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Collection EDYTEM.

Cahiers de
géographie

La photogrammétrie, principes généraux et terminologie


Yves Egels

Résumé
L 'objectif de cet article est de présenter les éléments théoriques essentiels de la photogrammétrie. Après une présentation des
principes de cette technique bénéficiant de plus d'un siècle de recul méthodologique, les mesures et leurs corrections font l'objet
d'un développement. Le géoréférencement des images est alors décrit : orientation, compensation, redressement. Enfin
l'exploitation des images et la production des MNT et orthophotos constitue l'aboutissement de la chaine opératoire mise en
œuvre.

Abstract
The aim of this paper is to present the essential theoretical elements of photogrammetry. The technical principles, based on a
century of development, are first described. The measures and their corrections are then explained and developed. Two main
results of the treatment pipeline are finally proposed : DEM and orthophotographies.

Citer ce document / Cite this document :

Egels Yves. La photogrammétrie, principes généraux et terminologie. In: Collection EDYTEM. Cahiers de géographie, numéro
12, 2011. Images et modèles 3D en milieux naturels. pp. 41-50;

doi : https://doi.org/10.3406/edyte.2011.1176

https://www.persee.fr/doc/edyte_1762-4304_2011_num_12_1_1176

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LA PHOTOGRAMMETRIE

PRINCIPES GÉNÉRAUX ET TERMINOLOGIE

PHOTOGRAMMETRY:
GENERAL PRINCIPLES AND TERMINOLOGY

Yves EGELS

Ecole nationale des sciences géographique, Département imagerie aérienne et spatiale,


Avenue Biaise Pascal 77455 Marne la Vallée Cedex 2, France.
,

Contact : yves.egels@free.fr

Résumé
L 'objectif de cet article est de présenter les éléments théoriques essentiels de la phot ogrammé trie. Après une présentation des prin¬
cipes de cette technique bénéficiant de plus d'un siècle de recul méthodologique, les mesures et leurs corrections font l 'objet d'un
développement. Le géoréférencement des images est alors décrit : orientation, compensation, redressement. Enfin l'exploitation
des images et la production des MNT et orthophotos constitue l 'aboutissement de la chaine opératoire mise en œuvre.
Mots-clés : photogrammétrie, iconométrie, image, colinéarité.

Abstract
The aim of this paper is to present the essential theoretical elements of photogrammetry. The technical principles, based on a cen¬
tury of development, are first described. The measures and their corrections are then explained and developed. Two main results of
the treatment pipeline are finally proposed: DEM and orthophotographies.

Keywords: photogrammetry, iconometry, image, coujnearity.

Collection EDYTEM -n° 12-2011 41


Images et modèles 3D en milieux naturels

Introduction

La photogrammétrie est utilisée depuis plus d'un logiques était en effet le support des images, plaques
siècle comme instrument de mesure géométrique, de verre ou film de grand format, qui rendait indis¬
essentiellement dans le domaine de la cartographie, où pensable un système de visualisation optico-méca-
elle est la base de la quasi-totalité des cartes topogra¬ nique complexe et délicat. Même l'apparition des
phiques du monde. Pendant tout le vingtième siècle, les restituteurs numériques dans les années 80 n'a guère
technologies ont relativement peu évolué. Elles sont amélioré cette situation ;
restées très onéreuses et confinées dans des grands - l'augmentation constante de la puissance de calcul
organismes, instituts géographiques civils ou militaires, des ordinateurs, qui permet de réaliser des opéra¬
ou sociétés privées de topographie. Depuis l'an 2000, tions complexes en des temps très courts sur des
trois facteurs ont complètement modifié les possibilités grandes quantités de données ;
d'usage de la photogrammétrie : - la généralisation dans le domaine universitaire de
- le plus important a été la généralisation de l'image logiciels libres a mis à la disposition de tout cher¬
numérique de bonne qualité, à des coûts toujours cheur des outils extrêmement performants.
plus bas. Le handicap principal des techniques ana¬

