Vous êtes sur la page 1sur 17

ARTHUR RIMBAUD

Jean Nicolas Arthur Rimbaud est né le 20 octobre 1854 à Charleville-Mézières dans les Ar-
dennes. Arthur est le deuxième enfant de la famille qui en compte cinq. Son père, capitaine
d'infanterie, est souvent absent jusqu'au moment où il abandonne femme et enfant. Sa mère
les élève seule, suivant des principes stricts. Le jeune Arthur est un élève brillant, il rem-
porte des prix de littérature dès son adolescence. Il saute la classe de cinquième. Grâce à sa
plume talentueuse, il remporte divers prix dont le premier prix du Concours académique en
1869. Jeune homme révolté contre l'ordre des choses, il voit la poésie comme un moyen de
les faire évoluer.
En 1870, il fait une rencontre capitale dans sa vie future de poète. Cette année là, Georges
Inzambrard est nommé professeur de rhétorique au Collège de Charleville. C’est grâce à
l’influence libératrice de ce jeune professeur que Rimbaud découvre les parnassiens (Le-
conte de Lisle, Banville, Verlaine) et commence à écrire des vers en français.
L’émancipation de Rimbaud du chaos familial le pousse à écrire à Théodore de Banville,
chef de file du mouvement littéraire du Parnasse, pour le rejoindre. On voit déjà ici la
volonté de devenir poète, volonté bien opposée aux idées de sa mère. C’est ainsi qu’à la fin
de l’été 1870, après une excellente année au cours de rhétorique de George Izambard, il
fugue pour la première fois. Fugue de courte durée car il est contrôlé sans billet à la Gare du
Nord à Paris et placé en détention. Là-bas, il reste 3 semaines avant d’être raccompagné
chez sa mère. En partant, il laisse 15 poèmes à un éditeur local : Paul Demeny. Ces poèmes
seront appelé à devenir, plus tard, le fameux Cahier de Douai

Paul Verlaine, à qui Rimbaud a envoyé ses écrits, est touché par les vers du jeune homme et
l'invite à Paris : "Venez, chère grande âme, on vous appelle, on vous attend". Rimbaud s'y
rend aussitôt, emportant avec lui son poème "Le bateau ivre". S'ensuivent deux années d'er-
rance et de vagabondage. Ils vivent à Paris chez Verlaine (lui-même étant marié et vivant en
ménage) et mènent une vie de bohème en fréquentant les bars du quartier Latin. Puis, les
deux amants passent par Bruxelles et Londres. Leur liaison s'achève violemment. Le
8 juillet 1873, Verlaine et Rimbaud se disputent et décident de se séparer. Verlaine, en état
d'ébriété, tire sur Rimbaud et le blesse. Verlaine sera condamné par la justice belge à deux
ans de prison. Peu après, Rimbaud achève et publie "Une saison en enfer", dans laquelle il
témoigne de sa souffrance. Sa blessure sera la cause de sa mort. Celui que Verlaine avait
surnommé "l'homme aux semelles de vent" poursuivit seul ses voyages. Il écrit le recueil
"Illuminations" qui comprend 57 poèmes, parus en 1886.
A 19 ans, Rimbaud choisit d'abandonner la poésie. Cet abandon est pour certains l'aveu de
son échec de faire évoluer le monde au travers de ses poèmes. D'autres pensent que c'est
simplement pour gagner sa vie qu'il arrête d'écrire et se tourne vers le commerce. Rimbaud
enchaîne les destinations : Hollande, Suisse, Allemagne, Italie, Chypre… En 1886-87, il se
lance dans le trafic d'armes dans l'espoir de devenir riche. L'affaire se révèlera un désastre.
En 1891, il souffre de douleurs au genou et se fait rapatrier en France. A Marseille, les mé-
decins découvrent une tumeur au genou. Rimbaud doit immédiatement se faire amputer de
la jambe droite. La maladie progresse et Rimbaud meurt le 10 novembre 1891 à Marseille à
l'âge de 37 ans. Il est enterré au cimetière de Charleville-Mézières. Il existe un doute quant à
la version finale de certaines lettres et écrits de Rimbaud. Plusieurs versions de poèmes ont
été retrouvées sans savoir laquelle était la version finale. Poussé par une volonté de créer
une langue nouvelle, "de l'âme pour l'âme, résumant tout, parfums, sons, couleurs, de la
pensée accrochant la pensée et tirant (Lettre du voyant)", Arthur Rimbaud a créé un style
moderne, loin de la poésie traditionnelle et de son lyrisme.

Les caractéristiques de l’écriture de Rimbaud

Les Cahiers de Douai est une œuvre profondément lyrique.


