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japonaise

Pearl Harbor

Les coulisses Un drôle


Kaman “K-Max”

de la préparation d’haltérophile
entre en scène
Max Guedj
Héros de

les angles
Une beauté
“Staggerwing”
la France libre

vue sous tous


Des idées
de cadeaux
Marché de Noël

pour les fêtes


L 19853 - 625 S - F: 7,80 € - RD
N° 625 Décembre 2021

7,80 € mensuel DOM/S : 8.80 € - BEL/LUX : 8.50 € - CH : 13.30 FS – CAN : 13.40 $cad – ESP/ITA/GR/PORT CONT/ANDORRE : 8.80 € - N CAL/S : 1190 xpf et A/ 2090 xpf – POL/A : 2290 xpf – MAR : 88 DH – Ile Maurice : 8.90 €
SOMMAIRE N° 625/DÉCEMBRE 2021
Ce héros méconnu
I
l fallait rendre hommage à Max Guedj, ce héros
si méconnu des Forces aériennes françaises
libres. Disparu en opération avant la fin de la
guerre, les vétérans parlaient de lui bien des années
après avec un immense respect. Il suffit de relire
ce qu’écrivit Clostermann sur Guedj pour mesu-
rer l’admiration qu’il lui portait. On disait de lui
que c’était un infatigable guerrier guidé par une
volonté de fer. Le tout dans une discrétion totale.
Ses compagnons du ciel étaient toujours étonnés
par le contraste entre le pilote implacable dans le
Max Guedj à l’attaque ciel et le grand silencieux une fois revenu d’opéra-
F G AMILLE UEDJ

du Prince Eugen le 17 mai 1942. tion sur “Beaufighter” et “Mosquito”. Si le terme


Composition de Daniel Bechennec. de héros est souvent galvaudé, il nous paraît tout à fait à propos avec Max Guedj.
Laissez-moi vous conter son destin tragique…
Je vous souhaite une bonne lecture et d’excellentes fêtes de fin d’année.
Le Fana

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9, allée Jean-Prouvé. 92587 CLICHY CEDEX
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PRÉSIDENTE DU DIRECTOIRE
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Le pilote de chasse
4 Actualités
Frédéric de Watrigant
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ET RESPONSABLE DE LA RÉDACTION :
60 Pierre Grandbesançon - 1934-1942
Patrick Casasnovas
La Luftwaffe passe
10 Courrier
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Papier issu de forêts Ce héros méconnu Une saga à découvrir !
gérées durablement.
Origine du papier :
Italie. Taux de fibres
de la France libre Quatrième épisode.
recyclées : 0 %.
Certification : PEFC/ 1940. Max Guedj refuse la défaite Découverte de la base et début
EU ECO LABEL. des alertes aériennes.
Eutrophisation : et l’ignominie de la collaboration
0,018 kg/tonne. en partant pour Londres.
Ce fut sur “Beaufighter” qu’il Ce jour-là… 23 décembre 1991
commença à s’illustrer dans
78 Premier vol du Kaman “K-Max”
de dangereuses missions. Petit mais costaud Rejoignez
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DIFFUSION : MLP Marché de Noël Râblé, musclé, voici un des
Printed in France/Imprimé en France 32 haltérophiles pratiquant le vol vertical.
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L’attaque de Pearl Harbor
Correspondance : Fana de l’Aviation,
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Le Fana de l’Aviation est une publication préparation des pilotes Au sommaire
des ÉDITIONS LARIVIERE ; S.A.S. au capital de
3 200 000 € ; dépôt légal, 4e trimestre 2021. Voici comment les pilotes japonais du prochain numéro
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ACTUALITES

L’EC 2/5 Île-de-France célèbre ses 80 ans

ANTHONY PECCHI
Le “Mirage”
Le 14 octobre dernier, la base aérienne 115 d’Orange Une grande tombola organisée par l’escadron a permis d’offrir un vol 2000C
a accueilli une journée de commémorations et en L39, un vol de voltige, des montres, etc., mais surtout 1 500 euros “GUSTO 80”
de célébrations pour les 80 ans de vie opérationnelle à Carri’air, une association qui favorise l’accès à l’aéronautique veille sur son
de l’escadron de chasse 2/5 Île-de-France. Un anniversaire fêté auprès des jeunes de la région. grand ancêtre,
en grand style ! Une cérémonie militaire fut présidée par le général Cette célébration avait néanmoins un petit goût de chant du cygne le “Spitfire”.
de corps aérien Frédéric Parisot, major général de l’armée de l’Air pour le 2/5. En effet, il tirera sa révérence sur “Mirage” 2000 lors du
et de l’Espace. Puis place fut laissé au spectacle. prochain défilé du 14 juillet puis sera mis en sommeil. Ses pilotes
Au sol, reconstitueurs et expositions ont permis d’illustrer l’histoire et XAVIER MÉAL

l’engagement, depuis 1941, des aviateurs de l’escadron de chasse


2/5, né Squadron 340 au sein de la Royal Air Force (lire Le Fana de
l’Aviation n° 623). À l’heure actuelle, l’EC 2/5 dispose de 12 “Mirage”
2000C et sept “Mirage” 2000B ; il participe à la mission de “police
du ciel” sur le territoire national, mais a aussi été amené à être
déployé sur des théâtres d’opérations extérieures.
Les invités ont vu apprécier un plateau statique composé d’une
cinquantaine de machines, dont des Mirage “2000”, des “Rafale”,
“Alpha Jet” de la Patrouille de France, un Canadair CL-415, des F-16
danois, belges et néerlandais, l’OV-10 “Bronco” de Montélimar, les
MD.312 “Flamant”, le T-6 de Corbas, et le “Spitfire” de Christophe
Jacquard. Un vol photo spécial a été organisé pour rassembler
l’avion qui fut aux origines du 2/5 et un “Mirage” 2000C.
Dans le ciel, ce fut un festival dans une tempête de ciel bleu, animé
par l’équipe de voltige de l’armée de l’Air, le Rafale Solo Display,
le F-16 Solo Display ou encore la Patrouille de France.
Mais le clou du spectacle fut le duo Gusto Tactical Display du 2/5,
dont un des avions est le “Mirage” 2000C dont le nom de code est
“GUSTO 80”, recouvert d’une livrée absolument somptueuse marquant
les 80 ans du 2/5. Le design en a été pensé en étroite collaboration
entre l’EC 2/5 Île-de-France et Régis “Rage” Rocca, designer graphiste
connu pour avoir réalisé les livrées des Rafale Solo Display, du PC21
et de plus de 30 autres pour l’armée de l’Air et de l’Espace depuis 11
ans. Une pointure dans le milieu du design aéronautique.
4
En bref
avec style Le dernier vétéran du régiment
Normandie-Niémen s’est éteint
Valentin Ogourtsov, dernier vétéran du régiment Normandie-
Niémen de la Deuxième Guerre mondiale, s’est éteint
le mercredi 27 octobre, à Iaroslavl (250 km au nord-est de
Moscou), à l’âge de 95 ans. Il était le dernier survivant russe
du légendaire régiment de chasse ; il fut le mécanicien des
pilotes Yves Mourier (1912-1948) et Georges Henry (1920-
1945). Avec son décès s’est tournée la dernière page vivante
de la célèbre escadrille dont la mémoire restera à jamais
gravée dans les esprits. Côté français, le dernier représentant
de cette unité militaire emblématique était André Peyronie,
décédé en décembre 2019.

MAXIME GARCIA / SPOTAIR


Le dessous de
“GUSTO 80” MINISTÈRE DES ARMÉES

évoque sans
ambiguïté Avez-vous des documents relatifs
l’origine de au Dewoitine 338 ?
l’escadron.
Airbus Heritage, le département d’Airbus chargé de la
protection du patrimoine de l’entreprise, a décidé d’apporter
Unes des son soutien au projet de rénovation d’un Dewoitine D.338.
précieuses pièces En effet, comme exposé dans le Fana de l’Aviation n° 582 de
du musée de la mai 2018, l’association Aérothèque, basée à Toulouse, avec
base d’Orange laquelle Airbus collabore depuis de nombreuses années, a
qui étaient retrouvé une grande partie du fuselage (photo) de ce très bel
exposées
appareil lancé en 1935, exploité notamment entre Paris, Saigon
pour l’occasion.
XAVIER MÉAL et Hong Kong, et qui a été une des machines emblématiques
du passé de l’entreprise et de la société Air France.
seront alors transformés sur “Rafale” pour former un escadron
En parallèle de la rénovation par l’association de ce tronçon
sur la BA 115 à l’automne 2024. Les sept “Mirage” 2000B
de fuselage, Airbus Heritage envisage avec l’Aérothèque de
rejoindront la base aérienne 133 de Nancy. L’avenir des 12 “Mirage”
mettre en place et de coordonner, avec d’autres acteurs dans
2000C est plus incertain. Stockage longue durée ou vente à une
le domaine aéronautique, un projet de reconstruction des
entreprise de services de sécurité et de défense, c’est-à-dire
parties encore manquantes de la structure de cet aéronef.
fournissant des services de type “Aggressor” et d’entraînement
La problématique est la suivante : si trouver le financement
militaire, cela reste encore à déterminer.
nécessaire à ce projet est réalisable, il n’existe plus de jeu de
Une Alpine A110 plans complets du D.338, ni dans les archives du constructeur
“Ravage 80” a ni dans celles des différents opérateurs de cet appareil.
été préparée par Appel est donc lancé à nos lecteurs pour retrouver plans,
la société Ravage photos, informations techniques et éventuellement pièces
Automobile dont de cet avion. Contacter Jean Pierre Salsenach (association
le propriétaire Aérothèque) : Tél. : +33 (0)6 87 76 54 44 ou courriel :
est un grand jeanpierre.salsenach@sfr.fr
passionné Vous pouvez suivre l’avancement du projet sur le site :
d’aviation. https://www.aerotheque.com/?s=D338.

AÉROTHÈQUE

5
ACTUALITES

ET 3/62 Ventoux, 50 ans au sommet !

PIERRE-ETIENNE LANGENFELD
Le Casa 235-
Le Casa 235-200 n° 111, codé mois de janvier suivant ses deux premiers chefs Herman et Abdou pour veiller sur le 200 n° 111,
64-II, arbore désormais une CN235-300 dits de nouvelle génération, qui chargement en soute. “C’est une mission codé 64-II,
livrée célébrant les 50 ans de disposent d’une avionique revue et corrigée, très prisée, a reconnu le cdt Clément. du Ventoux
l’escadron de transport 3/62 Ventoux. avec intégration d’écran LCD et d’une On vit des moments magiques, que ce dans sa livrée
Il est sorti de l’atelier de peinture début nouvelle motorisation, ce qui accroît ses soit avec les enfants mais aussi avec les spéciale 50 ans,
septembre, fruit d’un projet imaginé en performances et lui permet d’évoluer à une bénévoles de l’association, avec qui nous capturé ici dans
2020 mais réalisé seulement cette année altitude de croisière plus élevée, en plus de partageons des valeurs communes.” Pour les environs de
du fait des confinements imposés par lui donner plus d’autonomie et une capacité cette mission Rêves de gosse, un agent Toulouse début
la Covid-19. Ce projet de décoration a d’emport de charges utiles plus importantes d’escale, le sgt Nicolas, et une infirmière novembre.
été coordonné par le capitaine Pauline, (jusqu’à 6 t au lieu de 5). En juillet 2016, les convoyeuse de l’air, l’adj. Victoria, étaient
le design ayant été conçu par le fameux Casa des ET 1/62 Vercors et 3/62 Ventoux venus renforcer l’équipage. Le premier
Régis “Rage” Rocca et la mise en peinture ont quitté la base aérienne 110 de Creil pour a assuré la gestion des passagers et du
réalisée par l’adjudant Christophe. la base aérienne 105 d’Évreux. fret, tandis que la convoyeuse, infirmière
L’ET 3/62 Ventoux tire ses origines de Du 23 au 27 septembre dernier, l’ET 3/62 spécialisée, a apporté une expertise sur
l’escadrille de transport 3/62 créée à Ventoux a participé à l’opération Rêves de les enfants “extraordinaires”. C’était
Reims le 30 juillet 1970 pour assurer gosse avec son Casa décoré pour les 50 ans sa seconde participation : “Je suis plus
l’expérimentation des innovants Breguet de l’escadron, qui a assuré le déploiement habituée aux missions à l’étranger, a-t-elle
941S alors tout juste acquis par l’armée de logistique de la caravane d’avions de ville expliqué, pour rapatrier des blessés de
l’Air. Elle ne reçut cependant officiellement en ville et contribué à la mission principale guerre par exemple. Mais dès les premiers
le nom de Ventoux qu’en février 1973. de cette opération : donner du rêve aux baptêmes, j’ai versé quelques larmes
Trop coûteux à entretenir, les Breguet enfants cabossés par la vie ou la maladie. tellement les enfants sont émouvants quand
941S furent retirés du service en avril Outre le commandant Clément, l’équipage ils découvrent le vol.” L’adj. Victoria gère
1974, et l’escadrille de transport 3/62 du Ventoux comptait deux copilotes, les surtout l’aspect médical avec le médecin de
dissoute par la même occasion. Ses capitaines Claire et Maxime, ainsi que Rêves de gosse, et conseille le commandant
traditions et son insigne furent repris le deux mécaniciens navigants, les sergents- de bord sur l’embarquement des enfants.
1er septembre 1999 par l’escadron de ESCADRON DE TRANSPORT 3/62 VENTOUX

transport et d’entraînement 42, alors créé Des enfants


à Mont-de-Marsan sur Nord 262 et DHC-6 “extraordinaires”
“Twin Otter”. Si le Casa CN235 est en ont pu faire un
baptême de l’air
service au sein de l’armée de l’Air et de
dans le Casa
l’Espace depuis 1991, l’ETE 42 ne reçut ses
Spécial 50 ans
premiers exemplaires que le 27 novembre
du Ventoux lors
2002 avant d’être rebaptisée escadron de
du tour Rêves
transport 3/62 Ventoux. En 2011, le Ventoux de gosse qui a
fut transféré de la base de Mont-de-Marsan fait étape dans
à celle de Creil, où il reçut au tout début du huit villes du
6 24 septembre
au 2 octobre.
En bref
Patrick Gandil nouveau président
de l’Aéro-Club de France

OMAKA JOHN SMITH MOSQUITO PROJECT

AÉCF

Le “Mosquito” de John Smith Patrick Gandil, ancien directeur général de l’Aviation civile, et
récemment nommé conseiller d’État en service extraordinaire,
a repris vie à Omaka succède à Catherine Maunoury à la présidence de l’Aéro-
Club de France. Lors de ses deux mandats, Catherine
Lundi 8 novembre, à Omaka en Nouvelle-Zélande, l’équipe À Omaka, Maunoury, première femme à accéder au poste de président
du Omaka John Smith Mosquito Project a démarré pour la le 8 novembre de l’AéCF, a engagé et encouragé plusieurs actions pour la
première fois les deux moteurs “Merlin” du De Havilland “Mosquito” dernier, l’équipe conservation du patrimoine ainsi que des projets tournés vers
FB Mk VI matricule TE910 (NZ2336 avec la Royal New Zealand Air du John Smith l’avenir de l’aéronautique, avec l’enthousiasme des jeunes et
Force) du défunt John Smith. Un moment plein d’émotion pour la Mosquito l’engagement des commissions concernées. Patrick Gandil
petite équipe, qui vient couronner une restauration menée tambour Project a a exprimé son souhait de continuer dans cette voie tout en y
battant depuis que la famille de John Smith a confié quelques-uns démarré pour apportant son expertise et sa vision.
des trésors amassés par le regretté collectionneur néo-zélandais à la première
l’Omaka Aviation Center, en juillet 2020 (lire Le Fana de l’Aviation fois les deux Caravelle et Boeing 727 FedEx
n° 616 “Le hangar aux merveilles de M. Smith”). Lors de son tout moteurs de retour sur le tarmac du musée
du “Mosquito”
dernier vol, en 1952, le bimoteur était piloté par Johnny Checketts ;
NZ2336 de l’Air et de l’Espace
le fils de ce dernier a pris place dans le cockpit le 8 novembre
dernier pour “lui redonner vie”. restauré. Le 26 octobre a vu le retour sur le tarmac du musée de
l’Air et de l’Espace du Bourget de la Sud Aviation SE-210
Caravelle F-GCVL et du Boeing 727-22F FedEx immatriculé
N166FE. Ils étaient jusqu’alors conservés sur le site des
Le P51-C Red Tail de la CAF ateliers d’entretien et de restauration, à Dugny. La Caravelle
a longtemps été exploitée par la défunte compagnie aérienne
de nouveau accidenté Air Provence. Offert au musée en 2007 par l’entreprise
américaine de transport international de fret, le 727-22F
Le North American P-51C “Mustang” matricule 42-103645, immatriculé N166FE et baptisé Bud (ci-dessous) fut le
immatriculé N61429, de la Commemorative Air Force a été premier don de Boeing 727 en Europe, après avoir servi
endommagé à l’atterrissage le 4 novembre dernier : il a été victime FedEx pendant 18 ans. Tout comme la Caravelle au mois de
d’un cheval de bois à l’atterrissage qui l’a fait sortir de piste sur septembre dernier, le Boeing 727 FedEx a bénéficié début
l’aéroport de Tallahassee, en Floride aux États-Unis. Le chasseur novembre d’une campagne de nettoyage.
était à Tallahassee dans le cadre de l’exposition itinérante The Rise
Above qui offre “une opportunité unique aux jeunes et à ceux qui
sont restés jeunes dans leur cœur d’être inspirés par l’histoire des
Tuskegee Airmen [groupe d’aviateurs afro-américains formé sur la
base de Moton Field à Tuskegee (Alabama) qui de distingua durant la
Deuxième Guerre mondiale] par une immersion dans une expérience
théâtrale.” Le chasseur, familièrement désigné Red Tail (queue rouge)
a déjà souffert de deux accidents depuis sa restauration achevée
en 2001 : celui qui avait coûté la vie à Don Hinz lors d’un spectacle
aérien à Red Wing (Minnesota), le 29 mai 2004, et un atterrissage
train rentré le 3 février 2016 à Dallas (Bill Shepard, le pilote, n’avait
pas été blessé) après une reconstruction complète achevée en 2009 FRANÇOIS HERBET

par Tri-State Aviation et Odegaard Aviation – réparé par AirCorps À noter dans vos agendas 2022
Aviation, il avait volé depuis sans incident.
DR Le Temps des hélices, le spectacle aérien annuel
Le fameux P-51C de l’Amicale Jean-Baptiste Salis aura lieu les 4 et 5 juin
Red Tail de la sur le plateau de Cerny, à La Ferté-Alais (Essonne).
Commemorative Le 21e Flyin Saint-Yan (Saône-et-Loire) et son meeting
Air Force est aérien auront lieu le week-end de la fête des pères 2022,
sorti de piste les 17, 18 et 19 juin.
à Tallahassee Le 19 juin, vous pourrez passer par le Rassemblement des
le 4 novembre “Traîne-Queue” de Paray-le-Monial, tout près de Saint-Yan.
dernier.

7
ACTUALITES

Grand concours photos de l’Amicale Jean


les spectateurs du meeting ont du talent !
À l’occasion de la 48e édition du
spectacle aérien Le Temps des
hélices les 28 et 29 août derniers,
l’Amicale Jean-Baptiste Salis a organisé un
concours photos amical, ouvert à tous. Dans
chacune des trois catégories – Ambiance,
Dynamique, Statique –, les photos ont été
notées par un jury composé de membres
de l’AJBS et de partenaires, selon des
critères d’esthétisme, d’originalité et de
qualité. Les auteurs des trois photos ayant
reçu le plus grand nombre de votes dans
chaque catégorie ont reçu des lots divers
(un an d’abonnement au Fana de l’Aviation,
une BD dédicacée par Romain Hugault, un
exemplaire du livre de Rémy Michelin. Les
gens d’air, un bracelet AeroDesign, etc.). Les
sujets devaient être le plus naturels possible
sans utilisation de post-traitements excessifs
(abus de contraste, rectification de la
colorimétrie, vieillissement). Les traitements
du type HDR (high dynamic range, plage
dynamique étendue) étaient acceptés,
JEAN-BAPTISTE BLUMENFELD
mais uniquement à petite dose. Ci-dessus,
Les gagnants sont : le 1er prix
Dynamique,
Catégorie Ambiance avec le Beech
1- Riou Grazellia (17 points) “Baron” de
2- Bochet Jules (16 points) Mika Brageot.
2- Guillermou Claire (15 points)
Ci-contre, le
Catégorie Dynamique 1er prix Statique
1- Blumenfeld Jean-Baptiste (23 points) avec le Ju 52
2- Plassin Bruno (18 points) de l’AJBS.
3- Laporte Emmanuel (17 points)
Ci-dessous
Catégorie Statique à gauche le
1- Laheyne François (28 points) 3e prix en
2- Ryckeboer Antoine (27 points) Dynamique,
3- Pedersen Anne (9 points) et ci-dessous
le 1er prix
Bravo à toutes et tous ! Ambiance.
FRANCOIS LAHEYNE
EMMANUEL LAPORTE GRAZIELLA RIOU

8
En bref
-Baptiste Salis : Ils nous ont quittés…
Cette fin d’année est bien triste… Le collectionneur et pilote
Jean-Philippe Chivot (ci-dessous) est décédé le 18 octobre
à l’âge de 80 ans. Il fut l’un des piliers de La Ferté-Alais,

DR

participant comme pilote aux côtés de Jean Salis à de


nombreux tournages de longs-métrages ou séries télévisées,
étant de l’équipe qui ramena Yak-11 et Yak-18 du désert
égyptien, entre autres. Il fut propriétaire à 75 % du B-17G
futur Pink Lady, avec Jean Salis, auquel il échangea ses
BRUNO PLASSIN
parts en 1990 contre un T-6G et un Beech 17 “Staggerwing”
De haut en qu’il basa à Abbeville, avec un “Sicile Record” et un Stampe.
bas : 2e prix
Dynamique, Claude Terrazzoni (ci-dessous), grand nom de l’industrie
2e prix aéronautique à Toulouse, est décédé le 27 octobre à l’âge
Ambiance ; de 86 ans. Diplômé de l’X et de Sup Aéro, il avait débuté à
2e prix Statique ; la Direction générale de l’armement, et été breveté pilote
3e prix d’essai en 1967. Il avait rejoint Aérospatiale en 1984 et été
Ambiance nommé en 1995 directeur adjoint du groupe et directeur de
(à gauche) la branche aéronautique. De 1998 à 2002, il fut le conseiller
et 3e prix de Noël Forgeard, alors président d’Airbus Industrie. Pilote
Statique avec à son actif plus de 6 500 heures de vol, ce natif de
JULES BOUCHET (à droite).

DR

Perpignan a aussi présidé la chambre de commerce et


d’industrie de Toulouse, et fut un ardent promoteur du projet
qui allait donner naissance à Aéroscopia en apportant tout
son soutien à l’association Terre d’Envol qui, entre 2000 et
2015, œuvra sans relâche pour que le musée voit le jour.
ANTOINE RYCKBOER
CLAIRE GUILLERMOU ANNE PEDERSEN
Germain Chambost est décédé dans la nuit du 28 au
29 octobre, à l’âge de 86 ans. Pilote militaire pendant la
guerre d’Algérie (269 missions sur B-26), il devint à partir
de 1968 journaliste, débutant comme reporter de guerre
pour le quotidien Sud-Ouest, mais aussi instructeur en
aéro-club. Il publia son premier livre en 1972, un essai
intitulé De Mermoz à l’ordinateur, qui lui valut le prix Louis
Castex de l’Académie française. On lui doit à ce jour plus
d’une vingtaine d’ouvrages parmi lesquels Les Chevaliers
de l’Apocalypse (sur les pilotes nucléaires, Jean Picollec,
1980) et La Grande Aventure de l’Airbus A380 (Éditions Sud-
Ouest, 2005). Membre de l’Académie nationale de l’air et de
l’espace, il a collaboré aux magazines Info-pilote et Science
et Vie. Plus récemment, l’Aéro-Club de France lui avait
décerné son prix Alphonse Malfanti pour son livre Algérie
d’amour et de guerre (éditions JPO).

