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Tilman Nagel*

Le Mahdisme d’Ibn Tûmart et d’Ibn Qasî


une analyse phénoménologique

Abstract: In this paper, I argue that Islamic Mahdism tends to fade away in Sunnite Islam
because Sunnism holds that there is no total separation between man and his Creator. The world
will not fall into total corruption since being derives from absolute being. This dogma is trans-
lated into social reality by the saints and their impact on the daily life of Muslims.
Résumé : Dans cet article, je soutiens que le mahdisme a tendu à s’édulcorer au sein de l’is-
lam sunnite car le sunnisme considère qu’il n’y a pas de séparation décisive entre les êtres
humains et leur créateur. Le monde ne sera pas absolument corrompu car l’être humain est dérivé
de l’Etre Absolu. Ce dogme est transposé dans le mode réel par l’intermédiaire des saints et par
leur impact sur la vie quotidienne des musulmans.

Pour analyser le mahdisme d’Ibn Tûmart et d’Ibn Qasî, il convient de com-


mencer par l’étude des fameuses réflexions qu’Ibn Khaldûn a faites à ce propos
dans son Introduction. Il y a abordé ce sujet du point de vue sociologique et poli-
tique, et il apparaît qu’il regardait le mahdisme comme un phénomène au fond
chiite, qui se manifesta à maintes reprises comme un mouvement séditieux ou
bien révolutionnaire. Dans la perspective de sa théorie de l’évolution politique
de la société humaine, il traita du mahdisme comme d’un cas particulier de la

* Université de Göttingen.

REMMM 91-92-93-94, 125-136


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genèse des dynasties. Il arrive parfois que le fondateur d’une dynastie donnée appar-
tienne à une famille de très grand prestige, mais n’ait pas à sa disposition un groupe
de partisans assez fort ; malgré cela il gagne l’appui d’une tribu ou d’un peuple,
qui le vénère à cause de sa noble origine. Il écrit :
« Remarquez, par exemple, ce qui arriva aux Almohades avec les Zenâta. Ceux-ci
étaient plus habitués à la vie nomade que les Masmouda (les Almohades)… mais
les Masmouda combattaient pour leur religion sous la conduite du Mehdi, et ils
avaient pris une teinture de fanatisme qui doubla la force de leur esprit de corps.
Aussi les Zenâta succombèrent tout d’abord, et durent obéir au gouvernement
almohade, bien qu’ils fussent plus forts que leurs adversaires, tant par l’esprit de
tribu que par leur habitude de la vie nomade. Mais, aussitôt que le sentiment reli-
gieux eut cessé d’agir sur le vainqueur, les Zenâta se révoltèrent dans toutes les par-
ties de l’empire et finirent par s’emparer du pouvoir » (Ibn Khaldûn, 1862 : I, 326).
Alors que les Zenâta obéirent à Ibn Tûmart à cause de son prestige religieux,
ils s’opposèrent à ses successeurs qui, eux, ne jouissaient pas de l’autorité du
fondateur du mouvement. Cependant le sentiment religieux ne suffit pas pour
l’avènement au pouvoir ; ce sentiment doit se lier à la force déployée par un
groupe d’hommes unis. C’est le concours de ces deux facteurs qui garantit l’ar-
rivée au pouvoir et la continuité de son contrôle. Afin d’illustrer cette théorie,
Ibn Khaldûn en vient à parler ainsi d’Ibn Qasî, un révolté du type mahdien lui
aussi, mais sans soutien tribal considérable :
« Ayant pris les armes en Espagne, il se posa comme prédicateur de la vérité et donna
à ses partisans le nom de murîdîn (aspirants). Cela eut lieu peu de temps avant la
prédication du Mahdi (des Almohades). Son entreprise eut d’abord quelque suc-
cès : les Lemtouna (Almoravides) s’étaient laissé accabler par les Almohades, et l’Es-
pagne ne renfermait plus aucun parti, aucune tribu capable de lui résister. Mais à
peine les Almohades eurent-ils subjugué l’Afrique septentrionale qu’Ibn Cassi leur
fit sa soumission » (Ibn Khaldûn, 1862 : I, 327).
Cependant, ce qui nous intéresse ici avant tout, ce n’est pas l’aspect politique
du mahdisme, bien que nous voulions l’aborder à la fin de cet article. Nous
n’allons pas analyser le mahdisme comme l’élément catalyseur de l’histoire dynas-
tique du monde musulman. Au contraire, le mahdisme sera pour nous en pre-
mier lieu un phénomène religieux, qui eut sans doute aussi des effets politiques,
lesquels furent assez importants pour aspirer à les comprendre, mais qui sont secon-
daires malgré tout. Autrement dit, nous allons rechercher la racine religieuse pro-
fonde des événements politiques qu’Ibn Khaldûn décrit dans son Introduction.
Pour commencer, nous citons quelques observations faites par ‘Abd al-Wah-
hâb al-Sha‘rânî (mort en 1565) dans son œuvre volumineuse La†â’if al-minan,
une véritable encyclopédie de l’islam du XVIe siècle.
« Dieu m’a attribué le don de reconnaître les hommes de prétentions authentiques
des imposteurs. Or, je les reconnais grâce aux indices que Dieu m’inspire de manière
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à ce que tout cela m’apparaisse comme un savoir nécessaire. Un jour, un sharîf de


