Vous êtes sur la page 1sur 2

Sido texte 5

INTRODUCTION :
Colette est une écrivain majeur du XXème siècle. Son œuvre, Sido, est une prose poétique qui célèbre la nature et le
paradis de l’enfance. En 1929, à 56 ans, Colette publie Sido ou les points cardinaux, un texte dédié à sa mère auquel
elle ajoute en 1930 deux textes « Le Capitaine », son père, et « Les Sauvages », ses frères composant ainsi la version
définitive intitulée Sido. Étant devenue une trilogie familiale et étant une autobiographie dans laquelle la figure
maternelle domine. L’auteur a donc un regard rétrospectif sur l’époque de ses 8-12 ans où elle vit encore avec ses
parents en Bourgogne dans une maison possédant un magnifique jardin. Dans ce passage il s’agit d’une promenade
matinale dans la nature.

LECTURE PUIS PROBLÉMATIQUE AVEC MOUVEMENTS :


Nous verrons comment l’évocation de l’enfance se traduit ici par une communion extasiée avec la nature en analysant
l’échappée de Colette dans la nature de la ligne 1 à 13, la relation mère-fille de la ligne 14-18 et le retour de la
promenade de la ligne 19 à la fin.

I. L’échappée de Colette dans la nature l. 1-13 :

Le texte s’ouvre par une invocation lyrique marqué par un rythme ternaire. L’anaphore d’« étés » à la ligne 1,
au pluriel montre que Colette raconte des évènements, des expériences qu’elle a souvent vécue. La présence
de rimes antérieurs en « é » et l’allitération en « r » : « étés réverbérés par le gravier jaune et chaud, étés
traversant le jonc tressé de mes grands chapeaux, étés presque sans nuits » rendent cette première phrase du
texte chantante. Des « étés presque sans nuits » est une démultiplication du temps faite de manière onirique.
C’est une sorte de magie. Cette première phrase est une incantation remarquable par les points de suspension,
le manque de verbe et par le lyrisme. Chez Colette il y a une primauté des sensations, elle a un contacte
charnel avec la nature visible avec « gravier jaune et chaud », la chaleur qui traverse son chapeaux « étés
traversant le jonc tressé de mes grands chapeaux ». C’est une auteur qui a l’art d’esquissé un tableau charmant
ainsi qu’une silhouette d’enfant. C’est un texte très pictural et est comme un tableau d’impressionniste.
L’adverbe intensif « tant » et l’adverbe « déjà », mis en relief entre les virgules, à la ligne 2 permettent de
suggérer que l’aube est une fascination qui date de l’enfance de son enfance et qui durera toute sa vie. Le mot
« aube », ligne 2, vient du latin ALBA et signifie la blancheur, la pureté. De plus il y a un lien indissociable
entre la mère, Sido, et l’aube qui est un cadeau non seulement de la nature mais de la mère qui est vu comme
une divinité bienfaisante offrant le monde à sa fille comme en témoigne la métaphore de la « récompense » à
la ligne 3, un terme enfantin et généralement matériel ne l’est pas ici. L’évocation du départ matinal par une
précision temporelle « trois heures et demie » (l.3), l’heure à laquelle Sido réveille sa fille, montre que sa mère
exerce une éducation hors norme ce qui est relativisé par l’affirmation d’une complicité entre elles
« j’obtenais d’elle » à la ligne 3. Dans une ample phrase, de la ligne 2 à 6, nous pouvons voire que Colette fait
de l’humour puisqu’elle décrit sa promenade matinale comme une exploration lointaine, une conquête visible
par « je m’en allais » (l.4) et par l’anaphore de « vers » aux lignes 4 et 5, alors que sa destination semble
anodine « terres maraîchères » qui est un lieu où on cultive des fruits et légumes. Colette humanise,
personnifie la nature « se réfugiaient » à la ligne 5, ce qui donne l’idée que la nature se cache par souci de
tranquillité, qu’elle est réservée aux initiés. Le groupe ternaire final montre le but de l’expédition : la
cueillette. La précision des fruits qui sont à portés d’enfant donnent un camaïeu gourmand dans les tons
rouges. Leur pluriel « les fraises », « les cassis », « les groseilles barbues » souligne l’abondance de ses fruits
et montre que la nature est généreuse et nourricière. L’écrivain refait de l’humour en personnifiant à nouveau
