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CRIMINOLOGIE

INFORMATIONS SUR LE COURS


I) Documentation, bibliographie
Compléments d’informations accessibles depuis la page Moodle de ce cours : la page
Moodle est accessible depuis votre ENT auquel vous pouvez vous connecter grâce aux
identifiants que vous obtiendrez une fois que vous serez inscrits au DU.
Pour les étudiants inscrits en cursus principal à l’Université de Montpellier, vous avez
d’ores et déjà accès à l’ENT et donc à Moodle grâce à cette inscription principale. Vous y
trouverez le plan du cours, la bibliographie, des recommandations d’œuvres et de sources à
consulter, ainsi que le lien vers les vidéos du cours.

II) Organisation des cours, accès aux cours


A) Voir le cours en direct
Cours de 30 heures, divisé en séances de 3 heures. Il aura lieu en amphi 201, tous les
mardis de 17h30 à 20h30. Par ailleurs, le cours peut être suivi en direct, depuis chez vous, via le
site de la faculté (les caméras situées dans les amphis diffusent en direct les cours assurés).
Pour y assister, rendez-vous sur le site https://video.umontpellier.fr/live/ le mardi à
17h30 et sélectionnez l’amphi 201 dans la liste des amphis de la Faculté de Droit. Vous aurez
alors accès directement à la vidéo, il n’est pas nécessaire de s’inscrire.
Plus généralement, je ne me formalise pas si les étudiants n’assistent pas à l’entièreté du
cours, il est tout à fait possible de rentrer discrètement dans l’amphi lorsqu’on arrive en retard
ou d’en partir discrètement lorsqu’on veut partir au milieu du cours.

B) Voir le cours en replay


Tous les cours (à l’exception du premier donc) seront enregistrés et accessibles en ligne,
via la page Moodle. Ils seront déposés sur YouTube, mais via des vidéos en accès privé. Vous ne
pourrez donc y accéder qu’à partir des liens vers les vidéos accessibles depuis l’ENT.
J’envisage également de créer un groupe Facebook où les vidéos seront déposées, mais je
ne l’ai pas encore créé.

C) Fonctionnement du cours
Le cours est dispensé sous la forme de cours magistraux classiques, mais j’aime
particulièrement l’interaction avec les étudiants. Pour ce faire, je pose des questions en amphi et
surtout j’utilise le site Wooclap qui permet une interaction directe sous forme de QCM, de
sondages et qui intègre un chat anonyme permettant aux étudiantes et aux étudiants de poser
toutes les questions qu’ils souhaitent pendant le cours.
Pour y accéder, il suffit de se connecter, pendant les heures de cours, à l’adresse suivante
: www.wooclap.com/CRIMINO. Aucune inscription n’est requise et ce site peut être consulté
depuis n’importe quel ordinateur, tablette ou smartphone.

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III) Évaluation du cours
Le cours de Criminologie donne lieu à un examen oral organisé à la fin de l’année. L’oral
dure une dizaine de minutes, sans préparation, sur un sujet choisi par l’étudiante ou l’étudiant.
Concrètement, vous entrez dans mon bureau, vous me dites sur quel sujet vous aimeriez que je
vous interroge et nous discuterons de ce sujet.
Si la situation sanitaire venait à se dégrader et que nous devions passer en distanciel
intégral, je devrais alors basculer sur un écrit. Dans ce cas, il s’agira d’un examen écrit d’une heure
à une heure et demie. Vous devrez répondre à deux ou trois questions que vous choisirez vous-
même parmi quatre à cinq sujets proposés. Il s’agira naturellement d’un examen « à livres ouverts
», vous aurez le droit de consulter n’importe quel document, le cours, des manuels, des ressources
internet, etc. Je ne suis pas figé à propos des modalités d’examen, nous pouvons parfaitement en
discuter si vous le souhaitez, je suis ouvert à toute proposition.

IV) Contacts
Pour contacter votre génial et beau chargé de cours :
Mon bureau : Bureau 4.22 (bâtiment 2 – 4ème étage).
Mon adèle : eloi.clement@umontpellier.fr (adèle = adresse électronique en bon français
du Québec)

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INTRODUCTION
La criminologie c’est l’étude du phénomène criminel et des moyens de le combattre. On
peut lui donner une autre définition : la criminologie c’est l’étude scientifique de la nature, des
causes, du développement et du contrôle du phénomène criminel, à la fois d’un point de vue
social (= macro-criminologie) et individuel (= micro-criminologie).
Cette introduction va comporter trois axes de réflexion : le crime (chapitre 1), le contenu,
i.e. les méthodes (chapitre 2) et enfin l’histoire et les grandes théories qui l’ont marquée (chapitre
3).

Chapitre Premier : L’objet de la criminologie : le crime


Qu’est-ce que c’est (Section 1) et comment est-ce qu’on le mesure (Section 2).

Section 1 : La définition du crime


Crime, délit, contravention, infraction, délinquance, criminalité ? Quelle différence ? Les
criminologues ne sont pas des juristes différence inexistante dans leurs travaux. Mais encore ?
Plusieurs possibilités : définition sociale (I), juridique (II) ou universelle (III).

I) Le crime comme violation d’une norme sociale


Hypothèse : crime = déviance. Atteinte à un système de normes socialement accepté =
crime. Système de normes = morale, religion, us et coutumes, politesse, etc. du groupe. Crime
défini par rapport à la morale du groupe plusieurs conséquences :
- Nature du crime dépend de la nature de la morale : morale subjectiviste (c’est l’intention
de l’agent qui détermine si son acte est bon ou mauvais), morale conséquentialiste (ce sont les
conséquences de l’acte de l’agent qui déterminent si cet acte était bon ou mauvais) ou la morale
essentialiste (certains actes seraient naturellement, intrinsèquement bons tandis que d’autres
seront par nature, intrinsèquement mauvais).
-Universalité du crime découle de l’universalité des préceptes moraux (en théorie, toute
morale se prétendant universelle).
- Relativité du crime découle de la relativité des préceptes moraux (en pratique, chaque
groupe social dispose de ses propres concepts éthiques et ses règles morales).
- Paradoxe : la définition du crime est à la fois très stable (évolution lente de la morale),
relativement connue d’un point de vue endogène (« évidence » de la morale au sein du groupe,
chacun ressent une « évidence morale ») et très inconnue d’un point de vue exogène (relativité
de la morale qui est difficile à connaître pour les personnes qui n’appartiennent pas au groupe
social).
Imprécisions sont nombreuses : frontière crime / impolitesse ? Connaissance exogène du
crime ?
Palliatif = religions, spécialement les religions du Livre (où, par hypothèse,
commandements sont écrits), mais demeure un problème de relativité.
En tant que science, criminologie peut-elle s’en satisfaire ?

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II) Le crime comme violation d’une norme juridique
Hypothèse : crime = infraction.
Positivisme juridique (Hans Kelsen & consorts) : crime = acte que les lois en vigueur
qualifient comme tel.
Cette position est évoquée par DURKHEIM (« Définition du crime et fonction du
châtiment », in De la division du travail social (1893) : « nous appelons de ce nom [crime] tout
acte qui, à un degré quelconque, détermine contre son auteur cette réaction caractéristique qu'on
nomme la peine ») ou par Georges PICCA (in La criminologie, op. cit.).
Avantages = prévisibilité (textes + jurisprudence), fiabilité (statistiques et mesures
étatiques) et efficacité (pour criminologie appliquée – cf. infra).
Défauts = relativité temporelle et spatiale, avec surtout les conséquences dues aux
différences de régime…
Régimes despotiques : incrimination d’actes qui ne sont pas « naturellement », «
intrinsèquement » mauvais. Ex : 1984 (Georges Orwell, 1948) et le crimepensée, condamnations
religieuses, condamnations sexuelles, condamnations politiques, etc.
Plus imprécision due aux velléités de répression. Ex : art. 16 du Code pénal soviétique de
1926 et loi nazie du 28 juin 1935 autorisaient juge à sanctionner tout acte portant atteinte « au
sain esprit populaire ».
Innocence pas toujours considérée. Ex : Fidel Castro a répondu à Jorge Valls qui refusait
d’accuser un innocent (simple opposant politique) : « Ce n’est pas son innocence qui compte,
mais le résultat politique de son exécution. C’est pour le bien de l’État. » Jorge Valls passera 20
ans dans les geôles cubaines avant de fuir aux USA, il est mort à Miami en 2015.
Régime libéraux (occidentaux) pas de problème ? Doux espoir pour deux raisons :
- Incriminations possiblement « excessives » ou en tout cas qui n’existent pas dans toutes
les sociétés, dans tous les droits pénaux (y compris s’agissant de systèmes juridiques pourtant
proches). Ex : interdiction « d’occuper » les halls d’immeubles (art. L. 126-3 C. constr. hab.) ou
délits d’injures / provocations à la haine raciale (// USA), stupéfiants, prostitution, infractions
sexuelles (hors viol toujours incriminé), ensemble des droits pénaux « techniques », etc.
- Tentation de l’oppression (notamment face à une pression terroriste par ex.) et de la
répression (face à certaines formes de criminalité, par ex. c/ les enfants).

III) Le crime comme violation d’une norme universelle


Hypothèse : crime = faute en soi. Théorie = celle de Raymond GASSIN.
Recherche d’une définition générale et absolue du crime, valable pour tous les systèmes,
i.e. distinction du Malum in se (le mal en soi, ce qui serait par nature criminel) et du Malum
prohibitum (le mal prohibé, ce qui ne serait une infraction que parce que la loi le sanctionne mais
qu’elle pourrait ne pas sanctionner).
Renvoie quelque part aux philosophies du Droit naturel (Platon, Aristote, Cicéron, STA,
Thomas Hobbes, John Locke, Jean-Jacques Rousseau, Emmanuel Kant, François Gény, etc.).

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Justification = constantes de certaines incriminations (meurtre et vol notamment qui existent sous
une forme ou une autre dans tous les droits, dans toutes les sociétés).
Pb sont doubles :
- Possible relativité de certaines d’entre elles (i.e. relativité des frontières : il sera difficile
de déterminer précisément ce qui relève de cette catégorie et ce qui n’en relève pas).
- Identification d’iceux : référence au droit naturel ? Aux constantes des codes pénaux ?
Tentative française (Raymond Gassin & co) : recherche de l’identification des valeurs dans «
invariants ». Conclusions : la violence et la ruse pour arriver à ses fins constituent les limites du
crime. Problème = comment être plus précis ?
Tentative américaine : en 1964, Sellin et Wolfgang ont tenté de mesurer la perception du
crime par la population. Long questionnaire avec descriptions courtes et précises d’infractions,
associées à la question : « comparez gravité des infractions en cause ».
1977, Wolfgang réalise le test à grande échelle (50 000 citoyens US) remarquable
consistance des réponses quant à l’ordre de gravité (l’ordre est identique chez jeunes et vieux,
étudiants et policiers, riches et pauvres, blancs et noirs, hommes et femmes, etc.).
Exemple : Homicide au cours d’un hold-up > viol > enlèvement > vol de 1 000$ avec
violence > vol de voiture > cambriolage de 100$...
Six critères ressortent : 1°) ampleur des atteintes à l’intégrité physique ; 2°) Dangers
auxquels l’acte expose autrui ; 3°) Violence des moyens employés (hors du dommage) ; 4°)
Importance des pertes monétaires ; 5°) Vulnérabilité relative de la victime ; 6°) Intention
coupable.
Problème = cette ordre est-il réellement universel ? Ne reflète-t-il pas davantage la
hiérarchie des valeurs admises dans l’Amérique des années 60 et 70 ?
Conclusion de la section 1 : les définitions sociale et juridique du crime posent problème
parce qu’elles ne sont pas universelles, mais la définition universelle du crime semble illusoire,
inatteignable. Par conséquent, nous allons utiliser la définition juridique du crime, parce qu’elle
est la plus précise et la plus certaine ; néanmoins, nous ne devons jamais perdre de vue qu’elle a
ses limites et qu’elle ne sera pas toujours bien adaptée.

Section 2 : La mesure du crime


Traditionnellement = statistiques du crime (I) mais ajouts de nouvelles formes de mesure
(II).

I) L’évaluation statistique du crime


Apparues au début du XIXème siècle (Compte général de l’administration de la Justice
criminelle en France pendant l’année 1825, 1827).
Plusieurs questions : d’où vient la statistique ? Que contient-elle ? (A) Que mesure-t-elle
? (B)

A) L’origine des statistiques


Privées ou publiques ?

