une faiblesse extrême s'il ne se perd pas complé-
tement.
Les contralti qui ont la voix de tête faible sur les notes sols' la3, si, do
4,
J
et qui, par conséquent, se laissent entraîner à chanter

sur ces notes en voix de poitrine; feront bien de travailler ces notes en voix de
tête. Quel qu'en soit le résultat définitif, ce travail engendre un certain déve-
loppement de la voix de tête et fait toujours gagner quelques notes.
Malgré le volume de la voix de poitrine, il est des contralti dont la voix de
tête est remarquable de développement et d'étendue. Toutefois, les élèves les
mieux douées ne devront pas abuser des notes élevées de leur voix de tête; nous
leur conseillons même de n'employer ces notes que passagèrement ; par exemple,
dans les traits ou les points-d'orgue.
26° EXERCICES
POUR LIER LES REGISTRES DE LA VOIX DE CONTRALTO.

Travailler ces exercices avec toutes les voyelles, en ayant soin d'employer des voyelles
à résonnance grave lorsqu'on chante en voix de poitrine, et des voyelles à résonnance
claire lorsqu'on chante. en voix de tête.
EXERCICE

POUR LIER LES REGISTRES DE LA VOIX DE CONTRALTO

SUR UNE MÊME NOTE.

Attaquer piano, en voix de tête sur une voyelle à résonnance claire; augmenter le son
jusqu'à ce que l'on sente la nécessité de passer au registre de poitrine; changer la
voyelle claire en une voyelle à résonnance grave, donner à la voix la plus grande force

posàhla, puis diminuer le son graduellement et revenir au registre de tête en prenant la


voyelle claire avec laquelle on a fait l'attaque.

Travailler cet exercice avec toutes les voyelles.


DES ARPÈGES (,)

On appelle arpéger faire entendre successivement, d'un mouvement rapide,


les sons qui composent un accord, quel que soit l'ordre dans lequel ils se trouvent
placés.

Dans les études du mécanisme de la voix, on se sert des arpéges pour en


développer l'étendue et lui donner de la souplesse et de l'assurance.

De tous les exercices qui ont pour but de former la voix, l'arpége est un des
plus faciles au point de vue du mécanisme; les difficultés qu'il présente tiennent à
la nature des accords et à l'imprévu des intervalles, difficultés de justesse, qui font
l'objet du solfége.

Nous allons donner, sous forme d'arpéges, quelques exercices sur les princi-
paux accords de notre système musical. Ces exercices, tout en aidant à surmonter
la difficulté d'intonation de certains intervalles, auront l'avantage d'apprendre à
l'élève la plupart des accords.

En commençant l'étude des arpéges, on pourra marteler chaque note; plus


tard, on attaquera seulement la première note et on liera les suivantes, tout en
évitant de porter les notes les unes sur les autres. On ne doit pas détacher les
notes, à moins d'indications précises.

Il faut soutenir le son en montant et le diminuer en descendant. C'est le


moyen d'arriver à une exécution ferme, vive et brillante.

(1) Le mot arpége nous vient de l'italien arpa, harpe; c'est particulièrement sur cet instrument
qu'on exécute les accords arpégés. Par extension, on a donné le nom d' arpège à tout accord dont
on fait entendre les notes successivement.
EXERCICES D'ARPEGES
SUR L'ACCORD PARFAIT MAJEUR ET SUR L'ACCORD PARFAIT MINEUR.
EXERCICES D'ARPÈGES
SUR L'ACCORD PARFAIT MAJEUR ET SUR L'ACCORD PARFAIT MINEUR.
EXERCICES D'ARPÈGES
SUR L'ACCORD PARFAIT MAJEUR ET SUR L'ACCORD PARFAIT MINEUR.
EXERCICES D'ARPÈGES
SUR L'ACCORD PARFAIT MAJEUR ET SUR L'ACCORD PARFAIT MINEUR.
EXERCICES D'ARPÈGES
SUR L'ACCORD PARFAIT MAJEUR ET SUR L'ACCORD PARFAIT MINEUR.

Dans l'exercice suivant, le changement de la voyelle, lorsqu'on passe du forte au


jpianoj doit se faire sans respirer.
EXERCICE D'ARPÈGES
SUR L'ACCORD DE QUINTE DIMINUÉE.
EXERCICES D'ARPÉGES
SUR L'ACCORD DE SEPTIÈME DE DOMINANTE (OU septième de 1" espèce)
EXERCICES D'ARPÈGES
SUR L'ACCORD DE SEPTIÈME DE DOMINANTE (OU septième de LRE espèce).
EXERCICES D'ARPÈGES
SUR L'ACCORD DE NEUVIÈME MAJEURE.
EXERCICE D'ARPÈGES
(ou. septième sensible)
SUR L'ACCORD DE NEUVIÈME MAJEURE SANS FONDAMENTALE
EXERCIICE D'ARPÈGES
1
(OU septième sensible).
SUR L'ACCORD DE NEU VIÈME:,MAJEURE SANS FONDAMENTALE
EXERCICES D'ARPÈGES
SUR L'ACCORD DE NEUVIÈME MINEURE.
EXERCICE D'ARPÈGES
SUR L'ACCORD DE NEUVIÈME MINEURE
SANS FONDAMENTALE (ou septième diminuée).
EXERCICE D'ARPÈGES
SUR L'ACCORD DE NEUVIÈME MINEURE SANS FONDAMENTALE (OU septième diminuée).
EXERCICES D'ARPEGES
-. -- SUR L'ACCORD DE SEPTIÈME DE SECONDE ESPÈCE.
- -- - L-
EXERCICE D'ARPÈGES
SUR L'ACCORD DE SEPTIÈME DE TROISIÈME ESPÈCE.
EXERCICE D'ARPÉGÉS
SUR L'ACCORD DE SEPTIÈME DE QUATRIÈME ESPÈCE.
EXERCICE D'ARPÉGES.
EXERCICE D'ARPÈGES.
EXERCICE D'ARPÈGES.
EXERCICE D'ARPÈGES.
EXEMPLES D'ARPÈGES.
-

LE PÈRE GAILLARD (HENRI REBER)

SOPRANO

LA MULE DE PÉDRO (VICTOR MASSÉ)

SOPRANO

SÉRÉNADE (GouNOD)

TÉNOR
DE LA ROULADE
ou

DE LA VOCALISATION RAPIDE

(En italien Volata.)

La roulade n'est autre chose que la vocalisation rapide, c'est-à-dire une


suite de sons émis avec plus ou moins de volubilité sur une même voyelle.
La difficulté de la roulade est la rapidité d'exécution ; cette difficulté est grande
et exige une longue étude.
Les voix qui ont peu de volume, les voix légères, se prêtent davantage aux
exercices de la vocalisation.
Il ne suffit pas d'être bien doué pour exécuter la roulade ; il faut aider les dons
naturels, par un travail gradué, patient et bien compris, commencer tous les
exercices de la roulade avec lenteur et n'accélérer le mouvement que graduelle-
ment. Il y aurait danger, même pour les commençants ayant les plus grandes
dispositions naturelles, à vocaliser de prime-saut suivant le mouvement rapide de
la roulade.
Si les natures privilégiées ont besoin de travail, que dire de celles qui sont
rebelles à la musique et au chant? Cependant, avec de l'étude et de la persévérance
on obtient des résultats surprenants.
Tous les exercices de la roulade devront être faits d'abord en voix blanche,
puis en voix sombrée, et sur toutes les voyelles. On augmentera de force en montaut
les degrés de la gamme, on diminuera en les descendant.
Il est à remarquer que la roulade est beaucoup plus facile en descendant qu'en
montant.
Dans l'exécution de la roulade, quelle qu'elle soit, il ne faut remuer ni la
langue, ni les lèvres, ni la mâchoire inférieure.
Le léger tremblemeut qui parfois se communique aux lèvres n'est qu'un effet
nerveux; avec de l'attention on le fait disparaître en peu de temps.
Il faut, concurremment avec les exercices de la roulade, travailler les sons sou-
tenus et alterner les deux exercices. Il serait dangereux et nuisible pour la voix de
travailler uniquement la roulade.
Nous distinguons trois genres de vocalisation, qui diffèrent par les procédés
d'exécution :
La vocalisation martelée;
La vocalisation liée;
La vocalisation détachée.
Ces trois manières de vocaliser sont les seules reconnues par les chanteurs de
talent. Les autres ont inventé une sorte de roulade par saccades, facile à exécuter,
il est vrai, mais de nature à ne satisfaire que des auditeurs ignorants. On peut don-

ner à cette vocalisation vicieuse le nom de roulade saccadée. Elle est souvent
employée par les élèves qui, abandonnés à eux-mêmes, n'ont aucune idée des rou-
lades martelées ou liées. Ces élèves cherchent alors à exécuter une gamme le plus
légèrement et le plus rapidement possible et ils l'obtiennent par la saccade, c'est-à-
dire par une suite de secousses du gosier, espèce de rire nerveux qui ressemble au
bêlement.
Il y a aussi une sorte de roulade qu'on obtient à coups de poitrine ; elle est
encore plus dure que la roulade saccadée, par conséquent tout à fait insupportable.
Beaucoup de chanteurs peuvent exécuter les gammes rapides descendantes en
martelant et en liant ; mais quand il s'agit de monter, ils emploient la roulade sac-
cadée. Ce défaut est un indice de la mauvaise direction de leurs études.
D'autres n'emploient que la roulade saccadée, soit en montant, soit en
descendant, tout en ayant la conviction de bien faire.
Les gens de goût sont révoltés quand ils entendent un chanteur vocaliser par
saccade ou à coups de poitrine.
La dépense de l'air dans la roulade est un point sur lequel on doit porter toute
son attention.
Il est nécessaire, surtout dans la roulade martelée, d'économiser le plus possible
la respiration; si l'air s'échappait en trop grande quantité, le martellement ne
pourrait plus se produire.

1" DE LA VOCALISATION MARTELÉE

La vocalisation martelée est la plus facile. On l'obtient en attaquant chaque


note (voyez Attaque) successivement, sans interruption de son, ni déperdition d'air.
Dans l'exercice suivant, la glotte reste complètement immobile, le martelle-
ment s'effectue par un rinforzando très-accentué sur chaque note, comme pour simu-
1er une répétition de la voyelle sur laquelle on vocalise. On obtient le rinforzando -
par une vigoureuse poussée d'air, en ayant soin de ne pas interrompre le son. C'est
ce que nous avons voulu indiquer par les accents placés sur chaque note et les
petites liaisons qui les relient entre elles.
4b

2° EXERCICE DE MARTELLEMENT.

Il serait bon, au début, de faire précéder chaque exercice de vocalisation mar-


telée par un petit prélude de ce genre, que l'on exécuterait sur la note qui
commence l'exercice. On commencera par un mouvement lent, afin que chaque
note ait bien son attaque particulière et soit entendue distinctement. On pressera le
mouvement graduellement jusqu'à la plus grande vitesse possible, mais jamais au
préjudice de la netteté.
La vocalisation martelée paraîtra lourde aux jeunes élèves. Qu'ils ne s'en
préoccupent pas; avec le travail, on arrive toujours à une souplesse et à une
agilité suffisantes.
L'abus de la vocalisation martelée a l'inconvénient d'amaigrir la voix et de
la rendre tremblante ou chevrotante : il faut donc revenir constamment aux sons
soutenus.
3° EXERCICE DE VOCALISATION MARTELÉE.
EXERCICE DE VOCALISATION MARTELÉE.

Soutenir les rondes avec une certaine force, afin de conserver la plénitude de la
voix.
EXERCICE DE VOCALISATION MARTELÉE.
Avoir soin de ne pas prolonger le son sur les notes finales de chaque gamme, au
delà de la valeur réelle de ces notes. *
EXERCICE DE VOCALISATION MARTELÉE.

Commencer l'étude de cet exercice dans un mouvement modéré. Appuyer


sur la
première note des quartetti et des gammes descendantes.
Avoir soin de respirer grandement à chaque virgule, à cause de la longueur du trait.
EXERCICE DE VOCALISATION MARTELÉE.

Nous avons écrit cet exercice, comme on a l'habitude de le faire dans la musique
usuelle, sans accents ni liaisons et sans répéter les voyelles sous chaque note; néan-
moins, on aura soin de marteler chaque note en les liant entre elles, et de simuler
une
répétition de la voyelle, ainsi qu'on l'a fait dans les exercices précédents.
6.° EXEMPLES DE VOCALISATION MARTELÉE.

LALLÀ ROUKH (FÉLICIEN DAVID)

SOPRANO

LE VOYAGE EN CHINE, (FRANÇOIS BAZIN)


^
.1 -
TÉNOR

IJBRIGANTI (MERCADANTE)
- BARYTON

ZAÏRE (MERCADANTE)

BARYTON

LA MULE DE PÉDRO (VIC-TOR MASSÉ)

BARYTON
5° DE LA VOCALISATION LIÉE.

La vocalisation liée est plus difficile que la vocalisation martelée, parce que
notes entre elles ne doit pas empêcher l'oreille d'en percevoir distincte-
la liaison des

ment l'émission et la succession.


Lorsqu'un trait n'est qu'une suite de trois ou quatre notes, il y a peu de diffi-
culté ; il en est autrement s'il s'agit d'une ou plusieurs gammes, surtout dans un
mouvement très-rapide.
Quand la difficulté du lié sera telle qu'on ne puisse exécuter un morceau tout
entier, on décomposera ce trait en groupes de deux ou trois notes, et on exécutera
chaque groupe successivement, en martelant la première note de chacun ; puis on
réduira le nombre des groupes en augmentant le nombre des notes de chaque
groupe, c'est-à-dire qu'on partagera le trait, non plus en groupes de deux ou trois
notes, mais en groupes de quatre, cinq, six notes, etc., de manière à réduire
successivement le nombre des martellements, dans le trait, jusqu'à ce qu'on arrive
enfin à exécuter le trait tout entier, sans martellement.
On obtient l'exécution de la vocalisation liée par entraînement. Il ne faut

pas procéder, comme on l'a fait pour la vocalisation martelée, du lent au vite
graduellement; il faut, au contraire, chercher à obtenir de prime-saut, dans
l'exécution, une vitesse qui ne permette pas de marteler chaque note.
6" EXERCICE DE VOCALISATION LIÉE.
EXERCICE DE VOCALISATION LIÉE.
EXERCICE DE VOCALISATION LIÉE.
EXERCICE DE VOCALISATION LIEE.
7G EXEMPLES DE VOCALISATION LIÉE.

MIREILLE (GOUNOD)

SOPRANO

LE VOYAGE EN CHINE (FRANÇOIS BAZIN)

SOPRANO

1 BRIGANTI (MERCADANTE)
BARYTON

ZAÏRE (MERCADANTE)
BARYTON

L'INGANNO FORTUNATO (ROSSINI)


BARYTON
LA GAZZA LADRA (ROSSINI)

BASSE CHANTANTE

8° DE LA VOCALISATION DÉTACHÉE.

Ce genre de vocalisation est une suite de notes rapides, séparées les unes des
autres par un léger silence et plus ou moins piquées.
Cette manière de vocaliser convient particulièrement aux voix de femme.
Quelques ténors s'en servent, mais cela n'est pas de bon goût.
Employée avec mesure et discernement, la vocalisation détachée apporte une,
heureuse diversion à la vocalisation martelée ou liée.
9° EXERCICE DE VOCALISATION DÉTACHÉE.
Les notes détachées s'emploient de préférence dans le haut de la voix.
Les exercices qui suivent sont écrits sur des notes très-élevées et ne doivent être
travaillés qu'après de longues études de chant.
EXERCICE DE VOCALISATION DÉTACHÉE.
EXERCICE DE ;VOCALIS!ATION DÉTACHÉE.
EXERCICE DE VOCALISATION DÉTACHÉE.
EXERCIC;E DE VOCALISATION DETACHEE.]
EXERCICE DE VOCALISATION DÉTACHÉE.
1.00 EXEMPLES DE VOCALISATION DÉTACHÉE.
LA FLUTE ENCHANTÉE (MOZART)
SOPRANO

LE PARDON DE PLOËRMEL (MEYERBEER)


-

SOPRANO piqué.

HAMLET (AMBROISE THOMAS)


SOPRANO

L'ÉTOILE DU NORD (MEYERBEER)


SOPRANO
LES NOCES DE JEANNETTE (VICTOR MASSÉ)
SOPRANO

ROBERT LE DIABLE (MEYERBEER)


SOPRANO

LE VOYAGE EN CHINE (FRANÇOIS BAZIN)


SOPRANO

RAYMOND (AMBROISE THOMAS)


SOPRANO

TYROLIENNE (ROSSINI)
MEZZO-SOPRANO
DES NOTES D'AGRÉMENT

ou

PETITES NOTES

Les petites notes, ou notes d'agrément, que l'on écrit en caractères plus
petits, servent à donner plus de charme et d'accentuation aux notes réelles.
Il y a six genres principaux de petites notes :

L'appoggiature,
L'acciaccatura (1),
Le gruppetto,
Le trille, -

Le mordant,
Les petits groupes.

1° DE L'APPOGGIATURE

L'appoggiature se divise en deux classes :


L'appoggiature de lre classe est une note étrangère à l'accord. Elle se place
sur les temps forts de la mesure ou sur la première partie des temps faibles ; elle
précède toujours la note réelle (la note faisant partie de l'accord), à intervalle de
demi-ton, si elle monte, et de ton ou de demi-ton, si elle descend. Ce qui équivaut

(4) Prononcez at-chia-ka-tou-ra.


à dire que l'appoggiature fait sa résolution par demi-ton en montant et par ton
ou demi-ton en descendant ; exemple :

On peut attaquer l'appoggiature simultanément avec l'accord, quoiqu'elle


lui soit étrangère ; exemple :

Les exemples ci-dessus s'écrivent le plus souvent en petites notes, ayant


la moitié de la valeur de la note réelle qui suit l'appoggiature ; exemple :

L'appoggiature écrite en petites notes prend sa valeur sur la note qui la suit,
et la valeur de cette dernière note réelle est diminuée d'autant.
2° EXEMPLES D'APPOGGIATURES.

