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38 (2013)
Pratiques religieuses (afro-)cubaines
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Référence électronique
Emma Gobin et Géraldine Morel, « L’ethnographie et l’anthropologie religieuses de Cuba : repères historiques et
bibliographiques », Ateliers d'anthropologie [En ligne], 38 | 2013, mis en ligne le 08 juillet 2013, consulté le 18
juillet 2014. URL : http://ateliers.revues.org/9348 ; DOI : 10.4000/ateliers.9348
L’ethnographie et l’anthropologie
religieuses de Cuba : repères historiques
et bibliographiques
1 L’édition de ce dossier est issue d’un appel à contributions intitulé « Anthropologies
émergentes de Cuba ». Initialement lancé par Valerio Simoni (université de Leeds) et
Géraldine Morel (université de Neuchâtel), il a circulé au sein d’un réseau de « jeunes
chercheurs » s’étant pour la plupart rencontrés à Cuba, durant des événements scientifiques
ou sur le terrain. Sur une quinzaine de contributions reçues, près de la moitié portait sur la
religion et provenait de chercheurs appartenant à des institutions européennes. Il semblait donc
cohérent de les rassembler dans un numéro à part dont nous avons repris la coordination.
Si le développement que connaissent aujourd’hui les études religieuses cubaines en Europe
s’inscrit dans un renouveau plus général des études afro-américaines (Palmié, 2005 ; Capone,
2007), il se doit aussi à la conjonction de facteurs nationaux propres à Cuba. Ce n’est
effectivement pas un hasard si les recherches ethnographiques sur ce pays, et sur le thème
religieux en particulier, se sont singulièrement développées au cours des dernières années.
Dans cet article introductif, nous reviendrons sur les conditions sociohistoriques spécifiques
qui ont présidé à ce renouveau en les replaçant dans le contexte politique et idéologique cubain.
Afin d’établir des jalons bibliographiques nécessaires au sein d’un domaine d’études devenu
particulièrement dynamique, nous évoquerons aussi certaines tendances de la production
scientifique relative aux religions cubaines en répertoriant et en commentant plusieurs études
conduites récemment. Selon qu’elles proviennent des États-Unis, d’Europe ou de Cuba, ces
dernières témoignent d’orientations diverses dont nous tenterons de dégager les lignes de force
avant d’introduire les principales caractéristiques du champ religieux « afro-cubain » puis de
présenter les thématiques qui émergent des articles réunis dans ce numéro1.
épistémologiques novatrices. Fondés sur des recherches entreprises dans les années 1980 aux
États-Unis — respectivement dans le New-Jersey et à Miami — et poursuivies sur le terrain
cubain à partir des années 1990, ceux-ci s’appuient sur le traitement de matériaux issus d’une
histoire (ou d’histoires) orale(s) locale(s) ainsi que sur le dépouillement d’archives publiques
et/ou privées. Ils consistent en effet en des travaux d’envergure d’orientation pluridisciplinaire
qui traitent des dynamiques de constitution des systèmes rituels « afro-cubains » et de leurs
formes de (re)production dans le temps, et ce dans une vocation comparatiste. À partir de
prémisses constructivistes sensibles à la question de l’innovation et de l’agency dans la
constitution de « traditions », D. H. Brown et S. Palmié ont tous deux particulièrement
développé des concepts tels que ceux d’hybridité et de modernité qu’ils ont contribué à
substituer à ceux, plus essentialistes, de « rétentions africaines » et de « traditions africaines »
qui avaient classiquement défini les religions afro-cubaines et, plus généralement, les religions
afro-américaines. Ils sont de plus exemplaires d’une orientation majeure des études afro-
américanistes contemporaines — domaine que certains englobent aujourd’hui dans celui des
études dites « afro-atlantiques » (Yelvington, 2006 ; Palmié, 2008), expression significative
de l’échelle d’analyse adoptée et de son ancrage historique. Influencés par les propositions
initiales de S. Mintz et R. Price (1992), par le paradigme de l’« Atlantique Noir » du britannique
P. Gilroy (1993) de même que par un courant d’anthropologie historique ou d’ethnohistoire
très représenté aux États-Unis pour ce qui concerne les études yoruba d’Afrique avec lesquelles
D. H. Brown et S. Palmié dialoguent expressément et vice-versa — cf. Apter (1992), Matory
(1994, 2005) —, ces travaux incarnent en réalité le « tournant historiographique » qu’ont
connu les études états-uniennes sur ces questions9. À quelques exceptions près — telles
celle de K. Wirtz (2007), linguiste et anthropologue qui s’est intéressée aux dynamiques
discursives engagées dans la construction interne des « communautés » religieuses à Cuba,
ou de T. R. Ochoa (2010), au départ politiste, qui a examiné certaines implications pratiques
des représentations religieuses dans l’île —, cette préoccupation ethnohistorique domine
effectivement, bien qu’à différents degrés, les recherches conduites aux États-Unis dans ce
domaine (cf., entre autres, Ramos, 2000, 2003 ; Routon, 2005, 2008 ou encore l’ouvrage de
K. Hagedorn, 2001, toutefois très sensible aussi à la question de la performance rituelle10). Cet
élément distingue généralement ces travaux de ceux récemment produits en Europe et à Cuba,
quant à eux plus préoccupés, on va le voir, par l’ethnographie et/ou l’analyse des religions
afro-cubaines dans la synchronie.