maigre stature portant un turban et un litham est entré chez moi. Il me parlait des
sciences que personne ne connaissait sauf le Mahdi et puis il m’a informé que
c’était lui et que le moment de se présenter au public était proche. Mais je ne fai-
sais pas attention à lui. Alors, il m’a dit : “Est-ce que tu ne crois pas ça ?” Bien qu’il
fût un jeune homme de bonne allure et qu’il eût un air qui imposait du respect,
je lui répondis : “Mais non ! Ta voix n’est pas la voix des descendants du Prophète,
et le Mahdi, bien sûr, sera un de ses descendants !” Aussitôt il découvrit son visage
et il dit : “Tu as raison. Mais au Maghreb je mettais bien des gens à l’épreuve, et
ils croyaient que j’étais le plus grand Mahdi et ils disaient : ‘Voilà le Mahdi est
apparu !’” Je lui demandai : “Pourquoi faisais-tu comme ça ?” et il répondit : “Pour
qu’ils ne cessent pas de penser à lui, car le moment où il va se présenter au public
est proche. En disant que je suis le Mahdi je ne fais qu’affirmer que Dieu me guide
vers la religion de l’islam.” » (al-Sha‘rânî, La†â’if al-minan, II, 90).
Le jeune homme inconnu dont al-Sha‘rânî parle dans ce récit se faisait pas-
ser pour le Mahdi chez les Maghrébins, et ceux-ci ne doutaient point de son affir-
mation. Quant à al-Sha‘rânî, il a deviné aussitôt la réalité – ou du moins il le fait
croire à son lecteur. D’ailleurs le jeune homme ne semble pas être un imposteur ;
il a seulement l’intention de conserver la foi à l’arrivée du Mahdi, qui remplira
ce monde de justice et gagnera la victoire finale sur tous les adversaires de la vraie
religion. En tout cas, il faut admettre qu’il ne trompait pas ses auditeurs, car le
sens littéral du mot arabe al-mahdî est le « le guidé par Dieu », et il n’y a per-
sonne qui puisse contester que Dieu guide les croyants tous les jours. C’est-à-
dire que nous observons dans le récit d’al-Sha‘rânî un subtil jeu des mots qui dérive
de l’ambiguïté du terme. Au Maghreb, on pense à l’eschatologie, quand on men-
tionne le terme mahdî, mais au Caire on préfère se montrer plus éclairé : on ne
saurait nier que le Mahdi arrivera à la fin du monde, mais tout cela ne se réali-
sera que dans un avenir lointain et, pour cette raison, n’a pas d’importance pour
le moment. D’où vient ce sang-froid que l’on remarque chez al-Sha‘rânî, savant
sunnite du XVIe siècle ? Pourquoi ne craint-il pas aussi la destruction de ce monde
comme une éventualité plausible ? Dans ses œuvres, on ne trouve pas de trace
d’un chiliasme agité, pas de trace d’un désir de rencontrer le Mahdi. Chez al-
Sha‘rânî, la loi de Dieu ne paraît pas corrompue, on n’a pas besoin d’un Sauveur
qui doive la restituer comme elle était au temps du Prophète. Son scepticisme à
l’égard du jeune homme et de ses paroles, semble donc avoir des racines plus pro-
fondes que le « savoir inspiré » dont il se vante.
Pour comprendre cette confiance sunnite, qui ne craint plus la corruption de
l’islam, il faut remonter au temps du mahdi Ibn Tûmart, qui fut le dernier pen-
seur sunnite d’importance politique à invoquer l’eschatologie pour propager un
renouvellement de la religion.
« L’islam a commencé comme un étranger, et il redeviendra cet étranger qu’il a été
au commencement. Alors il faut dire salut aux étrangers ! »
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Ce sont les mots célèbres avec lesquels, selon une tradition bien connue, le
Prophète annonce le Mahdi. On la trouve, par exemple, dans la propagande mah-
diste lancée par Abû ‘Abdallâh al-Shî‘î pour gagner le support des tribus berbères
contre l’émirat aghlabide. Le Qâ∂î al-Nu‘mân, auteur d’un récit détaillé sur les
débuts de la domination ismaélienne Afrique du Nord, explique au lecteur ce
que le Prophète voulait dire avec cette prédiction : il y aura un temps où la loi
tombera en oubli et où la sunna sera remplacée par des normes qui violeront l’ordre
de Dieu. En ce temps-là, qui sera plein de mal, Dieu enverra un nouvel appel
aux hommes ; Dieu destinera un des descendants du Prophète à restituer la vraie
religion et à supprimer toutes les coutumes illégales, qui auront pris le dessus chez
les gens de cette époque. Le Qâ∂î écrit son histoire de la prédication chiite en
Afrique afin de convaincre les sceptiques et les hésitants de la vérité, et par consé-
quent de la légitimité, des aspirations ismaéliennes. C’est pourquoi le Qâ∂î
considère-t-il l’avènement de ‘Ubaydallâh al-Mahdî au pouvoir comme une
répétition de la carrière du prophète MuÌammad : Lui et son descendant ‘Ubay-
dallâh al-Mahdî, tous deux prédestinés par Dieu, sont les seuls à garantir l’inté-
