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Programme national « Très Haut Débit »

Volet C – Zones de faible densité

20 Novembre 2010

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Réponse de Nicolas GUILLAUME, Consultant indépendant
Introduction
L’enjeu que représente le déploiement du très haut débit sur l’ensemble du territoire
français a été, à de nombreuses reprises, comparé à l’immense chantier que
représentait l’électrification de la France.

A ce titre, l’extrait d’une étude de René Massé aux éditions «Études et travaux en
ligne» illustre le défi auquel le pays est aujourd’hui confronté avec la percée
progressive du très haut débit dans les zones urbaines et la lente résorption de la
fracture numérique dans de nombreuses zones rurales qualifiées de zones les moins
denses : « A la fin du XIXème siècle, en pleine période de développement
économique, les villes s’éclairent tandis que les villages restent dans l’obscurité.
Pour les notables ruraux, il est évident que le marché de l’électrification rurale
n’attirera pas spontanément les capitaux privés des entreprises d’électricité. Ils vont
donc prendre l’initiative d’engager les communes dans le processus d’électrification,
pour assurer d’abord l’éclairage public, puis la fourniture d’électricité aux citoyens.
Les zones rurales ne seront pas électrifiées, elles s’électrifieront par elles-mêmes. »

Près d’un siècle plus tard, les investissements de l’initiative privée qui se focalise
logiquement en premier lieu sur les zones rentables, vont contraindre l’Etat et les
collectivités à veiller à ce qu’une nouvelle fracture numérique ne touche les territoires
de faible densité, essentiellement ruraux.

Des investissements ont déjà été effectués dans de nombreuses communes ou


départements, que ce soit par le biais de NRA-ZO, de RIP incluant des liaisons
hertziennes (Wimax, Wifimax…).

Mais ces investissements sont à considérer comme des rustines qui ont pour seul
objectif de répondre à un besoin minimal immédiat.

C’est un fait, ces investissements ont un impact significatif sur les finances des
collectivités et qui plus est, dans la perspective de la montée en débit, les solutions
retenues ont généralement un temps de vie relativement limité sans pour autant
garantir l’arrivée au niveau local des offres très populaires (en termes de services et
tarifs) au niveau national.

Cette consultation est sans doute le volet le plus important du plan Très Haut Débit
car il est désormais impératif de faire émerger des solutions techniques,
économiques et juridiques pérennes - et parfois inédites - pour que le très haut débit
desserve le plus petit hameau de France à l’horizon 2025 selon le souhait du
Président de la République.

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Réponse de Nicolas GUILLAUME, Consultant indépendant
Q1. Identifiez-vous des besoins spécifiques d’accès aux ressources de la
société de l’information concernant les zones les moins denses, que ce soit
en termes de services ou en termes d’accessibilité (domicile privé,
entreprises, lieux ouverts au public) ? En quoi ces spécificités pourraient
elle influer sur le mode de déploiement de réseaux de communications
électroniques sur ces zones ?

Qu’il soit situé au cœur d’un grand centre urbain ou d’un village de 250 âmes, un
architecte doit bénéficier d’un service d’accès à (très) haut débit pour recevoir et
envoyer des fichiers volumineux, indispensables pour son activité.

Il en va de même pour de nombreux professionnels, incluant les personnes


physiques en télétravail.

La télé-sauvegarde, indispensable pour prévenir la perte de données des


entreprises, est à ce titre un cas d’école. Un artisan situé dans une petite commune
de Bourgogne qui aurait un gigaoctet de données à sauvegarder sur des serveurs
distants, ne peut pas le faire sans mettre à contribution l’intégralité de la bande
passante de voie montante (upload) disponible durant de longues heures.

Cela devra évoluer au fil des ans avec l’arrivée du très haut débit.

En clair : les populations et les entreprises des territoires ruraux, tout comme celles
des zones urbaines, font état des mêmes besoins.

Bon nombre de familles, urbaines ou rurales, sont aujourd’hui équipées d’au moins
un ordinateur. L’on remarque d’ailleurs que la tendance est clairement à la
multiplication des terminaux audiovisuels et informatiques au sein des foyers.