I - Généralités

1 - Principe partir de l'image. Deux grandes catégories de méthodes


sont alors utilisées (Figure 1) :
La photogrammétrie, mieux nommée à son inven¬ - si l'on ajoute une information de forme sur l'ob¬
tion iconométrie, permet la mesure géométrique d'ob¬ jet, une seule image peut suffire. Un objet peut être
jets dont on possède des images. Ce terme est un peu plan (une façade par exemple) et on parle alors de
vague et nécessite une définition précise dans le cadre redressement, mais aussi on peut supposer connu
de la photogrammétrie : une image est une transfor¬ un modèle de l'objet (Modèle numérique de terrain
mation géométrique de l'espace R3 dans l'espace R2 MNT) et l'on produira alors une orthophoto ;
(fonction image). Peu importe la réalisation physique - lorsqu'une telle information n'est pas disponible,
de cette transformation, très souvent photographique, on peut utiliser plusieurs images qui couvrent l'ob¬
mais aussi radar, radiographique, microscopique, ou jet, et qui permettent ainsi de le localiser par inter¬
par un dispositif à balayage. On remarquera que le lidar section. C'est la base de la stéréophotogrammétrie.
ou scanner laser n'entrent pas dans cette définition, car
la mesure est directement tridimensionnelle, et, même
s'ils sont souvent mis en œuvre par les mêmes corps 2 - La mesure, le modèle et les résidus
de métier, les techniques de traitement n'ont rien de
commun. D'une manière générale, un processus de relevé
Bien entendu, la fonction image ne peut pas être topographique est, pour une part, la réalisation d'une
directement inversée, l'inverse d'un point étant sauf mesure , l'autre part étant la compréhension de l'objet à
exception une ligne. Il est donc nécessaire d'ajouter relever. Cette mesure est complexe, et peut faire appel à
une autre information pour permettre la localisation à des outils divers : le mètre, l'appareil photo, le tachéo-

■i

fl'7

r5

par
Figure
droites
42 combinaison
1 - Orthophoto
issues de deux
d 'uneimages.
etimage
stéréophotogrammétrie
et d 'une information: sur
à gauche
la formela delocalisation
l 'objet ; à est
droite
impossible
la localisation
; au centre
se faitlapar
localisation
intersection
est des
obtenue
deux
Yves EG ELS La photogrammétrie, principes généraux et terminologie