grité de la loi divine ; le Prophète l’a promulguée et ‘Ubaydallâh va la restituer.
En dehors de MuÌammad et de sa famille, il n’y a ni personne, ni une chose effi-
cace qui puisse protéger la loi de la corruption et, finalement, de l’oubli total
(Nagel, 1972).
Dans la propagande mahdiste d’Ibn Tûmart on retrouve de nombreux motifs
parmi ceux que nous venons de signaler dans le mouvement ismaélien, et qui abou-
tirent au califat fatimide : l’islam a commencé comme un étranger, et il s’est rendu
étranger comme au commencement ; la loi divine ne vaut plus, elle a été cor-
rompue, et les indices que la fin du monde s’approche se multiplient de jour en
jour. Ibn Tûmart en compte vingt, et il puise la description des ces indices dans
Abû Hurayra qui les a résumés dans un Ìadîth fameux. Quand la servante met-
tra au monde son seigneur ; quand les bergers nus et pauvres, rivalisant de
richesse, se feront bâtir des palais ; quand les nus, les sourds, les muets devien-
dront les rois de la terre, là seront des indices de la proximité du Jugement der-
nier. Il y aura des méchants qui auront l’habitude de fustiger les gens avec des
fouets semblables aux queues des vaches ; il y aura des femmes qui s’habilleront,
mais qui apparaîtront nues quand même ; des femmes qui arrangeront leurs
cheveux de manière à ce qu’ils ressemblent à la bosse d’un chameau ; des femmes
qui auront une allure érotique. C’est avec obstination qu’Ibn Tûmart répète ces
phrases qui, à son avis, contiennent tout ce qu’il faut reprocher aux Almoravides.
Le temps où toutes les prédictions du Prophète et de ses compagnons vont se réa-
liser est venu. C’est-à-dire que les Almoravides se sont détournés de la loi divine,
et pour cela il faut maintenant se détourner d’eux (LMT : II, 258 sq).
Pour justifier ses prétentions, Ibn Tûmart se faisait passer pour un alide – ou,
plus vraisemblablement, ses adhérents le faisaient passer pour un descendant de
‘Ali. Cela n’était pas trop difficile, car il y avait des tribus berbères qui se vantaient
d’une origine alide, fait signalé par Ibn Khaldûn à maintes reprises dans son Histoire
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des Berbères. Mais, en étudiant les œuvres d’Ibn Tûmart, on a l’impression que
la prétendue descendance de la famille du Prophète n’a pas l’importance à
laquelle on pourrait s’attendre si l’on avait des sources chiites sous les yeux. Ce
que nous voulons souligner là, c’est le sens ambigu de la « bénédiction des étran-
gers », qui se trouve à la fin de la phrase du Prophète, citée ci-dessus. Dans un
avenir éloigné, l’islam deviendra une religion étrangère comme il l’était au com-
mencement. Ce sera une époque du Mal, et la plupart des hommes sera condam-
née à l’enfer. Quant aux étrangers, ce seront les héros de la foi, les vrais croyants,
qui réaliseront les exigences de la loi divine scrupuleusement et sans aucune
réserve. Ils feront cela malgré la décadence de l’époque à laquelle ils vivront et,
pour cette raison, ils gagneront plus de mérites que les Compagnons du Prophète
qui, à La Mecque puis à Médine, souffrirent de périls et de la pauvreté. Car Dieu
a accordé aux Compagnons l’avantage inestimable d’être parmi les gens qui
virent le Prophète de son vivant. Pour eux, ce ne fut pas difficile d’obéir à Dieu,
alors que les étrangers bénis, que le Prophète avait cités dans sa prédiction,
seront seuls, sans direction prophétique et, de plus, méprisés par leurs contem-
porains pécheurs. Pour cette raison, le vrai croyant n’a pas peur de la corruption
de la religion ; au contraire, il en profite. Plus les conditions de la vie quotidienne
de la communauté musulmane deviennent dépravées, plus ces étrangers-ci seront
récompensés dans l’au-delà pour leur persévérance. Alors, si l’on regarde les
choses dans cette optique, pourquoi faudrait-il espérer l’arrivée du Mahdi ?
Après la mort d’Ibn Tûmart en 1130, le mouvement dont il a été le fonda-
teur traverse quelques années d’une crise assez grave. Les années turbulentes (et
peu documentées) aboutissent à la création d’une structure stable du pouvoir almo-
hade, dont se sert ‘Abd al-Mu’min avec grand succès pour subjuguer le Magh-
reb entier et, finalement, pour intervenir en al-Andalus en faveur des musulmans
qui souffraient des attaques de plus en plus audacieuses des royaumes chrétiens
du nord. C’est au cours de ces événements de grande portée historique que le
calife almohade ‘Abd al-Mu’min rencontre Ibn Qasî, le révolté de la région méri-
dionale du futur Portugal, qui s’était déclaré le mahdi attendu. Nous renonçons
ici à retracer la situation militaire et politique qui détermina les actions de ces