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- Publiques = par des instances officielles (administrations, ministères, INSEE…).
- Privées = par des chercheurs (dites aussi scientifiques). Très rares (moyens nécessaires)
mais plus précises (généralement sur un ressort, une juridiction ou pour une catégorie).
Nationales ou internationales ?
- Nationales : par les États.
- Internationales : par institutions telles que ONU (UNODC : Office des NU c/ la drogue
et le crime), OIPC (Organisation Internationale de Police Criminelle – c’est le nom officielle
d’Interpol) dont les statistiques ont cessé en 2006 faute de données suffisantes, Conseil de
l’Europe (CDPC : Comité européen pour les problèmes criminels), UE (Eurostats). Intérêt
essentiel = comparaisons permettant conclusions sur efficacité préventive comme répressive.
Difficultés = pertinence des comparaisons (pour établir les chiffres et pour les interpréter –
comment comparer par exemple la délinquance et la criminalité entre États qui ne sanctionnent
pas les mêmes faits).
Police, justice ou administration pénitentiaire ?
- Police : statistiques publiées entre 2004 et 2015 par l’ONDRP (= département de
l’Institut National des Hautes Études de la Sécurité et de la Justice – INHESJ placé sous l’autorité
du Premier ministre. Cet institut a été supprimé en 2020 et remplacé par l’Institut des hautes
études du ministère de l'intérieur).
Depuis 2015, les statistiques sont publiées sur Interstats, mis en ligne par le Service
statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI).
o Comment :
Depuis 2005 : MCI = Main Courante Informatisée.
Depuis 2011, logiciels de saisies de statistiques = LRPPN (Logiciel de rédaction des
procédures de la Police Nationale) et LRPGN (Gendarmerie).
Existence de divers systèmes : STIC (Système de traitement des infractions constatées)
pour la Police, Judex (Système judiciaire de documentation et d’exploitation) pour la
gendarmerie.
o Quoi :
Liste d’infractions (= état 4001) réparties en 107 index, eux-mêmes regroupés en
catégorie homogènes d’infractions (= indicateurs) : atteintes aux biens, atteintes volontaires à
l’intégrité physique, escroqueries et infractions économiques et financières, infractions révélées
par l’action des services et autres infractions.
Nombre d’infractions constatées (par PV, i.e. dénoncées ou constatées à proprement
parler) + nombre de faits élucidés (i.e. d’auteurs identifiés) + nombre de personnes mises en
cause + nombre de gardes à vue réalisées.
- Justice :
o Qui : les Parquets et les juridictions de jugement. Publications assurées par le bulletin
Infostat Justice et l’Annuaire statistique de la Justice.

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o Quoi :
PV transmis par les forces de l’ordre et suites données.
Mesures présentielles dans l’attente du jugement.
Condamnations (avec sexe, âge, nationalité de la personne et quantum).
Condamnations inscrites au Casier Judiciaire.
- Administration pénitentiaire :
o France : nombre de personnes détenues à un instant t (= stock) + nombres d’entrées /
de sorties durant une période donnée (= flux) + distinction entre condamnés et détenus
provisoires + taux d’occupation des prisons + infos sur les détenus (sexe, âge, nationalité,
infractions).
o Conseil de l’Europe : SPACE (Statistiques pénales annuelles du Conseil de l’Europe) I
pour l’emprisonnement (taux d’incarcération, densité pénitentiaire, fréquence des courtes peines,
infractions (n° 1 = stups), pourcentage d’étrangers, mortalité en prison, répartition hommes /
femmes, dépenses par détenus (317€ pour la Suède, 97€ en moyenne, 2€ pour la Russie) et
SPACE II pour la probation.
Données à consulter sur les sites internet (de l’ONDRP pour les anciennes, du ministère
de la Justice, du ministère de l’Intérieur (Interstats) et sur cartocrime.net).
COURS MANQUE ?

Section II : Réagir aux crimes


On rentre dans le domaine de la criminologie appliquée, qui est de décrire la réaction au
crime, il y en a 3 :
1°/ Réprimer le crime : punir l’auteur
2°/ Prévenir le crime : empêcher qu’il arrive
3°/ Aider la victime
Ce sont nos 3 paragraphes.

I) Réprimer le crime
Conception la plus classique de la réaction au crime. Elle a donc été parfaitement admise
chez les penseurs classiques comme application de la criminologie. Cependant, dans les années
60, 70, en France, il y a eu un mouvement de dépénalisation, d’abandon du pénal, suivi dans les
années 1990 d’un retour au pénal. Il y a donc eu trois temps de pensée : la répression chez les
classiques (A), l’abandon du pénal (B), le retour du pénal (C)

A) La répression chez les classiques


Quel est l’intérêt de punir quelqu’un qui a commis une faute ? Il y en aurait trois : la
rétribution, l’intimidation et la neutralisation.
1) La rétribution

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L’idée est de dire : on punit quelqu’un qui a mal fait parce qu’il a causé du mal, donc on
va lui causer du mal en retour (équilibre cosmique, principe aristotélicien « suum cuique
tribuere » : « attribuer à chacun le sien », sous-entendu « attribuer à chacun la part
proportionnellement juste des biens sociaux », principe de la loi du talion).
La criminologie nous apprend que cette fonction de la peine ne fonctionne pas. Un
chercheur, M. DE GREEF observe que la fonction pénale est toujours vécue comme une
répression arbitraire par les criminels : ils estiment qu’ils ne méritent jamais leur peine. La
plupart des délinquants estiment que la société a été injuste avec eux, donc ils prennent ce qu’il
leur revient de droit (selon eux), et donc lorsque la société les punit, ils subissent une injustice.
En conséquence, on a vu naître les théories de la justice restauratrice : c’est une justice
dont le but est d’établir une transaction entre l’auteur et la victime (théorisée dans les années 90
mais qui existe depuis toujours dans de nombreuses civilisations (amérindiens, Inuits, afrique,
…). Ce type de justice vise à créer un dialogue entre l’auteur et la victime, voire avec sa famille ou
la communauté, et ce sous la tutelle d’un tiers impartial, neutre et bienveillant. C’est un point qui
marque la renaissance de l’idée de rétribution : il faut amener le délinquant à une prise de
conscience et il faut réparer le mal causé. Cette justice a été appliquée après des conflits
importants (comité vérité et réconciliation en afrique du sud, à la fin de l’Aparteid, juridiction
GACACA au Rwanda après le génocide de 94) et cela a permis de restaurer la paix dans la
société.
2) L’intimidation
La peine va servir à intimider les responsables, les protagonistes. Les chercheurs
distinguent l’intimidation générale et l’intimidation spéciale.
a) L’intimidation générale
Ici c’est l’idée que la peine sert à dissuader l’ensemble de la population de commettre les
faits, elle sert à les dissuader de commettre les mêmes infractions.
Il y a des auteurs qui ont réfléchi à cette intimidation utilitariste (BECCARIA, J.
BENTHAM) : c’est utile car cela va dissuader le reste de la population de faire la même chose.
Cette théorie utilitariste a été critiquée par d’autres auteurs, pour qui cela ne marche pas (E.
FERRI, « loi de saturation criminelle » (loi qui considère que dans une société donnée avec une
situation donnée, il se commet un certain nombre d’infractions : il va forcément y avoir un certain
nombre d’infractions dans une société, on ne peut rien faire contre ça, c’est la saturation
criminelle : le nombre d’infraction doit fatalement arriver au nombre qu’il doit être) et « loi de
sursaturation criminelle » (quand une société connaît des bouleversements, sa situation sociale
va évoluer et donc le nombre d’infractions aussi, mais cela ne fonctionne qu’en cas de
bouleversement de la société).
Analyses statistiques sur la peine de mort : est-elle dissuasive ? Est-ce que c’est la sévérité
de la peine qui détermine l’intimidation. Années 50 : comparer dans le temps et dans l’espace
les conséquences de la peine de mort. Expérience célèbre : SELLIN, 1959, USA, étude sur la
peine de mort. Son constat : la peine de mort n’est pas dissuasive : il ne se commet pas
d’avantage d’infractions graves statistiquement dans les Etats qui ne pratiquent pas la peine de
mort que dans ceux qui la pratiquent. 1980, SELLIN va faire la même étude : 90% des meurtres
commis par des prisonniers entre codétenus sont commis dans les Etats qui pratiquent la peine
de mort (en prison, on ne peut pas échapper à l’identification).

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France : effets de l’abolition de la peine de mort : pas de changements majeurs, ça a
augmenté, mais il augmentait déjà avant, et il n’a augmenté que jusqu’en 1985.
Cette effet a été observé aussi pour des infractions moins graves, comme pour les
contraventions routières : il n’y a pas de réel changements quand on aggrave la sanction : 1er
temps, cette aggravation va diminuer le nombre d’infractions, sauf que rapidement cet effet
s’émousse (2e temps) et les infractions recommencent à augmenter (3e temps).
Conclusion : la sévérité de la sanction n’est pas dissuasive. Qu’est ce qui pourrait
fonctionner alors ? 2 propositions :
1°/ La certitude de la sanction : il faut distinguer la certitude objective de la certitude
subjective. La certitude objective c’est la certitude réelle, c’est la proportion de chance d’être
effectivement puni pour une infraction (recherches américaines ; elle est inversement
proportionnelle au taux de criminalité). Question : quelle est la cause et quelle est la
conséquence ? Quand on a moins de chance d’être arrêté, il y a plus de criminalité, et vice-versa.
Quel phénomène est la cause de l’autre ? Les chercheurs américains ont tendance à penser que
c’est la criminalité qui est la cause du risque d’être arrêté : plus il y a de criminalité, plus les
services de police et de justice sont saturés et moins le risque d’être arrêté est grand, et moins il y
a de criminalité, plus le risque d’être arrêté est grand.
La certitude subjective est la croyance, vraie ou fausse, des délinquants potentiels, dans le
risque d’être arrêté, condamné et sanctionné. On a observé que les délinquants pensaient avoir
moins de chance de se faire arrêter que les non-délinquants. Des statistiques ont montré que 5%
des gens ne respectent pas la loi, 20% la respectent toujours et 75% la respectent que lorsqu’ils
croient qu’on la fait respecter.
2°/ La célérité de la sanction : elle serait déterminante dans le caractère intimidant de la
sanction. Dans son esprit, le délinquant associe donc vite la sanction à l’infraction. Ce point a été
moins étudié mais il y a eu quelques études américaines qui ont tendu à montrer que la célérité
n’aurait pas une influence très importante sur l’intimidation générale. En revanche, elle aurait un
effet en cas de prévention de la récidive. Plus le délinquant a été puni vite, et moins il sera enclin
à recommencé.
b) L’intimidation spéciale
L’intimidation spéciale, contrairement à l’intimidation générale, ne vise pas la population,
mais le condamné. Elle vise à le décourager à récidiver. Plusieurs études issues de la psychologie
sociales se sont intéressées à ce point (behavioristes). Ils ont pu établir 5 principes d’une sanction
qui vont déterminer son caractère intimidant.
1°/ Principe d’intensité : un stimulus aversif (quelque chose de déplaisant) fort d’emblé a
plus d’effets qu’un stimulus aversif graduellement augmenté. Les tests sur le enfants montrent
que le fait de recourir à ce genre de sanctions crée 3 problèmes : le défaut de croyance en une
sanction trop élevée (« je vais te découper en morceau »), le défaut de respect d’une sanction
disproportionnée, et la détermination du caractère aversif nécessaire à établir une intimidation (il
est difficile de déterminer à priori quelle sanction dissuadera quelle personne.
2°/ Principe d’immédiateté : plus la sanction intervient vite, et plus le risque de récidive
diminue.

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3°/ Le principe de non-contradiction : (ou le principe d’indisponibilité de la
récompense) : les punitions sont moins efficaces quand elles sont contrebalancées par des
récompenses antérieures ou ultérieures).
4°/ Le principe de continuité et de cohérence : le châtiment ne doit pas être aléatoire (le
fait de ne pas percevoir un châtiment attendu est perçu comme une récompense et pas seulement
comme une perte évitée).
5°/ Le principe de récompense équivalente : pour qu’une sanction dissuade une
personne de récidiver, il faut qu’une conduite alternative permette d’arriver au même résultat.
En France, le taux de récidive est de 30 à 35% des délinquants. Certains chercheurs ont
même pensé une théorie selon laquelle la peine augmente le taux de récidive. On constate qu’il
est plus élevé chez les personnes qui ont été punis à une peine d’emprisonnement comparé à
ceux qui ont eu des sanctions alternatives. Cela peut être contesté car on compare des populations
qui ne sont pas comparables.
Problème général de l’intimidation personnelle : essayer d’empêcher la récidive du
noyau dur des récidivistes, les personnes les plus dangereuses, les « super-délinquants » (les 5%
de la population qui commet plus de 50% des infractions) : c’est ces gens là qu’il faut empêcher
de récidiver. Le but est donc la neutralisation.
3) La neutralisation
Il y a plusieurs peines qui permettent la neutralisation : la mort, la relégation, la prison,
la déportation (dans le sens « reconduite à la frontière »), le bannissement, …
La prison ça fonctionne mais au prix d’une explosion (478 sur 100 000 Américains en
prison) de la population carcérale (en France, le taux d’incarcération est de 103 pour 100 000
Français, 207 pour 100 000 hommes français). La prison ça coûte cher, ça coûte très cher. L’idée
a donc été de concentrer la neutralisation sur ce cœur actif de la délinquance, sur les super
délinquants. La difficulté est de les identifier. Réponse : on va analyser la dangerosité du
délinquant. La sociologie a proposé plusieurs théories sur ce point de vue. Les deux
criminologues historiques (le Français GUERY et le Belge QUETELET) avaient affirmé que les
sociétés humaines seraient gouvernées par des lois semblables à celles de la physique.
Les premières prédictions criminelles sont nées aux USA, avec Ernst BURGESS
(sociologue à l’Université de Chicago). Il a proposé une première approche, puis la science s’est
développée jusqu’à donner deux manières d’évaluer la dangerosité de la personne : la
psychologie en faisant une recherche de personnalité, et se fonder sur les statistiques du crime.
C’est une technique que l’on retrouve dans les assurances (techniques actuarielles). On a distingué
5 générations de techniques pour évaluer le risque de récidive (1G, 2G, 3G, 4G et 5G).
1ères générations : expertises psychiatriques
2G : les approches actuarielles évaluant les facteurs de risques (Violence Risk Appraisal
Guide (VRAG), Sex Offender Risk Appraisal Guide (SORAG)). Les critères pris sont le sexe de
la personne, l’âge de la personne, la race du père (c’est elle qui est signifiante dans le risque de
récidive), la nationalité du délinquant, les conditions socio économique, les antécédents de
violence, les antécédents de victimisation, les antécédents judiciaires, l’échec scolaire, ou encore
la dislocation de la cellule familiale avant 16 ans.

