Vous êtes sur la page 1sur 7

Université Paris Diderot - Paris 7 L3 Maths Fondamentales

Intégration et Probabilités 2010-2011

Travaux dirigés, feuille 2 : tribus, mesures, fonctions mesurables

Préambule (sommation de réels positifs, dénombrabilité)

Exercice 1
Généralités :
On veut définir la ”taille” d’un ensemble E, qu’on appelle son cardinal et qu’on note Card(E). Si E est
constitué de n éléments distincts, pour un n ∈ N, on note naturellement Card(E) = n. On veut étendre la
notion de cardinal à des ensembles infinis, en les comparant à des ensembles de référence (N, R, ...).
Soient E et F deux ensembles. On dit que Card(E) = Card(F ) si et seulement si il existe une bijection
de E dans F . On dit que Card(E) ≤ Card(F ) si et seulement si il existe une injection de E dans F . On dit
que Card(E) < Card(F ) si et seulement si Card(E) ≤ Card(F ) et Card(E) 6= Card(F )
1) Soient E, F, G des ensembles. Vérifier que
• Card(E) = Card(F ) et Card(F ) = Card(G) implique Card(E) = Card(G),
• Card(E) = Card(E 0 ), Card(F ) = Card(F 0 ) et Card(E) ≤ Card(F ) implique Card(E 0 ) ≤ Card(F 0 ).
2) Soient E, F, G des ensembles. Montrer que
• Card(E) ≤ Card(F ) et Card(F ) ≤ Card(G) implique Card(E) ≤ Card(G),
• Card(E) ≤ Card(F ) et Card(F ) ≤ Card(E) implique Card(E) = Card(F )
(on admettra pour cela le Théorème de Cantor-Bernstein : S’il existe une injection entre A et B et une
injection entre B et A, alors il existe une bijection entre B et A). La relation ”≤” est en fait une relation
d’ordre sur les cardinaux.
3) On suppose E non vide. Montrer que Card(E) ≤ Card(F ) si et seulement si il existe une surjection de
F sur E. On admettra que si (Bi )i∈I est un ensemble de parties non vides et deux à deux disjointes de F ,
il existe F 0 ⊂ F qui contient un et un seul élément de chaque Bi (ceci repose sur l’axiome du choix).
Cardinal de N : Un ensemble est dit dénombrable s’il a le même cardinal que N, noté Card(N) = ℵ0 . On
dit qu’il est au plus dénombrable si son cardinal est inférieur ou égal à ℵ0 .
4) Montrer que si E est un ensemble infini alors E contient un ensemble dénombrable (toujours en admettant
l’axiome du choix : si F est un ensemble non vide, on peut choisir un point dans F ). En déduire que
ℵ0 ≤ Card(E) (en d’autres termes, “ℵ0 est le plus petit cardinal non fini” : un ensemble au plus dénombrable
est donc soit fini, soit dénombrable).
5) Comparer les cardinaux de N, de l’ensemble des nombres pairs, de celui des nombres impairs, de Z.
6) Montrer que Card(N × N) = ℵ0 . En déduire que si A1 , ...An sont des ensembles dénombrables (resp. au
plus dénombrables), n ∈ N∗ , alors Card(A1 × · · · × An ) = ℵ0 (resp. ≤ ℵ0 ).
7) Montrer que Card(Q) = ℵ0 .
8) Montrer que toute union au plus dénombrable d’ensembles au plus dénombrables est au plus dénombrable.
En déduire que l’ensemble des parties finies de N est dénombrable.

1
Cardinal de R :
9) Montrer que pour tout ensemble E, Card(E) < Card(P(E)) (on raisonnera par l’absurde en supposant
connue une bijection f de E dans P(E) et on montrera que la partie

B = {x ∈ E : x ∈
/ f (x)}

ne peut pas possèder d’antécédent).


10) En déduire que Card(P(N)) > ℵ0 .
11) Pour un entier naturel N ∈ N∗ , on considère un ensemble E à N éléments. Exhiber une bijection
naturelle entre P(E) et {0, 1}N (cela revient à fabriquer une fonction à valeurs dans {0, 1} à partir d’un
ensemble et inversement). En déduire Card(P(E)).
12) De même, exhiber une bijection naturelle entre P(N) et {0, 1}N , et en déduire que Card(P(N)) =
Card({0, 1}N ).
13) Nous allons montrer que Card({0, 1}N ) = Card([0, 1]).
a) On considère la fonction φ : [0, 1] → {0, 1}N , où φ(x) = (φn (x), n ≥ 0) est défini par récurrence :
  
