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Texte 1 

:
Edmond Dantès, trahi, dénoncé comme conspirateur bonapartiste, est enfermé
au château d’If. Il y devient ami avec le vieux Faria, qui lui révèle l’existence d’un
trésor avant de mourir. Pour s’évader, Dantès prend la place de ce dernier dans le
sac dans lequel était cousu son cadavre.
Dantès étourdi, presque suffoqué, eut cependant la présence d’esprit de retenir
son haleine, et, comme sa main droite, ainsi que nous l’avons dit, préparé qu’il était à
toutes les chances, tenait son couteau tout ouvert, il éventra rapidement le sac, sortit
le bras, puis la tête; mais alors, malgré ses mouvements pour soulever le boulet, il
continua de se sentir entraîné ; alors il se cambra, cherchant la corde qui liait ses
jambes, et, par un effort suprême, il la trancha précisément au moment où il
suffoquait; alors, donnant un vigoureux coup de pied, il remonta libre à la surface de
la mer, tandis que le boulet entraînait dans ses profondeurs inconnues le tissu
grossier qui avait failli devenir son linceul.
Dantès ne prit que le temps de respirer, et replongea une seconde fois ; car la
première précaution qu’il devait prendre était d’éviter les regards.
Lorsqu'il reparut pour la seconde fois, il était déjà à cinquante pas au moins du
lieu de sa chute ; il vit au-dessus de sa tête un ciel noir et tempétueux, à la surface
duquel le vent balayait quelques nuages rapides, découvrant parfois un petit coin
d’azur rehaussé d’une étoile ; devant lui s’étendait la plaine sombre et mugissante,
dont les vagues commençaient à bouillonner comme à l’approche d’une tempête,
tandis que, derrière lui, plus noir que la mer, plus noir que le ciel, montait comme un
fantôme menaçant, le géant de granit, dont la pointe sombre semblait un bras étendu
pour ressaisir sa proie ; sur la roche la plus haute était un falot éclairant deux
ombres.
Il lui sembla que ces deux ombres se penchaient sur la mer avec inquiétude ; en
effet, ces étranges fossoyeurs devaient avoir entendu le cri qu'il avait jeté en
traversant l'espace. Dantès plongea donc de nouveau, et fit un trajet assez long
entre deux eaux ; cette manœuvre lui était jadis familière, et attirait d’ordinaire autour
de lui, dans l’anse du Pharo, de nombreux admirateurs, lesquels l’avaient proclamé
bien souvent le plus habile nageur de Marseille.
Lorsqu’il revint à la surface de la mer, le falot avait disparu.

Dumas, Le Comte de Monte-Cristo, I-21 (1844)


Le Comte de Monte-Cristo est un roman d’aventures du XIXe siècle qui raconte l’incarcération de Dantès
dans la prison du château d’If, puis la vengeance de cet innocent injustement déclaré coupable. L’un des
épisodes les plus emblématiques de cette fresque épique est l’évasion du héros. Enfermé dans un sac dans
lequel il a pris la place d’un cadavre pour fuir, sac jeté à la mer par ses gardiens, l’intrépide héros parvient à se
libérer et à gagner le large.
Je vais maintenant procédes à la lecture du texte à haute voix.
LECTURE……………………….
Mon projet de lecture sera d’expliquer comment cette scène romanesque d’évasion fait du
prisonnier marginal, un héros ?
J’organiserai mon explication linéaire du passage en 2 étapes : d’abord, le premier paragraphe au cours
duquel Dantès parvient à « s’extraire de la prison du sac » cousu, puis, les quatre paragraphes suivants au
cours desquels il réussit à « fuir la prison de la mer ».