mètre, le scanner laser, le GPS... Chacun de ces outils bien placées, ou utiliser des instruments plus précis.
fournit des mesures unitaires partielles et de nature et Si elle est supérieure la demande, la rentabilité éco¬
de précisions diverses : le mètre fournit des distances nomique du chantier sera mauvaise, il faudra en
entre points, le tachéomètre des angles et des distances, tenir compte dans les prochains projets ;
la photo des coordonnées des pixels. Le traitement géo¬ - vérifier qu'il n'y a pas de faute de mesure. Si les
métrique des mesures a pour but de transformer ces dif¬ mesures ne sont pas surabondantes, il est impossible
férentes données en un résultat final correspondant aux de s'assurer qu'il n'y a pas de faute. Plus la sura¬
besoins du commanditaire. bondance est grande, plus la détection des fautes
Pour effectuer cette transformation, les anciens uti¬ est facile. Une mesure non contrôlée n'est pas une
lisaient souvent la règle et le compas, maintenant cette mesure.
tâche est confiée à des logiciels, qui fonctionnent glo¬ Il n'est pas évident de séparer les fautes de mesure
balement tous de la même façon : la mesure unitaire est de la précision obtenue car les possibilités d'erreur sont
modélisée par une équation la reliant aux coordonnées nombreuses : une erreur de numéro de point, la focale
des points et aux paramètres de l'instrument de mesure. d'un autre objectif, une image mal tournée. . . Si la sura¬
Par exemple, avec un niveau, la dénivellée est reliée bondance est suffisante, il est possible de donner une
aux coordonnées des deux extrémités par l'équation règle efficace :
simple Dn = Pour d'autres instruments de mesure, - les gros résidus normalisés isolés supérieurs à 3
les équations peuvent être beaucoup plus compliquées : ou 4 fois la valeur sg correspondent à des fautes. Les
par exemple, pour la photographie, l'équation donnera fautes doivent être comprises, pour ne pas les refaire
les coordonnées de l'image d'un point connaissant la la fois suivante, et corrigées ;
position de la caméra, son orientation, et les caracté¬ - les gros résidus très groupés, correspondent à
ristiques de l'objectif que l'on appelle en général para¬ une estimation réelle de la précision. S'ils sont
mètres. Chaque type d'instrument de mesure possède anormalement forts, soit la précision estimée des
son propre modèle mathématique, qui représente son mesures est surestimée, soit certains paramètres
fonctionnement par le calcul numérique. généraux du modèle mathématique sont faux (par
Réaliser une mesure revient alors à trouver le meil¬ exemple la distorsion de l'optique pour un calcul de
leur jeu de coordonnées et de paramètres, qui soit ph otogram m étri e ) .
en accord avec toutes les mesures unitaires qui ont
été enregistrées. C'est la base de la méthode appelée
« solution par moindres carrés ». Bien entendu, la défi¬ 3 - Les points homologues
nition de « meilleur jeu » doit prendre en compte les
différents types d'instrument de mesures et leurs préci¬ La plupart des opérations photogrammétriques
sions propre ; par exemple, on mesure à 2 cm près avec nécessitent l'identification de points homologues,
un décamètre ruban, à 1 pixel près l'image d'une cible c'est-à-dire des images d'un même point de l'objet
sur une photo, à 50 cm près une touffe d'herbe, à 3 mm sur différentes photographies. Les solutions technolo¬
près une distance au tachéomètre... Ces différences de giques à ce problème sont de plusieurs types :
précision sont prises en compte dans le calcul par la - on peut décrire le point : par un texte ou un dessin,
pondération, qui donne la qualité estimée de chaque ou le rendre identifiable par la pose d'une cible. On
mesure. peut classer dans la même catégorie le détecteur
Cette méthode fournit deux résultats : d'une part les SIFT et ses variantes, qui décrivent mathématique¬
coordonnées et paramètres cherchés, mais aussi une ment l'environnement radiométrique des points,
estimation de la qualité de ces valeurs, à condition qu'il et ramène la recherche de points homologues à un
y ait un nombre de mesures supérieur au minimum calcul de distance dans l'espace des descripteurs.
nécessaire (mesures surabondantes). L'évaluation de la Ces méthodes fonctionnent point par point et sont
précision est tirée de l'examen des résidus , qui corres¬ habituellement très précises, mais ne permettent évi-
pondent à la différence entre chaque mesure unitaire et dement pas la mesure complète d'un objet en tous
la valeur calculée par le modèle, qui tient compte de points ;
l'ensemble des mesures effectuées. La moyenne de tous - on peut mesurer la ressemblance radiométrique
ces résidus, rapportés à la pondération (résidus norma¬ des points, soit par un opérateur humain (vision
lisés) donne un estimateur global (s0) de la précision stéréoscopique), soit de façon algorithmique. La
du modèle. Si les pondérations sont correctes, cet esti¬ visualisation stéréoscopique informatique est main¬
mateur doit être proche de 1 (ce qui signifie que la pré¬ tenant très à la mode, avec le développement du
cision obtenue est proche de la précision recherchée). cinéma 3D, ce qui rend beaucoup plus accessibles
La connaissance de la précision obtenue a un double les applications de restitution photogrammétrique,
but : qui nécessitaient précédemment des matériels spé¬
- s'assurer que la méthode utilisée pour le relevé est cialisés. La détermination algorithmique de points
adaptée au besoin. Si la précision obtenue est infé¬ homologues se fait pratiquement toujours par l'exa¬
rieure à la demande, il faudra ajouter des mesures men d'un coefficient de ressemblance, souvent le

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Images et modèles 3D en milieux naturels

coefficient de corrélation linéaire entre des extraits au point homologue, et doit être complétée par des
d'image. Malheureusement, cette méthode est intrin¬ règles de cohérence additionnelles, par exemple en
sèquement peu fiable car la fonction de corrélation imposant une pente maximum.
comporte plusieurs maxima dont un seul correspond

II - La fonction image (équation de colinéarité)

Dans le cas d'une image photographique, l'image 2 - Corrections


correspond en première approximation, à une pers¬
pective centrale, à laquelle la physique réelle impose En réalité, la perspective n'est qu'une approxima¬
d'apporter un certain nombre de corrections. tion de la réalité physique. Plusieurs phénomènes sont
à prendre en considération, leur importance étant fonc¬
tion du domaine d'application envisagé.
1 - Perspective
a - Système de coordonnées

