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p a r la
qualité totale
Claude Y. B e r n a r d est ingénieur ESME et CPA Paris.
Il a exercé plus de vingt-cinq ans dans l'industrie, à des
postes de d i r e c t i o n g é n é r a l e et de d i r e c t i o n
opérationnelle. Membre actif de l'EFQM, il a siégé au
Comité académique des universités dont le rôle est de
promouvoir l'enseignement du management par la
qualité totale dans les universités européennes. Il a
participé, en tant qu'assesseur officiel, à l'évaluation
du n i v e a u d ' e x c e l l e n c e d ' o r g a n i s m e s de classe
mondiale en TQM (Sollac, British Telecom) dans le
cadre du Prix européen de la qualité. Il intervient dans
les grandes entreprises (Groupes ELF, Bouygues)
depuis 1992 en tant que formateur et conseil en TQM.
qualité totale
L'excellence
en efficacité et
en efficience
opérationnelles
Claude Yves Bernard
Chez le même éditeur
Recueils de normes
Les projets de normes ISO 9000 - Version 2000, 2000.
Les normes clés du responsable de projet, 2000.
Gérer et assurer la qualité, 1996.
Ouvrages
L'Amélioration de la qualité dans les PME- PMI, CTI, 2000.
ISO 9000. Mode d'emploi pour les PME, Massot P., Lagarde D., Nasiadka-P.,
Bellaïche M., 1999.
Mettre en œuvre la qualité du management de projet, Destors, Le
Bissonnais, 1999.
Anticiper les normes ISO 9000 - Version 2000, Mathieu Stéphane, 2000.
Outils d'autodiagnostic. Normes ISO 9000 - Version 2000, Mathieu
Stéphane, Naciri Khalid, 2000
Produits d'abonnement
Evolution ISO 14000 : Management environnemental des produits et
Système de management et audit environnemental, 2000.
Management de la qualité, 2000.
Evolution ISO 9000. Le Guide. Classeur, 1999.
© AFNOR, 2000
ISBN 2-12-465042-4
Couverture : Michel Le Louarn, Studio Mag Net
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part, les analyses et courtes citations justifiées par le caractère scientifique ou d'information
de l'œuvre dans laquelle elles sont incorporées (Loi du 1er juillet 1992 - art. L 122-4 et L
122-5, et Code Pénal, art 425).
Georges Auguste,
vice president corporate, directeur du TQEM, ST Microelectronics
lauréat du Prix européen de la qualité (1997)
et du Malcolm Baldrige Award (1999)
Introduction
Le management
par la qualité totale
Définition du TQM
Une entreprise très efficace, fournissant des produits dont la valeur perçue
est grande, peut être faiblement efficiente si ses taux de défauts internes, si
ses coûts d'obtention de la valeur perçue, si ses temps de cycle, si sa rigidité
sont très élevés. Ces déficiences pénalisent toutes les parties prenantes de
l'entreprise, à savoir :
- le client qui paie les produits au prix fort pour financer ces coûts inutiles,
- l'actionnaire pénalisé par la mauvaise rentabilité de l'entreprise,
- le salarié, qui voit son environnement de travail devenir plus contraignant,
- la société, globalement pénalisée par ces performances amoindries.
À l'inverse, une entreprise faiblement efficace peut être très efficiente. Dans
les années 80, bon nombre d'entreprises de haute technologie développaient
c o n j o i n t e et e x i g e n t u n d o u b l e s y s t è m e d e m e s u r e c o h é r e n t .
- c o m m e s u s c e p t i b l e d e lui f o u r n i r u n e c o n t r i b u t i o n , u n e v a l e u r s u p é r i e u r e
à celle des autres concurrents.
L e lien e n t r e T Q M et m a n a g e m e n t s t r a t é g i q u e
Le management s t r a t é g i q u e se p r é o c c u p e d e la p é r e n n i t é de l ' e n t r e p r i s e .