9
LE COURRIER
Un Breguet 14 et des questions
Fidèle lecteur du Fana jointes. Je n’ai malheureusement En m’adressant aux lecteurs j’aimerais
de l’Aviation depuis que peu de données contextuelles Qui est ce votre avis ou des pistes de réflexion
mes lointaines années historiques à rattacher à ces images. pilote blessé du qui orienteront mes recherches. Que
collèges, je m’intéresse depuis plus J’ai essayé en vain d’obtenir des Breguet 14 A2 racontent ces photos ? Sur l’une d’elles
particulièrement aux événements informations auprès d’anciens pilotes de l’escadrille apparaît un pilote blessé, un bandage
BR 213 dont
liés à l’histoire locale de l’aviation et passionnés locaux. Ça ne donne sur le front cachant en partie son
l’insigne
en Haute-Savoie. Un membre rien mais je poursuis mon travail visage. Est-ce un “héros” de la Grande
(un goéland)
de ma famille était photographe d’investigation, notamment sur Guerre ? Quel pourrait être l’intérêt
est visible sur
professionnel. En fouillant dans ses le parcours militaire et/ou de reporter historique de ces images ?
la photo
archives, j’ai retrouvé les photos de l’auteur de ces photos. de droite ?
Denis Viollet

DR/COLL. DENIS VIOLLET DR/COLL. DENIS VIOLLET

La malle mystérieuse de Mister Guillem


La réponse du mois dernier Le Fana de l’Aviation n° 195 de février 1986, ce qui ne nous rajeunit pas
La malle mystérieuse de Jacques Guillem a provoqué son lot de en effet. Jacques Verriere de son côté raconte l’histoire pas banale de cet
retours, toujours aussi nombreux. Citons Olivier Sugot : “J’ouvre avion-cargo avec le fuselage et une partie des ailes qui étaient en acier
page 10 mon Fana de novembre reçu ce matin, et ne voila-t-il pas que je inoxydable. Le “Conestoga” mériterait un nouvel article.
tombe sur un Budd RB-1/C-93 “Conestoga”, aussi luisant que ses frères
en arrière-plan. Merci à la construction en inox. En son temps, Le Fana Le défi du mois
de l’Aviation lui avait consacré un article. Mais “en son temps”, cela En attendant, l’ami Jacques Guillem vous met au défi avec cette chose.
fait longtemps, très longtemps… !” Le “Conestoga” fut présenté dans C’est quoi son blaze et tout le toutim comme dirait Audiard…

Cette chose doit bien


avoir un nom…

DR/COLL. J. GUILLEM

10
David Méchin s’est
Pan sur le bec !
penché sur vos photos. Il s’agit l’Aviation de Prague-Kbely
d’un Breguet 14 A2 de l’escadrille (République tchèque).
BR 213 qui avait un goéland Ni original, ni réplique,
en dernier insigne. ni même un modèle.
Difficile ensuite d’apporter des La photo du Yak-3 qui
précisions sur les circonstances figure sous la lettre du
de la scène. Est-ce qu’un lecteur lecteur provient du musée
aurait des informations et de l’Air de Belgrade
précisions ? (Serbie). Le bâtiment
possède une structure
distinctive que l’on peut
voir derrière l’avion. Le
Yak-3 photographié ici porte
également l’insigne de la
force aérienne yougoslave.
Pour autant que je sache,
c’est un avion original.
JACQUES GUILLEM
Le Yak-3 Jan Jandera, Prague
Je considère votre magazine original du
comme l’un des meilleurs sur musée de l’Air Il faut croire que
l’aviation. Je regrette d’autant plus de Belgrade. la fréquentation du bar de
que dans le n° 624 de novembre, en l’Escadrille nous a fait oublier les
page 11, vous avez commis plusieurs insignes de l’ex-Yougoslavie du
erreurs dans votre réponse au lecteur Yak-3 qui est exposé à Belgrade,
Philippe Garzino. M. Garzino a tort : et non à Prague-Kbely, comme
il n’y a pas de Yak-3 au musée de nous l’avons écrit.

“Super Sabre” français en Angleterre au 2/11 Vosges. Entre-temps,


bon nombre de F-100 ont été convoyés
vers l’EC 4/11 Jura à Djibouti,
À propos des “Super Sabre” être restitués aux États-Unis à la fin nouvellement créé début 1973.
français que vous évoquez dans de leur vie opérationnelle – tout comme Les États-Unis avaient demandé que
Le Fana n° 611 d’octobre 2020 : fin une centaine de “Mystère” IVA. les appareils soient rendus sur une
1975, les F-100 “Super Sabre” qui Sur la base de Toul-Rosières, de leur base en Grande-Bretagne, en
équipaient l’armée de l’Air depuis 1958 l’escadron de chasse 3/11 Corse reçoit l’occurrence Sculthorpe, où il existe un
commencent à être retirés du service ses premiers “Jaguar” fin 1975, et détachement du Logistics Command
et sont remplacés par le “Jaguar”. Une l’escadron de chasse 1/11 Roussillon chargé de réceptionner les aéronefs.
partie d’entre eux (une quarantaine) ont se prépare à les accueillir, une partie Là, les avions seraient stockés en
été fournis au titre du plan Marshall et, des F-100 restants étant stockée à attente de décisions ultérieures (dons
comme le prévoit ce plan, ils doivent Châteaudun et une autre partie laissée à des musées, pièces détachées,
destruction…). L’EC 2/11 [où Daniel
Carrasco est pilote, NDLR], qui est le
seul à continuer à voler sur F-100, est
Le F-100D chargé d’organiser leur convoyage vers
piloté par Sculthorpe. Régulièrement, l’escadron
Daniel Carrasco de convoyage n° 70 de Châteaudun
vient atterrir à nous amène à Toul-Rozières des
Sculthorpe le avions stockés chez eux afin que nous
25 novembre les emmenions en Grande Bretagne.
1975. Pourquoi ne le font-ils pas eux-mêmes
DANIEL CARRASCO
directement alors que c’est normalement
leur mission ? Encore aujourd’hui nous
ne le savons pas…
Ainsi, la première mission est
programmée le 25 novembre 1975
avec trois F-100 à laquelle j’ai participé.
Une fois arrivé, les mécanos américains
se sont immédiatement rués sur mon
avion pour vérifier les canons, seul
armement en place. Ils ont vérifié ensuite
l’IFF [Identification Friend or Foe, ami ou
Les deux autres ennemi, NDLR] et les fréquences radio
“Super Sabre” restitués Au total ce furent 25 “Super Sabre” qui
le même jour. furent restitués.
Daniel Carrasco
DANIEL CARRASCO

11
À LIRE, À VOIR
Légendaire chasseur britannique de du CEA, le second est De tous les livres entre jolies espionnes,
l’époque. Excellente lecture directeur de l’Irsem, consacrés à la culture grands sentiments, devoir
en perspective. l’Institut de recherche de populaire de l’atome, patriotique et sommets
l’École militaire à Paris. celui-ci est le plus riche, enneigés, les deux officiers
Spitfire À cette fin, ils ont réuni et par son sommaire français auront fort à faire.
Par Christophe Gibelin 35 auteurs sur un thème exhaustif, il se pose loin Ils ne sont pas venus en
et Jean-Pierre Pécau inédit en France : la culture devant ses homologues Suisse pour les vacances.
Chez Delcourt populaire de l’atome. américains. Du bel Tous les clichés sont là. On
72 pages, 16,95 € En filigrane, l’expression ouvrage : 170 illustrations s’amusera beaucoup des
ISBN 978-2-413-02259-6 culturelle des stratégies et texte de haute tenue. mises en scène aériennes
de défense et son effet De quoi enrichir par le biais faisant jouer une aviation
Culture sur notre opinion et
notre vision du monde
culturel le rayon nucléaire
de votre bibliothèque.
d’époque (“Alouette”,
“Hunter”, Saab “Tunnan”,
nucléaire et de l’atome. François
Gezelnikoff, alors patron
Philippe Wodka-Gallien F-84). Saluons la sortie de
ce bel album qui revisite
Christophe Gibelin de la direction des Imaginaires l’héritage Urderzo et
(dessins) et Jean-Pierre applications militaires au nucléaires. Charlier, les créateurs de
Pécau (scénario) abordent CEA, s’est intéressé aux Représentations de Tanguy et Laverdure.
l’histoire du mythique armes nucléaires de la l’arme nucléaire dans P. W.-G.
“Spitfire” à travers la franchise James Bond. On l’art et la culture.
bande dessinée. Nous voilà retrouvera la génération Par Céline Jurgensen
plongés dans l’Angleterre montante de l’analyse et Jean-Baptiste
de la fin des années 1930, stratégique française. Jeangène-Vilmer
avec l’ingénieur Reginald Citons Emmanuelle Chez Odile Jacob
Mitchell qui se lance dans Maître, Thyphaine de 375 pages, 35 €
l’étude d’un chasseur Champchesnel et Olivier ISBN 978-2-7381-5504-7
autour du non moins Zajec. Ce livre est une
mythique moteur V12 Rolls-
Royce “Merlin”. Arrive le
ambiance. Le jour, on
apprenait par Lucien Tanguy et
prototype, puis la mise au
point, et enfin les combats
Des B-52 de Docteur
Folamour à Buck Danny,
Poirier, Hervé Coutau-
Bégarie et dans Le Fana
Laverdure
de la bataille d’Angleterre. le nucléaire s’est imposé le volet aviation de son Nous voici dans la
Le tout est mené tambour dans la culture populaire. histoire, le soir venu, 99 Suisse des années 1960.
battant dans un style très Ce livre est le fruit d’un Luftballons, Supernature, Aux commandes des
plaisant. Les “spitophiles” projet éditorial voulu Enola Gay et Atomic “Mirage” III, Tanguy et Le pilote qui
seront ravis, et ceux qui par deux universitaires enflammaient les pistes Laverdure, les pilotes de en savait trop
ne connaissent pas encore habités par le sujet, Céline de danse des galas des chasses les plus célèbres Par Patrice Buendia,
cet appareil légendaire Jurgensen et Jean-Baptiste grandes écoles, civiles de l’armée de l’Air. Il se Hubert Cunin et Mathieu
auront une bonne idée Jeangène-Vilmer. La comme militaires. Voilà trouve qu’à Zurich, DSGE, Durand
des circonstances dans première est directrice de comment notre génération MI6, KGB et organisations Chez Dargaud-Zéphyr
lesquelles il s’affirma la stratégie à la direction a vécu la guerre froide à criminelles se livrent une 48 pages, 14,95 €
comme le meilleur des applications militaires l’ombre des euromissiles. guerre de l’ombre. Navigant ISBN 978-2-205-08299-9
USAF

Puzzle avions
Amis céphaloclastophiles (amateur occasion de se pencher sur les plus
de casse-têtes) et autres chercheurs petits détails d’un avion. Nous avons
de passe-temps activant les méninges, retenu ici deux boîtes parmi celles
1001hobbies propose des puzzles qui sont proposées. Pour commencer
illustrant des scènes de l’histoire de attaquez-vous aux 500 pièces du
l’aviation. Fokker D VII, “Spitfire”, P-51D Caroline. Ambitieux ? Les 1 000
“Hellcat” et autres gloires du ciel pièces du B-17 Connecticut Yankee en
attendent votre œil affûté et vos doigts formation avec les célèbres Memphis
d’expert. Piotr Forkasiewicz illustre Belle et Delta Rebel 2 vous attendent.
chaque scène découpée en 500 ou Incontestablement voici des idées de
1 000 pièces. C’est une excellente cadeaux qui devraient plaire aux fanas.

P-51 “Caroline”
500 pièces
47 x 33 cm, 20 €
Des B-17 lors de la mission
B-17 “Connecticut Yankee” de la 8th Air Force sur Stuttgart
1 000 pièces
le 6 septembre 1943, à laquelle
12 70 x 50 cm, 25 €
À commander sur 1001hobbies.fr participa Connecticut Yankee.
BIOGRAPHIE
Max Guedj (1913-1945) plaide dans la capitale, est au mois
de novembre 1930 décoré de la croix

Ce héros méconnu
de chevalier de la Légion d’honneur
sur proposition du ministre du tra-
vail. C’est au cours de cette même
année 1930 que Max obtient son bac-

de la France libre
calauréat et, suivant le chemin tracé
par son père, entame aussitôt des
études de droit à la faculté de Paris,
parallèlement avec des études en
lettres. Parlant parfaitement l’an-
glais, l’arabe et l’espagnol, il met à
Première Partie. profit ses années d’études en effec-
tuant plusieurs voyages et, en 1933,
Brillant avocat, Max Guedj est passe quelques jours à Berlin au
terme d’un voyage en train depuis
mobilisé en Afrique du Nord quand Paris. Il en tire un récit, Instantanés
la Deuxième Guerre mondiale éclate de Berlin, dans lequel il décrit de ma-
nière très réaliste la réelle emprise
en septembre 1939, puis il s’engage dans de la propagande des nazis qui
viennent de prendre le pouvoir sur
les FAFL en septembre 1940. Très vite il l’ensemble de la population, laquelle
s’illustre aux commandes de “Beaufighter”. semble embrigadée et toute prête à
se lancer dans une nouvelle guerre.
Par David Méchin Son texte, à valeur prophétique, est
publié dans la revue littéraire Les
Œuvres libres du mois d’août 1933,
et rend parfaitement compte des pé-
Félix et Gilberte rils qui s’annoncent.
Guedj, Il va prolonger ses études et réa-
ses parents, liser plusieurs articles en tant que
une famille
journaliste, jusqu’à ce qu’il soit rat-
de notables
trapé par ses obligations militaires.
nord-africaine.
Il part alors dans un régiment de
Metz-Frescaty en tant que simple
soldat le 15 octobre 1934 et y reste
une année durant laquelle naît une

V
Max Guedj
devant la porte
de Brandebourg
à Berlin en 1933,
alors que les
nazis viennent
FAMILLE GUEDJ
de prendre le
pouvoir. Il revint
aurice, Jean, Max, à Casablanca, au Maroc, pour re-

M
de son séjour
Guedj voit le jour le prendre son métier d’avocat, et de- très impressionné
8 juin 1913 dans le vient un important notable en accé- de l’emprise de
port tunisien de dant à la fonction de bâtonnier de la propagande
Sousse, unique en- l’ordre puis en fondant une école de ces derniers
fant de Gilberte Sultan et de Félix professionnelle pour les indigents, sur la population
Guedj. Il s’agit d’une famille juive de militant dans les associations de qu’il jugeait FAMILLE GUEDJ
notables puisque M. Félix Guedj, né bienfaisance. À ce titre, il est décoré toute prête à
en 1885, qui a fréquenté le lycée de par le sultan du Maroc de l’ordre du marcher au pas
Tunis et a fait des études de droit à Ouissam Alaouite le 1er janvier 1929. et à faire
Paris, exerce la profession d’avocat Durant toutes ces années, son jeune la guerre.
tandis que son propre père, Moïse fils, qui prend le prénom d’usage de
Guedj, exerce la profession de phar- Max, grandit à Casablanca et fré-
macien à Sousse. Sans doute pour quente le lycée de la ville. Jeune étudiant
obtenir la citoyenneté française, qui de 19 ans
n’est pas octroyée aux juifs de Un texte qui rend s’intéressant
Tunisie – le décret Crémieux de 1870
ne s’appliquant qu’aux juifs d’Algé-
compte des périls à venir au journalisme,
Max (au centre)
rie –, Félix Guedj, militant à la ligue Quand il atteint l’âge de 16 ans sa est photographié
des droits de l’homme, s’engage dans famille s’installe à Paris et emmé- au mois d’août
l’armée en 1914 et combat sur le front nage dans un appartement du bou- 1932 lors d’un
pendant trois années. Il y est proba- levard Haussmann. Alors que Max voyage aux
blement blessé car démobilisé en poursuit sa scolarité au prestigieux États-Unis,
1917. Il s’installe alors avec sa famille lycée Janson de Sailly, son père, qui à Philadelphie.
FAMILLE GUEDJ

16
Le wing commander
Max Guedj, alias Maurice,
Compagnon de la Libération
par décret du 20 novembre
1944 signé par le général
De Gaulle. Il disparut le
15 janvier 1945 au terme
d’une carrière glorieuse.

FAMILLE GUEDJ
MAX GUEDJ, HÉROS MÉCONNU DE LA FRANCE LIBRE

passion pour les avions qu’il ne fait


que côtoyer, étant de par son rang de
simple exécutant cantonné à des
tâches du service général de la base.
Le père Raymond Godard, futur au-
mônier des Forces aériennes fran-
çaises Libres, y débute son service
militaire et croise le jeune Max
Guedj : “Chose curieuse, il y avait à
Metz-Frescaty quand je faisais mon
service militaire, un petit bâtiment
appelé le service des archives. Il y
avait dans ce bâtiment quatre
hommes, un adjudant, un sergent-
chef et deux appelés. L’un de ces ap- Max Guedj
pelés était un de mes amis, qui était (à droite) lors
organiste […] Il y avait avec lui d’un voyage en
Guedj. Il m’étonnait à ce moment-là, Turquie en 1938.
FAMILLE GUEDJ
car il était très pacifiste, et très anti-
militariste. Il était dans une véritable
planque, c’était en temps de paix. Ils
étaient toujours en permission, il suf-
fisait que l’un soit là. Son père était
avocat à Casablanca, il était israélite,
nous avions des conversations très
intéressantes, mais il était antimilita-
riste.” Fait illustrant le témoignage
de Raymond Godard, Max Guedj
termine son service militaire le
12 octobre 1935 sans le moindre ga-
lon malgré son niveau d’études. Max Guedj dans
son automobile.
Un jeune avocat FAMILLE GUEDJ

jeune et éloquent défenseur sollicite prises se rend aux États-Unis – la


particulièrement brillant l’acquittement de son client Elloy” page mondaine du Petit Marocain
Il retourne à Casablanca après qui ne s’en sort pas trop mal en étant le mentionne plusieurs fois sur la
son année de service, où son père a condamné à un an de prison avec liste des passagers arrivant ou quit-
repris ses plaidoiries et a notamment sursis et une amende. Le 15 no- tant le port de Casablanca sur les
défendu au mois de février 1934 le vembre 1938, Me Max Guedj obtient paquebots qui y font escale.
Pacha de Marrakech dans une af- également l’acquittement d’un Toujours dans les pages mondaines
faire de diffamation contre un jour- Marocain nommé Rahal Ben du quotidien local on trouve son
nal parisien, en compagnie du plus Mohammed accusé de vol et nom dans les articles relatant l’acti-
célèbre avocat de l’époque Pendant condamné en première instance à 20 vité de l’aéro-club du Maroc : il
Me Vincent Moro-Giafferri, avocat son service années de prison. prend des cours de pilotage aux
de Landru et témoin du mariage de militaire, Max Disposant de revenus confor- mois de mai et juin 1936, volant sur
Guedj (flèche),
Charles Nungesser. Max Guedj, tables, Max Guedj poursuit ses les petits avions de tourisme
pose avec
après avoir achevé sa thèse en droit voyages à travers le monde et visite Caudron C.286 “Super phalène”,
des camarades
et obtenu deux diplômes d’études su- la Russie, la Turquie, et à deux re- “Aiglon”, “Luciole” ainsi que
de régiment.
périeures en économie politique et
en civilisation américaine, entame
alors son activité professionnelle
d’avocat fi n 1936 aux côtés de son
père. Le jeune avocat est de toute
évidence particulièrement brillant si
l’on en croit le chroniqueur judiciaire
du quotidien Le Petit Marocain qui
y retranscrit plusieurs de ses plaidoi-
ries. Ainsi, le 6 juillet 1937 il plaide
la cause de Pierre Elloy, un comp-
table indélicat de la Société des
Carburants accusé de détournement
de carburants : “Me Max Guedj dé-
fend l’accusé. D’une voix solide, bien
timbrée, le jeune défenseur va pré-
senter une belle et éloquente plaidoi-
rie en faveur d’Elloy.” Le quotidien
décrit la plaidoirie et conclut que
“dans une belle péroraison très goû-
tée par un auditoire nombreux, le
FAMILLE GUEDJ

18
“ (…) susciter un
courant favorable aux
démocraties. “Aide-toi.
l’Amérique t’aidera” ”
Farman 202 et 402 sur un desquels
il obtient son brevet de pilote.
À l’aube de la Deuxième Guerre
mondiale, Max Guedj est un jeune
homme très cultivé de 26 ans, qui a
beaucoup voyagé, et qui entame une
liaison avec une jeune fille prénom-
mée Marie. Le 21 juin 1939 à l’uni-
versité populaire de Casablanca, il
donne une conférence intitulée
“Aide-toi, l’Amérique t’aidera” dans
laquelle il n’a aucun doute sur la me-
nace que représente l’Allemagne et
disserte sur la question “Que feront Max lors de son
les États-Unis dans le cas d’un service militaire
conflit européen ?” Il y fait part de comme simple
l’état d’esprit du peuple américain soldat à la base
tel qu’il a pu le ressentir au cours de aérienne 138
ses deux derniers voyages : les de Metz en 1934-
Américains haïssent les totalita- 1935, avec ses
rismes mais ne sont pas disposés à compagnons
intervenir militairement dans un de chambrée.
FAMILLE GUEDJ
conflit. Il entretient toutefois l’espoir
de son auditoire en décrivant les ini- les moyens de corriger cette opi- laisser séduire. Et Me Guedj, très
tiatives du président Roosevelt passé nion, de retourner cet état d’esprit, applaudi, termine par cette formule
d’un farouche isolationnisme à une de susciter un courant favorable que nous livrons à la médiation des
franche coopération avec les démo- aux démocraties. Ses suggestions Français : Aide-toi, l’Amérique t’ai-
craties européennes, tenant à bous- Max Guedj les voici. Le peuple américain est dera certainement.”
culer son opinion publique. Un jour- (flèche) en naïf et facilement malléable. Des
naliste qui relate la conférence, se 1939-1940, exemples précis l’ont montré. La Affecté au 21e régiment
demande alors dans son article s’il mobilisé au presse a donc une infl uence pro-
faut accepter cette fatalité et écrit : 21e régiment fonde sur l’opinion. Servons-nous
de zouaves à Meknès
“Me Guedj, dont l’énergie n’a pas de zouaves de cette presse, activons notre pro- Quand la guerre éclate au mois
été atteinte par le fatalisme maro- au Maroc, où pagande, créons au besoin un mi- de septembre 1939, Me Max Guedj,
cain, ne le croit pas. Au cours de son il sert comme nistère pour montrer quel est le vrai avocat réputé, se voit proposer un
séjour il n’a pas fait que constater chef de pièce visage de la France, et acquérir poste administratif au sein des
de DCA avec
un état d’esprit regrettable ; pour l’amitié et la tendresse d’un peuple forces armées locales, qu’il décline
le grade
notre cause il a essayé de découvrir charmant qui ne cherche qu’à se pour aller dans une unité combat-
V

FAMILLE GUEDJ
de sergent.
MAX GUEDJ, HÉROS MÉCONNU DE LA FRANCE LIBRE

tante. Il se retrouve alors affecté au très bien quelle sera ta décision. J’en avec la législation antisémite de
21e régiment de zouaves à Meknès, suis fier. Non seulement je ne ferai Vichy, mais dont l’application au
où il va gagner les galons de caporal rien pour contrecarrer cette déci- Maroc sera bien moindre qu’en mé-
en février 1940, puis de sergent en sion, mais je ferai tout ce qui est en tropole. Sans doute a-t-il vu à cette
juin, et se retrouver chef de poste mon pouvoir pour t’aider à re- période la tournure qu’allait
d’une pièce de DCA. Si ce n’est une joindre une unité combattante en prendre le régime de Vichy avec le
crise de paludisme, la drôle de Angleterre ou ailleurs. Je pense que discret décret signé du maréchal
guerre va s’écouler pour Max sans tu es à même d’apprécier ce que ton Pétain et publié le 30 août 1940 au
le moindre incident. Le Maroc est départ représentera pour nous. Tu Journal officiel, abrogeant les dis-
hors de portée de l’aviation alle- seras démobilisé dans quelques positions interdisant la propagande
mande tout comme F G AMILLE UEDJ FAMILLE GUEDJ antisémite…
de l’aviation ita- Toujours
T est-il que
lienne, cette dernière Max
M Guedj fait un
n’ef fect ua nt que choix.
c Prétextant une
Max Guedj et
quelques raids sur la plaidoirie
p à Tanger,
sa compagne Tunisie et l’Algérie alors
a ville internatio-
Marie. Ils eurent au mois de juin 1940. nale
n au Maroc espa-
ensemble une L a nouvelle de gnol,
g il obtient un
fille Claudine l’armistice consterne visa
v pour s’y rendre
reconnue par les autorités locales et
e de là part pour
son père avant et le général Noguès, l’Angleterre.
l Il gagne
son départ pour le résident général, L
Lisbonne par une
Londres. envisage même de l
ligne régulière, puis
poursuivre la lutte l port de Bristol où
le
mais se range fi nale- i rejoint Londres et
il
ment sous les ordres s
signe son engage-
du gouvernement de m dans les Forces
ment
Vichy. Le sergent a
aériennes françaises
Max Guedj qui, comme tous les mi- jours. Tu pourras alors, l’esprit libres le 26 septembre 1940.
litaires du pays, n’a pas tiré le libre, agir comme tu l’entendras. Si
moindre coup de feu contre l’en- je me suis trompé sur tes intentions, À l’école de pilotage
nemi, est sans doute frustré de nous ne reparlerons plus jamais de
n’avoir pu combattre. Plusieurs mi- ceci.” Max est effectivement démo-
de la RAF
litaires s’évadent pour rejoindre bilisé le 14 août 1940 et retourne On note qu’il inscrit de sa main
l’Angleterre, et ce malgré les évè- chez lui. Sa compagne Marie a du- “néant” à la ligne “religion” sur la
nements de Mers-El-Kébir au dé- rant sa mobilisation en 1940 donné feuille de recrutement à Westminster
but du mois de juillet 1940 qui naissance à une petite fille nommée House et sur laquelle il rapporte tous
Max Guedj douchent bien des vocations (1). Claudine qu’il a reconnue. Une vie ses antécédents militaires. Après un
reprend son De Casablanca, Me Félix Guedj confortable d’avocat fortuné l’at- bon mois à Londres, il est dirigé vers
instruction écrit une lettre à son fi ls : “Un géné- tend, qui se serait certes compliquée les écoles de pilotage de la Royal Air
à zéro ral français, le général de Gaulle, Force où, comme toutes les recrues,
en arrivant
lance tous les soirs, de Londres, des (1) Le 3 juillet 1940, la Royal Navy il doit malgré son brevet de pilotage
en Angleterre.
appels à volontaires pour continuer attaqua la flotte française amarrée dans reprendre son instruction de zéro. Il
Ici une la rade de Mers el-Kébir, près d’Oran,
la lutte. Je tenais à être le premier à est d’abord affecté le 3 novembre
des écoles pour ne pas qu’elle tombe aux mains
de formation
t’en faire part. Bien que je ne t’aie des Allemands. Le bilan fut lourd avec 1940 à l’école d’Odiham, à l’ouest de
des cadets.
pas vu depuis de longs mois, je sais près de 1 300 morts. Londres, dirigée par le cne Rancourt
RAF MUSEUM - 5864-11LG