deux adversaires – ou bien des deux rivaux, si nous adhérons à l’interprétation
d’Ibn Khaldûn signalée ci-dessus. Ibn Qasî nous donne une description détaillée
de sa pensée dans son œuvre Khal‘ al-na‘layn. Là, il saute aux yeux que l’islam,
devenu un étranger comme il l’était à son commencement, joue un rôle impor-
tant dans ses idées théologiques et mythiques. Mais, avant d’aborder l’analyse de
ces idées et de les comparer à celles d’Ibn Tûmart, nous devons étudier la base
métaphysique du mahdisme almohadien. Nous verrons que cette base est tout
à fait conforme au concept de l’islam étranger, un concept qui – nous le proposons
d’abord comme hypothèse – n’a pas besoin d’un changement total et violent
concernant tous les aspects d’une vie religieuse et sociale corrompue.
Malgré la prétention qu’il avait de descendre de la famille du Prophète, Ibn
Tûmart, nous l’avons vu, n’était pas chiite. Il avait été formé par un jurisconsulte
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de l’école de Mâlik b. Anas, avant qu’il ne quittât le Maghreb pour continuer ses
études dans les centres fameux de l’érudition islamique comme Baghdad. Nous
n’avons que quelques renseignements, sur cette période de sa vie. Quoi qu’il en
soit, le fait qu’il ait rencontré al-Ghazâlî, le savant le plus célèbre de ce temps-
là, n’est qu’une légende, élaborée pour sa légitimation de réformateur. En dépit
de l’obscurité dans laquelle sont plongées ces années de sa carrière, on peut tra-
cer nettement l’influence de la pensée d’al-Ghazâlî à travers les traités théologiques
qu’il écrivit après son retour au Maghreb. Nous nous bornerons dans cet article
à l’étude de son traité polémique le plus riche, intitulé A‘azz ma yu†lab (La chose
la plus chère à laquelle on puisse aspirer), lequel fut composé en 1121. Ce traité
rend compte des polémiques acharnées qui opposaient à cette époque Ibn Tûmart
aux savants almoravides. Comme ceux-ci, Ibn Tûmart appartenait à l’école mali-
kite, la plus répandue en Afrique du Nord. En lisant les considérations théolo-
giques d’Ibn Tûmart, on discerne sans difficulté que le malikisme est le fonde-
ment de sa pensée, et on peut aller jusqu’à dire que ce sont des particularités
malikites qui déterminent la conception de son mahdisme, ce que nous allons
démontrer maintenant. La clef de voûte de la théorie juridique malikite consiste
en la doctrine de la tradition vivante des exemples prophétiques, que les croyants
sont obligés de suivre pour éviter de pécher, et pour entrer au Paradis. Ces
exemples, énoncés par le Prophète ou décrétés indirectement par ses actions, de
l’avis des malikites ne sont pas transmis directement dans les vastes collections.
Il y figurent comme un nombre immense de textes assez fragmentaires desquels,
en appliquant une certaine méthode d’interprétation, on décline les prescriptions
de la loi divine. Selon la doctrine malikite, et Ibn Tûmart insiste sur ce point à
maintes reprises, on ne trouve pas la loi de Dieu dans ce qui a été écrit, mais dans
les actions mêmes, qui se produisent continûment depuis l’ère du Prophète jus-
qu’au temps présent, et qui ne cessent pas d’être en conformité avec les ordres
de Dieu, que MuÌammad exécutait de son vivant. Savoir la loi divine, ce n’est
pas avoir la connaissance de la tradition textuelle et de la méthode exacte de l’in-
terprétation, mais c’est pratiquer l’imitation par action. Face à ses adversaires almo-
ravides Ibn Tûmart souligne ses convictions malikites, et il reproche aux Almo-
ravides de ne pas être adaptés à la jurisprudence telle qu’on la connaît chez les
jurisconsultes des autres écoles. L’argumentation qu’Ibn Tûmart développe se base
sur la théorie du « récit disséminé partout » (al-khabar al-mutawâtir). Selon la
doctrine des autres écoles juridiques on parle d’un récit disséminé partout, s’il
y a un si grand nombre de transmetteurs qu’on ne peut pas imaginer qu’ils se soient
entendus pour faire circuler un mensonge ; cela revient à dire que « le récit dis-
séminé partout » a valeur de témoignage. Mais Ibn Tûmart met en garde son lec-
teur contre la fiabilité de ce type de tradition car il faut être conscient que cette
catégorie de récits n’est qu’une construction théorique. En réalité, ils n’existent
pas en tant que tels, surtout si l’on considère chaque récit comme un texte incor-
poré dans des ensembles textuels beaucoup plus importants. Ainsi, chaque texte
ne vaut pas plus qu’un témoignage écrit ou transmis oralement d’un lecteur à
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un auditeur qui l’enregistre dans sa propre collection pour le transmettre aux