FERNAND CORTEZ (SPONTINI)


SOPRANO

LA VESTALE (SPONTINI)

LA VESTALE (SPONTINI)
LUCIA DI LAMERMOOR (DONIZETTI)

SOPRANO ET BARYTON

L'exécution de l'appoggiature n'offre aucune difficulté particulière. Elle


demande seulement à être accentuée ( appoggiature est un dérivé de l'italien
appoggiare qui signifie appuyer).
Quand la petite note est écrite avec une valeur moindre que la moitié de la
note réelle, ou bien encore lorsque cette petite note est traversée diagonalement
par une barre, elle s'exécute plus brièvement et prend le nom à'acciaccatura.

38 LEÇON (RUBINl)

TÉNOR

Les auteurs modernes écrivent les appoggiatures non plus en petites notes,
-
mais en notes ordinaires, telles qu'on doit les exécuter. C'est assurément
une
excellente réforme, qui évite tout malentendu.

Au lieu d'écrire cette


phrase ainsi :

On l'écrit aujourd'hui telle


qu'elle doit être exécutée.

Dans la musique ancienne, et notamment dans la musique italienne, les appog-


giatures ne sont pas écrites. C'est un grand embarras pour le chanteur; à défaut
de règle qui marque la place de l'appoggiature, il n'a d'autres guides que le
goût et le style.
On emploie l'appoggiature non écrite à la fin des phrases de récitatif ; très-
rarement dans le corps même de la mélodie.
Nous recommandons la plus grande circonspection dans l'emploi de l'appog-
giature non écrite.

EXEMPLES D'APPOGGIATURES NON ÉCRITES.

LE SIÈGE DE CORINTHE (ROSSINI)

Le passage
ci-contre

doit être
exécuté ainsi

LE COMTE OR Y (ROSSINI)
Le passage
ci-contre

doit être
exécuté ainsi :

Lorsque le chanteur ajoute des appoggiatures, il doit avoir le soin de les


placer sur l'avant-dernière syllabe des mots à rimes féminines.
On emploie aussi à des intervalles de tierce, quarte, quinte, sixte, septième,
de petites notes d'agrément qui produisent le même effet que l 'appo--iature, mais
elles diffèrent en ce sens qu'elles font partie de l'accord ; exemple :

LA VESTALE (SPONTINI)

LE BARBIER DE SÉVILLE (ROSSINI)


BARYTON
Très-souvent ces notes d'agrément ne sont pas indiquées, le chanteur les
ajoute; exemple :

1
LE COMTE OR Y (ROSSINi)

le passage
ci-contre

doit être
exécuté ainsi :

Ces petites notes ainsi employées à distance sous forme d'appoggiatures sont
exécutées comme des portamenti et en suivent les règles. (Voyez du Porlamenlo,
page 186).

Les appoggiatures de deuxième classe suivent la note réelle au lieu de la précé-


der et sont placées sur la partie faible des temps. Elles sont moins usitées que les
autres et nous croyons superflu d'en parler plus longuement. Le chanteur n'a pas
à s'en préoccuper, attendu qu'elles sont toujours écrites en notes ordinaires et qu'i
ne pourra même pas les distinguer, s'il n'a fait des études d'harmonie.
3° DE L'ACCIACCATURA

OU PETITE NOTE BRISÉE

L'acciaccatura, ou petite note brisée, s'écrit en petites notes barrées :

Elle suit les mêmes règles que l'appoggiature, en ce sens, qu'elle fait sa réso-
lution par degré conjoint, qu'elle ne doit pas monter de plus d'un demi-ton et
qu'elle ne doit pas descendre de plus d'un ton.

U0 EXEMPLES D'ACCIACCATURA.

LALLA ROUKH (FÉLICIEN DAVID)


SOPRANO

LE VOYAGE EN CHINE (FRANÇOIS BAZIN)


TÉNOR
LE TROUVÈRE (VERDi)
TÉNOR

MAITRE PATHELIN (FRANÇOIS BAZIN)


COUDERC

LE BARBIER DE SÉVILLE (ROSSINI)


BARYTON

LE PÈRE GAILLARD (HENRI REBER)

BASSE
La valeur de l'acciaccatura est toujours moindre que celle de l'appoggiature;
celle-ci est écrite avec la moitié de la valeur de la note réelle, tandis que celle-là
doit toujours être écrite avec une valeur moindre. Certains auteurs négligent cette
distinction lorsqu'ils écrivent; c'est alors au goût du chanteur de déterminer si la
petite note doit être exécutée en appoggiature ou en acciaccatura.
Dans la musique légère, les appoggiatures sont quelquefois barrées ; de façon
que l'exécutant ne sait pas s'il doit considérer la petite note comme une appoggia-
ture ou comme une acciaccatura. Le Comte Ory, notamment, fourmille de ces diffi--
cultés, et les maîtres eux-mêmes ne sont pas toujours d'accord sur la manière d'in-
terpréter les agréments de cette musique. C'est alors une affaire de sentiment plutôt
que de règle.
Dans l'exécution, la valeur de l'acciaccatura est, contrairement à celle de l'ap-
poggiature, prise sur le temps qui précède la note réelle.
Cette petite note brisée est d'un effet très-agréable, elle sauve souvent la
monotonie d'une phrase musicale; mais il faut qu'un chanteur soit sûr de lui pour
se permettre de l'exécuter lorsqu'elle n'est pas écrite.
On emploie quelquefois, à une distance de plus d'un ton, soit au-dessus, soit
au-dessous, de petites notes qui doivent s'exécuter exactement comme l'acciacca-
tura; elles font l'effet d'un portamento rapide et doivent être exécutées suivant les
règles du portamento (1). Exemple :

HAYDÉE (AUBER)
TÉNOR

(4) Voir du Portamento, page 186.


LE PÈRE GAILLARD (HENRI REBER)

TÉNOR

MAITRE PATHELIN (FRANÇOIS BAZIN)

TÉNOR

SAPHO (GOUNOD)

TÉNOR

HERCULANUM (FÉLICIEN DAVID)

BASSE

Lablache prétend que cette petite note est toujours préparée; on voit par les
exemples qui précèdent qu'il peut en être autrement (1).

(1 )Méthode de chant, par Lablache, page 43.


Quelquefois la petite note est placée à un plus grand intervalle de la grande, mais alors elle est
toujours préparée, c'est-à-dire précédée d'une note pareille à elle-même.
5" EXERCICE D'ACCIACCATURA.
EXERCICE D'ACCIACCATURA.

Bien enlever la petite note, de telle sorte que la note réelle et la note d'agrément
soient émises presque simultanément.
EXERCICE D'ACCIACCATURA.
6° DU GRUPPETTO

Le gruppetto est un petit groupe de quatre notes d'agrément qui se place d'or-
dinaire entre deux notes réelles. Toutefois, il peut se placer après une seule note
réelle; on l'écrit à l'aide de l'un des deux signes : n ou cn y suivant que le
gruppetto est descendant ou ascendant. Exemples :

Si le gruppetto est descendant, oa, il commence parla note supérieure;


s'il est ascendant, e<s il commence par la note inférieure.
,
Il peut exister un intervalle d'un ton ou d'un demi-ton entre chaque note du
gruppetto.
On peut donc obtenir huit formules de gruppetti, dont quatre sont descen-
dants et quatre ascendants (1).

(1) Remarque. — Plusieurs auteurs prétendent que les trois notes du gruppetto ne peuvent former
qu'une tierce diminuée ou une tierce mineure, et n'admettent pas la tierce majeure. Ils s'appuient sur
ce principe que la première et la troisième note étant considérées comme des appoggiatures; exemple:

la note inférieure doit se résoudre par demi-ton.


Mais comme ces mêmes auteurs, une fois cette règle établie, ne se font aucun scrupule d'employer
les phrases suivantes :

nous nous en autorisons pour maintenir les troisième, quatrième, septième et huitième formules du
gruppetto. Dans les troisième et septième formules, la note inférieure fait sa résolution par ton, et dans
les quatrième et huitième formules, les trois premières notes du gruppetto forment une tierce majeure.
On peut donc poser comme principe que la note inférieure du gruppetto peut faire sa résolution par
ton, et que, dans certains cas, il peut exister un intervalle de tierce majeure entre les première et
troisième notes d'un gruppetto. Exemples :

LE COMTE ORY (ROSSINI)


Dans les gruppetti écrits en abrégé, on accompagne les signes N co des
accidents nécessaires; exemple :

LE VOYAGE EN CHINE (FRANÇOIS BAZIN)


BARYTON

HERCULANUMJ(FÉLICIEN DAVID)
BASSE

MARCO SPADA (AUBBR)

IBASSE CHANTANTE
On voit, d'après tous les exemples ci-dessus, qu'il est impossible de se trom-
per sur la manière d'interpréter le gruppetto écrit en abréviation.
Le gruppetto est un agrément des plus indispensables au chanteur. La musique
la plus sérieuse comme la plus légère en est remplie et l'on ne peut les supprimer.
Il faut donc que le chanteur en fasse une étude spéciale.
Pour exécuter le gruppetto descendant d'une manière parfaite, il faut unir la
rapidité à la légèreté, et faire entendre toutes les notes, égales en force et en durée,
sans être jamais martelées. Pour arriver à ce degré de perfection, eût-on les plus
grandes dispositions, on a besoin de s'exercer graduellement, en suivant la méthode
que nous allons indiquer.
Étant donné l'exercice suivant de gruppetti descendants :

Au lieu d'exécuter les gruppetti qui composent cet exercice avec la valeur
exacte de chaque note, on devra, plus ou moins longtemps, selon l'aptitude de
l'élève, les exécuter en les décomposant, suivant les études de la page 152.
L'exécution du gruppetto ascendant est d'une extrême difficulté; elle exige
une étude spéciale et graduée.
Étant donné l'exercice suivant de gruppetti ascendants,

Au lieu de chercher à exécuter cet exercice tel que la notation l'indique, on


en commencera l'étude en le décomposant, comme pour le gruppetto descendant ;
seulement la décomposition devra se faire en sens inverse, ainsi que nous allons
l'indiquer.
PREMIÈRE ÉTUDE DU GRUPPETTO DESCENDANT

Attaquer franchement chaque note réelle qui précède les gruppetti;


Passer rapidement sur la première note des gruppetti, comme si c'était une
acciaccatura et en liant bien les deux premières notes;
Chanter les deux dernières sans hâte et sans secousse.

DEUXIÈME ÉTUDE DU GRUPPETTO DESCENDANT

Exécuter les deux premières notes rapidement en les liant à la troisième.


La quatrième note s'exécutera lentement relativement aux autres.

TROISIÈME ÉTUDE DU GRUPPETTO DESCENDANT

Exécuter les trois premières notes rapidement en les liant à la quatrième, sur
laquelle on s'arrête légèrement.

QUATRIÈME ÉTUDE DU GRUPPETTO DESCENDANT

Il faut que les quatre notes qui composent le gruppetto soient parfaitement
liées entre elles. Presser 1p mouvement graduellement.
PREMIÈRE ÉTUDE DU GRUPPETTO ASCENDANT

Lier avec soin toutes les notes du gruppetto, en passant très-rapidement


sur la troisième comme si c'était une acciaccatura.

DEUXIÈME ÉTUDE DU GRUPPETTO ASCENDANT —

Les deux notes du milieu devront être enlevées rapidement, comme on le ferait
d'une double petite note sans martellement.

TROISIÈME ÉTUDE DU GRUPPETTO ASCENDANT

Il faut que les trois premières notes soient exécutées rapidement et liées à la
quatrième, sur laquelle on s'arrête légèrement (1).

QUATRIÈME ÉTUDE DU GRUPPETTO ASCENDANT

On commencera à chanter cette étude avec un mouvement modéré, en ayant


som de bien lier entre elles toutes les notes qui composent le gruppetto. On pressera
le mouvement graduellement, jusqu'à la plus grande vitesse possible.

(4) Il est absolument nécessaire d'étudier longtemps les trois premières études du gruppetto ascen-
dant avant de passer à la quatrième étude.
7° ÉTUDE DU GRUPPETTO.
8° DU TRILLE

Le trille est la répétition rapide, égale et consécutive de deux notes séparées


l'une de l'autre par un intervalle de ton ou de demi-ton.

TRILLE A INTERVALLE DE TON, APPELÉ TRILLE MAJEUR

TRILLE A INTERVALLE DE DEMI-TON, APPELÉ TRILLE MINEUR


q
Le trille est préparé lorsqu'il est précédé d'une appoggiature ou d'un petit

groupe ; exemples :

TRILLES MAJEURS PRÉPARÉS

TRILLES MINEURS PRÉPARÉS


Le trille est résolu lorsqu'il est suivi d'un petit groupe; exemples :

TRILLES MAJEURS RÉSOLUS

TRILLES MINEURS RÉSOLUS

L'étude du trille, en raison de sa difficulté, doit être commencée aussitôt que


l'élève aura obtenu une émission de voix satisfaisante. Cette étude aura pour pre-
mier résultat d'assouplir la voix et de la préparer à la vocalisation rapide, martelée
et liëe.
Certains auteurs prétendent que le trille est un don de la nature et qu'il ne
s'acquiert pas par le travail; nous pouvons affirmer le contraire. Nous ajouterons
même que les voix qui ont une trop grande disposition pour l'exécution de cet
agrément du chant, le font mal. Par conséquent, les élèves qui, par exception, feraient
facilement le trille, dès leurs premières études, devront néanmoins s'astreindre aux
exercices progressifs que nous allons donner, et ce, sous peine d'arriver à un excès
de rapidité dont l'effet ressemblerait au chevrotement. Les hommes, et particulière-
ment ceux qui ont la voix de basse, doivent se mettre en garde contre ce défaut.
Plus les voix sont graves, moins elles sont souples. La rapidité hâtive ne s'obtient
qu'au détriment de la netteté.
Dans l'exécution du trille, la glotte opère alternativement un mouvement des-
cendant et un mouvement ascendant. Le mouvement descendant a lieu sur la note
principale ou note inférieure du trille ; le mouvement ascendant a lieu sur la note
supérieure; il en résulte un battementde la glotte, d'autant plus précipité que l'exé-
cution du trille est plus rapide.
Pour comprendre ce battement de la glotte, on peut essayer le trille à
intervalle de tierce; mais il serait très-dangereux d'abuser de ce moyen; cela
pourrait altérer la voix. Il est plus sage d'obtenir le trille, conformément à notre
méthode, en travaillant patiemment les exercices progressifs que nous donnons
plus loin.
On ne doit pas s'exercer au trille sur les notes extrêmes de la voix.
L'étude du trille poussée à l'excès pourrait déterminer le chevrotement; il
faudra donc faire alterner les exercices de trille avec des exercices de sons soutenus.
Quand le mouvement de la glotte sera bien développé et permettra de prolon-
ger les trilles, on s'exercera à les commencer piano, pour augmenter le son
graduellement jusqu'au milieu du trille, et le terminer morendo, exactement comme
pour l'exécution du son filé.
Dans certains cas, on commence le trille piano et l'on place au milieu plu-
sieurs rinforzandi, qui donnent beaucoup de brio à l'exécution.
La vitesse avec laquelle on doit exécuter le trille dépend non-seulement du
genre de musique que l'on interprète, mais aussi du genre de voix dont on
est doué. Ainsi un soprano devra exécuter un trille avec plus de rapidité qu'une
basse ou un baryton. Plus la note est élevée, plus le battement doit être rapide, et
vice versa.
Qu'on exécute un trille sur la chanterelle d'un violon et qu'on le compare au
même trille exécuté avec la même rapidité sur une contre-basse, le premier sera
net, le second sera confus. Pour que ce dernier soit perceptible et agréable, il faut
l'exécuter plus lentement. Il en est de même pour les voix.
Il est indispensable de signaler aux commençants les défauts qu'ils sont le '
plus enclins à contracter, en leur indiquant en même temps le moyen de les
vaincre. Ces défauts sont : -
1" Le chevrotement sur une seule note, dont l'effet est assez semblable au rire
nerveux, au cri de la chèvre ou au hennissement du cheval. Il suffit, pour l'éviter,
de s'astreindre aux exercices gradués que nous recommandons ;
2° Le tremblement de la langue, des lèvres et du menton, mouvement nerveux
très-fréquent chez les gens impressionnables, mais que l'on combat facilement par
la volonté et qui disparaît avec l'habitude ;
30 Le trille à intervalle de tierce, déterminé par l'excès d'attention du chan-
teur à bien appuyer sur la note supérieure, attention louable, mais qui l'entraîne
quelquefois à donner la note trop haute et à faire une tierce à son insu.
On corrige ce défaut en s'astreignant à commencer le trille lentement, de
manière à bien établir le degré des deux notes avant de passer à un mouvement
plus rapide;
h° Le trille en dessous, déterminé par le manque d'attention du chanteur à
bien appuyer sur la note supérieure, ce qui fait qu'après quelques battements il a
baissé sans s'en apercevoir.
On corrige également ce défaut en s'astreignant à commencer le trille lente-
ment, de manière à bien établir l'intonation des deux notes.

9° DU MORDANT"'

Le mordant est un diminutif du trille, composé de quelques battements seule-


ment ; on l'indique ordinairement par ce signe qui est lui-même une réduc-
tion du signe indicatif du trille.
L'exécution du mordant suit les mêmes règles que celles du trille.

(1) Quelques auteurs donnent le nom de mordant à certains petits groupes.


10° ÉTUDE PROGRESSIVE DU TRILLE.

Exercice ayant pour but de développer le mouvement de la glotte.