6 Notons que si les ancrages théoriques brièvement évoqués rendent en partie compte du souci
de ces études d’inscrire les religions « afro-cubaines » dans la diachronie, un facteur d’une
autre nature doit être considéré. Les autorités des États-Unis imposent en effet des contraintes
particulières aux résidents de leur pays, étudiants et chercheurs compris, qui désirent séjourner
à Cuba, a fortiori pour longtemps comme l’exige le travail de terrain11. Les ethnographes les
plus déterminés peuvent bien sûr contourner ces difficultés — les auteurs mentionnés ci-dessus
en sont des exemples —, mais cette situation constitue aussi indubitablement un obstacle de
taille à la conduite de terrains de longue durée et, par conséquent, au plus grand développement
d’études états-uniennes consacrées aux implications et aux dynamiques contemporaines des
expressions religieuses locales de même qu’à leur dimension de praxis.
7 En cela, c’est donc plutôt du côté européen que l’ethnologie, précisément subordonnée aux
conditions de faisabilité d’enquêtes de longue durée, a commencé à investir le terrain cubain
et le terrain religieux en particulier, du fait notamment des réorientations économiques et
idéologiques opérées dès le début de la Période spéciale et qui ont bénéficié indirectement aux
ressortissants du vieux continent.
de visiter l’île, et même d’y séjourner temporairement, un élément qui a favorisé la venue
d’étudiants européens désireux d’entamer des recherches personnelles12. Une libéralisation
religieuse a de plus été décrétée en 1991 par le IVe congrès du Parti communiste cubain.
Aboutissement d’une tendance amorcée avec le « Processus de rectification des erreurs et
des tendances négatives » annoncé par Fidel Castro en avril 1986 et d’une nouvelle stratégie
d’appui visant en l’occurrence l’Église catholique, cette libéralisation s’est cristallisée, dès
1992, dans un amendement de la Constitution (cf. infra) qui a eu d’évidentes conséquences.
En premier lieu, de façon inédite, de nombreux Cubains ont entrepris de mettre en avant,
individuellement ou collectivement, leur religiosité et, singulièrement, leur appartenance au
monde des religions afro-cubaines (tenues vestimentaires d’initiés, discours de présentation
de soi, gestuelle, etc.). Cette situation a ensuite contribué à « dépolitiser » en quelque sorte
le sujet : puisqu’une affiliation religieuse ne compromettait plus une carrière de militant
socialiste, ni ne remettait en cause un engagement révolutionnaire, les pratiques religieuses
locales ont commencé à acquérir une visibilité sociale grandissante et il est devenu possible de
les étudier sans devoir pour autant toucher directement — ce qui demeure aujourd’hui encore
problématique — à des questions politiques et idéologiques. En somme, c’est très logiquement
que les premiers ethnographes européens se sont intéressés à ces pratiques qui, outre qu’elles
avaient déjà intrigué les fondateurs des études religieuses afro-américaines, semblaient être au
cœur de l’expérience de leurs interlocuteurs.
9 En la matière, le travail précurseur de K. Argyriadis (1999), qui commence par étudier la
danse (sur le conseil des autorités) puis se réoriente, dès que possible, vers le thème religieux,
est éloquent. Fondé sur une enquête ethnographique approfondie menée à La Havane dans
les débuts de la Période spéciale (entre 1990 et 1995 dans le cadre d’un doctorat), son
ouvrage brosse un tableau général détaillé des pratiques religieuses havanaises en insistant
sur la logique thérapeutique, l’unité de fond et la complémentarité qui les gouvernent. Ses
descriptions du climat singulier de l’époque et son analyse des relations entre Révolution et
religion en font aussi une source importante pour des chercheurs francophones travaillant sur
d’autres objets à Cuba. Peu après, un deuxième ouvrage en français sur la question religieuse
à La Havane, également issu d’une thèse, est publié par E. Dianteill (2000). Sociologue
religieux, il conduit ses enquêtes en 1994-1995 et s’intéresse quant à lui à deux thématiques
plus spécifiques : celle du genre, comprise comme l’une des clefs de la diversité religieuse
havanaise ; celle ensuite — dans la veine des propositions de J. Goody sur l’oralité et l’écriture
— des implications de l’écriture dans la constitution et, à un moindre degré, la transmission
de certains savoirs rituels associés aux pratiques religieuses cubaines.
10 Au sein d’une anthropologie européenne « cubaniste » encore balbutiante, la religion s’érige
rapidement comme un domaine d’investigation majeur, renouant en quelque sorte, si ce n’est
en termes d’approches en tout cas en termes d’objet, avec une tradition avortée13. Cela est
particulièrement apparent pour les années 2000 durant lesquelles les perspectives vont se
diversifier et le nombre des travaux universitaires se multiplier. En Suède, J. Wedel terminera
par exemple en 2002 une thèse sur la dimension thérapeutique et médicale des pratiques
rituelles afro-cubaines et publiera rapidement un ouvrage sur la question (Wedel, 2002, 2004).
Au Royaume-Uni, la même année, une thèse sur Ifá sera aussi soutenue par M. Holbraad
(2002) qui vient d’en tirer un ouvrage ambitieux : portant sur l’« ontologie » de la notion
de « vérité » telle qu’elle se décline dans le cadre de la divination par Ifá, celui-ci soulève
des questions épistémologiques qui dépassent de loin un souci uniquement ethnographique ou
régionaliste (Holbraad, 2012). D’autres recherches doctorales, publiées ou non, ont de même
été récemment menées dans diverses institutions européennes (Testa, 2006 ; Rauhut, 2011,
2012 ; Panagiotopoulos, 2011), parmi lesquelles celles de plusieurs auteurs de ce numéro
(Konen, 2006, 2009 ; Espirito Santo, 2009 ; Kerestetzi, 2011 ; Morel, 2012 ; Gobin, 2012).