Le coût devenu acceptable des équipements informatiques personnels (comme les


mini-ordinateurs portables ou Netbook) encourage certains foyers à équiper chaque
enfant/adolescent d’un poste de travail.

Il est aussi important de noter que les collectivités territoriales « rurales » peuvent
compter comme les plus impliquées en termes de mise à disposition ou
subventionnement de l'équipement des collégiens et lycéens en micro-ordinateurs /
tablettes.

Ainsi, il n’est pas rare de voir plusieurs ordinateurs au sein d’un même foyer : chacun
des utilisateurs ayant des besoins spécifiques.

Si certains parents s’en tiendront à un usage basique de l’outil (courrier électronique,


consultation de sites web, etc), les enfants/adolescents sont plus enclins à utiliser
des applications consommatrices de ressources. On peut notamment citer la
messagerie instantanée (incluant la vidéoconférence et le partage de fichiers), les
jeux en ligne exigeant des faibles temps de latence, le visionnage de vidéos, etc.

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Réponse de Nicolas GUILLAUME, Consultant indépendant
D’un point de vue général, avec la mise en réseau des espaces collectifs tels que les
écoles, centres de formation ou encore relais de santé, le temps passé devant l’outil
informatique n’a de cesse d’augmenter.

En toute logique, les zones rurales sont les plus demandeuses d'offres
audiovisuelles innovantes, comme la TV de rattrapage et les services de vidéo à la
demande (VoD) en raison de la proximité moindre qu'en zones denses de loueurs de
DVD, médiathèques… De même, l’éloignement des grands centres commerciaux,
peut pousser les citoyens de ces zones à se tourner plus facilement vers les
commerçants en ligne.

Au- delà des besoins « Internet », les services gérés comme les services
audiovisuels et les services d'aide à la personne (téléassistance, téléformation,
télésurveillance, télémédecine…), appelés à un fort développement dans les
prochaines années, vont induire des besoins en termes de débit d'accès qui ne
pourront inévitablement pas être couverts par les solutions actuelles.

A ce titre, il apparaitrait comme discriminatoire de faire une distinction des besoins en


fonction de la densité d’un territoire. Il est établi que les besoins en débit augmentent
de façon homogène sur l’ensemble du territoire.

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Réponse de Nicolas GUILLAUME, Consultant indépendant
Q2. Quelles solutions technologiques vous semblent en mesure de contribuer
à la couverture du territoire dans les zones où des réseaux à très haut débit en
fibre optique ne seraient pas déployés à moyen terme ? dans les zones où des
réseaux à très haut débit en fibre optique ne seraient pas déployés à long
terme ? Quels sont leurs avantages et leurs inconvénients respectifs ?
D’autres solutions doivent-elles être considérées ?
Q3. Quels sont les freins (économiques, techniques, juridiques…) au
déploiement de ces technologies ?

A ce jour, les technologies utilisées sont nombreuses 1.

Si le DSL (ADSL/SDSL) est assez largement déployé, des zones considérées


comme « grises » (accès plafonnant à 1 mégabit par seconde) se tournent de plus
en plus vers des alternatives pour organiser la montée en débit.

L’on pourrait citer cet exemple2 d’un habitant près de La Maxe à quelques kilomètres
au nord de Metz, qui disposait d'une ligne téléphonique éligible au ReADSL 3 avec un
affaiblissement de 70dB.

1
Schéma « La complémentarité technologique », source ANT
2
http://www.ariase.com/fr/news/wifimax-idyle-west-telecom-nomotech-article-2139.html
3
Le Reach Extended ADSL2 est une technique d'accès haut débit permettant d'accroître, en termes de longueur de ligne de cuivre, la
portée de l'ADSL. Elle fait l'objet de l'annexe L de la recommandation G.992.3 (ou ADSL2) de l'UIT.
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Réponse de Nicolas GUILLAUME, Consultant indépendant
Ancien abonné ADSL, son débit ne dépassait pas les 512 Kbits en réception et
128Kbits en émission. Par ailleurs, il était victime de nombreuses déconnexions dues
à une désynchronisation de son équipement d’accès au réseau.