L’omniprésence de la première personne du singulier place le moi au centre de la démarche
du poète.
La forme exclamative traduit le surgissement de l’émotion (« Nuit de Juin ! Dix-sept ans ! »
dans « Roman »).
L’écriture hyperbolique et les apostrophes, comme dans « Soleil et chair », relèvent égale-
ment d’une écriture lyrique traditionnelle : « Et tout croît, et tout monte ! – Ô Vénus, ô
déesse ! ».
Impossible de passer à côté la verve satirique de Rimbaud. Le jeune poète s’en prend à
Napoléon III dans « Rages de César » et « L’éclatante victoire de Sarrebrück » où l’empe-
reur apparaît comme un vulgaire personnage burlesque « raide sur son dada ». Dans « À la
musique », Rimbaud cible les bourgeois, bafoués pour leur pesante fatuité et leur appât du
gain. Plus étonnant encore, la plume satirique de Rimbaud s’étend jusqu’à lui même si l’on
considère que le poète se présente souvent avec autodérision. Dans « Au-Cabaret vert » par
exemple, le style épique du vers « J’entrais à Charleroi » est ironique : la solennité de cette
annonce, qui fait songer au triomphe d’un empereur, porte un regard amusé de Rimbaud sur
ses propres espoirs de voyage.

Bibliographie d'Arthur Rimbaud : ses principaux écrits


1870 : Recueil Demeny ou Cahiers de Douai avec les poèmes :
• "Sensation"
• "Morts de Quatre-vingt-douze"
• "Au Cabaret-Vert, cinq heures du soir"
• "Le dormeur du val"
• "Ma bohème"
• "Le Mal"
• "Les Effarés"
• "A la musique"
1873 (avril à août) : Recueil Une saison en enfer avec les poèmes :
• "Nuit de l'enfer"
• "Matin"
• "Adieu"
1872-1875 : Recueil Illuminations avec les poèmes :
• "Aube"
• "Fleurs"
• "Vagabonds"

Les Cahiers de Douai

Le recueil Cahiers de Douai est particulièrement touchant à lire puisque Rimbaud n’a que
16 ans lorsqu’il écrit les poèmes qui composent cet ouvrage. Les Cahiers de Douai est un
court recueil de vingt-deux poèmes que Rimbaud publie en automne 1870. C’est une année
d’agitation politique majeure : la guerre contre l’Allemagne conduit à la chute de l’Empire.
Ce contexte influence le recueil, qui réactive l’imagerie révolutionnaire (« Morts de quatre-
vingt-douze », « Le Forgeron »), raille l’empereur déchu (« Rages de Césars ») et dénonce
la violence de son temps : « Les effarés » montre des enfants affamés devant l’enseigne
d’une boulangerie, « La ballade des pendus » prend la forme d’une véritable danse macabre.
Le recueil est toutefois également empreint des douceurs des premières amours : on en
trouve des traces dans « Première soirée » et « Roman ». De courts poèmes, comme
« Sensation » et « Ma bohème » soulignent la communion du jeune poète avec la nature ins-
piratrice.
Les poèmes de Rimbaud mettent en scène une galerie de personnages. Certains, comme les
« Réparties de Nina », suivent une forme dialoguée. Rimbaud s’essaie aux grandes fresques
sociales dans « Le Forgeron », aussi bien qu’au portrait intime dans la
« Vénus Anadyomène » ou le « Dormeur du Val ».

Les Cahiers de Douai est composé de deux cahiers, de respectivement 15 et 7 poèmes,


présentés dans l’ordre chronologique.
Une partie de ces poèmes relate l’éveil des sens et de l’adolescence comme « Sensation »,
« Roman »,« Au cabaret vert », « La Maline ».
D’autres textes ont une visée politique. Ils évoquent l’univers militaire de la guerre des an-
nées 1870 comme dans « Le Mal » ou « Le Dormeur du Val » qui dénoncent l’irruption
délétère de la guerre dans la vie des jeunes gens. Rimbaud se dresse contre la tyrannie et
n’hésite pas de traiter Napoléon III avec beaucoup de mépris, dans « Rages de César » ou
«L’éclatante victoire de Sarrebrück ».
L’adolescent manie également une plume satirique comme le montre la critique de la bour-
geoisie dans « À la Musique » ou « Roman ». Les poèmes « Ophélie », « Bal des pendus »,
« Le châtiment de Tartufe », « Vénus anadyomène » effectuent un voyage dans la littéra-
ture : Dans « Ophélie », Rimbaud nous offre son regard sur un personnage d’Hamlet de
Shakespeare. Dans « Le Châtiment de Tartufe », le poète convoque le personnage créé par
Molière. « Vénus anadyomène » constitue un contre-blason conformément à la tradition lit-
téraire du XVIème siècle.
Enfin, dans « Ma Bohème », le poète s’affranchit des règles poétiques traditionnelles et
construit son propre mythe du poète vagabond, à michemin entre Orphée, qui anime la na-
ture de sa lyre, et le Petit-Poucet, figure errante qui sème des rimes.