Tout d'abord, la formule précédente s'applique dans


un espace euclidien (repéré par trois axes orthonormés),
qui n'est pas habituellement celui des cartographes, qui
sont habitués à travailler en projection. Bien entendu, la
correction la plus importante est altimétrique, suivant
Figure 2 - Notation conven¬ la formule approximative bien connue de l'équation 3.
tionnelle utilisées pour la La correction est ainsi de 7,7 cm à 1 kilomètre.
r mise en place de la fonction
image. (éq. 3)
13
La solution la plus rigoureuse consiste à transformer
les coordonnées cartographiques dans le système eucli¬
dien local, en utilisant si possible les formules géo-
désiques rigoureuses, ou éventuellement une formule
approchée valable dans le domaine d'étude.

b - Distorsion optique
La perspective géométrique est définie comme l'in¬ Les caméras photogrammétriques aériennes profes¬
tersection de la droite joignant le point objet au centre sionnelles ont une distorsion quasi nulle (par construc¬
de l'objectif avec le plan du capteur (Figure 2).Si l'on tion pour les caméras argentiques, par calcul pour les
note K le vecteur unitaire sur l'axe Z (Figure 2), on peut caméras numériques). Ce n'est pas le cas des appareils
exprimer les coordonnées m de l'image en fonction des photographiques usuels, de plus en plus utilisés pour
coordonnées M du point objet, de la position S et de des applications photogrammétriques légères. La dis¬
l'orientation R du capteur, du vecteur focal F par la for¬ torsion est la fonction reliant l'orientation du rayon
mule suivante : lumineux émergent à celle du rayon incident.
m — F — KFR(M-S) (éq. 1) Dans la mesure où l'optique est correctement
FR(M S) construite (dioptres de révolution bien centrés), on
Qui peut être développée en : peut souvent se contenter d'une correction radiale
modélisée par un polynôme impair centré sur l'inter¬
Xc \ fx" section de l'axe optique et du capteur (éq. 4). Le point
F = yc m = R = *2 principal de symétrie n'est confondu avec le point
principal d'autocollimation que si l'axe optique est
et p, V 3 / perpendiculaire au capteur.
dr
j = ar 2.75.
+ br + cr 7 (éq. 4)
x = x - p Rx -{M -S)
*3 (M -S) (éq. 2) La distorsion des optiques courantes (surtout grand
R. ■(M -S) angulaires) atteint souvent la centaines de pixels ; sa
y = yc-p connaissance conditionne grandement la qualité des
R, (M-S) mesures qui pourront être faites. L'étalonnage permet

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Yves EG ELS La photogrammétrie, principes généraux et terminologie

PPA Point Principal d'Autocollimation


A, axe optique ppc Point Principal de Symétrie
Distorsion
Plan du cliché

Figure 4 - Distorsion d'un objectif Minolta 18-70.

c - Correction atmosphérique
En raison des variations de l'indice de réfraction de
l'atmosphère, les rayons ne se propagent pas en ligne
droite. L'indice n varie essentiellement en fonction de
l'altitude du capteur suivant la loi :
n = 1 + 278.10
T7Q 1 A "6 e (-105.10 () h) (éq. 5)
i

La conséquence est une correction altimétrique y


fonction de l'altitude h et de l'angle 0 des rayons lumi¬
neux avec la verticale.
î "s ~
y = cos © 105.10 + (éq. 6)

où ns, nM et nc sont respectivement les indices de


réfraction au niveau du sol, de l'avion, et dans la cabine
(dans le cas d'un avion pressurisé). Cette correction est
Figure 3 - a) principe de la distorsion optique ; b) distorsion souvent faible, elle vaut par exemple 45 cm pour un
en barillet ; c) distorsion en coussinet. avion volant à 5 000 mètres et un angle de 45°
d - Corrections diverses
de ramener les résidus de distorsion à une fraction de
pixel (0,15 à 0,25). Si cette modélisation polynomiale Dans certains cas, d'autres corrections peuvent
est insuffisante, il peut être nécessaire d'adopter une s'avérer nécessaires, par exemple la déformation du
correction par interpolation dans une grille, notamment support lorsque l'on cherche à exploiter des images
lorsque des défauts de centrage des lentilles produisent anciennes pour des études diachroniques, ou la réfrac¬
une distorsion tangentielle sensible. tion de l'eau pour des mesures sous-marines.

