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III)
Author(s): Léopold SUDRE
Source: Romania, Vol. 17, No. 65 (1888), pp. 1-21
Published by: Librairie Droz
Stable URL: https://www.jstor.org/stable/45042127
Accessed: 22-10-2020 18:17 UTC
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SUR UNE BRANCHE DU ROMAN DE RENART
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2 L. SUDRË
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SUR UNE BRANCHE DU ROMAN DE RENART J
confusion dans la branche VI, v. 745 sq. 1 : Ysengrin raconte
que Renart, en lui donnant un morceau d'anguille, l'a engagé à
contrefaire le mort et à se laisser jeter sur la charrette des
marchands de poissons, et, - détail à noter, car il a son impor-
tance, - l'épisode des charretiers est rappelé après celui de
l'ordination du loup ; quant à l'allusion à la pêche , elle figure
plus haut au vers' 667 2, comme si cet épisode n'avait aucun
rapport avec les précédents. Dans la branche IX, v. 517 ss. 3,
l'ordre des allusions est de même interverti : après la pêche
vient le vol dans la charrette, puis la tonsure. Enfin la branche
VIII, v. 135-424, mentionne un seul denos trois épisodes ,
celui de la pêche ; mais c'est une mention qui est très précieuse
pour nous, vu l'ancienneté de cette branche relativement aux
autres de la collection et la variante qu'elle nous présente. Ce
n'est plus en effet Constant des Granches, ce n'est plus un
« vavassor » avec ses veneurs, ses limiers et ses cors qui attaque
Ysengrin, mais un simple vilain avec sa massue. Ce dénoue-
ment si naïf, si peu surchargé de détails, porte la marque d'une
origine plus ancienne; cette dernière version se rapproche cer-
tainement plus de la tradition primitive du Roman de Renart
que celle de la branche IH, ou se sont introduits des éléments
de chevalerie destinés à enrichir le récit et à produire plus
d'effet.
Aucun de ces trois épisodes, ni celui du vol des poissons, ni
celui de la pêche, ni naturellement celui du loup moine, n'a
son correspondant direct soit dans les recueils des fables clas-
siques d'Esope et de Phèdre, soit dans le recueil des contes
orientaux de Pierre Alphonse, soit enfin dans le Physiologus , qui,
suivant la théorie aujourd'hui reçue, ont servi à constituer le
fonds primitif du Roman de Renart .
Pourtant le motif qui représente Renart faisant le mort pour
être jeté dans la voiture des charretiers peut sembler, au premier
abord, dérivé d'une tradition fort répandue au Moyen Age par
les Bestiaires et empruntée par eux au Physiologus . Nous
lisons en effet dans ce dernier : « 'Eàv ouv rcsivasY)
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4 L. SUDRE
I . Spicilegium Soiesinense , II
2. Martin, I, p. 234,
3. m., II, p. 234.
4. I, p. 188 et 190.
5. Ibid., p. 324 sq.
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SUR UNE BRANCHE DU ROMAN DE RENART 5
blerait un procédé tout naturel. Mais il ne faut pas, on le sait,
accorder une trop large part à l'invention dans l'œuvre de nos
« trouveurs ». Là même où ils paraissent le plus faire preuve d'ori-
ginalité, ils suivent la plupart du temps une tradition. Et c'est
le cas ici. Dans le Pantcbatantra1, dans YHitopadésa 2, non seu-
lement le chacal, mais les daims, les serpents, les poissons eux-
mêmes simulent la mort pour échapper à un danger et tromper
leurs ennemis, stratagème qui, comme le fait remarquer après
Benfey3 M. Kolmatchevsky, dans son intéressant mémoire sur
l'épopée animale chez les Slaves et en Occident 4, a été d'abord
présenté comme un moyen employé par certains animaux pour
sauver leur vie et , comme tel , répond à un fait réel , à une
observation exacte de la nature. Avec les transformations du
conte d'animaux et sous l'influence de plus en plus prépondé-
rante du chacal ou du renard pris pour type de ruse et de malice,
il est devenu un moyen de duperie, et par suite c'est ainsi qu'il
apparaît dans la fable d'Élien où la panthère fait la morte pour
prendre un singe 5, dans celle de Waldis où le chat agit de
même bien qu'il ne coure aucun danger6, dans un conte bre-
ton où le merle, pour allécher le renard, conseille au chien de
faire le mort 7. Ainsi c'est de la tradition orale que dérive direc-
tement cet emploi, si fréquent dans le roman de Renart, de ce
motif d'un animal faisant le mort, et, loin d'avoir été transporté
du goupil à d'autres animaux, c'est au contraire des autres
animaux qu'il a été transféré presque exclusivement à Renart.