La couverture de sa commune par les infrastructures du délégataire de service public


RHD57 (Conseil Général de la Moselle) l’a permis de résilier sa connexion ADSL au
profit d’un service d’accès internet hertzien terrestre (Wifimax) et ainsi de profiter
d’un débit symétrique de 6 mégabits par seconde avec un temps de latence
« raisonnable » d’une trentaine de millisecondes.

Si elles souffrent de nombreuses limitations, les solutions hertziennes terrestres sont


paradoxalement plébiscitées dans les territoires ruraux, à ceci près qu’elles ne
garantissent pas nécessairement la disponibilité au niveau local des offres triple-play
très prisées au niveau national.

Cela peut toutefois constituer une formidable opportunité pour des fournisseurs
locaux, à la seule condition que ces derniers atteignent une taille critique et ne
laissent pas leurs clients… en rase campagne4.

Ces dernières années, l’on a pu observer l’émergence de fournisseurs d’accès


associatifs sous forme de RAN (Rural Access Network) nés de la volonté de
supplanter sans délais à un service inexistant. C’est le cas en Bretagne avec le « net
du kermeur »5, un réseau rural d'accès à Internet associatif qui comptait en 2009
plus de 75 abonnés et qui a donné naissance à une initiative similaire dans la même
région6.

La 3G, quant à elle, n’est pas ou peu déployée dans les zones de faible densité. A ce
jour non-native IP, elle souffre de regrettables limitations techniques, comme des
liens de collecte ne permettant pas de rivaliser avec les offres fixes, conduisant en
pratique à des offres de détail proposant des restrictions d’usage fortes, source
d'insatisfaction croissante des consommateurs.

Malgré cela, il y a quelques exceptions comme à Jouhe, un village de 500 habitants


situé à 7 kilomètres de Dole (Jura) et dont la majeure partie est située en zone
blanche.

Avant qu’ils ne soient couverts par une base Wimax mise en place sous l’impulsion
du Conseil Général du Jura (via le réseau d’initiative public local baptisé Connectic
39), certains habitants situés dans la partie haute du village utilisaient des clés 3G
pour se connecter à Internet.

Détail notable : c’est grâce à l’autoroute A36 traversant le village et la proximité d’un
pylône équipé de la 3G que cette rustine s’est imposée naturellement pour quelques
foyers. Hélas, le quota mensuel de données ne permet pas de profiter pleinement de
tous les usages.

4
http://www.itespresso.fr/wimax-les-petits-operateurs-tentent-de-se-re-organiser-pour-couvrir-les-zones-blanches-35628.html
5
http://www.letelegramme.com/ig/generales/fait-du-jour/haut-debit-des-zones-blanches-a-noircir-27-02-2010-801495.php
6
http://www.letelegramme.com/local/finistere-nord/brest/landerneau/haut-debit-treflevenet-s-attaque-aux-zones-blanches-04-05-2009-
362639.php
6
Réponse de Nicolas GUILLAUME, Consultant indépendant
La 4G est appelée à remédier à ces limitations techniques, mais son déploiement en
zones peu denses ne pourra s'effectuer qu'une fois les zones denses couvertes, sauf
si l’on s’engage dans une mutualisation intelligente des déploiements qui pourrait
accélérer le processus.

Après avoir regardé toutes les solutions disponibles, certains territoires privilégient
les réseaux satellitaires.

Hélas, cette technologie souffre de limitations plus importantes que les réseaux
hertziens terrestres.

La latence inhérente à la distance entre le sol et le satellite (400 à 600 millisecondes


en moyenne) et la bande passante limitée se traduisent par des offres commerciales
peu séduisantes. En effet, en plus d’être plus onéreux que les accès DSL terrestres,
les abonnements incluent un quota de trafic mensuel contraignant qui restreint de
facto sensiblement les usages et anéanti toute capacité d’innovation dans ces zones.

L’on ne peut d’ailleurs que s’étonner que le label « haut débit pour tous » ne laisse
une place aussi importante à ces offres et n’a, à l’heure de la rédaction de cette
réponse, pas pris en compte les rustines hertziennes terrestres déployées dans
plusieurs territoires.