Exécuter les deux notes liées d'un seul martellement, comme si- la note supérieure
était une acciaccatura.
Changer la voyelle du forte au piano sans^respirer.
ÉTUDE PROGRESSIVE DU TRILLE.
11° EXERCICE DE TRILLES MINEURS.
Commencer lentement, en appuyant sur la note supérieure du trille.
On aura soin, quel que soit le mouvement dans lequel on chantera, d'exécuter les
petites notes comme des acciaccatura^ avec beaucoup de vivacité.
12° EXERCICE DE TRILLES MAJEURS.
Commencer lentement en appuyant sur la note supérieure du trille.
On aura soin, quel que soit le mouvement dans lequel on chantera, d'exécuter les
petites notes comme des acciaccatura, avec beaucoup de vivacité.
13° EXEMPLES DE TRILLES.

FAUST (GoUNOD)

SOPRANO

LA MULE DE PÉDRO (VICTOR MASSÉ)

SOPRANO

LE TROUVÈRE (VERDI)

SOPRANO
LE PÈRE GAILLARD (HENRI REBER)

MEZZO SOPRANO
fritte majeur.

LE TROUVÈRE (VERDI)

MEZZO SOPRANO

RAYMOND (AMBROISE THOMAS)

BARYTON

PSYCHÉ (AMBROISE THOMAS,

BASSE
14° EXEMPLES DE MORDANTS.

LE TROUVÈRE (VERDI) -

SOPRANO
1

LE TROUVÈRE (VERDI)
SOPRANO
f50 DES PETITS GROUPES

Outre les cinq genres principaux de petites notes dont nous venons de parler,
on peut écrire une foule de groupes divers en notes d'agrément. S'ils ne suivent
aucune règle générale et ne peuvent pas s'indiquer par signes, ils sont écrits.
en toutes notes et leur mode d'exécution est subordonné à leur composition.
Toutefois, il est des groupes de deux ou trois notes, qu'on appelle simplement
petites notes doubles ou triples, et qui suivent les mêmes règles que l'acciaccatura,
quant à l'exécution, parce que ces groupes ne sont, en fait, que des acciaccatura
doublées ou triplées.
Les petits groupes doubles ou triples sont : ou ascendants, ou descendants,
ou brisés, selon la position des notes qui les composent.

PETIT GROUPE ASCENDANT.

PETIT GROUPE DESCENDANT.


PETITS GROUPES BRISÉS.

Le petit groupe ascendant est le seul dont l'exécution soit difficile.


Tous ces petits groupes font partie de la vocalisation liée et ne doivent pas
être martelés, mais l'exécution doit en être ferme en même temps que légère.
Nous n'insistons pas, d'ailleurs, sur la beauté de leurs effets; il nous suffira
de faire remarquer que souvent on les emploie à la place d'une acciaccatura
simple.
Quant aux divers autres groupes composés de quatre, cinq, six notes, etc.,
il faut les exécuter comme ils sont écrits ; ils ne sont, par conséquent, soumis à
aucune règle spéciale.
160 ÉTUDE DES PETITS GROUPES DOUBLES ET TRIPLES.
ÉTUDE DES PETITS GROUPES DOUBLES ET TRIPLES.
17° EXEMPLES DE PETITS GROUPES.

MARCO SPADA (AUBER)

SOPRANO

LE TROMPETTE DE MONSIEUR LE PRINCE (FRANÇOIS BAZIN)


SOPRANO
a piacere.

LE COMTE ORY (ROSSINI)


SOPRANO

LE PÈRE GAILLARD (HENRI REBER)


MEZZO-SOPRANO

HERCULANUM (FÉLICIEN DAVID)

MEZZO-SOPRANO
LE BARBIER DE SÉVILLE (ROSSINI)

LE BARBIER DE SEVILLE (ROSSINI)


TÉNOR

/
LE PÈRE GAILLARD (HENRI REBER)
TÉNOR.

LA MULE DE PÉDRO (VICTOR MASSÉ)


BARYTON
-
LA MULE DE PÉDRO (VICTOR 1\1ASSÉ)

BARYTON

RAYMOND (AMBROISE THOMAS)

BARYTON

LE TROUVÈRE (VERDI)

BASSE

HERCULANUM (FÉLICIEN DAVID)


BASSE
DU PORTAMENTO
ou

PORT DE VOIX

On appelle portamento, ou port de voix, le passage d'une note à une autre,


quel qu'en soit l'intervalle, en liant dans une seule émission toutes les notes chro-
matiques intermédiaires.
Le passage d'une note à l'autre s'effectue rapidement et sans traîner la voix (1 ).

(4) Remarque. — La traînée du son peut avoir lieu, par exception, dans certains cas particuliers;
alors le compositeur l'indique lui-même, comme l'a fait souvent Meyerbeer.

L'ÉTOILE DU NORD (MEYERBEER)


SOPRANO
Le portamento est très-utile pour égaliser la voix et lier les registres entre eux;
il adoucit le soubresaut qui résulte du changement de registre.
L'écueil du portamento est la tendance à dépasser l'intervalle des deux notes
liées et à faire entendre des notes inférieures.

Par exemple les portamenti ci-après :

sont souvent exécutés ainsi par les commençants :

L'ÉTOILE DU NORD (MEYERBEER)


SOPRANO
Il faut s'en garder avec d'autant plus de soin que cela devient vite habitude
et qu'il est rare qu'on parvienne à s'en défaire complètement.

Le port de voix de bas en haut y jj


est plus difficile que le

port de voix de haut en bas.


^ | C'est dire qu'on exécute le premier

L'ÉTOILE DU NORD (MEYERBEER)


TÉNOR

L'ÉTOILE DU NORD (MEYERBEER)


BASSE CHANTANTE

L'ÉTOILE DU NORD (MEYERBEER)


BASSE CHANTANTE
plus mal que le second. La liaison de bas en haut doit être faite plus rapidement
que la liaison de haut en bas.
L'exécution du portamento doit se faire avec beaucoup de décision. En por-
tant la voix de bas en haut, on doit augmenter légèrement l'intensité du son
jusqu'à sa résolution sur la note supérieure, qui doit être attaquée franchement
et avec fermeté ; exemple :

En portant la voix de haut en bas, on doit aussi enfler le son au milieu de la


liaison, mais il faut l'amoindrir quand il arrive à sa conclusion sur la note basse;
exemple :

L'observation des principes ci-dessus est indispensable pour la bonne exécu-


tion du portamento, en ce sens qu'elle évite précisément l'écueil que nous signalions
plus haut.
Le portamento est d'un effet très-agréable dans certains cas et l'exécution n'en
est pas d'une très-grande difficulté; cependant il serait de mauvais goût d'en abu-
ser. Nous conseillons même aux élèves de ne jamais s'en permettre dans un
morceau de chant, à moins d'indication précise.
Lorsqu'on rencontre des petites notes à la distance de plus d'un ton, il faut
les considérer et les exécuter comme des portamenti, ainsi que nous l'avons déjà dit
aux chapitres de l'appoggiature et de l'acciaccatura.
Nous ne donnons des exercices de portamento que sur l'octave. Cela doit suf-
fire quant aux principes, toutefois l'élève pourra s'exercer avec fruit sur tous les
intervalles de la gamme.
Dans l'exercice suivant, le portamento est précédé d'un gruppetto qui a pour
but de rompre la monotonie de l'exercice et de forcer l'élève à mettre en pratique
les études qu'il aura faites sur le gruppetto.
1" ÉTUDE DU PORTAMENTO.

Après avoir attaqué et soutenu la première note, on exécutera le gruppetto d'après


les indications que nous avons données à cet égard; on portera ensuite vivement le son sur
la seconde note, en liant bien et en ayant soin, nous le répétons, de ne pas faire entendre
de son en dessous.
2° EXEMPLES DE PORTAMENTO.

LA MULE DE PËDRO (VICTOR MASSÉ)


SOPRANO
-

HERCULANUM. (FÉLICIEN DAVID)

MEZZO-SOPRANO

HERGULANUM (FÉLICIEN DAVID)


MEZZO-SOPRANO

LE PARDON DE PLOËRMEL (MEYERBEER)


TÉNOR

FAUST (GOUNOD)

SOPRANO
DES SONS FILÉS

On appelle son filé un son attaqué pianissimo, enflé graduellement jusqu'à la


moitié de sa valeur, puis diminué graduellement jusqu'à l'extinction complète.
Rien ne semble plus facile, au premier abord, que d'exécuter un son filé; c'est
là cependant une des plus grandes difficultés du chant, sous le rapport de la délica-
tesse et du rini.
Le son filé résume tous les exercices relatifs à l'émission de la voix. Aussi
n'est-ce qu'après avoir fait de longues études de sons soutenus, et suivi la méthode
que nous avons indiquée, qu'on pourra entreprendre l'étude du son filé. Mais si
l'élève a eu soin de suivre rigoureusement nos enseignements, il sera tout surpris
d'obtenir immédiatement une exécution satisfaisante.
Pour exécuter un son filé, il faut d'abord prendre une respiration suffisante,
afin de n'être pas obligé de la renouveler pendant la durée du son.
Il faut ensuite attaquer pianissimo et sur une voyelle claire, puis enfler et
sombrer graduellement la voix jusqu'à ce qu'on ait atteint la moitié de la valeur de
la note; à cet endroit la voix doit être complétement sombrée et avoir acquis sa
plus grande intensité.
Dans la seconde moitié, le son doit suivre la marche contraire, c'est-à-dire
passer de la voix sombrée à la voix claire au fur et à mesure qu'il diminue d'inten-
sité, et cela surtout avec la lenteur qu'on aura observée en sens inverse dans l'exé-
cution de la première moitié. Nous insistons particulièrement sur cette recomman-
dation parce que tous les commençants ont une tendance très-marquée à presser le
diminuendo et à couper brusquement le son, au lieu de le maintenir, suivant sa
décroissance régulière, jusqu'à complète expiration.
En réalité le diminuendo n'est pas d'une exécution plus difficile que le crescendo;
il demande seulement un peu plus d'attention.
Le passage de la voix claire à la voix sombrée et réciproquement, en con-
servant l'homogénéité du son, est une grande difficulté; mais on la surmonte par
le travail. Les exercices fréquents en voix claire et en voix sombrée font naître la
voix intermédiaire que l'on appelle voix mixte et qui leur sert de liaison.
Cette liaison produit l'homogénéité de la voix. Alors toute difficulté est vaincue.
Les moyens que nous avons indiqués s'appliquent aux études. Ils se modifient
dans l'application ; ainsi dans le style dramatique on commence le son filé en voix
mixte et non plus en voix blanche.
1° OBSERVATION.

Sur les notes ré mi b mi ï JL pour les voix de soprano ;


z, 3, 3,
j o
sur les notes mt mi q fa., £ pour les voix de mezzo-
3, 3, bo ' Ço "
soprano; sur les notes wt g, fa., fa Il 3, jp 1
pour les
q n fl"
contralto ; le premier quart du son filé sera chanté en voix de tête, les deux autres
quarts seront chantés en voix de poitrine, le quatrième et dernier quart sera chanté
en voix de tête ; exemples :
On suivra les règles déjà prescrites pour la bonne exécution du son filé, c'est-
à-dire qu'on augmentera le son graduellement et qu'on le diminuera de même, en
ayant soin toutefois d'adoucir le plus possible le hoquet qui résulte du changement
de registre.

2° ÉTUDE DU SON FILÉ.

3° EXEMPLES DE SONS FILÉS.


FAUST (GOUNOD)
TÉNOR

LE PARDON DE PLOËRMEL (MEYERBEER)


BARYTON
DU GENRE CHROMATIQUE

On appelle genre chromatique le mode de succession des sons par demi-tons


ascendants ou descendants.
Ce genre est d'une exécution difficile au point de vue de la justesse, d'abord
parce qu'il fait perdre le sentiment de la tonalité, ensuite, à cause de la différence
de hauteur entre les notes, par demi-tons ascendants, et les mêmes notes, par
demi-tons descendants, qui constituent la gamme. Ainsi, contrairement à ce que
font supposer les instruments à notes fixes, tels que le piano et l'orgue, le do dièse
et le ré bémol n'ont pas le même son ; il y a entre ces deux notes un léger inter-
valle qui les distingue et qu'on appelle comma.
Le comma est la neuvième partie de l'intervalle d'un ton à un autre : si nous
supposons, par exemple, qu'un intervalle de ton soit égal à une distance que nous
indiquons par les figures suivantes ;

les subdivisions de ces figures, partagées en neuf parties égales, représenteront


autant de commas.
Or, le son d'une note diésée correspond à la cinquième subdivision ascendante,
et le son d'une note bémolisée correspond à la cinquième subdivision descendante;
de sorte qu'il y a véritablement, entre une note diésée et sa supérieure bémolisée, la
différence d'un neuvième de ton ou comma.
Par conséquent, le dièse indique que la note diésée doit être plus rapprochée
de la note supérieure qui suit; le bémol indique que la note bémolisée doit être plus
rapprochée de la note inférieure.
C'est en vertu de ce principe que l'on écrit la gamme chromatique en mon-
tant avec des dièses et en descendant avec des bémols. Voici comment on écrit la
gamme chromatique :

(1) Le sixième degré de la gamme majeure ne doit pas être altéré en montant.
(2) Le cinquième degré de la gamme majeure ne doit pas être altéré en descendant.
(3) Le premier degré de la gamme mineure ne doit pas être altéré en montant.
(4) Le septième degré de la gamme mineure ne doit pas être altéré en descendant.
Avant d'exécuter la gamme chromatique, il est nécessaire de déterminer le ton
dans lequel on se trouve ; supposons que l'on ait à exécuter les gammes suivantes :

en enlevant tous les accidents de la gamme montante, nous aurons la gamme dia-
tonique d'ut :

On chantera d'abord cette gamme pour bien établir la tonalité. On passera ensuite
à la gamme chromatique en appuyant sur les notes diésées et en portant le son vers
les notes qui appartiennent à la gamme diatonique; exemple :

En procédant ainsi on obtiendra cinq commas du do naturel au do dièse et quatre


commas du do dièse au ré naturel et ainsi de suite, pour toutes les notes qui ont une
marche identique.
Pour descendre la gamme, on procédera de même, mais en sens inverse; on
dépouillera d'abord la gamme descendante de ses bémols et l'on obtiendra la gamme
diatonique d'ut :

On chantera cette gamme pour habituer l'oreille à la tonalité; puis on attaquera la


gamme chromatique en appuyant sur les notes bémolisées avec une tendance à bais-
ser la note, ce qui est le contraire du dièse, et en portant le son vers les notes qui
appartiennent au genre diatonique :

On obtiendra ainsi cinq commas du si naturel au si bémol et quatre commas du si


bémol au la naturel, et ainsi de suite pour toutes les notes qui ont une marche
identique.
Les commençants sont instinctivement portés à faire les demi-tons de la
gamme chromatique trop étroits; il s'ensuit que lorsqu'ils arrivent au faîte de la
gamme, la note d'octave est trop basse et ne répond pas à la tonique. Notre méthode
pour l'étude du genre chromatique a pour effet de combattre ce défaut et de donner
immédiatement une exécution irréprochable, sous le rapport de la justesse.
Ce que nous. venons de dire pour les gammes s'applique à tous les passages
chromatiques que l'on peut rencontrer dans le cours d'un morceau. D'abord on se
rend compte de la tonalité du passage ou du trait chromatique, en supprimant
toutes les notes altérées accidentellement; on chante le passage ainsi dépouillé des
accidents, puis on l'exécute de nouveau tel qu'il est écrit, lentement d'abord, et en
le décomposant au besoin, par groupe de deux, trois ou quatre notes.
Le genre chromatique est d'autant plus difficile à exécuter que la tonalité est
moins facile à déterminer, et que le mouvement est plus rapide. Il convient particu-
lièrement aux chanteuses à roulade; par la flexibilité et la nature même de leur
voix, elles semblent se faire un jeu des plus grandes hardiesses et ornent leur chant
de traits chromatiques d'une extrême richesse, mais d'une difficulté inouïe.
Les compositeurs n'emploient guère le genre chromatique pour les voix
d'homme, qui, du reste, s'y prêtent peu.
1° ÉTUDE DU GENRE CHROMATIQUE.

Tous les exercices du genre chromatique devront être étudiés en martelant chaque
son, afin d'éviter la traînée qui résulterait d'une trop grande liaison.
On n'abandonnera ce qui est écrit en petits caractères que lorsqu'on sera sûr de
la justesse.
ÉTUDE DU GENRE CHROMATIQUE.
1
ÉTUDE DU GENRE CHROMATIQUE.
ÉTUDE DU GENRE CHROMATIQUE.
2° EXEMPLES DE GAMMES ET DE TRAITS CHROMATIQUES.

L'ÉTOILE DU NORD (MEYERB'EER)

SOPRANO

NORMA (BELLINI)

SOPRANO

L'ÉTOILE DU NORD (M EYERBEER)

SOPRANO
PSYCHÉ (A MBROISE THOMAS)

MEZZO-SOPRANO

PSYCHÉ (AMBROISE THOMAS)

MEZZO-SOPRANO
LE BARBIER DE SÉVILLE (ROSSINI)
TÉNOR

L'ÉTOILE DU NORD (MEYERBEER)


; ."--
BASSE
DES EXERCICES

Tous les exercices de cet ouvrage doivent être chantés non-seulement avec
les voyelles que nous avons écrites sous la musique, mais encore avec les dix-sept
sons ou voyelles (1), en choisissant surtout ceux que l'on a le plus de difficulté à
émettre.
On doit s'exercer tous les jours, mais sans excès, pour habituer graduellement
les organes à supporter la fatigue.
Pour qu'un exercice soit étudié avec fruit, il faut que l'élève l'apprenne par
cœur, afin qu'il n'ait à s'occuper que de l'émission et du mécanisme.
De même qu'il faut éviter les queues, c'est-à-dire les traînées de son sur la
note finale, il faut avoir la précaution de ne pas arrêter court après chaque phrase
et surtout de ne pas fermer la bouche.
Plus on étudie d'exercices différents, moins on apporte de perfection dans
l'exécution de chacun d'eux. Il faut donc s'attacher d'abord à exécuter bien un
nombres d'exercices restreint, sauf à entreprendre ensuite des exercices nouveaux,
mais sans négliger les premiers. En général les exercices les plus simples sont les
meilleurs ; cependant ils sont tous bons pour exercer la voix, à la condition d'être
exécutés suivant la règle.
Ce qu'il faut avant tout discerner dans un exercice, c'est la manière de l'exé-
cuter, en déterminant le mouvement qui lui est propre, et le principe sur lequel
il repose.
Les exercices qui procèdent par notes se succédant à intervalles de ton ou de
demi-ton et composés de plus de quatre notes devront être exécutés d'après les
principes de la vocalisation martelée. Ceux, au contraire, qui se composent de
brisés, c'est-à-dire de notes n'excédant pas le nombre de quatre (montantes ou
descendantes) à intervalles diatoniques ou chromatiques, doivent être exécutés
d'après les principes de la vocalisation liée.