Voilà déjà une raison assez péremptoire pour révoquer en doute
une influence quelconque des Bestiaires sur le récit qui nous
occupe. Il en est encore une autre plus décisive. La version du
roman de Renart d'après laquelle Renart vole des poissons aux
charretiers est la seule version littéraire que nous possédions de
ce conte; nous n'en trouvons trace ni dans l 'Ysengrimus, ni dans
i. Pantchatantra de Benfey, II, 137, 139 sq.; 242, 246-49, 333, 339.
2. Hitopadesa de Lancereau, p. 32, 142, 175.
3. Pantchatantra , I, p. 333.
4. Jivotny èpos na ņtpdie i ou Slavian. Kazan, 1882, p. 65.
5. De natura animalium, V. c. 54.
6. Aesopus von Burkhard Waldis, éd. Kurz, 1. III, f. 57.
7. Sébillot, Contes pop. de la Haute Bret., p. 333.
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6 L. SUDRE
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SUR UNE BRANCHE DU ROMAN DE RENART J
poisson, et en ramène à la maison toute une charretée. Voilà
donc qu'il revient, quand il voit une renarde étendue sur le chemin
toute recoquillée sur elle-même. Le vieux descend de sa charrette,
s'approche de la renarde, et elle ne bouge pas, elle gît comme
morte. « Voilà un beau cadeau pour la femme ! » dit le vieux ;
il prit la renarde, la jeta sur sa charrette et poursuivit sa route.
La renarde saisit le bon moment et se mit à jeter tout doucette-
ment hors de la charrette poisson après poisson. Ayant jeté tous
les poissons, elle détala. « Hé ! la vieille, dit le vieux, viens voir
le beau collet que je t'ai apporté pour ta pelisse. - Où est-il ? - Là
dans la charrette , et le poisson , et le collet ! » La femme s'en
alla à la charrette : ni collet, ni poisson; elle se mit à gronder :
« Vieux barbon ! vieux ceci, vieux cela i Et encore tu t'avises de
me tromper! » Alors le vieux comprit que la renarde n'était
pas morte : il s'affligea, mais c'était trop tard r. »
L'auteur de la IIIe branche a donc incontestablement puisé
les éléments de son récit à la source populaire, et on ne peut y
trouver rien, pour le fonds du moins, dont il soit redevable
aux Bestiaires. Pour ce qui concerne la forme, l'affirmation
doit être moins absolue. Des bestiaires français en prose et en
vers étaient alors dans toutes les mains, et il n'est pas impossible
qu'un poète ayant à décrire Renart faisant le mort ait eu d'in-
volontaires réminiscences dues à la lecture de ces ouvrages
presque classiques. Le fait est même indubitable pour une des
variantes de la branche XIV, que Méon avait insérée dans son
texte2 et que M. Martin a rejetée dans son troisième volume.
Vardille dont il est fait mention correspond bien, comme le fait
remarquer M. Kolmatchevsky, à la ruge tere de Philippe de
Thaon :
i. Afanassief, I, p. 1.
2. Méon, v. 3951.
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8 L. SUDRE
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SUR UNE BRANCHE DU ROMAN DE RENART 9
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10 L. SUDRE
douteux peut-être,
d'après les témoignag
dans l'Amérique du
ses pattes et des cr
s'empare aussi des
traire, cette donnée
le domaine de la fa
s'est pas arrêtée là
devenu complexe; i
l'introduction d'un
soit le loup, destin
que le renard a pr
figure comme pêc
exemple, où il est
d'autres renards im
qu'il a pris des pois
11 y a eu évidemm
presque toutes les
héros. De plus, le n
renard plonge sa
s'opère la pêche da
et dans un grand n
et c'est cette tradi
suite, l'on peut dir
plus ancienne que
procédé de pêche ay
de comique, le pêch
à sa queue soit un s
soit une cruche com
dans un conte italien
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SUR UNE BRANCHE DU ROMAN DE RENART II
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12 L. SUDRE
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SUR UNE BRANCHE DU ROMAN DE RENART I3
bler cette lacune, les créa avec de longues queues; mais, dans
les pâturages, elles ne faisaient que s'enibarrasser aux épines des
buissons et elles importunaient sans cesse le diable pour les
dégager : celui-ci fatigué leur coupa à toutes la queue. C'est à ce
groupe de contes qu'il faut rattacher notre épisode de la pêche
du loup. Au désir de se rendre compte de l'inégale distribution
de queues faite par la Providence a servi entre autres la légende
de l'animal qui prend des poissons dans l'eau. Tel a été l'objet
primitif du conte; mais peu à peu le motif qui était au premier
plan s'est effacé pour passer au second et même disparaître; il
n'a subsisté, par hasard, que dans une variante, exemple curieux
mais non unique de la survivance du motif original dans un
seul représentant de tout un ensemble de contes.