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3G : ajout de facteurs dynamiques : ils permettent de mesurer la capacité du délinquant
à changer son cadre de vie.

4G : identification de nouveaux critères criminogènes


5G : rajout de critères concernant la capacité de désistance du délinquant (typiquement,
le fait d’avoir un enfant fait souvent sortir le délinquant de la délinquance).
En France, il s’agit essentiellement d’expertises cliniques, voire psychologiques. Le
problème de ces expertises est qu’elles ne sont pas fiables pour plusieurs raisons : examen par
une personne unique, biais rétrospectif sur la personne suspectée (l’expert part du principe que
la personne en face de lui est responsable), il est beaucoup moins dangereux pour sa carrière de
juger une personne dangereuse que de la juger sans risque (si on la juge dangereuse alors que ce
n’est pas le cas, elle va rester en prison et rien ne va se passer, si on la juge non-dangereuse et
qu’on a eu tord, on va nous reprocher notre expertise), la réalité est tronquée par la réalité globale
de l’individus (choc carcéral de la personne en emprisonnement provisoire, il sait qu’il y a des
suspicions contre lui et il sait que le praticien a le pouvoir de le remettre en liberté : le rapport
est donc biaisé), également, la dangerosité psychiatrique n’a rien à voir avec la dangerosité
criminologique.
Va-t-on faire évoluer nos pratiques ? Oui, l’IRM fonctionnel est très prometteur : cela
pourrait être une technique qui fasse détecteur de mensonge (pour l’instant cela ne fonctionne
pas car il n’est pas capable de faire la différence entre un vrai souvenir et un faux souvenir et la
plasticité du cerveau est telle qu’on ne sait pas si tout le monde régit de la même façon). En
revanche, dans certains pays, il est permis d’utiliser des encéphalogrammes pour montrer des
anomalies cérébrales.

B) L’abandon du pénal (années 1970)


Il s’agit de l’idée selon laquelle on pourrait faire sans la répression. Elle a été développée
essentiellement par un chercheur (LOUK HULSMAN, Hollandais). Il y a un célèbre juriste
allemand (JHERING) qui avait dit que l’histoire de la peine était celle d’une constante disparition
de la peine. Cette idée a été reprise dans les années 60 et surtout 70 : on a proposé un système
d’abandon du pénal qui fonctionnerait comme une fusée à 3 étages : l’idée est que chaque étape
va propulser l’étape suivante. La première étape était la dépénalisation (suppression de peines ou
proposition alternatives aux sanctions pénales (ex : jusqu’en 1972, l’émission d’un chèque sans
provision était un délit. A partir de 1992, c’est devenu une contravention ➔ dépénalisation).
Ensuite, on procède à la décriminalisation, c’est-à-dire faire sortir du droit pénal un domaine
précis (1975, décriminalisation du chèque sans provision). Ensuite, la troisième étape : l’abolition
du système pénal (très défendu par Louk Hulsman). L’idée est que l’on remplace le système
pénal par un système administratif de contrôle et un système civil de dommages. En 1987, les
conférences internationales sur la suppression des prisons, sont devenues les conférences
internationales sur la suppression des systèmes pénaux.
Quel intérêt ? Motifs idéologiques : le système pénal est un mal (on crée une sanction,
une souffrance au délinquant, or, il faut éviter toute souffrance). Pour d’autres penseurs, les motifs
sont pratiques : le système pénal crée de la délinquance (théorie de l’étiquetage) et donc il
n’arrive pas à suivre l’inflation de la délinquance. D’autres auteurs proposent que le pénal va trop
loin, il pénalise des choses qui ne relèvent pas du pénal (opportunistes). Pour d’autres encore,

11
les motifs sont économiques : seulement, aucune recherche simulée ou réelle n’a permis
d’évaluer les gains ou les pertes effectives d’une abolition totale ou partielle du système pénal.
L’idée n’est pas totalement absurde, elle participe de l’idée que les citoyens se réapproprient le
système répressif (ils doivent se réapproprier la gestion de la citée, dont la répression à la
délinquance). Certaines données tentent à prouver que la dépénalisation puis la décriminalisation
ne sont pas effectifs (pour le chèque, il y a énormément de commerces où il n’est plus possible
de payer en chèques car le nombre de chèques sans provisions a explosé après sa
décriminalisation).

C) Le retour au pénal
Comme beaucoup de phénomènes liés au pénal, il est né aux USA, puis il s’est manifesté
en France.
1) Le retour au Pénal aux USA
Années 80-90, marque d’un courant de pensée « law and order », « loi et ordre », qui
s’est manifesté de plusieurs façons : la politique de tolérance 0 (toutes les infractions, aussi
insignifiantes soient elles, doivent être punies, théorie de la fenêtre brisée), les lois des trois essais,
« three strikes laws » : l’idée c’est qu’à la troisième infraction que l’on commet, on est punit à
une peine très sévère (trois fois le montant de la dernière peine encourue, soit 25 ans de prison).
Exemple : Leandro Andrade a commis de petits vols : il a été condamné pour de petits vols, et
la troisième fois il a volé pour 150$ de cassettes vidéos pour les enfants. Il a été condamné à 50
ans de prison pour cela. Cette peine a été validée en 2003 par la cour suprême des USA.
Il existe également des guides pour aider les juges à prendre des décisions sévères, les
guides de condamnation ou « sentences guide lies ». Le but était d’unifier les peines des cours
fédérales (les USA sont un Etat fédéral) en proposant une fourchette de peines en fonction de la
récidive du délinquant et de la gravité de l’infraction. Ces guides sont facultatifs mais sont en
pratique très suivis par les magistrats américains.
Développement des « stand your ground laws », ou « défendez votre terrain » : elles
étendent la légitime défense. Elles reposent sur le principe que la force doit rester à la loi.
Autrement dit, il ne faut jamais permettre au mal de triompher : donc dès qu’il est possible de
mettre en œuvre une légitime défense, il faut le faire. En France, la légitime défense est trictement
encadrée aux seuls cas où l’on est directement et physiquement menacé. Aux USA, ils partent
du principe que l’on peut se défendre dès que l’atteinte est possible ou envisageable. Cette
présomption de légitime défense est quasiment irréfragable. L’idée est que dès qu’une personne
se trouve dans un endroit où elle n’a pas le droit d’être, typiquement la propriété privée que
quelqu’un d’autre, on peut la considérer comme dangereuse et s’en défendre. Cette loi a donné
lieu à plusieurs drames. En Floride par exemple, une loi permet de se défendre même si le
danger est hypothétique. Dans cet Etat a eu lieu un drame appelé l’affaire « Trayvon Martin » :
c’était un jeune afro-américain de 17 qui se promenait le soir en tenant en main une canette de
coca. Il est tombé sur un vigile qui a eu peur qu’il tenait dans sa main une arme, il a eu peur et il
l’a abattu en 2012. Le vigile a été poursuivi mais en vertu de la loi de légitime défense étendue de
Floride, le vigile a été acquitté, car ils sont partis du principe que même si l’agression était
imaginaire, tant qu’il a pu se croire menacé, il était légitime à riposter.
2) Le retour au Pénal en France

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En France, les manifestations du retour au pénal se manifestent de diverses manières : la
sécurité est devenu aujourd’hui un objectif fondamental. Anciennement, on ne parlait que très
peu de sécurité dans les textes juridiques. La différence entre le droit à la sûreté (droit d’être
protégé contre les actions de l’Etat et des tiers) et le droit à la sécurité (droit d’être protégé des
tiers par l’Etat) est fondamentale.
Aujourd’hui, de nouvelles infractions sont nées comme l’outrage public au drapeau
français ou à l’hymne national, le délit de refus prise d’empreinte ou de prise de photo à la police
nationale, le délit de refus de prise d’échantillons scientifiques, l’outrage sexiste, … Tous ces faits
n’étaient pas très sanctionnées, mais elles le sont depuis 1980. Aujourd’hui le gouvernement veut
rendre répréhensible le fait de filmer et de diffuser des images d’un policier en vue de s’en
prendre à son intégrité physique ou morale ou le séparatisme. Egalement, il faut noter la
multiplication de lois en matière de récidive et en matière de terrorisme. Le code pénal de 1810
prévoyait une peine plancher et une peine maximum. Ca a été abrogé par le nouveau code pénal
qui prévoit uniquement un maximum. Pour les récidivistes, on a tenté de recréer des peines
planchers (loi du 12 novembre 20 ??). Cela n’a pas fonctionné et cette loi a été abrogée sous le
quinquennat de François Hollande.
3) La valeur du retour au Pénal
Pourquoi sommes nous revenus au droit pénal dans les années 1980 ? Principalement 3
causes ;
1°/ Cause pratique : dans les années 1980, la délinquance augmentait dans les pays
occidentaux de manière assez importante (500% entre 1955 et 1985 en France). Il y a des
explications à cette augmentation : le baby boom, … Les criminologues arrivent à la conclusion
que rien ne fonctionne : la délinquance finit inexorablement à augmenter.
2°/ Cause scientifique
3°/ Cause politique : arrivée au pouvoir de deux chefs d’Etats et de gouvernement
extrêmement conservateurs et libéraux dans le monde occidental : Thatcher et Regan. Ils ont
prôné l’idée d’un désengagement de l’Etat dans l’économie et un sur engagement de l’Etat dans
les questions sociales et surtout pénales (conception « néo-libérale »).
Le cumul de tous ces éléments a abouti à un retour du pénal : tout le monde était
persuadé d’un laxisme juridique et pénal, ils pensaient que les juges étaient vendus aux rouges
etc. Il n’y avait aucun laxisme judiciaire à l’époque, mais il y avait un problème de manque de
moyens.
Après ces lois, le taux de criminalité s’est effondré, on parle aux USA du « crime drop ».
Un exemple : la ville de NYC, entre 90 et 2009, la criminalité a baissé de près de 80% dans tous
les quartiers. Dans les années 80, NYC était très dangereux et présenté comme tel. Le taux
d’homicide a baissé de 72%.
26 novembre 2012 ➔ premier jour sans meurtre à NYC depuis 50ans.
Cependant, on constate une baisse de la criminalité dans tous les pays occidentaux à partir
des années 80, y compris ceux qui n’ont pas adopté la politique de tolérance 0. Aux USA, on
constate que la baisse a commencé dès 1970, alors que les premières lois des three strikes laws
ont commencé en 1973. Quelles sont les causes alors ?

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1°/ Conséquences du bay boom ➔ devenu un papy boom : la population occidentale a
beaucoup vieilli. Or, l’âge est très lié à la criminalité.
2°/ Changements ethniques à NYC : sont arrivés énormément d’asiatiques et
d’hispaniques, considérés comme moins délinquants ou moins ciblés par la police.
3°/ Augmentation des moyens alloués à la police.
4°/ Amélioration des conditions socio-économiques
Steven Levitt a proposé 4 explications au crime drop : 1°/ Augmentation du nombre de
policier 2°/ Augmentation du taux d’incarcération 3°/ Recul du marché du crack 4°/ La légalisation
de l’IVG (elle a permis d’éviter la naissance d’une nouvelle génération de délinquants : les
femmes qui ont eu recours à l’IVG étaient ceux qui se disaient qu’elles ne pouvaient pas se
permettre d’accueillir un enfant. Si ces enfants étaient nés, ils seraient nés dans de mauvaises
conditions, donc il y a une forte chance qu’une partie de ces enfants se tournent vers la
délinquance).
Critiques du retour au pénal et de la politique de tolérance 0 : cela coûte cher (en police
et en justice), contrôle assidu des personnes « à risque » et donc les minorités (augmentation des
bavures policières).

II) Prévenir le crime


Il s’agit ici de sortir de la peine, de comprendre ce que la criminologie peut nous enseigner
sur la prévention. Globalement, on peut penser des techniques pour éviter qu’un crime ne soit
commis ou réitérer.