"4) Voir au chapitre De l'Émission, page <6.


Nous avons déjà dit avec quel soin il faut s'attacher à l'exécution de la voca-
lisation liée. Cependant s'il se présente quelque passage qui dépasse ses moyens,
le chanteur devra recourir à l'exécution martelée, plutôt que de se permettre la
moindre confusion ou le moindre escamotage.
L'élève qui s'est exercé suffisamment sur toutes les voyelles n'est pas encore
capable d'aborder un morceau de chant. S'il entreprend de chanter sur des paroles,
il n'est plus maître de sa voix. C'est qu'il lui reste à faire une étude presque aussi
importante. Il apprendra à articuler les consonnes sans s'écarter des principes
qu'il a appliqués à l'aide des voyelles.
L'étude en est facile. Il suffit de reprendre les exercices en faisant précéder
d'une consonne les voyelles attaquées, puis de répéter la consonne à chaque chan-
gement de voyelle ; enfin de changer de consonnes.
Voici dans quel ordre elles devront être exercées :

L, K, N, T, D, V, F, P, B, M. Les autres consonnes S, C, R, CH, J, dont


il est question dans la deuxième partie, au chapitre de la Prononciation, seront
exercées ensuite, si on les prononce naturellement bien.
Pour arriver à une prononciation théâtrale, il est nécessaire de préparer les
consonnes comme si on devait en faire entendre deux à la fois. On
prend ainsi
l'habitude d'une articulation ferme et d'une diction magistrale.
DEUXIÈME PARTIE

THÉORIE DE L'EXÉCUTION

DU STYLE

Le style, pour le chanteur, est l'interprétation. Il ne suffit pas qu'une exécu-


tion soit correcte, il faut encore qu'elle ait la couleur et la vie. Le chanteur inter-
prète la musique suivant son caractère particulier ; de là vient la diversité des
interprétations.
Avant d'arriver à une exécution satisfaisante, il faut être maître de son
instrument, avoir étudié les grands compositeurs de toutes les écoles, comparé
leur manière et s'être pénétré des sentiments qui les ont inspirés ; enfin, il faut
étudier à fond les éléments du style.
L'exécution de la même œuvre par des sujets différents peut être parfaite
dans tous les cas, sans cependant produire les mêmes impressions. Chacun donne
à son exécution une interprétation et un cachet d'originalité qui lui sont propres
et qui constituent son style.
Tout chanteur a son style, comme tout peintre a son coloris ; par imitation
on peut obtenir une copie exacte au point de vue de la ligne, mais le coloris ne
s'imite pas. Il est nécessaire assurément d'entendre les grands chanteurs, d'étu-
dier l'émission et le mécanisme de leur voix ; mais il ne faut pas chercher à
imiter leur manière. Non-seulement on n'y parviendrait pas, mais ce qu'on en
tirerait ne vaudra jamais une exécution originale. Les grands chanteurs n'ont
jamais imité leurs devanciers, et lorsqu'ils ont eu à interpréter la même œuvre,
ils l'ont toujours fait d'une manière différente. Il ne faut pas perdre de vue que
l'exécutant a sa part de création; vouloir le nier, serait nier l'art même. Le
style ne s'apprend pas, il se forme. Le maître ne doit donc pas imposer sa
manière à l'élève, il doit le guider et lui signaler les écueils, tout en lui laissant
sa liberté.
L'élève ainsi livré à lui-même trouvera, s'il est intelligent, à tirer parti
de ses qualités et deviendra lui. Est-ce à dire qu'un chanteur d'une certaine
force n'ait plus besoin de conseils? Non, certes; le maître lui est aussi utile que
jamais. L'art du chant est tellement difficile, qu'il n'est pas un chanteur sans
défaut.
Pour bien chanter un morceau et lui donner de la couleur, il est essentiel
de le savoir par cœur. Ceux qui croient n'avoir pas de mémoire se trompent.
La mémoire est plus ou moins facile, mais les chanteurs les moins doués à cet
égard parviendront toujours, avec de la persévérance, à vaincre cette espèce
de difficulté.-
Il faut aussi connaître les ritournelles et les réponses d'accompagnement,
afin de n'avoir pas besoin de regarder la musique en chantant. La mesure
doit être battue mentalement et rien ne doit trahir les efforts de mémoire.
En résumé, le style est un composé de diverses qualités qui concourent
toutes à un même but : une interprétation rationnelle et une bonne exécution.
Ces qualités résident dans :

La prononciation,
La prosodie,
Le rhythme,
La nuance,
L'expression.
DE IJA PRONONCIATION

1" ARTICULATION.

Pour parler, on est obligé de donner à chacune des consonnes une articulation
ferme, nette et distincte. En chantant, surtout dans un vaste local, l'articulation
doit être plus ferme encore et plus marquée, sans aller néanmoins jusqu'à doubler
les consonnes, ce qui serait d'un très-mauvais effet.
Tout en gardant sa fermeté, l'articulation ne doit pas être dure. On prépare
quelquefois la consonne, lorsqu'on veut donner plus d'importance à la syllabe;
mais il faut toujours avoir soin d'articuler dans le son lui-même, c'est-à-dire sans
rien changer à la manière de le soutenir.
Une articulation vigoureuse donne beaucoup d'énergie au chant. Certains
chanteurs lui doivent leur succès.
Les mots longs exigent une articulation très-soignée; il faut accentuer de
préférence la consonne qui précède l'avant-dernière syllabe des mots à rime fémi-
nine et la consonne qui précède la dernière syllabe des mots à rime masculine.
Il est à remarquer que dans les théâtres d'opéra les femmes prononcent moins
distinctement que les hommes. Cela ne tient pas, comme on pourrait le croire, au
timbre de la voix, mais bien à l'insuffisance de l'articulation; souvent même, les
femmes rendent ce défaut plus sensible en supprimant complètement certaines
paroles d'un chant, pour les remplacer par des exclamations dont l'émission leur
semble plus facile. On comprend aisément l'inconvénient d'une telle manière; les
plus beaux airs passent à l'état de vocalises, et perdent une grande partie de leur
puissance.
Est-ce à dire que les femmes ne puissent pas articuler avec autant de netteté
que les hommes? Point du tout; avec l'étude, les femmes arrivent à une articu-
lation souvent remarquable.
2° PRONONCIATION.

On doit faire de la prononciation une étude sérieuse. Toutefois, comme ce


sujet comporte un enseignement spécial, nous ne pouvons donner ici que quelques
conseils généraux.
On sait qu'il y a deux sortes de langages : le langage familier dont on se sert
dans la conversation, et le langage académique qu'on emploie à la tribune et au
théâtre. Dans le langage familier, l'usage permet de prononcer une foule de mots
d'une façon arbitraire, et de supprimer quelquefois des liaisons qui donneraient à
la conversation une tournure prétentieuse et emphatique. Dans la diction théâtrale,
il faut être plus sévère et prononcer grammaticalement.
Quelques chanteurs, pour obtenir plus de son, altèrent sciemment la pronon-
ciation de certains mots; il s'ensuit une telle confusion, qu'il est impossible de
comprendre ce qu'ils disent.
Il peut se faire qu'on ait une bonne articulation avec une prononciation
défectueuse plus ou moins marquée; ainsi, dans le midi de la France, d'où pro-
viennent nos meilleures voix, on a une articulation généralement remarquable,
mais le plus souvent une mauvaise prononciation. Le principal défaut des méri-
dionaux consiste à substituer les voyelles ouvertes aux voyelles fermées et les
voyelles fermées aux voyelles ouvertes.
Ils prononcent: â pour a, d pour o, è pour é, et réciproquement.
Il est d'ailleurs à remarquer que les défauts de prononciation sont d'autant
plus choquants que l'articulation est plus ferme. Mais si l'on parvient à corriger
ces défauts, les qualités seules restent, et c'est une véritable métamorphose.
3° DES CONSONNES DÉFECTUEUSES.

B.

On prononce quelquefois le B d'une manière un peu dure, qui lui donne de la


ressemblance avec le P. Pour corriger ce défaut, il suffit de le signaler.

Ç et S.

Le Ç et l'S peuvent être prononcés de deux manières défectueuses.


La première vient de ce qu'on place le bout de la langue entre les dents,
comme pour le th des Anglais, et alors le sifflement nécessaire ne se produit plus.
La seconde vient de ce qu'on soulève la langue vers le palais, ce qui donne
à l'articulation le son du ch.
Ces deux défauts sont graves, mais on les corrige facilement en employant le
moyen ci-après :
Placer exactement les dents supérieures sur les dents inférieures; le bout de
la langue s'appuyant fortement contre la naissance des gencives inférieures et la
langue entière aplatie.
Quand les dents et la langue sont ainsi placées, chasser l'air vigoureusement,
et l'on obtient le sifflement ferme qu'exigent l'S et le Ç.
Cependant, le sifflement ne doit pas s'exagérer, car il produirait un effet
désagréable.

CH.

Les enfants prononcent souvent le CH comme l'S, mais il est rare que ce
défaut ne disparaisse pas avec l'âge.
Il existe encore une manière vicieuse de prononcer le CH, qui vient de ce
qu'on soulève la langue outre mesure vers le palais en ramenant la mâchoire
inférieure en arrière; l'articulation se forme alors dans l'arrière-bouche, ce qui
enlève à la syllabe CHE une partie de sa netteté et de sa sonorité.
L'articulation du CH doit avoir lieu le plus possible en avant de la bouche ;
les dents, au lieu de se crocheter, doivent être superposées comme pour l'articulation
de l'S et du C, et la langue doit être légèrement soulevée.
D et T.

Il n'existe pas, à proprement parler,


de vice de prononciation au sujet de ces
deux consonnes, mais il arrive souvent qu'on les prononce l'une pour l'autre.
Il serait superflu de rappeler que le T doit avoir une articulation dure, et que
le D doit, au contraire, être doux.
Certains chanteurs, pour donner plus de fermeté à l'articulation, prononcent le
D dur ; c'est très-désagréable et même ridicule ; ils prononcent, par exemple :

D'autres, au contraire, donnent au T la prononciation douce du D, mais cela


est plus rare.
Ils diront, par exemple :

On comprend que la prononciation de ces lettres soit facile à rectifier avec un


peu d'attention et de volonté.

G dur.

' On donne quelquefois au G devant les voyelles a, o, U-, le son du K ; l'accent


allemand a ce défaut, mais il est facile de le corriger.
J et G doux.

Le J et le G doux sont des lettres qui s'articulent avec difficulté dans le bas
âge. Les enfants prononcent ces deux consonnes soit en mettant leur langue entre
les dents, soit en leur donnant la prononciation du Z. Il est rare que ce défaut
subsiste chez les adultes.
Il serait impossible de chanter avec un défaut déjà si ridicule en parlant. Pour
l'éviter, il faut prononcer le J ou le G doux, en superposant les dents comme pour
1'5 et le C, mais en changeant la position de la langue qui, au lieu de s'appuyer
contre les gencives inférieures, doit être légèrement soulevée.

M et N.

L'articulation des consonnes nasales exige que les narines soient libres, sinon
on prononce B pour M et D pour N ; ainsi au lieu de dire Mon, on dira Bon, et au
lieu de Non, on dira Don.
Si ce défaut est l'effet d'un vice de conformation du nez, il n'est pas possible
de le corriger ; mais dans tout autre cas, on le prévient en aspirant de l'eau fraîche.

R.

L'articulation de la lettre R est d'une extrême importance dans le chant, et il


faut presque toujours en faire une étude spéciale.
Bien que l'R soit une consonne linguale, le langage ordinaire, surtout dans
certaines régions de notre pays, en réduit l'articulation à une oscillation rapide
imprimée à la luette par l'expiration de l'air; mais lorsqu'il s'agit de chanter ou de
déclamer, la prononciation de l'R doit être normale, c'est-à-dire que l'articulation
doit en être produite par une vibration du bout de la langue. Cette manière beau-
coup plus énergique a, de plus, l'avantage de ne pas fatiguer les cordes vocales,
comme le ferait la vibration de la luette.
Pour obtenir cette vibration énergique, qui ressemble à un roulement précipité,
il faut porter vivement le bout de la langue au palais près, des dents, de manière
à obtenir plusieurs battements à l'aide de la poussée de l'air.
Il en est de cette articulation de l'R comme de toutes choses dont on n'a pas
l'habitude : pour les uns elle ne présente aucune difficulté et s'acquiert, pour ainsi
dire, sans travail; mais pour les autres, c'est tout le contraire, et il n'est pas rare
que certains sujets ne parviennent qu'avec les plus grandes peines à se l'approprier.
Toutefois le travail et la volonté viennent à bout de tous les obstacles. Le pre-
mier à vaincre est l'habitude du grasseyement.

EXERCICE AYANT POUR BUT DE COMBATTRE LE GRASSEYEMENT

Répéter dix fois Be-de-le.

— - Fe-de-le.

Gue-de-Je.
— Je-de-le.
— Le-de-le.
— Me-de-le.
— Ne-de-le.
— Pe-de-le.
— Se-de-le.
— Te-de-Ie.
— Ve-de-le.

Faire des lectures à haute voix, en observant les règles suivantes


.

i0 Précédé d'une voyelle et suivi d'une consonne, prononcer l'R de le;


exemple :
Partage prononcer Pa dele tage.
Pourquoi — Pou dele quoi.
Harmonie — Ha dele monie.

2° Précédé d'une consonne et suivi d'une voyelle prononcer l'R edel; exemple:

Tradition, prononcer Tedel adition.


Trépas, — T edel épas.
Tribus — T edel ibus.
3° A la fin des mots prononcer l'R dele; exemple :

Bonheur, prononcer Bonheu dele.


Amour, — Amou dele.
Jour, — Jou dele.

k° Au commencement des mots, prononcer l'R del; exemple :

Roi, prononcer Del oi.


Radieux, — Del adieux.
Rebelle, — Del ebelle.

5° Entre deux voyelles, prononcer l'R del; exemple :

Sonore, prononcer Sono del e.


Origine, — 0 del igine.
Corriger, — Co del iger.

h° MOTS DONT LA PRONONCIATION PARAIT DOUTEUSE.

ACHÉRON.
— On prononce généralement le ch de ce mot à la française;
cependant à l'Opéra on lui donne la prononciation du K et l'on dit Akéron; nous
préférons cette dernière prononciation dans la déclamation lyrique.
AIGUILLE, AIGUILLON, AIGUISER. — L'u, doit se faire entendre dans
ces mots. Féraud et Gattel sont d'avis qu'il faut prononcer éghiser; mais Beauzée,
Restaut.. Wailly, Domergue, Lamare, Rolland, Laveaux, etïAcadémie, veulent qu'on
prononce ai-gu-i-ser : ui est prononcé rapidement, mais ru se fait entendre.
ALMANACH. — On prononce Almana; le ch ne doit pas être entendu.
AOUT. — On doit supprimer l'a dans la prononciation, on doit prononcer oilt,
en faisant entendre le t : malgré l'usage qui persiste à dire a-aût, cette prononciation
n'est pas admise.
ARSENIC. — Le c ne se prononce pas.
ASPECT. — Le t ne se prononce pas, le c doit se faire entendre.
AUXERRE, AUXERROIS, AUXONNE. — L'a? de ces trois mots se prononce
Aucerrois, Auçonne.
comme dans soixante; on dit Aucerre,
AVANT-HIER. — Le t doit se faire sentir, niais faiblement.
BAYER. -
Se prononce bé-ié. Bailler aux corneillesn'est pas admis; le verbe
Bailler est employé improprement; il faut dire bayer aux corneilles.

Molière a néanmoins employé le verbe bailler dans cette acception.

Allons, vous, vous rêvez et baillez aux corneilles. (Le Tartuffe.)

Au Théâtre-Français on prononce béié.

BIENFAISANCE, BIENFAISANT. — Dans le langage ordinaire on dit : bien-


fesance, bienfesant, mais au théâtre on doit prononcer bienfcsance, bienfèsant. (L'Aca-
démie.)
BRUXELLES. — On prononce l'x comme dans soixante; on dit Brucelles.
CERF. — On ne prononce pas l'y, mais on le prononce dans serf (esclave)
(d'après les meilleures autorités).
CHRÉTIENTÉ. Doit se prononcer chl'é-ti-in-té; il serait mauvais de dire

èhré-tiè-ne-té.
CINQ POUR CENT. — Le q doit se prononcer.
CIRCONSPECT. — Le c doit se faire entendre, on ne prononce pas le t.
COQ. - COQ d'INDE. — On prononce le q dans le mot coq employé isolément,
et on ne le prononce pas dans coq d'Inde (co d'Inde).
DÉSIR, DÉSIRER. admis au théâtre de prononcer le
— Il est généralement
premier e de ces deux mots comme un e muet. Cette prononciation est défectueuse
et prétentieuse ; les meilleurs grammairiens veulent que l'on prononce l'é aigu. Cette
dernière manière est d'autant plus avantageuse qu'elle est favorable au chant (1).
-
DIVERS. L's final doit être muet.
DOMPTER. — Le Dictionnaire de l'Académie, Catineau, Boiste, Rolland,

(4) Il semble que l'on prenne à tâche de vouloir justifier le reproche que nous font les étrangers de
rendre notre langue sourde, monotone et efféminée par la multiplication de l'e muet.