Les thèmes importants dans Cahiers de Douai

La Nature

La nature est l’occasion pour Rimbaud d’une rencontre sensuelle avec le monde, d’où l’im-
portant champ lexical de la perception, qui souligne la symbiose du poète avec la nature : «
picoté », « fouler », « j’en sentirai la fraîcheur », « baigner ma tête nue»
(« Sensation »). La nature apparaît souvent comme une figure féminine maternelle, bien-
veillante et protectrice, comme dans « Ma Bohème » (« Mon auberge était à la Grande-
Ourse ») ou « Le Dormeur du Val » (« Nature, berce-le chaudement »). Elle prend une di-
mension presque érotique dans « Sensation » où Rimbaud se sent avec elle « heureux
comme avec une femme. ». Dans « Soleil et Chair », la nature divinisée acquiert le statut de
Déesse Mère de la mythologie, incarnation de la profusion et de l’abondance.

Le désir amoureux et la découverte de soi

Ce thème est important, car il est au cœur des Cahiers de Douai. Rimbaud est, avant tout, un
adolescent qui se découvre et qui découvre la vie. Quelques poèmes célèbrent ses amours
avec des jeunes filles ou ses rencontres avec des femmes qui attirent son regard. On retrouve
une vision de l’amour éloignée du romantisme : l’auteur connaît ses premiers émois mais
reste lucide sur lui-même. Rimbaud reprend la figure poétique classique de l’amour et l’uti-
lise pour se découvrir lui-même. Le poème « Première Soirée », représentant une scène
d’amour insouciante, illustre bien l’état d’esprit du poète.
Dans « Roman », « Première Soirée », « Sensation », « Les réparties de Nina », Rimbaud
évoque les premiers émois amoureux, envisagés sous le prisme de la sensualité. L’atmo-
sphère de ces poèmes est intimiste ; la jeune fille aimée se montre réceptive et complice («
Elle jeta sa tête mièvre/ En arrière » dans « Première soirée » ou « Rieuse » dans « Au
Cabaret-Vert »). On note toutefois que l’initiation amoureuse reste souvent fantasmée. Ain-
si, si « Rêvé pour l’hiver » dégage une atmosphère libertine, le titre suggère qu’il ne s’agit
que d’une scène « rêvée » que le futur « nous irons / tu me diras » » déréalise. Dans « Au
Cabaret-Vert », la « fille aux tétons énormes, aux yeux vifs » disparaît de la fin du poème
pour laisser place aux mets et à la boisson, qui semblent suffire au plaisir épicurien de Rim-
baud. On constate donc dans le recueil une hésitation permanente entre la réalité et la fiction
de l’amour.

La liberté

Les Cahiers de Douai constituent une ode à la liberté comme en témoignent les nombreuses
allusions au voyage et à l’errance (« Au Cabaret-Vert », « Ma Bohème »). La liberté est éga-
lement envisagée dans une perspective sociale et politique. Dans « Le Forgeron », l’ouvrier
devient une allégorie du peuple qui défie l’aristocratie et Louis XVI. Dans « Morts de
Quatre-vingt-douze et de Quatre-vingt-treize… », Rimbaud fait l’éloge de la Révolution. Le
Second Empire et Napoléon III sont attaqués dans « Rages de César ». « L’Éclatante vic-
toire de Sarrebrück » tourne en dérision les titres des journaux à l’égard de l’Empereur.

La critique de la bourgeoisie

Rimbaud raille la bourgeoisie, empesée dans ses certitudes et son confort. Dans « À la mu-
sique », le champ lexical de l’étouffement (« poussifs », « étranglent », « chaleurs »,
« bouffis ») dresse le portrait d’une élite pédante et auto-satisfaite. Les termes relatifs au
commerce (« rentiers », « bureaux », « airs de réclames », « en argent », « En somme ! »)
envahissent la langue bourgeoise et suggère que la recherche du gain financier empêche
l’expression du lyrisme et de la beauté.

Critique de la guerre

Ce thème est une préoccupation majeure du poète dans ses réflexions sur le monde mo-
derne. Rappelons qu’à l’époque de Rimbaud, la guerre est d’actualité. Pensons au célèbre
poème « Le Dormeur du val » dans lequel Rimbaud oppose au monde haineux, angoissant
et sombre la description d’un soldat paisible, serein et pacifiste. Rimbaud utilise, par consé-
quent, la poésie comme un réquisitoire contre la barbarie inhérente à toute forme de guerre.