III - Le géoréférencement des images

Quelle que soit l'utilisation des images dans un but sion). Cette opération constitue le géoréférencement
de mesure (stéréorestitution, redressement, orthophoto, des images, et revient à déterminer toutes les formules
corrélation, texturation de nuages 3D), il est nécessaire d'image des photographies.
de reconstituer les conditions géométriques dans les¬ Dans certains cas, il est possible d'obtenir des don¬
quelles ces images ont été acquises. Plus précisément, nées directement lors de la prise de vue elle-même :
il s'agit de déterminer la position et l'orientation de c'est le cas en photographie aérienne, où la position
la caméra à chaque photo, et éventuellement les para¬ de la caméra peut être obtenue par GPS, et l'orien¬
mètres internes de la caméra (point principal et distor¬ tation par une centrale à inertie, dont sont équipées

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Images et modèles 3D en milieux naturels

maintenant la plupart des caméras aériennes (mais pas Par contre, si on tourne de 1 80°, on repart en arrière, si
toujours suffisamment précises pour ce but). Dans le on tourne du double, le résultat est nul, on continue tout
domaine de la photogrammétrie terrestre, ces pratiques droit : les rotations ne sont pas linéaires. Hors l'équa¬
restent possibles, au moins partiellement (mesure du tion de colinéarité fait intervenir des rotations.
point de station par topométrie, nivellement de l'axe Malheureusement, les méthodes classiques de réso¬
optique avec un niveau à bulle). Mais elles alourdissent lution des systèmes d'équations utilisables pour calcu¬
considérablement les opérations de terrain, et en dimi¬ ler l'aérotriangulation fonctionnent uniquement avec
nuent sensiblement la productivité ; elles ne sont en des systèmes linéaires. Pour pallier cette difficulté, on
conséquence pas d'un usage courant. résout les équations par approximations successives, à
Le géoréférencement des images peut être réalisé à partir d'une valeur approchée raisonnable, c'est-à-dire
la demande pour deux images, dans le cas de la stéréo- suffisamment proche de la réalité pour que les approxi¬
restitution d'un couple, mais il est plus économique de mations puissent converger vers la bonne valeur. Si
traiter simultanément l'ensemble des images du chan¬ les itérations ne convergent pas en quelques itérations
tier. On utilise alors une méthode d' aérotriangulation, (moins d'une dizaine, en général 2 ou 3), cela signi¬
dont les résultats peuvent être employés pour la fabri¬ fie que les valeurs approchées sont trop éloignées de la
cation des produits finaux. réalité. La cause en est presque toujours une faute de
mesure non détectée dans la phase de calcul approché.
Il existe de nombreuses méthodes de calcul appro¬
1 - Principe de calcul ché. A titre d'exemple, dans Redresseur on dispose
d'une boîte à outils que l'on peut combiner, comme on
De façon générale, on a recours à une reconstruction peut calculer un réseau topométrique en combinant des
des paramètres de prise de vues par le calcul, à partir intersections, des rayonnements, des relèvements, etc.
d'une part de mesures de coordonnées de points dans Pour faciliter les calculs, il est intéressant d'organiser
les images (mesures image), et d'autre part d'informa¬ les images en bandes, chaque bande étant composée
tions externes de dimensions, positions, et orientations d'images se succédant avec recouvrement stéréosco-
(mesures d'appui). Ce calcul, qui est une application pique. Ces outils sont les suivants :
particulière de la méthode décrite dans le paragraphe
« La mesure », porte dans ce cas le nom de « compen¬ a - Orientation relative
sation par faisceaux ». Pour appliquer cette méthode
générale, il est nécessaire de traduire chaque mesure On utilise deux images de deux stations différentes
(image ou appui) en une équation mathématique reliant ayant des points homologues (au moins 6, de préfé¬
la mesure aux paramètres du problème. Il suffit alors rence une douzaine). On laisse l'image gauche fixe, et
d'utiliser des outils mathématiques adaptés (moindres on calcule la position de l'image droite telle que tous
carrés) pour calculer les paramètres les mieux adaptés les rayons homologues se coupent (dans ce cas la paral¬
aux mesures : laxe verticale est nulle). Les équations utilisées sont
- pour les mesures images, cette équation est l'équa¬ les équations de coplanéité, indiquant que les deux
tion de colinéarité, déjà vue ci-dessus (éq. 1) ; sommets et les rayons homologues sont coplanaires,
- pour les points d'appui, les équations sont avec comme valeurs approchées des axes parallèles
simples : les coordonnées du point M doivent être perpendiculaires à la base (en cas de besoin, il est pos¬
égales aux coordonnées P mesurées par la topogra¬ sible d'introduire des axes convergents). On obtient un
phie (M = P). couple, ensemble des points vus sur les deux images,
Comme il est précisé dans le paragraphe sur la avec des coordonnées dans le repère de l'image gauche.
mesure, les types de mesures ont des précisions très
différentes, une fraction de pixel pour les mesures
images, quelques centimètres pour les points d'appui
par exemple. Il convient donc de choisir une pondéra¬
tion adéquate.