(Essai sur les voix de la langue française, par Morel, p. 41, ch. n, art. 4".)
Laveaux, sont d'avis de ne pas prononcer le p. Wailly, Gattel, Féraud, préten-
dent, au contraire, que le p doit être prononcé dans le langage soutenu.
DOUAIRIÈRE. — Il faut prononcer douarière.
ÉDEN doit se prononcer Édène d'après Féraud, l'Académie, Gattel, Wailly.
Bescherelle prétend qu'on peut prononcer E-dein ou É-dènn.
ENIVRER. — Il faut prononcer an-ni-vrer. Domergue veut qu'on prononce
a-nivrer, mais cette prononciation n'est pas admise.
EXAMEN. — On prononce généralement ce mot en donnant à l'n le son
nasal : examain.
EXEMPT. — EXEMPTION. — Le p ne se prononce point dans exempt, il se
prononce dans exemption.
FAON. — On prononce fan.
GRAMMAIRE. — GRAMMAIRIEN. On doit éviter de prononcer les deux

m de ces deux mots; ce serait prétentieux et emphatique. Dans les mots gramma-
tical et grammatiste, qui sont moins usités, il faut, au contraire, faire entendre les
deux m.
HENNIR. — HENNISSEMENT, — se prononcent hanir, hanissement.
HYMEN. — Il faut prononcer hymène; on peut aussi prononcer hymain,
mais cette dernière prononciation est moins correcte.
IMMANQUABLE.— Il faut prononcer ein-manquable. Certains auteurs pré-
tendent, contre l'usage, que les deux m doivent se prononcer.
INNOCENT. — INNOMBRABLE. — On prononce ces deux mots et leurs
dérivés comme s'il n'y avait qu'un n : i-nocent, i-nombrable.
LACS (filets).
— Le c ne se prononce point.
LAON. — On prononce Lan.
LIS (la fleur). — On prononce en faisant entendre l's final toutefois, dans
;
fleur de lis, on ne prononce pas l's.
MICHEL. — On prononce le ch à la française, comme dans archevêque.
Toutefois, dans Michel-Ange, on donne au ch le son du k; Mi-kèl-ange, comme en
italien.
-
MOEURS. L's doit être entendu; on prononce meurss.
MONSIEUR. — On prononce mo-cieu.
PAON. — On prononce pan.
PÈLERINAGE. Le second doit être muet.
— e
RESPECT. — Le c doit se faire entendre, le t est muet.
SECOND. — SECONDER.
— Dans ces deux mots et leurs dérivés, on change
la prononciation du c en celle du g; on dit segond, segonder.
SECRET. — SECRETAIRE.
— On doit prononcer se-krè, sekrétaire.
SERF. — On prononce Vf.
SHAKSPEARE ou SHAKESPEARE.
— On prononce Chèkspir.
SOLENNEL. — On prononce solanel.
SOURCIL. — Prononcez sourci.

5° DE L'ACCENT PROVINCIAL ET DE L'ACCENT ÉTRANGER

L'accent provincial est assez difficile à corriger. On ne s'entend pas soi-


même, on a besoin d'une personne qui écoute et qui signale les défauts; mais
avec l'aide du maître, on s'en délivre en plus ou moins de temps.
L'accent étranger est plus tenace; cependant, avec du travail, de la persévé-
rance et surtout un bon guide, on y parvient toujours.
C'est à Paris qu'on prononce avec le plus de pureté, de correction et d'élé-
gance; les classes les plus pauvres y ont un accent qui charme l'oreille, abstraction
faite, bien entendu, de ce qu'on appelle le langage faubourien. C'est donc la pro-
nonciation et l'accent de Paris que l'on doit prendre pour modèles.
DE LA PROSODIE

La prosodie française n'a pas de longues ni de brèves, comme les langues


anciennes. Elle a trois éléments : le rhythme, l'accent et la ponctuation.
Au point de vue musical, la prosodie consiste à suivre les accents de la poésie.
Pour qu'il y ait harmonie parfaite entre les deux arts, il faut que les éléments
de la poésie soient toujours associés aux éléments correspondants de la musique,
c'est-à-dire que le rhythme musical s'accorde avec le rhythme prosodique, que les
syllabes accentuées soient placées sur les temps forts, et enfin que les silences,
ou temps d'arrêt de la musique, correspondent à ceux de la poésie.
Le chanteur n'a rien à changer au rhythme ni à la ponctuation qui sont écrits
par le compositeur ; sa tâche consiste à accentuer les mots sur lesquels il faut atti-
rer l'attention: tels sont les verbes, les adjectifs qualificatifs, les substantifs qui font
image, ou qui expriment les sentiments passionnés.
Par suite de la difficulté d'appliquer à la musique la versification française,
les règles de la prosodie sont très-élastiques, et l'on peut dire que chaque composi-
teur a sa manière de prosodier. Il arrive même que la musique modifie ou altère
le sens des paroles lorsque la prosodie n'est pas observée avec l'esprit ou le respect
de notre langue. C'est une négligence qui doit attirer l'attention du chanteur.
En principe, on ne doit pas changer la prosodie du musicien; cependant
on peut se permettre de légers changements, afin de séparer ou de réunir,
suivant le cas, des syllabes que le rhythme, la ponctuation, auraient accouplés, ou
scindés, de manière à produire des jeux de mots, déplacés s'ils ne sont pas
prémédités.

HAYDÉE (AUBER)

TÉNOR

Il faudra placer le mot pur sur le troisième temps de la mesure et marquer


un léger silence entre les mots pur et et.
On évitera ainsi la liaison de l'r qui ferait entendre purée sans tache.

LA JUIVE (Haléty)
TÉNOR

Pour que l'auditeur n'entende pas le mot confi, qui prêterait à rire, dans un
passage aussi dramatique, il faut prononcer le mot entier, confia, ainsi que nous
l'avons écrit, sans scinder les deux dernières syllabes. Ce petit changement n'altère
en rien la mélodie.
DU RHYTHME

Nous n'avons à nous occuper ici que du rhythme appliqué au chant.


Le rhythme est représenté par la mesure et le mouvement.
Il y a, comme on le sait, des mesures à 2, 3. h et 5 temps, qui ont chacune
leur caractère et qui peuvent s'exécuter avec un mouvement plus ou moins vif.
Pour en faire sentir le rhythme, il faut appuyer sur certains temps et passer
légèrement sur les autres. Les temps sur lesquels on appuie s'appellent temps
forts, les autres, temps faibles.
Dans toute mesure le 1er temps est fort, les autres faibles. Le plus souvent
la mesure à quatre temps a deux temps forts, le 1er et le 3me ; telle est la règle.
Lorsque les compositeurs placent leur effet sur d'autres temps que les temps forts,
ce qui arrive presque toujours dans la mesure à trois temps, le chanteur doit s'en
rendre compte et le faire sentir.
Certains chanteurs, d'un mérite incontestable, contractent l'habitude de ralentir
les mouvements et de soutenir les sons outre mesure, pour faire briller leur voix.
Ce système est déplorable, car il tronque le rhythme et nuit à l'effet. Sans
s'astreindre à la sécheresse du métronome, on peut toujours exécuter la musique
avec expression en tenant compte de la valeur des notes. Avant tout, il ne faut pas
oublier que l'œuvre du compositeur doit être respectée.
Le rhythme peut exister sans la mélodie, mais la mélodie ne peut être définie
sans le rhythme. Le rhythme a donc une importance au moins égale à la mélodie.
Un défaut de rhythme est aussi grave qu'une fausse note. C'est dire que le chanteur
doit se préoccuper autant du rhythme que de la justesse. Il doit donc avoir soin
de ne pas changer la valeur des notes. Quand un compositeur a écrit une double
croche, c'est une double croche qu' il faut faire et non une croche. C'est le moyen
de conserver à la musique sa fermeté et sa carrure, qualités si remarquables dans
les œuvres des maîtres.
Il est des cas où les règles du rhythme semblent d'une application difficile. Il
peut se faire, par exemple, qu'il n'y ait pas accord entre les paroles et la musique,
c'est-à-dire que l'accent prosodique ne soit " pas sur le temps fort de la mesure.
H vaut mieux, dans ce cas, ne pas appuyer sur le temps fort,
exemple :

LA REINE DE CHYPRE (HALÉVY)


TÉNOR

On ne peut appuyer ni sur le temps fort, ni sur l'accent prosodique, sans


blesser le goût.

GUILLAUME TELL (ROSSINI)


TÉNOR

Il faut appuyer sur l'accent prosodique, qui est place sur le temps fort.
1

LALLA ROUKH (FÉLICIEN DAVID)


SOPRANO
LE PARDON DE PL0ËRMEL (MEYERBEER)

BARYTON

Exécuter les deux exemples qui précèdent tels que les compositeurs l'on
indiqué.
DES NUANCES

Le son est susceptible de modifications sous le rapport de l'intensité; il en


résulte des oppositions ou différences de forte, de piano et de timbre, qui produisent
ce qu'on appelle les nuances.
Voici les principaux signes que l'on emploie pour indiquer les nuances :

f forte Fort.
p piano Faible.
ff. fortissimo Très-fort.
pp pianissimo Très-faible.
fp forte piano La lre note forte, la 2e faible.
pro piano forte La lre note faible, la 2e forte.
sfz sforzando En forçant.
rf-, rinforzando En renforçant.
mf mezzo forte Demi-fort.
crese crescendo En augmentant.
dim diminuendo En diminuant.
smorz smorzando En éteignant.
morend morendo En mourant.
perdend perdendosi En perdant le son.
cal calando En donnant de la chaleur.
dol dolce Doux.
mez. voc mezzo voce ...... A demi-voix.
sotte voc sotto voce
....... A voix basse.

< Augmenter graduellement le son.


> Diminuer graduellement le son.
<> Augmenter, puis diminuer.

Lorsque ces signes sont négligés par les compositeurs, c'est


au chanteur d'y
suppléer, suivant ses propres inspirations.
Règle générale, lorsqu'on a deux phrases musicales semblables à exécuter
dans une courte période, sans indication de nuances, il est nécessaire d'en varier
l'exécution. Voici à ce sujet quelques exemples qui feront mieux comprendre notre
pensée :

ZAMPA (HÉR0LD)

TÉNOR

Cette phrase doit être chantée piano en voix sombrée; les sons doivent être
soutenus et l'articulation douce.

Toujours en voix sombrée, mais un peu plus piano, en donnant plus de fermeté
avec une expression entraînante.

ROBERT LE DIABLE (Meverbeer)


BASSE

Dans le plein de la voix, mais avec douceur et mélancolie, en adoucissant


l'articulation.

Dans cette seconde phrase, qui est identiquement semblable à la précédente, il


faut donner plus de force à la voix, plus de fermeté à l'articulation et exprimer un
sentiment d'affection plus prononcé.
LE CHALET (ADAM)

BASSE CHANTANTE

Voix mixte légèrement couverte ; ne porter le son en dehors que sur l'avant-
dernière syllabe du mot Helvétie; chanter piano avec une expression douce et amou-
reuse; les sons bien soutenus et liés; un léger appui sur la syllabe qui porte l'accent
prosodique; se garder d'appuyer sur l'e muet.

Augmenter légèrement le volume de la voix, l'articulation serrée; exprimer


l'enthousiasme, appuyer avec fermeté sur les accents ; passer rapidement sur l'e
muet du mot chérie.

LES MOUSQUETAIRES DE LA REINE (HALÉVY)

TÉNOR

La voix pleine et claire, l'articulation ferme, le rhythme bien accusé, la deuxième


syllabe du mot amis, forte et accentuée, sans être pointue.

La voix toujours très en dehors, mais avec une intention plus aimable; le sou-
rire sur les lèvres, l'articulation moins mordante. Préparer légèrement le b du mot
beau; le mot plaisir très-souriant; donner de l'importance au mot roi, en portant
le son vers le palais.
GUILLAUME TELL (HOSSINl)

SOPRANO

Mezzo-forle doux, soutenu et bien lié; bien articuler et accentuer le mot cœur,
faire un portamento du si au fa, en évitant toute espèce de saccade ou coup de
poitrine.

Piano, d'une voix plus claire, et articuler légèrement avec une expression amou-
reuse mélangée d'une certaine timidité. Exécuter le portamento plus lentement,
tout en évitant la traînée.

GUILLAUME TELL (ROSSINI)


SOPRANO

Dans le plein de la voix.

Pianissimo, grande opposition imitant l'écho.


LA FAVORITE (DONIZETTI)

MEZZO-SOPRANO

Voix onctueuse de poitrine; le sol qui est placé sur le mot mon peut être fait en
voix de tête avec avantage, mais il faut revenir à la voix de poitrine sur le mot
Fernand. Chanter la phrase avec abandon en liant bien.

Plus fort, avec une articulation plus marquée et avec entraînement. Chanter
toute la phrase en voix de poitrine et avec vigueur.

JOCONDE (NICOLO)
TÉNOR

La voix bien posée, les sons soutenus en voix mixte couverte; sentiment mélan-
colique et tendre.

Voix claire sur les dents, articulation douce et soutenue.


LE VOYAGE EN CHINE (FRANÇOIS BAZIN)
TÉNOR

Attaquer bien franchement le mot ange; doubler le d du mot adoré et appuyer


sur l'accend prosodique de ce mot en sombrant la voix. Sèche tes larmes : articula-
tion douce, les sons bien liés et diminuendo.

Attaque douce sur le mot plus, de la fermeté sur la première syllabe du mot
,
craintes. Ne pas accentuer le fa, sur la syllabe tes; appuyer fortement sur l'accent
prosodique lar du mot alarmes, et terminer en liant smorzando.

HAMLET (AJIBROISE THO1\1AS)

SOPRANO

La première syllabe du mot pâle en voix de poitrine et bien attaquée. Arti-


culation serrée sur le mot dort; le sol4 sur le mot sous doit être soutenu mais sans
effort, afin de conserver la justesse du son. Accentuer la seconde syllabe du mot
profonde, en sombrant la voix, expression dramatique. Voix de poitrine sur la
deuxième syllabe du mot regard; le sol sur le mot de en voix de tête, et le mi
3 3

sur mot feu, en voix de poitrine et en accentuant avec force.


le

Attaque douce sur les mots que Dieu. Articuler la première syllabe du mot
garde; soutenir avec élan le sol sur la syllabe lui, voix stridente et sombrée,
4
observer la justesse du son. Attaquer avec fermeté le mot dans. Au bord du lac bleu!
smorzando et la voix sombrée.
RAYlUOND (AMBROISE THOMAS)

SOPRANO

Articulation douce, les sons soutenus et bien liés.

Articulation plus marquée, les sons en dehors, faisant opposition à la première


phrase.

L'interprétation que nous avons donnée pour l'exécution des exemples qui pré-
cèdent n'est pas absolue ; chacun doit, en tenant compte du principe des nuances,
s'identifier avec la pensée du compositeur et approprier l'exécution à ses qualités
particulières, mais ces exemples suffiront à démontrer l'opportunité des oppositions.
Du reste, la manière dont nous faisons chanter les exercices dès les premières
études, d'abord forte en voix sombrée, puis piano en voix blanche, familiarise de
bonne heure l'élève avec ces oppositions, qui ne lui présentent, dès lors, aucune
difficulté sérieuse sous le rapport de l'exécution.
Il est à remarquer que le forte repose du piano, comme le piano repose du
forte, de même que la voix chantée se repose en parlant et que la voix parlée se
repose en chantant.
Les oppositions donnent aussi au chanteur un moyen de se ménager, car la
voix blanche repose de la voix sombrée et vice versa. — Ces ménagements sont
essentiels dans les morceaux de longue haleine.
Le crescendo doit augmenter de force graduellement et sans brusquerie jusqu'au
fortissimo. Le diminuendo s'exécute naturellement en sens inverse.
Dans les piano on peut chanter soit en voix blanche, soit en voix sombrée, et
l'on use de ces différents timbres selon que l'exigent les sentiments divers que l'on
veut exprimer. Le point essentiel est d'être entendu; c'est pourquoi il faut chanter
les piano avec beaucoup d'énergie.
Dans les grands airs qui se composent d'un récit, d'un cantabile et d'un allegro,
le récit doit être chanté dans le plein de la voix, tout en ménageant, bien entendu,
les nuances nécessaires. Le cantabile doit être chanté piano, le son soutenu et avec
des oppositions de voix, s'il y a lieu. L'allégro, qui termine, se chante forte et les
effets d'intensité doivent être d'autant plus saisissants que l'on aura chanté le can-
tabile plus piano.
Dans les duos-, trios, quatuors, et morceaux d'ensemble, il est du plus mauvais
goût qu'une voix domine les autres. C'est aux voix les plus fortes à se régler sur
les faibles, puisque le contraire ne serait pas possible.
Il peut arriver cependant que dans un morceau d'ensemble il y ait un chant
écrit pour dominer ; dans ce cas, les voix qui ne font que des parties d'accompa-
gnement doivent chanter suffisamment piano pour que le chanteur qui exécute la
partie principale ne soit pas gêné. Si cette règle n'est pas observée avec soin, la
pensée du compositeur se trouve étouffée et reste incomprise.
Le défaut que nous venons de signaler se manifeste souvent dans l'orchestre
qui accompagne un chant; mais il est moins sensible que dans un accompagne-
ment chanté.
Un chanteur ne doit jamais forcer ses moyens; s'il sait mesurer ses effets, on
l'entendra aussi distinctement dans le piano que dans le forte.
Certains artistes qui ont peu de voix croient devoir forcer cette voix lorsqu'ils
chantent dans un grand local. C'est une faute, car alors ils sont tellement préoccupés
du désir d'ètre entendus, qu'ils n'observent plus les nuances et ne font, par consé-
quent, aucun effet. De plus, ils se fatiguent et sont amenés à chevroter.
Il est rare qu'un chanteur de talent, avec une voix relativement petite, ne pro-
duise pas un grand effet, même dans un vaste local et à côté de voix plus volumi-
neuses que la sienne ; car le charme de la voix, bien plus que son intensité, com-
mande l'attention et le silence.
Le suprême de l'art n'est donc pas de se faire entendre, mais bien de se faire
écouter.
DE L'EXPRESSION'

Par le seul fait de la volonté, nous avons la faculté de communiquer à notre


voix des accents particuliers, qui sont en harmonie avec les sentiments que nous
voulons exprimer; c'est ce qui constitue l'expression (voyez notre Traité de maintien
théâtral). Mais c'est la voix qui joue le rôle principal.
A la scène le comédien doit toujours conserver toute sa présence d'esprit, quel-
serait une faute
que passionnés que puissent être les sentiments à exprimer; ce .

grave que de se laisser dominer par la fiction, sous prétexte de donner un


libre cours
à l'Inspiration ; l'interprétation ne doit rien attendre du hasard, tous les effets doivent
être calculés pour donner l'expression juste de la pensée de l'auteur.
Il faut aussi se mettre en garde contre les distractions, car alors l'expression
serait tronquée ou nulle.