étudiants de la prochaine génération. Dans ce cas, le texte garde un statut de texte
et personne ne peut vérifier s’il est reconnu unanimement comme sain. Par
conséquent, les controverses des jurisconsultes tendent à s’éloigner de la réalité
et, ce qui est plus regrettable encore, il s’ouvre une rupture fatale entre le savoir
(al-‘ilm) et l’action (al-‘amal) du croyant. Il est vrai que l’on essaya de fixer le
nombre de transmetteurs qui suffisait à reconnaître un texte donné pour « dis-
séminé partout » mais on ne parvint pas à une solution convaincante. Il était
impossible de relier la réalité, la vie quotidienne musulmane, à une immense quan-
tité de récits écrits, parfois contradictoires d’ailleurs, et qui, presque toujours,
avaient besoin d’un commentaire pour être compris. Ces défauts ne furent
jamais éliminés, même par la méthode de la plus stricte interprétation, ce qui
amena Ibn Tûmart à la conclusion que l’adoption des opinions sur l’autorité des
jurisconsultes interpréteurs de textes devait être interdite aux croyants (Nagel,
1997).
Ainsi, aux yeux d’Ibn Tûmart, l’histoire de la jurisprudence musulmane, dans
la mesure où elle est représentée par toutes les écoles célèbres – sauf le malikisme,
bien sûr – n’est qu’une erreur terrible, et le malikisme est le seul moyen de la cor-
riger – bien entendu, un malikisme ramené à ses propres racines et qui abandonne
toutes les influences que les autres écoles exerçaient sur lui. Mais en quoi sa
méthode originelle consiste-t-elle ? Ibn Tûmart l’explique à ses adhérents et à ses
adversaires almoravides dans son traité cité ci-dessus. Y a-t-il des traditions « dis-
séminées partout », qui corroborent le mode d’exécution des rites plus impor-
tants que le Prophète a enseignés à la communauté médinoise ? Non, dit Ibn
Tûmart, on n’en trouve presque aucune et, malgré cela, les musulmans, dans toutes
les régions de la Terre, s’acquittent de leurs obligations religieuses de la bonne
façon. Comment est-il possible d’exécuter la loi divine de manière satisfaisante
sans s’appuyer sur la connaissance des récits transmis par tous les jurisconsultes ?
Même la formule de la profession de foi ne se base que sur des traditions indi-
viduelles ! C’est la pratique continue de l’exécution des rites qui les garde contre
toutes sortes de corruption et de modification, intentionnées ou non. En expo-
sant cette idée, Ibn Tûmart révèle son malikisme fondamental : la communauté
des croyants reste une et unifiée grâce à la pratique et non grâce aux textes trans-
mis ! Au fond, c’était la pratique de Médine, la pratique des contemporains du
Prophète ; les gens qui vivaient avec Lui l’ont adoptée et, quand les armées
musulmanes conquirent de vastes contrées, ils l’enseignèrent aux peuples sou-
mis. Après cela, il y eut des savants arabes et non-arabes, qui discutèrent sur la
tradition orale et écrite et prirent conscience du caractère particulier de cette tra-
dition. Elle n’était pas entièrement conforme à la pratique, elle ne comprenait
pas tous ses aspects et tout ce qu’elle transmettait, elle n’était pas authentique au
même degré. En bref, le savoir de la loi divine en dehors de Médine n’était pas
en harmonie totale avec la pratique continue. Ibn Tûmart en donne un exemple
très simple : en Irak on discutait la capacité de la mesure nommée mudd que le
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Prophète utilisait pour le commerce du blé et pour établir la taxe qu’était le