2 - Phases du calcul

Si le principe général est simple, la mise en œuvre


est nettement plus complexe. En effet, les équations de
colinéarité ne sont pas linéaires. On qualifie de linéaire
un phénomène dans lequel une augmentation des para¬
mètres produit une augmentation proportionnelle du
résultat. Si la vitesse d'une voiture est multipliée par 2,
la distance parcourue en un certain temps sera doublée. Figure 5 - Orientation relative.

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Yves EG ELS La photogrammétrie, principes généraux et terminologie

b - Enchaînement de groupes

Un groupe est un ensemble d'images ayant déjà été


reliées, par exemple un couple, ou plusieurs couples
déjà enchaînés. On prend deux groupes ayant au mini¬
mum 3 points communs, non alignés (et éventuellement
une image commune, si les groupes appartiennent à la
même bande). On calcule le changement de repère qui
passe le second groupe dans le repère du premier. Le
modèle mathématique est la similitude 3D, avec blo¬
cage de la rotation et de la translation s'il y a une image
commune. On obtient un groupe plus grand.

Eigure 6 - Enchaînement de deux groupes (d'un couple vert


à trois couples déjà enchaînés en rouge) Cercles : points de
liaison au sol. Triangles Sommet commun.
.

c - Orientation absolue

Si un groupe contient un nombre suffisant de points


connus sur le terrain (3 minimum, non alignés), on peut
calculer le changement de repère qui passe le second /rithme
méthode,
alable
ela
mesure.
peut
phie.
caméra
ment
méthode
coup
sont
sible
images.
exemple,
résultats.
qui
équivalent
d'appui
peuvent
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trop
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La
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les
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points
compensation.
répartition
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une
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dépend
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Le
géoréférence¬
plus
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d'assemblage
les
avec
de
points
résultats
peut
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favorable
nombre
Les
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focale
risquent
éventuelles
algorithme
phases
nombre
colinéarité
les
façade
des
longue,
homogra¬
bords
recouvre¬
fautes
d'images
efficaces
de
doit
mesures
un
faussent
être
de
caracté¬
points),
images
(appui
points
etsur
fautes
debeau¬
(dans
Cette
de
algo¬
bons
pos¬
pré¬
sont
être
que
très
des
par
les
de
la
et
groupe dans le repère terrain. Le modèle mathématique
est la similitude 3D.

d - Compensation par faisceaux

Les groupes orientés en absolu peuvent être com¬


pensés pour obtenir les paramètres de prise de vue
définitifs. Le modèle mathématique utilise les équa¬
tions de colinéarité et d'appui, tous les paramètres étant
estimés simultanément. Il est possible de considérer
les paramètres d'étalonnage des caméras comme des
inconnues, et de les déterminer en même temps que le
géoréférencement des images (auto-étalonnage). Cette

a'iL

Figure 7 - Orientation absolue.


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Images et modèles 3D en milieux naturels

IV - Exploitation des images

Une fois le géoréférencement réalisé, les images ou les conditions de prise de vues (convergence) sont
peuvent être utilisées à des fins de mesures. Plusieurs choisis de façon à donner une profondeur importante à
types de produits sont alors disponibles, en fonction de l'objet. Le calcul de géoréférencement peut alors four¬
l'application : nir les valeurs précises de la focale et de la distorsion.
Ce calcul peut être réalisé simultanément au calcul de
géoréférencement d'un chantier (autoétalonnage), mais
1 - Etalonnage d'une caméra ce n'est pas toujours une solution rentable en pratique.