A) La prévention du passage à l’acte


On peut distinguer les méthodes de préventions en fonction du public visé : 3 formes de
préventions ; la prévention primaire, secondaire et tertiaire.
Prévention primaire : prévention dirigée vers la population en général.
Prévention secondaire : prévention dirigée vers des populations « à risque »
Prévention tertiaire : prévention dirigée vers les délinquants pour éviter les récidives.
La prévention sociale c’est l’adoption de politiques destinées à augmenter le bien-être
général des populations (éducation, santé publique, sécurité sociale, …). Prévention
situationnelle : cherche à modifier les éléments propices au passage à l’acte (situation pré
criminelle). L’idée est soit d’agir à la racine pour désamorcer un évènement originaire
(maltraitances physiques, sexuelles, etc… ➔ prise en charge psychologique pour éviter que ces
victimes ne deviennent à leur tour des délinquants. Interdiction de la vente d’armes à feu, …).
Prévention communautaire : forme plus restreinte de prévention sociale, développement social
d’une région particulière (un département, une ville) pour faire diminuer les tensions dans la
région. Le but est de développer les liens entre les membres d’une communauté, pour éviter la
déshumanisation de la victime, qui motive le passage à l’acte. Egalement, si on augmente le niveau
de vie, le but de passer à l’acte diminue. Cette sorte de prévention est née aux USA avec l’idée
de l’ « empowerment », qui veut qu’il faut développer sa capacité d’agir (qu’est ce que l’on peut
faire nous même pour nous aider nous-même ?). Prévention développementale : concise à

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éliminer les causes de la criminalité essentiellement à partir de l’éducation (accompagner le
développement de l’enfant pour faire en sorte qu’il puisse se construire sereinement).
Est-ce que la prévention fonctionne ? C’est très délicat de le dire. La délinquance, de ce
point de vue, ne peut pas être prévenue selon certains auteurs. Toutes les formes de délinquances
ne peuvent pas être prévenues. Egalement, la prévention fonctionne mais quand elle est
accompagnée de la sanction.

B) La prévention de la récidive
On entre ici dans le domaine de la criminologie clinique, donc cette idée que nous allons
prévenir la récidive en soignant le criminel. C’est une théorie qui a été développée par certains
auteurs : on est un criminel parce que l’on est malade. Cela a amené à la conclusion qu’il faudrait
confier les délinquant à des psychiatres. Une branche plus sérieuse de cette pensée dit que le
problème est l’inadaptation sociale. On développe donc des conceptions thérapeutiques de la
réaction sociale. Cette vision entraine plusieurs conséquences : la première et la plus évidente :
il va effectuer une expertise approfondie de la personne. Pour ce faire, le thérapeute doit disposer
d’un pouvoir discrétionnaire absolu (il doit pouvoir intervenir aussi loin que c’est nécessaire et
aussi longtemps qu’il le sera nécessaire pour la réadaptation sociale du criminel). Cela veut dire
qu’on ne limite pas le térapeuthe.
Conseils pour faire respecter ce genre de mesures : l’agent de probation doit veiller à
toute sa (propre) communication (verbale (poser des questions ouvertes, être optimiste) et non
verbale (être détendu, etc))

III) Aider les victimes


Aider les victimes n’est plus le rôle de la criminologie mais de la victimologie.
Benjamin Mendelhson (avocat Roumain naturalisé israélien. Il a prononcé un discours
« De nouveaux horizons psycho médico sociaux : la victimologie » en 1947) et Hans von Elting
(auteur de « The criminal and the victim » en 1948) sont les pères de la victimologie. Ils se sont
séparés pour incarner les deux mouvements opposés de la victimologie : Von Elting a étudié le
rôle de la victime dans le passage à l’acte (la victimisation), Mendelhson a défendu la victimologie
qui s’intéresse aux conséquences du processus de victimisation (aider la victime). La première
victimologie est donc celle qui va nous intéresser car elle est liée à la criminologie. La seconde
victimologie ne concerne plus du tout la criminologie.
Il y aurait plusieurs raisons qui amènent à être victime d’infractions : notamment, les
célibataires sont plus victimes que les personnes mariés, les personnes qui sortent plus sont
également plus victimes, les jeunes également. Les délinquants sont sur-victimisés dans la société.
Pour tous ces critères, l’explication est simple : le style de vie de la victime va la pousser à
rencontrer des délinquants. Cela explique également pourquoi les délinquants sont plus victimes
que les autres. Il y a aussi l’idée de rivalité mimétique : on a plus de rivalité envers des gens qui
nous ressembles car on se dit qu’on pourrait être à leur place, ils suscitent notre jalousie.
80% des infractions, selon une étude canadienne, sont commis par des personnes au sein
d’un même groupe ethnique.
Le risque de sur-victimisation des victimes est le fait qu’une victime a plus de chance d’être
agressé à nouveau qu’une personne qui ne s’est jamais fait agressé (une victime a 7 fois plus de

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chances d’être à nouveau victime qu’une personne qui ne l’a jamais été ➔ étude anglaise). 3
causes à ce phénomène ont été imaginées : la répétition de l’infraction entre les mêmes
protagonistes, la nature de l’individu, et le fait que les délinquants communiquent entre eux (et
donc se refilent les « bons plans »).
La victimologie qui se base sur le comportement de la victime a pris une certaine distance
avec d’autres courants de la victimologie car elle considère que la criminalité n’a pas pour seule
cause la déviance du criminel (il n’est pas la seule cause de la criminalité), elle est également due
au comportement de la victime (tous les protagonistes ont un rôle causal dans l’infraction). Cela
amène à plusieurs dérives dont celle de blâmer la victime (pour certains auteurs, le fait qu’il n’y
ait pas de crime sans victime, cela implique le fait qu’elle a toujours un rôle dans l’infraction : la
victime est un catalyseur de l’infraction). Mendelsohn avait proposé 6 catégories de victimes : la
victime complètement innocente (la victime présente au mauvais endroit au mauvais moment),
la victime moins coupable que l’auteur (la victime qui a commis une faute qui a incité le passage
à l’acte), la victime autant coupable que l’auteur (le duel, etc), la victime plus coupable que
l’auteur (celle qui a déclenché le passage à l’acte), la victime extrêmement coupable (personne
tuée par une personne qui agit en cas de légitime défense), la victime imaginaire.
Cela a dérivé notamment sur la culpabilisation des victimes de sévices sexuels. Cela a
amené la création de la seconde victimologie pour assister la victime. C’est une science de l’action
qui nous dit comment apporter assistance à la victime. Cette seconde victimologie n’est pas le
sujet de la criminologie.

Chapitre III : l’histoire de la criminologie


Section I : les origines de la criminologie
Elles remontent à la première moitié du XIXe siècle. Les deux fondateurs de la
criminologie sont le Français André Michel Guerry (1802-1866) et le Belge Adolphe Quételet
(1796-1874). Ils ont étudié les premières statistiques pénales et ils ont observé que les taux de
suicide et de criminalité sont stables entre les groupes sociaux et dans le temps, en revanche, ils
ont observé que les taux de suicide et de criminalité évoluent beaucoup en fonction des lieux.
L’idée qui a résulté de ces observations est que les actions humaines seraient gouvernées à des
lois semblables aux lois physiques (comme la météo) et qui échappent à la volonté humaine. Ils
sont donc considérés comme les pères de l’école cartographique ou géographique du crime. Leur
idée forte est que la délinquance augmente avec la richesse et surtout avec le passage de la richesse
à la pauvreté (si tout le monde est riche ou tout le monde est pauvre, il y a peu d’infractions, s’il
y a des pauvres et des riches, le taux d’infractions augmente). Egalement, ils pensent que le taux
d’infractions est lié à la chaleur (augmente avec la chaleur), notamment parce qu’à l’époque il
était beaucoup moins risqué de boire de l’alcool que de boire de l’eau, donc plus on avait soif et
plus on buvait de l’alcool ➔ donc plus on était bourré et donc plus on commettait d’infractions).

I) Les positivistes italiens


Cesare Lombroso, Enrico Ferri, et Raffaelo Garofalo sont les principaux représentants
du positivisme italien.

A) Cesare Lombroso

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C’est un professeur de médecine légale italien à Turin, il est né en 1835 et il est mort en
1909 et en 1876 il a publié un ouvrage qui s’appelle « L’umo delinquente » traduit en français
par « l’homme criminel ». Il présente la théorie du criminel né : le criminel porterait des
stigmates anatomiques et biologiques qui annoncent ces traits psycho-pathologiques. Le
fondement scientifique de cette théorie est à rechercher dans deux « sciences » que sont la
physionologie (remonte à Aristote et postule que notre tête traduit qui nous sommes) et la
phrénologie (qui postule que la forme du cerveau et donc du crâne révèlerait la personnalité de
l’intéressé). La théorie de l’évolution de Charles Darwin, publié en 1859, a beaucoup marqué
Lombroso dans ses travaux, et dans le travaux de nombreux chercheurs (développement de
l’eugénisme de Francis Galton : il faudrait sélectionner les êtres humains pour améliorer le
patrimoine génétique de l’être humain). Toutes ces théories ont favorisé l’apparition de la théorie
de Lombroso. Il a passé 30 ans à mesurer les crânes de criminels morts et vivants pour tenter
d’établir un portrait physique du criminel (mais il n’a pas fait de groupe contrôle) ➔ donc ses
résultats ont été faussés. Selon lui, les caractéristiques physiques du criminel né sont ceux-ci :
cerveau relativement petit, mâchoire énorme, levres charnues, menton carré et saillant, arcades
sourcilières très avancées, orbites grandes, cheveux abondants, barbe rare, oreilles écartées, gestes
fréquents, … Pour le meurtrier : regard vitreux, froid et immobile, mais quelquefois sanguinaire,
nez volumineux, mâchoires robustes, oreilles longues, pommettes larges, cheveux crépus, foncés
et abondants, lèvres fines, …
Selon Lombroso, le criminel né ne fait quasiment pas partie de notre humanité, c’est
l’atavisme (réapparition chez un descendant de caractères présent chez ses ancêtres mais qui
avaient disparus) ➔ réapparition donc de traits primitifs. Le criminel né est donc un homme, par
atavisme, qui a des caractéristiques d’une espèce primitive. En conséquence, cette détermination
biologique du criminel né le rend totalement inadapté à la vie en société : il ne décide pas d’être
criminel mais donc il ne décide pas de s’adapter à la société. Le criminel né ne peut pas être
adapté à la société, donc il faut le neutraliser, il ne pourra jamais le contrôler.
Il a finit par créer d’autres types de criminels car sa théorie de base était largement
insuffisante pour expliquer le phénomène criminel : le criminel occasionnel, le criminel fou, le
criminel alcoolique, le criminel par passion, etc mais sans jamais revenir sur sa théorie du criminel
né.
Un des grands critiques de cette théorie est Alexandre Lacassagne (médecin légiste
lyonnais, pionnier de la balistique, célèbre pour ses expertises de grands criminels). Il a fondé
l’école du milieu social : pour lui, l’environnement (les facteurs sociaux) serait plus déterminant
que les facteurs biologiques. Il a dit « Le milieu social est le bouillon social de la criminalité, le
microbe, c’est le criminel, un élément qui n’a d’importance que le jour où il trouve le bouillon
qui le fait fermenter. Les sociétés n’ont que les criminels qu’elles méritent ».

B) Enrico Ferri (1856-1929)


Il était professeur de droit pénal (à Rome puis à Turin). Il a été disciple de Lombroso,
avec Ferri. Tous les trois ont fondé une revue : « archives de psychiatrie et d’anthropologie
criminelle ». Il a repris les théories de Lombroso et il les a affiné : il admet qu’il y a des
conditions socio-économiques qui sont des causes de la délinquances mais il ne remet pas en
question les causes biologiques. Pour lui il y a trois types de facteurs à la criminalité : les facteurs
endogènes (les facteurs internes du criminel : sa constitution biologique, psychiques et ses
caractéristiques personnels), les facteurs exogènes liés au milieux physiques (liés au milieu

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physique : le climat, la nature du sol, la production agricole) et les facteurs exogènes liés au milieu
social (la densité de population, l’état de l’opinion public (société religieuse ou non, Etat
révolutionnaire ou non), le système d’éducation, les conditions socio-économiques, les
différences de richesse, l’organisation économique et politique de la cité, l’alcoolisme). Il aboutit
à une classification des délinquants en 5 catégories, classés selon les facteurs déterminants du
passage à l’acte (les deux premiers, ce sont les facteurs endogènes qui priment, les trois suivantes
sont les facteurs exogènes) :
1°/ Le criminel né
2°/ Le criminel aliéné
3°/ Les criminels habituels (les professionnels)
4°/ Les criminels d’occasion (l’occasion de commettre l’infraction s’est présentée), les plus
nombreux
5°/ Les criminels par passion, les moins nombreux
Ferri est un positiviste pur et dur, il considère que les actions humaines obéissent à des
lois scientifiques qui ont la même précision et inhérence que les lois physiques ➔ l’homme n’a
pas de libre arbitre. Conséquences criminologiques : il ne croit pas à la responsabilité morale
(un criminel n’est pas un méchant, il ne doit pas être punit au sens de la rétribution, il est
déterminé par sa nature et par son milieu). Par conséquence, chez Ferri, la répression est basée
sur la responsabilité sociale (la société est un organisme vivant qui doit se défendre contre les
microbes) ➔ il est l’un des premiers auteurs des théories de la défense sociale (la réponse à la
délinquance est une réponse légitime de la société qui doit se protéger). Ses théories ont des
conséquences importantes sur la fonction de la peine (elle ne sert pas à rétribuer ou à intimider).
Pour autant, Ferri reste un répressif : il propose des peines à vocation d’élimination, de
neutralisation.