11 Alors que, aux États-Unis comme à Cuba, la pratique de la santería (ou regla de ocha)
tend à mobiliser l’attention de bien des chercheurs, les auteurs européens semblent quant
à eux élargir le spectre ethnographique. Pour ne citer que les travaux déjà mentionnés,
K. Argyriadis, E. Dianteill et A. Panagiotopoulos prennent en compte plusieurs modalités
religieuses (spiritisme, palo monte, catholicisme populaire, etc.). M. Holbraad, A. Konen
et E. Gobin s’intéressent de façon plus systématisée à Ifá, souvent traité comme le simple
corollaire divinatoire de la santería au détriment de l’analyse de ses logiques internes
et distinctives. D. Espirito Santo et G. Morel s’intéressent quant à elles à des pratiques
uniformément négligées d’un point de vue ethnographique. J. Wedel, S. Testa et K. Kerestetzi,
qui ont respectivement conduit leurs enquêtes dans les provinces de Matanzas, de Ciego de
Avila et de Cienfuegos, sortent du « havano-centrisme » dont pèchent, à peu d’exception
près, les études religieuses sur Cuba (cf. aussi Wirtz, 2007 pour le cas de Santiago de Cuba).
C. Rauhut évoque la santería du point de vue de son processus de « globalisation », thème
de plus en plus couru des études afro-américanistes s’étant développées autour du thème de
la « transnationalisation » religieuse — phénomène lié aux migrations et au tourisme et qui
renvoie, dans ce cas, à l’implantation des pratiques cubaines hors de leur contexte originaire14.
CARTE 1 – Cuba et ses provinces en 2013
Cette carte tient compte du redécoupage administratif de 2011 qui a subdivisé l’ancienne province de La Havane en
trois : La Havane (limitée à la capitale et à ses banlieues proches), Artemisa et Mayabeque
Sandrine Soriano, CNRS–UMR7186, licence CC BY-SA 3.0 (sources : Daniel Dalet/d-maps.com, http://d-maps.com/
carte.php?&num_car=38497&lang=fr ; Rei-artur, CC BY-SA 3.0, Wikimedia commons)
12 Parallèlement au développement de ces études étrangères et pour les mêmes raisons, les
religions afro-cubaines ont aussi bénéficié d’un fort regain d’intérêt à Cuba, au sein et hors de
l’académie. Avant d’aborder ces études ainsi que quelques-unes des thématiques des actuels
travaux européens, introduisons un peu mieux les pratiques auxquelles nous nous référons.
14 Parmi ces manifestations religieuses locales, la plus connue du public « cubanophile » demeure
de loin la santería que l’on désigne aussi parfois du terme etic d’ocha-Ifá (López Valdés, 1985)
pour signaler son interdépendance avec le pôle divinatoire d’Ifá. Communément considérée
comme d’origine yoruba, la santería (ou le complexe d’ocha-Ifá) est particulièrement
valorisée et représentée dans le discours des intellectuels locaux et des universitaires étrangers,
mais se partage le panorama religieux avec d’autres pratiques non moins populaires. Ainsi, le
palo monte, principalement fondé sur des éléments cultuels associés à une aire culturelle et
linguistique bantoue et qui a été bien moins étudié, est également présent dans toute l’île17. En
fonction des configurations régionales, d’autres pratiques viennent aussi composer le paysage
thérapeutico-religieux local. Dans les provinces occidentales de La Havane et de Matanzas,
l’Abakuá, qui trouve un point de départ dans les sociétés secrètes masculines de la région
du Calabar (actuels Nigeria et Cameroun), est ainsi particulièrement visible. Dans la région
de Matanzas, et dans une moindre mesure de Cienfuegos, l’arará dit d’origine dahoméenne
(ewé-fon), rarement étudié, occupe aussi une place importante18. Dans les provinces orientales
du pays, telles Santiago de Cuba et Guantánamo, de même que dans toutes les villes ayant
accueilli depuis le XVIIIe siècle et jusqu’à aujourd’hui une immigration (parfois clandestine)
en provenance de l’île voisine d’Haïti, une modalité du vaudou, localement appelé vodú, est
pratiquée19. À travers l’île, dans certaines localités, et même spécifiquement dans certaines
familles (cf. Basso Ortiz, 2005 et Testa, 2005), on trouve par ailleurs des expressions cultuelles
qui se distinguent des précédentes par leur mode de reproduction fondé sur une transmission
au sein de la famille biologique (les plus répandues reposant au contraire, tout au moins
aujourd’hui, sur un système de parenté rituelle). Celles-ci jouent également à un niveau
extrêmement local un rôle central dans la négociation des identités et des statuts religieux.
Partout, des pratiques diverses, tantôt appelées muertería, tantôt espiritismo et spécifiquement
fondées sur la communication avec les « morts », sont de plus en vigueur. Le spiritisme
cubain, initialement issu d’une tradition occidentale mais qui, tant dans ses formes dites
« populaires » que « scientifiques », intègre aussi des éléments d’origine africaine, est en effet
une composante intrinsèque du champ religieux cubain. Il est étroitement lié, rituellement
et conceptuellement, aux autres manifestations religieuses évoquées20. Toutes ces pratiques
prennent enfin pour toile de fond un catholicisme populaire fondé sur le culte des saints —
figures identifiées à certaines entités de la santería et, parfois, du palo monte — et constituent
des exemples emblématiques des syncrétismes issus de l’histoire coloniale et esclavagiste
américaine. Dans une moindre mesure, certaines intègrent d’ailleurs de lointaines influences
chinoises et jamaïcaines due à des immigrations du XXe siècle ou encore des éléments dits
taïno à travers des figures spirituelles telle celle de l’« Indien » que l’on trouve en particulier
dans le spiritisme.