Critique de la religion et des institutions

Tout lecteur de Rimbaud remarquera que la religion dans les Cahiers de Douai est vivement
critiquée. Dans le poème « Le Châtiment de Tartufe », Rimbaud critique l’hypocrisie reli-
gieuse et se moque des idées religieuses à la manière d’un Baudelaire. Le poète s’insurge
également contre la monarchie et célèbre les idéaux de la Révolution française dans le
poème « Le Forgeron ». « Liberté chérie ! » ainsi peut se formuler la philosophie de Rim-
baud.

Angoisse du monde moderne


Il est enfin un thème qui parcourt les Cahiers de Douai dans leur intégralité : une forme
d’angoisse liée à la naissance d’un nouveau monde. En effet, Rimbaud célèbre une nature
verdoyante, un monde idéalisé dans le poème « Soleil et chair », poème qu’il faut lire
comme un regret face au monde moderne, fade et disharmonieux. Cette angoisse se lit aussi
dans la conception étonnante de la beauté que se fait Rimbaud dans le poème « Vénus
Anadyomène ». En effet, le poète parodie la naissance de Vénus, déesse de l’amour. En re-
vanche, l’auteur crée un objet poétique digne et d’une beauté tragique en peignant le portrait
d’enfants affamés dans « Les Effarés ». Le monde moderne, violent et laid aux yeux du
poète, brise l’harmonie des origines et la rend presque grotesque

Résumé des poèmes

Première soirée

Le poème première soirée d’Arthur Rimbaud se trouve en tête des Cahiers de Douai. Le
poète l’écrit à 16 ans et y raconte une scène d’amour et de première fois de manière légère
et comique. Cette sensualité mise en place est également une métaphore de l’acte de créa-
tion poétique.

Sensation

Sensation est un court poème d’Arthur Rimbaud. Le poète y évoque le plaisir et les sensa-
tions ressenties lors d’un voyage ou d’une fugue. Le contact avec la nature y est primordial
car il permet de se retrouver, loin des contingences et contraintes de la vie quotidienne.

Le forgeron

Le forgeron est un long poème d’Arthur Rimbaud dans lequel le jeune poète invente une
anecdote historique. Un forgeron s’adresse au roi Louis XVI pendant la Révolution
Française pour lui faire contempler la misère. Cette fresque permet en fait à Rimbaud de cri-
tiquer le second empire.

Soleil et chair

Soleil et chair est un long poème mystique d’Arthur Rimbaud. Le poète y mélange des sym-
boles appartenant à différentes religions et mythologie afin de créer une sorte de religion
poétique personnelle. Il démontre déjà ici sa volonté de libérer et révolutionner le langage.
Ophélie

Ophélie est un poème en 9 quatrains d’Arthur Rimbaud. Le poète y emprunte le personnage


Shakespearien d’Ophélie, morte noyée, et l’utilise comme une figure de double. Cette incar-
nation représente les doutes et l’errance d’Arthur Rimbaud dans sa quête personnelle et poé-
tique.

Bal des pendus

Bal des pendus est un poème d’Arthur Rimbaud. À l’origine, il s’agirait d’un devoir dans le-
quel le jeune Rimbaud devait imaginer une lettre où Charle d’Orléans demandait à Louis X
de gracier le poète François Villon. On y lit une prise de position pour les poètes et contre la
religion.

Le châtiment de Tartuffe

Le châtiment de Tartuffe est un poème allégorique d’Arthur Rimbaud. Il donne à voir la pu-
nition du personnage de faux dévot de Molière, que l’on peut généraliser à la punition de
tous les hypocrites, dont Napoléon III. Rimbaud affirme ici le pouvoir de la littérature enga-
gée.

Vénus Anadyomène

Vénus Anadyonème est un sonnet d’Arthur Rimbaud. Le poète y représente une prostituée
sous des traits empruntés à Vénus, déesse de la beauté, pour laisser voir progressivement sa
vulgarité, sa laideur et sa maladie. Le poème se conclut par une audace, faire rimer Vénus
avec Anus.

Les réparties de Nina

Les réparties de Nina est un poème narratif d’Arthur Rimbaud. Le poète cherche à y séduire
une jeune femme en se montrant insistant, mais elle ne cesse de se dérober à lui par ses ré-
parties. Finalement, la chute qui la montre si attachée à son bureau suggère qu’elle y a déjà
un amant.

À la musique
À la musique est un poème satirique d’Arthur Rimbaud. Le poète y dépeint de manière
acide toutes les classes sociales venues écouter jouer un orchestre militaire dans sa ville
d’origine : Charleville-Mézière. Ainsi, il critique le second empire et Napoléon III.

Les effarés

Les effarés est un poème engagé d’Arthur Rimbaud. Le poète y dépeint une scène pathé-
tique : 5 enfants affamés regardent avec envie un boulanger faire son pain. Le poème repose
sur des jeux de contrastes comme celui du froid des enfants avec la chaleur de la boulange-
rie.