II) Les théories sociologiques du crime


A) Gabriel Tarde (1843-1904)
C’est un magistrat français (juge à Sarla jusqu’à sa mort). Il était également philosophe et
sociologue. Il est le fondateur de la théorie de l’imitation sociale.
Sa plus grande œuvre est « les lois de l’imitation ». Sa grande théorie est que le moteur
essentiel des sociétés humaines c’est l’imitation : « on tue ou on ne tue pas par imitation ».
L’imitation va déterminer le passage à l’acte et le motus operandi. Tous les comportements
humains sont des imitations. Même lorsque nous créons, nous imitons car la création est un
phénomène de recombinaison de l’existant.
Il distinguait deux types d’imitations criminelles : l’imitation mode et l’imitation coutume.
L’imitation mode est l’imitation d’un phénomène nouveau qui a marqué (ex : affaire de la veuve
gras : Paris, 1875. Elle avait un amant infidèle. Pour le punir, elle lui a jeté du vitriole. L’affaire
a fait grand bruit et dans la continuité de cette affaire, on a relevé un très grand nombre de
« vitrioloage »). L’imitation coutume désigne les traditions anciennes (parmis elles les coutumes
criminelles) qui se transmettent de générations en générations (ex : la provocation en duel dans
les castes de nobles, la vandetta corse).

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Tarde combattait donc les théories de Lombroso : tout était explicable par la psychologie
humaine. Il a contribué à faire de la psychologie une science à part. Ses théories sont aujourd’hui
contestées, notamment par Durkheim, mais cette théorie de Tarde conserve une application : le
phénomène de foule criminel (le royaume de l’imitation criminelle). Cette théorie a été
développée par Gustave Le Bon : les phénomènes de foules dangereuses se manifestent par une
cascade d’imitations sociales. Le phénomène de foule entraine une désindividualisation (perte de
la dimension individuelle : on n’est qu’une cellule d’un corps) et une radicalisation extrême.

B) Emile Durkheim (1858-1917)


Sociologue français, fondateur de l’école sociologique française. On lui doit quelques
développements à la criminologie mais il n’est pas criminologue, ce n’est pas son premier centre
d’intérêt. Il développe « la normalité du crime » : une société sans crime est inenvisageable, et
ce parce qu’il ne peut pas y avoir de société où tout le monde se comporte de la même manière :
donc il y aura toujours des déviances (dont des comportements criminels). Il est socialement
normal également qu’il y ait des personnes qui soient psychologiquement anormales. Durkheim
explique même que le crime est utile à la société : d’une part parce qu’il offre un modèle négatif
(il montre ce qu’il ne faut pas faire) et parce qu’il permet donc d’éduquer la société en punissant
ceux qui transgressent la règle. La criminalité permet d’affirmer les valeurs de la société.
Durkheim ajoute même que la criminalité démontre même l’existence de la liberté individuelle.
Cependant, il explique que la criminalité peut atteindre des niveaux morbides (un niveau
anormal de crimes) et dans ce cas-là il faut réagir. Il développe ainsi la notion d’intégration : les
comportements dans la société peuvent être guidés par un phénomène d’intégration (plus on est
intégré dans une société et plus on est susceptible de suivre ses codes sociaux). Il a fait paraitre
« Le suicide, étude sociologique » dans lequel il va classer les suicides en 4 catégories : le suicide
égoïste, le suicide anomique, le suicide altruiste, et le suicide fataliste. Les deux derniers suicides
ne concernent pas la criminologie car il concerne la notion du crime contre soi-même. Le suicide
égoïste est le suicide non pas égoïste dans le sens que ça serait vilain, mais qui est causé par des
raisons liées à une mauvaise intégration dans la société (on se suicide pour soi == égoïste).
Pourquoi les protestants se suicident plus que les catholiques ? pourquoi les gens se suicident
moins en temps de guerre ? Pourquoi les célibataires se suicident plus que les gens mariés ? La
différence concerne l’intégration sociale selon Durkheim.
L’affirmation de Durkheim sur le suicide égoïste se transpose à la criminologie : une
meilleure intégration sociale permet de diminuer la criminalité.
La notion de suicide anomique : l’anomie c’est une situation sociale causée par une
perturbation de l’ordre collectif qui est du au recul de la contrainte sociale. « a » (=sans)
« nomox » (=norme), sans normes donc. Cette anomie va engendre beaucoup de conséquences
sur la société : sentiment d’indétermination (on ne sait plus ce que l’on peut faire), sentiment
d’insatisfaction (on n’a plus l’impression que les bonnes actions sont récompensées et que les
mauvaises actions ne sont pas récompensées), va engendrer donc un état de troubles, de colère,
un mécontentement.

Section II : les théories contemporaines


On va s’intéresser aux théories d’aujourd’hui, c’est-à-dire des théories du XXe et du XXIe
siècle. Comment expliquer le crime ? Il y a trois types de théories dont on peut parler : d’où
vient le crime ? (théories étiologiques : elles s’intéressent au crime comme on s’intéresse aux

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maladies, comme s’il s’agissait d’un comportement global né de la société et où les individus ne
sont que l’outil), cela se différence des théories dynamiques : pourquoi passe-t-on à l’acte ? et
des théories critiques : marxisme et féminisme.

I) Les théories étiologiques relatives aux causes du crime


Il s’agit de chercher quelles sont les causes du crime : on peut les chercher à deux
endroits : soit on cherche le crime dans l’individu (il y a des causes personnelles du crime) soit
on recherche le crime dans la société, soit on peut chercher une théorie globale.

A) La cause trouvée dans la biologie


On va ici parler d’un ensemble de théories qui pourraient s’inscrire dans le prolongement
des théories de Lombroso, mais ici ces théories cherchent à expliquer l’entièreté de la criminalité
par la biologie. Toutes ces théories ont été fortement critiquées.
Première théorie, Ernest Dupré, 1912 : l’action humaine serait dirigée par trois
instincts : l’instinct de conservation (qui nous pousse à survivre), l’instinct de reproduction et
l’instinct d’association (qui pousse à créer des amitiés, des relations). Dupré va ainsi développer
une théorie de la criminalité qu’il appelle la « perversion instinctive » : son raisonnement est de
dire que la criminalité est liée à la perversion des instincts en cause : on viole car on impose la
reproduction (perversion de l’instinct de reproduction), etc. Il explique également que ces
pervertirons sont biologiques : elles sont donc incurables et la seule solution est donc
l’élimination.
Deuxième théorie, Olof Kinberg (1873-1960), il développe l’idée de l’inadaptation
biologique : chaque individu réagit aux stimuli externes en fonction de sa structure biologique
propre (il n’existerait pas de libre arbitre). Il explique que chaque individu a en lui des forces de
pulsion qui lui forcent à faire quelque chose et des forces de résistances qui lui permet de résister.
Chez les individus normaux, les forces de résistance sont plus fortes, et chez les personnes
biologiquement inadaptées, les forces de pulsion sont plus fortes.
Troisième théorie, Henri Laborit, chirurgien et neurobiologiste français : il considère
que les objectifs, préoccupations de chaque humain se divisent en quatre : la consommation
(manger, boire, sexe), la récompense (approbation, prix, privilèges, …), éviter la punition,
l’inhibition de l’action (on est naturellement porté au moindre effort). Cette considération a
amené Laborit à présenter le système cérébral humain en trois niveaux : le cerveau reptilien
(gère tout ce qui attrait à la survie de l’espèce et à la satisfaction des besoins primaires), le cortex
ou cerveau limbique (commun à l’ensemble des mammifères : il gèrerait la mémoire, les
émotions et le stress), et le néo-cortex (propre à l’espèce humaine, permettrait de contenir les
idées abstraites (tout ce qui est anticipation, prévision des conséquences de nos actions, etc)). Il
explique ainsi que la criminalité est causée par une agressivité causée elle-même par une
opposition entre les différents niveaux du cerveau (le néo-cortex ne peut pas contenir les pulsions
des autres niveaux du cerveau). De la même façon il explique qu’il existe une pression entre notre
impératif naturel et ce que la société permet et ne permet pas de faire. Tout cela a été démonté
par la neurobiologie moderne.
Quatrième théorie : Jacques Léauté (1916-1994) : théorie de la violence sur l’étologie,
c’est-à-dire la science du comportement animal. Son explication de la criminalité est de dire que
le comportement violent serait une donnée totalement naturelle. Pour lui, la violence est canalisée

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chez les animaux sociaux (combats entre males à la saison des amours, cela constitue des combats
naturels dans lesquels les adversaires s’épargnent, etc), mais dans les sociétés humaines, depuis
les années cinquante, la violence n’est plus catalysée (plus de duels, plus de tolérance envers les
affrontements violents légitimes) cela engendrerait donc une hausse de la criminalité.
Cinquième théorie : Edouard Osborne Wilson, sociobiologie (étude des sociétés
animales) : pour lui, le cerveau humain est le fruit d’une évolution darwinienne, toute notre
culture, notre morale, nos règles, sont des avantages évolutifs. Par conséquent, tout groupe
humaine soudé sera plus fort et favorisera la prospérité.
Sixième théorie : théorie évolutionniste : le but est de se reproduire, donc tout ce que
l’on fait c’est pour avoir une meilleure position et plus de descendants : par exemple la théorie
du viol (Randy Thornhill et Craig T. Palmer) : le viol serait une théorie alternative pour se
reproduire car on est un « looser ». Cela expliquerait pourquoi la majeure partie des violeurs
sont des hommes. Cette théorie échoue sur plusieurs plans, notamment sur le cas des viols
homosexuels.
Conclusion : les théories bio criminologiques échouent presque toutes. Il est certain que
certaines malformations physiques peuvent avoir des conséquences criminogènes, mais les
théories qui visent à expliquer tous les comportements humains échouent à démontrer leurs
fondements.

B) La cause trouvée dans la société


Ces théories sont nombreuses : les théories de la désorganisation sociale, des
déséquilibres et de conflits de culture.
1) Les théories de la désorganisation sociale
Ces premières théories sont issues des théories écologiques de la ville de Chicago : la
criminalité ne dépend pas des personnes mais de la structure de la ville (elle est pensée comme
un organisme vivant). Le niveau socioéconomique de la ville est un déterminant (peut générer de
la délinquance), l’hétérogénéité ethnique, la structure des familles (les familles monoparentales
et décomposées favorisent la criminalité), la mobilité résidentielle (s’il y a beaucoup de gens qui
passent où si tout le monde est implanté depuis longtemps), la densité de population (plus la
population est densément répartie, et plus la criminalité augmente), la structure de l’habitat, la
santé publique, la présence de services publics.
A ces facteurs-là, deux chercheurs (Jane Jacobs et Oscar Newman) ont trouvé des facteurs
supplémentaires : la faculté des citoyens à s’approprier de l’espace public et donc à créer de la
sociabilité dans l’espace public. Est-ce que les citoyens considèrent que la rue est un espace public
qui appartient à tout le monde ? Ou est ce qu’ils considèrent que la rue est un espace qui
n’appartient à personne ? Cela permet de limiter l’effet du spectateur/ l’effet du témoin qu’on
appelle aussi parfois l’effet « Kitty Genovese » (assassinée le 13 mars 1964 en pleine rue à NYC
devant 38 témoins. L’agression a duré trente-cinq minutes. Personne n’a appelé la police).
Le profilage géographique : la criminalité se concentre autour de quelques points chauds.
A Minneapolis, ils ont créé un ciblage géographique criminel.
2) Les théories des déséquilibres

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Le premier grand théoricien est un chercheur très important car c’est la théorie phare de
la criminologie contemporaine : il s’appelle Edwin Hardin Sutherland. Il a créé la théorie des
associations différentielles. Elle repose sur l’idée que le comportement criminel n’est pas
héréditaire, il est appris dans tous ses aspects. Il s’est beaucoup inspiré de Tarde et de sa théorie
de l’imitation. Pour lui, on devient délinquant parce que l’n fréquente des délinquants (qui vont
nous apprendre des techniques mais également des raisons de commettre une infraction). La
probabilité de devenir délinquant dépend du rapport différentiel (la balance) entre d’une par les
conceptions, opinions et jugements favorables au respect de la la loi et les conceptions, opinions
et jugements défavorables au respect de la loi. Il défend donc l’importance capitale de l’éducation
et du bon encadrement des personnes.
Cette théorie a été approfondie par deux chercheurs (Ronarld L. Akers et Robert L.
Burgess).
Theorie de la tension (Robert King Merton) : la criminalité arrive lorsque les buts donnés
par la société ne sont pas accessibles par les moyens autorisés par la société. Cela crée donc une
tension que la criminalité désamorce. Dans une telle société il y a cinq réactions possibles : 1/
Le conformisme 2/ L’innovation (ce qui donne la criminalité) 3/ Le ritualisme (acceptation des
moyens de la société sans pour autant respecter ses valeurs) 4/ L’évasion (on rejette tous, on
s’évade de la société, physiquement (clochard) ou mentalement (alcool, toxicomanie)) 6/ la
rébellion
3) Les théories de conflit de cultures ou de sous-cultures
Le premier chercheur en la matière était Thorsten Stellin (« Culture Conflict and
Crime ») : chaque société crée une culture, y compris des normes sur les comportements à
adopter, à éviter, à blâmer, etc (chaque culture ou chaque sous-culture). Il existe parfois des
conflits de cultures et donc des conflits d’infractions entre plusieurs sociétés. Exemple : dans le
monde des affaires, il y a une valeur de rentabilité qui est très encrée, ce qui peut mener à la
délinquance (en col blanc). Cela va pousser les délinquants à justifier leurs actes qu’ils estiment
légitimes. La sous-culture délinquante va ainsi critiquer les valeurs de la société dominante et
défendre ses propres valeurs. De ce point de vue, le terrorisme islamique résulterait d’une sous-
culture appelée le « takfirisme » qui vient de l’arabe « takfir wa el hijra ».
4) Les théories du contrôle social
Ce sont des théories qui ne s’intéressent pas aux facteurs sociaux qui mènent à la
délinquance mais qui s’intéressent à la question de savoir pourquoi certaines personnes issues de
certains milieux sociaux ne commettent pas d’infractions. Cela serait lié aux avantages sociaux
que l’on serait susceptible de perdre. Par conséquent, la théorie de Becker serait de dire que
ceux qui commettent des actes délinquants sont ceux qui n’ont pas assez d’avantages de la sociétés
pour qu’ils aient peur de les perdre.
Cette théorie a été approfondie par Travis Hirschi, qui a développé la théorie du lien
social : il considère que tout ce qui nous intègre socialement (famille, pairs, professeurs, officiers
du culte) va générer un attachement aux vakeurs de la société et une crainte de perdre tous les
avantages que nous donne la société.
Michael R. Gottfredson : la délinquance est due à un self contrôle insuffisant de la part
de ses auteurs.