CARTE2 – Fêtes religieuses afro-cubaines selon l’Atlas ethnographique de Cuba (Centro de
Antropología/CIDCC, 1999b)
Si le projet déjà mentionné de l’Atlas ethnographique de Cuba a négligé l’étude des pratiques religieuses, il les
a indirectement recensées en considérant certaines de leurs cérémonies à caractère collectif (ou « célébrations
traditionnelles »). La carte 2 fusionne deux cartes élaborées par le Dr. Virtudes Feliú, respectivement intitulées « fêtes
religieuses d’origine sub-saharienne » (tableau de gauche) et « fêtes religieuses d’origine haïtienne » (tableau de
droite). Ces dernières ne sont pas exhaustives (le vodú n’y apparaît par exemple pas à La Havane alors qu’il y
est pratiqué) et certaines des entrées adoptées peuvent être discutées (la santería ou le palo y sont par exemple
catégorisés selon leur degré de perméabilité aux autres pratiques afro-cubaines, ce qui ne rend pas compte des
dynamiques internes à l’univers religieux cubain, cf. infra). La carte a néanmoins le mérite de montrer que les pratiques
religieuses (afro‑)cubaines sont présentes sur l’intégralité du territoire national. Elle révèle aussi leur lien à des fêtes
catholiques et le fait que, selon la région ou l’époque envisagée, certaines d’entre elles sont plus significatives que
d’autres
Nous remercions l’ICAN (anciennement Centre d’anthropologie) et l’ICIC Juan Marinello (anciennement CIDCC) pour
nous avoir permis d’utiliser ces cartes
15 Prises ensemble, toutes ces pratiques dessinent donc les contours d’un champ ou continuum
thérapeutico-religieux vaste et dynamique au sein duquel elles peuvent fonctionner de façon
complémentaire pour les adeptes : au niveau des trajectoires thérapeutiques et individuelles,
les parcours poly-initiatiques sont ainsi légion et le recours simultané ou successif à des
spécialistes de différentes traditions est fréquent. Une personne peut par exemple se dire
spirite, palera, santera et, pour les hommes, abakuá (même si des règles canoniques ordonnent
le passage entre l’une ou l’autre affiliation et que l’une de celles-ci finira par primer sur
les autres lorsque la personne assumera des charges rituelles spécifiques). En outre, ces
différentes pratiques se sont historiquement construites simultanément et en interaction
et s’influencent mutuellement : leurs spécialistes, au gré de conceptions et d’innovations
personnelles, s’empruntent et s’échangent des concepts, des symboles, des techniques, des
artefacts ou des éléments esthétiques. Comme l’ont souligné plusieurs auteurs (cf. James
Figarola, 2001 ; Palmié, 2002 ; et surtout Argyriadis, 1999), ces pratiques mobilisent de fait
un univers de représentations homogène. Notamment, elles font appel à une théorie de la
personne relativement unifiée, qui postule que chacun peut simultanément être en relation
avec des entités telles que des « morts spirituels » — entités propres au spiritisme —, avec
un ou des orichas et des ancêtres rituels (eggun) — entités propres à la santería et à Ifá
— ou encore qu’il est possible de sceller des alliances avec des nfumbi/nfumbe — morts
matérialisés propres au palo monte. Leurs techniques « magico-religieuses » reposent aussi
sur une grammaire en partie commune : la plupart d’entre elles sont fondées sur l’initiation
et engagent une logique de la réciprocité et de l’échange constant avec ces entités extra-
humaines diverses, par l’intermédiaire de la divination, de la possession et de différentes
procédures d’oblation matérielles et spirituelles. Bien sûr, elles n’en sont pas pour autant
diluées dans un tout indistinct et, par les dispositifs rituels spécifiques qu’elles mettent en
branle ou les constructions du sujet et des carrières religieuses qui en découlent, chacune
possède ses dynamiques et son organisation propres. Qui plus est, la situation de pluralisme
religieux évoquée dessine, on s’en doute, les contours d’un « marché religieux » au sens
bourdieusien du terme, traversé par d’importantes dynamiques de clientélisme21. Du fait de la
production dans cet univers de formes alternatives de pouvoir (individuel et collectif) et d’une
organisation pluricéphale et segmentaire — les groupes de culte sont souvent organisés autour
de la figure d’un initié ou spécialiste charismatique —, il comprend aussi de fortes dynamiques
concurrentielles. Celles-ci se jouent à la fois entre pairs au sein d’un même complexe rituel
et sacerdotal et entre spécialistes de « traditions » distinctes, qui se livrent constamment à un
puissant travail des « frontières », au sens que F. Barth (1969) accorde à ce terme (cf. aussi
Wirtz, 2007 sur ce point). L’univers religieux (afro‑)cubain est ainsi dynamique et foisonnant,
animé par des tendances à la fois centripètes et centrifuges, caractérisé par une certaine fluidité
en même temps que par des démarcations et des négociations internes incessantes.