20
IMPERIAL WAR MUSEUM CH 2376
Fin février
où les volontaires français et belges Après cette formation élémen- 1941, Max du Nord, pour y être instruit sur son
reçoivent leur instruction militaire taire au pilotage, il passe le 26 avril Guedj intègre avion d’armes, le bimoteur Bristol
de base. Grâce à sa parfaite connais- 1941 à la Secondary Flying Training l’Elementary “Beaufighter”, étant nommé au
sance de la langue anglaise, il voit sa School n° 11 de Shawbury, entre Flying Training grade de sous-lieutenant (pilot offi-
formation quelque peu s’accélérer ; Birmingham et Liverpool, non loin School n° 6 cer, selon le grade équivalent de la
il est dirigé le 26 février 1941 à l’Ele- de la frontière du pays de Galles, où de Sywell, RAF) le 20 août 1941.
mentary Flying Training School n° 6 il va obtenir son brevet de pilote mi- où il vole sur C’est à Catfoss qu’il fait connais-
de Sywell, en plein centre de l’Angle- litaire en volant sur bimoteur “Tiger Moth”. sance du navigateur britannique qui
terre, pour suivre des cours de pilo- Airspeed “Oxford”. Avec plusieurs sera son équipier pour les missions
tage sur les petits biplans “Tiger de ses compatriotes, il se porte vo- Malgré son de guerre à venir, le fl ight sergent
Moth”. Deux Français libres y offi- lontaire auprès du gén. Valin, chef brevet de pilote Charles Corder, un employé de la
cient, le lt Pinot, vétéran de 1914- des Forces aériennes françaises civil, Max Guedj Lloyds Bank mobilisé et de quatre
1918 et pilote instructeur, ainsi que libres, pour intégrer le Coastal reçoit toute ans son cadet, qui n’a pas pu être sé-
le père Godard qui, comme Pinot, Command plutôt que de rejoindre l’instruction lectionné dans les écoles de pilotage
s’est évadé de France en juin 1940 une unité de chasse sur “Spitfire” ou pour être en raison de sa vue. Les deux
sur le bateau de pêche Le Trébouliste “Hurricane”. On ne connaît pas pilote, avec hommes, qui après s’être entraînés
et est devenu l’aumônier des FAFL ; vraiment les raisons qui l’ont poussé les passages ensemble sur Airspeed “Oxford” et
il recroise le jeune appelé du contin- à faire ce choix… Toujours est-il que sur simulateur Avro “Anson”, effectuent leur pre-
(à gauche)
gent qu’il avait croisé à Metz le 18 août 1941, il part à l’Operatio- mier vol sur “Beaufighter” qui a bien
et leçon de
quelques années plus tôt et le trouve nal Training Unit (OTU) 5 à Catfoss, failli être le dernier : au décollage, le
navigation
aussi motivé que réservé. près de la ville d’Hull, face à la mer siège de pilote de Max Guedj n’est V
IWM CH 2378
(ci-dessous). IWM CH 2390

21
MAX GUEDJ, HÉROS MÉCONNU DE LA FRANCE LIBRE

pas verrouillé, et il se retrouve al-


longé sur le dossier du siège penché
à l’horizontale, le tout pendant que
le “Beaufighter” continue de grim-
per ! De sa place d’observateur à l’ar-
rière, Charles Corder saisit le dossier
et le remet en place, permettant à
Max Guedj de reprendre les com-
mandes de l’avion qui était sur le
point de partir en vrille…

Changer de nom
pour protéger sa famille
Pendant que se termine sa for-
mation de pilote, de mauvaises nou-
velles lui arrivent du Maroc. Son
père a milité pour la cause alliée et
a attiré l’oreille des autorités de
Vichy qui l’ont arrêté. Félix Guedj
est condamné le 20 septembre 1941
par le tribunal militaire de
Casablanca à cinq ans de prison, Un “Beaufighter”
10 000 francs d’amende et 15 années du Squadron 248 survolant
d’interdiction d’exercer la profession l’Atlantique.
d’avocat, pour “acte de nature à
DR/COLL. CHRIS GOSS
nuire à la défense nationale et pro-
pos de nature à exercer une influence
fâcheuse sur l’esprit des popula- Ce fl air gigantesque
“et la confiance en
grand, mince et plutôt beau garçon,
mais d’une façon discrète. Il était plu-
tions”. Il est aussitôt incarcéré à la tôt calme et n’appartenait pas à
prison de Kénitra, près de Rabat, l’équipe du Squadron quelque peu at-
malgré sa santé fragile qui ne ces- tirée par les pubs et les parties. Mais
sera de se dégrader du fait des condi-
tions de détention.
lui-même qu’il devait il ne négligeait jamais de participer à
tout évènement d’ordre opérationnel
Max entame alors des démarches
pour changer de nom et ne pas causer montrer plus tard ” ou de caractère social. Au point de
vue opérationnel, mon impression est
de difficultés supplémentaires à sa fa- qu’il était en train de chercher sa voie
mille : après approbation formelle le des Ju 88, chasseurs à long rayon d’ac- et n’avait pas encore développé ce flair
30 mars 1942 par le gén. Valin, chef tion. Pour ce faire ils sont armés de gigantesque et la confiance en lui-
des FAFL, il sera désormais le quatre canons de 20 mm logés dans même qu’il devait montrer plus tard”.
plt off. Maurice. Il est entre-temps af- le nez de l’appareil qui lui donnent
fecté le 19 février 1942 à sa première une puissance de feu considérable. Le Prinz Eugen
unité opérationnelle, le Squa- L e plt off. Max Guedj et le endommagé
dron 248, sur “Beaufighter” Mk VIC. flt sgt Charles Corder effectuent leur lors de l’attaque
aérienne
Il rejoint l’escadron après une année première sortie opérationnelle le
du 17 mai 1942 à
et demie de formation en étant ac- 1er avril 1942 à bord du “Beaufighter”
laquelle participa
compagné par un autre pilote fran- T3326 pour une mission d’escorte
Max Guedj.
çais libre qui a suivi le même cursus d’un avion d’attaque, en compagnie
que lui, le sous-lieutenant Gérard d’un autre “Beaufighter”. Durant
Weil, évadé d’Afrique du Nord le tout l’après-midi midi, au terme d’un
29 juin 1940 vers Gibraltar, à bord vol de 5 h 45 min, ils fouillent la mer
d’un Caudron “Simoun”. du Nord sans trouver le navire alle-
mand signalé. Les pilotes du
Premières missions Squadron 248 n’ont généralement
pas d’appareil personnel et volent sur
au Squadron 248 des “Beaufighter” différents à
Le Squadron 248 stationne alors chaque mission : c’est le cas de Guedj
à Dyce, au nord de l’Écosse, face à la et Corder qui réalisent cinq autres
Mer du Nord et à la Norvège distante missions durant le mois d’avril 1942,
de près de 400 km, d’où ses Bristol rencontrant pour la première fois la
“Beaufighter” qui servent de chas- chasse ennemie au cours de la der-
seurs à long rayon d’action réalisent nière d’entre elle (une reconnais-
sous une météo qui est rarement clé- sance spéciale), le 29 du mois, sous
mente de longues patrouilles en mer la forme de cinq Messerschmitt 109
pour intercepter les avions allemands qu’ils esquivent et qui n’insistent pas.
attaquant les convois (Fw 200 Max Guedj est alors décrit par
“Condor”) et escorter les bombar- son chef d’unité, le squadron leader
diers anti-U-Boot du Coastal et acting wing commander James
Command qui sont sous la menace M. N. Pike, comme un homme “assez
DR

22
Le Prinz Eugen des cuirassés Scharnhorst et
réfugié dans Gneisenau qui font un passage en
le Lofjord, pour force à travers la Manche. Si l’opé-
réparations, ration réussit non sans mal grâce à
après avoir la protection de la Luftwaffe qui dé-
été torpillé par joue les attaques aériennes de la
un sous-marin Royal Air Force, un sous-marin bri-
britannique le tannique torpille le Prinz Eugen le
23 février 1942. 21 février 1942 alors qu’il approche
Au premier du but, le fjord norvégien de
plan se trouve Trondheim. Très endommagé dans
le croiseur sa partie arrière, il parvient cepen-
Admiral Scheer. dant à gagner Trondheim et y rece-
DR
voir des réparations de fortune. Le
16 mai 1942, le Prinz Eugen, escorté
de plusieurs destroyers, quitte son
refuge norvégien pour tenter de ral-
lier le port de Kiel et y être réparé
dans les chantiers navals allemands.

Branle-bas de combat
au Squadron 248
Autre vue Le convoi naval est repéré par les
du Prinz Eugen Britanniques qui montent dans l’ur-
en réparations. gence une opération aérienne pour
DR
l’attaquer dans la nuit du 16 au 17.
La mission d’attaque contre le pour y perturber la navigation des Celle-ci ne rencontre pas sa cible,
croiseur lourd Prinz Eugen, qui sur- c o nvo i s a l l i é s (o p é r a t i o n mais une seconde attaque bien plus
vient le 17 mai 1942, va être l’occa- Rheinübung), mission qui l’a mené importante est montée en fin de jour-
sion pour Max Guedj de démontrer aux confins de l’Islande. Au terme née le 17 mai 1942, rassemblant un
tout ce qu’il a dans le ventre. Ce croi- d’une rude bataille avec les navires total de 27 Bristol “Beaufort” torpil-
seur est un des rares bâtiments de et les avions de la Royal Navy, le leurs des Squadrons 42 (Leuchars,
surface d’importance dont a disposé Bismarck est coulé le 26 mai 1941 Écosse) et 86 (Sumburgh, îles
la Kriegsmarine durant la guerre. tandis que le Prinz Eugen parvient Shetland), des Handley Page
Parti de son port d’attache de à rallier le port de Brest le 1er juin. “Hampden” et 19 Bristol “Blenheim”
Gotenhafen – aujourd’hui, Gdansk S’y trouvant menacé par les pour mener un raid de diversion,
en Pologne –, il a accompagné le constantes attaques de la Royal Air ainsi qu’une escorte de chasse de
croiseur de bataille Bismarck dans Force, il évacue ce port le 11 février “Beaufighter” des Squadrons 226 et
une sortie dans l’Atlantique nord 1942 pour la Norvège en compagnie 248 . C’est donc une force totalisant

23
MAX GUEDJ, HÉROS MÉCONNU DE LA FRANCE LIBRE

52 appareils qui est mobilisée. C’est quai celui le plus près du Prinz Eugen cependant un Messerschmitt 109 qui
le branle-bas de combat au (nous n’avions pas encore de VHF sur tente de les abattre mais dont ils par-
Squadron 248 où le wg cdr Pike est les “Beaufighter”). J’avais déjà beau- viennent à esquiver les attaques.
prévenu à la hâte par sa hiérarchie, coup d’expérience d’attaques d’objec- Vers 22 h 15 ils rentrent à bon port
recevant pour instruction de se dé- tifs très défendus et croyais fermement avec l’appareil de leur chef qui té-
brouiller pour faire ce qu’il peut afin au principe de la surprise – une seule moigne : “Max Guedj attaqua seul
de protéger les Bristol “Beaufort” de attaque en tirant au maximum avec trois fois son torpilleur et je dois ad-
torpillage : “[Le briefing] que je fis à les canons et les mitrailleuses – suivie mettre que je fus sincèrement impres-
mes équipages dans le peu de temps des actions évasives, jusqu’à ce que sionné par son courage. Au retour de
qui me restait fut très court : “Nous l’on soit hors de portée de l’ennemi, et cette mission je pensais qu’il avait
allons attaquer l’escorte de torpilleurs c’est ce que je fis.” beaucoup de chance d’être toujours
du Prinz Eugen au canon pour cou- Guedj arrive sur les lieux à 20 h 14, en vie.” Tout le monde n’a pas eu
vrir l’attaque des “Beaufort”, vous quelques minutes après son squadron cette chance car neuf des 52 appa-
n’avez qu’à me suivre et prenez cha- leader, et attaque à son tour un des- reils engagés ne sont pas revenus,
cun un torpilleur différent s’il y en a troyer qui fait feu de toutes ses pièces. dont le “Beaufighter” du Squa-
plus d’un”.” D’après l’ORB du Squadron 248, le dron 236 piloté par le Français libre
tir de Guedj fait mouche et le vaisseau Oddino Sabadini abattu par un
“Je croyais au principe ennemi est vu couvert de fumée. Mais Messerschmitt 109, mais qui aura la
contrairement à Pike, il revient à deux chance d’y survivre pour finir la
de la surprise” reprises sur sa cible sous le feu intense guerre dans un camp de prisonniers.
Selon l’Operational Record Book de la DCA. Corder témoigne : Le Prinz Eugen parviendra pour sa
(ORB) du Squadron 248, ses équi- “Tandis que les autres avions ne fai- part à rejoindre sa destination sans
pages, du moins pour son escadron, saient qu’une seule attaque, Max atta- grands dommages.
tiennent en fait à un seul, celui de Max Depuis le quait trois fois de façon opiniâtre l’es- Après cet exploit, Max Guedj
Guedj et du sgt Corder, qui à bord du porte-avions corte des torpilleurs. Mes seuls effectue encore 12 missions le long
“Beaufighter” T4721 vont accompa- Victorious, les souvenirs de ces minutes plutôt agi- des côtes de Norvège durant le res-
gner l’appareil T4824 du wg cdr Pike Indomitable tées me rappellent que nous étions tant du mois de mai, ainsi qu’en juin
décollant à 18 h 07 de Dyce pour es- et le Eagle entre les mâts d’un torpilleur et je re- et juillet 1942. Il est basé durant tout
corter les appareils se dirigeant vers (au fond). gardais à la verticale le trou d’une ce temps sur le terrain de Sumburg,
la côte norvégienne. Il s’agit alors de Ils étaient cheminée en me débattant comme un sur la pointe sur des îles Shetland,
la 11e mission de guerre de Max impliqués dans beau diable en même temps avec les distantes d’environ 250 km des
Guedj. La formation, après avoir tra- l’opération chargeurs des canons, ce qui était côtes de Norvège. Ces missions se
versé la mer du Nord, découvre le Pedestal pour déjà difficile en temps normal. Nous résument à des patrouilles sans his-
Prinz Eugen naviguant vers le sud ravitailler ne rencontrâmes aucune difficulté de toires à lutter plus contre la brume
ceinturé d’une escorte de cinq des- Malte en août la part de la chasse ennemie étant que l’aviation ou la marine enne-
1942, à laquelle
troyers qui font feu de toutes leurs donné l’intense DCA des bateaux qui mie : il ne rencontre aucune oppo-
participa Guedj
pièc es de DCA . P i ke té- nous servit de protection contre ses sition aérienne ni n’attaque de bâti-
au sein du
moigne : “Autant que je me souvienne, propres avions.” ment ennemi. Il y vole comme
Squadron 248
il y en avait deux sur le côté d’où par- Selon l’ORB de l’unité, l’équi- d’habitude sur plusieurs appareils,
sur
tait l’attaque des “Beaufort” et j’atta- “Beaufighter”.
page de Guedj et Corder rencontre ma is assez souvent su r le

IWM A 11293 IWM TR 1061

24
Le pétrolier
américain Ohio
rejoignant
in extremis mois d’août 1942, si la menace est à
le port maltais peu près écartée, les forces aé-
de La Valette riennes de Malte sont sur le chemin
le 15 août 1942 de l’offensive en attaquant la navi-
où son carburant gation ennemie, principalement à
pourra être l’aide de Bristol “Beaufighter”. Mais
pompé avant elles manquent de tout et l’île est
qu’il ne coule. dans l’attente de ravitaillement, en
FAMILLE GUEDJ
appareils comme en carburant.
Quelques C’est dans ce contexte que les ap-
instants de pareils du Squadron 248 s’envolent
détente pour pour l’île de Malte en plusieurs
Max Guedj
groupes étalés sur plusieurs jours, en
(à droite) et ses
faisant escale à Gibraltar. Max
camarades du
Guedj, sur le “Beaufighter” VI codé
Squadron 248
lors de leur
“O” y réalise son plus long vol de
séjour à guerre, décollant de l’Angleterre le
Malte au mois 9 août 1942 à 7 h 00 depuis de terrain
d’août 1942. de Porthreath, dans les Cornouailles,
pour se poser à Gibraltar après
5 h 30 min de vol sur le golfe de
Gascogne et au large des côtes du
Portugal. De Gibraltar il peut voir
les côtes marocaines et a sans doute
une pensée pour son père empri-
En juin 1943, sonné, sa mère, sa fiancée et sa petite
sur l’île de fille qui sont à Casablanca à moins
Malte, le Bristol d’une heure de vol de son avion… Il
FAMILLE GUEDJ
“Beaufighter” rejoint Malte le lendemain 10 août
“Beaufighter” T5107 codé “Y” qui de l’Angleterre, face à la Manche et Mk VIF après un nouveau vol de cinq heures,
semble presque devenir son appa- les côtes françaises. Mais il n’y fait codé F (pour se posant sur l’aérodrome de Takali.
reil personnel. aucun vol opérationnel, car son Freddie) du Les vols de convoyage se sont bien
unité s’apprête à rallier l’île de Squadron 272 déroulés puisque les 16 appareils du
Séjour à Malte en pleine Malte. Possession britannique au roule sur un
taxiway de
Squadron 248 sont tous arrivés à bon
centre de la Méditerranée entre la port, bien que l’un d’eux, présentant
opération Pedestal Sicile et la Libye italienne, elle est fortune de la des problèmes mécaniques, servira
base de la RAF
À la fin du mois de juillet 1942, devenue une forteresse assiégée et de source de pièces de rechange.
de Takali, au
tout son escadron déménage pour soumise à d’importantes attaques Ils ne sont pas destinés à s’y éter-
pied de la ville
aller à Gosport, près de Porths- aériennes des forces de l’Axe en niser et effectuent surtout ce voyage
fortifiée
mouth, en plein centre du rivage sud 1941 et au début de l’année 1942. Au pour livrer leurs “Beaufighter” aux

V
de Mdina.