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John Rawls : théorie de la justice procédurale : les citoyens sont d’autant susceptibles de
respecter la loi qu’ils perçoivent la loi, les décisions de l’autorité comme justes, c’est-à-dire issues
d’une procédure équitable.

C) Les explications globales


Théories qui mélangent les différentes théories qu’on a déjà vues. Pour ces théories, il n’y
a pas qu’un seul facteurs, il y en a plusieurs pour expliquer la délinquance. La plus connue est
celle des époux Glueck. Pour eux il y a cinq facteurs qui différencient les délinquants des non-
délinquants : l’état physique, le caractère, l’attitude, la psychologie, la place socio-culturelle.

II) Les théories dynamiques relatives au passage à l’acte


Ici la question n’est pas de savoir pourquoi il existe des infractions mais pourqui les
auteurs passent à l’acte.

A) Théorie des activités routinières


On doit cette théorie à deux sociologues américains (Lawrence E. Cohen et Marcus
Felson). On appelle également cette théorie la théorie de l’opportunité : pour eux le crime est
une activité ordinaire (dans le sens où ça prend place dans la vie quotidienne en général).
L’infraction la plus commise est le vol. Or, ce n’est qu’un moyen comme un autre d’acquérir un
bine. Il s’agit donc d’un acte rationnel. Pour ce faire, il faut réunir un certains nombre de
conditions il faut un délinquant potentiel, capable et déterminé, il faut une cible intéressante
(celles qui obéissent à l’acronyme VIVA (Value, Inertie, Visibility, Accessibility), et il faut
l’absence d’un gardien ou d’un système de protection.

B) L’analyse stratégique
Théorie développée par Maurice Cusson :le délit est un comportement rationnel qui
obéit à une rationalité limitée (sur le moment le délinquant croit que c’est rationnel mais avec le
temps il se rend compte que ça ne l’est pas). Pour faire reculer la délinquance il suffit donc que
les avantages de la délinquance diminuent face à leurs inconvénients.

C) La théorie du choix rationnel


Ronald V. Clarke et Derek B. Cornish : les êtres humains sont des êtres rationnels : ils
font le bénéfice-cout de chaque comportement. Leur théorie est donc de dire que les humains
font tous ce calcul subjectif de ce risque et donc ce qui va être déterminant cela va être la
personnalité du délinquant.
Théorie de la fenêtre brisée de Wilson et Kelling : ce n’est pas la délinquance qui crée
le sentiment d’insécurité, c’est l’inverse, c’est le sentiment d’insécurité qui crée la délinquance.
Lorsque l’on a un sentiment d’insécurité, ça pousse les gens à faire des actes délinquants car à
partir du moment où on pense vivre dans une société dangereuse, on va être tenté de se dire « il
y a beaucoup d’infractions, donc si j’en commets une je ne risque pas grand-chose ». Si la vitre
brisée d’un immeuble n’est pas rapidement réparée, on constate qu’il y a d’autres vitres qui vont
être cassées car si on ne répare pas on pense que toute le monde n’en n’a cure.
Mise au point par Philip Zimbardo : il a disposé une voiture sans plaque, capot relevé
dans une banlieue chic de Californie et dans le quartier du Bronx à NYC. Dans le Bronx, au
bout de 10 min, une famille est venue prendre le radiateur et la batterie de la voiture, puis un

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festival de destruction (par les braves délinquants du Bronx, pas par des délinquants qui zonnaient
dans le quartier). En Californie, il n’y a pas de réactions. Au bout d’un moment, il est lui-même
allé mettre un coup sur la voiture, à ce moment là toute la population du quartier s’est jointe à lui
pour l’aider à la détruire.
Effet Lucifer : Zimbardo a demandé à ses étudiants de simuler une situation : le groupe
a été séparé en deux (un groupe gardien qui devait maintenir l’ordre et un groupe de prisonniers
qui devait mettre le bordel). Elle devait durer 4 semaines mais elle a été arrêtée après 2 semaines
en raison d’abus affreux. Cela démontre que les personnes ont tendance à se conformer à leur
rôle. Les gens suivent l’ordre social. La réponse à cette théorie est donc la politique de la tolérance
0.

III) Les théories de la criminologie critique


L’idée est de critiquer l’ordre social et ses institutions car la délinquance serait générée
par les instances répressives. La théorie la plus connue est celle de la stigmatisation.

A) La théorie de la stigmatisation
Cette théorie est née aux USA dans les années cinquante et 60. On la doit à Erving
Goffman, Edwin M. Lemert et Howard S. Becker. L’idée générale est de dire que le crime est
une construction factis de la réaction sociale. La société va apposer des stigmates sur les individus
liées à trois types de choses : nos anomalies physiques, nos déviances et nos appartenances
tribales (religieuses, culturelles, ethniques).
Edwin Lemert a proposé de faire une distinction entre la déviance primaire et la déviance
secondaire : La déviance primaire consiste à accomplir un acte de déviance sans jamais avoir été
exposé à la réaction sociale (ne jamais être considérer comme un délinquant et commettre un
acte délinquant), la déviance secondaire est la déviance de celui qui a déjà été saisi par la réaction
sociale (profonde différence avec la déviance primaire car le déviant secondaire a déjà été
étiqueté, donc il est prédestiné à continuer dans ce sens là). Becker explique que l’étiquetage va
entrainer une redéfinition du rôle social et donc va entrainer une carrière de déviant ou de
délinquant (on se sent obligé de coller à l’étiquette qu’on nous a collé). Globalement dans la
société, on est récompensé quand on reprend le rôle qu’on nous attribue.
Puissance de l’étiquetage social : l’ensemble des individus de la société ont tendance à se
fier aux étiquettes que la société a collé aux individus.
Entrepreneurs de morales : certaines personnes font profession à fixer les normes de la
société.
D’un point de vue évolutionniste, il y a certaines infractions qu’on ne peut pas tolérer
pour la survie du groupe humain (typiquement le meurtre, le viol).
Comment se fait-il qu’un non déviant puisse basculer dans la déviance ?

B) Les criminologies idéologiques


La première grande théorie en la matière est celle de la criminologie marxiste (inspirée
des idées de Marx et de Engels) : l’idée est que le droit pénal est une atteinte à la lutte des classes
(c’est un droit bourgeois pour protéger les intérêts de la bourgeoisie). Par conséquent, le
marxisme va libérer la société de la bourgeoisie et également de la criminalité : partage des

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richesses égalitaire, création d’une société socialiste donc destruction de l’egoisme, de la pauvreté,
et donc de la criminalité.
Un de ces auteurs : Louis Chevalier, « classes laborieuses et classes dangereuses pendant
la première ½ du XIXe siècle », 1958
Radical marxist criminology (William J. Quiney, Ian Taylor, Paul Watson, Jock Young,
Jeffrey Reiman (« The Rich Get Richer and the Poor Get Prison (1998))) : ils constatent que les
pauvres sont poursuivis et punis avec sévérité là où les riches bénéficient de passe-droit, d’une
grande mansuétude de la part des autorités. Ils constatent également que les lois qui protègent les
pauvres des discriminations sont peu voire non appliquées, que l’Etat investit beaucoup dans les
prisons et peu dans les milieux pauvres, que la criminalité est très élevée dans les milieux de
pouvoir et d’affaire. Leur conclusion : le droit pénal ne protège que les hautes classes, contre les
basses classes. Ils ont conclu que le crime est une réaction légitime de la basse classe envers les
inégalités qu’elle subit. Cette théorie inspirera beaucoup la théorie du conflit. De nombreuses
idéologies idéologiques ont repris cette idée : toute domination sur un groupe de la société va se
traduire par une hausse de la criminalité dans le groupe dominé, puisque les dominants qualifient
d’infraction le comportement des dominés.
Criminologie féministe : sanctionner le comportement des hommes moins sévèrement
que celui des femmes.

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PARTIE I : LA MACROCRIMINOLOGIE

Section I : les grandes catégories de délinquants


On pourrait envisager de traiter de la délinquance civilisationelle (est ce que la civilisation
occidentale crée plus de criminalité que les autres civilisations ?). Il est cependant difficile de
faire la comparaison avec les Etats totalitaires car dans ces pays il y a une diminution artificielle
de la criminalité (les crimes de l’Etat totalitaire ne sont pas comptabilisés, puis certains crimes ne
peuvent exister (en Corée du nord il n’y a pas beaucoup de braquages car il n’y a pas grand-chose
à braquer)).

I) La délinquance juvénile
La délinquance des jeunes est un problème de toute éternité (cf texte que Platon prete
à Socrate). Quand on étudie la délinquance juvénile, on différencie deux types de violences

A) Les violences infantiles


Les bébés sont des psychopathes : la violence est parfaitement normale et naturelle chez
les enfants jusqu’à 1-3 ans, parfois jusqu’à 6 ans. Ils sont des psychopathes car ils n’ont pas
d’empathie (ils sont encore dans la phase d’apprentissage de la douleur des autres), et parce qu’ils
ne font pas encore la distinction entre eux et le monde qui l’entoure. On observe en revanche
qu’environs 5% des enfants de plus de 6 ans, un comportement de violence chronique se
maintient. Chez ces enfants, se destine en général un échec scolaire, ils sont plus susceptibles
d’être chômeur, et de violenter leurs enfants. Ils sont également plus enclins à la toxicomanie et
au suicide. Il y a 3 types de caractéristiques que l’on observe chez la plupart de ces enfants :
caractéristiques individuelles (hyperactivité, impulsivité particulière, incapacité à réguler ses
émotions, déficit neuropsychique), parentalité déficiente (parents laxistes, sévérité excessive,
autorité parentale incohérente, disputes conjugales, famille éclatée, prédominance de ces enfants
dans les familles nombreuses, jeune âge de la mère, refus de reconnaitre l’enfant, impossibilité
des parents d’inculquer des valeurs), facteurs sociologiques (ces enfants sont plus nombreux dans
les familles pauvres, lorsque l’un ou les deux parents sont au chômage, lorsqu’ils sont dépendant
des aides sociales, lorsqu’ils ont un faible niveau d’éducation, lorsque la famille vit dans un
quartier défavorisé ou lorsque la famille est victime de mal-logement).

B) Les violences urbaines


Renouvelées par le mouvement des gilets jaunes : les violences commises pendant les
révoltes urbaines sont majoritairement du fait des jeunes. Etude des émeutes qui ont eu lieu en
France et au RU depuis 2005 : les émeutes urbaines ont été générées par des frustrations
générées par les difficultés sociales (proposition des sociologues : aider les jeunes à se développer
une personnalité. Les émeutes arrivent souvent lorsque les jeunes ont l’impression d’être
considérés comme des citoyens de seconde zone) et par la colère que les jeunes ont contre les
violences de la police à leur endroit (sociologues : il faut soigner les relations entre la police avec
les jeunes et les minorités).

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II) La délinquance en col blanc
= délinquance lucrative commise au profit d’une société, d’une personne publique, etc
(relève du droit pénal des affaire, des transports, de la santé publique, etc), mais peut signifier
également les infractions commises dans le cadre d’une activité professionnelle à l’égard des
consommateurs. Cette criminalité faire référence au col blanc des chemises que portent les gens
importants, en opposition à la délinquance en col bleu, qui concernait les travailleurs.
Pour ce genre de criminalité, elles se révèlent par des manifestations paradigmatiques
(incontestables, des éléments obligatoirement liés à la définition) et contingentes (on pourrait les
discuter, éléments non essentiels pour la définition de la criminalité en col blanc).
La délinquance en col blanc est beaucoup moins poursuivie et sanctionnée que la
délinquance ordinaire. Egalement, la réaction sociale est beaucoup moindre. Pourquoi ?
D’abord car ce sont des infractions occultes, parce que les infractions en cause sont des infractions
extrêmement complexes qui nécessitent des enquêteurs spécialisés, parce que les pressions des
milieux d’affaire sont très grandes sur les autorités régulatrices et parce que le public est
relativement indifférent à ce genre de criminalité en dehors de quelques affaires médiatisées
(comme l’affaire Tapie, l’affaire Cahuzac).
Toutes ces raisons font que la criminologie a du mal à étudier cette criminalité en col
blanc. Cependant, on a pu retenir certaines caractéristiques : c’est une criminalité rationnelle
(réfléchie, l’auteur mesure le pour et le contre avant de prendre une décision), il y a une tendance
à justifier rationnellement leurs actions (autojustification, vient du fait que cette criminalité émane
de personnes très bien insérées dans la société, et comme ils ne veulent pas perdre cette insertion,
ils se défendent en disant qu’ils sont de bons citoyens), il y a également souvent une grande
tendance à la négation du préjudice, comme pour l’excuse de la normalité (tout le monde fait ça),
ou pour l’excuse du non-enrichissement personnel.
Pourtant, le cout de la délinquance en col blanc est considérable : on estime qu’il est 10
fois supérieur à la délinquance de droit commun, et ce cout est supporté par les contribuables et
par les consommateurs.