 X n 
−p 
 n+1 
φ0 (x) = bxc et φn+1 (x) = 2   x− φp (x)2 ,
p=0

−p
P
Montrer que φ est injective. Indication : on pourra montrer que x = p≥0 φp (x)2 .

b) On considère la fonction ψ : {0, 2}N → [0, 1] définie par ψ((sn )n≥0 ) = n≥0 sn 3−(n+1) . Montrer que ψ
P
est injective. Remarque : l’image de ψ est l’ensemble triadique de Cantor, que nous allons revoir.
c) Conclure.
14) Montrer que Card([0, 1]) = Card(R). En déduire que le cardinal de R est strictement plus grand que
celui de N. On le note habituellement Card(R) = c. C’est le cardinal (ou puissance) du continu.

Exercice 2
1) Calculer
X 1 X 1
et .
pq pq
(p,q)∈N2 , p,q≥2 (p,q)∈N2 , p,q≥1

2) Pour un nombre réel x > 0, calculer X


xλ .
λ∈Q∗+
X
3) Soit (xi )i∈I ⊂ R+ une famille sommable, c’est à dire telle que xi < +∞. Montrer que l’ensemble
 i∈I
i ∈ I : xi 6= 0 est au plus dénombrable.

Exercice 3
1) L’ensemble des suites à valeurs dans Z est-il dénombrable ?
(Rappel: Il n’existe pas d’application surjective d’un ensemble E dans l’ensemble de ses parties P(E) car
pour une telle application f la partie B = {x ∈ E; x 6∈ f (x)} n’a pas d’antécédent. )
2) Soit p un entier naturel non nul.

2
a) L’ensemble des suites à valeurs entières définies par une relation de récurrence linéaire d’ordre p à
coefficients entiers fixée est-il dénombrable ? (Rappel: Une telle relation correspond à définir un+p =
ap un+p−1 + · · · + a2 un+1 + a1 un + a0 , pour des coefficients entiers ai )
b) L’ensemble des suites à valeurs entières pouvant être définies par une relation de récurrence linéaire à
coefficients entiers est-il dénombrable ?

Exercice 4
Soient S l’ensemble des suites de 0 et de 1 et ϕ : P [0, 1[→ S, ϕ(x) = s définie par : s1 = 0 si x ∈ [0, 1/2[, s1 = 1
sinon puis, s1 , . . . sp étant définis, on pose ap = p1 sk 2−k et on définit sp+1 = 0 si x − ap < 2−p−1 , sp+1 = 1,
sinon.
1) Montrer que ϕ(x) = (sk ) ⇒ x = k sk 2−k .
P

M
2) Montrer que sk est nul à partir d’un certain rang ssi il existe M, p ∈ N tels que x = 2p .
3) Montrer que si s appartient à l’image de ϕ, s n’est pas stationnaire en 1.
sk 2−k .
P
4) Montrer que, si s n’est pas stationnaire en 1, alors on a s = ϕ(x) où x =
En résumé, ϕ est une bijection de [0, 1[ sur l’ensemble des suites de 0 et de 1 qui ne sont pas stationnaires
en 1.

Tribus

Exercice 5
Soit E un ensemble. Trouver toutes les tribus sur E ayant 0, 1, 2, . . ., 8 éléments.

Exercice 6
Soit E un ensemble non fini et non dénombrable. Soit T l’ensemble des parties A ∈ P(E) telles que A ou
Ac soit au plus dénombrable.
1) Montrer que T est une tribu sur E.
2) Monter que T est engendrée par l’ensemble des singletons de E.

Exercice 7
Soient A1 et A2 deux tribus sur un ensemble E. Montrer que la tribu engendrée par

A1 ∪ A2 = {A|A ∈ A1 ou A ∈ A2 }

coı̈ncide avec la tribu engendrée par {A1 ∩A2 |A1 ∈ A1 , A2 ∈ A2 } ou encore par {A1 ∪A2 |A1 ∈ A1 , A2 ∈ A2 }.

Exercice 8
Montrer que la tribu B(R) des boréliens de R peut être engendrée par l’une des classes suivantes:

C1 = {]a, b[, a, b ∈ Q} C2 = {] − ∞, a], a ∈ Q}


C3 = {] − ∞, a[, a ∈ Q} C4 = {]a, +∞[, a ∈ Q}
C5 = {[a, +∞[, a ∈ Q} C6 = {] − ∞, a], a ∈ R \ Q}.

Exercice 9
On définit sur N, pour chaque n ≥ 0, la tribu Fn = σ({0}, {1}, ...{n}). Montrer que la suite de tribus
(Fn , n ∈ N) est croissante, mais que ∪n∈N Fn n’est pas une tribu. Indication : on pourra décrire précisément
Fn , et raisonner par l’absurde en utilisant le sous ensemble 2N des entiers pairs.