zakât ; à Médine on garda cette mesure et on ne cessa pas de l’utiliser (LMT :
II, 49). L’islam, en tant que mode de vénération du Dieu créateur, révélé par ce
Dieu, a été conçu dès l’origine comme une pratique vivante et se propagea jus-
qu’à nos jours comme une tradition vivante. Au commencement de la juris-
prudence musulmane, le malikisme aspirait à justifier la supériorité des Médi-
nois, prétendument conservateurs de la tradition vivante. Mais, à l’époque d’Ibn
Tûmart, les malikites durent élaborer une argumentation plus subtile, qui per-
mit de refuser l’arrogance d’une classe de jurisconsultes qui s’intéressa en premier
lieu aux textes, et moins à la pratique continue. Plus se précisait le danger que
le savoir religieux était en train de disparaître, plus les jurisconsultes gagnaient
de l’importance dans la mesure où ils étaient les seuls à connaître et à expliquer
la voie qui mène au Paradis. Ibn Tûmart s’imagine les conséquences d’une telle
situation spirituelle, et il s’en effraie : à la fin, cela aboutirait au pouvoir sans res-
triction pour les jurisconsultes, la grande majorité des croyants étant obligée
d’adopter leurs ordres sans objection – et au surplus sans la possibilité de s’as-
surer de la conformité de ces ordres à la volonté de Dieu. Pour cette raison Ibn
Tûmart n’hésite pas à rappeler les fondements du malikisme à ses disciples. Si
l’on prend ces fondements au sérieux, les croyants n’arriveront jamais à une
situation si désastreuse ; la félicité de la communauté musulmane ne dépend
plus d’un mahdi qui arrivera afin d’« emplir le monde de justice comme il est
plein d’injustice à présent ». Au contraire, la loi divine continue à être en vigueur;
elle se manifeste dans les actions quotidiennes des croyants, dans les actions
rituelles du service rendu à Dieu. Même si seuls les « étrangers » restaient fidèles
aux ordres divins, on n’aurait pas besoin d’un mahdi réformateur. Car, à cause
de la continuité des actions, la vie terrestre ne se séparera jamais entièrement de
son fondement divin ; la mesure de blé que les Médinois gardent depuis le temps
du Prophète pour leurs affaires est le symbole le plus évident d’une telle conti-
nuité.
Il en résulte que la théorie de l’interprétation de la loi divine et la vue de la
nature des fondements du droit exercent une influence remarquable sur le
concept du mahdisme. Le mahdi que l’on attend ne peut être un rénovateur du
savoir législatif révélé par Dieu au Prophète que tant que la loi provient des
textes dont la connaissance et l’interprétation sont réservées aux spécialistes du
fiqh. Si la loi divine est transmise dans les actions des croyants, elle ne disparaîtra
jamais entièrement, et alors la mission du mahdi n’est pas assurée. Cependant
ce n’est pas seulement la théorie du droit qui met le mahdisme d’Ibn Tûmart au
demi-jour ; il faut aussi regarder ses opinions métaphysiques, qui jouent un rôle
important à cet égard. Nous venons de constater que la mesure de blé que le
Prophète laissa aux Médinois représentait la continuité de l’ordre des choses
voulu par Dieu. Dans la pensée d’Ibn Tûmart on peut discerner d’autres repré-
sentants de cet ordre divin et, à maintes reprises, il souligne dans son traité polé-
mique que l’ordre des choses est garanti par Dieu pour que l’homme puisse
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obéir à toutes les prescriptions de la loi. Cette loi n’est que l’aspect verbal de l’ordre
universel, duquel Dieu a doué la création ; la loi fait partie de l’œuvre continue
de Dieu, et l’homme doit rechercher tous les phénomènes de cet ordre.
Comprendre les créatures et le règne de la nature, c’est comprendre les condi-
tions de l’obéissance à la loi. Ce monde doit être pénétrable pour l’esprit de
l’homme ; autrement la demande de l’obéissance à la loi divine serait tout à fait
inique et insupportable. En signalant la relation étroite entre la pénétrabilité du
monde créé et la possibilité de l’observation de la loi, Ibn Tûmart témoigne
qu’il s’est éloigné considérablement de l’ash‘arisme qui domina la pensée malikite
pendant plus d’un siècle et demi. Les théories d’al-Ash‘arî servirent à stabiliser
les récits transmis comme la base la plus importante du fiqh, certes, et c’est
pourquoi on remarque une certaine affinité entre l’ash‘arisme et le malikisme.
Mais, comme une jurisprudence qui se fonde sur la pratique vivante continue,
le malikisme n’est pas conforme à la métaphysique des ash‘arites dont les doctrines
soutiennent la discontinuité du monde créé face à Dieu, créateur et législateur
absolu et incompréhensible.
Apparemment, Ibn Tûmart se voit dans la nécessité d’expliquer ses opinions
sur la métaphysique afin de justifier sa théorie, qui déduit la jurisprudence de
la pratique vivante. Dieu est « l’être absolu » (al-wujûd al-mu†laq), dit-il, Dieu
n’a pas de qualités quelconques, qui soient comprises par la raison humaine. Car
la raison humaine fait partie du monde créé, qui représente l’être conditionné
(al-wujûd al-muqayyad). L’être conditionné dépend de l’être absolu. Il en dépend,
et cela veut dire qu’il n’y a pas de différence totale entre les deux espèces de
l’être qui, chez les ash‘arites, sont considérés comme irréconciliablement oppo-
sées de façon à ce qu’il n’y ait point de rapport ontologique entre eux. Chez Ibn
Tûmart ils sont complémentaires, l’être conditionné provenant de l’être absolu.
À cause de cette provenance ininterrompue du monde, l’être conditionné ne souffre
jamais de la carence de l’ordre de Dieu. Tout ce qui se produit en ce monde, se
produit en accord complet avec Dieu, et il en résulte une foi rigide en la pré-
destination, une doctrine qui semble comparable à celle des ash‘arites. Mais,
contrairement à leurs doctrines, dans celle d’Ibn Tûmart l’homme qu’il a conçu
est capable de déchiffrer la volonté de Dieu qui se manifeste dans le cours de tous
les événements de la nature et de l’histoire humaine. Or, vers la fin de son traité,
Ibn Tûmart s’occupe des mathématiques en général et des nombres en particu-
lier qui, de son point de vue, sont la clé la plus importante qui nous aide à com-
prendre la création et même à la manipuler en faveur de notre intérêt ; Ibn
Tûmart décrit bien des métiers, qui se servent de cette clé (LMT : II, 59-62).
Si l’homme est capable d’analyser le monde, qui est la manifestation de la
volonté compréhensible de Dieu, alors l’homme ne cesse jamais de participer au
salut, qui existe tant que le monde créé existe. Nous touchons ici à la deuxième
raison de l’ambiguïté du mahdisme propagé par le mouvement des Almohades :
ce monde ne peut pas être corrompu, parce qu’il représente en soi l’être condi-
tionné, qui est le complément inséparable de l’Être absolu, de Dieu. Alors, si l’uni-
134 / Tilman Nagel