Roman

Roman est un poème en 8 quatrains d’Arthur Rimbaud. Le poète y fait l’éloge de la liberté
et de la jeunesse. Le cadre est celui de la jeunesse de Rimbaud à Charleville, rêvant de liber-
té et d’émancipation. Le premier vers est très connu avec sa célèbre diérèse.

Morts de Quatre-vingt-douze et de Quatre-vingt-treize

Morts de Quatre-vingt-douze et de Quatre-vingt-treize est un sonnet engagé d’Arthur Rim-


baud. Le poète commence par rendre hommage aux soldats révolutionnaires, morts pour lut-
ter contre la tyrannie. Il ramène ensuite la critique au second empire et à Napoléon III.

Le Mal

Le Mal est un sonnet engagé d’Arthur Rimbaud. Il dresse le terrible tableau des soldats
morts pour des rois qui les méprisent. Il critique également Dieu qui ne s’intéresse pas à ces
hommes, mais uniquement au don des mères endeuillées. Pour Rimbaud, l’Église est au ser-
vice de la tyrannie.

Rages de Césars

Rages de Césars est un énigmatique sonnet d’Arthur Rimbaud sur un personnage de tyran.
Césars peut représenter Napoléon III aussi bien qu’un autre tyran. Il semble s’être laissé
consumer par sa soif de pouvoir et en voulant répandre la liberté, en a en fait privé le
peuple.
Rêvé pour l’hiver

Rêvé pour l’hiver est un sonnet sensuel et métaphorique d’Arthur Rimbaud. Prenant la
forme d’une invitation au voyage pour une jeune femme, le poète évoque une araignée qu’il
faudra chercher, métaphore des baisers du poète sur le corps de la femme.

Le dormeur du val

Le dormeur du val est un sonnet en Alexandrins d’Arthur Rimbaud. Le poète y décrit une
nature idyllique dans laquelle un soldat semble dormir. Seulement, la chute ramène le lec-
teur à la violence de la guerre : le soldat ne dort pas, il est mort. Ce sonnet critique la guerre
contre la Prusse.

Au cabaret-vert

Au cabaret-vert est un sonnet d’Arthur Rimbaud. Le poète y raconte une scène vécue lors de
l’une de ses fugues. Après avoir erré, il s’attable à un cabaret et savoure chaque instant en
mobilisant l’ensemble de ses sens. Ce poème exprime donc un amour pour la liberté et la
simplicité.

La maline

La maline est un sonnet d’Arthur Rimbaud. Le poète y raconte une scène de séduction vé-
cue peut-être lors d’une de ses fugues. C’est pour lui un moment heureux et simple où une
jeune femme lui fait des propositions sensuelles alors qu’il est attablé dans une salle à
manger.

L’éclatante victoire de Sarrebrück

L’éclatante victoire de Sarrebrück est un sonnet satirique d’Arthur Rimbaud. Le poète y cri-
tique la guerre de Napoléon III contre la Prusse en se moquant d’une victoire française sans
aucun intérêt stratégique : celle de la bataille de Sarrebrück.

Le buffet
Le buffet est un mystérieux sonnet d’Arthur Rimbaud. En décrivant un vieux meuble, un
buffet, le poète fait émerger des souvenirs des personnes qui l’ont possédé. Cependant,
l’imagination est nécessaire pour donner vie à ces souvenirs ; en cela, le buffet est une
image du recueil poétique.

Ma bohème

Ma bohème est un sonnet d’Arthur Rimbaud dans lequel il évoque de manière légère et opti-
miste le plaisir qu’il éprouve lors de ses fugues. Au niveau du style, bien que de forme clas-
sique, ce sonnet est plein de fantaisies et de prises de liberté.

Parcours Émancipations créatrices

L’émancipation, c’est l’affranchissement d’une autorité, d’une dépendance morale, d’un


préjugé. Ce terme est utilisé au pluriel dans ce parcours car Rimbaud s’affranchit de plu-
sieurs types d’autorité : familiale, sociale, politique, poétique.

L’émancipation à l’égard du foyer familial


La première émancipation de Rimbaud, c’est celle à l’égard du foyer familial et de la pres-
sion maternelle à laquelle il échappe lors de ses fugues. Les haltes heureuses
« Au Cabaret-Vert » ou dans la « salle à manger brune » de la Maline constituent pour
l’adolescent une libération. Les femmes rencontrées incarnent le contre-modèle de sa mère :
nourricières, inspirantes, elles dégagent chaleur et hospitalité. Si le foyer familial est une
prison, un lieu austère, les auberges dans lesquelles Rimbaud fait halte en Belgique repré-
sentent un espace de sensualité, de liberté et d’émancipation.