Les deux épisodes de la pêche et du vol des poissons dans la
charrette nous montrent donc que les auteurs du cycle animal,
clercs ou trouveurs, ne se sont pas contentés de puiser aux
sources classiques ou orientales, mais ont mis aussi à contribu-
tion les traditions populaires pour en tirer quelque trait nouveau
et original relatif aux aventures de Renart et d'Ysengrin. La
présence de l'un de ces deux récits dans 1' Ysengrimus est même
un fait à remarquer dans la littérature du Moyen Age; car il
nous montre qu'alors que les clercs s'inspiraient ordinairement
d'œuvres latines antérieures et n'étaient nourris que des souvenirs
de l'antiquité soit païenne, soit chrétienne, quelques-uns firent
exception cependant pour les fables d'animaux en ne dédaignant
pas de tirer du trésor des contes populaires de nouveaux récits
qui servirent à renouveler, à vivifier le vieux fonds grec et
oriental transmis par Phèdre et par Pierre Alphonse. Dans le
Roman de Renart , ces deux épisodes font partie de la collection
des premières branches et même, parmi elles, ils peuvent être
regardés comme fort anciens et par leur composition et aussi
l'allusion qui est faite à la pêche dans la branche VIII. Cette
influence de la tradition orale sur la formation du cycle animal
français remonte donc assez haut. D'ailleurs ce ne sont pas là
les seuls témoignages de cette influence dans notre épopée de
Renart, et j'ai entrepris d'étudier son rôle si ancien et si consi-
dérable en dégageant dans le poème français l'élément populaire
des autres éléments auxquels il est venu s'adjoindre. J. Grimm
avait déjà entrevu l'importance de cette étude, quand, dans son
Reinhart Fuchs> il rapprochait les traditions esthoniennes de
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Í4 L. SUDRE
récits français ou latins corres
n'a cessé d'appeler l'attention s
Renart avec la littérature popu
le reconnaître, dit-il dans la
appelle encore bien des recher
dont l'origine elle-même est lo
certain nombre de contes ď an
retrouvent dans la littératur
diverses, et qui sont sans dou
la tradition orale plutôt que p
appris à connaître les apologu
leurs accumulé dans ces dern
qu'a prise le Folk-Lore, tou
rendent les comparaisons plus
le livre de M. Kolmatchevsk
seconder dans ma tâche.
Entre ces deux contes popu
branche celui du loup moine
ment ecclésiastique ou plut
premier en date dans la form
plus important, puisque c'es
cycle, celui autour duquel son
tous les autres éléments.
C'est le loup, on le sait, et
personnage principal dans la p
Le rôle prépondérant qu'il jou
de satire animale au xe siècle, les
postérieurs, Sacerdos et Lupus
Nivardus, Y Ysengrimus, sont
xne siècle, il est comme le prot
allégorique des animaux. Or, s
Luparius , soit dans Y Ysengrim
comme moine. Dans YEcbas
troupeau rencontre le loup, ce
pleines d'onction :
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SUR UNE BRANCHE DÜ ROMAN ÖE RENAR!4 î$
Hujus in occursum forstrarius elicit ymnum
Moris ut est monachis, longo de calle reversis ,
« Sit sal vus, Christe, servus qui mittitur ad me.
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1 6 L. SUDRE
i. L. V, v. 345 et sq.