vers est ainsi, il n’y aura jamais besoin d’un mahdi, qui le remplira du bien, car
l’univers ne se remplira jamais du mal. Pour cette raison, la propagande almo-
hadienne tend à souligner l’importance de l’imamat d’Ibn Tûmart : il est pré-
senté aux adhérents comme le mahdi, qu’il faut reconnaître à cause des indices
prédits (al-mahdî al-ma‘lûm), qui viennent d’apparaître, bien sûr, mais en même
temps il est « l’imam infaillible » (al-imâm al-ma‘Òûm), qui symbolise la conti-
nuité de ce monde et de la loi divine (LMT : II, 289-312). Il est comme une
colonne ; les cieux et la terre restent sur place grâce à lui (LMT : II, 246-247).
Le mahdisme almohadien marque donc une position intermédiaire entre la pen-
sée chiliastique, dont les traits les plus précis se développèrent dans l’eschatolo-
gie chiite, et le culte des saints d’origine sunnite. Nous le constatons d’un point
de vue purement phénoménologique. Les Almohades n’étaient pas des chiites ;
ils se servaient des formules chiites uniquement pour donner plus de vigueur à
leur propagande chez les tribus berbères. En considération des résultats de notre
analyse des doctrines d’Ibn Tûmart, il semble facile de comprendre que, chez ‘Abd
al-Mu’min, le successeur d’Ibn Tûmart, la sainteté du calife gagnait en impor-
tance. Le saint, en qualité de thaumaturge, sait manipuler les événements ; son
esprit pénètre l’ordre divin des choses et, surtout, le saint n’est point un personnage
eschatologique.
Pour synthétiser ce que nous venons d’expliquer ci-dessus, jetons un coup d’œil
sur les mots, qu’Ibn Qasî, le contemporain de ‘Abd al-Mu’min, fit frapper sur la
monnaie, qu’il mit en circulation pendant son règne en Algarve : « Dieu est notre
Seigneur, MuÌammad est notre prophète, le Mahdi est notre imam – l’imam
AÌmad b. Qasî, le fiduciaire de Dieu ». Dans son traité du Khal‘ al-na‘layn
(« Ôte les sandales ») il a partagé l’histoire de ce monde en deux cycles. Le
premier a commencé par Adam et s’est fini par la prophétie de Jésus. La révélation
reçue par MuÌammad introduit le deuxième, qui durera mille ans. Maintenant,
on se trouve à mi-chemin de l’ère musulmane, dit Ibn Qasî, et c’est la phase la
plus importante, celle des croyants étrangers, conservateurs de la vraie foi. Il sont
les héros de la religion, parce qu’ils gardent la lumière du message divin malgré
la distance énorme qui les sépare du Prophète. Cependant ce n’est pas grâce aux
textes transmis qu’ils remplissent cette mission ; selon Ibn Qasî ils puisent leur
savoir immédiatement à la source, comme l’a fait Moïse, quand Dieu l’a appelé :
« Je suis ton Seigneur! Ôte donc tes sandales, car tu te trouves dans la vallée sacrée! »
(Coran : XX, 12). Les étrangers sont des équivalents de Moïse, ils savent péné-
trer la surface des choses créées et atteignent une telle connaissance de l’ordre de
ce monde et de la volonté divine, qu’ils n’ont plus besoin des textes. Ils prennent
directement conscience du gouvernement de Dieu sur ses créatures.
C’est de cette représentation qu’il se fait de l’étranger, qu’Ibn Qasî dérive la
justification de son imamat. Son mahdisme n’est plus qu’un fantôme ; Ibn Qasî
ne tient plus beaucoup au titre de mahdi et il renonce à en fournir des preuves.
Ibn Tûmart et ses adhérents se servaient encore de la généalogie afin d’attester
le mahdisme du fondateur du mouvement almohadien ; ils voulaient se rattacher
Le Mahdisme d’Ibn Tûmart et d’Ibn Qasî une analyse phénoménologique / 135