3
Exercice 10
Soit B la tribu borélienne de R, et f une application borélienne.
1) Décrire f −1 (B) dans le cas f = 1A où A ∈ B.
2) a) Montrer que l’ensemble S des boréliens de R symétriques par rapport à 0 est une tribu.
b) On suppose que f est paire. Montrer que f −1 (B) ⊂ S.
c) Montrer que cette inclusion peut être stricte. (On pourra considérer la fonction cosinus).
d) Montrer que si f = |x|, alors f −1 (B) = S.
e) En déduire que S est engendrée par les intervalles [−b, b]b∈R+ .

Mesures

Exercice 11
Soient (X, T ) un espace mesurable et µ : T → R+ une mesure.
1) Soient A, B ∈ T . Montrer que

a) µ(A ∪ B) + µ(A ∩ B) = µ(A) + µ(B) ;

b) si A ⊂ B alors µ(A) ≤ µ(B) .

2) Soit (An )n∈N ⊂ T . Montrer que


!
[ X
a) µ An ≤ µ(An ) ;
n∈N n∈N
!
[
b) si An ⊂ An+1 pour tout n ∈ N, alors µ An = lim µ(An ) ;
n→+∞
n∈N
!
\
c) si An+1 ⊂ An pour tout n ∈ N et µ(A0 ) < +∞, alors µ An = lim µ(An ) .
n→+∞
n∈N

d) l’égalité c) n’est pas toujours vérifiée sans l’hypothèse µ(A0 ) < +∞. On pourra considérer pour cela
la mesure de Lebesgue sur R, et les ensembles An = [n, ∞[, (n ∈ N).

Exercice 12 X
Soient (X, T , µ) un espace mesuré et (An )n∈N ⊂ T tels que µ(An ) < +∞.
n∈N
 
\ [
1) Montrer que µ  Ap  = 0 .
n∈N p≥n
T S
2) Montrer que n∈N p≥n Ap est l’ensemble des x ∈ X qui appartiennent à une infinité de An . On appelle
c
S T
cet ensemble lim sup An . Montrer que son complémentaire, n∈N p≥n Ap , est l’ensemble des x ∈ X qui
appartiennent à tous les Acn sauf un nombre fini. On appelle cet ensemble lim inf Acn .
3) Soit fn et gn deux suites de fonctions mesurables de (Ω, A, µ) dans (R, B(R)) telles que fn = gn µ-pp,
cad que pour tout n il existe An ∈ A tel que µ(Acn ) = 0 et pour tout x ∈ An , fn (x) = gn (x). A-t-on
sup fn = sup gn µ-pp ?

4
Exercice 13 : ensemble de Cantor
Soit (an ) une suite décroissante convergeant vers α ≥ 0, telle que a0 ∈]0, 1[.
On définit une suite de fermés Cn ⊂ [0, 1] comme suit :
C0 est obtenu en enlevant au milieu de [0, 1] un intervalle ouvert de longueur 1 − a0
Cn est obtenu en enlevant au milieu de chaque segment composant Cn−1 un intervalle ouvert de longueur
2−n (an−1 − an ).
1) Montrer que C =def ∩Cn est mesurable. Quelle est sa mesure?
2) Montrer que C est compact, totalement discontinu (i.e. les composantes connexes de C sont des points)
et sans point isolé. On dit que C est parfait
3) On pose an = (2/3)n+1 pour tout n ∈ N.
a) Dessiner C. C’est l’ensemble triadique de Cantor. Que vaut λ(C)?
b) Montrer que la fonction φ : {0, 2}N → C définie par
X
φ((sn , n ∈ N)) = sn 3−(n+1)
n≥0

est bijective. On pourra pour cela montrer que


" n n
#
[ X X
Cn = ak 3−(k+1) , ak 3−(k+1) + 3−(n+1) .
a0 ,...,an ∈{0,2} k=0 k=0

En déduire que C n’est pas dénombrable.

Exercice 14
On considère l’intervalle [0, 1] muni de la tribu borélienne et de la mesure de Lebesgue λ.
1) Montrer que pour tout  > 0, il existe un ouvert O dense dans [0, 1] tel que λ(O) < .
2) En déduire que pour tout  > 0, il existe un fermé d’intérieur vide F tel que λ(F ) > 1 − . Existe-t-il un
fermé d’intérieur vide de mesure de Lebesgue 1?

Exercice 15 P
Soient λ1 la mesure de Lebesgue sur R, et (Ij )j∈J une famille
S d’intervalles ouverts de R telle que j∈J λ1 (Ij ) <
b − a pour deux nombres a < b. Montrer que [a, b] 6⊂ j∈J Ij .