P o u r c e f a i r e , il s ' o r g a n i s e pour acquérir toutes les f o r m e s de c a p a c i t é s
distinctives permettant à l'entreprise d'atteindre un avantage concurrentiel
e x c l u s i f et d u r a b l e s u r ses m a r c h é s . D ' u n p o i n t d e v u e s t r a t é g i q u e , la v a l e u r
d ' u n avantage concurrentiel dépend des capacités distinctives sur lesquelles
il s ' a p p u i e , d e la taille d u m a r c h é et d e la p r o f i t a b i l i t é d e l ' i n d u s t r i e d a n s
laquelle opère l'entreprise. U n e stratégie représente une forme d'équilibre
entre l ' e n s e m b l e des c a p a c i t é s distinctives d é v e l o p p é e s par l'entreprise et
l'ensemble des parties prenantes de son système é c o n o m i q u e avec lesquelles
La recherche de l'excellence en management par la qualité totale consiste à
faire que l'entreprise soit durablement plus efficace et plus efficiente que ses
concurrents, aux yeux de ses parties prenantes servies, afin d'acquérir un
avantage concurrentiel.
Figure 1
♦ Capital stratégique
Un avantage concurrentiel peut être bâti sur autre chose qu'une capacité
distinctive. Il peut résulter de décisions réglementaires ou législatives.
3. John Kay, Foundation of corporate success. How business strategies add value, Oxford University
Press, 1993.
Le management stratégique a pour mission de développer avec cohérence
l'ensemble des capacités distinctives de l'entreprise susceptibles de lui
procurer un avantage concurrentiel exclusif et durable. Le TQM se focalise
essentiellement sur l'excellence de l'efficacité et de l'efficience opérationnelles
de l'architecture de l'organisation.
Figure 2
♦ Innovation technologique
♦ Architecture de l'organisation
♦ Réputation, image de m a r q u e
Figure 3
L ' u t i l i t é d u T Q M p o u r les s e r v i c e s p u b l i c s
Les services publics sont aujourd'hui, en Europe, moins avancés que les
entreprises du secteur concurrentiel dans l'adoption du TQM. Seules
quelques organisations publiques européennes ont fait l'effort de soumettre
leur candidature au Prix européen de la qualité. Leur niveau d'excellence sur
le plan de l'efficacité et de l'efficience opérationnelles est encore très loin de
celui des entreprises considérées comme les plus avancées au monde en
TQM. Cependant, quelques réalisations exceptionnelles démontrent qu'un
service public peut également atteindre un tel niveau. Le management par la
Elle s'oblige à financer une structure publique dotée d'une très faible
p r o d u c t i v i t é s u r le p l a n d e s services r e n d u s à la société. E n tolérant les
énormes gaspillages entraînés par ces carences, elle se c o n t r a i n t à d e s
p r é l è v e m e n t s fiscaux croissants pour maintenir ses équilibres budgétaires.
Cette appropriation excessive des richesses produites p a r les acteurs
é c o n o m i q u e s limite leurs propres capacités à créer de la valeur ajoutée. Tout
s e p a s s e c o m m e si l ' e n t r e p r i s e F r a n c e c r o u l a i t s o u s s e s c o û t s d e n o n - q u a l i t é
et les r é p e r c u t a i t d a n s le p r i x d e ses s e r v i c e s . L a c a u s e p r o f o n d e d u c h ô m a g e
e n F r a n c e se t r o u v e d a n s c e s c a r e n c e s , s o u r c e s d ' é n o r m e s g a s p i l l a g e s s u r le
plan collectif. Les services publics ont l'ultime obligation d e s e r v i r la
société en contribuant à créer un système économique dans lequel chaque
c i t o y e n t r o u v e les c o n d i t i o n s les p l u s f a v o r a b l e s à s o n d é v e l o p p e m e n t . C e t t e
mission demande autant d'intelligence, autant de capacités en matière de
m a n a g e m e n t q u e celles a c q u i s e s p a r les meilleures entreprises m o n d i a l e s .
C e n ' e s t p a s u n h a s a r d si l e s h o m m e s p o l i t i q u e s s ' i n q u i è t e n t d e la m o n t é e e n
puissance des décideurs économiques. L a puissance é c o n o m i q u e de grands
g r o u p e s privés m o n d i a u x rivalise a u j o u r d ' h u i avec celle de certains États.