à la tradition ancienne, qui promettait l’apparition d’un rénovateur descendant


du Prophète vers la fin du monde. Ibn Qasî se faisait nommer le Mahdi, et il son-
geait à un rassemblement de tous les croyants, qui étaient devenus des étrangers
dans leur société. Cependant ce ne serait pas un renouvellement total d’un
monde corrompu, mais seulement une réunion des hommes pieux, qui portent
la lumière de la révélation et qui doivent continuer à garder cette lumière pen-
dant la deuxième moitié de l’ère musulmane (Dreher, 1985).
Ibn Khaldûn, ayant analysé les mouvements d’Ibn Tûmart et d’Ibn Qasî, est
arrivé à la conclusion que l’échec d’Ibn Qasî n’était point inattendu car il n’est
pas parvenu à rallier des tribus fortes sous ses drapeaux : la société tribale exprime
son loyalisme en termes de descendance et ne comprend pas la mission reli-
gieuse, dont Ibn Qasî se vante. Alors le mahdisme « chiite » d’Ibn Tûmart paraît
un élément nécessaire pour assurer son succès sur le plan politique; en même temps
ce mahdisme voile le caractère de la pensée d’Ibn Tûmart : Il n’y a pas de raison
d’avoir peur de la disparition de la loi divine, parce qu’elle se manifeste dans l’ac-
tion continue. Ibn Qasî y ajoute le savoir, que l’homme croyant ne peut pas perdre
son accès aux sources du gouvernement de Dieu. C’est le type du saint sunnite,
intermédiaire entre ce monde des phénomènes et le domaine du règne divin invi-
sible, qui s’annonce dans les œuvres d’Ibn Tûmart et, plus directement, d’Ibn
Qasî et qui y trouve sa propre raison théologique et métaphysique. Les sunnites
apprennent à surmonter la peur d’un avenir sans conduite divine. Quels que soient
les événements qui se produisent, les croyants ne tomberont jamais en disgrâce
de Dieu, le créateur et législateur. Ainsi al-Sha‘rânî n’a pas senti d’inquiétude,
quand il a rencontré ce jeune homme-là, qui se faisait passer pour le Mahdi : Seuls
les gens crédules perdent contenance en entendant des paroles comme celles-ci.

BIBLIOGRAPHIE

DREHER J., 1985, Das Imamat des islamischen Mystikers Abulqâsim ibn al-Îusain Ibn Qasî, Bonn,
Universt. Dissertation.
IBN KHALDOUN, éd.1862-1868, Prolégomènes historiques d’Ibn Khaldoun, traduits en français et
commentés par W. MacGuckin de Slane. Notices et extraits des manuscrits de la Biblio-
thèque impériale, vols. XIX-XXI, Paris, Imprimerie impériale.
NAGEL T., 1972, Frühe Ismailiya und Fatimides im Lichte der Risâlat IftihâÌ ad-da‘wa, Bonn, Orien-
talisches Seminar der Universität.
— 1997, « La destrucción de la ciencia de la Ωarî‘a por MuÌammad b. Tûmart », dans : Al-
Qan†ara XVIII, 295-304 (traduction de l’original allemand par J. Aguadé et C. de la Puente
en collaboration avec M. Fierro).
Abréviation :
LMT = LUCIANI I. F. (ed.), 1903, Le livre de Mohammed Ibn Toumart, Alger.

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