Le calcul de géoréférencement peut être un produit


en lui-même, par exemple pour fournir la trajectoire 2 - Stéréorestitution
d'un mobile, ou l'orientation d'un objet auquel on fixe
une caméra (un bon exemple étant le bras d'arrimage de On peut utiliser un couple d'images et numériser
la navette spatiale). L'application la plus répandue reste manuellement des points et des lignes choisis par un
néanmoins l'étalonnage d'une caméra. Les données de opérateur, en leur attribuant des codes correspondant
départ sont alors les coordonnées images d'un certain à des attributs sémantiques généraux (route, bâtiment,
nombre de points vus sur plusieurs images, éventuelle¬ courbe de niveau) ou spécifiques à une application
ment connus en coordonnées terrain. Le polygone et/ métier (ligne de faille, limite de bloc...). 11 s'agit d'une
restitution point par point en mode
vecteur, qui permet une interprétation
directe en 3D de la scène. Lors de la
restitution photogrammétrique, la for¬
mule d'image est appliquée en temps
réel lors du déplacement du curseur
3D (appelé aussi ballonnet).

Figure II - Mire (PhotoModeler) et poly¬


gones d'étalonnage ENSG.

48
Yves EG ELS La phot ogrammétrie, principes généraux et terminologie

Correction de courbure Je Terre

Correction de réfraction ( Z,otai)

'kF,R|(M"-S,)
'kR2(M - S2)
Colinéarité

faisceau
- Prise en compte de la distorsion de l 'optique
Oh Oh -faisceau
Orientationrepère
Internemesure
changement de repère
(en prenant en

:
compte les déformations du film dans le cas
argentique)

ballonnet au sol 9

Non — ► déplacement du ballonnet


Oui • saisie par clic

Figure 12 - Restitution photogrammé-


trique : chaine de calcul lors de l 'ajuste¬
ment d un point au sol.
'

3 - MNT et orthophoto ce processus des phases d'élimination des parties


cachées, à la fois sur chaque photographie du chantier,
On peut aussi déterminer automatiquement un et sur l'orthophoto résultante, ce qui complique consi¬
modèle dense de l'objet par corrélation, et utiliser ce dérablement l'opération.
modèle soit en tant que tel (pour une étude morpholo¬
gique, calcul de pentes, de volumes, d'exposition...)
soit pour rectifier les photographies et obtenir ainsi
une orthophoto, assemblage d'images rectifiées en Ç
projection cartographique. La boucle de calcul de l'or-
thophoto est la suivante : chaque pixel de l'orthophoto
à calculer reçoit une altitude (Figure 13.1) par l'inter¬
médiaire du modèle numérique. Ce point est projeté
par les formules d'image sur les différentes photo¬
graphies du chantier (Figure 13.2). Les radiométries
y sont alors prélevée et combinées (par mélange, par
choix d'une image préférentielle, ...)(Figure 13.5). La
radiométrie résultante sert alors à colorier le pixel de
départ (Figure 13.6)
Dans le cas d'un objet tridimensionnel complexe
(orthophoto urbaine vraie, et surtout orthophoto de
prise de vues terrestre) il est nécessaire d'ajouter à Figure 13 - Processus de calcul d'une orthophoto.
Collection EDYTEM - n° 12-2011 49
Images et modèles 3D en milieux naturels

Conclusion

Nous avons détaillé succinctement dans cet article de projection dont les paramètres définissent l'orien¬
les étapes fondamentales permettant une exploitation tation du modèle photogrammétrique. La restitution
photogrammétrique d'images avec recouvrement sté- photogramétrique constitue la phase d'exploitation de
réoscopique. Les principes utilisés se fondent sur la ce modèle. Elle aboutit à la détermination des coor¬
relation géométrique entre le terrain et les images de données de points terrain.
ce terrain. Cette relation se caractérise par une formule

Bibliographie

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On trouvera là une bibliographie commentée


:

http://www.ensg.eu/IMG/pdf/bibliographie ref_photogrammetrie.pdf

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