L’émancipation de l’enfance
Les Cahiers de Douai retracent aussi l’émancipation de l’enfance et la découverte de l’ado-
lescence. Dans « Sensation » ou « Ma Bohême », Rimbaud découvre la sensualité et le désir
amoureux, partagé dans « Première soirée », à sens unique dans « Les reparties de Nina ».

L’émancipation sociale
La libération de Rimbaud est également sociale. Le jeune poète se forge un personnage en
marge de la société, comme en témoigne sa désinvolture dans « A la Musique » : « Moi, je
suis débraillé comme un étudiant ». Cette tenue vestimentaire impertinente symbolise une
émancipation morale et sociale où le poète évolue en marge des codes sociaux et moraux
étouffants. Le rêve d’émancipation collective et politique Mais Rimbaud rêve aussi d’éman-
cipation collective et politique. Le thème de la Révolution est très présent dans les Cahiers
de Douai (comme dans « Le Forgeron »). Le ton sarcastique envers Napoléon III, « raide sur
son dada » s’inscrit dans une perspective de lutte contre les régimes oppressifs.

Émancipation politique
Les cahiers de Douai sont marqués par leur contexte d’écriture, et en premier lieu par l’élan
révolutionnaire du XIXe siècle. Le sonnet « Morts de quatre-vingt-douze et quatre-vingt-
treize » rend hommage aux morts pour la République. L’image du sang régénérant les vieux
sillons, qui conclut le deuxième quatrain, fait écho au chant révolutionnaire de La Mar-
seillaise. Le sonnet se conclut sur une pointe amère : « Messieurs de Cassagnac nous re-
parlent de vous ». Ce député bonapartiste s’oppose visiblement aux idéaux républicains pro-
clamés dans le sonnet. S’opère le deuil non seulement des héros de la République, mais de
la République elle-même, qui a laissé place à des citoyens « courbés sous les rois comme
sous une trique » (vers 13). Les héros de la Révolution se voient dotés d’une grandeur
épique. Dans une gradation saisissante, ils passent de l’état d’« hommes extasiés et grands
dans la tourmente » (vers 5), à celui de « millions de Christs » (vers 11).

L’émancipation poétique et artistique


L’émancipation de Rimbaud est aussi artistique : il revendique dans « Ma Bohème » une
poétique de « petit Poucet rêveur » qui égraine ses rimes. On retrouve ce ton presque enfan-
tin dans l’ « Éclatante victoire de Sarrebrück », parsemé d’un lexique d’enfant : dada, papa,
pioupiou. Ainsi, « Au cabaret » et « La maline », où domine le lexique alimentaire, jurent
avec le ton habituel du sonnet, forme privilégiée de l’épanchement amoureux. De même, la
« Vénus Anadyomène » de Rimbaud ne sort pas de la mer, mais de sa baignoire, et est dé-
crite dans toutes ses abjections physiques. L’analogie sculpturale
(« deux mots gravés », vers 12) ne fait pas d’elle une statue, mais une fondation « avec des
déficits assez mal ravaudés » (vers 4). Cette désacralisation non seulement de la forme du
sonnet, mais de l’imagerie mythique, prête à sourire. On retrouve la thématique mytholo-
gique dans « Soleil et chair », réécriture du mythe de l’âge d’or où Rimbaud en appelle suc-
cessivement aux mythes de Zeus et Europe, de Zeus et Léda. Enfin, l’émancipation poétique
de Rimbaud se manifeste dans la structure même de ses vers. Rimbaud brise l’idole de
l’alexandrin classique, en plaçant la virgule une syllabe trop tôt, rendant la césure classique
impossible. Le vers 6 de « Rages de Césars » est aussi un alexandrin fracturé : « Il s’était dit
je vais souffler la liberté ». La liberté ainsi proclamée est également celle du vers, qui se
joue des règles de césure. Si les poèmes de Cahiers de Douai sont assez traditionnels dans
leur forme – nombre d’entre eux sont des sonnets en alexandrins ou octosyllabes – Rim-
baud, qui joue sur les rythmes et disloque le vers traditionnel, montre déjà un profond désir
de renouvellement de la tradition, qui sera confirmé par ses recueils ultérieurs.

Etude du « Le dormeur du val »


De quelle manière ce sonnet permet de dénoncer la guerre?

Plan

Pour mener cette analyse linéaire du poème « Le dormeur du val » d’Arthur Rimbaud, nous
suivrons le mouvement naturel du texte en adoptant un découpage par strophe.

La première strophe présente un cadre naturel idyllique. La seconde strophe décrit le per-
sonnage du jeune soldat. la troisième strophe insiste sur le sommeil du personnage et la der-
nière strophe invite à une relecture du poème en révélant la mort du soldat.

Le dormeur du val

C’est un trou de verdure où chante une rivière,

Accrochant follement aux herbes des haillons (vêtement sale)

D’argent ; où le soleil, de la montagne fière,

Luit (rayonne) : c’est un petit val qui mousse de rayons.

Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,

Et la nuque baignant dans le frais cresson (plante de l’eau)bleu,

Dort ; il est étendu dans l’herbe, sous la nue,(le ciel)

Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.

Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme

Sourirait un enfant malade, il fait un somme :(sieste)

Nature, berce-le chaudement : il a froid.


Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;

Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine,

Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.

Analyse linéaire

I. Strophe 1

L’ouverture du poème par le présentatif « c’est » montre une volonté de description pictu-
rale. Le poète va s’adresser à l’imaginaire du lecteur.

Dès lors, le poème donne à voir une paysage idyllique, mais aussi ambigu.

Le « trou de verdure » évoque un havre de paix, mais peux également désigner une tombe à
la 2e lecture.

Pourtant, dans cette première strophe, la gaité l’emporte : la nature est personni-
fiée (« chante une rivière » ; « accrochant follement » ; la montagne fière ») ce qui donne
une impression de fête et d’harmonie.

La personnification des éléments naturels évoque également la vie de la nature qui s’oppose
à la révélation de la mort du soldat au dernier vers.

Le tableau est également celui d’un paysage lumineux avec le champ lexical de la lumière :
« D’argent » ; « Luit » ; « soleil » ; « rayons ». Les deux enjambements des vers 3 et 4 parti-
cipent d’ailleurs à mettre en valeur cette lumière omniprésente.

Enfin le retour du présentatif au vers 4 permet de clore la description par une méta-
phore intéressante : « un petit val qui mousse de rayons ». Cette métaphore permet, en plus
de renforcer la lumière du tableau, d’évoquer la nature comme un tout, avec des éléments
qui fusionnent, donc une image d’harmonie.

Ainsi donc, dans cette première strophe, Rimbaud dresse un cadre verdoyant et agréable qui
ne laisse pas supposer le caractère engagé du poème.

Pourtant, en ajoutant un personnage dans la seconde strophe, le poète peaufine peu à peu
son tableau.
II. Strophe 2

Le groupe nominal « Un soldat jeune » permet d’introduire le personnage. On note l’utilisa-


tion de l’indéfini « un » qui permet d’universaliser le propos : il pourrait s’agir de n’importe
quel soldat.

L’adjectif épithète « jeune » permet à Rimbaud de rappeler qu’un grand nombre des appelés
à la guerre sont très jeunes.

La position du soldat est porteuse d’ambiguïté. Elle fait d’abord penser au sommeil avec
un champ lexical dans l’ensemble de la strophe : « bouche ouverte » ; « Dort » ; « étendu » ;
« lit ».

Le verbe « dort » est d’ailleurs repris par 3 fois (v. 7 ; 9 ; 13), comme pour insister sur
l’immobilité du corps.

Comme dans la première strophe, les enjambements mettent des termes en valeur : « Dort »
au vers 7 et « Pâle » au vers 8.

L’adjectif « pâle » accentue l’ambiguïté. Le soldat est-il seulement endormi, ou est-il égale-
ment malade ? ou pire ? Ainsi, la « bouche ouverte » peut être lue comme un signe de som-
meil profond, ou alors comme une attitude de mort.

On voit clairement que le personnage se dégage du paysage dans lequel il se trouve. Il


n’entre pas en harmonie avec la nature.

Son immobilité parfaite s’oppose au mouvement incessant de la nature, rappelée par les
référence à l’eau (toujours en mouvement) : « baignant » ; « pleut ».

De plus, au niveau des couleurs, l’antithèse du vers 8 permet d’opposer « pâle » avec la mé-
taphore « la lumière pleut ».

Donc dans cette strophe, la nature continue d’évoquer la continuité de la vie et l’harmonie,
mais le soldat fait tâche.

Lui seul ne bouge pas, lui seul est pâle, et la chaleur de la première strophe ne semble pas
pouvoir le réchauffer. Au contraire, la seconde strophe insiste davantage sur le froid : « frais
cresson bleu » ; « tête nue ».
Ainsi, la description du soldat dans cette strophe permet d’introduire des oppositions qui
bouleversent l’harmonie naturelle. La strophe suivante s’intéresse plus encore à l’immobilité
du soldat.

III. Strophe 3

On constate d’emblée la poursuite du lexique du sommeil : « il dort » ; « un somme » ;


« berce-le ».

Cependant, de plus en plus de termes suggèrent qu’il ne fait pas que dormir.

D’abord, les glaïeuls peuvent faire penser à la mort (ce sont traditionnellement des fleurs de
deuil).

Ensuite, la comparaison « comme sourirait un enfant malade » fait écho à l’adjectif « pâle »
de la strophe précédente et interroge le lecteur sur l’état de santé du personnage.