16 Ces quelques caractéristiques, communes à d’autres contextes afro-américains tel celui
du Brésil, permettent d’ailleurs d’envisager ces pratiques religieuses de deux façons —
toutes deux représentées dans les articles de ce numéro. Par exemple, si l’on se propose
de restituer des cheminements thérapeutiques et spirituels d’adeptes, leurs biographies
religieuses, d’expliquer les formes de passage d’une pratique à une autre ou, plus encore,
les dynamiques globales qui traversent le champ religieux cubain, les pratiques mentionnées
peuvent être abordées dans leur continuité et leur complémentarité, c’est-à-dire comme un
ensemble relativement monolithique dans lequel elles apparaissent interconnectées. C’est
l’approche adoptée dans ce numéro par D. Espirito Santo et A. S. de Almeida Cunha. Si l’on
entend en revanche décrypter les techniques et l’organisation rituelle de l’une ou l’autre de
ces pratiques, les sentiments et modes d’appartenance par lesquels les acteurs se définissent
22 Malgré les contraintes liées à cet environnement de travail, du point de vue de la production
académique stricto sensu, l’assouplissement des enjeux idéologiques qui avaient autrefois
stimulé l’étude des phénomènes religieux à Cuba a clairement permis à plusieurs chercheurs
de renom de revisiter le champ de ces études et de le renouveler par des contributions et des
ethnographies originales. Puisque la production du savoir scientifique à Cuba reste soumise
à certaines formes de contrôle et de validation mais aussi à une tradition de pensée qui
balise le champ de l’analyse et de la réflexion théorique, le cadre conceptuel de l’analyse
demeure parfois ouvertement marxiste. Cela n’empêche guère que les données et les réflexions
développées soient bien novatrices. Pour prendre quelques exemples éloquents, certains ont
ainsi envisagé les articulations internes existant entre différents ensembles rituels (Argüelles
Mederos et Hodge Limonta, 1991), d’autres se sont intéressés aux représentations des acteurs
eux-mêmes sur leurs pratiques en s’attachant à recueillir leurs discours (Fernández Robaina,
1994). D’autres encore ont abordé les processus d’innovation esthétique qui les traversent
(Menéndez, [1995] 2001, 2002) ou ont étudié des traditions rituelles jusqu’alors négligées
(James Figarola, 2006), convergeant partiellement, par ces biais, avec des dimensions
également abordées par leurs collègues « du Nord » ou d’Europe.
23 Sans qu’il soit donc judicieux d’opposer de façon monolithique les productions cubaines aux
productions étrangères26, les études récentes menées par de « jeunes chercheurs » d’universités
européennes s’orientent quant à elles aussi autour de problématiques spécifiques qu’il nous
reste à évoquer pour présenter le contenu de ce numéro. Disons d’emblée que ces études,
fondées sur des outils conceptuels variés, actualisent, à notre sens, une forme de fécondité
propre au « regard éloigné » et reflètent également des sensibilités représentatives de certaines
approches qui se sont progressivement imposées dans l’anthropologie contemporaine des
religions, y compris sur d’autres terrains. Ces dernières sont encore peu représentées à Cuba
mais les matériaux religieux cubains peuvent justement contribuer, par leurs caractéristiques,
à les enrichir.
En guise d’ouverture…
34 Qu’ils insistent plutôt sur les logiques rituelles ou sur les logiques sociales qui organisent cet
univers de pratique et accordent aux unes ou aux autres une primauté plus ou moins franche,
tous les articles rassemblés dans ce numéro mettent finalement en avant la façon dont, à
l’échelle individuelle et/ou collective, des acteurs se construisent et se négocient constamment,
et dans l’interaction, un rapport à soi singulier ainsi qu’une identité complexe, un statut et
une place spécifiques dans la société cubaine dans laquelle ils évoluent, en marge ou au
cœur des enjeux les plus forts qui la traversent aujourd’hui. Par-delà la diversité relative
des problématiques abordées et des ancrages théoriques mobilisés, leur unité réside de plus,
conformément à l’appel à contribution initial, dans l’adoption d’une perspective résolument
empiriste. Ces textes souscrivent en effet à l’idée que seule une démarche ethnographique
approfondie, soucieuse de restituer les complexités du terrain, constitue la condition d’une
meilleure compréhension des dynamiques à l’œuvre dans les pratiques religieuses cubaines,
quelles que soient les perspectives comparatives qu’elle offre et les réflexions théoriques sur
lesquelles elle ouvre. Chacun de ces articles présente ainsi des données originales et largement
inédites.
35 Avant de laisser la parole aux auteurs, disons peut-être que ce numéro ne prétend pas, loin s’en
faut, fournir un échantillon exhaustif des orientations des études afro-cubaines et moins encore
des pratiques religieuses envisagées : plusieurs modalités cultuelles régionales, dont certaines
demeurent peu ou pas explorées, n’y sont ainsi pas évoquées et, malgré la longueur de la
bibliographie sur le sujet et la multitude des études en cours, le champ empirique et théorique
à explorer reste encore très large du point de vue d’une anthropologie religieuse de Cuba.
Comme le prônent les chercheurs cubains eux-mêmes, des études ethnographiques restent en
particulier à mener dans les provinces cubaines afin de nuancer le tableau havano-centré qui
domine aujourd’hui la présentation de ces pratiques et conduit parfois à négliger l’étude de
pratiques religieuses plus locales et méconnues. Par ailleurs, le lecteur s’en rendra compte en
consultant la bibliographie proposée ci-après, la santería mobilise encore beaucoup l’attention
des chercheurs (cela étant cependant de moins en moins vrai, comme le révèle ce dossier
qui ne déroge en revanche que très peu au « havano-centrisme »). Dans la capitale cubaine
et au delà, des recherches mériteraient en outre d’être menées sur les évolutions les plus
contemporaines relatives à l’émergence de pratiques de type New Age, notamment incarnées
par le reiki, qui connaissent une popularité grandissante parmi les adeptes des pratiques
évoquées31. Les réagencements des parcours religieux à la lumière de l’essor des églises
protestantes et évangéliques de tous bords qui se sont développées depuis les années 1990 sur
le territoire cubain constitueraient encore un autre thème de recherche fécond. Négligées des
recherches aussi bien cubaines qu’étrangères, ces études permettraient d’ailleurs d’approfondir
l’analyse des expériences religieuses individuelles, des dynamiques de pouvoir personnelles
et collectives ou encore des processus de créativité rituelle à l’œuvre ici. À sa façon, cet
ensemble de textes espère néanmoins témoigner de la vivacité et du dynamisme des pratiques
religieuses cubaines telles qu’on les observe aujourd’hui dans l’île ainsi qu’offrir un aperçu de
la diversité des approches qu’elles suscitent actuellement dans les domaines de l’ethnographie
et de l’anthropologie.