Cela revient à conclure que l’accès internet par satellite tout comme la 3G ne
sont pas des solutions modernes et/ou durables pour répondre à la demande
d'accès à internet (très) haut débit fixe dans un contexte personnel ou
professionnel.

Dans les zones de faible densité, les réseaux filaires existants seront donc
inévitablement appelés à supporter le très haut débit avec si nécessaire, un
complément terrestre hertzien.

Le contexte économique difficile pour nombre de collectivités et le coût du


déploiement de la fibre optique jusqu’à l’abonné au regard des conditions de
mutualisation retenues par l'ARCEP consistant à privilégier un point de mutualisation
très en aval dans le réseau (à l'inverse de ce qui a été retenu pour l'ADSL avec une
mutualisation au niveau du nœud de raccordement d'abonnés), rend indispensable
l’orientation vers d’autres solutions technologiques.

A ce titre, l’accès à la sous-boucle locale pourrait être l’occasion d’introduire une


technologie présente dans nombre de pays frontaliers (Allemagne, Belgique,
Espagne, Italie, Suisse…) qu’est le VDSL2.

Il s’agirait d’appliquer le principe du FTTC pour Fiber To The Curb (Fibre jusqu’au
cabinet/sous-répartiteur) dans la perspective d’un déploiement à moyen ou long
terme de la fibre optique jusqu’à l’abonné.

Si l’un des freins réside dans son incompatibilité avec l’ADSL et les services RNIS, le
VDSL2 n’en reste pas moins une solution technique qui ouvrirait à court et moyen
terme, la possibilité d’apporter le très haut débit dans les zones de faible densité en
se basant sur des infrastructures existantes.

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Pour preuve de la pertinence de cette alternative, un opérateur du nord de l’Europe a
récemment fait état d’une migration de son réseau ADSL vers du VDSL 2.

Pour répliquer cela dans les zones de faible densité en France, des obstacles sont
toutefois à franchir. Outre le modèle technique qui reste à valider avec les opérateurs
et équipementiers, l’on peut citer :

 Les coûts des équipements : plus chers que les équipements ADSL
largement déployés, ils risqueraient de se répercuter sur l’abonné final. L’on
peut raisonnablement estimer qu’un forfait triple-play basé sur le VDSL 2
serait légèrement plus cher qu’un forfait ADSL traditionnel si l’on fixe le coût
au palier historique de 30 euros TTC par mois. Il convient donc de veiller à ce
que les populations de ces zones ne soient pas sanctionnées par des forfaits
plus onéreux que les zones urbaines comme cela a été le cas avec les offres
d’accès internet hertziennes terrestres n’incluant pas l’offre audiovisuelle (TV
sur IP et VoD).

 Le ciblage des sous-répartiteurs : Après avoir défini de façon claire les


zones dites de faible densité, il conviendra de recenser les sous-répartiteurs
potentiellement concernés par ce déploiement. Les infrastructures
mobilisables devront également être connues.

 L’indispensable mutualisation des infrastructures : Si cette solution était


retenue, il conviendrait d’optimiser les coûts de déploiement : si le chiffre de
15 à 30 000 sous-répartiteurs a déjà été avancé dans le cadre de la montée
en débit, il est économiquement irréaliste de penser que les opérateurs-
dégroupeurs investiront sur leurs fonds propres dans ces nouveaux
équipements et raccordements individuels en énergie ; ces derniers étant
devenus kafkaïens, notamment lorsque le point à raccorder se situe sur la
voie publique, à la suite des nouvelles procédures de raccordement découlant
de l'ouverture à la concurrence du marché électrique et qui sont à ce jour l’une
des causes les plus fréquentes des reports d'ouverture de sites ruraux au
dégroupage. La création d’un réseau de collecte mutualisé (un équipement
pour plusieurs opérateurs avec modèle de facturation mensuelle par ligne)
avec une offre de gros régulée doit être envisagée. Elle devra permettre la
fourniture de services triple-play par les différents acteurs du marché.