Rien n'indique pour l'instant que cette montée en puissance puisse
s'interrompre. Les hommes p o l i t i q u e s o n t la r e s p o n s a b i l i t é d u d é v e l o p -
p e m e n t à l o n g t e r m e de leur p a y s et du b o n f o n c t i o n n e m e n t , sur le p l a n
opérationnel, des services publics. L'absence de concurrence apparente entre
n a t i o n s , d o n t ils o n t b é n é f i c i é j u s q u ' à p r é s e n t , r i s q u e d e n e p l u s ê t r e d u r a b l e .
L a F r a n c e s ' o u v r e à la c o m p é t i t i o n m o n d i a l e . L ' e n s e m b l e d e s c o l l a b o r a t e u r s
faisant partie des services publics, à tous les niveaux, ne pourront
d u r a b l e m e n t é v i t e r d e p r a t i q u e r e u x - m ê m e s , a v e c e x c e l l e n c e , les f o r m e s d e
management abordées dans ce livre. Les industries occidentales,
essentiellement américaines, ouvertes à la c o n c u r r e n c e m o n d i a l e , souffrirent
Chacune de ces causes suffit le plus souvent à faire échouer toute velléité de
mise en œuvre du TQM dans une approche intégrée. En les analysant de
manière globale, on constate en fait qu'elles sont les symptômes d'une cause
majeure plus profonde provenant d'une vision incomplète, d'une
compréhension limitée du TQM. Le changement de paradigme que représente
ce modèle de management est peut-être le plus grand obstacle à sa diffusion.
Au cours des années 80, de nombreuses entreprises américaines faillirent
disparaître face à la concurrence japonaise déjà très avancée en TQM. Intel fut
contraint d'abandonner le marché des mémoires DRAM à semi-conducteurs et
de s'orienter vers la technologie des microprocesseurs. Corning Glass perdit
définitivement le monopole de la production des tubes de télévision noir et
blanc face à son concurrent Asashi avec lequel elle commit l'erreur de signer
un contrat de transfert de technologies une décennie plus tôt. Xerox faillit
disparaître face à Canon, un nouvel entrant dans les photocopieurs. Motorola
essuya les mêmes échecs en téléphonie mobile. À cette époque, les nouvelles
capacités distinctives acquises par les entreprises japonaises étaient
difficilement perceptibles au travers de la grille imposée par le système de
pensée du management traditionnel. C'est en visitant les usines de Fuji Xerox
au Japon, une entreprise dont Xerox avait fait l'acquisition à une époque plus
faste, que ses dirigeants prirent graduellement conscience de l'avantage
concurrentiel procuré par le TQM dans une approche intégrée. Cette dimension
du TQM est difficilement perceptible de l'extérieur. C'est ce qui explique la
tardive prise de consciences des industries occidentales. Ce modèle de
management fut officiellement reconnu par les États-Unis en 1987 et par
l'Europe en 1991. Il fut progressivement adopté par les plus grandes
entreprises occidentales qui recouvrèrent ainsi, face à l'industrie japonaise, leur
compétitivité temporairement perdue.
F i g u r e 1.1
modèle de management et enfin une nouvelle crise financière dramatique,
pour que le président comprenne enfin, au bout de cinq ans, tout ce que ce
modèle de m a n a g e m e n t pouvait lui apporter en termes d'avantages
concurrentiels (Figure 1.2).