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Notes
1 Nous remercions les relecteurs choisis par la revue Ateliers d’anthropologie, qui nous ont incitées à
apporter nombre de précisions absentes d’une version antérieure et plus synthétique de ce texte.
2 Pour des ouvrages de référence, cf., entre nombre d’autres, LEVESQUE, 1976 ; KIRK, 1989 ; MOORE,
1988 ; PÉREZ, [1988] 2006 ; HABEL, 1989. Sur les grandes tendances des études historiques et politiques
cubaines ou Cuban studies telles qu’elles se sont institutionnalisées aux États-Unis, notamment dans
les départements des universités de Pittsburgh et de Miami où des universitaires cubains exilés étaient
présents, cf. notamment BLOCH, 2006.
3 L’expulsion célèbre d’Oscar Lewis et de son équipe, qui avaient été accueillis par les autorités cubaines
afin de recueillir des récits de vie parmi la population, a d’ailleurs en quelque sorte signé la fin de l’accueil
officiel d’ethnographes étrangers à Cuba. Quelques universitaires occidentaux purent certes encore
séjourner dans l’île dans les années 1970, mais ils y furent clairement entravés dans leurs recherches,
comme en a par exemple témoigné C. BATAILLON (2006).
4 L’histoire de ces institutions est trop longue pour être retracée ici mais mentionnons parmi elles
l’Institut d’ethnologie et de folklore, aujourd’hui disparu. Créé en 1960, il a joué un rôle central dans le
développement des études religieuses durant les années 1960 à Cuba. Signalons aussi qu’alors que l’île
ne put guère s’ériger en un terrain anthropologique pour des chercheurs occidentaux, quelques étudiants
soviétiques (le plus souvent russes) furent en revanche invités à collaborer avec les chercheurs cubains.
Plus tard, nombre d’étudiants africains furent aussi accueillis dans l’île, mais peu d’entre eux s’orientèrent
vers les sciences sociales.
5 Ce choix thématique faisait aussi écho à certains programmes de l’Unesco relatifs à la « présence
africaine » dans les Amériques (l’Unesco appuya d’ailleurs financièrement la création de l’Institut
d’ethnologie et de folklore), une situation qui favorisa pendant quelques années encore des échanges
entre intellectuels de toutes nationalités. Pour plus de détails sur les travaux cubains prérévolutionnaires,
cf. DIANTEILL, 1995 et ARGYRIADIS, 2006.
6 S. T. DÍAZ FABELO (1967, 1969, 1970) fut par exemple un auteur très prolixe mais qui demeure
méconnu, la plupart de ses travaux étant restés à l’état de manuscrits mécanographiés non publiés et
circulant avant tout de mains en mains.
7 Cf. par exemple la réédition des textes de R. LÓPEZ VALDÉS (1985) datant pour la majorité des années
1970.
8 Pour les premiers articles dans des revues scientifiques, cf. par exemple SANDOVAL, 1979 ; MARTÍNEZ
et WETLI, 1981, 1983 ; PALMIÉ, 1986 ; KIRBY et SANCHEZ, 1988. Pour les premiers travaux académiques,
cf., entre autres, MURPHY, 1980 ; BRANDON, 1983 ; GREGORY, 1986, qui, tous trois, publieront plus tard
des ouvrages sur ces questions (cf. MURPHY, 1988 ; BRANDON, 1993 ; GREGORY, 1999).
9 Cf. aussi HOLBRAAD (2012 : 9-10) sur ce point, qui insiste très justement sur les déterminants
politiques et éthiques qui ont concouru à ce « tournant historiographique » dans l’anthropologie
africaniste et afro-américaniste. Rappelons peut-être que le concept d’ « Atlantique Noir » de Gilroy —
terme originellement proposé par R. F. THOMPSON, [1968] 1983 — renvoie à un espace conçu comme
relativement homogène de résistance et de recréation constante de nouvelles formes du culturel. Pour
des discussions relativement récentes de cette notion, cf. notamment CHIVALLON, 2008 ; AGUDELO et
al., 2009.
10 Le récent ouvrage publié en Angleterre mais co-dirigé par A. APTER et L. DERBY (2010), tous deux
membres du département d’histoire de UCLA, est aussi très représentatif de ce courant. Il comprend
plusieurs articles consacrés aux pratiques religieuses cubaines (dont un de S. Palmié) qui se voient ainsi
d’emblée replacées dans un monde historique « transatlantique ».
11 Ces contraintes qui, hors de programmes d’échanges spécifiques, visent tous les résidents américains
souhaitant se rendre dans l’île sont fluctuantes mais bien réelles, à la mesure de l’embargo sur l’île dont
l’intensité varie elle aussi selon les époques et qui s’était durci dans les années 1990.
12 S’il n’existe toujours pas de visa de recherche, il est possible pour quiconque, moyennant rémunération
à une institution scientifique ou culturelle cubaine de rattachement, d’obtenir un visa étudiant de longue
durée (un an) et de jouir d’une réelle liberté dans la conduite de ses activités quotidiennes de recherche.
Il est encore plus facile de se rendre dans l’île avec un visa tourisme décerné à tous par les consulats
cubains, ou par des agences de voyage, et facilement renouvelable. Signalons que le recours au tourisme
de masse comme moyen de pallier la crise après 1991 ne fut officiellement entériné que lors du Ve congrès
du Parti communiste cubain (1997).