 Le cadre réglementaire : suite logique du point précédent, l’utilisation du


VDSL2 revient à utiliser un segment de la boucle locale cuivre, propriété de
l’opérateur historique. Il convient de s’assurer que le modèle de déploiement
des équipements et de raccordement sera équitable pour s’assurer que tous
les opérateurs pourront proposer leurs offres dans un cadre économico-
juridique concurrentiel transparent et de ce fait, qui ne confortera pas un
acteur du marché en position dominante.

Il semblerait opportun d’articuler ce déploiement en se basant sur les réseaux initiés


par les collectivités, gage de neutralité et de transparence dans l’offre de gros.

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Réponse de Nicolas GUILLAUME, Consultant indépendant
Dans les zones qui ne seraient pas couvertes par un RIP, il conviendrait de désigner
un opérateur d’opérateurs chargé de déployer, de commercialiser et de maintenir en
conditions opérationnelles les équipements (incluant notamment l'alimentation en
énergie) mutualisés entre les opérateurs.

L’accès filaire n’est pas le seul à pouvoir apporter à moyen terme le très haut débit
dans les zones de faible densité.

A ce titre, le déploiement prometteur de nouvelles technologies comme le LTE est un


complément idéal au même titre que le Wimax a tenté de l’être en complément de
l’ADSL.

Il conviendra toutefois de prendre en compte les attentes fortes de la population pour


des offres incluant un abonnement « voix » et un bouquet de programmes/services
audiovisuels en complément de l’accès internet seul.

L’arrivée du très haut débit va renforcer la dynamique autour des usages et des
services. Les terminaux comme les téléviseurs sont appelés à être connectés au
réseau mondial.

Dans des conditions d’accès fixe, il reste à démontrer que le LTE pourrait supporter
la diffusion de flux audiovisuels en continu et apporter une réponse pérenne pour
toutes les zones qui ne seraient pas desservies à moyen comme à long terme par
des réseaux THD en fibre optique. Les promesses non-tenues du Wimax sont à ce
titre un cas d’école…

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Q4. Comment assurer la bonne articulation des deux volets B et C ? Par
exemple :
- Comment éviter de soutenir un déploiement de fibre optique jusqu’à l’abonné
(FTTH, Fiber-to-the-Home) trop onéreux à court terme là où la modernisation des
réseaux existants (filaires ou hertziens) serait plus adaptée dans une première étape
ou réciproquement ?
- Comment éviter de soutenir de manière trop systématique des projets de
modernisation des réseaux existants (filaires ou hertziens) lorsque, pour les foyers
les plus isolés, un recours à la voie satellitaire pourrait être pertinent ?
Dans certain cas, une part des investissements d’un projet de modernisation de
réseaux ne sera justifiée qu’en ce qu’elle prépare le déploiement de réseaux THD
ultérieurement : par exemple le réseau de collecte pourrait être surdimensionné en
vue d’être capable, le moment venu, d’acheminer le trafic THD. Comment définir les
critères d’éligibilité de tels surinvestissements ?
Q5. Le raccordement de foyers par les réseaux à très haut débit en fibre
optique ne sera pas pris en compte dans le cadre du programme national «
très haut débit » si son coût devient excessif. Sur la base de quels critères ou de
quelle méthodologie est-il possible d’identifier les zones qui n’ont pas vocation à être
couvertes rapidement par les réseaux à très haut débit en fibre optique ? Un coût de
raccordement plafond peut-il être pris en compte et, le cas échéant, sur quelle maille
géographique devrait-il être mesuré ?
Q6. Pour les foyers les plus isolés, le coût de raccordement par les réseaux
terrestres pourrait s’avérer excessif, justifiant le recours à une solution
satellitaire. Sur la base de quels critères ou de quelle méthodologie est-il possible
d’identifier les zones sur lesquelles les coûts de raccordement par les réseaux
terrestres pourraient s’avérer excessifs ? Un coût de raccordement plafond peut-il
être fixé et mesuré ? Un coût de raccordement plafond peut-il pris en compte et, le
cas échéant, sur quelle maille géographique devrait-il être mesuré ?

La cohérence des initiatives publiques est un point fondamental qu’il est nécessaire
d’aborder.