la nature « groseilles barbues » à la ligne 6. Elle donne l’idée d’un visage, d’une pellicule sur les fruits, d’un
duvet doux au toucher ou d’une sensation sur la langue. « A trois heures et demie », l.7, est une reprise de la
notation temporelle soulignant le caractère exceptionnel de ce moment. Le groupe ternaire « tout
baignait », « originel », « humide et confus » à la ligne 7 présente la nature comme un univers fœtal, le monde
utérin, d’avant la naissance. Colette assiste donc à la naissance du monde. « Bleu humide », l.7, est une
synesthésie qui relie la vue au toucher permettant ainsi un mélange de sensation. Il y a également une alliance
de couleurs douces, feutrés « bleu », « sables, « brouillard ». Le brouillard forme une sorte de cocon
protecteur. L’auteur est en symbiose avec la nature comme en témoigne le mouvement ascendant et successif
du brouillard qui s’élève progressivement : « d’abord », « puis », « atteignait » tous à la ligne 9, c’est comme
si on assistait à un mouvement cinématographique allant de bas en haut, des jambes aux narines. Le brouillard
crée ici une ambiance mystérieuse, vaporeuse. Il y a l’idée que Colette se laisse envelopper par le brouillard.
Elle réussit à créer une vision onirique d’une osmose parfaite avec l’allusion à la composition du brouillard
qui est de la vapeur d’eau. De la ligne 7 à 10, les éléments primordiaux sont la terre, l’eau, l’air, le feu. Colette
fait une approche sensorielle de la nature en créant une sensation tactile de ce « bain » dans le brouillard. Dans
ce texte tous les sens sont présents et ont une place importante sauf l’ouïe, présent une seule fois et à la fin du
texte. Elle décrit un bonheur purement physique. Les points de suspensions sont assez présents comme si elle
voulait prolonger la rêverie. L’écrivain rappelle son âge « mon petit torse bien fait » à la ligne 9 qui désigne
soit la beauté de l’enfance soit la beauté perdue de la femme vieillissante « j’étais peut-être jolie » (l.16). A la
ligne 10, il y a la primauté de l’odorat, Colette hume constamment la nature. La phrase courte de la ligne 10 à
11 met en relief le dynamisme de la marche, l’orgueil de la solitude « j’allais seule », ce qui rappelle Rimbaud
« je m’en allais ». D’ailleurs, Colette ne parle jamais d’enfants qui auraient été ses ami(e)s. Elle fait de
l’humour, elle se moque, dans sa phrase avec « mal pensant » à la ligne 10-11. Sido qui est donc mal vu par un
village rempli de préjugés puisqu’elle elle est dite trop libre et qu’elle « bannissait les religions humaines ».
Elle fait une antithèse avec « mal-pensant » et « sans danger » qui est une critique de l’insouciance
irresponsable de sa mère qui laisse sa fille se promener seule à l’aube. L’anaphore du démonstratif « c’est »,
l.11-13 et du démonstratif mélioratif « ce » montre un désir de faire ressurgir le souvenir. La phrase ample
lyrique, musical et ayant un rythme ternaire crée un contraste avec la précédente phrase. Colette possède
l’orgueil d’être unique « mon prix » à la ligne 12 qui a toujours été considéré par Sido comme « précieuse ».
Dans Les Vrilles de la vigne Colette affirme avoir perdu son « bel orgueil », la secrète certitude d’être une
enfant précieuse et de n’être devenu qu’une femme. « État de grâce indicible » montre qu’elle est très extasiée
ce qui est souligné par l’allitération en « s ». Son extase renvoie au sacré avec « grâce ». La présence du
vocabulaire de l’éveil du monde, de la naissance « premier souffle », l.12-13, « l’oiseau », l.13, « soleil encore
ovale », l.13 ce qui est une image de l’œuf primordial. Le soleil est ici comparé à un œuf qui est un mot
venant du latin « ovum » cependant dans la mythologie égyptienne le soleil est un œuf d’or. Le monde est
fécondé par le soleil. Colette assiste donc bien à la naissance du monde et dit même « Plus que toute autre
manifestation vitale, je me suis penchée, toute mon existence, sur les éclosions. Le monde m’est nouveau à
mon réveil chaque matin, et je ne cesserai d’éclore pour cesser de vivre ».

II. La relation mère-fille l. 14-18 :

Vous aimerez peut-être aussi