F i g u r e 1.2
1. Masaaki Imai, Kaisen, the key to japan's competitive success, Mc Graw Hill, 1986.
e t q u e c e m o d è l e d e m a n a g e m e n t d e v a i t t r è s v i t e s e d é p l o y e r d a n s t o u s les
sites, d a n s toutes les f o n c t i o n s , d a n s t o u s les objectifs d e l ' e n t r e p r i s e et à
tous les n i v e a u x . L e m o m e n t était v e n u de p a s s e r d ' u n g r a n d n o m b r e
d'initiatives en qualité, à u n e d é m a r c h e intégrée, unifiée par un m o d è l e de
m a n a g e m e n t g l o b a l et p a r u n e c u l t u r e p a r t a g é e . L ' e n g a g e m e n t total d u
p r é s i d e n t fut a c q u i s en j u i l l e t 1991. S o u s s o n i m p u l s i o n et g r â c e à s o n
incontestable autorité, la p r e m i è r e initiative du comité exécutif consista à
définir les n o u v e l l e s r e s p o n s a b i l i t é s en m a t i è r e de T Q M . L e poste de vice-
p r é s i d e n t , d i r e c t e u r du T Q M à t e m p s plein, fut créé en juillet 1991. Sa
r e s p o n s a b i l i t é f u t d o n n é e à l ' a n c i e n v i c e - p r é s i d e n t d e la q u a l i t é e t d u s e r v i c e
q u i a b a n d o n n a p a r a i l l e u r s l a l o g i s t i q u e e t l e s s y s t è m e s d ' i n f o r m a t i o n . Il
d e v e n a i t m e m b r e à p a r t e n t i è r e d u c o m i t é e x é c u t i f et se p l a ç a i t ainsi au
n i v e a u h i é r a r c h i q u e le p l u s é l e v é , a u m ê m e t i t r e q u e les a u t r e s v i c e -
présidents du groupe. Cette nomination montrait clairement l'importance
s t r a t é g i q u e a c c o r d é e au T Q M . L e c o n s e i l e x é c u t i f d e la q u a l i t é t o t a l e ,
c o m p o s é de 9 m e m b r e s , d o n t le p r é s i d e n t et 8 d e ses vice-présidents, fut
officiellement créé en o c t o b r e 1991. U n séminaire de sensibilisation au
T Q M , r é u n i s s a n t les p r i n c i p a u x d i r i g e a n t s du g r o u p e , fut o r g a n i s é en
n o v e m b r e 1 9 9 1 , a u c o u r s d u q u e l ils d é c i d è r e n t d ' a d o p t e r d é f i n i t i v e m e n t u n e
a p p r o c h e intégrée. U n n o u v e a u plan de d é v e l o p p e m e n t du T Q M à trois ans
fut p r o p o s é au conseil e x é c u t i f d e la qualité au c o u r s du m ê m e m o i s et fut
adopté en d é c e m b r e 1991. L e p r e m i e r signe visible de l ' e n g a g e m e n t du
n o u v e a u c o n s e i l e x é c u t i f de la qualité en f a v e u r d u T Q M survint en avril
1 9 9 2 a v e c l a c r é a t i o n d u g r o u p e d e d é v e l o p p e m e n t d u T Q M , p l a c é s o u s la
responsabilité du vice-président, directeur du T Q M , disposant d ' u n budget
et de r e s s o u r c e s h u m a i n e s et f i n a n c i è r e s adaptées. L ' e n c a d r e m e n t c o m p r i t
q u e les dirigeants d u g r o u p e p r e n a i e n t le T Q M très au sérieux. P e n d a n t ce
t e m p s , les sites de p r o d u c t i o n de la z o n e A s i e / P a c i f i q u e , c o m p r e n a n t 7 0 0 0
s a l a r i é s , a v a i e n t d é f i n i t i v e m e n t l a n c é l e u r p r o c e s s u s d e t r a n s f o r m a t i o n p a r le
T Q M . A f i n d e p r é s e r v e r la c o h é r e n c e d e l ' a p p r o c h e i n t é g r é e r é c e m m e n t
d é f i n i e p o u r l ' e n s e m b l e d e l ' o r g a n i s a t i o n , le g r o u p e de d é v e l o p p e m e n t
formalisa rapidement un calendrier c o m m u n d'implantation du T Q M pour
l'ensemble de l'organisation.
Bien que déjà mis en œuvre dans les sites de la région Asie/Pacifique, le
système de déploiement des politiques de l'entreprise fut formalisé par le
groupe de développement du TQM qui y intégra le système de standards de
performances du groupe, ainsi qu'un calendrier détaillé à cinq ans des étapes
de mise en œuvre du TQM. Le rôle de ce système était d'assurer le
déploiement des méthodes et des systèmes de management du TQM ainsi
que les premières politiques d'amélioration spécifiques au TQM. Ce
système fut avalisé par le conseil exécutif de la qualité en juillet 1992. Une
version révisée de ce système fut formalisée en 1993 pour y intégrer le
management des politiques de transformation radicale. Une version
consolidée fut formalisée en 1994 pour y intégrer l'ensemble des politiques
de progrès de l'entreprise, y compris celles concernant le management
opérationnel. Cette troisième étape préfigurait l'intégration complète du
TQM et du management opérationnel dans un modèle de management
unifié.