En premier lieu, si l'objectif est de contribuer à l'arrivée au niveau local des


opérateurs nationaux (Orange, SFR, Free, Bouygues, Numéricâble-Completel…), il
importe que les modalités techniques (dimensionnement, modalités de
raccordement) opérationnelles et tarifaires soient homogènes au niveau national.

Les opérateurs ne peuvent se permettre de gérer autant d'exceptions locales qu'il y


aura de projet : une telle diversité est inductrice d'inefficacité qui in fine aura un effet
négatif soit en dissuadant les opérateurs d'investir au niveau local, soit en amenant
quelques opérateurs cédant aux exigences des édiles locaux, à répercuter ces
charges supplémentaires sur les offres de détails comme en témoignaient par
exemple les tarifs différenciés de SFR sur la fibre optique à Pau par rapport à des
déploiements réalisés en propre.

Si l’on prend l’exemple d’une collectivité ayant investi dans l’installation de NRA-ZO
sur son territoire, il n’est pas certain qu’elle sera favorable à un nouvel
investissement à court, moyen voir long terme pour déployer la fibre optique jusqu’à
l’abonné. Toutefois, si ce NRA-ZO a été raccordé en fibre optique, il serait possible
d’envisager une migration technique pour passer de l’ADSL au VDSL2.

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Réponse de Nicolas GUILLAUME, Consultant indépendant
Il est logique de se poser la question de l’opportunité de financer la montée en débit
via ce type de solution alors qu’au regard du coût par ligne, une solution neutre et
pérenne menant plus rapidement vers le très haut débit serait plus raisonnable.

Pour les abonnés isolés (nombre limité à définir dans un périmètre restreint), l’usage
de solutions hertziennes terrestres sera inévitable. Dans ce cadre, il convient
d’analyser avec la plus grande attention les expériences de déploiement de fibre
jusqu’à l’abonné FTTH collectées via un réseau hertzien 7 en attendant l’arrivée d’un
réseau de collecte full-fibre.

En tout état de cause, l’objectif final doit rester le même : proposer une technologie
d’accès pérenne qui ne bridera pas les usages actuels et futurs comme c’est le cas
avec les réseaux satellitaires. Ces derniers ne devront être utilisés que lorsque les
abonnés finaux sont isolés et qu’il est établi que aucune infrastructure terrestre filaire
ou hertzienne ne pourra les desservir à court, moyen et long terme.

Q7. Un soutien à un effort de recherche, de développement et d’innovation


(RDI) visant à mettre au point une nouvelle génération de satellites d’accès à
Internet vous semble t il opportun ? Quel devrait être l’objectif de ces travaux de
RDI ? Quels sont les verrous technologiques à lever ? Quelles performances
pourraient être attendues, notamment en termes de baisse du coût de la bande
passante, et à quel horizon ? Quelles nouvelles offres de détails pourraient être
commercialisées et selon quel modèle économique ?
Q8. Au delà du marché français, l’industrie satellitaire européenne pourrait
elle bénéficier de retombées économiques à l’international grâce au
développement d’une nouvelle génération de satellites ? Dans le cas où l’Etat
soutiendrait les travaux de RDI, comment pourrait il être associé aux retombées
économiques ultérieures ?

Si la France accueille aujourd’hui des industries qu’il convient de soutenir, le


développement massif de l’accès (très) haut débit par satellite n’est pas un choix
judicieux pour l’avenir de l’économie numérique et des usages amenés à croitre ces
prochaines années.

Les efforts financiers doivent se focaliser exclusivement sur des solutions


durables et dont l’adoption massive (et par extension la pérennité) sera
assurée.

7
http://www.silicon.fr/david-el-fassy-altitude-%C2%ABtout-euro-investi-dans-la-montee-en-debit-doit-etre-depense-a-75-
vers-le-tres-haut-debit%C2%BB-41000.html
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Réponse de Nicolas GUILLAUME, Consultant indépendant
Q9. Au delà du satellite, le soutien à d’autres projets de RDI est-il opportun
pour d’autres technologies (par exemple : développement d’équipements
terminaux spécifique pour l’usage fixe des réseaux mobiles de nouvelle
génération) ?
Q10. En tenant compte des difficultés évoquées précédemment, dans quelle
mesure le déploiement de réseaux hertziens terrestres (WiFi, WiMax…) vous
paraît il pouvoir bénéficier d’un soutien public ?
Q11. Le désengagement d’industriels de la technologie WiMax est
il de nature à remettre en cause la pérennité à moyen terme des déploiements
utilisant cette technologie ?