DU POINT D'ORGUE

Le point d'orgue, qui s'écrit ainsi : C, indique qu'il faut prolonger la durée
de la note, ou du silence sur lequel il se trouve placé.
Quand il se rencontre sur une note, la tenue plus ou moins longue de cette note
musicale; on
ne donne pas toujours le brio désirable à la terminaison de la phrase
remplace alors la note tenue par un trait composé et exécuté suivant le style du
morceau. Ce trait prend lui-même, par extension, le nom de point d'orgue.
Lorsque les compositeurs écrivent les traits, ils le font d'une façon tellement
capricieuse qu'on n'a pas de donnée certaine sur la durée relative des notès qui les
-composent; rien n'indique, le plus souvent, la manière de phraser le trait. Aussi les
exécutants interprètent-ils les traits d'une façon tout à fait arbitraire, et il n'est pas
rare, par exemple, d'entendre exécuter des croches simples plus rapidement que
des doubles croches.
Il est vrai que les tràits peuvent être compris et exécutés de diverses manières
sans blesser le goût; certains compositeurs se bornent même à surmonter d'un point
d'orgue C la note sur laquelle il convient de placer un trait et laissent au chan-
teur le soin de le composer à sa fantaisie.

(4) Voir le Traité de l'Expression musicale, par Mathis Lussy, 1874.


Or, de deux choses l une : ou la note surmontée du point d'orgue est accom-
pagnée de son accord, ou cet accord est sous-entendu; dans le premier cas, il
faut que le chanteur soit assez musicien pour composer le trait suivant l'harmonie
de l'accord; dans le second, il faut qu'il compose le trait sans autre base que ses
propres aptitudes musicales; tout cela exige une certaine connaissance de l'har-
monie.
Lorsque le point d'orgue est placé sur un silence, on lui donne le nom de
point de repos. Comme dans le point d'orgue, la tenue du silence a une durée
arbitraire; le goût du chanteur en détermine la valeur; mais on comprend que.
ce sentiment ne peut s'acquérir qu'avec le temps.
Le point, de repos est d'une importance très-grande : il donne de l'autorité à la
déclamation lyrique et remet le chanteur et l'auditeur des fatigues d'un chant et
d'une attention trop soutenus.
Les traits d'une certaine durée peuvent être scindés par des temps d'arrêt,
pour permettre de reprendre haleine ; de même qu'il est permis, pour plus de facilité,
de faire certaines modifications ; exemple :

LES HUGUENOTS (MEYERBEER)


TÉNOR
LE BARBIER DE SÉVILLE (ROSSINI)
TÉNOR ET BARYTON

EXEMPLES DE POINTS D'ORGUE.

LE TROUVÈRE (VERDI)
SOPRANO

HAYDÉE (AUBER)
.

SOPRANO
HAÏDÉE (AUBER)
SOPRANO

LE TROUVÈRE (VERDI)
MEZZO-SOPRANO

LE PÈRE GAILLARD (HENRI REBER)


MEZZO-SOPRANO

.1 PSYCHÉ (AMBROISE THOMAS)


.
MEZZO-SOPRANO -
PSYCHÉ (AMBROISE ,THOMAS)
MEZZO-SOPRANO

LE PROPHÈTE (MEYERBEER)
MEZZO-SOPRANO

LE TROUVÈRE (VERDI)
TÉNOR

D
RAY)ION (AMBROISE THOMAS)

BARYTON
PSYCHÉ (AMBROISE THOMAS)

BASSE

LE PÈRE GAILLARD (HENRI REBER)


BASSE
DU RÉCITATIF

Le récitatif est une déclamation chantée non rhythmée, qui précède ordinai-
rement un chant mesuré. On l'écrit à quatre temps, mais on ne tient aucun compte
de la mesure.
Le récitatif doit être chanté dans le plein de la voix, largement et simplement,
en accentuant avec soin les syllabes qui portent l'accent prosodique. Il faut que la
déclamation lyrique se rapproche le plus possible de la déclamation parlée ; le chant
est d'autant plus expressif que l'accentuation est plus juste.
La façon de phraser n'étant pas déterminée par le rhythme ou le mouvement,
le chanteur reste libre; il doit réciter la poésie en chantant, comme il pourrait le
faire en déclamant. Aussi le récitatif réclame-t-il du chanteur une connaissance par-
faite de la prosodie.
Les silences qui se trouvent entre les phrases du récit ont une très-grande impor-
tance. D'ordinaire, ils sont remplis par des accords d'accompagnement; le chanteur
doit en attendre la fin et attaquer sans précipitation la phrase suivante de son réci-
tatif. Ces légers temps d'arrêt donnent de la clarté à l'exécution. On fera exception
pour les passages qui expriment la vivacité ou la colère ; en ce cas, les accords et le
chant se succèdent rapidement.
C'est dans le récitatif que l'on emploie le plus souvent J'appoggiature non écrite.
Elle est du meilleur effet et donne du lié à la phrase musicale.
Le récitatif demande une grande fermeté d'exécution ; il exige moins de fini
que le cantabile, sous le rapport du son en lui-même, mais, en revanche, il réclame
une articulation et une accentuation plus vigoureuses.
Certains passages du récitatif sont susceptibles d'être ornés; ainsi la phrase
qui précède immédiatement le chant, peut souvent supporter un point d'orgue ou
un trait.
Il faut que le chanteur soit bien sûr de lui pour ajouter ces ornements de sa
propre autorité. Nous conseillons, à ce sujet, la plus grande circonspection.
DU CANTABILE

Le cantabile est un chant mesuré, d'un mouvement lent, entre Y adagio et l'an-
dante, sans rhythme spécial ; on désigne ordinairement sous le nom de cantabile les
chants lents et doux.
Le cantabile se chante généralement piano, sans exclure néanmoins certaines
oppositions de forte; c'est dans le cantabile qu'on emploie la voix mixte avec le plus
de succès.
Le cantabile exige une délicatesse de son toute particulière et une connaissance
complète de notre art : c'est dans ce genre de musique que le chanteur pourra faire
briller son talent et se faire juger au point de vue de l'émission de la voix; il y pro-
duira de l'effet, même avec de faibles moyens vocaux.

EXEMPLES DE CANTABILE

PSYCHE (AMBROISE THOMAS)


MEZZO-SOPRANO
LE PÈRE GAILLARD (HENRI REBER)
BASSE

FAUST (GOUNOD)
TÉNOR
DES CHANGEMENTS

ou

VARIANTES NON ÉCRITES

Malgré le respect que l'on doit aux œuvres des compositeurs, il est des cas
où l'on peut s'y permettre quelques changements ; ces changements doivent être
faits avec beaucoup de discernement, de manière à laisser intact l'esprit de la com-
position et à ne pas en altérer le caractère. Ainsi, il serait du plus mauvais goût
d'intercaler des roulades dans une musique d'un caractère sévère.
Les changements sont admis, par exemple, lorsqu'un passage présente des
difficultés insurmontables d'exécution, ou bien lorsqu'il y a lieu de donner à la
mélodie une plus grande puissance, ou même enfin pour faire ressortir les qualités
d'une voix exceptionnelle.
Il est nécessaire, pour apprécier l'opportunité de ces changements, d'avoir des
notions suffisantes d'harmonie et de joindre, pour ainsi dire, au talent d'exécutant,
celui de compositeur. On comprend combien il est difficile et scabreux de modifier,
même légèrement, l'oeuvre généralement remarquable que l'on exécute. C'est dans
ces sortes de variantes que se révèlent le style et le goût du chanteur.
Les agréments tels que l'acciaccatura, l'appoggiature et le gruppetto> qui au
fond n'altèrent pas la mélodie, se prêtent aux changements, sans danger.
Lorsqu'un trait difficile est accompagné de paroles, beaucoup de chanteurs,
et surtout de chanteuses, ont une grande tendance à supprimer les paroles et à
les remplacer par l'exclamation ah! Cette façon de tourner la difficulté a les plus
grands inconvénients, notamment lorsque le même cas se présente plusieurs fois
dans un même morceau ; elle donne une monotonie insupportable à l'exécution,
sans dissimuler le moins du monde l'insuffisance de l'exécutant.
Quand une phrase musicale est trop longue sur un même mot, ce qui arrive
surtout dans les traits, il est permis de scinder la phrase et de terminer le mot
sur la note finale d'un membre de phrase; on respire après ce membre de phrase
et l'on reprend ensuite, soit sur le même mot, soit sur l'exclamation ah !
NORMA (BELLINI)

SOPRANO

Texlt*.

Variante
changement
dans les paroles

Nous sommes d'avis qu'il vaut mieux répéter deux fois le membre de phrase
le bonheur », ainsi qu'il est écrit dans la variante.
On obtiendra de cette manière plus de clarté, et l'auditeur comprendra la
phrase du poëte ; d'un autre côté, la chanteuse respirant avant de répéter le mot
« bonheur » pourra
terminer la vocalise avec d'autant plus de fermeté qu'elle
sera moins gênée par le manque de respiration.
Tous les passages analogues peuvent se plier à ces sortes de changements; loin
de nuire à l'exécution, ils la rendent plus lucide.
Dans certains passages, au contraire, il est du plus mauvais goût de scinder
la phrase, ou de remplacer les paroles par l'exclamation ah! Exemple :

LES DRAGONS DE VILLARS (1\1AILLART)


MEZZO-SOPRANO

Il arrive souvent que la chanteuse, craignant de ne pouvoir donner le si bémol


sur la voyelle muette me-, commence la phrase sur les deux premières « il m'aiJ)
et termine le chant sur la voyelle a, sans faire entendre la syllabe me. Cet
escamotage est d'autant moins excusable qu'il dissimule un défaut plus facile
à corriger. Il suffit de vocaliser sur la muette e pour arriver à émettre une note
élevée aussi bien sur cette voyelle que sur toutes les autres.
TRAITÉ
DE

MAINTIEN THÉÂTRAL

PRÉAMBULE

Beaucoup d'auteurs qui se sont occupés de l'art dramatique ont prétendu que
le geste ne s'apprend pas, et qu'en voulant établir des règles à ce sujet, on n'arrive
qu'à produire des comédiens guindés et d'un jeu prétentieux.
Il faut assurément que ces auteurs n'aient jamais assisté à une classe de panto-
mime.
Pour se convaincre du contraire, il suffit de voir un grand comédien jouer
plusieurs fois le même rôle, on constate qu'à chaque représentation il emploie
exactement les mêmes gestes et les mêmes jeux de physionomie. Ce seul fait ne
prouve-t-il pas qu'il y a dans le geste étude et convention?
Si un acteur est prétentieux et guindé, c'est lui qu'il faut accuser, et non le
système de l'étude ; il fait mal le geste parce qu'il ne l'a pas assez étudié.
Le comble de l'art c'est le naturel; mais combien peu d'acteurs ont assez
d'intuition, sinon de génie, pour s'identifier avec leurs personnages dès le début et
sans une étude assez longue ! D'autre part peut-on nier que le geste ne soit un élé-
ment capital de l'expression ? Il faut donc absolument que le geste soit étudié avec
soin ; ce n'est qu'à force d'étude qu'on parvient à faire disparaître la trace même de
l'étude et qu'on arrive au naturel.
Lorsqu'on assiste à une classe de maintien et qu'on voit plusieurs élèves rendre
la même pensée par gestes, on comprend bien vite, à la diversité des jeux, qu'il est
impossible de faire les gestes d'instinct. Il suffit de voir marcher les élèves à tour
de rôle pour sentir la nécessité d'une école. Rien n'est plus comique, en effet,
que les gestes d'instinct, et il n'est pas rare que les plus intelligents ne soient pas les
plus gracieux.
On nous objectera que bon nombre d'excellents comédiens n'ont jamais pris
de leçons de pantomime. Nous demanderons alors combien de temps il leur a fallu
pour devenir ce qu'ils peuvent être. Combien n'ont-ils pas dti observer pour créer
eux-mêmes leur talent, et que ne seraient-ils pas devenus s'ils avaient pu profiter de
l'expérience des autres ?
L'art du comédien est au théâtre ce que l'éducation est à la vie privée. Un
homme de basse condition a certainement beaucoup de peine à se mettre au niveau
d'une société bien élevée et à paraître l'égal de l'homme né dans ce milieu.
Il en est de même du comédien. Celui qui a grandi dans les coulisses trouve
son art facile et nie qu'il puisse s'apprendre ; il regarde comme un don de nature
l'avantage qu'il doit aux circonstances et aux exemples de tous les jours.
La théorie ne suffit pas, il faut pratiquer le geste, le pratiquer beaucoup.

Les élèves du Conservatoire, qui suivent assidûment la classe si utile de notre
éminent professeur M. Élie, arrivent presque sans peine, par la force des choses,
aux résultats les plus satisfaisants.
Il existe, dans la pantomime, deux points capitaux : l'exécution propre-
ment dite du geste et l'esprit du geste. Le premier s'apprend comme tous
les exercices de corps ; le second tient de la nature du sujet. Tel qui exécute des
gestes parfaits au point de vue plastique se trompe quand il s'agit d'en faire
l'application.
Livré à lui-même, ne pouvant se voir en scène, un élève ne sait s'il fait bien
ou mal : prétentieux, il croit toujours bien faire et contracte des défauts dont il ne
se corrigera jamais; modeste, il craint de mal faire même en faisant bien. Dans
les deux cas, un maître est nécessaire, ses conseils corrigent les défauts du pre-
mier, ses encouragements donnent au second la confiance qui lui manque.
Le maître développe en outre les dispositions de l'élève, il aplanit les diffi-
cultés et obtient en peu de temps des résultats que l'élève ne saurait acquérir seul.
Sans prétendre traiter d'une manière complète un sujet d'une si grande
importance et que beaucoup d'auteurs ont interprété de manières si diverses,
nous voulons poser ici quelques principes généraux qu'il est indispensable de
connaître.
DU SALUT m

On doit s'avancer à pas mesurés, le corps droit et souple, sans balancer


les bras ; la tête droite. Au moment où l'on s'arrête, les talons doivent être
rapprochés l'un de l'autre, ainsi que l'indique cette figure A B.

C'est dans cette position qu'on commencera le salut, qui se compose de quatre
mouvements.
1er Mouvement.
— Porter le pied droit vers la
droite, par une légère oblique,
B b, ce qui produit un certain écartement des jambes A b.

2me Mouvement. — Rapprocher le talon gauche du talon droit, A a.

3m" Mouvement. — Reculer le pied gauche d'un pas verticalement, a a',


pour arriver à un nouvel écartement des jambes, b a.

(1) Ce chapitre et le suivant concernent spécialement le chanteur de salon ou de concert.


4me Mouvement. — Ramener le pied droit près du pied gauche, bb'.

C'est en exécutant le troisième et le quatrième mouvement que l'on doit


s'incliner et se relever. Le corps s'incline en voûtant légèrement les épaules,
laissant tomber les bras inertes et de leur propre poids, les jambes tendues. Il
se relève au dernier mouvement bb'. Dans chaque mouvement du salut, les pieds
doivent effleurer le sol sans traîner.

SALUT DE L'HOMME.

Le salut peut s'effectuer de la jambe


gauche, mais il est plus naturel du côté
droit. La grande étiquette exige qu'on
fasse trois saluts consécutifs, un à droite,
un à gauche et le troisième au milieu,
toujours en avançant.
Les dames exécutent les trois premiers mouvements d'une manière moins
accusée ; le quatrième mouvement est double, le pied droit se portant en
arrière plus loin que a' soit en b \ et le pied gauche allant rejoindre le pied
droit comme s'il y avait un cinquième mouvement a".

Le salut de la femme comme celui de l'homme doit se faire lentement et


sans saccades ; l'inclinaison de la tête et du corps sera d'autant plus grande,
qu'on voudra marquer plus de respect.

SALUT DE LA FEMME.