13 Parmi les travaux produits à l’époque, l’exception de l’ethnographe suédoise M. ROSENDHAL (1997),
dont l’enquête s’est concentrée sur l’étude de la vie quotidienne à Cuba, doit être mentionnée. Signalons
que depuis, l’anthropologie de Cuba a connu un véritable essor et que de nombreuses thématiques,
parmi lesquelles l’économie informelle, le tourisme, la place des femmes, les productions musicales
alternatives (rap et reggaeton) ou encore les micro-mécanismes de l’émergence d’une société civile, se
sont développées. Un colloque organisé à Paris par V. Jolivet, S. Testa et M.‑L. Geoffray à l’occasion des
cinquante ans de la Révolution cubaine a par exemple témoigné de cette diversité de sujets. Pour d’autres
exemples, cf. aussi le dossier 57-58 des Cahiers des Amériques latines (GEOFFRAY et TESTA, 2009) et les
numéros 4 et 5 de la revue ASAonline (2012). Remarquons peut-être qu’alors qu’il existe une tradition
d’études politiques sur Cuba au Canada et qu’un grand nombre de Canadiens visitent l’île depuis les
années 1990, les études ethnologiques sur Cuba n’y ont en revanche pas connu, à notre connaissance,
de développement majeur ces dernières années. Quelques mémoires de master, sensibles à la question
religieuse et incluant de courtes enquêtes à Cuba, ont cependant récemment vu le jour, cf. par exemple
LAMARRE, 2007 ; FARALDO-BOULET, 2009.
14 D’autres travaux universitaires fondés sur des terrains européens ou latino-américains ont aussi abordé
cette dimension (cf. par exemple LÓPEZ CALLEJA, 2005 ; JÚAREZ HUET, 2007). G. MOREL (2011 ; 2012 :
239-294) a également montré que cette question acquiert actuellement une pertinence dans le cadre
de l’Abakuá. En France, une ANR « Religions transnationales » (2007-2010) a donné lieu à plusieurs
publications, dont une plus spécifiquement consacrée aux religions afro-américaines (ARGYRIADIS et
CAPONE, 2011). Dans une moindre mesure, cf. aussi ÁGUILAR et al., 2008.
15 À Cuba, bien que les catégorisations populaires soient plus complexes, trois catégories raciales
officielles, répertoriées sur les documents d’identité, sont en vigueur : Noir, Blanc et Mulâtre (Mulato).
16 Les enjeux nationaux qui ont présidé à l’étude de ces phénomènes ont largement influé sur la
conservation de ce terme dont les chercheurs cubains ont souligné l’intérêt pour la valorisation d’un
apport africain à la culture et l’identité nationales en même temps que le caractère préjudiciable pour
l’idéologie unitariste et l’homogénéité culturelle prônée par la Révolution. Les premiers textes émanant
des plus hautes instances du Parti et traitant de la question religieuse instaurèrent quant à eux l’appellation
générique (et en partie dépréciative) de « cultes syncrétiques » (cultos sincréticos, cf. DEPARTAMENTO
DE ORIENTACIÓN, 1975). On la trouve aussi reprise, bien qu’avec une certaine distance, sous la plume de
certains académiques (cf. par exemple ARGÜELLES MEDEROS et HODGE LIMONTA, 1991).
17 On a coutume de le classifier en trois variantes dominantes (mayombe, kimbisa, brillumba) qui
s’adaptent en réalité assez mal à la plasticité et à l’extrême personnalisation de la pratique quotidienne
(cf. K. Kerestetzi et A. S. de Almeida Cunha dans ce numéro).
18 Le Béninois Brice H. SOGBOSSI (1998), qui a fait ses études universitaires à Cuba, est jusqu’à présent
le seul à s’y être intéressé. On trouve également quelques éléments à ce sujet dans ANDREU (1992) et
dans BROWN (2003b).
19 Sur le vodú, le seul ouvrage disponible est celui, largement prospectif, des auteurs cubains JAMES
FIGAROLA et al. (1992). Un récent mémoire de licence a également été rédigé par l’étudiant cubain A.
PÉREZ MASSOLA (2013). Sur le lien privilégié entre vodú et palo monte, cf. aussi SOGBOSSI (1998) et
A. S. de Almeida Cunha dans ce numéro.
20 Tout comme pour le palo monte, une typologie en diverses « traditions » spirites isolées a été proposée.
Dans ce cas aussi, elle répond plutôt à l’obsession classificatrice des auteurs qu’elle ne décrit une réalité
empirique (cf. D. Espirito Santo dans ce numéro).
21 Exception faite cependant de l’Abakuá qui ne propose aucun service religieux à ses initiés
ou aux profanes, ce qui ne le soustrait guère à des logiques de pouvoir spécifiques (cf. G. Morel
dans ce numéro).
22 L’article 54 (alinéa 1) de la première Constitution révolutionnaire (1976) indiquait ainsi : « L’État
socialiste, qui fonde son activité et éduque son peuple dans la conception matérialiste scientifique de
l’univers, reconnaît et garantit la liberté de conscience, le droit de chacun à professer n’importe quelle
croyance religieuse et à pratiquer, dans le respect de la loi, le culte de sa préférence » (notre traduction).
L’alinéa 3 nuançait toutefois fortement cette affirmation : « Il est illégal et punissable d’opposer la foi
ou la croyance religieuse à la Révolution, à l’éducation ou à l’accomplissement des devoirs de travailler,
de défendre la patrie par les armes, de révérer ses symboles ainsi qu’aux autres devoirs établis par la
Constitution. » Dans l’amendement effectué en 1992 suite au IVe congrès du Parti, c’est justement ce
dernier alinéa qui disparaîtra tandis que le précédent sera reformulé sous la forme suivante : « L’État,
qui reconnaît, respecte et garantit la liberté de conscience et de religion, reconnaît, respecte et garantit la
liberté de chaque citoyen de changer de croyance religieuse ou de n’en avoir aucune, et de professer, dans
le respect de la loi, le culte religieux de sa préférence. » En outre, l’article 42 de cette Constitution révisée
ajoutera aux discriminations proscrites et potentiellement punissables par la loi — c’est là que se joue
une différence majeure (elles se restreignaient jusqu’alors au sexe, à la race et à l’origine géographique)
— celui de la discrimination pour « croyance religieuse ».