Il semble indispensable d’analyser avec minutie les causes de l’échec du Wimax


dans l’hexagone.

Des promesses « marketing » qui ne se transforment pas en promesses


« techniques » sur le terrain, des capacités limitées, des équipements qui ne sont
parfois pas « interopérables », des offres peu convaincantes lorsqu’elles existent…
autant de raisons qui devront conduire à la prudence avant la mise en avant d’une
technologie.

Le désengagement de grands industriels est à ce titre un signe dont chacun pourra


mesurer la portée vis-à-vis du développement de cette technologie en France.

Les premiers tests et déploiements commerciaux de LTE devront également être


suivis avec la plus grande attention avant un déploiement sur notre territoire.

En tout état de cause, une obligation de couverture devra être fixée à chaque
détenteur de licence, en veillant à ce que les modalités d'attribution des ressources
ou du marché en tiennent compte pour ne pas faire peser des charges excessives
sur le ou les opérateurs concernés et veiller à l'instauration d'une dynamique
vertueuse au bénéfice des consommateurs.

Il conviendra également de travailler avec les opérateurs pour articuler, si besoin est,
le déploiement de ces nouveaux réseaux mobile avec les besoins fixes.

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Réponse de Nicolas GUILLAUME, Consultant indépendant
Q12. Quelle est la maturité technologique des solutions de déport du signal et
de biinjection ? Ces solutions sont-elles susceptibles d’être déployées à large
échelle et de favoriser la montée en débit sur le réseau téléphonique ? Quels
intérêts et inconvénients présentent-elles ?
Q13. Comment s’assurer que les projets de montée en débit sur la boucle
locale existante et de modernisation des réseaux câblés ne créent pas de
distorsion de concurrence ?
Q14. Quelles garanties en termes d’accessibilité et d’ouverture peuvent être
proposées dans le cadre de projets de modernisation des réseaux câblés ou
du réseau téléphonique ?
Q15. Le soutien de projets pilotes permettant d’expérimenter la solution de
déport de signal vous semble-t-il opportun ? Seriez-vous susceptibles de vous
impliquer, le cas échéant financièrement, dans un des projets pilotes ? dans des
travaux de recherche, de développement et d’innovation (RDI) ?
Q16. Le déploiement de technologies avancées telles que le VDSL ou le
VDSL2 sur des zones ciblées est-il pertinent en France ? Si oui, quelles
performances et quelle couverture pourraient être attendues ?
Q17. D’autres technologies ou d’autres modes de déploiement pourrait-il être
pertinent de soutenir afin de tirer le meilleur profit de la modernisation du
réseau téléphonique et plus largement des réseaux existants (notamment
outre-mer) ?

Dans l’objectif d’introduire une nouvelle technologie comme le VDSL2 évoqué


précédemment, la “bi-injection” (qui résulte d’une obligation issue des directives
européennes et renforcée par l’amendement Leroy), permettant à n’importe quel
opérateur d’implanter ses équipements au niveau de la boucle (NRA) ou de la sous-
boucle (SR) apparait comme une première réponse.

Le déport de signal apparait toutefois comme une meilleure solution car la mise en
œuvre de cette montée en débit doit s’articuler autour de plusieurs contraintes.

Nous l’avons déjà évoqué, il est nécessaire d’agir en prenant en compte :

 La préservation de la concurrence renforcée par les propositions de l’Autorité


de la concurrence. Cette dernière a fait état d’un intérêt pour le déport de
signal.
 La pérennité des investissements avec la réutilisation de l’infrastructure (ex :
cabinets/armoires/shelters) lors du passage au FTTH.
 La mutualisation des équipements : avec le déport de signal, les équipements
resteraient localisés au NRA d’origine. Un équipementier français déclare par
ailleurs que sa solution offre la possibilité d’une télé-alimentation de ses
équipements par les paires de cuivre évitant ainsi de lourdes contraintes pour
raccorder une armoire/shelter au réseau d’électricité.