I – Tout d’abord, le premier paragraphe évoque les difficultés de Dantès pour « s’extraire de la prison
du sac » :
Le passage s’ouvre par une évasion spectaculaire et haletante : la libération de la prison, symboliquement
représentée par le sac cousu. Les actions se succèdent sur un rythme très rapide avec de nombreux verbes
d’action au passé simple « il éventra », « sortit les bras », « il se cambra », « il trancha la corde », « il remonta
libre à la surface de la mer ». Son « couteau » symbolise d’ailleurs sa lutte farouche contre l’adversité.
Les marqueurs d’opposition « Dantès étourdi, presque suffoqué, eut cependant la présence d’esprit de
retenir son haleine » ou « malgré ses mouvements pour soulever le boulet » ainsi que les hyperboles « par un
effort suprême » et le registre épique « il continua de se sentir entraîné » ou « il la trancha précisément au
moment où il suffoquait » contribuent à dramatiser le récit. En effet, Dantès frôle la mort et il manque toujours de
peu de succomber. Il est présenté comme un héros extraordinaire qui parvient systématiquement à faire face,
avec courage, à l’adversité. Il ne peut que susciter l’admiration du lecteur.
Dans cette scène de suspense intense, le lecteur partage les émotions du personnage grâce au récit rendu
à travers un point de vue interne : « Dantès étourdi, presque suffoqué, eut cependant la présence d’esprit de
retenir son haleine ». Il souhaite sa réussite avec empathie tout en ignorant comme lui l’issue de ces épreuves :
« malgré ses mouvements pour soulever le boulet, il continua de se sentir entraîné »
Enfin, le paragraphe se termine sur le mot « linceul » qui appartient au lexique de la mort pour rappeler que
Dantès a échappé de peu à la mort. Le héros aurait pu se noyer et mourir prisonnier du sac de toile cousu. Cette
scène d’aventure romanesque est donc très spectaculaire et palpitante. Maintenant dans un univers liquide,
Dantès, le héros, vient de renaître.

II – J’en viens à la seconde partie consacrée à la détermination de Dantès pour fuir la prison de la
mer :
Les négations lexicales « replongea » (ne pas se faire remarquer), « éviter les regards » (ne pas être vu),
« plongea de nouveau » (être invisible) insistent sur les très nombreux efforts faits par le personnage pour se
dissimuler à les surveillance des geôliers. Le vocabulaire de l’éloignement et de la disparition « fit un trajet assez
long », « le falot avait disparu ». Il doit absolument fuir la prison du château d’If le plus loin possible.
Mais à travers des symboles, une lueur d’espoir semble apparaître à l’horizon, au cœur de la tempête
« un ciel noir et tempétueux, à la surface duquel le vent balayait quelques nuages rapides, découvrant parfois
un petit coin d’azur rehaussé d’une étoile ». Le succès devient enfin possible malgré les très nombreux
obstacles.
Par ailleurs, le registre épique est omniprésent avec des répétitions, des anaphores « plus noir que la mer,
plus noir que le ciel » ou des comparaisons par exemple « comme un fantôme menaçant », « la pointe sombre
semblait un bras étendu » ou des métaphores « le géant de granit » « ressaisir sa proie ». Ces procédés
évoquent l’héroïsme de Dantès, un personnage qui se bat avec un courage surhumain contre des éléments
démesurés dans un combat aux allures presque mythologiques. Dantès, héros sublime, dantesque, porte bien
son nom.
De plus, un retour sur son passé glorieux valorise Dantès « cette manœuvre lui était jadis familière, et
attirait d’ordinaire autour de lui, dans l’anse du Pharo, de nombreux admirateurs, lesquels l’avaient proclamé bien
souvent le plus habile nageur de Marseille ». L’analepse vient rappeler que Dantès n’a pas changé, il est resté le
même homme admirable et admiré malgré son long séjour en prison.
Enfin, l’antithèse entre l’ombre avec les expressions « un ciel noir », « la plaine sombre », « plus noir que le
mer », « la pointe sombre » et la lumière avec « un falot », « une étoile », « le falot » fait que ce héros marginalisé
par l’injustice, ce prisonnier, ce paria, seul dans l’obscurité de sa cellule en prison, seul maintenant dans la mer
va se frayer un chemin vers la lumière, la vengeance et la véritable liberté. Alors, Dantès se retrouve seul au
milieu de la mer et de la nuit mais une lueur d’espoir apparaît symboliquement dans le ciel. La bonne étoile de
Dantès et ses talents de nageur lui permettront probablement de rejoindre la terre ferme et d’être libre

En conclusion et pour revenir à mon projet de lecture qui était : comment cette scène romanesque
d’évasion fait du prisonnier marginal, un héros ? Je dirai que
Cette scène d’aventure romanesque est spectaculaire et palpitante. En effet, Dantès, le héros, vient de
renaître.
Sa bonne étoile, sa détermination et ses talents lui permettront probablement de rejoindre la terre ferme et
d’être libre, enfin.

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