Enfin, le froid suggéré dans la strophe 2 est enfin affirmé dans la strophe 3 : « il a froid ».

Tous ces éléments évoquent la maladie ou la mort et donnent à penser que le soldat n’est pas
qu’endormi.

La nature apparaît encore comme une entité vivante grâce à la personnification impliquée
par l’apostrophe et l’injonction : « Nature, berce-le chaudement ». L’opposition entre la cha-
leur de la nature et le froid du soldat se double d’une opposition entre la vie et la mort.

On note ici l’antithèse entre l’adverbe « chaudement » et le nom « froid ».

Enfin, on remarque dans cette strophe une insistance sur la jeunesse du soldat. Plusieurs
termes suggèrent qu’il n’est qu’un enfant ; à commencer par « enfant », mais aussi l’emploi
du nom « somme » et surtout le verbe « berce-le ».

Cette insistance va permettre de renforcer le pathétique à la révélation de la mort du soldat


dans la dernière strophe. Mort doublement contre-nature non seulement car elle s’oppose au
mouvement et à la vie perpétuelle de la nature, mais aussi car il n’était qu’un enfant.

IV. Strophe 4

Le premier vers de la dernière strophe contient une négation grammaticale totale : « les par-
fums ne font pas frissonner sa narine ». Cette négation, dans une nature aussi vivace et sti-
mulante suggère définitivement la mort. Aussi peut-on parler d’une litote pour dire que le
soldat ne respire pas.
Le vers suivant souligne une dernière fois l’opposition entre le froid du corps et la chaleur
de la nature. « Il dort dans le soleil » insiste sur l’idée que le soleil recouvre entièrement le
corps avec la préposition « dans », comme si le soleil englobait le soldat. Pourtant, le lecteur
sait qu' »il a froid ».

Sa posture, « la main sur la poitrine » peut évoquer une posture solennelle, comme s’il était
tombé au combat. Par ailleurs, la main sur la poitrine peut cacher une blessure, ce qui est
confirmé au dernier vers.

Le rejet de l’adjectif « Tranquille » insiste une dernière fois sur l’immobilité du soldat avec
ce début de vers qui s’éteint au bout d’un seul mot, comme un dernier souffle.

Cet enjambement permet également de faire renaître l’opposition entre le mouvement de la


nature et l’immobilité du soldat.

Enfin, les derniers mots du poème, comme souvent dans les sonnets, constituent une chute :
le soldat est mort.

Cependant, Rimbaud reste humble, se contentant de décrire sobrement, il ne tombe pas dans
un registre pathétique ni polémique.

« Il a deux trous rouge au côté droit » clot le tableau sur l’image d’un soldat ayant reçu deux
balles dans le coeur (vu de face, le côté droit est celui du coeur).

La couleur rouge apporte une dernière opposition entre le soldat et la nature, celle du vert
pendant l’ensemble du poème et du rouge dans le dernier vers.

Cette phrase simple est d’ailleurs un euphémisme pour dire que le soldat a reçu deux balles.
Rimbaud se montre donc pudique dans sa façon d’évoquer la mort, ce qui permet de renfor-
cer son propos en laissant le lecteur constater l’horreur de lui-même.

Sans dire directement les choses, elles peuvent être encore plus criantes.

Cette révélation finale invite à une relecture du sonnet et permet de donner du sens aux dif-
férentes ambiguïtés relevées ci-avant.

On comprend également pourquoi le poème est structuré autour d’oppositions entre la na-
ture et le personnage. La nature qui représente la vie ne peut être assimilée au soldat qui est
mort. De plus, sa mort est contre-nature.

Rappel du développement
Dans ce poème, Arthur Rimbaud dresse un tableau simple : une nature idyllique dans la-
quelle dort un jeune soldat. Seulement, au gré des indices qu’il sème, puis avec la révélation
finale, le lecteur comprend que le soldat est mort, victime de la guerre.

Réponse à la problématique

Si « Le dormeur du val » de Rimbaud est si connu, c’est parce qu’il réussit le tour de force
de dénoncer la guerre sans vocabulaire militaire et sans registre polémique.

Tout en retenue, de manière picturale, Arthur Rimbaud arrive à faire naître une image frap-
pante aux yeux du lecteur : celle de la mort contre-nature d’un jeune homme au nom
d’idéaux guerriers insensés.

Ouverture

Arthur Rimbaud s’oppose fermement à Napoléon III d’une part, et à sa guerre contre la
Prusse d’autre part. Pour lui ces conflits germent de l’avidité des tyrans et coûtent la vie à de
jeunes hommes auxquels il s’identifie.

On peut évoquer le poème Le mal, autre sonnet dans lequel le poète critique également la
mort inutile de nombreux soldats, mais cette fois, de manière plus directe et ironique.

Vous aimerez peut-être aussi