25
MAX GUEDJ, HÉROS MÉCONNU DE LA FRANCE LIBRE

DR
“Beaufighter”
forces locales. Mais l’île est dans l’at- du niques, si bien que neuf “Beaufigher” au large du cap Bon, à la pointe nord-
tente de l’arrivée d’un important Squadron 248 se présentent sur le terrain de est de la Tunisie. Trois autres
convoi de ravitaillement – opération survolant Cagliari-Elmas distant de quelque “Beaufigher” décollent à l’aube pour
Pedestal – de 14 navires marchands l’Angleterre 250 km de Malte. La DCA du ter- prendre le relais, le premier à 5 h 05
dont le pétrolier Ohio transportant par un temps rain, assez forte, se met à tirer mais piloté par le wg cdr Pike, suivi d’un
du carburant d’aviation. Ils sont es- couvert. les bimoteurs britanniques vont y dé- second piloté par le plt off. Jay avec
cortés par rien de moins que 42 bâti- chaîner le feu de leurs canons, rédui- le flt sgt Mc Farlane en observateur.
ments de guerre dont trois porte- sant au silence les postes de tir avant Max Guedj décolle quelque 20 mi-
avions britanniques ; tous ces navires de s’en prendre aux hangars et aux nutes plus tard mais retournera à
se rassemblent au sud des Baléares appareils entreposés – deux Savoia- Malte sans avoir trouvé le convoi. Ce
quand les “Beaufighter” du Marchetti 79 y seront revendiqués n’est pas le cas de Pike qui se fait at-
Squadron 248 se posent à Malte. Ils détruits et six autres endommagés. taquer par des Bf 109 dont il esquive
seront mis à contribution pour prêter Max Guedj y fait un “carton” contre les attaques et rentre à Malte avec
main-forte aux aviateurs de Malte un des hangars qui est laissé en une balle dans la queue. Jay et Mc
qui vont déployer un effort maximal flammes quand les “Beaufighter” Farlane n’ont pas cette chance : leur
afi n de protéger le convoi que les s’éloignent… pour se diriger vers le moteur gauche en feu, ils sont
forces navales et aériennes de l’Axe terrain de Decimomannu, distant de contraints de sauter en parachute en
s’apprêtent à attaquer. quelques kilomètres, qu’ils prennent mer. Cinq autres “Beaufighter” vien-
par complète surprise en lui infl i- dront sur place en fin de matinée et
Un “carton” contre un geant la même punition. Max Guedj seront pris en chasse par les Bf 109
y revendique un hangar endommagé dont ils éviteront les attaques.
hangar laissé en flammes ainsi que deux avions non identifiés Pike veut faire le maximum pour
Le 11 août 1942, le convoi allié endommagés au sol, des SM 79 si l’on retrouver son équipage parachuté en
quitte le sud des Baléares et se dirige en croit les rapports de ses cama- mer et envoie le lendemain 14 août
en direction du cap Bon, la pointe de rades qui au total signalent avoir in- quatre appareils qui décollent peu
la Tunisie. Les “Beaufigher” du cendié huit heavy aircraft (avions après 13 heures et qui découvrent un
Squadron 248 vont s’en prendre aux lourds) multimoteurs et endommagé dinghy dans lequel se trouvent deux
terrains abritant des avions torpil- 16 autres. Casiers à munitions vides, hommes. Ils rentrent tous à Malte
leurs italiens, à savoir celui de l’île de tous les appareils, dont deux ont été sauf l’un d’eux, piloté par l’autre
Pantelleria vers laquelle quatre ap- légèrement endommagés par la Français libre de l’unité, le
pareils décollent vers 19 h 15. Trois DCA, rentrent à Malte et s’y posent plt off. Gerard Weil, qui reste à tour-
quarts d’heure plus tôt, l’essentiel de dans la nuit vers 23 h 30, y retrouvant ner autour de l’embarcation jusqu’à
l’unité, soit 11 “Beaufighter” menés les quatre autres revenus du raid épuisement de son carburant dans
par le wg cdr Pike, ont déjà décollé contre Pantelleria. l’attente d’un hydravion de secours
pour s’en prendre aux terrains du sud En fin d’après-midi du lende- – il est question que le commande-
de la Sardaigne. Max Guedj fait par- main 12 août le Squadron 248 dé- ment de Malte y envoie un hydra-
tie de ce groupe avec son fidèle pêche six de ses appareils pour four- vion Cant 506 italien capturé. Max
Corder ; ils peuvent voir que deux de nir une couverture aérienne au Guedj et Corder décollent à
leurs équipiers font demi-tour pré- convoi qui, au matin du 13 août, s’est 17 heures pour prendre le relais de
maturément suite à des ennuis méca- approché à quelque 220 km de Malte Weil. Les pilotes du Squadron 248
26
ignorent que les occupants du din-
ghy ne sont pas leurs camarades,
“ L’avion ennemi voie de son côté des Ju 88 à long
rayon d’action, notamment basés à
mais l’équipage d’un “Stuka” italien Bordeaux-Mérignac, pour tenter
descendu la veille par des chasseurs
alliés, à savoir le pilote Antonio
s’enfuit en piqué… Une d’apporter une couverture aérienne
à ses sous-marins.
Cumbat et son mitrailleur Cavallo,
blessé. Leur canot de sauvetage est
poursuite s’engage et se Max Guedj est de la partie pour
ce premier jour de reprise des vols
percé et Cumbat fait ce qu’il peut
pour pomper et le maintenir à flot, finit au ras des flots ” et réalise avec Corder une patrouille
en mer de près de quatre heures vers
ayant pu y amarrer les deux roues de les approches ouest avec deux autres
son “Stuka” qui se sont détachées à dommagé, a pu rejoindre le port de équipiers, sans faire de mauvaise
l’impact et qui servent de bouées. La Valette où il va couler, mais non rencontre. Il en fait une lors de sa
Guedj décrit de larges cercles autour sans avoir vu tout le carburant qu’il seconde sortie deux jours plus tard,
du frêle esquif de fortune tandis que transportait transbordé à quai ou sur le 27 septembre 1942, ayant décollé
Corder leur jette des vivres au bout d’autres navires, ce qui sauve l’île de à 14 h 43 avec trois autres équipiers
d’un parachute que les naufragés, Malte de la pénurie. Les forces de la pour escorter un bombardier
trop épuisés, ne vont pas chercher. RAF à Malte sont donc de nouveau Armstrong Whitworth “Whitley”.
A lors que la nuit commence à sur pied et peuvent continuer à atta- Le temps est plutôt clair au décol-
tomber un hydravion fait son appa- quer le trafic maritime de l’Axe en lage mais va se gâter en mer, où ap-
rition, que Guedj décrit comme ac- Méditerranée centrale… Ce que font paraissent des nuages, des pluies lé-
compagné d’un chasseur monomo- le 15 août neuf “Beaufighter” du gères et des nappes de brouillard.
teur qui quitte la scène. Il n’a pas vu Squadron 248 en escortant des Au détour d’un nuage, la patrouille
qu’il y avait en fait IWM B r i s t o l aperçoit un Ju 88 qu’elle attaque im-
toute une patrouille “Beaufort” médiatement. L’avion ennemi s’en-
de MC 202 italiens torpilleurs
t au fuit en piqué… Une poursuite s’en-
qui ont fait demi- large
l de l’île de gage et se finit au ras des flots. Seuls
tour à bout de carbu- Corfou,
C rempor- le “Beaufighter” codé “X” du
rant. L’hydravion est tant
t à l’occasion flt sgt R. Hammond et le KL304 “C”
Le wg cdr James
seul face à lui ; c’est plusieurs
p vic- M. N. Pike,
de Max Guedj parviennent à le rat-
un Dornier 24 alle- toires
t aériennes à la tête du traper. Des échanges de tirs ont lieu
mand. Il demande contre
c des Ju 52, Squadron 248 et le mitrailleur arrière du Junkers
des instructions au Ju
J 88 et Fiat quand Guedj y parvient à toucher l’appareil d’Ham-
commandement de BR.20,
B au prix était affecté en mond d’une balle dans l’aile gauche,
Malte qui lui or- d’un
d appareil 1942, lors de ses près du moteur. Le bimoteur alle-
donne de ne pas tirer perdu. Ma x missions contre mand reçoit de son côté plusieurs
sur l’avion de sauve- Guedj
G n’est pas le croiseur lourd impacts, mais poursuit néanmoins
tage ennemi. Ce qu’il du
d vol et tous les Prinz Eugen sa route, à la grande rage de Max
fait en dirigeant par pilotes
p survi- et à Malte. Guedj qui doit abandonner le com-
ses manœuvres le vants
v font leurs bat, faute de munitions.
Dornier vers le din- bagages
b dans les C’était la première fois qu’il af-
ghy et en tirant à jours
j qui suivent. frontait un avion ennemi en vol, et
trois reprises sur la Laissant
L leurs de toute évidence a estimé qu’il de-
mer autour des nau- appareils
a aux vait améliorer sa technique de tir. Il
fragés pour signaler leur position. forces de Malte, ils quittent l’île sur se consolera quelques jours plus tard
L’hydravion finit par les apercevoir un Lockheed “Huston” vers lorsqu’il recevra la Distinguished
et se pose à proximité pour les re- Gibraltar, puis de là s’embarquent le Flying Cross (DFC) dont la citation
cueillir. Antonio Cumbat témoi- 26 août 1942 sur le cargo Llanstephan souligne son exceptionnelle volonté
gnera des années après les faits : Castle qui les ramène en Angleterre de voler et de se battre ; la décoration
“Guedj continue à observer la scène trois jours plus tard. britannique sera doublée d’une cita-
en tournant autour de nous et tion à l’ordre de l’armée française
lorsqu’il se rend compte que nous Missions au large ainsi libellée : “Brillant officier pilote
avons été sauvés, il effectue un virage de chasse bimoteur. A effectué de
vers l’hydravion pour nous saluer
de l’Irlande nombreuses opérations sur les côtes
puis met le cap sur Malte.” Les mécaniciens et services gé- norvégiennes et hollandaises. S’est
De l’équipage du “Beaufighter” néraux du Squadron 248 sont restés particulièrement distingué le 17 mai
parachuté en mer, seul l’observateur, à Dyce pendant l’épisode maltais et 1942, en prenant une part active à
le flt sgt Mc Farlane, pourra échap- rejoignent les pilotes à Talbenny, sur l’attaque sur le Prince Eugène. Vient
per à la noyade et sera sauvé par la pointe sud du pays de Galles, où de participer avec brio à des opéra-
l’équipage d’un autre “Stuka” italien l’unité reçoit de nouveaux “Beau- tions en Méditerranée centrale, au
abattu qui le recueillera sur son din- fighter” et reprend ses vols le 25 sep- cours desquelles il a détruit deux
ghy. Les trois hommes seront ulté- tembre 1942. Sa mission sera de réa- hangars et endommagé trois appa-
rieurement sauvés par un hydravion liser des patrouilles de chasse dans reils ennemis sur des terrains.
allemand. Le pilote, le plt off. Jay, n’a le golfe de Gascogne et d’escorter les Compte à son actif 104 heures d’opé-
pas eu cette chance et a péri noyé en bombardiers de lutte anti-sous-ma- rations et 31 missions de guerre.”
mer. Pendant que se déroulait cette rine qui tentent d’y détruire les L es missions se poursuivent
opération de sauvetage, le convoi de U-Boote ennemis de passage vers le alors au-dessus de l’Atlantique, en
ravitaillement a pu rallier l’île de centre de l’Atlantique pour y atta- mer Celtique et jusqu’au golfe de
Malte avec d’importantes pertes. En quer les convois venant d’Amérique Gascogne, et les “Beaufighter” du
particulier le pétrolier Ohio, très en- vers l’Angleterre. La Luftwaffe en- Squadron 248 croisent la route de
V

27
MAX GUEDJ, HÉROS MÉCONNU DE LA FRANCE LIBRE

quelques Ju 88 de patrouille et en Max s’ouvrit à moi et n’eut pas honte


descendent même un durant le mois de montrer tout ce qu’il ressentait fut
d’octobre. Max Guedj poursuit ses lorsqu’il apprit la mort de son père”.
missions avec un rythme soutenu, Max Guedj va imperturbable-
menant pas moins de neuf ment poursuivre ses missions, qui se
“Interceptor Patrol” (patrouilles déroulent toujours à un rythme sou-
d’interception) en octobre sans croi- tenu : huit patrouilles en novembre,
ser d’ennemi. cinq en décembre 1942 avant que le
Squadron 248 ne quitte le pays de
Bouleversé par la mort Galles pour s’installer dans la pointe
des Cornouailles sur les terrains de
de son père Talbenny puis Predanncak, pour re-
À des milliers de kilomètres de prendre les mêmes missions. Promu
là, au Maroc, sa famille est touchée au grade de lieutenant à titre tempo-
par un drame : son père, Me Félix raire le 15 décembre 1942, le désor-
Guedj, a vu son état de santé se dé- mais flying officer Maurice et son ra-
grader dans la prison de Port-Lautey dio Corder repartent pour neuf
(aujourd’hui Kénitra) où il croupis- patrouilles en janvier et quatre en
sait depuis plus d’un an, embastillé février 1943 au-dessus du Golfe de
par les autorités de Vichy pour ses Gascogne, toujours pour des mis-
opinions gaullistes. Malgré les dé- sions de près de quatre heures au-
marches de sa mère qui a multiplié dessus de l’océan accompagné de
les recours, il n’est sorti de prison deux ou trois équipiers sans jamais
que le 14 octobre 1942 pour être rencontrer l’ennemi, bien qu’il arrive
transféré dans un hôpital où il expire que d’autres patrouilles croisent la
le lendemain. Moins d’un mois plus route ou même abattent des Ju 88
tard, le 8 novembre 1942, les troupes rencontrés en mer.
anglo-américaines débarquent au Le 9 mars 1943, Max souhaite la À son retour repos. Plus tard, quand nous opére-
Maroc et en Algérie (opération bienvenue à un nouveau pilote de la de Malte, Max rons à nouveau sur les côtes de
Torch) et les autorités lo- France
F libre muté dans Guedj sera France, de Norvège ou de Hollande,
cales de Vichy, après son
s unité après être sorti bouleversé ce sera une autre histoire, mais pour
avoir résisté pendant d’OTU,
d le s/lt Claude d’apprendre le moment, le travail que nous fai-
trois jours, se rallient fi- Serf (a l i a s le la mort sons vous servira comme un ex-
nalement aux Alliés le plt
p off. Georges New- de son père, cellent entraînement. Person-
11 novembre. On ignore man),
m qui se souvient des Félix Guedj, nellement, je préférerais faire
précisément quand la paroles
p de son supérieur : dans une quelque chose de plus intéressant,
nouvelle de la mort de “
“Vous arrivez au meil- prison mais pour un jeune pilote qui entre
son père parvient à Max leur
l moment pour acqué- de Vichy en escadrille, c’est juste ce qu’il faut.”
Guedj, mais il en est bou- rir
r l’expérience qui vous au Maroc le Partant se coucher tôt car devant
leversé. D’habitude très manque
m encore, sans être 15 octobre partir en patrouille au petit matin du
réservé sur ses senti- jeté
j d’un coup en pleine 1942, où il lendemain matin, Max Guedj allait
ments, il ressent le besoin bagarre.
b Ici, nous ne fai- avait été voir ses paroles ironiquement dé-
F G
AMILLE UEDJ
d’en parler à son compa- sons
s rien, ce ne sont que incarcéré pour menties par le destin. Le 10 mars
triote du Squadron 248 Gérard Weil des patrouilles sans intérêt, on ne voit ses opinions 1943 à 7 h 15, son appareil décolle du
qui témoigne que “la seule fois où jamais un boche. C’est presque du gaullistes. terrain de Predannack, dont la bor-
De gauche
à droite :
le Junkers 88
touché par Max
Guedj le 10 mars
1943 s’abat dans
l’Atlantique.

DR/COLL. CHRIS GOSS DR/COLL. CHRIS GOSS

28
E
T DHORN
VINCEN

Aux commandes de ce “Beaufighter” Mk VIC du Squadron 248


Max Guedj remporta une victoire contre un Ju 88 le 10 mars 1943.

dure donne directement sur une fa- Brest. Iniss monte aussitôt pour l’at- moins de 300 m de distance pour une
laise tombant dans l’océan, pour taquer, suivi des appareils de rafale de deux secondes qui fait
commencer une patrouille en mer Stringer et de Guedj. Le Ju 88 repère mouche et laboure les moteurs et le
avec trois autres “Beaufighter” me- les “Beaufighter” alors qu’Iniss est cockpit de sa cible. Il s’approche à
née par le sqn ldr F. K. Burton à un peu moins de 1 000 m de dis- moins de 150 m et tire une seconde
(“Beaufighter” “X”). Max est son tance sous sa queue. Il tente de se rafale en plein dans son angle mort
n° 2 sur le “Beaufighter” “W”, suivi mettre à l’abri dans un nuage tandis qui incendie complètement le
des appareils “U” du fl ight lieute- qu’Iniss appuie sur la détente de ses Junkers qui s’incline fortement vers
nant A. R. Iniss et du “T” du flight canons, mais rien ne part en raison bâbord, puis redresse avant de glis-
officer R. G. Stringer. Ils volent au d’un défaut d’interrupteur de tir. ser vers la mer sur laquelle il est vu
ras des flots et sont à environ 250 km Alors que l’avion allemand entre s’écraser. Il n’y aura aucun survivant
à l’ouest de la pointe de la Bretagne dans le nuage qui se révèle être assez parmi l’équipage de l’oberleutnant
quand Iniss est le premier à aperce- fin, Stringer peut lui tirer une rafale Ernst Stichel.
voir un bimoteur ennemi évoluant à de ses mitrailleuses et observe Mais le mitrailleur arrière de
600 m d’altitude. Il s’agit d’un Ju 88 quelques impacts sur le plan de l’équipage allemand ne s’est pas
D-1 de la Wekusta 51, une unité de queue bâbord, le temps de dégager laissé faire ; durant l’attaque il a gra-
reconnaissance météorologique pour faire place au “W” de Guedj tifié son assaillant d’une bonne rafale
dont un détachement est basé à qui ouvre le feu de ses canons à de sa MG 131 de 13 mm qui a fait
V

DR/COLL. CHRIS GOSS

29
MAX GUEDJ, HÉROS MÉCONNU DE LA FRANCE LIBRE

mouche en laissant trois gros trous


dans l’aile tribord, arraché un tiers
“ Aux questions,il un long moment à chercher l’appareil
de Maurice et ne savaient rien de ce
de l’aileron ainsi que la prise d’air du
moteur, et touché le poste de pilotage répondait en parlant de qui lui était arrivé. Quant à Maurice,
ses blessures étaient légères et, après
en fracassant l’essentiel du tableau de être passé à l’infirmerie, il vint nous
bord, blessant Max Guedj de plu-
sieurs éclats. L’heure est grave car ils
son navigateur qui avait rejoindre au mess dans la soirée. Il
était très content parce que le docteur
sont à près de 250 km de leur base,
avec leurs deux moteurs plus ou
fait tout le travail ” lui ayant interdit de voler pendant huit
jours, il avait obtenu de prendre sa per-
moins endommagés… De son poste mission le lendemain. Car il n’aimait
arrière, Corder va s’affairer avec une il essaya d’enlever son casque de vol et pas les permissions qui suspendaient
grande énergie. Le téléphone de bord cela le fit grimacer car il avait un mi- son activité aérienne. Je lui dis ce soir-
ne fonctionnant plus, il va ramper nuscule morceau de schrapnell [éclat] là : “C’est bien vous qui me disiez hier
dans le fuselage pour donner le cap planté en haut du crâne. Sa joue était qu’il ne se passait jamais rien dans le
à suivre à son pilote. Retournant à sa écorchée et il saignait légèrement sur golfe de Gascogne ?” Il eut un sourire
coupole arrière, il tente d’entrer en une longueur de deux centimètres. qui voulait dire “Je m’excuse” ou “Ce
communication avec les autres “Qu’est-ce que c’est que ça, Morrie ?” n’est pas de ma faute”. Comme d’habi-
“Beaufighter” en leur faisant des si- lui demanda un Anglais. Il se tâta la tude, il parlait très peu mais dans le
gnaux lumineux avec sa lampe Aldis, joue d’un air vaguement honteux et mess, les conversations allaient grand
mais celle-ci ne fonctionne plus. Il répondit avec un sourire embarrassé : train. On discutait pour savoir si
vient alors tenter d’aider Max à régler “Une balle, je crois.” Il se dirigea vers Maurice aurait une “bar” à sa DFC
le pas de l’hélice du moteur bâbord les bâtiments. Il boitait et marchait ou non. Certains disaient qu’il n’y
dont la manette de commande lui avec grande difficulté, ayant reçu plu- avait pas assez longtemps qu’il avait
restera dans les mains, laissant sieurs éclats dans chaque jambe. Je la DFC pour y gagner une “bar”. De
l’avion difficilement contrôlable. l’observais avec attention, cherchais toute façon, il faudrait attendre au
Prévenant la base de leur état par ra- en vain un signe de nervosité ou de moins six semaines pour savoir. Et
dio, ils entament un difficile chemin joie, mais Maurice était exactement le Maurice partit en permission…”
du retour alors que le moteur bâbord même que la veille au soir, flegma-
ne tarde pas à les lâcher. tique, calme, maître de lui. À toutes Blessé, il réussit à
les questions dont on l’assaillait, il ré-
Il s’approche de la falaise pondait surtout en parlant de son navi-
regagner l’Angleterre
gateur qui avait fait tout le travail. C e n’est pas la première fois
en perdant de l’altitude […] Les trois autres avions de la pa- qu’u n “Beau f ig hter” du
L’appareil perd progressivement trouille [qui l’avaient perdu de vue, Squadron 248 abat un Ju 88. Mais
de l’altitude et se maintient à grand- NdA] n’arrivèrent en même temps que c’est bien la première fois que l’un
peine à une centaine de mètres au- par pure coïncidence. Ils étaient restés d’entre eux revient à sa base dans
dessus des flots, volant à moins de FAMILLE GUEDJ

200 km/h à la limite de la vitesse de Max Guedj


décrochage. Au moment où les deux (à gauche) et son
hommes envisagent de poser leur ap- radio-navigateur
Charles Corder
pareil en mer, les côtes apparaissent
après leur exploit
sur l’horizon. Ils tentent le tout pour
du 10 mars
le tout et Corder tire des fusées Very
1943, décorés
pour attirer l’attention du personnel respectivement
de la base. C’est à ce moment que le de la
moteur tribord s’enflamme et que de Distinguished
l’huile se met à envahir le cockpit ! Service Order et
L’avion s’approche de la falaise en per- de la Conspicious
dant de l’altitude ; Claude Serf est té- Gallantry Medal.
moin de la scène : “Beaucoup
avouèrent plus tard qu’ils fermèrent
les yeux de crainte en voyant venir la
catastrophe. Pourtant, l’appareil avait
franchi la falaise, à peut-être un mètre
au-dessus du sol, et il effectuait main-
tenant un atterrissage forcé au milieu
de l’aérodrome, sur le ventre, et cha-
cun eut la joie de voir les deux membres
de l’équipage, pilote et navigateur, sau-
ter à terre et s’éloigner de l’avion sur
lequel les pompiers s’affairaient déjà
et éteignaient les flammes qui faisaient
rage. En quelques secondes, tout le
monde se trouva réuni autour de
l’avion. Maurice, car c’était bien lui,
se tenait debout au milieu de la foule.
Lorsque j’arrivai, il était en train d’al-
lumer une cigarette. Il était d’un calme
parfait. Sa main ne tremblait pas. Puis
30
Le 10 mars 1943, le “Beaufighter”
de Max Guedj et Charles Corder
rentre à sa base de Predannack sur
un seul moteur pour s’écraser sur
la piste. Charles Corder a eu
le temps de prendre ce cliché.

CHARLES CORDER

des conditions aussi mouvemen- mander qu’on remette la croix de depuis plus d’un an, a effectué
tées ! Aussi, son exploit qui n’est pas guerre à son navigateur… La DSO 280 heures de vols de guerre au
mince sera récompensé par la pres- sera remise à Guedj le 21 avril 1943 cours de 72 missions dont 58 mis-
tigieuse Distinguished Service sur le terrain de Predannack par l’air sions offensives à longue distance
Order (DSO) à titre exceptionnel, vice-marshal G. Bromet, le com- Pilotes et radio- dans les ciels de Norvège, de
qu’il est le premier pilote français mandant du 19th Group du Coastal navigateurs du Hollande, du golfe de Gascogne et
libre à obtenir. Corder, que Guedj Command, au terme d’un déjeuner Squadron 248 de la Méditerranée centrale. À la
considère comme ayant sauvé l’équi- dont le menu a été écrit en français. en 1943 posant suite d’un combat difficile contre un
page de par son excellente naviga- Corder recevra pour sa part sa déco- devant un Junker 88 au large de la Bretagne a
tion qui les a menés droit vers ration des mains du roi Georges VI “Beaufighter”. abattu en flammes son adversaire au
Predannack, est recommandé pour à Buckingham palace. Les autorités Max Guedj moment où il cherchait à s’échapper
la Distinguished Flying Medal ré- de la France libre donneront en est assis au dans les nuages. Blessé à la tête et
premier rang,
servée aux sous-officiers, mais rece- outre une citation à l’ordre de l’ar- aux jambes, a réussi à regagner
3e à droite ;
vra à la place la Conspicuous mée aux deux hommes, celle de Max l’Angleterre malgré les graves ava-
Corder est
Gallantry Medal, la plus haute dis- Guedj, qui lui permet d’ajouter une ries causées à son appareil par le feu
le premier à
tinction après la Victoria Cross. seconde palme à sa croix de guerre, gauche au
de l’adversaire.” Q
Guedj écrira au gén. Valin pour de- étant ainsi libellée : “En opérations dernier rang.
À suivre
FAMILLE GUEDJ

31
FÊTES

Des cadeaux aéros


En fin cette fin d’année 2021, Le Fana vous propose une sélection de
cadeaux pour les fêtes sur le thème de l’armée de l’Air et de l’Espace,
d hier et d
d’hier aujourd
j hui. De q
d’aujourd’hui. quoi alimenter votre liste au Pè
Père Noël.

n “Mirage” F1
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La légende
Le “Mirage” F1 demeure une des légendes qui
ont fait l’histoire de l’armée de l’Air et de l’Espace.
Entrés en service en 1974, les “Mirage” F1 français
ont tiré leur révérence à l’occasion du défilé
militaire du 14 juillet 2014.

32
Iconique

L’AAE lance sa marque de


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Collection. Ce blouson PN
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avec une touche de modernité.
Une pièce originale de “Mirage”
IIIB est insérée sur la poche
de poitrine, le logo “Épervier”
est en relief dans le dos.
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33
CADEAUX

Le retour du Béarn
L’historique escadron de transport
Béarn a été sorti du sommeil
pour reprendre du service sur A400M
en septembre dernier. Un de ses avions
a été orné du fameux taureau rouge.

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35
CADEAUX

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37
REPORTAGE

Beech D17S “Staggerwing”

Beau et efficace

XAVIER MÉAL
Paul-Émile Cassart aux commandes
de son Beech D17S “Stagerwing”
N44GM au-dessus
de la Bourgogne, en juin dernier.

39
BEECH D17S “STAGGERWING”

pour le “Staggerwing” pour pouvoir


Il fallait décider entre le fin et agile Yak-3 voler en leur compagnie.”
et le sculptural Beech “Staggerwing”. Le Beechcraft type 17 est plus
qu’une machine volante : c’est une
Paul-Émile Cassart a choisi le biplan, légende. Lancé en 1933, il fut pro-
duit pendant 16 ans, jusqu’en 1949,
pour ses courbes, mais aussi pour ses à 785 exemplaires. Conçu et créé au
performances. Un croisement entre milieu de la pire dépression écono-
mique que l’Amérique ait jamais
une Cadillac et une Ford GT 40. connue, le Beech 17 représentait
Par Xavier Méal un formidable pari pour Walter H.
Beech. En novembre 1932, quand
l’avion aux ailes décalées (c’est ce
que signifie staggerwing) fit son
’ai commencé par le vol à voile deux Pitts par la suite. Le deuxième premier vol, les empires commer-

J à 26-27 ans, raconte Paul-Émile


Cassart. Avant, il y avait eu le mo-
délisme et les bouquins de France
Empire. Je m’étais toujours dit
que je ferai de l’aviation quand j’en
était accidenté et je l’ai fait refaire par
Bruno Ducreux et sa société Aero
Restauration Service. J’ai aussi volé
sur les classiques : Zlin et Stampe.
Après quinze ans de Pitts, j’ai voulu
ciaux s’effondraient, les actions en
bourse avaient perdu toute valeur,
le chômage généralisé laissait des
millions de personnes sans emploi
et alimentait un mécontentement
aurais les moyens ! J’ai fait pendant faire autre chose. Après de nom- social croissant. Walter H. Beech, lui,
quelques années des compétitions breuses discussions avec Christophe prenait le pari de proposer un avion
de planeur. J’en ai possédé deux : Jacquard et autant de bonnes bou- dont l’aménagement intérieur riva-
un Glasflügel H301 “Libelle” et un teilles, j’ai réussi à réduire les options lisait avec les plus belles Cadillac, et
Rolladen-Schneider LS6. Puis j’ai à deux machines : Yak-3 ou Beech en même temps capable de perfor-
enchaîné sur le vol moteur, d’abord “Staggerwing”. Le Yak pour ses per- mances comparables à celle des Ford
sur un Piper “Cub”, et ensuite sur la formances et son histoire. Le “Stagger- 24 novembre GT 40 qui allait gagner les 24 Heures
2012.
voltige – j’ai débuté en CAP 10. wing” car je souhaitais un avion de du Mans 34 ans plus tard. Un Ovni.
Les travaux
À cette époque, mon ami voyage non conventionnel ; je voulais “Quand j’ai commencé à chercher,
de restauration
Christophe Jacquard m’emmenait un avion avec une esthétique et des il y avait trois “Staggerwing” à vendre
ont débuté
faire des tours en Pitts. C’est lui qui performances, pas une barcasse qui depuis le
sur le marché européen : un à La Ferté-
m’a embarqué dans l’aviation, qui se traîne. Étant père de deux filles qui mois d’août Alais, un chez Stephen Grey et un en
m’a donné l’envie de voler. J’ai eu font également de l’aviation, j’ai opté précédent. Belgique. Celui en Belgique était chez
FAST AÉRO

40
Flying Aces Services and Training
(FAST Aero), la société de Frédéric
Vormezeele ; il s’agissait de son projet
personnel. L’avion était complet et
démonté quand je l’ai acheté, le treillis
tubulaire sortait de peinture, le train
était monté dessus. Mais pratiquement
tout restait à faire.”