2. Kleinere Schriften , II, p. 270.
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SUR UNE BRANCHE DU ROMAN DE RENART I7
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1 8 L. SUDRE
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SUR UNE BRANCHE DU ROMAN DE RENART I9
était gelé. Or il n'avait pas annoncé plus haut que c'était là que
les moines prenaient leurs poissons. La soudure entre les deux
épisodes est donc imparfaite; dans 1 e Reinhart, au contraire,
elle est toute naturelle : « Les anguilles que tu as là, dit Ysen-
grin, une fois qu'il a reçu la tonsure, devraient nous être com-
munes. - Rien ne te sera refusé. Mais il n'y a plus de poisson
ici. Si tu veux aller à notre vivier, tu y trouveras des poissons
en telle quantité que personne ne peut les compter. Les frères
les y ont mis. - Allons-y, dit Ysengrin. » La mention dans le
texte français d'un noviciat, laquelle n'introduit que du vague,
semble être une addition postérieure à la rédaction primitive ,
bien qu'elle se rencontre dans tous les manuscrits. Du reste, la
maladresse de cette transition, si l'on se rappelle le peu de
concordance entre elles des allusions des autres branches, ne
s'expliquerait-elle pas naturellement par l'incertitude de la tradi-
tion primitive et par l'existence à l'origine de chaque conte à
l'état isolé? Quant à la simplicité du récit du Glichezare, il
serait facile d'en donner la raison, si l'on adoptait la théorie de
M. Martin, qui, dans ses Observations1, se range définitivement
contre J. Grimm, Fauriel, Wàckernageí et Jonckbloet, suivant
lesquels le Reinhart aurait eu pour source un original français
perdu. Selon M. Martin, le Glichezare n'a fait que raccourcir,
abréger les branches que nous possédons : « Il n'est pas permis,
dit-il, de prétendre que les détails qui ne se trouvent pas dans
son poème aient été ajoutés plus tard. » Dans le cas qui nous
occupe, le poète allemand n'aurait fait que rendre simple ce qui
était obscur chez le poète français ; cette nécessité du noviciat qui
embrouillait la suite des idées, il l'aurait supprimée, donnant
ainsi plus de naturel et une allure plus vive à l'ensemble du
récit.
Mais il est un point où cette théorie de M. Martin semble
être en défaut, c'est la présence dans la branche française du récit
du vol des poissons précédant immédiatement la rencontre de
Renart et d'Ysengrin et le « moniage » de ce dernier. Pourquoi
l'auteur du Reinhart aurait-il laissé ce récit de côté ? L'aven-
ture est piquante, originale; en outre elle éclaire fort bien l'épi-
sode de la pêche, en nous indiquant comment Renart se trouve
I. P. 106 sq.
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20 L. SUDRE
en possession des po
grin. Une telle lacun
ce conte dans l'orig
cet original était cer
branches que nous p
sodes (moniage, pêc
Birtin qui, dans le t
des Granches, et l'al
la branche VIII, qui
prouvent bien en fa
rente de celle que no
Maintenant est-ce
sommes redevables de l'idée de mettre ces deux contes en
dépendance ? Il est probable que non. Car il est rare de rencon-
trer l'épisode de la pêche à l'état isolé dans la littérature popu-
laire : il est toujours précédé de quelque autre aventure ayant
trait soit au renard seul, soit au renard et au loup. Or, chose
remarquable, c'est le conte des charretiers qui précède le conte
de la pêche dans un grand nombre de variantes. « L'épisode des
charretiers particulier à la variante (de Moutiers-sur-Saulx) , dit
M. Cosquin 3, se retrouve dans un conte allemand de la marche
de Brandebourg (Kuhn, Maerkische Sagen , p. 297). Dans ce
conte, le renard s'y prend absolument de la même manière que
dans notre variante pour voler un charretier qui conduit une
voiture chargée de barils de poissons salés. Le loup, ayant vu
ensuite le renard en train de manger ces poissons, lui demande
où il se les est procurés. Le renard lui dit qu'il les a péchés dans
tel étang. Suit l'histoire de la pêche. Quand la queue du loup
est bien gelée, le renard attire du côté de l'étang les gens du
village voisin, qui tombent sur le loup à coups de bâton et de
fourche. Le loup y perd sa queue. Mêmes aventures et même
enchaînement des deux épisodes dans un conte esthonien où
l'ours tient la place du loup (ič. Fuchs , p. cclxxxv), dans un
conte russe (Léger, n° 28), dans un conte wende de la Lusace,
un peu altéré (Haupt u. Schmaler, W endische Sagen , II, p. 166),
dans un conte français de la Bresse ( Contes des provinces de
France , n° 65), altéré aussi, et dans un conte du grand-duché
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SUR UNE BRANCHE DU ROMAN DE RENART 21
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