Exercice 16
Soit E un ensemble. On définit µ : P(E) → R+ par

µ(A) = sup Card(B) : B ∈ P(E), B ⊂ A et B fini .

1) Montrer que µ est une mesure (elle est appelée mesure de comptage).
2) Montrer que la mesure de comptage µ est finie si et seulement si E est fini.
3) On suppose E non fini. On dit que µ est σ–finie s’il existe une suite croissante de parties mesurables En
telles que E = ∪n∈N En et µ(En ) < ∞, pour tout n. Montrer que la mesure de comptage µ est σ–finie si et
seulement si E est dénombrable.

5
Exercice 17
Calculer la mesure de Lebesgue de l’ensemble
[ 1 1

, .
n+2 n+1
n∈N

Exercice 18
Soit µ une mesure sur (R, B(R)) telle que µ soit finie sur les compacts, c’est-à-dire que µ(K) < +∞ pour
tout compact K ⊂ R. On dit que a ∈ R est un atome pour µ si µ({a}) > 0. On dit que µ est diffuse si elle
ne charge aucun singleton, c’est-à-dire que µ({a}) = 0 pour tout a ∈ R.
1) Montrer que la mesure de Lebesgue λ1 est diffuse.
2) Montrer que µ possède au plus un nombre dénombrable d’atomes. (on comptera le nombre d’atomes tels
que µ({a}) ≥ 1/n, pour tout n ∈ N).
X
On dit que la mesure µ est purement atomique si elle s’écrit sous la forme m = αn δxn pour des suites
n∈N
(αn ) ⊂ R+ et (xn ) ⊂ R.
3) Montrer que µ peut s’écrire, de manière unique comme somme d’une mesure diffuse µd et d’une mesure
purement atomique µa .
4) On considère la fonction G : R → R définie par
(
−µ(]x, 0[) si x < 0 ,
G(x) =
µ([0, x]) si x ≥ 0 .

Montrer que µ est diffuse si et seulement si G est continue.

Mesurabilité

Exercice 19
Soit X un ensemble. On munit R de la tribu Borélienne B(R).
1) Déterminer toutes les fonctions mesurables f : X → R lorsque X est muni de la tribu T = {∅, X}.
2) Déterminer toutes les fonctions mesurables f : X → R lorsque X est muni de la tribu T = P(X).
3) On suppose que (X, d) est un espace métrique et on note B(X) sa tribu Borélienne. Soit T la plus petite
tribu sur X telle que toute fonction continue f : X → R soit mesurable, c’est à dire que T est l’intersection
de toutes les tribus ayant cette propriété. Montrer que T = B(X).

Exercice 20
1) Montrer que toute fonction définie sur R, continue sauf en un nombre dénombrable de points est
borélienne.
2) a) Montrer que la fonction indicatrice de Q est borélienne.
b) Montrer que la fonction f : R → R est borélienne.
p
1
∧ q = 1, (p, q) ∈ Z × N∗

q si x = q,p
x 7→
0 sinon
3) a) Montrer que toute fonction croissante sur R est borélienne.
b) Montrer qu’une fonction croissante sur une partie borélienne de R et nulle ailleurs est borélienne.

6
Exercice 21
Soit f : R → R une fonction continue à droite. En considérant les fonctions
X k + 1
fp : x 7→ f 1[ kp , k+1 (x) ,
2p 2 2p [
k∈Z

montrer que f est borélienne.


Exercice 22
Soit (ft )t∈R un ensemble de fonctions de R dans R tel que les fonctions ft soient boréliennes et que, pour
tout x ∈ R, la fonction t 7→ ft (x) soit continue à droite. [
Montrer que, pour tout a ∈ R, on a {x ∈ R| sup ft (x) > a} = {x ∈ R|ft (x) > a} et en déduire que la
t∈R t∈Q
fonction supt∈R ft est borélienne.
Exercice 23
Soit A la tribu engendrée par les singletons dans R et soit f : R → R+ une fonction (A, B(R+ )) mesurable.
On note m la mesure définie sur (R, A) par m(A) = 0 si A est dénombrable et m(A) = 1 sinon.
1) Décrire A. Vérifier que m est bien une mesure.
2) Montrer que f est m-presque sûrement constante, c.a.d. qu’il existe A ∈ A tel que m(Ac ) = 0 et pour
tout x, y ∈ A, f (x) = f (y). (Indication : poser α = sup{a ∈ R|m({x| f (x) ≤ a}) = 0}).

Vous aimerez peut-être aussi