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Mouvements du poème
Premier quatrain : un décor paradisiaque assorti d’une légère inquiétude
Deuxième quatrain : le portrait d’un jeune soldat...endormi ?
Premier tercet : l’ombre de la mort
Dernier tercet : la réalité tragique
Le paysage naturel, fait de lumière et de couleurs bleue et verte, est charmant et encadre
paisiblement le jeune soldat : : sous lui « le frais cresson bleu », « le lit vert » , au-dessus de lui « la
nue ». Le verbe « pleuvoir » est normalement impersonnel, mais Rimbaud l’utilise de manière très
poétique en lui donnant un sujet : la lumière pleut. Comme si la Nature avait une volonté propre :
elle ne peut pas être impersonnelle. La lumière est comparée à la pluie : on peut l’entendre et la
toucher, exactement comme les rayons qui moussent... le fait de mélanger ainsi les perceptions
s'appelle la synesthésie.Tout au long du quatrain, l’allitération en L semble imiter cette pluie de
lumière qui tombe. L’herbe, couverte d’eau argentée au premier quatrain, est devenu un lit, or on
parle bien du lit de la rivière : le dormeur est comme noyé dans cette nature liquide.
Le verbe « dort » placé en rejet comme « d’argent » au premier quatrain, crée une sorte d’écho avec
la première strophe. Ce verbe ainsi isolé exprime la quiétude de ce portrait. Mais Rimbaud prend
son temps pour rassurer son lecteur : le verbe « dort » est retardé le plus possible par les
compléments circonstanciels de manière en cascade. L’enjambement (la phrase est poursuivie sur le
vers suivant) crée un effet d’attente.
Des indices viennent troubler la douceur. Le cresson est une plante semi-aquatique qui se
développe sur l’eau. La tête du soldat semble donc au contact de l’eau et le verbe « baignant »
associé d’abord à la végétation par le biais d’une métaphore doit peut-être être pris dans son sens
littéral. Le dernier vers met en valeur l’adjectif « pâle » qui suscite une inquiétude sur la santé du
jeune soldat. Cette teinte, associée au « lit vert » crée un ensemble morbide.
Le dernier vers commence avec une apostrophe (une adresse directe), où la Nature devient
réellement une allégorie avec la majuscule : « berce-le chaudement ». Le poète s'adresse
directement à la nature par le biais de l'impératif. On reconnaît le motif traditionnel de la vierge à
l’enfant. La Nature est comme une mère, voire même, comme la Vierge Marie, une Sainte. Le
dormeur est alors dans la posture du christ, dont le destin sera de mourir.
Dans un autre poème, « Le Mal », Rimbaud développe cette même image, où les soldats, victimes
de la guerre, sont tous les enfants de la même mère Nature, qui est sanctifiée. "Tandis qu’une folie
épouvantable broie /Et fait de cent milliers d’hommes un tas fumant ; /— Pauvres morts ! dans l’été,
dans l’herbe, dans ta joie, Nature ! ô toi qui fis ces hommes saintement !…
Rimbaud exploite la forme du sonnet qui se termine traditionnellement par une pointe, un effet de
chute finale. Le titre même du poème était trompeur : le dormeur était en fait un cadavre, le
sommeil était un euphémisme, une expression atténuée.
Rimbaud repousse au maximum le moment de la révélation, avec l’adjectif « tranquille » en rejet,
qui empiète de deux syllabes sur l’alexandrin : le moment de vérité devra se concentrer sur le reste
du vers, 10 syllabes seulement !
Les premières lettres de ces trois derniers vers forment le mot LIT, c’est un acrostiche (un mot
transcrit verticalement dans un poème). Le lit du dormeur, le lit de mort
La mort n’est pas annoncée de manière explicite : « Deux trous rouges » C’est la couleur, la
dimension picturale du poème qui fait émerger un sens plus profond et symbolique.
La blessure « au côté droit », c’est une notation très précise, Rimbaud renvoie explicitement à l’une
des plaies du Christ : pour constater sa mort, un soldat romain aurait percé son flanc droit avec sa
lance. Ainsi, le dormeur devient un véritable martyre.
Le mot « trou » était presque le premier mot du poème : la boucle est bouclée. Cette blessure du
soldat est à l’image du val où il se trouve : la Nature entière a-t-elle pouvoir de bercer et de consoler
ou est-elle finalement un mensonge, un cadre joyeux qui contient une horreur ?
Conclusion
Dans ce poème, la Nature est à la fois belle et sauvage, allégorique et mystique, elle dépasse l’être
humain. Comme chez Baudelaire, les couleurs, les matières et les perceptions se confondent, les
effets de contraste véhiculent un sens caché. La mort plane sur ce paysage idyllique, cette mort
injuste qui écrase l'humanité et révolte le poète comme dans le poème "Le Mal".
II. (Quoi ? Dans ce tableau, la Nature est belle et mystérieuse, elle dépasse l’humain.
A Un décor paradisiaque, plein de vie
B Une nature accueillante pour le jeune homme vulnérable
C L' allégorie de la Nature
III. (Pourquoi?) Le sentiment de mort qui plane sur tout le texte vise une efficace dénonciation de la
guerre.
A. Une légère inquiétude dans le premier quatrain
B. Un soldat surpris dans une pose inquiétante
C La réalité tragique et brutale