Un soldat
devenu civil
Ce qui n’est alors qu’un squelette
de “Staggerwing” s’avère avoir été
construit en tant que GB-2, c’est-à-
dire la version commandée par l’US
Navy. Le GB-2 avait pour vocation
le transport de personnalités et des
pilotes de convoyage vers des usines
à travers tout le pays afin de livrer les
avions à la flotte. Celui-ci, numéro
de série 6916, fut pris en compte
le 27 mai 1944 avec le Bureau of
DR
Aeronautics Number (BuAer N°) Le Beech D17S
23736, mais fut semble-t-il immé- “Staggerwing” à partir de 2004, a été un Beech Quand je l’ai acheté, en 2007, mon
diatement versé, pour les besoins de immatriculé “Staggerwing”, pour le Néerlandais activité de restauration a commencé à
l’accord lend-lease (1) aux US Army N67426, Edwin Boschoff ; il s’agissait d’un décoller… J’ai dû mettre mon projet
Air Forces qui lui attribuèrent le futur N44GM, YC-43 immatriculé N295BS, un de côté, l’entreposer dans une réserve
matricule 44-76071. Cependant il ne à Watsonville, avion qui avait été utilisé par l’ambas- privée avec les avions de mon père.”
fut pas expédié en Angleterre et fut en Californie, sadeur américain à Londres pendant À cette époque, le fuselage a d’ores et
rayé des inventaires le 31 juillet 1946, au milieu des la Deuxième Guerre mondiale. Il a déjà subi une restauration complète :
puis vendu comme surplus. Il devint années 1960. volé à nouveau le 29 avril 2009. le treillis tubulaire a subi un traitement
alors civil, en tant que Beech D17S, Dès le début des travaux, j’ai été total tandis que cadres et lisses en bois
et adopta l’immatriculation N67426. séduit par cet avion, et j’en ai voulu neufs ont été installés.
Il fut accidenté deux fois dans les Le fuselage est un pour moi. Grâce à mon réseau
années 1960 : en mai 1964, le train composé d’un
assemblage
aux États-Unis, j’ai trouvé ce que je Un nombre d’heures
d’atterrissage se rétracta inopinément cherchais. Un monsieur en vendait
au roulage sur l’aéroport de Tucson, de couples deux, l’un en état de vol, l’autre qu’il
de travail exponentiel
et de lisses
dans l’Arizona, et en septembre avait acheté pour le restaurer mais Fréderic Vormezeele extirpe le
en bois, tout
1965, sur l’aéroport d’Evansville, qu’il n’avait en définitive jamais tou- fuselage restauré du N44GM de son
en courbes,
dans l’Indiana, le train d’atterrissage ché. Celui “à restaurer” avait fait son entrepôt privé pour le transporter
sur un treillis
refusa de sortir suite à une panne du dernier vol en 1965 je crois. jusqu’aux ateliers de FAST Aéro en

V
métallique.
moteur électrique qui l’active. Le FAST AÉRO

21 avril 1970, un nouveau certificat


de navigabilité lui fut attribué avec
la nouvelle immatriculation N44GM ;
il devint la propriété de Grant G.
Lindemer, résident à Arden Hills,
dans le Minnesota, qui le revendit
en août 2007 à Frédéric Vormezeele.
“J’ai passé un contrat avec
Frédéric Vormezeele, poursuit Paul-
Émile Cassart, qui a pu ainsi terminer,
d’une certaine façon, “son projet”. Il
a fallu pour cela trois ans et demi de
travaux, soit un peu plus que les deux
ans et demi prévus à l’origine. Mais il
en est venu à bout. Je me suis impliqué
en faisant de petites recherches sur cer-
taines pièces, en posant les bandes de
masquage, en faisant des choses à la
mesure de mes connaissances.”
Le fondateur de FAST Aéro se
souvient : “La première restaura-
tion que j’ai effectuée pour un client,

(1) Prêt-bail, un programme d’armement


mis en place par les États-Unis pendant
la Deuxième Guerre mondiale.

41
BEECH D17S “STAGGERWING”

août 2012. Ailes, gouvernes, com-


mandes de vol et les divers capotages
ont déjà été restaurés. Reste à assem-
bler “à blanc” le puzzle géant, pour y
installer les systèmes, avant d’entoiler.
“Le N44GM était générale-
ment sain. Nous n’avons refait que
quelques tôles qui étaient corrodées,
raconte Frédéric Vormezeele. Le
“Staggerwing” est un avion très par-
ticulier à restaurer. Les Américains
qualifient la restauration de ce type
d’avion de cubic man hours – qui
nécessite un nombre d’heures de
travail exponentiel. Il n’y a pratique-
ment aucune ligne droite et on travaille
Mars 2019 : aussi bien de la structure tubulaire
le fuselage entoilé métallique que du bois et de la toile.
révèle ses gracieuses Le train d’atterrissage est un défi. La
courbes. courbe d’apprentissage est très… pen-
FAST AÉRO

XAVIER MÉAL

42
tue. J’ai passé beaucoup de temps à Le train
rechercher des pièces. Heureusement, d’atterrissage,
ayant entretenu et réparé quelques mû par des
“Staggerwing” auparavant, je dispose moteurs
d’un petit réseau aux États-Unis. Les électriques, est
moteurs électriques des trains d’atter- sans doute
rissage sont très difficiles à trouver, le système
tout comme les contacteurs qui servent le plus complexe
d’interrupteurs quand le train est du Beech
rentré. Par ailleurs, régler le mouve- “Staggerwing”.
ment des jambes de train est très long.
Dans un autre domaine, les vérins
mécaniques des volets, entraînés par
un moteur électrique, sont également
devenus très rares.”
Les premiers essais du moteur
Pratt & Whitney sont menés le 11 sep-
tembre 2019 et, le 13 octobre suivant,
Frédéric Vormezeel effectue avec
succès le premier vol de contrôle.
V

“Staggerwing”
signifie “ailes
décalées”.
Et en effet,
l’aile supérieure
est plus en
arrière que l’aile
inférieure.

Septembre
2018 : le Pratt
& Whitney
R-985 de
600 ch révisé
est en cours
d’installation. FAST AÉRO
DIRK BELLENS / FAST AÉRO

43
BEECH D17S “STAGGERWING”

“Ce qui rend le “Staggerwing”


si particulier, confie-t-il, ce sont ses
lignes associées à un beau moteur
en étoile : un des plus beaux avions
jamais construit, selon moi. Il plaît
au premier coup d’œil. Quand tu
ouvres la porte de la cabine, tu as le
sentiment d’avoir ouvert la portière
d’une Cadillac. Même les gens qui
ne connaissent rien à l’aviation sont
émerveillés la première fois qu’ils
voient un “Staggerwing” et qu’ils
jettent un œil dedans. C’est un avion
qui va loin, et qui le fait vite.
Du point de vue pilotage, c’est un
avion complexe, à train rentrant et
pas variable. Il nécessite une certaine
expérience, voire une expérience cer-
taine. Sur piste en herbe, ce n’est pas
encore trop compliqué. Ajoutez-y du
vent de travers, et la charge de travail
augmente fortement et cela devient
délicat. C’est encore plus délicat sur
une piste en dur ; là, il faut être très
attentif. Il faut faire attention aussi
au centrage : il est trop avant si on est
que deux personnes à bord, et il faut
alors mettre du poids dans la soute
à bagage. Pour ce qui est du sélec-
teur de réservoirs de carburants – il
y en a cinq au total –, il est à l’origine
composé de deux sélecteurs rotatifs
qu’il faut savoir bien combiner ; ce
système a été à l’origine d’un certain
nombre d’accidents et nous faisons
une modification avec un sélecteur
de réservoir unique à la place de
ce doublet. Nous ajoutons aussi
une pompe électrique en plus de la
pompe à main.
J’ai éprouvé une grande satis-
faction à fi naliser ce projet, grâce
à Paul-Émile : nous sommes sur la
même longueur d’onde en termes de
qualité et de niveau de restauration.
Ce qui m’a permis de restaurer le
N44GM comme je l’aurais fait pour
moi-même.”

Beau et efficace pour


voyager rapidement
“J ’ai fait deux vols avec
Frédéric Vormezeele dans un autre
“Staggerwing” qu’il avait en entre-
tien, raconte Paul-Émile Cassart. J’ai
tout de suite aimé : c’est beau, c’est ef-
ficace. Toute l’expérience que j’avais
acquise en train classique s’est révélée
des plus utile à ce moment-là. J’ai été
rapidement lâché. Mais il a fallu que
je change d’état mental par rapport à
la voltige : maintenant il s’agissait de
voyager… rapidement.”
Le “Staggerwing” N44GM de-
vrait participer à quelques meetings
en 2022, les années 2020 et 2021
n’ayant pas été des plus propices pour
le montrer. À bon entendeur… Q
XAVIER MÉAL

44
Habituellement basé
à Saint-Hubert, en
Belgique, le Beech D17S
“Staggerwing” N44GM
fréquente les aérodromes
français. Lors de cette prise
de vue, il avait fait étape à
Darois (Côte-d’Or).

45
HISTOIRE

L’attaque de Pearl Harbor


Les secrets
de la préparation
des pilotes
Les Japonais se préparèrent soigneusement à l’attaque
de la flotte américaine à Pearl Harbor le 7 décembre
1941. Voici comment pilotes et navigateurs-
observateurs furent formés au bombardement et au
torpillage avant cette opération qui se voulait décisive.
Par Bernard Baëza

H. TANAKA

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Le pont d’envol de l’Akagi la veille
de l’attaque. Un ultime briefing
se tient au pied de l’îlot, à côté
du chasseur A6M2b piloté par Tadao
Kimura qui fut de la seconde vague
contre Pearl Harbor.

47
LA PRÉPARATION DES PILOTES À PEARL HARBOR

’attaque surprise du 7 dé-

L cembre 1941 contre Pearl


Harbor est inscrite sur la liste
des batailles célèbres ayant
influé sur le cours de l’his-
toire. De très nombreux ouvrages et
articles lui ont été consacrés, et elle
a inspiré deux fi lms qui, dans une Durant les
immense majorité, s’en tiennent à derniers mois
deux idées maîtresses : en termes de du conflit sino-
japonais, un
savoir faire, l’Aéronavale japonaise
bombardier-
était la meilleure au monde en dé-
torpilleur
cembre 1941 ; Pearl Harbor fut un
Yokosuka B4Y1,
coup terrible pour les Américains, le prédécesseur
presque une catastrophe militaire du Nakajima
dont ils mirent six mois à se remettre, B5N, survole le
période durant laquelle les armées porte-avions
nippones purent s’emparer sans trop Kaga alors que
de difficulté de toutes les possessions celui-ci navigue
occidentales d’Asie du Sud-Est. en mer de
Si la réalité diffère quelque peu Chine orientale.
de ces idées reçues, il n’en demeure Ce conflit fut
pas moins vrai qu’à la fin de l’année un terrain
1941, la Marine impériale était la d’entraînement
seule au monde à posséder un puis- pour les pilotes
sant outil aéronaval spécifiquement japonais ; ils
conçu pour l’offensive : le Kidô- y acquirent
Bûtaï (force mobile) constitué des une précieuse
porte-avions de la 1re flotte aérienne expérience.
DR/COLL. BERNARD BAËZA
(Daï-Ichi Kôkû Kantaï).
scores de neuf bombes au but sur quement et intellectuellement. Pour
Neuf bombes au but neuf piqués n’étaient pas rares… ce qui me concerne, les instructeurs
Au sujet de sa formation, au conclurent que je présentais les qua-
sur neuf piqués… cours de l’année qui précéda l’entrée lités requises pour suivre la forma-
Pour performante que fût l’Aéro- en guerre, Haruo Yoshino, qui prit tion d’observateur et je me retrouvai
navale impériale à la veille du conflit part à l’attaque du 7 décembre 1941 affecté au Kôkûtaï de Suzuka pour
avec les puissances occidentales, un à bord du Nakajima B5N2 “Kate” le stage Teïsatsu Renshûseï (forma-
tiers de ses équipages ne possédait codé “AII-305”, un torpilleur du tion à la reconnaissance) de 10 mois.
aucune expérience du combat. porte-avions Kaga, écrivit dans ses Là, à l’exception du pilotage, j’appris
Malgré cela, et ce même au sein des mémoires : “À l’issue du tronc com- tout ce qu’il était possible de faire en
groupes aériens les plus récents, les mun d’instruction élémentaire, les vol : la navigation, le tir à la mitrail-
jeunes aviateurs étaient encadrés par élèves étaient triés en fonction des leuse orientable, le bombardement,
des “anciens” formés dans le ciel de résultats des tests intellectuels et phy- l’attaque à la torpille, l’usage des
Chine de 1937 à 1941. Car, comme la siques. Au départ, naturellement, fusées éclairantes pour attaque noc-
guerre d’Espagne pour la Luftwaffe tout le monde voulait devenir pilote turne, l’usage des signaux lumineux,
avec la légion Condor, le conflit sino- mais la nature est ainsi faite que tous les transmissions radio, la photogra-
japonais constitua pour la Marine les hommes ne sont pas égaux physi- phie aérienne et l’identification des
impériale un galop d’essai à l’issue
duquel elle disposait de quelque 3 500 Des élèves pilotes
pilotes dont environ 1 000 étaient de l’Aéronavale
qualifiés sur porte-avions. 600 d’entre sur le terrain
d’Oïta (Kyûshû).
eux constituaient l’effectif de la
La formation
1re flotte aérienne. Ces hommes tota-
des aviateurs
lisaient entre 800 et 1 000 heures de
de la Marine
vol chacun. Les plus jeunes en avaient impériale était
500 à leur actif. L’encadrement était plus complète
particulièrement expérimenté. Les et considérée
chefs de groupes (Hikôtaïchô) totali- comme plus
saient 2 0 0 0 heures de vol. sérieuse que
Exceptionnellement, les plus jeunes celle de leurs
étaient admis à ce poste après homologues de
1 500 heures. l’Armée. Les deux
Pour les équipages de bombar- étaient basées
diers en piqué, un tel degré de pro- sur le mode
fessionnalisme se traduisait par un éducatif japonais
pourcentage moyen de coups au but, de l’époque,
sur cibles mouvantes, de 88 %. À extrêmement
l’entraînement, lors d’exercices d’at- rigide…
taque par Chûtaï de neuf avions, des
DR/COLL. BERNARD BAËZA

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Le bombardier
en piqué biplace
embarqué
type 99 Aichi
D3A1 modèle 12
“Val”. C’était
un appareil
moderne et
performant pour
l’époque.
K. KOSEMOTO

Le bombardier-
torpilleur triplace
embarqué type 97
Nakajima B5N2
modèle 12, “Kate”
pour les Alliés. Il
avait remplacé le
B5N1 modèle 11
tout au long de
l’année 1941 et
équipait les six
grands porte-
avions du Kidô-
Bûtaï. Il emportait
des bombes ou
une torpille. NARA

navires par leur profil. Au départ,


j’avais ressenti une certaine frustra-
tion de ne pas apprendre à piloter
mais, à l’issue de ma formation à
Suzuka, j’avais compris que mes Chargement
d’une torpille
camarades et moi avions acquis en
avant un vol
dix mois beaucoup plus de connais-
d’exercice
sances que les élèves-pilotes. Nous
(les torpilles
en étions arrivés à nous moquer d’exercice “Kusui
d’eux en disant qu’ils n’étaient fina- Tôbu” avaient
lement que des “chauffeurs de taxis” les mêmes
qui transportaient les navigateurs- caractéristiques
observateurs, accessoirement mi- que les torpilles
trailleurs-arrière, auxquels revenait opérationnelles
tout le travail crucial. type 91) sur un
La formation de navigateur in- B5N2 type 97.
cluait la lecture des tables gra- C’est sur cette
phiques, des cartes, l’usage de la règle arme que
à calcul, celui du sextant et, parce que reposaient
la Marine impériale privilégiait les les espoirs
actions nocturnes, la navigation à nippons de
l’aide des étoiles. Tout cela faisait du rééditer l’exploit
navigateur-observateur un véritable britannique de
spécialiste, spécialité reconnue par Tarente.
DR/COLL. BERNARD BAËZA
l’accession systématique au corps
des officiers mariniers, qui, pour Gros plan
chaque vol, se retrouvait à charrier des systèmes
un énorme sac réglementaire appelé grâce auxquels
Yôgubukurô dans lequel se trou- fut résolu le
vaient aussi de puissantes jumelles problème que
marines, un pistolet lance-fusées et posait la faible
une caméra ou appareil photo. profondeur de
À l’issue de ce stage, en mars 1940, la rade de Pearl
je fus affecté au Kôkûtaï de Tateyama, Harbor pour
une unité d’instruction intermédiaire l’utilisation
au sein de laquelle les élèves mettaient de torpilles
en pratique, dans le cadre de vols aériennes
réels, tout ce qu’ils avaient appris. type 91
Quatre mois plus tard, mon appren- de 838 kg.
V

DR/COLL. BERNARD BAËZA

49
LA PRÉPARATION DES PILOTES À PEARL HARBOR

Former des équipages


“ d’élite, constitué
punis en même temps. Nous devions
faire un tour de piste en courant
pour les bombardiers horizontaux.
En conséquence, le contre-amiral
autour de l’aérodrome, environ Michitarô Totsuka, chef de la 1re flot-
4 km, en combinaison de vol avec tille aérienne composée des groupes
casque et bottes ! Au bout de 500 m, aériens de l’Akagi et du Kaga, en
d’un pilote et d’un nous étions tous en sueur, même en
plein hiver. Mais, la pire des puni-
conclut lors du débriefing qu’il fallait
se cantonner au lancement de tor-
observateur-bombardier” tions était la privation de repas…” pilles et au bombardement en piqué.
C ette opinion m’inquiéta
Un entraînement quelque peu car, dans le cas de Pearl
tissage terminé, je rejoignis le Kôkûtaï Harbor, si l’attaque par torpilles se
d’Ômura, une unité d’entraînement
spécifique et intensif révélait impossible, il n’y aurait alors
avancé (école d’application) dans les Au sein des 1 re et NARA aaucun moyen de porter
rangs de laquelle je fus promu au e
2 flottilles aériennes aaux cuirassés des coups
grade de maître. Minoru Genda
(porte-avions Akagi, ddécisifs. Heureusement,
Le 18 décembre de la même an- était un fervent Kaga, Sôryû et Hiryû), le ll’état-major de la fl otte
née, j’eus la joie d’apprendre ma partisan de pourcentage de “bleus” ccombinée ne souscrivit
mutation au groupe aérien du porte- l’aviation n’était que de 8 % mais, ppas aux propositions de
avions Kaga. Il s’agissait d’un poste embarquée. C’est même chez les “anciens”, TTotsuka. Il fut décidé
prestigieux auquel je ne m’attendais à lui que revint si certains affichaient de dd’accentuer l’entraîne-
pas. Là, je fus affecté au groupe des la charge de nombreuses heures de vol, mment des équipages et on
avions-torpilleurs type 97 en tant mettre sur pied tous ne possédaient pas ffit appel pour cela au
que navigateur-observateur et, mes l’opération Z. une réelle expérience du llieutenant de vaisseau
chefs étant satisfaits de mon travail, combat. De surcroît, IIzumi Furukawa, un ins-
je me retrouvai un mois plus tard l’opération Z (nom de ttructeur du Kôkûtaï de
chef de bord (Kichô) d’un bombar- Le lv Izumi code de l’attaque de Pearl M ARU YYokosuka. Avec lui arri-
dier triplace type 97.” Furukawa Harbor) revêtait un carac- vvèrent sur l’Akagi le
Quant aux méthodes pédago- alors qu’il était tère très particulier, de mmaître pilote Watanabe
giques, si elles étaient relativement instructeur sorte que l’entraînement eet le maître observateur
normales pour les élèves-officiers, à Yokosuka. des équipages prit, lui AAso, deux officiers-ma-
tel n’était pas le cas des quartiers- aussi, une tournure toute rriniers émérites, eux
maîtres et matelots appelés à accé- particulière comme le ra- aaussi instructeurs à
der, par la suite, au corps des offi- content les mémoires du YYokosuka. La précision
ciers-mariniers. Pour eux, les capitaine de frégate oobtenue lors des bom-
méthodes d’apprentissage étaient (cf) Minoru Genda bbardements horizontaux
typiquement japonaises, autrement – membre de l’état-major eeffectués par ces hommes
dit brutales, comme le stipulent les L’Akagi et son de la 1re flotte aérienne, il nnous fit immédiatement
mémoires de Tokuji Iizuka, qui ter- escorte dont était considéré comme le cchanger d’avis sur ce
mina sa formation en 1940, à temps faisait partie concepteur du plan Z : “Au cours des mode d’attaque.
pour prendre part à l’attaque de le cuirassé manœuvres qui avaient eu lieu en Le premier essai effectué le
Pearl Harbor aux commandes du Kirishima sont mars 1941, les attaques aériennes 23 avril au sud de Kyûshû, sur le
Aichi D3A1 type 99 codé “AI-206” : vus ici dans contre des navires-cibles s’étaient tra- bateau-cible Settsu – en mouvement
“Si je faisais une erreur à l’atterris- la baie duites par un taux de coups au but de – donna quatre bombes au but pour
de Sukumo,
sage, non seulement je recevais un presque 100 % pour les avions-torpil- neuf bombardiers évoluant à 3 000 m
au sud de
bon coup de poing dans la figure, leurs, de 60 % pour les bombardiers d’altitude. Le même jour, les deu-
Shikoku, le
mais tous mes camarades étaient en piqué, mais de seulement 10 % xième et troisième essais donnèrent
MARU
27 mars 1939.
constitué d’un pilote et d’un observa-
teur-bombardier [le rôle du radio-
mitrailleur arrière était moins cru-
Le chasseur cial, NdA]. Vers le milieu de l’année
embarqué type 1941, sous la direction du
“Zero” Mitsubishi lv Furukawa, commença le rassem-
A6M2b blement des meilleurs équipages de
modèle 21 était bombardement de la 1re flotte aé-
ce qui se faisait rienne et je participai personnelle-
de mieux en 1941 ment à leur sélection…”
dans le domaine
de la chasse Décollages et atterrissages
embarquée.
Y. IZAWA de l’aube au crépuscule
Le lv Izumi Furukawa prit alors
Le lv Zenji Abe
le chemin de Kagoshima avec 16
du groupe de
équipages des 1re, 2e et 4e divisions
bombardement
en piqué de
de porte-avions – à la mi-1941, l’idée
l’Akagi ici, en d’utiliser le petit Ryûjô comme cin-
janvier 1942 quième porte-avions n’avait toujours
sur le terrain pas été écartée – qu’il astreignit à un
d’Iwakuni. entraînement des plus intenses. En
Il participa à peu de temps, ces équipages déjà
l’attaque de Pearl considérés comme les meilleurs de
Harbor à laquelle leurs unités respectives acquirent le
il prit part avec la statut d’équipages d’élite appelés à
seconde vague, jouer les “experts”.
aux commandes Cette formation spécifique ter-
du D3A1 type 99 minée, Furukawa prit ensuite en
codé AI-210. main tous les autres pilotes de bom-
Auparavant, bardement horizontal de la 1re flotte
il s’était entraîné aérienne pour les soumettre à un
à Tomitaka. entraînement intensif car le temps
Z. ABE
commençait à presser. Alors que le
respectivement trois et cinq bombes projectiles n’étaient autres que des règlement prévoyait pour les pilotes
au but. Ces résultats démontraient obus de 406 mm, habituellement uti- Le Nakajima à l’instruction un maximum de cinq
qu’il serait possible de bombarder en lisés par les cuirassés Nagato et B5N2 codé décollages et atterrissages par demi-
palier les navires ancrés à Pearl Mutsu, spécialement modifiés. BI-323 en journée, Furukawa passa outre et
Harbor, en cas d’impossibilité d’uti- Le cours spécial qui avait débuté octobre 1941, obligea ses élèves à décoller et atter-
liser des avions-torpilleurs. La en mai 1939 sur la base aéronavale sur le terrain rir sans interruption de l’aube au
bombe de 250 kg, habituellement de Yokosuka, avait initialement pour d’Izumi, était crépuscule et à s’alimenter en vol
utilisée par les bombardiers en piqué, but l’entraînement au bombarde- un bombardier grâce à des boîtes de rations. Les
horizontal
ne permettait pas de percer le blin- ment des équipages des escadrilles premiers qui commirent l’erreur de
du Sôryû et
dage des cuirassés. En revanche, la de reconnaissance. Par la suite, le se plaindre de la fatigue se virent
n’avait pas
bombe perforante de 800 kg pouvait cycle d’instruction fut modifié afin infliger deux heures de vol supplé-
encore reçu son
causer des dégâts fatals. Ces gros de former des équipages d’élite, camouflage.
mentaires… et de nuit. V
DR/COLL. BERNARD BAËZA