On emploie le salut soit au salon, soit au concert ; d'ordinaire, il faut à peine


indiquer chaque mouvement, un salut dans toutes les règles serait prétentieux
et ridicule.
DU MAINTIEN

Quand le salut est terminé, on prend un maintien plus dégagé, en por-


tant une jambe en avant et laissant reposer le corps d'aplomb sur l'autre jambe.
Les bras doivent être pendants sans raideur ni fixité. On peut, par exemple,
ramener la main à demi fermée, vers le creux de l'estomac, tantôt la gauche,
tantôt la droite.
Il serait affreux d'accrocher les mains aux revers de l'habit ; on doit encore
éviter de mettre les mains derrière le dos ; c'est une position peu agréable à

voir et elle gêne la respiration. Au salon on a quelquefois la ressource d'ap-


puyer une main sur le piano, ce qui donne une contenance.
Les dames ne doivent pas laisser pendre les bras le long du corps ; cette
position produit une ligne droite désagréable à I'oeil ; elles peuvent ramener
soit une main, soit les deux, vers le creux de l'estomac, en croisant les poignets.
Autant le geste est utile au théâtre, autant il est ridicule au concert et au
salon; il faut donc, dans ces deux derniers milieux, s'en abstenir d'une manière
absolue. L'exception n'est admise que pour le genre comique.
La physionomie doit être calme, le regard au niveau de l'œil et au plus pro-
fond de la salle ou du salon. On ne doit pas fixer les auditeurs, il faut songer
qu'on est soi-même leur point de mire et qu'on ne doit rien faire qui puisse dis-"
traire du chant.
On doit se pénétrer des sentiments que l'on exprime, mais éviter d'exagérer
le jeu de la physionomie.

DE LA SCÈNE

La scène est établie suivant un plan incliné s'abaissant vers le spectateur; l'in-
clinaison est assez faible pour ne pas gêner la marche du comédien, toutefois pour
s'y accoutumer on a besoin de quelques exercices.
Remonter la scène signifie se diriger vers le fond du théâtre; descendre la
scène est se rapprocher de la rampe.
La scène a deux côtés qu'on appelle côté cour et côté jardin. Lorsqu'on étu-
die l'art dramatique, on doit savoir la signification et l'étymologie de ces deux
expressions.
On confond souvent le côté droit et le côté gauche de la scène suivant qu'on
se place au point de vue du spectateur ou à celui de l'acteur.
Les comédiens du Roi, qui jouaient autrefois au théâtre des Tuileries, avaient
pris l'habitude, pour éviter tout malentendu, d'appeler côté cour le côté de la scène
qui donne sur la cour du Carrousel, et côté jardin le côté de la scène qui donne sur
le jardin des Tuileries. Or, la scène étant près de la rue de Rivoli et la salle
des spectateurs à l'opposé, le côté droit de l'acteur, qui est le côté gauche
du spectateur, s'appelle côté jardin, tandis que le côté gauche de l'acteur, qui est
le côté droit du spectateur, s'appelle côté cour.
Ces expressions, dont se servaient les comédiens du Roi, furent généralement
adoptées dans tous les théâtres.
DE LA MARCHE

La marche théâtrale est une chose difficile, qui demande une étude spéciale.
On ne marche pas au théâtre comme à la ville. Il faut se tenir droit, la tête
haute sans raideur.
Le haut du corps doit se porter en avant, la pointe des pieds légèrement tour-
née en dehors/ A chaque pas, le corps conserve son impulsion en avant, de façon

qu'il n'y ait pas de temps d'arrêt. Le mouvement de la,jambe doit partir du
la jambe qui est restée
genou et non du pied, comme le font les conscrits ;
la première ; le pied reste un peu en
en arrière se rapproche légèrement de
arrière sur la pointe.
Il serait disgracieux de plier sur la jambe qui est portée en avant et de faire
de trop grandes enjambées.
Les bras doivent tomber le long du corps, la main demi-fermée, et ne se livrer
à aucun balancement comme on se le permet dans la marche ordinaire.
1
m

Dans une marche très-lente le pas se fait de la même manière, mais il faut
le décomposer. Au lieu de porter d'un seul mouvement en avant le pied qui se
trouve en arrière, il faut lui faire marquer un temps d'arrêt sur la pointe.
DE LA POSE

Le poids du corps repose sur une jambe, tandis que l'autre est placée en avant.
Cette position assure l'équilibre. Le corps est droit et ferme, sans raideur; il a de
la grâce et de l'aisance, sans mollesse ; la tête se soutient avec noblesse ; les bras
tombent naturellement le long du corps, la main demi-fermée, la paume tournée
en dedans.
Le poids du corps repose sur l'une des jambes, tandis que l'autre est reportée
légèrement en arrière, le jarret plié et la pointe du pied touchant le sol.
On s'attachera à observer les recommandations ci-dessus pour la position du
corps, de la tête, des bras et des mains. On s'exercera, en outre, à placer la
\ambe qui est en arrière plus ou moins loin, de façon qu'elle soit plus ou moins
tendue et que le pied soit plus ou moins sur la pointe. Il faut avoir soin de tenir
la pointe des pieds toujours un peu en dehors.
Ces deux. poses, que nous appellerons fondamentales, serviront à faire l'étude
du geste.
Il ne faut jamais placer les pieds sur la même ligne, surtout en rapprochant
les talons; outre que cette pose manque de solidité, elle donne le sentiment d'une
ligne droite désagréable à l'œil.

La pose suivante est peu gracieuse; elle est, il est vrai, adoptée par quel-
ques comédiens, mais le spectateur ne l'accepte que par indulgence en faveur
d'artistes qui rachètent ce défaut par des qualités exceptionnelles.
En effet, les jambes écartées et tendues, les pieds sur la même ligne, constituent
une attitude des moins nobles; elle est tout au plus admissible dans une scène
familière.
La flexion et l'écartement simultané des jambes ne peuvent être acceptés que
pour simuler la vieillesse caduque.

Quand on a pris une pose, il faut la conserver le plus longtemps possible,


sans cependant fatiguer l'œil du spectateur. Rien n'est plus désagréable au public
que ces mouvements fréquents qui font l'effet d'un piétinement. L'excès est tou-
jours un signe d'inexpérience.
Il faut avoir soin de ne pas se placer trop près de la rampe : d'abord,
l'illusion est moins grande ; la rampe éclaire trop en dessous et porte sur le haut
du visage des ombres désavantageuses ; de plus, la chaleur du gaz est suffocante
et occasionne de l'enrouement ; enfin les chanteurs qui d'habitude se tiennent près
de la rampe témoignent par cela même qu'ils ont peu de voix, et qu'ils craignent
de n'être pas entendus.
DU GESTE

Les mouvements des bras et des mains constituent le geste.


Ils complètent l'expression du sentiment et accompagnent le chant ou la
parole.
Le geste doit avant tout être gracieux. On arrive à la grâce par la simplicité.
C'est sur cette donnée que nous établirons les principes généraux du geste.
Dans le geste, la ligne trajectoire de la main doit toujours être aussi courte
que possible, de manière à ne pas donner au mouvement un caractère emphatique
et prétentieux.

La main doit être presque inerte et la paume en dedans ; ce n'est qu'à


la fin du mouvement que la main prend sa part à l'action et complète le geste
nécessaire à l'expression.
Toute espèce de contour du bras fait perdre du temps et est de mau-
vais goût. Ainsi, quand le bras fait une courbe en dedans, le geste est préten-
tieux et sans grâce, et le mouvement s'effectue avec trop de lenteur; exemple
ci-contre.
On prétendait autrefois que la main ne devait pas se lever au delà du niveau
de l'œil ; on a beaucoup modifié de nos jours ces règles trop absolues, et il n'existe
pas aujourd'hui un grand acteur qui ne se permette ce geste :

On voit que la main dépasse la hauteur non-seulement de l'œil, mais de la


tête.

Pour exécuter ce geste, le bras doit rester tendu mais sans raideur, la main
décrivant une courbe dont le centre est l'épaule. Quand le bras termine le
mouvement, la main prend de l'action et se retourne sans' brusquerie en indi-
quant le ciel. Il serait mauvais de passer la main devant la figure, c'est-à-dire que
le bras ne doit pas s'élever en dedans et la paume de la main ne doit pas être
tournée du côté du spectateur en terminant le mouvement.
Partant de la position indiquant le ciel (page 268) pour prendre une des trois
positions suivantes, la main devra parcourir les lignes tracées par des points.
Dans ces changements, le bras doit tomber naturellement et s'arrêter exacte-
ment à la nouvelle position.
Il faut remarquer que sur les mots, je le veux, la main est presque fermée,
l'index indiquant la terre, et le dessus de la main en dehors.
Sur les mots, ici même, au contraire, la main se retourne en s'ouvrant à demi,
les doigts recourbés légèrement, dans une position gracieuse, laissant voir en partie
la paume.
Il serait mauvais d'exécuter le geste comme il est indiqué à la page 269,
partant de la position Dieu. La lenteur du mouvement est de l'affectation, et rien
n'est plus gauche que de passer la main devant le visage.
La seconde planche ne diffère de la première que par la mauvaise exécution
du geste. Les positions sont les mêmes.
Lorsque le bras gauche est caché sous le pallium, il est bien -de mettre le
poignet recourbé sur la hanche, cela donne du moùvement à la draperie et de la
grâce à la pose.
-
Pour tomber à genoux, on avance la jambe qui se trouve du côté du person-
nage auquel on s'adresse et on se laisse tomber
naturellement; de cette manière,
le genou qui pose à terre se trouve toujours du côté du spectateur.

La position à genoux peut prêter au ridicule, lorsqu'on la prend gauchement


ou qu'on n'est pas bien d'aplomb ; il faut s'y préparer et surtout ne pas se précipiter.
Il est rare que l'on doive tomber à deux genoux. Ce mouvement est d'un effet
très-dramatique, mais à la condition d'être parfaitement exécuté, ce qui est très-
difficile ; il faut s'y exercer longtemps avant de le bien faire.
On doit avoir soin de ne pas croiser les mains comme dans la position sui-
vante :
-
Pour s'asseoir on place devant le siège la jambe droite si le siége est à droite,
la jambe gauche si le siége est à gauche, de manière à produire un écartement
préalable des jambes.

On se baisse sans courber les reins et l'on évile que les jambes restent sur
une même ligne et dans une position trop symétrique. L'une des jambes peut être
ramenée près du siége, tandis que l'autre reste légèrement allongée.
Il faut s'asseoir sur le bord du siége, afin que les jambes puissent opérer
facilement des mouvements s'il y a lieu. Dans le genre comique, on fait le contraire
avec succès.
Quand une femme s'assied elle doit veiller à ce que l'étoffe de sa robe ou de
son costume se drape du côté du spectateur.
. Pour boire en scène (c'est toujours dans le maintien noble que nous plaçons
le personnage), on doit tendre la coupe de toute la longueur du bras.
Quand on est servi, on fait décrire à la coupe un demi-cercle bien accusé
horizontalement; la main ne doit ni monter au-dessus du niveau de la bouche, ce
qui est emphatique, ni descendre, ce qui est trivial; le coude reste en place et

par conséquent ne se lève ni ne se serre contre la poitrine. Quand on vide la coupe,


la main et la tête opèrent seules le mouvement.

Tous les gestes, on ne saurait trop le répéter, doivent -être faits de la manière
la plus simple, la plus naturelle et sans contours inutiles. On doit pouvoir s'expliquer
pourquoi l'on a fait tel geste au lieu de tel autre. Un geste inexplicable est mauvais,
à coup sÙr.
Pour croiser les bras sur la poitrine, on applique d'abord le poing gauche
sur le pectoral droit et l'on ramène le poing de la main droite sous le bras gauche.

Il est une seconde manière plus noble de croiser les bras. Quand on a appliqué
le poing gauche sur le pectoral droit, on ramène la main droite, soit ouverte, soit
fermée, sur l'avant-bras gauche près du coude ; les bras et les mains ne doivent
pas être serrées avec contraction.
On croise les bras de la manière suivante pour exprimer un sentiment religieux :

Toute autre manière de croiser les bras est inadmissible.


Quand des passions violentes sont en jeu, il est nécessaire de faire des gestes
des deux bras; chaque geste doit avoir sa signification particulière comme dans
cette position.

La main indiquant la poitrine veut dire : moi. Le bras gauche tendu, le poing
fermé, exprime la colère, l'indignation. La position des jambes donne au corps une
attitude mouvementée. Le port de la tête et l'expression de la physionomie viennent
compléter le tableau.
Il est rare de placer les deux mains dans une position symétrique et de faire
des gestes semblables des deux mains, pour exprimer une seule pensée ; cela est
gauche et d'exécution difficile. Si la situation est très-dramatique, ces gestes doublés
ajoutent à l'action, mais pour se les permettre, il faut être bien sûr de soi.
Les gestes suivants bien exécutés sont assurément très-dramatiques, mais s'ils
sont faits avec indécision, ils deviennent ridicules.

Le premier geste indiquant le ciel se fait lentement et avec noblesse, les mains
s'élevant comme nous l'avons déjà indiqué, page 266.
Pour le changement de pose, le geste rendant cette expression : « la mort »,
doit être exécuté avec la plus grande rapidité et même avec une certaine violence.
Les mains doivent tomber perpendiculairement sans décrire de courbe; dans ce
cas, c'est le coude qui se plie légèrement ; le corps reposait sur la jambe gauche
dans la première pose, il doit se porter en avant et reposer sur la jambe droite
dans la seconde.
Tout geste en avant se fait du bras droit, si c'est le pied droit qui se trouve
en avant, et du bras gauche, si c'est le pied gauche. Le principe est inverse s'il s'agit
de gestes en arrière, c'est-à-dire, que le geste se fait du bras droit si le pied droit
est en arrière, et du bras gauche si c'est au contraire le pied gauche qui se trouve
en arrière. Toutefois, si l'on avait à faire un geste en arrière à gauche et qu'à ce
moment ce fût précisément le pied droit qui se trouvât en arrière, il faudrait, en
même temps qu'on fait le geste en arrière à gauche, porter le pied gauche en
arrière. On tient un raisonnement analogue pour le geste en arrière à droite. Faute
de se conformer rigoureusement à ces principes, on n'obtient que des gestes
gauches, contournés et pénibles.
Quand on est en scène avec un autre personnage, la jambe qui se trouve de
son côté se porte en avant et le geste est fait par le bras du même côté.

Quand on écoute, il faut garder une attitude convenable et ne pas faire


de gestes trop marqués ; l'attention du spectateur se porte naturellement sur

l'acteur qui parle ou qui chante ; si ce dernier exprime une pensée saillante, on
en profite pour faire un geste en rapport avec la situation et pour effectuer un
changement de pied qui donne un peu de repos.

Il faut s'exercer à pivoter sur les pointes et sur les talons afin de changer
de pose avec la plus grande sobriété de gestes ; mais se garder d'exagérer ce
mouvement, en le répétant trop souvent.
Le geste doit précéder la parole.
Il importe de ne faire de gestes que pour rendre l'image plus saisissante. Rien
n'est plus ridicule que d'accompagner chaque mot d'un geste, ce geste fût-il d'ailleurs
très-juste.
La mimique se règle sur les dimensions de la scène et le genre qu'on y inter-
prète. A l'Opéra, par exemple, où l'on n'entend pas toujours suffisamment les
paroles, le geste très-accentué supplée, en quelque sorte, à l'insuffisance dela voix.

DE L'ENTRÉE EN SCÈNE

La manière d'entrer en scène est d'une haute importance. Outre que la


démarche doit toujours être noble et gracieuse (sauf, bien entendu, dans les scènes
comiques), il faut apporter la plus grande attention à n'arriver à sa place défini-
tive qu'à l'instant où l'on doit commencer à chanter. Arrivé trop tôt, on est obligé
d'attendre l'orchestre ; arrivé en retard, c'est l'orchestre qu'on laisse en suspens.
DE LA SORTIE

Quand on fait face au public, il faut pour sortir de scène avoir soin de porter
en arrière la jambe qui se trouve du côté de la sortie, pivoter ensuite sur les talons
et partir de l'autre jambe. Supposons que le corps repose sur la jambe gauche A et
que la jambe droite B soit en avant ; pour sortir par le côté jardin, voici les
mouvements que l'on est obligé de faire :

1er Mouvement.
— Retirer la jambe droite B en arrière b et porter le poids
du corps sur cette jambe.

2e Mouvement. — Pivoter sur les talons

ou sur la pointe,

de façon que les pieds soient placés dans la direction de la sortie.


Ces deux mouvements doivent se faire simultanément. L'on part ensuite du
pied gauche A a.
Si le poids du corps porte sur la jambe droite et que la jambe gauche soit
en avant, pour sortir par le même côté, côté jardin, on est obligé de faire un
mouvement de plus.

icr iJJouvement.- Faire pivoter les pieds sur la pointe, de A B en a b, et faire


porter un instant le poids du corps sur la jambe gauche a.

2e JJ/ouvement.- Retirér la jambe droite b en arrière b' et reporter de nou-


veau le poids du corps sur cette jambe, b'.

Y Mouvement. — Pivoter sur les talons a a' b' b"

ou sur la pointe,

dans la direction de la sortie. L'on part ensuite du pied gauche a al.


Il va sans dire que si l'on veut sortir par le côté cour, on opère les mou-
vements en sens inverse.
On appelle faire une fausse sortie, s'arrêter, ou revenir sur ses pas, au moment
de quitter la scène.

DE LA PASSADE

La passade la plus usitée est la passade par devant. Elle consiste à passer
franchement devant le personnage avec lequel on est en scène; celui-ci doit faciliter
le mouvement en reculant d'un pas au moment opportun et venir se placer du
côté où se trouvait l'acteur qui a exécuté la passade. Ces divers mouvements
doivent s'opérer sans affectation.
La passade par derrière est moins employée. L'acteur se dirige vers le fond
de la scène, se retourne, fait un léger temps d'arrêt, qu'il occupe par un geste
quelconque; puis vient se placer de l'autre côté de son interlocuteur, qui lui-même
se déplace comme pour la passade en avant.
La passade en rond est employée plus rarement encore. Elle est d'un grand
effet sur une vaste scène, dans les situations dramatiques, au moment d'une sup-
plication par exemple. L'un des personnages se dirige vers le fond de la scène et
revient faire face au public en décrivant un demi-cercle ; l'autre personnage le
suit naturellement en exprimant par gestes sa prière. Au temps d'arrêt les acteurs
ont changé de côté. Ce genre de passade est difficile et demande à être bien exé-
cuté pour ne pas paraître gauche.
La passade a surtout pour objet de donner du mouvement à l'action et d'éviter
la monotonie d'une même position de deux acteurs à l'égard l'un de l'autre. Il faut
avoir soin de l'exécuter à propos, c'est-à-dire lorsque la situation s'y prête;
sinon il vaut mieux s'en abstenir.
CHANTER A L'ÉPAULE

Quand on est en scène avec un personnage et qu'on chante en s'adressant


directement à lui, il faut se placer un peu en arrière de manière à éviter la posi-
tion de profil à l'égard du public, c'est ce qui s'appelle chanter à l'épaule.
DES CHUTES

On ne saurait étudier avec trop de soin l'art de tomber. Toute espèce de chute
exécutée trop rapidement est mauvaise ; elle surprend désagréablementle spectateur
et lui donne une sensation pénible.