III) Les syndicats criminels et la criminalité organisée


On peut établir une hiérarchie entre trois étages : tout en bas, on retrouve les gangs de
rue (les groupements criminels les moins organisés), puis les groupements intermédiaires, qui
font le lien entre les gangs de rue et les syndicats criminels et les mafias (les plus grosses
organisations). La plus connue est la Cosa Nostra (sicilienne), mais on peut également citer la
Camora (napolitaine), les ‘Ndrangheta (callabraise), les Yakuzas (Japon), les Triades (Chine et
Hong Kong), les cartels (Mexique et Amérique du Sud), …
Un syndicat criminel se caractérise par un grand nombre de membres qui se caractérisent
eux-mêmes par un passé criminel et une aptitude à avoir un comportement criminel. Il peut y
avoir d’autres critères de sélection : familiaux, ethniques, nationaux, etc, Deuxième
caractéristique : organisation très pyramidale, souvent calqué sur le modèle de l’armée. C’est un
critère de distinction fort entre les mafias et les syndicats criminels et les intermédiaires. La Bradva
n’est par exemple pas considérée comme une mafia car son organisation est beaucoup plus
déconcentrée, pyramidale.

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La plupart des mafias s’inventent une histoire, des origines, des mythes qui légitiment leur
fondation. Ils reposent en général sur une société secrète à but altruiste. Ils se légitiment souvent
par la culture.
Les mafias et les syndicats criminels ont comme finalité exclusive l’enrichissement de ses
adhérents par la conquête de parts de marchés illicites et par la conquête de territoire pour
l’épanouissement de ces parts de marché : trafic de pierres et métaux précieux, trafics de biens
culturels, trafics de véhicules, de contrefaçons, de produits polluants, d’enfants, de migrants, de
prostituées, d’organes et de tissus humains, …
L’organisation doit pouvoir être capable de parasiter l’activité de l’Etat et des activités
économiques (corruption, trucage des marchés publics, taxe de protection sur les entreprises).
Pour se développer, les organisations de ce type ont besoin d’un terrain favorable, donc
en général dans des Etats dans lesquels il n’y a pas assez de services publics. Les organisations
criminelles s’imposent alors comme des remplaçants efficaces de l’Etat.
La lutte contre les mafias et les syndicats criminels est particulièrement difficile car ces
organisations arrivent à faire pression sur les autorités. Egalement, une autre difficulté est que ces
organisations sont très souvent multinationales. Enfin, certains Etats préfèrent s’abstenir d’agir
pour préserver la paix publique.
Les gangs de rue : ce sont des groupements beaucoup plus petits et beaucoup moins
organisés que les mafias. Cela en raison de leur objectif : lucratifs mais aussi d’excitation pure (il
y a beaucoup de gangs qui opèrent pour le plaisir du frisson, de l’interdit). Les habitants du
quartier du gang vont souvent être liés au gang (famille, etc) : ce qui va constituer des
communautés autour du gang : les parents vont hésiter à dénoncer les enfants du gang etc, ce qui
complexifie la répression des gangs de rue. Certains gangs de rue peuvent contribuer aux mêmes
apports que la mafia en matière de maintien de l’ordre public.
Les organisations intermédiaires : de très nombreuses organisations qualifiées de mafias
dans le langage courant sont en fait des organisations intermédiaires. Par exemple, les
organisations raciales américaines comme la mafia jamaïcaine qui s’oppose à la mafia afro-
américaine, la mexican mafia (mexicains), la mafia portoricaine, les salvadoriens, les dominicains,
la bradva (confrérie russe), la pègre tchétchène, géorgienne, ukrainienne, albanaise, la Chaldean
Mafia (chrétiens d’Irak). Egalement, il faut noter l’existence des gangs de motards : les Hells
Angels, les Bandidos, les Outlaws, les Pagans, … En France aussi, il y en a un certain nombre :
les organisations balkaniques (celles d’ex-Yougoslavie, Albanie), tchétchènes, ukrainiennes,
nigériennes, gitanes, motards, …

IV) La délinquance idéologique


Spectre idéologique extrêmement large qui va de la délinquance contestataire jusqu’au
terrorisme.

A) La délinquance contestataire
Délinquance militante : parmi tous les militants d’une cause, il y en a toujours qui
privilégient une forme délinquante, violente. Cette délinquance peut avoir des buts très nobles :
cela peut être de la désobéissance civile comme l’ont fait Gandhi, Mandela, le Dalaylama, etc. La
délinquance est tout acte considéré comme délinquant par les normes du pays où il a été

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commis : peu importe la cause défendue (ZAD, aide aux étrangers en situation irrégulière, …).
On peut aussi citer l’idéal anticapitaliste et l’idéal anarchiste.

B) Le terrorisme
Le terrorisme ne vise pas seulement à tuer dans un but idéologique, le terrorisme vise à
répendre la terreur. La notion de terrorisme vient des Français et du régime révolutionnaire de
la terreur : emploi par l’Etat de la terreur pour maintenir l’ordre. Le terrorisme s’est ensuite
progressivement détaché de l’Etat pour justement s’en prendre à l’Etat.
On peut distinguer le terrorisme domestique du terrorisme international. Le terrorisme
domestique englobe tous les mouvements terroristes séparatistes (IRA, ETA, Corses, le FLN, les
FARC, le sentier lumineux au Pérou, les tigres tamouls au Sri Lanka, …). On peut aussi citer le
terrorisme de l’extrême droite : aux USA (KKK, …), en Europe, … et le terrorisme de l’extrême
gauche : les brigades rouges en Italie, la bande à Baader en Allemagne, l’action directe en France.
Le terrorisme international provient souvent de réseaux qui s’installent sur le territoire
d’Etats en déliquescence (Liban Hezbollah, Daesh, etc). Il y a beaucoup de terroristes
domestiques qui se sont réclamés du terrorisme international pour le prestige. Il existe de très
nombreux liens entre le terrorisme et la criminalité lucrative : les terroristes ont souvent des
activités lucratives pour financer leurs actions (ex : Daesh a vendu des biens pillés sur des lieux
archéologiques, détournement de pétroles).
Il y a eu plusieurs vagues d’attentats en France : 1994-1995 : détournement d’un avion,
… Depuis 2012 : Mohamed Merra, Charlie Hebdo, 13 novembre 2015, promenade des
Anglais,…
Il est particulièrement difficile de combattre le terrorisme : d’abord, parce que le
terroriste se mélange à la population et il est très difficile de l’identifier (deux profils types : jeunes
hommes très cultivés qui pensent être victimes de discrimination et le jeune homme petit
délinquant qui s’est radicalisé en prison). Egalement, il est extrêmement difficile de déradicaliser
un terroriste.

Section II : les caractéristiques générales des délinquants


Ces caractéristiques sont très générales et très nombreuses : on va traiter le sexe, l’âge et
l’appartenance ethnique/l’immigration

I) Sexe et délinquance
Dans les systèmes notamment occidentaux, les droits se ressemblent un peu, surtout en
matière pénale. Les seules petites différences concernent les violences faites sur soi-même et tout
ce qui touche à l’intime. L’intime est très intéressant pour la criminologie car dans ce domaine,
les différences entre les nations s’expriment encore en droit pénal. Mais on ne va pas parler de
sexualité mais de délinquance : quelle est la différence entre les hommes et les femmes ? En
France, les femmes ne sont concernées que par 15% des enquêtes de police : donc 15% des
délinquants sont des femmes, seulement 10% des condamnés sont des femmes, et seulement 3%
des détenus sont des femmes. On constate de très grandes variabilités concernant diverses
infractions. Typiquement, 90% des actions révélées par les actions de services de police
(exemple : le trafic de stupéfiant n’est pas souvent dénoncé, il est souvent découvert par les
services de police, ou les immigrés en situation irrégulières) sont commises par des hommes. En

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revanche, pour ce qui est de la criminalité astucieuse, 30% des délinquants sont des femmes. La
part des femmes dans la criminalité n’est pas identique en fonction de la nature de la délinquance
que l’on considère. Ce qui semble ressortir des statistiques c’est que les femmes semblent se
concentrer sur une criminalité moins lucrative, moins organisée et moins violente que celle des
hommes.
Comment expliquer ces données ? Il y a plusieurs hypothèses qui ont pu être
proposées : physiologiquement, les femmes n’ont pas le même corps que les hommes et donc
elles sont moins fortes. Par conséquent, elles se concentrent moins sur la criminalité. Cette
explication n’est pas convaincante car aujourd’hui, la force physique n’est plus l’élément essentiel
pour commettre des infractions criminelles. Certains ont alors proposé des explications
psychologiques : les femmes n’ont pas le même fonctionnement mental que les hommes et donc
par conséquent, de leur tempérament conservateur, doux, respectueux de l’ordre établi et calme,
elles sont moins tournées vers la criminalité (idée reçue qui a fait que le droit de vote des femmes
a été pendant longtemps critiqué par la gauche car ils ont toujours pensé qu’elles voteraient à
droite, du fait de leur tempérament conservateur). Cela n’est pas convainquant car aujourd’hui,
la médecine nous a prouvé qu’aucun élément biologique ne viendrait expliquer cette thèse
psychologique. En revanche, on peut dire que si elles sont majoritairement plus douces,
conservatrices etc, cela viendrait d’une explication sociologique : les stéréotypes de la féminité
sont aux antipodes des valeurs du milieu criminel. Autrement dit, ce que la société dit à la femme,
la manière dont elle doit se comporter et les valeurs qu’elle doit défendre, sont à l’opposé des
valeurs criminelles. Les études de genres nous apprennent qu’il existe des stéréotypes masculins
et féminins développés par toutes les sociétés humaines, et les valeurs que l’on préconise aux
femmes sont aux antipodes de la criminalité. Les stéréotypes féminins seraient donc emprisonnés
dans le triptyque social : la fille, la mère et l’épouse, et ces modes d’être sont aux opposés de la
criminalité.
Otto Pollack : théorie chevaleresque (Chivalry thesis) : la criminalité féminine est
artificiellement basse : le système pénal étant essentiellement contrôlé par des hommes (ce qui
n’est plus le cas aujourd’hui en France) et qu’ils se comportent de manière chevaleresque, ils sont
plus indulgents à leur égard : elles sont moins suspectées, moins dénoncées, moins jugées et
condamnées que les hommes.

II) Age et délinquance


On avait vu que la délinquance des très jeunes enfants est normale. C’est si la violence
persiste après 5-6 ans qu’il faut s’inquiéter. La délinquance augmente de 7 à 25 ans puis décline
jusqu’à devenir quasiment inexistant chez les personnes très âgées. Les mineurs représentent 18
à 20% des personnes misent en cause par la police mais seulement 8% des condamnés. Cela
signifie que la justice française ne poursuit que la moitié des mineurs délinquants. Pourquoi la
délinquance est-elle plus importante chez les jeunes ? Plusieurs explications ont été avancées :
pour Victor Hugo, l’âge apporte un assagissement et une extinction de ses pulsions « Toutes les
passions s’éteignent avec l’âge, l’une emportant son luth, l’autre son couteau ».
Autre explication : l’efficacité des adultes : les jeunes ont moins d’expérience de la
délinquance que les majeurs, et ils commettent beaucoup d’infractions en groupe, ce qui rend les
arrestations beaucoup plus faciles et en plus grand nombre, tandis que les adultes sont plus
méthodiques et agissent plus seuls, donc ils se font moins attraper.

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L’âge marque une évolution selon les types de criminalité : on se doute moins qu’un
crime a été commis par une personne âgée et bien habillé, on part souvent du principe que les
jeunes représentent la grande majorité de la délinquance, donc on va souvent chercher le
coupable chez les jeunes etc, et cela entretient le stéréotype, l’idée. Les infractions à l’ordre public
sont plus commises par des mineurs/jeunes, tandis que les agressions sexuelles / viols sont
majoritairement perpétrés par des personnes âgées. Les meurtres sont majoritairement commis
par des personnes de 18 à 25 ans.