51
LA PRÉPARATION DES PILOTES À PEARL HARBOR

L’expérience “Furukawa” donna


de tels résultats que le commande-
ment fit appel, en septembre, à un
autre instructeur chevronné du
Kôkûtaï de Yokosuka, le capitaine
de corvette (cc) Takashige Egusa
pour prendre en main l’entraînement
de tous les bombardiers en piqué de
la 1re flotte aérienne. Pour des rai-
sons pratiques, ceux de la 1re flottille
aérienne s’installèrent Tomitaka, sur
la côte Est de Kyûshû, et ceux de la
2e flottille à Kasanohara, sur la côte
Sud. À cette occasion, l’état-major
général affecta officiellement Egusa
au poste de commandant du groupe
aérien (Hikôtaïchô) du Sôryû.
À propos de l’entraînement des
équipages de bombardement en pi-
qué, les mémoires de Shinsaku
Yamakawa (futur pilote du D3A1
codé “AII-256”), alors fraîchement
affecté au groupe aérien du Kaga,
nous disent : “La Marine japonaise La rade de
parlait de bombardement en piqué Pearl Harbor la Marine par la ville de Konoïke, tait toujours en 2010, NdA] derrière
dès lors que l’angle de descente excé- avait été transformé en aérodrome, qui devint lequel s’ouvrait la baie. Sur bâbord,
dait 45°. En pratique, nous effec- reproduite à notre base d’entraînement. Dès lors, il y avait une grosse citerne d’eau
tuions nos attaques entre 55 et 65° échelle réduite nous volâmes nuit et jour, encore et douce qui matérialisait le lieu du
dans la partie finale du piqué [il était mais de encore. Pour chaque vol, nous décol- largage de la torpille. Il fallait alors
de 70° pour les SBD-3 “Dauntless” la manière la lions de notre terrain herbeux, cap survoler la mer entre 20 et 30 m, ce
de l’US Navy, NdA] et nous lancions plus réaliste sur la baie de Sakurajima au centre qui n’avait plus rien à voir avec l’alti-
nos bombes à 800 m d’altitude. possible par de laquelle se trouvait le volcan épo- tude réglementaire de 90 m à la-
L’entraînement auquel nous fûmes les Japonais. nyme. Après être montés à 2 000 m, quelle nous étions habitués.
soumis à Tomitaka nous permit de nous virions de 180° à l’approche du D’ailleurs l’altimètre ne servait plus
descendre jusqu’à 400 m, soit l’ultime volcan pour foncer droit sur une à rien et il fallait se fier à notre vue,
limite de sécurité pour le bombardier Le Mitsubishi petite montagne du nom de exercice d’autant plus périlleux qu’il
type 99 sur lequel nous volions. Alors A6M2b codé Shirohama qui, elle, surplombait fallait voler lentement, à moins de
que le pilote se concentrait sur la visée, AI-156 ici Kagoshima. Peu avant de l’atteindre, 150 nœuds [278 km/h]… Notre cible
l’observateur, dans le poste arrière, se arrimé sur le il fallait virer encore et amorcer une était alors distante de 500 m. C’était
concentrait sur l’altimètre et annon- pont d’envol descente en cercles jusqu’à 500 m deux groupes de bouées avec des
çait l’altitude. Au moment précis où de l’Akagi, puis mettre le cap sur Kagoshima en drapeaux qui représentaient l’avant
l’observateur annonçait “400 m”, le dans la baie descendant jusqu’à 40 m, l’altitude et l’arrière d’un navire ennemi et
pilote actionnait la poignée de largage d’Hitokappu, à laquelle nous survolions la ville nous lancions des torpilles d’exer-
prit part à
et tirait immédiatement de toutes ses jusqu’à sauter littéralement un bâti- cice récupérables (Kusui Tôbu).
l’attaque avec
forces sur le manche à balai. Nous ment-usine de cinq étages [l’entre- Nous nous demandions tous
la première
subissions alors une pression terrible, prise Yamagata Hyakkaten qui exis- pourquoi on nous obligeait à des-
vague.
de l’ordre de 6 ou 6,5 g. Nous avions
l’impression que la tête nous rentrait
dans les épaules puis des points
rouges masquaient notre vue avant le
black-out… Au moment où nous re-
prenions connaissance, l’avion était
rarement à plus de 20 m du sol. C’était
terriblement risqué mais, de cette
manière, nous étions quasiment sûrs
d’atteindre la cible à tous les coups…”
Celui des torpilleurs nous est
rapporté par les mémoires d’Haruô
Yoshino : “En septembre 1941, je
n’avais pas la moindre idée du fait
que nous allions attaquer Hawaii.
Les torpilleurs de l’Akagi et du Kaga
(1re flottille aérienne) se virent attri-
buer comme zone d’entraînement la
baie de Sakurajima en raison de sa
ressemblance avec la rade de Pearl
Harbor mais, cela, je ne l’appris que
plus tard. Nous gagnâmes alors un
champ de courses hippiques offert à
Y. IZAWA

52
NARA DR/COLL. BERNARD BAËZA
Le carré
cendre si bas et à voler lentement. des officiers un rôle de Shômeï-taï [unité d’éclai- et à la plus basse vitesse possible.
Nous savions, par expérience, que supérieurs de rage] et, en coordination avec les J’appris par la suite, de la part de
dans une baie peu profonde, les tor- l’Akagi dans “attaquants”, lançaient des fusées techniciens armuriers, que les ailettes
pilles ne servaient à rien car, lar- la soirée du éclairantes pour leur permettre de servaient à stabiliser la torpille en vol
guées à l’altitude réglementaire, 24 novembre localiser la cible et de viser. Pour mais aussi à lui donner la plus faible
elles devaient, en raison de leur 1941. Seul d’évidentes raisons de sécurité, les inclinaison possible vers l’avant,
poids, s’enfoncer de quelque 45 m est identifié exercices d’attaque de nuit se faisaient celle tout juste nécessaire pour lui
sous l’eau avant de remonter à la le cf Mitsuo à l’altitude de 90 ou 100 m au lieu des éviter de rebondir à la surface de
bonne profondeur d’attaque. Sans Fuchida, à 20 ou 30 m auxquels nous volions en l’eau. Ensuite, le choc d’entrée dans
une profondeur suffi sante pour ne l’extrême journée. Le moment le plus délicat l’eau provoquait l’arrachement de
pas toucher le fond et sans une cer- gauche, qui était celui de l’extinction de la fusée l’empennage en bois et, à 10 m de
taine distance entre le lieu du lar- regarde éclairante qui perturbait la vision du profondeur tout au plus, il en résul-
gage et la cible, nécessaire pour l’objectif. pilote et lui faisait souvent perdre de tait le départ de la course sous l’eau
permettre à la torpille de remonter vue l’horizon. Nous perdîmes ainsi d’une torpille quasiment à l’horizon-
à la bonne profondeur d’attaque, un appareil qui toucha l’eau et se tal qui remontait rapidement à la
celle-ci risquait soit de se planter désintégra, provoquant la mort des bonne profondeur d’attaque…
dans la vase du fond, soit de passer trois hommes d’équipage. Notre période de vols terminée,
sous la cible sans la toucher. nous fûmes transférés sur la base de
Carte détaillée
Mais, le plus angoissant était les
de Pearl Harbor
Des torpilles Tomitaka où nous retrouvâmes nos
vols de nuit. Pour leurs besoins, deux camarades des bombardiers en pi-
appareils survolaient la baie de
remise aux perfectionnées qué dont c’était la base d’entraîne-
équipages
Kagoshima à 900 m d’altitude dans nippons. Nous découvrîmes, à l’issue de ment. Là, nous bénéficiâmes de trois
cette phase d’entraînement poussé, jours de repos que nous passâmes
comment nos chefs avaient résolu ces dans les restaurants et les bars de la
deux problèmes. Dès 1937, le ville. Puis, ce fut le retour à bord du
cc Haruo Haruta et le lv Makoto Kaga pour y apprendre que nos ap-
Kodaïra de l’arsenal de Yokosuka pareils devaient recevoir un camou-
avaient travaillé à l’amélioration de flage “vert foncé”. Personnellement,
la torpille type 91. Leurs travaux, j’en fus contrarié car j’avais pris
associés à d’autres, avaient abouti à pour habitude de bien polir le revê-
l’adoption d’ailettes latérales stabili- tement en aluminium du mien pour
satrices et à la fixation d’un empen- réduire la résistance à l’air. La pein-
nage en bois sur les ailettes de queue ture du camouflage ne faisait pas que
d’origine pour stabiliser la trajectoire contrarier cette habitude, elle alour-
du projectile dans les airs et limiter dissait l’avion. De surcroît, certains
sa profondeur d’immersion à une appareils, heureusement ce ne fut
dizaine de mètres seulement. Ce sys- pas le cas du mien, reçurent un ca-
tème avait été perfectionné au point mouflage peint hâtivement, un mé-
de réellement pouvoir contrôler lange de taches apposées un peu
l’angle de trajectoire d’une torpille n’importe comment, au hasard. Je
entre le moment de son largage et son découvris par la suite, qu’il en avait
entrée dans l’eau. Et, c’est pour da- été de même sur d’autres porte-
vantage simplifier les calculs avions et que ces camouflages
d’angles, qu’il était nécessaire de lar- avaient été apposés selon le gré des
guer à la plus faible altitude possible chefs d’unités. À cette époque, il
V

US NAVY NATIONAL MUSEUM OF NAVAL AVIATION

53
LA PRÉPARATION DES PILOTES À PEARL HARBOR

n’existait aucun camoufl age régle-


mentaire pour l’aviation embarquée.
“ Je m’oppose à ce que plus qu’une partie du personnel vo-
lant n’arriva qu’à la mi-octobre.
C’est quelque chose qui n’intervint
que bien plus tard dans le conflit.
(…) Concernant notre opération,
la radio soit utilisée, nous Comme les autres, ses bombardiers-
torpilleurs opérèrent depuis
Kagoshima. En revanche, ses bom-
nous apprîmes quelques jours plus
tard qu’en cas de guerre, une déclara-
devrons mourir en silence bardiers en piqué allèrent s’entraîner
à Usa et ses bombardiers horizon-
tion préalable serait adressée aux
Américains et que pour cette raison, si le moteur s’arrête ” taux furent basés à Oïta alors que
ceux des 1re et 2e divisions opéraient
une réaction de leur chasse était pré- respectivement depuis les terrains de
visible. Cela ne constituait pas un Harbor étaient très différentes de Miyataka et d’Ômura.
problème majeur pour nos propres c el les renc ont rées pa r les Preuve que les équipages de la
chasseurs, appelés à opérer en altitude Britanniques à Tarente et cela, les 5e division étaient d’un niveau infé-
comme les bombardiers en piqué, et, principaux intéressés le savaient. rieur aux autres, à la fi n du mois
de fait, ils conservèrent leur aspect L’a t t a q u e d e N ARA dd’octobre, leurs
gris clair “aluminium”. À l’inverse, le Le cf Mitsuo Tarente fut présen- eexerc ic e s no c -
danger était plus grand pour nos Fuchida que tée aux Japonais tturnes d’attaque à
avions-torpilleurs, appelés à opérer l’état-major dans ses détails lla tor pi l le su r
lentement et à basse altitude au-des- général de la lors d’une confé- ccibles fi xes se tra-
Marine rappela
sus de la jungle d’Hawaii. Tous les rence qui se tint à duisaient en
sur l’Akagi pour
équipages de torpilleurs en prirent Kagosh i ma le mmoyenne par trois
lui confier le
conscience et finirent par admettre le 23 octobre 1941 et oou quatre coups au
commandement
bien-fondé du camouflage.” du groupe aérien
à laquelle assis- bbut pour 10 tor-
et, au-delà, celui
tèrent le cf Mitsuo ppilles lancées. Au
Un intérêt certain de la première F uch id a et le mmême moment, la
cc Shigeharu Mu- ggrande majorité
pour l’opération Tarente vague d’assaut
rata, les hommes ddes torpilleurs des
chargée “d’ouvrir
Pendant un temps, l’emploi des le bal” à Pearl en charge de l’en- 1re et 2 e divisions
torpilles posa effectivement un pro- Harbor. traî nement des aavaient atteint un
blème aux concepteurs de l’opéra- torpilleurs. Elle fut nniveau de maîtrise
tion Z, mais la solution fut apportée, donnée par deux qqui leur permettait
comme cela est dit dans les mémoires officiers de retour d’Allemagne, de descendre à 15 m des flots à la
d’Haruo Yoshino, par le recours à dont le cc Takeshi Naïtô. En tant vitesse de 185 km/h pour larguer
l’invention des ingénieurs de l’arse- qu’attaché de l’Air à Berlin, Naïtô leur torpille et de faire mouche avec
nal de Yokosuka, une idée vieille de avait eu le loisir de se rendre à 100 % de réussite. D’autre part,
quatre ans mais jamais testée en Tarente et d’y étudier de visu la si- nombreux étaient les pilotes affec-
condition opérationnelle hormis tuation. Son exposé s’avéra des plus tés à la 5e flottille aérienne qui ve-
l’expérience britannique de Tarente. intéressants pour un Fuchida qui le naient d’unités basées à terre et qui
Contrairement à ce qui a sou- pressa de questions sans toutefois n’étaient pas encore parfaitement à
vent été dit et écrit sur le sujet, l’at- pouvoir lui dévoiler la véritable rai- l’aise sur porte-avions.
taque du port de Tarente en 1940 son de son intérêt pour cette opéra- Après des semaines (et pour cer-
par des avions embarqués de la tion aussi lointaine qu’étrangère. tains des mois) d’entraînement inten-
Fleet Air Arm conforta d’une cer- L’intégration de la 5e division de sif, les aviateurs du Kidô-Bûtaï
taine manière l’idée de l’opéra- porte-avions au Kidô-Bûtaï courant étaient véritablement au “top” de
tion Z mais ne l’inspira pas au sens septembre fit que l’entraînement de leurs capacités. Au total, les acci-
propre. Outre la différence de topo- ses équipages prit du retard sur le dents avaient coûté la vie à 32
graphie, les conditions à Pearl programme général, et ce d’autant hommes (six équipages de B5N2 et
K. TOKIWA

Les six porte-avions qui constituaient le cœur du


Kidô-Bûtaï réunis dans la baie d’Hitokappu. Sur ce
cliché pris depuis l’Akagi, outre les bombardiers en
piqué D3A1 à l’arrière du pont d’envol, on distingue
(de gauche à droite) le Kaga, le Hiryû et le Sôryû.
Dans le lointain, en arrière-plan, à peine visibles,
le Shôkakû et le Zuikakû.
sept équipages de D3A1), mais cela ministère de la Marine, EMGM d’action était trop court, chargèrent
était considéré comme un prix ac- (État-Major général de la Marine) et des fûts de mazout supplémentaires
ceptable et le moral des autres était Flotte combinée. Et, pour faire afin de compenser ce handicap.
au plus haut… bonne mesure, des unités d’instruc- Le 24, le cc Suguru Suzuki, qui
tion avaient immédiatement rem- venait de rentrer d’Oahu, nous fit le
Les détails dévoilés placé les groupes aériens du Kidô- point de la situation afin d’éclaircir
Bûtaï sur les différentes bases de le plan d’attaque. C’est également le
aux officiers navigants Kyûshû où leurs appareils s’étaient 24 au matin que les amiraux et offi-
Le 2 novembre, à bord de l’Akagi entraînés au cours des dernières se- ciers supérieurs, rassemblés sur
ancré dans la baie d’Ariake, l’ami- maines, ce afin d’y maintenir la l’Akagi, reçurent de l’am. Nagumo
ral Yamamoto réunit tous les offi- même importante activité aérienne… les dernières instructions et les ordres
ciers navigants de la 1re flotte aé- L’ordre de départ du Kidô-Bûtaï d’opérations. Dans l’après-midi, les
rienne pour leur dévoiler les détails tomba le 26 à 8 heures, et les bâti- commandants d’unités se réunirent
de l’opération Z et leur présenter ments quittèrent Hitokappu, cap à pour coordonner leurs actions.
l’objectif sur une ma- DR/C . B
OLL B
ERNARD AËZA
ll’est, afi n de lon- Pour assurer le succès des avions-
quette de grande gger le 40e parallèle Le 30 août 1939, torpilleurs, dont l’action était pri-
taille. Les jours sui- nnord. La météo, l’am. Isorokû mordiale, on décida des dispositions
vants, l’Akagi et le eexécrable jusque- Yamamoto que devraient prendre les différentes
fut nommé
Kaga rallièrent Sasebo llà, s’était amélio- formations selon que l’attaque puisse
commandant en
tandis que le Sôryû et rrée et, profitant s’effectuer par surprise ou en force.
chef de la flotte
le Hiryû ralliaient dd’une mer apai- En cas d’attaque par surprise, les
combinée (Rengô
Kure pour avitailler et ssée, l’esc ad re Kantaï).
torpilleurs attaqueraient d’abord les
y prendre en charge les aadopta immédia- cuirassés américains et, tout de suite
torpilles spécialement ttement son régime après, les autres formations pour-
mod i f iées et les dde croisière éco- raient attaquer leurs objectifs respec-
bombes perforantes nomique de tifs sans gêne mutuelle.
de 800 kg. 14 nœuds Le Grand En cas d’attaque en force, les
Le 17 au soir, les ((26 km/h). Rapi- Quartier chasseurs devraient d’abord s’assu-
navires commencèrent d e m e nt , l’ î l e général rer la maîtrise du ciel pour ouvrir le
à quitter leurs bases dd’Etorofu dispa- impérial auquel passage aux formations d’attaque.
respectives pour, indi- r ut d a n s le s siégeaient, Ensuite, les bombardiers horizon-
viduellement et de nuit, se diriger brumes derrière les navires à bord autour de taux pilonneraient la flotte tandis que
vers l’archipel septentrional des desquels tous, et plus particulière- l’empereur, les bombardiers en piqué attaque-
Kouriles, et plus particulièrement ment les aviateurs de la 1re flotte les quatre raient les positions de DCA de l’île
l’île d’Etorofu dont la baie d’Hito- aérienne, étaient conscients d’aller à principaux Ford. Profitant alors de la dispersion
kappu / Tankan avait été choisie pour la rencontre de leur destin… responsables des tirs antiaériens, les torpilleurs
être la base de départ de l’opéra- de l’Armée pourraient passer à l’attaque. C’était
tion Z. Pour donner le change aux Préserver le secret (à droite) et le plan que j’avais établi avec le
services de renseignements améri- de la Marine, cf Fuchida. Cependant, je craignais
cains, les indicatifs radio des porte-
à tout prix parmi lesquels qu’en cas d’attaque en force, et ce
avions continuaient d’émettre depuis Sur la phase finale des prépara- les amiraux quel que soit le sens du vent, les fu-
Kure où avaient débarqué les habi- tifs, Minoru Genda écrivit encore : Isorokû mées provoquées par les avions en-
tuels opérateurs radio dont la “signa- “Entre le 22 et le 24 novembre, fi n Yamamoto, nemis en feu sur l’île Ford et sur
et Osami
ture” était reconnaissable pour des prêts, les bâtiments rejoignirent sépa- Hickam-Field ne viennent considé-
Nagano, chef
spécialistes. Pour leurrer l’ennemi, rément, afin de préserver le secret, la rablement gêner l’attaque à la tor-
d’état-major
ils entretenaient un trafic radio régu- baie d’Hitokappu. Les porte-avions pille. Malheureusement, il n’y avait
de la Marine
lier avec les différents états-majors : Akagi, Sôryû et Hiryû dont le rayon aucune parade à cela.
V
DR/COLL. BERNARD BAËZA
impériale.

55
LA PRÉPARATION DES PILOTES À PEARL HARBOR

Le cc Kanjirô Ono, responsable Personne à terre ne nous vit partir.


des communications du Kidô- Quelques bombardiers terrestres 97
Bûtaï, vint nous donner les instruc- [Mitsubishi G3M2 “Nell”, NdA] du
tions concernant l’utilisation de la Kôkûtaï de Kisarazu vinrent jouer
radio et des codes qui devraient être pour nous les éclaireurs mais bien-
utilisés. Ainsi, “To-Ra” devait signi- tôt ils durent nous quitter en battant
fi er le succès de l’attaque par sur- des ailes pour nous signifi er une
prise. “Jusqu’au début de l’attaque”, bonne chance.”
nous dit Ono, “le silence radio le Également présent, le lv Yoshio
plus scrupuleux devra être respecté, Shiga, “patron” des chasseurs du
sauf en cas d’imprévu ou d’amerris- Kaga, raconta après guerre : “Notre
sage forcé suite à une panne de mo- porte-avions, le Kaga, fut le dernier
teur.” A cela, le lv Takehiko Chihaya à se joindre, en baie de Tankan, aux
s’opposa catégoriquement en ces autres bâtiments de l’escadre char-
termes : “Pour un raid d’une telle gée d’attaquer Pearl Harbor et qui
importance, je m’oppose à ce que la comprenait 33 navires aux ordres
radio soit utilisée, et ce quelle qu’en du vice-amiral Nagumo. Le pay-
soit la raison”, et, s’adressant à l’as- sage de fi n d’automne était sombre
sistance : “nous devrons mourir en et oppressant. Les collines arides
silence si le moteur s’arrête.” Sa pro- étaient saupoudrées de neige et pi-
position fut adoptée H. M ATSUMURA qquetées de rares Le lv Hirata mer favorable dans le Pacifique
à l’unanimité. aarbrisseaux noirs. Matsumura nord et la présence des porte-avions
Durant cette réu- TTout baignait dans prit part à ennemis en rade de Pearl Harbor.
nion, le vent se leva lle silence à ce l’opération Z en Le 26 novembre, sous un ciel de
et la mer devint si mmouillage secret. tant que leader plomb, nous appareillâmes discrète-
agitée qu’il fut im- DDepuis les passe- des torpilleurs ment et personne ne vit sortir l’es-
possible aux visi- rrelles, on ne voyait du Hiryû. cadre. En doublant les caps qui fer-
teurs de rejoindre ppersonne sur les maient la baie, tous les navires
leurs bords respec- ccôtes. À bord de Les torpilleurs tirèrent à munitions réelles. C’était
tifs. Tous restèrent l ’A kag i , n avi re du Kaga avant pour tester le bon fonctionnement
donc pour la nuit à aamiral, il y eut plu- l’attaque de des canons et pour également signi-
bord de l’Akagi. Et, ssieurs conférences Pearl Harbor. fier aux équipages que les dés étaient
bien sûr, toute la nuit concernant la Seuls sont jetés et que nous allions combattre.”
nous fêtâmes la pro- gguerre à venir. Des identifiés le La vision des officiers-mariniers
chaine attaque…” oordre s détaillé s lv Kazuyoshi nous est donnée comme suit par
Parmi les offi- ffurent établis par Kitajima (3e en Haruô Yoshino : “Nous quittâmes
ciers présents à cette lles of f iciers de partant de la Saeki [Kyûshû] et après que nous
dernière réunion, se trouvait le l’état-major, contenant des plans g. au 2e rang), eûmes doublé l’île de Shikoku, nous
lv Hirata Matsumura, le “patron” des remarquablement précis de Pearl le pm Haruo apprîmes que le navire se dirigeait
torpilleurs du Hiryû dont les mé- Harbor. Le cc Suzuki qui en reve- Yoshino (2e en vers la baie d’Hitokappu sur l’île
moires nous disent : nait nous donna les derniers éclair- partant de la g. d’Etorofu [aujourd’hui Iturup,
“À bord du Hiryû, il y avait en- cissements. Avec des ordres précis au 3e rang) et NdA] pour y rejoindre les autres
core un grand nombre d’ouvriers ci- et des cartes parfaitement rensei- le pm Takeshi porte-avions de l’escadre destinée à
Maeda (3e en
vils de l’arsenal de Sasebo. Ils conti- gnées, nous étions prêts. Nous sou- frapper la flotte américaine du
partant de la g.
nuèrent à travailler jour et nuit pour haitions trois choses : la conserva- Pacifique. Ce fut pour nous une
au quatrième
mettre au point le navire. tion du secret le plus absolu, une grande nouvelle ! Je n’éprouvais per-
rang).
Le 24 novembre, une nouvelle H. YOSHINO

conférence se tint à bord de l’Akagi.