L'acteur doit se laisser choir avec une certaine grâce, de façon à ne pas
laisser craindre qu'il ne se blesse.
S'il tombait de toute sa hauteur sur le dos, il aurait beau courber la tête en

avant et présenter les omoplates, la secousse n'en serait pas moins violente, et la
tête porterait. En la supposant même exécutée avec adresse, une pareille chute
serait disgracieuse et par conséquent inadmissible.
La chute sur le côté est la plus usitée pour les hommes comme pour les fem-
mes. Il faut tomber d'abord sur un genou, puis
se laisser aller sur le côté en allon-
geant le bras, pour que la tête vienne s'y
porter sans danger.
Les hommes peuvent dans certains
cas exécuter une chute qui paraît plus

terrible. Ils commencent par tomber sur un genou,


en ayant soin que le bras du
même côté prenne en même temps un léger point d'appui à terre puis ils
; se laissent

aller en roulant sur le coude et sur les omoplates, courbant légèrement


la tête en
avant et allongeant le corps.

Il sera plus gracieux et plus convenable,


surtout pour lés femmes, de placer
le corps en diagonale la tête du côté des
spectateurs.
DE LA RITOURNELLE

Une ritournelle doit être mimée et réglée, de façon que le spectateur s'y inté-
resse quelle qu'en soit la longueur. Est-elle courte, un ou deux pas en arrière, un
geste, un regard, suffisent quelquefois pour occuper la scène ; mais si elle est longue,
l'acteur ne doit jamais oublier que le compositeur a eu une pensée en composant
cette longue ritournelle, et que la pantomime en doit rendre le sens.
C'est surtout dans les ritournelles que se révèle l'esprit du comédien.

DE LA PHYSIONOMIE

L'acteur doit composer sa physionomie par avance et lui donner le caractère


du personnage qu'il va représenter; son attitude et ses gestes doivent être en
harmonie avec elle.
Quand on est en scène, le regard doit se porter vaguement vers le fond de la
salle. Il ne faut pas fixer le public. On ne baisse les yeux que lorsque la situation
l'exige, on ne regarde en l'air fixement que dans les extases.
Il faut autant que possible faire face au public, afin qu'il ne perde rien de
l'expression du visage ; mais par cela même, il faut que la physionomie soit
toujours en action. Il serait très-mauvais d'avoir des distractions. Rien n'est plus
désagréable qu'un acteur distrait. Même alors qu'on écoute, la physionomie doit
être mobile, et si le récit est fait pour émouvoir, les- sentiments doivent se peindre
sur le visage. Comme le geste, l'expression de la physionomie doit toujours pré-
céder la parole.
La justesse du jeu de la physionomie est le comble de l'art dramatique ; il est
si difficile de ne pas tomber dans l'exagération I Il faut bien se garder des grimaces
et des contorsions, surtout ne pas oublier qu'il est plus dramatique de jouer l'émo-
tion que de la ressentir. Le miroir est indispensable pour régler le jeu de la phy-
sionomie.
Un comédien qui, pour exprimer un violent chagrin, pleurerait à chaudes larmes,
réussirait moins à émouvoir le spectateur qu'à exciter son hilarité.
L'agonie, la mort, les sentiments terribles, doivent être peints avec fidélité,
mais sans blesser le goût.
La raison exige que l'on travaille un art en toutes ses parties. L'étude for-
tifie les qualités de l'acteur et lui donne avec la conscience de son talent une confiance
et une autorité sans lesquelles il ne saurait émouvoir.
Avant d'étudier un rôle, il est essentiel de connaître l'ouvrage en son entier.
On doit étudier d'abord l'esprit des personnages avec lesquels on se trouve en scène,
puis se pénétrer de l'âge, des sentiments et des passions du personnage que soi-
même on représente. Alors on peut s'identifier avec son sujet par un langage, un
chant, des poses, des gestes, une physionomie en harmonie avec le caractère du
sujet.
C'est seulement lorsque ces détails, qui constituent un rôle, sont passés, pour
ainsi dire, à l'état d'habitude, que le comédien peut se laisser aller à ce qu'on appelle
l'inspiration.
L'inspiration, au théâtre, n'est autre chose que l'expression d'une grande
sensibilité nerveuse, don que fait la nature à certaines âmes privilégiées. En proie
à la surexcitation, l'acteur arrive à donner aux larmes et à la pâleur l'apparence
de la réalité. Il s'abandonne au point que sa volonté semble vaincue par la sen-
sibilité, et cependant il conserve assez de présence d'esprit pour se posséder et
n'oublier pas qu'il joue un rôle et qu'il est'en public.
Poussée au delà, l'inspiration serait de la folie. C'est le cas d'un acteur ro-
main qui, dans son délire, s'oublia au point d'assommer un homme en pleine scène.
Lorsqu'on arrive à donner carrière à cette effervescence de l'âme, on atteint
l'apogée de l'art, on produit des effets plus saisissants que nature.
L'étude et l'habitude rendent les jeux de physionomie tellement familiers à
l'acteur, qu'il parvient à exprimer par les yeux et les traits du visage les passions
les plus diverses de l'âme.
Les sourcils nous servent puissamment pour peindre nos passions ; les muscles
de la face et surtout ceux de la bouche jouent aussi un grand rôle dans la physionomie;
mais c'est particulièrement dans nos yeux que se peignent nos agitations intérieures,
et c'est par les yeux que nous les communiquons.
Les gestes et les mouvements du corps sont réglés d'avance et ne doivent subir
aucun changement sensible.
CONCLUSION

En résumé, la pantomime se compose de trois éléments distincts : la pose, le


geste et la physionomie. Ces trois éléments sont liés d'une manière absolue et il
doit régner entre eux une harmonie parfaite.
En matière de simple mimique, il ne faut pas accompagner chaque pensée d'un
geste, comme on est obligé de le faire dans la pantomime. Il faut, au contraire,
avoir une certaine sobriété de mouvement. Une mimique exagérée est de la cari-
cature.
Les jeunes comédiens doivent étudier les bons modèles, mais ne pas chercher
à les imiter.
Les grands rôles du théâtre moderne ont presque tous été interprétés par
plusieurs acteurs de talent; la diversité de leur jeu prouve qu'ils n'ont pas cherché
à s'imiter les uns les autres.
Toute imitation d'acteur à acteur est mauvaise ; elle tronque ou annihile les
moyens naturels des élèves, et, par la contrainte qu'ils s'imposent, les empêche
d'atteindre le degré de perfection auquel ils pourraient parvenir. D'ailleurs, lorsqu'on
veut imiter, il est rare qu'on égale le modèle ; tandis que si l'on se livre à ses pro-
pres inspirations, on arrive souvent à créer une manière plus parfaite que celle
des devanciers les mieux appréciés.
Plus un comédien approche de la vérité, plus il a d'aisance, plus la trace du
travail disparaît. Il devient créateur, comme le peintre ou le statuaire. Son visage,
son regard, ses muscles, tout en lui change d'aspect et d'expression au gré de sa
volonté.
Quand les principes généraux de la mimique théâtrale sont acquis, quand le
jeune comédien connaît à fond la pantomime et que la scène lui est devenue fami-
lière, il doit trouver en lui les moyens d'exprimer toutes les passions humaines.
Alors les conseils, sans lui être toujours inutiles, ne lui seront plus indispensables.
Tant qu'un acteur ne trouve rien par lui-même, tant qu'il a besoin d'un guide, il
n'est qu'un comédien médiocre.
L'on ne peut devenir grand acteur que si l'on a les plus précieuses qualités
de l'esprit et du cœur, c'est-à-dire si l'on joint à une haute intelligence une
profonde sensibilité. L'intelligence s'accompagne, à un degré plus ou moins pro-
noncé, d'une troisième qualité également indispensable : le don d'imitation. Ce don
a besoin d'être développé. Il faut se livrer à une observation des allures, du lan-
gage, de la tournure d'esprit, en un mot du caractère des différentes classes de
la société, afin de s'en faire facilement l'interprète. Dans le monde, l'acteur prendra
l'habitude des grandes manières. Chez le peuple, il trouvera la nature simple et
sans culture, des gestes et des jeux de physionomie qu'il n'aura même pas soupçonnés
et avec lesquels il devra se familiariser, s'il veut être complet.
Le comédien doit chercher moins à imiter un individu pris au hasard dans
une classe quelconque de la société, qu'à personnifier cette classe tout entière.
L'étude des usages chez les divers peuples est encore nécessaire, car tous n'in-
terprètent pas les mêmes sentiments de la même façon. Ainsi, pour ne citer qu'un
exemple, l'Européen se découvre et s'incline légèrement en signe de respect ; les
Orientaux restent couverts et se prosternent la face contre terre.
Les artistes qui jouent la comédie, le drame, la tragédie et la pantomime,
sont généralement meilleurs comédiens que ceux qui jouent l'opéra. Ces derniers
travaillent spécialement le chant et négligent plus ou moins la pantomime; aussi
n'est-il pas rare qu'un excellent chanteur ait un jeu insuffisant. C'est un tort d'au-
tant plus grand que la mimique adoptée dans le grand opéra et même dans l'opéra
comique, est plus difficile. Cela tient à ce qu'une même pensée demande beaucoup
plus de temps pour être chantée que pour être simplement parlée, et que les gestes
qui accompagnent le chant obligent le chanteur à étudier une plus grande variété
de mouvements conformes à la situation.
Le grand opéra offre beaucoup de ressources dramatiques; il exige une con-
naissance parfaite de la mimique théâtrale et une grande ampleur de gestes. Quelle
distinction ne faut-il pas, par exemple, pour porter convenablement le costume
des anciens, et combien peu d'acteurs sont arrivés à cette noblesse de la démarche,
de la pose, du geste et de la physionomie, si remarquable dans les œuvres de
la statuaire antique!
EXTRAIT D'UN POËME

SUR LE GESTE
PAR

LE PÈRE SANLECQUE
(1696)

Surtout n'imitez pas cet homme ridicule


Dont le bras nonchalant fait toujours le pendule;
Au travers de vos doigts ne vous faites point voir,
Et ne nous prêchez pas comme on parle au parloir.
Chez les nouveaux acteurs c'est un geste à la mode
Que de nager au bout de chaque période;
Chez d'autres apprentis, l'on passe pour galant
Lorsqu'on écrit en l'air et qu'on peint en parlant.
L'un semble d'une main encenser l'assemblée,
L'autre a les doigts crochus et semble avoir l'onglée;
Celui-ci prend plaisir à montrer ses bras nus,
Celui-là fait semblant de compter des écus.
Ici, le bras manchot jamais ne se déploie;
Là, les doigts écartés font une patte d'oie.
TABLE DES MATIÈRES

PREMIÈRE PARTIE

son....
Pages.
Conditions essentielles pour chanter 1

De la justesse 4
De l'étendue 2
Du timbre 2
De l'égalité... , 3
Du 3

VOIX DES ENFANTS 4


Classification des voix d'après la longueur et l'épaisseur des cordes vocales. 4
,
Classification des voix d'enfant 6
Des registres chez l'enfant 6
Étendue générale des voix d'enfant sans distinction de classe. 7
De la liaison des registres chez l'enfant. 7
,
De la mue 9

CLASSIFICATION DES VOIX 10


1" Des voix non cultivées 10
20 Des voix cultivées 12

DE LA RESPIRATION. 43
Exercice de respiration

DE L'ÉMISSION
«... 45

46
° Tableau des sons ou voyelles, leur émission
4
46
2° Position de la langue 47
3° De l'émission de la voix 47
4° De la voix blanche

.....................
48
5° Étude de l'émission en voix blanche 48
6° De la voix sombrée 49
Pages.
7° Étude de l'émission en voix sombrée 20
8° Des sons soutenus 21
9° Étude du son soutenu en voix blanche et en voix sombrée 23
10° De l'attaque et du martellement. 24
11, Étude de l'attaque 25
12° De la voix mixte 25
13° Du tremblement et du chevrotement 26
14° De la voix voilée 26

DES REGISTRES 27
1° Des registres chez l'homme 27
2° Du registre de poitrine chez l'homme 27
3° Du registre de tête chez l'homme 28
4° Étendue générale des registres de la voix d'homme, sans distinction de classe.... 28
5° De la liaison des registres chez l'homme 29
6° De la voix de ténor 29
7° Des registres de la voix de ténor 30
Étendue de la voix de ténor avec ses registres 30
8° Exercices pour lier les registres de la voix de ténor 31
9° De la voix de baryton 39
1 0° Des registres de la voix de baryton 39
Étendue de la voix de baryton avec ses registres 39
H° De la voix de basse. 40
12° Des registres de la voix de basse 40
Étendue de la voix de basse avec ses registres 40
1 3° Des registres chez la femme 41
1 4° Du registre de poitrine chez la femme 42
15° Du registre de tête chez la femme 42
4 6" Étendue générale des registres de la voix de femme 43
17° De la liaison des registres chez la femme 44
18° De la voix de soprano 45
1 9" Des registres de la voix de soprano 46

.
Étendue de la voix de soprano avec ses registres .'16
20° Exercices pour lier les registres de la voix do soprano 48
Exercice pour lier les registres de la voix de soprano sur une même note 49
21° De la voix de mezzo-soprano
22° Des registres de la voix de mezzo-soprano.
Étendue de la voix de mezzo-soprano avec ses registres
23° Exercices pour lier les registres de la voix de mezzo-soprano
.., 51
51
51
53
Exercice pour lier les registres de la voix de mezzo-soprano sur une même note... 54
24° De la voix de contralto 56
25° Des registres de la voix de contralto
Étendue de la voix de contralto avec ses registres
...
26° Exercices pour lier les registres de la voix de contralto
Exercice pour lier les registres de la voix de contralto sur une môme note
56
56
E8
59

DES ARPÈGES 61
Exercices d'arpèges sur l'accord parfait majeur et sur l'accord parfait mineur 62
Exercice d'arpéges sur l'accord de quinte diminuée
Exercices d'arpèges sur l'accord de septième dominante
Exercices d'arpéges sur l'accord de neuvième majeure
...........
...........
67
68
70
Pages.
Exercices d'arpéges sur l'accord de neuvième majeure sans fondamentale 71
Exercices d'arpèges sur l'accord de neuvième mineure 73
Exercices d'arpéges sur l'accord de neuvième mineure sans fondamentale 74
Exercices d'arpéges sur l'accord de septième de seconde espèce 76
Exercices d'arpéges sur l'accord de septième de troisième espèce 77
Exercice d'arpéges sur l'accord de septième de quatrième espèce 78
Exercices d'arpèges 79
Exemples d'arpèges 85

DE LA ROULADE OU DE LA VOCALISATION RAPIDE 86


1° De la vocalisation martelée 87


Exercice de martellement
Exercice de vocalisation martelée
.. 88
89
4° Exemples do vocalisation martelée 98
5° De la vocalisation liée 99
6° Exercice de vocalisation liée 100
7° Exemples de vocalisation liée 110
8° De la vocalisation détachée 111
9° Exercice de vocalisation détachée 112
10° Exemples de vocalisation détachée 128
.

DES NOTES D'AGRÉMENT OU PETITES NOTES 130


°
1 De l'appoggiature 130
2° Exemples d'appoggiatures 132
Exemples d'appoggiatures non écrites 134
3° De l'acciaccatura (ou petite note brisée) 137
4° Exemples d'acciaccatura 137
5° Exercice d'acciaccatura 141
6° Du gruppetto 146
70 Étude du gruppetto 152
8° Du trille 157
9° Du mordant 161
10° Étude progressive du trille.... 162
11° Exercice de trilles mineurs 166
12° Exercice de trilles majeurs 167
13° Exemples de trilles 168
14° Exemples de mordants 170
15° Des petits groupes 171
16° Étude des petits groupes doubles et triples 173
n° Exemples de petits groupes 183

DU PORTA}1ENTO OU PORT DE VOIX 186


1° Étude du portamento 190

,.......
2° Exemples de portamento 193

DES SONS FILÉS 493


1° Observation 194
2° Étude du son filé 195
3° Exemples de sons filés 195
Pages.
DU GENRE CHROMATIQUE 496
1° Étude du genre chromatique...... 200
2° Exemples de gammes et de traits chromatiques 209 -

DES EXERCICES
.. 242

DEUXIÈME PARTIE

THÉORIE DE L'EXÉCUTION

,
DU STYLE -214

DE LA PRONONCIATION 216
,
1° Articulation?, 216
2° Prononciation....... *

217
3° Des coœonnes 'defëctueuses 218
4° Mots dont la prononciation parait douteuse.. 222
5° De l'accent provincial et de l'accent étranger.... _ 225
*
DE LA PROSODIE ; 226

DU RUYTHME 228

DES NUANCES 231

DE L'EXPRESSION 239
Du point d'orgue *
239
Exemples de points d'orgue 214

DU RECITATIF 245

DU CANTABILE 246
Exemples de Cantabile 346
*

DES CHANGEMENTS OU VARIANTES NON ÉCRITES 148

TRAITÉ DE MAINTIEN THÉÂTRAL

Préambule 251

DU SALUT
Salut de l'homme
.... r
253
254
» - - - •
Salut de la femme.. -
255

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