23 La question du syncrétisme ou de la « transculturation » (ORTIZ, 1940), importante dans
la conception de ces mises en scène, est d’ailleurs toujours centrale dans les travaux des
auteurs cubains, en tant que métaphore de l’identité cubaine elle-même. Pour des analyses de
ce processus de « patrimonialisation », cf. HAGEDORN, 2001 ; ARGYRIADIS, 2006 ; GOBIN,
2009. Pour des formulations particulièrement explicites de l’idéologie qui y a présidé, cf. par
exemple MARTÍNEZ FURÉ, [1979] 1997 ; GUANCHE, 1983. On trouve aussi des analyses des
relations contemporaines entre religion et politique fondées sur des études de terrain dans
l’ouvrage de la chercheuse britannique C. AYORINDE (2004) et dans celui de A. H. HEARN
(2008), universitaire de Sydney ayant travaillé à La Havane et à Santiago de Cuba.
24 Cf. à ce sujet ESPIRITO SANTO, 2009 ; MOREL, 2010 et les articles de E. Gobin et A. Konen dans ce
numéro.
25 Bien des universitaires cubains sont d’ailleurs eux-mêmes des pratiquants, que cela soit lié ou pas à
leurs investigations. C’est aussi le cas d’un nombre croissant de chercheurs étrangers.
26 Rappelons que les jeunes chercheurs provenant d’Europe sont souvent affiliés ou accueillis pour la
durée de leur enquête à Cuba par des institutions nationales parmi lesquelles celles mentionnées ci-dessus
et que les interactions formelles et informelles entre chercheurs de toutes nationalités sont fréquentes sur
le terrain, ce qui contribue également à ce que les pistes de réflexion des uns et des autres puissent être
des sources d’inspiration réciproque.
27 Pour une théorisation majeure et déjà classique de l’approche « relationnelle », cf. HOUSEMAN et
SEVERI (1994). Pour celle de l’anthropologie et de la phénoménologie du « soi », cf. CSORDAS, 1994. Pour
le développement revendiqué d’une approche « phénoménologique » liée à une lecture « perspectiviste »
et « ontologique » dans l’univers des religions cubaines, cf. aussi l’ouvrage déjà cité de M. HOLBRAAD
(2012). Pour le développement de monographies sur les religions cubaines également sensibles à certains
de ces courants, cf. aussi, entre autres, PANAGIOTOPOULOS, 2011 ; GOBIN, 2012.
28 S’il est superflu de renvoyer aux ouvrages classiques de P. Bourdieu et de E. Goffman, mentionnons
peut-être, pour des théorisations relatives à la question de la performance, les travaux — certes déjà un
peu anciens mais influents — de V. TURNER et R. SCHECHNER (1986), de J. BUTLER (1990) et la synthèse
de R. SCHECHNER (2002). Notons aussi, comme on peut s’y attendre, que la thématique du pouvoir est
l’une des problématiques les plus difficiles d’abord pour les chercheurs cubains en raison notamment
des enjeux de légitimation locaux brièvement pointés. Signalons qu’un ouvrage collectif directement
consacré à ces questions dans l’univers religieux cubain, codirigé par A. S. de Ameida Cunha, D. Espirito
Santo et A. Panagiotopoulos, est actuellement en cours de préparation (cf. CUNHA et. al., à paraître).
29 Pour des travaux généraux prônant une telle approche dans le domaine de l’anthropologie religieuse,
cf. par exemple T. CSORDAS ([1997] 2012) ou le recueil plus récent édité par E. HALLAM et T. INGOLD
(2007). Le travail classique mais véritablement fondateur en la matière de F. BARTH (1987) doit aussi
être mentionné.
30 Le travail de BROWN (2003b) articule en réalité expressément les notions de pouvoir, d’innovation et
d’agency dans son analyse du développement historique de la santería.
31 Cette thématique est aussi présente, de façon transversale, dans plusieurs des articles de ce numéro (cf.
D. Espirito Santo, E. Gobin ou A. S. de Almeida Cunha). Pour l’instant, seuls un rapport d’investigation
d’une équipe du CIPS cubain (JÍMENEZ et al., 2005) et un mémoire de master rédigé par l’un des membres
de cette équipe sensible à la question du rituel et de ses symboles (BLANCO PÉREZ, 2007) y ont été
consacrés. Pour un article de sociologie abordant quelques pratiques New Age comme le résultat d’une
« transnationalisation religieuse », cf. KARNOOUH, 2011.
Référence électronique
Droits d’auteur
Tous droits réservés
Résumés
Le développement que connaissent aujourd’hui les études sur Cuba, en particulier
l’ethnographie des pratiques religieuses dites « d’origine africaine », n’est pas le fruit du
hasard. Cet article introductif revient sur les conditions sociohistoriques spécifiques qui ont
présidé à ce renouveau en les replaçant dans le contexte politique et idéologique cubain. Afin
d’établir quelques repères bibliographiques dans un domaine d’études devenu particulièrement
dynamique, il évoque aussi certaines tendances de la production scientifique relative aux
religions cubaines en répertoriant et en commentant plusieurs études conduites récemment.
Selon qu’elles proviennent des États-Unis, d’Europe ou de Cuba, ces dernières témoignent
de sensibilités diverses qui sont brièvement pointées avant de présenter les principales
caractéristiques du champ religieux « afro-cubain » puis d’évoquer les thématiques qui
émergent de ce numéro, également représentatives de certaines orientations de l’anthropologie
religieuse contemporaine.