Cette fois, l’am. Nagumo, comman-
dant la Force mobile, nous donna ses
derniers ordres. C’était l’ultime brie-
fing avant l’attaque et les respon-
sables aux divers niveaux commen-
tèrent les moindres détails. En
dernier, le cc Suzuki de l’État-Major
général de Tokyo nous donna les
derniers renseignements sur la flotte
américaine autour de Pearl Harbor.
Il rentrait d’un voyage à Hawaii et
c’était donc un témoin oculaire ré-
cent qui nous parlait.
Vers le soir, la mer grossit, empê-
chant la circulation des canots et
nous dûmes passer la nuit sur le
vaisseau amiral. Ce fut heureux car
nous pûmes ainsi approfondir nos
connaissances sur nos rôles respec-
tifs. Le 26 novembre à l’aube, la
Force mobile appareilla vers l’est.
56
HORNE
VINCENT D

Le Nakajima B5N2 modèle 12 du groupe aérien du Hiryû, porteur de marquages jaunes de Bûntaïchô
(chef d’escadron). Il était piloté par le lv Hirata Matsumura, “patron” des torpilleurs du porte-avions.

sonnellement aucune haine envers sion les axes d’approche et les en- convaincus que l’ennemi nous atten-
les États-Unis, mais je savais quand droits où se trouvaient les navires qui drait. Toutefois, notre principale
même qu’ils étaient en train de pous- nous étaient assignés comme cibles. crainte était de ne pas pouvoir at-
ser le Japon à la guerre de par leurs Il ne nous parla pas des cibles attri- teindre la distance de lancement de
prises de position. On nous précisa buées aux autres groupes aériens. nos torpilles, crainte que je parta-
également que l’escadre pourrait être En route vers (…) À l’issue de ce briefing, geais avec mon ami le maître Takeshi
appelée à faire demi-tour sur ordre Pearl Harbor via beaucoup d’entre nous pensaient Maeda qui, comme moi, devait sur-
du QG de la Marine, et ce jusqu’à la le Pacifique nord, que cette mission serait sans retour. vivre au conflit avec le grade d’en-
dernière minute. Nous étions majoritairement seigne de vaisseau…”

V
le Kaga
À Hitokappu, les aviateurs (à gauche)
furent envoyés par petits groupes à et le Zuikakû vus
bord de l’Akagi pour d’ultimes brie- depuis l’Akagi,
fings dirigés par le cf Minoru Genda. alors qu’ils
À l’aide d’une règle et d’une grande tanguent sur une
maquette d’Oahu, Genda nous dé- forte mer avec
tailla les routes d’attaque et nous visibilité limitée.
désigna les cibles principales. Ma
cible était n’importe lequel des cui- La route nord
rassés ancrés dans “Battleship Row” suivie par le
[l’“allée des cuirassés” : le regrou- Kidô-Bûtaï du
pement des cuirassés de l’US Navy 26 novembre
dans le port de Pearl Harbor, au 8 décembre
1941 à 1 h 30,
NDLR]. La maquette devait faire 6
heure de
ou 8 m2 . Elle était donc parfaitement
Tokyo, soit le 7
claire et détaillée. Cela permit à
à 6 h 00, heure
Genda de nous montrer avec préci- d’Hawaii. DR/COLL. BERNARD BAËZA
FRANÇOIS HERBET o s e
s e t i e n n
d e s A l é o u
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Ch.
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La Marine impériale japonaise


des
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attaque Pearl Harbor
Volcans de l'Em

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de

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Changchun Vladivostok
Sapporo Nitok
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Nitokappu (7
7 décembre
dé 1941)
266 nno
novembre
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1941 à 06 h 00
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3 décembre 1941
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Mer du Japon Aomori Ravitaillement
1er décembre
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1941
2 décembre
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déce
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1941 décembre 1941
4 décembre
JAPON
COREE
Sendai
O c é a n
pe

Inchon Tomioka
reu

Fukui Utsunomiya décembre 19


5 décembre 1941
Tokyo Kasumigauro
Nagoya
Yokohama
P a c i f i q u e
r

Kòbe
Saga Numazu
Tobata
Sasebo Kure Okayama
Osaka Hamamatsu décemb 1941
6 décembre
Nagazaki
Mer
de Chine
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N o r d d embre 1941
déce
7 décembre
Orientale
Amami-Oshima re
Kure
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TR O PIQ UE D U C ANC E R
Minamitori-shima wa TR O PIQ U E D U C AN C ER
ii
(Île Marcus)
0 Nautiques 300 600 900 57
Wake Pearl Harbor
bor
LA PRÉPARATION DES PILOTES À PEARL HARBOR

Très vite, la mer devint grosse et


houleuse ; un épais brouillard s’ins-
talla que le vent ne parvenait pas à
dissiper. Les destroyers semblaient Le Kaga, au
plonger puis surgir des vagues tant premier plan, et
ils tanguaient. La situation était telle l’Akagi, dans le
que le cf Gishirô Miura, officier de lointain, sont vus
depuis le Zuikakû
navigation de l’Akagi, pourtant
en route vers
connu dans toute la Marine impé-
Pearl Harbor via
riale pour sa jovialité, demeurait
le Pacifique nord.
sombre et tendu sur la passerelle du
navire amiral. Exceptionnellement,
DR/COLL. BERNARD BAËZA
il avait enfilé une paire de souliers
réglementaires au lieu des pantoufles tées – équipage sauf. De fait, la tarô Omori, sur le croiseur léger
qu’il portait d’habitude, fantaisie que 5 e flottille aérienne fut tenue à Abukuma, était fort occupé à faire
tolérait la hiérarchie. l’écart de ces missions risquées maintenir à leur poste ses frêles des-
tout le reste du voyage. troyers qui dansaient frénétiquement
“Gravissez Un jour, le second maître Tatsuo sur la mer déchaînée.
Itazu, observateur sur un D3A1 Preuve que de nombreux autres
le mont Niitaka 1208” (BII-207) du Hiryû, fut témoin de hommes étaient inquiets quant à
Le 28 novembre, on essaya de se l’appontage brutal d’un autre bom- leur avenir, le m. Shintarô Hasegawa,
ravitailler en mer, mais les éléments bardier en piqué au cours duquel une un des mécaniciens attachés aux
étaient tellement déchaînés qu’on y Affiche du film des deux bombes de 60 kg qu’il trans- avions- torpilleurs de l’Akagi, ra-
renonça. 48 heures plus tard, on américain Tora ! portait sous voiluree conta après guerre :
cont
retenta l’opération avec plus de suc- Tora ! Tora ! se décrocha et “J’étais persuadé qu’il
“J’ét
cès, mais de nombreux fûts d’es- produit en 1970. glissa sur toute la s’agissait d’une mission
s’agi
sence embarqués en surplus sur le Ce titre résultait longueur du pont. sans retour et que nous
Hiryû se détachèrent et s’éven- d’une erreur Heu reu sement, allions tous y rester.
alli
trèrent en roulant sur le pont que le de traduction elle n’explosa pas J’avais donc décidé de
J’av
mazout transforma temporaire- commise après la mais déclencha un dépenser ma solde au
dép
ment en patinoire. Le roulis et le guerre et reprise mouvement de pa- bar et au magasin du
tangage étaient un réel problème en boucle depuis nique sur le pont. navire, en cigarettes, en
na
pour les patrouilles aériennes anti- lors. Le véritable L e voyage see alcools et en friandises.
alc
sous-marines tant ils rendaient dif- mot code n’était poursuivit dans un n “À quoi bon garder de
ficiles et risqués les décollages et, pas “Tora” qui silence absolu et les es l’argent sur moi”, me
l’a
plus encore, les appontages. signifie “Tigre” opérateurs radio à disais-je ? Quand on
d
Durant les premiers jours, les en Japonais, l’écoute des stations ns meurt on ne l’amène
m
avions rentrant de patrouille re- mais “To-Ra”, américaines ne déce- ce- pas avec soi…”
p
çurent pour consigne de se débar- deux syllabes lèrent rien qui laissât
sât B AËZA
Le 1er décembre,
/C . B
OLL ERNARD
rasser de leurs bombes avant d’ap- en morse tirées supposer que l’opéra- ra- DR le Kidô-Bûtaï fr franchit la ligne inter-
ponter conformément aux règles de de la procédure tion ait pu être éventée. Mais nationale de changement de date et,
sécurité en vigueur. Mais, preuve radio codée de la l’am. Nagumo n’en était pas moins le lendemain, Nagumo reçut le mes-
que les moyens de la Marine impé- Marine impériale. inquiet, et il avait de bonnes raisons sage fatidique : “Niitaka Yama
riale étaient limités et que le Kidô- de l’être. Si les cuirassés et les croi- Nobore 120 8” (“Gravissez le
Bûtaï était parti en guerre avec le seurs lourds du v/ am. Gunichi mont Niitaka 1208). Le dimanche
minimum vital, ce problème qui se Mikawa ne paraissaient pas trop 7 décembre 1941, les pilotes japonais
posait tous les jours amena le com- souffrir de la tempête, le c/ am. Sen- passaient à l’attaque. Q
mandement à considérer, et ce à K. OSUO

juste titre, que l’on gaspillait inuti- L’ultime briefing


lement de précieux projectiles. Il le 6 décembre
en résulta très vite pour les avia- sur le Kaga par
teurs l’ordre de conserver les le lv Kazuyoshi
Kitajima. À noter
bombes et de rentrer avec elles. Se
le schéma de la
poser sur des ponts étroits, mou-
rade de Pearl
vants et détrempés ne laissait aux
Harbor, avec
pilotes aucune marge d’erreur et le la position des
Zuikakû perdit ainsi un D3A1 dont cuirassés et les
le pilote préféra amerrir après plu- axes d’attaque.
sieurs tentatives d’appontage ra-

“ J’étais persuadé qu’il


s’agissait d’une mission
sans retour et que nous
allions tous y rester ”
58
BIOGRAPHIE

PIERRE GRANDBESANÇON

États-Unis. Il leur a fallu déchan-


Quatrième partie. Aux premiers jours de l’attaque ter… Regroupées à Calais-Marck
allemande le 10 mai 1940, le GC II/8, sévèrement avec ses “nouveaux” Potez, l’AC1 et
son unité jumelle l’AC2, venue de
touché, doit assurer sa protection et la couverture Marignane, seront regroupées en
mars pour former la flottille F1C qui
des forces franco-britanniques engagées dans opérera jusqu’au printemps aux cô-
le plan Dyle, contre-offensive visant à stopper tés des Bloch du GC II/8 sous le com-
mandement du cc Jozan.
l’invasion des Pays-Bas et du Nord de la Belgique. Dès la mi-janvier, trois pilotes
de la 3e escadrille des Requin, aux
Par Bernard Bombeau, avec Jean Grandbesançon ordres du lt Poiré, ont été détachés
à Buc, en région parisienne, pour se
i-janvier 1940, la 3e es- entre Calais-Marck et Cherbourg- familiariser avec le MB.152 qui

M cadrille du GC II/8
perçoit ses premiers
Bloch MB.152 et ré-
trocède ses Po. 631 à
l’escadrille AC1, une formation de
chasse de l’Aéronautique navale qui,
depuis novembre, fait la navette
Querqueville dans l’attente de pou-
voir échanger ses antiques
Dewoitine 376 contre des chasseurs
modernes. Les marins espéraient
toucher des monoplaces Morane-
Saulnier 406 français ou des
Grumman G-36 commandés aux
équipe depuis octobre le GC II/1,
premier groupe de chasse à en avoir
été doté. De retour à Marck avec
trois premiers avions, ils servent de
“préformateurs” au reste de l’esca-
drille dont les pilotes, après six à
huit heures de prise en main, vont
60
Le pilote de chasse Pierre Grandbesançon - 1934-1942
La Luftwaffe passe
à l’offensive

Immobile dans les dernières neiges


de l’hiver 1939-1940, ce MB.152
compte au nombre des premiers
appareils réceptionnés avec
des moteurs à large ouverture
de capot Gnome et Rhône 14N-25
de 870 ch qui donneront bien
des soucis aux mécaniciens.

un à un réceptionner à l’Entrepôt
EAA-301 de Châteaudun (Eure-et- Une formation de Heinkel 111H
Loire) leurs nouvelles montures de la 7/KG 1 Hindenburg en route
assemblées, non loin de là, à l’usine vers son objectif.
SNCASO de Châteauroux-Déols
(Indre). Quel changement ! Le
MB.152 s’avère d’emblée d’un pilo-
tage “agréable”. Bien que sa charge
alaire soit assez élevée, il reste ma-
niable, grimpe bien et vire serré
sans tendance au décrochage.
Toutefois, la manœuvre de renver-
sement est fortement déconseillée
en combat aérien avec le risque
avéré à basse altitude d’un départ
en vrille. Son armement puissant
– deux canons HS-404 de 20 mm
(chargeurs de 60 obus) et deux mi-
trailleuses MAC-1934 de 7,5 mm
(chargeurs de 500 cartouches) en
voilure – est supérieur à celui de la
V

BUNDESARCHIV

61
PIERRE GRANDBESANÇON - 1934-1942

plupart des chasseurs de son


époque. Mais les pilotes s’en aper-
cevront vite, cette “artillerie
lourde” n’est pas exempte de dé-
fauts : les canons se désynchro-
nisent, s’enrayent fréquemment et
gèlent à haute altitude.

Le MB.152
montre ses limites
Plus grave encore, comme beau-
coup d’appareils français des an-
nées 1930, le point faible du MB.152
DR/COLL. ARDHAN VIA R. FEUILLOY
réside dans sa motorisation. Les Avec l’arrivée
premières machines qui arrivent en Marck, février est un véritable cal- des Bloch, les ment, permettent aux jeunes de se
unités sont dotées du Gnome et vaire. La température chute. Entre Po. 631 sont perfectionner.”
Rhône 14N-25 développant à peine deux tempêtes de neige, le terrain transférés à la L e Bloch 152 montre aussi ses
1 000 ch aux altitudes d’utilisation. se transforme en bourbier empê- flottille F1C de limites : en montée, le badin oscille
La mise au point, l’intégration et le chant toute activité opérationnelle l’Aéronautique entre 170 km/h et 200 km/h ; en pa-
refroidissement de ce moteur en à l’exception de quelques vols d’en- navale. lier, il atteint difficilement les
étoile (refroidissement par air) traînement sur la dizaine de Bloch Le requin sera 480 km/h. Son moteur s’avère exces-
laissent à désirer. Les remèdes aux réceptionnés dont les moteurs re- conservé par sivement gourmand, réduisant son
problèmes sont lents et erratiques fusent fréquemment de démarrer. les marins. rayon d’action à moins de 500 km
au fil des sous-versions qui peinent Pierre Grandbesançon a touché le Les Potez pour à peine 1 h 30 min de vol en ré-
à sortir des ateliers du motoriste. sien. En tant qu’avion du chef d’es- ne sont pas gime de croisière économique et
Tant sur les propulseurs que sur les cadrille, il porte le numéro “1” peint de première moins d’une heure à la puissance de
mécanismes d’armement, les méca- sur la dérive. Son mécanicien atti- jeunesse, combat. Qui plus est, sa conduite
niciens vont devoir bricoler. Le tré, le sgt/c. Willy Welghe, ne mé- comme n’est pas des plus aisée du fait de la
lt Grandbesançon s’en agace : nage pas ses efforts pour le mainte- en témoigne multitude de commandes, de cadrans
“Notre groupe commence à toucher nir en état de vol. Les conditions le n° 62 dont et de servitudes réparties dans tout
des Bloch 152 à moteur 14N-25, puis météorologiques s’améliorent aux le gouvernail l’habitacle : “Il faut avoir les mains
N-49 ordinaire, puis N-49 modifié, premiers jours de mars. Les pa- gauche a été d’un Bouddha et les yeux d’un escar-
puis N-49 “réchauffé”, puis N-49 trouilles d’alerte et les missions cannibalisé sur got”, ironise Pierre Grandbesançon ,
le Po. 631 n° 21.
transformé, etc. Les pilotes qui vont d’interception reprennent en quête “l’appareil est une usine où on a
à Châteaudun chercher les appareils d’un adversaire inabordable. Pierre l’impression que l’ordre d’impor-
sont à l’affût des derniers perfection- Grandbesançon raconte : “Malgré
nements, mais ils sont un peu décou- des calculs extraordinaires pour
ragés car, à leur atterrissage à Marck, prévoir les intentions de l’ennemi,
on leur apprend quelques fois que
depuis leur départ de Châteaudun un
les décollages sur alerte et les pa-
trouilles a priori aux altitudes les
Où aller ? Où va-t-on
“retrouver son unité ?
nouveau Bloch particulièrement plus variées se succèdent et toujours
retaillé vient de sortir.” RAS… Nous ne voyons en l’air
Aux tracas des moteurs (1)
s’ajoute une pénurie d’hélices à pas
aucun ennemi, sauf parfois sous
forme de fumées blanches inacces- Peut-être des amis sont
variable qui oblige parfois de livrer sibles. Néanmoins, tous ces vols,
l’avion avec une hélice en bois dite
“de convoyage” ! Les carences sont
augmentés de séances d’entraîne- déjà morts ? ”
également récurrentes pour les ra-
Pilotes et mécanos affrontent les dures vicissitudes
dios, les trains d’atterrissage ou les
de l’hiver 1940. Avec leurs manteaux de cuir Mercier,
collimateurs que les équipementiers
les navigants sont les mieux lotis.
ne parviennent pas à produire au
rythme de sortie des cellules. Rares
sont encore les Bloch 152 qui, en ce
début d’année 1940, arrivent en
unité entièrement équipés !
Jusqu’en juin 1940, il subsistera tou-
jours une dramatique absence de
synchronisation entre la fabrication
des avions et celle des équipements
(lire Le Fana de l’Aviation n° 590).
Sur le Nord de la France, le
temps se dégrade encore. À Calais-

(1) Les problèmes de refroidissement


seront en partie aplanis sur les
GR 14N-49 de 1 100 ch (puissance
maximale) grâce à une amélioration
de la prise d’air et un capot moteur
modifié.
PIERRE GRANDBESANÇON

62
En janvier 1940,
la 3e escadrille
du GC II/8
réceptionne à
Calais-Marck ses
premiers Bloch
MB.152.
Au second plan,
le Potez 631 du
chef d’escadrille,
le cne Grand-
besançon

PIERRE GRANDBESANÇON
Aux côtés
tance des installations a été l’ordre de cet MB.152
chronologique des fournisseurs. Le du GC II/8,
fabricant des circuits d’air et d’huile l’arrière d’un
a obtenu une belle concession dans Bloch MB.131 de
le tableau de bord. Il y a immédiate- reconnaissance
ment casé quatre manomètres d’un encore
intérêt très relatif”. Cette complexité utilisé pour
fait toutefois du MB.152 un chasseur l’entraînement
robuste, entièrement métallique, au par le GR I/35
blindage efficace mais qui, tout au en cours
long de la bataille de France, restera d’équipement
handicapé par le manque de re- sur Po. 63/11.
PIERRE GRANDBESANÇON
changes qui restreint la disponibilité.
mandes se font plus nombreuses et çaises. La guerre commence. Les
Une activité aérienne laissent entrevoir ce que tous subo- officiers sont rappelés. Un télé-
dorent ; une offensive au printemps. gramme me le confirme. Le train de
prémonitoire À la mi-avril, la plupart des permis- Paris est bondé. Plus il file vers le
Courant avril, le GR I/35, qui sions sont supprimées puis, peu à Nord, plus les conversations de-
partageait le terrain avec le GC II/8 peu rétablies. Pierre Grandbesançon viennent graves. Le soleil fait ou-
et les escadrilles de l’Aéronautique est promu le 15 mars “à titre défi ni- blier tant de choses ! Où aller ? Où
navale, déménage avec ses Po. 63/11 tif” au rang de capitaine. Début va-t-on retrouver son unité ? Peut-
pour se mettre au service de la mai, il bénéficie d’une permission être des amis sont déjà morts ? Le
VIIe armée terrestre à Saint-Omer. pour rejoindre sa famille en journal m’apprend que Calais a été
La 4e escadrille du GC II/8 entame Provence. L’attaque allemande le bombardé ainsi que tous les terrains
à son tour sa transformation sur surprend au matin du vendredi du Nord. Que vais-je et qui vais-je
Bloch 152. Le groupe, au complet, 10 mai 1940 au cours d’une pêche retrouver ?”
assure depuis Marck deux à trois au harpon sur l’île Verte, au large Gare du Nord, le 11 mai : “Les
missions quotidiennes d’alerte et de de la Ciotat. Sur un cahier d’écolier, trains qui arrivent sont remplis de
protection. De jour en jour, sur les il note : “Retour à midi. La radio a femmes, d’enfants, de bagages hâti-
lignes de front figées depuis l’au- annoncé l’entrée des Allemands en vement faits. Quelle tristesse ! Ceux
tomne 1939, l’activité aérienne aug- Belgique et en Hollande, le bombar- qui partent sont pleins de jeunes
mente. Les reconnaissances alle- dement de terrains et de villes fran- Belges chantant et gesticulant.
V

Un Bloch 152
du GC II/8.
Des cocardes
de grandes
dimensions
sont apposées
sur le fuselage
et les ailes.
La verrière du
cockpit semble
ne pas avoir
résisté au choc
et/ou au froid.

DR

63
PIERRE GRANDBESANÇON - 1934-1942

Beaucoup ont des uniformes. Les Aux commandes


pompons rouges de leurs bonnets ont du MB.152. Sur
un gros succès (…) Le train va de plus la planche de
en plus lentement. Enfin, Calais. Il bord principale :
fait beau. Un magnifique soleil brille. à gauche,
Les sous-lieutenants Poiré, Jaquemet l’anémomètre
et Sagon m’attendent. Ils me ra- d’atterrissage ;
content tout…”. au centre,
l’indicateur de
Premières bombes, vol ; à droite,
le compas de
premiers morts type Vion.
Au matin du 10 mai, la 3e esca- Surplombant le
drille est en alerte avec deux Bloch tout, l’imposant
prêt à décoller aux ordres du collimateur Baille-
Lemaire prolongé
s / lt D utey- H a r i sp e et du
par un long tube
sgt/c. Honorat. Il est 3 h 30, il fait
de visée
encore nuit, le terrain de Marck est
et une mire.
noyé dans la brume quand soudain,
SHD
sans qu’aucune alerte n’ait été trans-
mise, le ciel s’emplit du vrombisse-
ment caractéristique de bombardiers
qui, par groupes de trois à quatre,
tentent de repérer le terrain dans
l’obscurité. Les premiers tirs de En piteux état,
DCA se font entendre. Le doute le MB.152 n° 393
n’est plus permis… L’ordre de décol- est un des six
lage est donné par le cc Jozan, “pa- appareils du
tron” de la F1C. Le sgt/c. Honorat GC II/8 détruits
est le premier à enjamber le cockpit ou gravement
de son avion dont les mécaniciens endommagés
ont déjà lancé le moteur. au sol par
Les premières bombes pleuvent les bombes
sur l’aérodrome alors que se dé- allemandes
tachent à basse altitude les sil- le 10 mai.
houettes de bombardiers allemands Il sera ferraillé.
DR/FAMILLE GRANDBESANÇON
Heinkel 111. À l’est, l’aube com-
mence à poindre. Le Bloch d’Hono- L’heure bombes. Chacun croit que c’est un
rat roule et disparaît dans la brume des comptes cauchemar, mais hélas il y a ces gros
et la fumée des explosions. Les trous, ces avions percés comme des
mécaniciens s’affairent sur les Dans ses mémoires, Grand- écumoires et surtout ce sang…”
Bloch du s/lt Dutey-Harispe et de besançon écrit : “Pauvre 3e esca- Le terrain de Calais-Marck, aux
l’ajd. Curthelet dont les moteurs drille. Aucun avion n’est indemne. contours bien repérables, délimité
refusent obstinément de démarrer. Le mien a reçu trois balles. Trois au sud et à l’ouest par un grand ca-
Les témoins racontent : “L’avion de autres sont irrémédiablement per- nal et des fossés de drainage, n’a pas
Curthelet ne veut pas partir. Le chef dus. Le souffle d’une bombe a recro- échappé aux reconnaissances alle-
de hangar, l’ajd. Lageat, va lui- quevillé le train d’un appareil, à mandes menées durant l’hiver. Une
même essayer de mettre en route. Il moitié affalé comme un homme quarantaine de bombes – principa-
Les dernières
monte dans l’appareil. Curthelet est blessé à mort. Honorat s’est bagarré lement de 50 kg – ont fait d’impor-
neiges ont fondu.
près de lui, debout sur l’aile. Le sol- Les Requin
avec une douzaine de Heinkel. Il tants dégâts et endommagé l’unique
dat Galliay, près de l’hélice, tente de partagent encore
revient, les chargeurs vides, se poser hangar à avions édifié quelques
lancer le moteur à la manivelle. Une leurs maigres comme un chef, en pleine brume. Il mois plus tôt. Sur les 19 appareils du
bombe explose. Curthelet est projeté installations avec en a probablement descendu un. GC II/8 (pour une dotation nor-
à 10 m, indemne mais hébété. les équipages Enfin, la brume se lève, la brise dis- male de 26 !), trois ont été détruits,
Quand la fumée se dissipe, les per- du GR I/35 dont sipe l’épaisse fumée noire des trois sont gravement endommagés
sonnels, les pieds dans l’eau, collés les Po. 63/11 ne
PIERRE GRANDBESANÇON

sur le bord d’une tranchée de drai- vont pas tarder


nage, voient Lageat arriver en titu- à déménager
bant. Il s’écroule. Deux énormes de Calais-Marck
éclats ont traversé la tôle et pénétré à Saint-Omer-
la chair. Galliay ne réapparaît pas : Wizerne au profit
son corps sans vie gît sous l’aile de de la VIIe armée
l’avion. Les Heinkel effectuent une terrestre.
deuxième passe et attaquent à la On mesure sur
mitrailleuse. Le sgt/c. Mege, méca- ce cliché le degré
nicien, a sa veste de cuir traversée d’improvisation
par une balle. Lui n’a rien”. Peu à à la veille
peu, le bruit des moteurs s’estompe. de l’offensive
“Enfin, ils s’en vont…” allemande…