Dans ce contexte, c’est donc le déport de signal qui apparait comme la meilleure
alternative possible.

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Réponse de Nicolas GUILLAUME, Consultant indépendant
Il s’agit toutefois d’un équipement supplémentaire que certains opérateurs-
dégroupeurs pourraient être réticents à voir mis en œuvre puisqu’ils n’en auraient
pas la pleine maitrise en cas d’incident technique.

Une exigence de disponibilité et de neutralité de cet équipement sera


vraisemblablement souhaitée.

Il est opportun d’expérimenter dès à présent ces deux solutions avec toutes
les parties concernées (opérateurs, équipementiers, régulateur, collectivités et
opérateurs d’opérateurs).

Par ailleurs, comme indiqué précédemment, s’il est convenu que la fibre est l’étape
ultime pour desservir le plus grand nombre de foyers et d’entreprises, l’introduction
du VDSL2 en zone de faible densité est une réponse pertinente à court et moyen
terme pour apporter un accès très haut débit.

Si une ligne raccordée à un sous-répartiteur ne dépasse pas un kilomètre8, cela


constituerait une longueur suffisante pour que le signal injecté au sous-répartiteur ne
perde pas sa puissance et offre un débit effectif à l’utilisateur final compris entre 30 et
100 Mbit/s lui permettant de bénéficier d’une offre triple-play (grand public) ou de
services professionnels comme la sauvegarde à distance ou l’envoi/réception de
fichiers volumineux.

8
http://www.itespresso.fr/tres-haut-debit-le-vdsl2-appelle-a-la-rescousse-dans-les-zones-peu-denses-
35582.html/3
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Réponse de Nicolas GUILLAUME, Consultant indépendant
Q18. Cette approche vous semble t elle pertinente ?
Q19. Le calendrier proposé vous semble t il adapté ?
Et conclusion

Lorsque des collectivités ont le choix de financer des équipements de type NRA-ZO,
il se pose la question du renforcement des liens de collecte par le biais d’un nouveau
marché impliquant un nouveau financement.

Généralement, les collectivités ayant initié la création d’une infrastructure publique


incluant une dorsale locale/départementale de collecte seront avantagées face aux
territoires n’ayant pris le parti de n’engager qu’un plan pour transformer des SR en
NRA-Zx non-fibrés.

A cet effet, pour éviter des surcouts préjudiciables au développement du très haut
débit et pour assurer une équité entre tous les projets, le régulateur devrait rendre
dès à présent obligatoire le raccordement de ces nouveaux équipements par une
liaison optique (les câbles communément utilisés comportant désormais au minimum
36 paires dans un volume plus réduit qu'un câble coaxial, permettant de faire face
aux besoins futur) pour permettre à des opérateurs-dégroupeurs de proposer leurs
services. Et de ce fait, permettre le développement du FTTC (Fibre jusqu’au
Cabinet).

En tout état de cause, dès lors qu'un opérateur exerçant une influence significative
sur un marché de détail voit tout ou partie de son déploiement HD et THD financé par
de l'argent public, il apparait nécessaire d'assortir cette facilité d'un certain nombre
de garanties visant à éviter toute distorsion de concurrence au détriment du
consommateur.

En particulier, il appartiendra aux pouvoirs publics de s'assurer de la disponibilité


d'offres de gros dans des conditions non discriminatoires à des modalités
économiques tenant compte de l'avantage découlant d'un financement public, par
exemple en minorant la prime de risque que souhaite appliquer l'opérateur retenu
pour valoriser ses investissements.

Il convient en effet de veiller à éviter de reproduire les erreurs d'une tarification non
orientée vers les coûts, qui en pratique, a conduit l'opérateur historique à bénéficier
d'un enrichissement sans cause en dégageant depuis plusieurs années des
excédents d'exploitation significatifs.

Lorsque le financement est public pour une fraction significative, il incombe d'être
particulièrement vigilant sur les garanties d'utilisation compte tenu des sanctions,
notamment pénales, régissant l'utilisation de l'argent public.

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Réponse de Nicolas GUILLAUME, Consultant indépendant

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