III) Appartenance ethnique, immigration et délinquance


Aux USA, on a le droit de faire des statistiques ethniques qui nous apprennent que les
taux de criminalité violentes sont 3 fois plus élevés chez les noirs, les hispaniques et les indiens.
En 2017, 14% des Américains étaient noirs et pourtant 37% des prisonniers sont noirs et 50%
des condamnés à morts sont également noirs. On considère que 3% des noirs américains sont en
prison alors que 0.5% des blancs seulement le sont. Ces chiffres témoignent-ils de la réalité de la
délinquance aux USA ? La discrimination s’exprime à tous les étages du système de la répression
pénale américaine : les minorités sont plus ciblées par la police américaine, ils sont plus
facilement jugés coupables et à des peines plus sévères que les blancs (prouvé par des études
statistiques). Cela se démontre lorsque l’on observe que les taux de criminalité chez les noirs aux
USA sont très supérieurs aux taux de criminalités des hispaniques. Or, on sait que la situation
des « latinos » est beaucoup moins favorable que celle des noirs américains. Comment
l’expliquer ? Un hispanique ressemble plus à un blanc, surtout dans les Etats du sud des Etats
Unis où les blancs sont bronzés naturellement.
Les étrangers représentent 13 à 14% de la délinquance rapportée par les services de police
(20%) et de gendarmerie (beaucoup moins). Il s’agit ici uniquement de personnes de nationalité
étrangère. Des études plus précises ont abouti à dire que les migrants temporaires commettent 2
à 3 fois plus d’infractions que les nationaux. Tandis que les migrants définitifs de première
génération (ceux nés à l’étrangers et qui veulent vivre et s’installer en France) commettent moins
d’infractions que les nationaux. Pourquoi ? Car ils veulent s’intégrer. En général, on observe
même des comportements de durcissement des conditions d’obtention de la nationalité française.
En revanche, les migrants de la seconde génération présentent une sur-délinquance. Une enquête
d’auto-confession a établi que cette population commet 1.5 à 2 fois plus d’infractions que le reste
de la population. Pourquoi ? Difficultés sociaux-culturelles, et les conflits de culture (les migrants
de la seconde génération sont soumis à un conflit intérieur en raison de leur double culture).
Pour les migrants de la 3e génération, les statistiques sont identiques que pour les nationaux.

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PARTIE II : LA MICROCRIMINOLOGIE
Ici on va s’intéresser à la question de la personnalité du criminel. Donc on va se pencher
sur l’iné, qui s’oppose à l’acquis.

Section I : l’inné
Question de l’influence de l’état mental du délinquant, et par effet miroir, des troubles
mentaux.

I) L’état mental du délinquant


Un certain nombre d’études ont cherché à trouver un lien entre les anomalies neuronales,
les anomalies chromosomiques et l’intelligence et la criminalité.

A) Les anomalies du cerveau


Certaines études de neuropsychologie ont établi la responsabilité du lobe frontal et du
système limbique dans la régulation des comportements antisociaux, extravertis, impulsifs et
agressifs. Les personnes qui rentrent dans ces caractéristiques sont en général des personnes qui
souffrent de limitations intellectuelles, de difficultés notamment à communiquer avec autrui, ce
qui entraîne une certaine agressivité en réponse. On observe également chez ces personnes une
limite des fonctions exécutives, c’est-à-dire les processus nécessaires à l’accomplissement d’une
tâche complexe (planification, organisation, inhibition, abstraction, apprentissage, mémoire de
travail et prise de décision). Cette limitation des fonctions exécutives peut être partiellement
environnementale (acquis) : pour certains chercheurs, les expériences d’attachement émotionnel
auraient des conséquences sur le « câblage » de notre cerveau. John Bowlby a établi qu’il
existerait 3 types d’attachements : secure (le plus sain, lorsque les besoins de l’enfant sont
satisfaits, l’enfant va développer des capacités normales à exprimer des sentiments), hésitant
(lorsque les besoins de réconfort et d’attention de l’enfant ne sont pas satisfaits voire sont
contredis. Cela développerait une inhibition de la capacité à ressentir et exprimer des émotions.
Il va en résulter une hostilité larvée, une colère froide et de possibles explosions de colère) et
anxieux (les besoins d’attachement et d’attention de l’enfant ne sont satisfaits que de manière
épisodique. Il en résulte une crainte de ne pas être aimé, une hyper émotivité, et donc une
expression excessive des émotions : l’enfant croit qu’il faut surjouer ses émotions pour obtenir
de l’attention). Les recherches ont mis en évidence l’importance de la biochimie du cerveau, dont
tout un ensemble de neurotransmetteurs et d’hormones. On peut citer comme
neurotransmetteur la sérotonine, la dopamine, la noradrénaline, l’adrénaline, etc. Comme
hormones on peut citer de testostérone ou de cortisol. Quand une personne souffre d’un manque
d’une de ces hormones ou de neurotransmetteurs, cela peut avoir des conséquences grave qui
peut mener à des comportements violents. Ces considérations là amènent à une question
intéressante : peut-on envisager des chirurgies du cerveau pour guérir des personnes violentes ?
Cela a eu lieu dans l’histoire avec des trépanations et des lobotomies (50 000 opérations entre
1930 et 1950 aux USA). Vidéos sur ce sujet : épisode 10 de dirty biology « tuto création
zombie : la chirurgie », épisode 27 des revues du monde « l’art antique de se trouer le crâne. »
Les nouvelles techniques médiales permettent d’envisager d’autres moyens : des
traitements médicamenteux ou des techniques réversibles comme la stimulation neuronale par
électrodes

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B) Les anomalies chromosomiques
On estime que les aberrations chromosomiques, plus précisément les aberrations
gonosomiques (qui portent sur les chromosomes sexuels) se retrouveraient plus chez les criminels
emprisonnés que dans le reste de la population. On peut citer à cet égard le syndrome de
Klinefelter (ou syndrome 47 : on a un chromosome sexuel en plus) dont souffre Francis
Heaulme, un des plus grands criminels français, ce qui le rend impuissant, et pourtant il était un
tueur en série sexuel : il faisait violer ses victimes par des complices. Il existe aussi des syndromes
48 et 49 (la combinaison entre les X et les Y peuvent varier).
Des études de jumeaux ont été réalisés : la première par deux chercheurs Norvégiens
(O.S Dalgard et Einar Kringlen) entre 1930 et 1935. Ils ont observé sur 33 000 jumeaux, 139
paires de jumeaux dans lequel il y a au moins un criminel. Ils ont fait une différence entre les
jumeaux monozygotes et les jumeaux dizygotes (les vrais et les faux jumeaux). Ils ont observé un
taux de concordance criminel de 20 à 30% chez les dizygotes, alors que chez les monozygotes, il
est de 50 à 60%.
2002, Rhee et Waldman : 40% des comportements antisociaux viendraient de facteurs
génériques et 60% de l’environnement.

C) L’intelligence et la délinquance
L’intelligence et délinquance est une question très peu étudiée par nos criminologues
français car on a du mal à considérer le QI comme une donnée acceptable et utilisables dans des
recherches scientifiques. En revanche, aux USA, ils n’ont pas de problème à utiliser cette mesure
du QI, et pour eux, la plupart des délinquants sont commis par des personnes qui ont un QI
inférieur au reste de la population. En revanche, il existe certains types de criminalité qui
nécessitent un QI très élevé. En France, le reproche que l’on fait au QI c’est que les tests sont
très malléables et très culturels.

II) Troubles mentaux et délinquance


A) Les désordres mentaux
DSM = Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders, c’est un manuel surtout
utilisé aux USA et qui liste l’ensemble des pathologies psychiatriques. On trouve la psychopathie
et la sociopathie, qui se traduisent toutes les deux par un comportement extrêmement antisocial.
Première caractéristique : manque d’empathie, difficulté à voire les autres comme des
personnes, il les voit plus comme des objets. 2°/ Indifférence aux normes sociales et culturelles.
3°/ Forte irritabilité, impulsivité, agressivité et très faible seuil de tolérance à la frustration. 4°/
Absence de remords ou de culpabilité qui se manifeste par la recherche systématique d’excuses.
5°/ Une incapacité à prévoir et à tirer profit de l’expérience. 6°/ Une tendance à l’intrépidité
(absence de peur, de gêne, ou moins que le commun des mortels). 7°/ Quête d’un haut degré
d’excitation. 8°/ Etat permanent d’agitation et de dysphorie (il alterne entre anxiété, dépression,
tension). 9°/ Incapacité à tolérer l’ennui. 10°/ Incapacité chronique à tenir ses engagements,
irresponsabilité chronique.
Certains psychopathes ou sociopathes ont très bien réussis (certains sont avocats,
médecins, psychiatres, chef d’entreprise), mais une majorité d’entre eux sont des délinquants
multirécidivistes violents et non spécialisés. Le terme de psychopathe a été banalisé mais un vrai
psychopathe est totalement incompatible avec la vie en société. On estime qu’1/4 des criminels

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dotés de comportements antisociaux sont des psychopathes. Un psychopathe c’est quand le
trouble vient de la génétique tandis que la sociopathie est causée par l’environnement, c’est la
seule différence entre ces deux types de personnes (l’origine du trouble), mais le trouble est
exactement le même.
Caractéristique importante : c’est totalement incurable. 5.8% des hommes et 1.2% des
femmes risquent de développer une personnalité antisociale. Chez les détenus, on estime que les
personnalités antisociales représenteraient 50 à 75% d’entre eux. A noter que les comportements
antisociaux peuvent être développés en prison.
Autres maladies : la schizophrénie (meurtres et agressions sexuelles), la paranoïa (crimes
passionnels et actes de fanatisme), les mélancoliques (plus tendances au meurtre et au suicide
collectif), les maniaques (plus tendances aux bagarres, aux injures, aux viols et autres agressions
sexuelles, les escroqueries, la filouterie. La cleptomanie, la pyromanie, le voyeurisme,
l’exhibitionnisme sont des comportements maniaques).

B) Les tueurs en série


Généralement, quand on en parle, le premier auquel on pense (historiquement) c’est
Jacques l’éventreur (1838 à Londres, on lui en attribue 5 ou 6). Evidemment, ce n’est pas le
premier, par ex : Gilles de Rais (compagnon de Jeanne d’Arc) a été jugé et tué pour avoir violé
et tué 140 enfants.
Qu’est ce qu’un tueur en série ? Il n’y a pas de définition juridique. Selon Robert Ressler
(1937-2013, agent du FBI et profiler) : une personne ayant commis de sang froid au moins 3
meurtres avec un temps de latence entre eux. Cela permet de dissocier le tueur en série du tueur
de masse et le tueur sporadique (il massacre au hasard dans plusieurs lieux différents à la suite).
Ressler différenciait les tueurs en série organisés des tueurs en série désorganisés, mais certains
criminologues pensent que la frontière est très floue entre les deux. Néanmoins, il a observé 5
caractéristiques communes entre les différents tueurs en série : 1°/ Comportement très agité en
dehors de la prison et un comportement très serein en prison (comme s’il était très soulagé d’avoir
été arrêté). 2°/ Une tendance à manifester une certaine indestructibilité, infaillibilité (ils ne veulent
pas dépendre de qui que ce soit). 3°/ La différenciation entre lui-même et le monde qui l’entoure
est altérée (il a du mal à comprendre que le monde n’est pas lui, qu’il peut exister sans lui). 4°/
Une image maternelle sur un piédestal. 5°/ Le clivage du « moi », le « moi » conscient sait qu’il
a commis les actes qu’on lui reproche mais il ne sent pas coupable, parce qu’il ne sent pas l’avoir
fait. On observe également des caractéristiques très fréquentes : séparation parentale, disparition
du père, fréquence des abus sexuels, déménagements fréquents, atmosphère éducative pleine de
violence et cruauté envers les animaux supérieure. On retrouve souvent également la nécessité
d’un fétiche pour arriver à l’orgasme, qui s’oppose aux tueurs en série qui cherchent un sentiment
de toute puissance. Très souvent, le premier meurtre est utilitaire ou improvisé, et ils se rendent
compte du sentiment de plaisir que cela leur procure. En général ils ne haïssent pas leurs victimes,
ils en sont totalement indifférents car sinon cela signifierait qu’ils les reconnaissent comme une
personne et qu’ils ont une relation avec elles. On estime que les tueurs en série sont surtout
présents aux USA (60% des tueurs en série du Monde), ils seraient majoritairement des hommes
blancs (aux USA) on observe que les victimes des tueurs en séries sont quasiment exclusivement
blanches (95%). A noter que les USA est un des seuls pays à s’être beaucoup penché sur la
question.

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En France, on peut établir 3 catégories : 1°/ Les tueurs en série qui commettent des
meurtes utilitaires ou pseudo-utilitaires. Par ex : Henri Désiré Landru : sa spécialité était de tuer
des veuves qu’il épousait, ou le docteur Marcel Petiot (entre 27 et 63 victimes entre 1941 et 1944,
il tuait des minorités chassées par les nazis en prétendant vouloir les aider pour prendre leurs
affaires). 2°/ Les actes commis par des vagabonds ou des pseudo-marginaux (ex : Joseph
Vacher : il a tué 11 personnes en 1894 et 1917 (tueur de la Landes), et Francis Heaulme (routard
du crime) il faisait violer ses victimes avant de les tuer). 3°/ Les tueurs sexuels comme Emile Louis
(il aurait violé 8 enfants handicapés) ou Guy Georges (SK1), Patrice Allègre (5 meurtres et 10
viols), le couple Fourniret ou encore Pierre Bodein.

Section II : l’acquis

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