64
Avec l’arrivée
du printemps,
la Luftwaffe
reprend ses
reconnaissances
aériennes le long
des côtes de la
Manche et de
la mer du Nord.
Bien que d’un
modèle “ancien”,
ce He 111E du
KG 1 peut voler
à 430 km/h,
soit une vitesse à
peine inférieure
à celle de
la plupart
des chasseurs
français.
ECPAD
DR/FAMILLE GRANDBESANÇON

À l’issue de l’attaque et sept autres pourront être réparés


allemande du 10 mai sur Calais- sur place avec les maigres rechanges
Marck, ce MB.152 des Requin disponibles. La 3e escadrille, Ce He 111 du
porte les traces des éclats qui regroupée à l’est du terrain, a payé KG 27 a été
tuèrent l’adj. Lageat qui avait le plus lourd tribut. Seule consola- contraint de se
tenté de lancer le moteur. tion, Honorat est parvenu à inter- poser le 10 mai
cepter un des Heinkel 111 et sur la plage
l’a contraint à se poser sur la plage de Nieuport
de Nieupor t, en Belg ique. victime
L’homologation sera partagée avec du MS.406 du
le sgt Durand lancé à la poursuite sgt Durand
du bombardier depuis sa base de (GC III/1) et du
Norrent-Fontes, dans le Pas-de- Bloch 152 du
Calais, aux commandes d’un sgt/c. Honorat.
Cette victoire
Morane 406 du GC III/1. L’équipage
partagée est
allemand est fait prisonnier.
la première
C’est la première victoire offi-
des Requin de
cielle de la 3e escadrille. Mais à quel
V

DR/ COLL. FAMILLE GRANDBESANÇON


la 3e escadrille.
PIERRE GRANDBESANÇON - 1934-1942

prix ? Le reste de la journée est


consacré à la réparation des dégâts Les Messerschmitt
“sont très nombreux
reils, le casque de fer sur la tête, le
casque de vol à la main, prêts à dé-
et, avec l’aide des compagnies de l’Air coller. Mais des messages annoncent
attachées au terrain, au rebouchage que les Curtiss H-75 du GC I/4 les
des nombreux cratères. Par chance, ont accrochés au passage et en ont
aucun des 20 Po. 631 de la Marine,
stationnés à l’autre extrémité du ter-
et nous sommes des descendu cinq (2). Les autres ont
fait demi-tour”. Avec peu d’avions,
rain, n’a été détruit. Quatre d’entre
eux, menés par le cdt Jozan (unique- chasseurs chassés ” la 3e escadrille ne fournit ce 11 mai
que quelques patrouilles simples (à
ment revêtu d’une robe de chambre deux appareils) incapables d’enga-
sur son pyjama !) sont parvenus à Po. 631 dont on ne donnait pas cher ger de puissantes formations.
décoller durant l’attaque. Trois ont des qualités guerrières… Mais les ordres sont les ordres.
engagé les Heinkel, sans succès. Samedi 11 mai 1940. Levé très Nouveau venu à la “3”, le s/lt Dutey-
L’ev Jacoubet a reposé le sien criblé tôt, Pierre Grandbesançon se re- Harispe en témoigne : “Nous de-
de balles… Outre les MB.152, on cueille sur le corpss du vons assurer, de l’aul’aube à la nuit, la
déplore également la perte au sol soldat Galliay et protection d’un poi point sensible en
d’un antique Breguet 27 d’une sec- rend visite à l’hôpital
tal Belgique. Le nombre d’avions (dis-
tion du service météorologique à l’adj. Lageat. ponibles) ne permet que q de disposer
(SPM.2) du s/ lt Ducastel. Le Requin de “Il souffre de patrouilles simples,
simp ce qui est
Très vite, on se réorganise. Le la 3e escadrille comme un damné. é. Il dérisoire. Heureuse
Heureusement, de gros
cdt de Ponton d’Amécourt, chef du hérité de me reconnaît, mais ais je cumulus nous permettent
perm de nous
GC II/8, a alerté l’état-major : en l’Aéronautique suis si ému que je ne “planquer” quand nous sommes
début d’après-midi, un Bloch navale. peux rien lui dire. e. Ses trop attaqués. Les Messerschmitt
MB.220 réquisitionné parvient à se yeux agrandis regardent
gardent plus sont très nomb
nombreux et nous
poser et embarque dix pilotes qui, du côté de la mortt que du côté de somm
sommes vraiment
dès le lendemain, ramèneront de la vie [il décédera de ses blessures d
des chasseurs
Châteaudun dix MB.152 flambant le 27 mai 1940, NdA]. J’arrive au DR cchassés. À ce
neufs à moteurs 14 N-49 “réchauf- terrain à 5 heures. Alerte ! 45 bom
bom- jeu
jeu, je perd
perds très vite mon
fés”. En dépit de ses blessures, le bardiers allemands Dornier 17 sont
terrain de Calais-Marck demeure signalés à Lille faisant route au (2) Ce chiffre de cinq avions abattus
opérationnel. Deux patrouilles nord-ouest. Tous les pilotes de la semble plutôt correspondre à
l’ensemble des victoires revendiquées
simples de la F1C ont pris l’air en fin 3e escadrille, debout depuis 3 heures par les Curtiss français pour la journée
de matinée pour escorter des hydra- du matin, sautent dans leurs appa- du 11 mai.
vions-torpilleurs Latécoère 298
partis bombarder l’embouchure de
l’Escaut. Au cours de cette mission, Les pilotes du GC II/8, chaudement
un trimoteur de transport Ju 52 est emmitouflés dans leurs combinaisons de vol.
intercepté par l’ev Philippe de
Scitivaux et probablement abattu.
Blessé par les tirs du mitrailleur
arrière, Scitivaux parvient cepen-
dant à ramener son Potez. Pour lui,
la bataille de France est terminée.
Il rejoindra l’Angleterre dès juil-
let 1940, combattra dans la RAF et
prendra en 1942 le commandement
du Squadron 340 Île-de-France.

“Les bombes sifflent, 18


tombent sur le terrain”
Pierre Grandbesançon reprend
son récit : “Le soir, à 9 heures, la
nuit vient de tomber. Chacun rentre,
l’esprit lourd de pensées. Soudain,
à nouveau, un bruit sourd. Les re-
voilà ? Les bombes sifflent, 18
tombent sur le terrain, deux seule-
ment explosent…” Les Allemands
sont revenus à la tombée de la nuit.
Mais deux Po. 631, de retour de
patrouille, ont réussi à les intercep-
ter. Les maîtres-pilotes Andrès et
Maulandi prennent un des He 111
sous leurs feux croisés. L’avion alle-
mand disparaît en mer au large du
village des Hemmes. C’est la deu-
xième victoire de la journée pour la PIERRE GRANDBESANÇON
F1C. Un succès inespéré pour des
66
équipier qui ne peut me suivre. La page est parvenu à se parachuter près Handicapés par
patrouille qui vient me relever m’au- de Bruges. À l’issue d’âpres combats
torise à prendre le chemin du retour sur l’Escaut, les marins regagnent leur rayon d’action
vers Calais et je décide victoires sûres et
Calais avec deux vict Cela fait 48 heures que la Wehr- En médaillon :
de longer la côte à deux probables contre un peloton de macht a lancé son offensive sur les le Chardon
très basse altitude. He 111 et leur
leu escorte de Pays-Bas et le Nord de la Belgique. de Lorraine
À h a u te ur de Messersch m itt Les aérodromes belges et néerlan- de la 4e escadrille
Nieuport, j’aper- Bf 110. Au fil
B dais ont été sévèrement pilonnés et sa devise
de la SPA 38
çois un bombar- des heures, les
d mais les dégâts sont relativement
issus de la
dier allemand qui dix nouveau x peu importants sur la majorité des
Grande Guerre.
se traîne car il doit Bloch 152 du GC II/8 arrivent terrains français. Les plus touchés
être durement tou- DR de Châteaudun. Ils sont répartis entre ont été ceux de l’Aéronautique na-
ché. J’en profite avec mes les Requin de la 3e es
escadrille et les vale dans le Nord et le Nord-Est le
canons pour le tirer de près, et il fait Chardon de la “4”. long du littoral. Les états-majors

V
plouf… Victoire certaine mais qui
ne peut être prise en compte faute de
Le cne Astier,
preuve. Nous n’avions pas à
chef de la
l’époque de mitrailleuses photogra- 2e escadrille du
phiques… [témoignage paru dans GC I/8, embarque
la revue Icare n° 156, NdA].” à bord du
Ce même jour, le GC I/8, l’autre MB.152 n° 545
groupe de la 8e escadre qui opère éga- en fin de
lement sur MB.152 depuis Velaine- matinée
en-Haye, en Meurthe et Moselle, le 10 mai.
perd trois appareils en combat (pour 30 minutes
deux victoires partagées), et déplore plus tard, il
déjà la mort de deux de ses pilotes succombera sous
dont le cne Astier, chef de la 2e esca- les coups de sept
drille, abattu la veille. Guère plus Messerschmitt
chanceux, les Po. 631 de la F1C, for- 109E, non
tement mis à contribution, perdent sans avoir, au
deux des leurs en missions de protec- préalable, abattu
tion de trafic maritime. Un seul équi- un Dornier 17.
SHD

Les pilotes du GC II/8


(septembre 1939-juin 1940)
Groupe état-major :
Cdt Gibbon-Guilhem (arrivé en 1938, parti le 28/01/1940) ; cdt d’Amécourt
(arrivé le 1/11/1939, parti le 1/08/1940) ; cne de Maistre (adjoint du commandant
de groupe, commandant l’échelon roulant).
3e escadrille Le Requin :
Cne Grandbesançon (commandant l’escadrille, arrivé le 1/10/1936, parti
1/09/1941) ; lt Poiré (affecté le 25/6/1940, succédera au cne Grandbesançon) ;
lt Stiquel (muté au GC I/4 le 1/04/1940) ; s/lt Jaquemet ; s/ lt Dutey-Harispe
(arrivé le 15/04/1940 en provenance du GC II/10) ; s/lt Sagon (arrivé le
8/03/1940 en provenance du centre d’instruction à la chasse (CIC) de Chartres) ;
adj./c. Marchais (ex-Aéronavale, évacué le 8/06/1940 pour raison de santé) ;
adj. Curthelet (ex-Aéronavale) ; adj. Nicole (ex-Aéronavale, porté disparu le
8/06/1940, rejoindra l’escadrille fin juin 1940) ; adj. Veyrunes ; sgt/c. Petitjean
(ex-Aéronavale, gravement blessé au combat le 21/05/1940) ; sgt/c. Honorat ;
sgt Dietrich (arrivé le 6/03/1940 en provenance du CIC de Chartres).
4e escadrille Le Chardon
Cne de Vaublanc (commandant d’escadrille, arrivé en 1936, parti le 9/1941) ;
lt Paskiewicz (ou Paskiewitch, pilote polonais arrivé le 23/05/1940, parti
le 19/06/1940) ; s/lt Viaris de Lesegno (officier de tir du groupe, abattu
et fait prisonnier le 23/5/40) ; s/ lt de la Ménardière (gravement blessé et
prisonnier le 24/05/1940 en mission) ; s/lt Mousset (arrivé le 8/03/1940,
blessé accidentellement à l’atterrissage le 27/05/1940) ; s/lt Pelletier (arrivé
le 11/05/1940 du CIC de Chartres) ; s/lt Delocque-Fourcauld ; s/ lt Mir ;
adj./c. Hourcade (muté au groupe aérien d’observation (GAO) 515 le
5/04/1940) ; adj./c. Levavasseur (ex-Aéronavale, muté au CIC de Chartres le
1/04/1940) ; adj. Plesnage (arrivé du CIC de Chartres le 1/05/1940) ; adj. Clerc
(ex-Aéronavale) ; sgt/c. Gaubert ; sgt/c. Roncin (muté au GC I/9 le 15/12/1939) ;
sgt Husson ; sgt Rapinat ; sgt Wünsche (ou Wunch, pilote polonais arrivé
le 23/05/1940, parti le 19/06/1940) ; sgt Nowak (ou Novack, pilote polonais,
arrivé le 23/05/1940, tué accidentellement le 28/05/1940).

67
PIERRE GRANDBESANÇON - 1934-1942

alliés avaient, de longue date, anti-


cipé cette offensive et engagé le
plan Dyle visant à soutenir la résis-
tance belge et néerlandaise dans la
région de Breda, pour la VIIIe ar-
mée, et sur la ligne Louvain, Wavre,
Namur pour le Corps expédition-
naire britannique (BEF) parti de
Dunkerque et de Calais.
Le 12 mai, le plan Dyle est en-
clenché. “Ce 12 mai 1940”, écrit le
cne Grandbesançon, “le réveil
sonne à 3 heures du matin. Toute
l’escadrille est au travail à 3 h 30. Je
vais faire la première patrouille de
protection du terrain de Marck.
Décollage à 4 heures, il fait presque
nuit. Les trous d’obus, hâtivement
rebouchés, se voient mal. Lever du
IWM
jour magnifique. Atterrissage à Des Curtiss
5 h 30 : Rien à Signaler (RAS).” H-75A français Catastrophe, ils ont viré vers l’est des multitudes d’Anglais mais pas
escortent trois pour aller probablement bombarder de boches. Il est canonné par la
“Que de travail pour bombardiers Anvers. Il y a 1 h 10 min que je suis DCA française au retour et dé-
d’assaut Fairey en l’air avec mes six Bloch 152 et clenche une alerte. Il ressort de plus
un groupe mal équipé” “Battle” du nous sommes à 120 km de Marck. en plus que l’embouchure de l’Es-
Deux missions particulières ont Squadron 88 Si je me lance à leur poursuite, je ne caut est le point central de cette
été attribuées aux MB.152 du de la RAF. les rattraperai pas avant 16 minutes énorme agitation aérienne. Les
GC II/8 et aux Po. 631 de la F1C. Une image de et à plein régime. Je serai peut-être Allemands par vingtaines, les
D’une part, protéger les convois qui propagande en panne avant. Il faut faire demi- Anglais par dizaines, les Potez, les
partent de Dunkerque pour débar- prise durant tour. La guigne…” Bloch, les Curtiss, tout cela se
quer des troupes à Flessingue – port la drôle cherche, se surveille, se confond
de commerce néerlandais qui consti- de guerre. “Blenheim”, “Spitfire”, surtout : rien ne ressemble plus à un
tue une position stratégique entre Dans les faits, Po. 63 qu’un Messerschmitt 110. Le
l’Escaut et la mer du Nord – et, Français et “Hurricane”, la corrida ! cdt Jozan en sait quelque chose…
d’autre part, assurer la couverture Britanniques N ouveaux décollages dans (3) La recherche sous cette lumière
aérienne des colonnes qui, sur les partent au l’après-midi du 12 mai. La 4e esca- violente avec ces couches de nuages
routes de Belgique, emmènent les combat avec drille fait deux missions de couver- qui cachent peut-être l’ennemi de-
troupes franco-britanniques à la ren- un manque ture à 13 heures et 18 heures. La “3” mande une tension qui très vite
contre de l’ennemi. “Que de travail criant de en fait une à 15 heures. Pierre épuise. Le personnel est merveilleux
coordination.
pour un groupe mal équipé”, note le Grandbesançon écrit : “La pa- d’entrain et de dévouement. Il n’y a
chef de la 3e escadrille… En fin de trouille triple est commandée par que des volontaires pour toutes les
matinée, celle-ci est de nouveau sol- Dutey-Harispe. Il voit des Anglais, missions. Mais certains com-
licitée pour “une couverture” le long DR/COLL. FAMILLE GRANDBESANÇON

de la côte entre Nieuport et Le s/lt Dutey-


Zeebrugge. Le cne Grandbesançon Harispe
commande une patrouille triple, éta- reconnaissable
à l’écharpe dont
gée en altitude : “RAS pendant
il ne se sépare
1 h 10. Je constate que le bombarde-
jamais. Nouveau
ment du terrain d’Ostende n’a pas
venu aux Requin,
fait de gros dégâts. À 12 h 30 on me il revendique
signale un peloton de 18 Heinkel et le 11 mai une
plusieurs pelotons de 12 autres entre seconde victoire
4 000 m et 8 000 m. Je suis la pa- pour l’escadrille.
trouille basse. J’avise soudain, loin Elle ne lui sera
vers l’est, une quinzaine de points pas homologuée,
noirs qui grossissent. Ils sont sur faute de témoins.
l’Escaut, cap au nord-ouest. Mon
cœur saute dans ma poitrine. Je me
place, ainsi que mes patrouilles, de
manière à pouvoir attaquer soleil
dans le dos. Je suis sorti de mon sec-
teur et, en effet, ma patrouille supé-
rieure, Poiré et Jaquemet, voient des
douteux qui sont en fait des bom-
bardiers Blenheim de la Royal Air
Force (RAF) chargés du secteur d’à
côté. Les autres appareils, identifiés
comme ennemis grossissent mais
sont encore au moins à 10 km.
68
mencent à être fatigués. Ils dorment
Les aviateurs
par terre entre les avions et ne se
français font
couchent réellement que 5 heures
plus ample
par nuit. Il faut qu’on vienne nous connaissance
renforcer. Je crois d’ailleurs que avec un
nous allons partir en Belgique, plus adversaire
près de la bagarre. J’ai eu quelques redoutable, le
tuyaux ce soir : l’armée française a Messerschmitt
rejoint l’armée belge, de grands Bf 109E dont les
combats ont lieu. Dans les airs, c’est plus récentes
plus dur… versions
L’aviation belge n’existait déjà s’avèrent
plus le 10 mai à 9 heures du matin ! supérieures
Tous leurs terrains avaient été bom- à tous les
bardés et les terrains hollandais occu- chasseurs de
pés. Mais, poursuit-il, une fois les l’armée de l’Air
Allemands posés, les Hollandais ont et de la RAF
ouvert le feu détruisant de nombreux engagés dans
appareils et faisant leurs équipages la bataille.
DR
prisonniers. Le chiffre de 100 à 150
avions de la Luftwaffe perdus en tume du coup de la Norvège et qui Les renseignements venus du front
Hollande est exact. Au total, les n’ont plus 1 200 km de mer à traver- laissent à penser que la Wehrmacht
boches ont bien dû perdre 250 avions ser, s’en donnent à cœur joie. n’a pas engagé aux Pays-Bas des ef-
en deux jours (4). C’est cher payé… “Blenheim”, “Spitfire”, “Hurricane”, fectifs très importants. Mais les re-
Mais il y en a encore et il en sort de quelle corrida ! [allusion à la cam- connaissances aériennes observent
partout… Toutefois, le temps tra- pagne de Norvège qui, du fait des des poussées allemandes dans les
vaille pour nous : les équipages et les distances, n’a pas permis à la RAF Ardennes belges sur Arlon,
avions perdus par les Allemands ne d’intervenir efficacement, NdA].” Neufchâteau, Bastogne et, plus in-
se remplaceront pas vite. Les Anglais, quiétant encore, le franchissement
les Anglais surtout, qui ont l’amer- Des réfugiés fuyant de la Semoy à hauteur de Bouillon
en direction de Sedan.
les bombes Sur le terrain de Calais-Marck
(3) Confondus avec les Messerschmitt 110
d’allure similaire, les Po. 63 de chasse et Lundi 13 mai 1940. Pour l’état- on ignore encore la manœuvre alle-
de reconnaissance sont régulièrement pris major, “la situation est confuse”… mande plus au sud de la ligne
à partie par la DCA alliée et subissent Hier encore nos généraux s’interro- La Haye – Liège où se concentrent
fréquemment des tirs fratricides d’avions
français et britanniques. geaient pour savoir si l’offensive alle- encore les combats. L e
(4) La Luftwaffe a effectivement mande dans le Nord de la Belgique cne Grandbesançon note dans son
essuyé de lourdes pertes en avions de et en Hollande avait pour but prin- cahier : “Patrouille de l’aube. RAS.
transport pour la conquête de quelques cipal la conquête des côtes néerlan- Un “Spitfi re” de la RAF, basé en
points stratégiques et d’une poignée daises en vue d’une action ultérieure Angleterre, se pose à 9 heures. Le
d’aérodromes. Sur 430 Ju 52 engagés
aux Pays-Bas et en Belgique, 220 ont été contre l’Angleterre ou la recherche pilote revient de se bagarrer au-des-
d’une bataille décisive en Wallonie. sus de Rotterdam. Toute la ville est
V

détruits ou gravement endommagés.


SHD
Le MB.152 n° 506
du s/ lt Gouachon,
pilote au GC I/8,
forcé de poser
son appareil en
catastrophe après
avoir engagé
le 14 mai
une formation
de Bf 109E et
en avoir abattu
un. Les croix
gammées sur
le fuselage sont
sans doute
l’“œuvre” de
soldats allemands
de passage.

69
PIERRE GRANDBESANÇON - 1934-1942

en flamme. Complètement perdu, à


bout d’essence, se croyant en
Angleterre, il se pose à Marck. Il n’a
La RAF, qui
pas de cartes. Seuls les chefs de
accompagne
patrouille anglais en ont. On lui le corps
dessine la forme du Pas-de-Calais expéditionnaire
sur un bout de papier qu’il emporte britannique,
précieusement.” entre résolument
Ce “Spitfi re” égaré appartenait dans la lutte aux
au Squadron 66 de Duxford. Il reve- premiers jours
nait d’une mission d’escorte dans le de la bataille.
secteur de Dordrecht, en Hollande. À l’image du
“À 11 h 30, départ d’une patrouille Squadron 85
en direction de Zeebrugge conduite basé à Lille-Seclin
par l’adj./c. Marchais en liaison qui accueille le
avec les Potez de la F1C. RAS. À sgt Sammy Allard
15 heures, enterrement du soldat au retour d’un
Galliay. Le corps est déposé dans combat aérien
le caveau de 1914-1918, les anciens victorieux le
combattants ayant voulu que le 10 mai 1940.
IWM
jeune repose parmi leurs morts.
Grande nouvelle : nous quittons le
giron de la Marine (Amiral Nord)
“ (…) il faut tenir partager la plate-forme avec des
détachements de MS.406 des
et sommes rattachés à titre tempo- GC III/1 et GC III/3, plus occasion-
raire au groupement de chasse 25
qui va avoir un rôle très intéressant,
Anvers, on va lancer nellement avec des Curtiss H-75 du
GC I/4. Les Requin et les Chardon
son terrain de travail étant à
Maldegem, à l’est de Bruges, dans
de fortes patrouilles de sont désormais directement imbri-
qués dans le plan Dyle.
Les Flandres. Chacun se couche
tôt, plein d’espoir. Quelle vie bi- chasse, sans arrêt ” Pour la matinée du 14, le pro-
gramme est chargé : en collabora-
zarre tout de même : je suis couché, tion avec le GC III/1, le II/8 reçoit
j’entends les avions de la “4” qui est à la trahison. Il s’interroge : l’ordre de tenir une longue perma-
patrouillent. Ils n’atterriront que “Comment un pays a-t-il pu être nence de couverture dans la région
dans une heure.” ainsi contaminé, pourri ? Le génie Anvers-Lierre. Pour le cne Grand-
D ans l’après-midi, Pierre d’Hitler est diabolique !” besançon, “les missions vraiment
Grandbesançon est allé à Calais. Il sérieuses vont commencer. Premier
a vu les résultats des bombarde- Deux victoires décollage de Marck à 5 heures.
ments des jours précédents et a J’emmène une patrouille triple faire
côtoyé “les Belges et les Hollandais
pour les Chardon la couverture d’un secteur à l’est
fuyant les bombes et les incendies, M ardi 14 mai 1940. La base d’Anvers. Rien dans le ciel sinon un
passant sans arrêt ayant tout aban- principale du GC II/8 demeure groupe de Curtiss dans la région de
donné…” Il retranscrit les propos Calais-Marck. Le terrain de Brecht. Atterrissage à Maldegem au
entendus : “Une lutte intérieure de Maldegem, où est installé le PC du bout de 2 h 10 min de vol. Le
tous les instants contre les parachu- Le “Spitfire” groupement 25 aux ordres du colo- sgt Dietrich tombe en panne d’es-
tistes ; les maisons, foyers nazis du égaré du nel (Air) de Moussac, est une plate- sence sur la piste. Il faut faire les
Squadron 66
temps de paix ; les bateaux remplis forme exiguë, sablonneuse et très pleins en vitesse. Le terrain a été
de Duxford
d’armes camouflés dans les ca- visible du ciel, faisant office de ter- mitraillé le matin et va sûrement être
venu se poser à
naux ; les autobus pris par des rain de ravitaillement aux pa- bombardé. La VIIe armée avait fait
Calais le 13 mai
Allemands, en civil ou déguisés, au retour d’un
trouilles de chasse agissant au profit une avancée magnifi que mais les
fonçant sur la foule (…).” L’heure vol d’escorte.
de la VIIe armée. Le GC II/8 va divisions belges ont lâché devant

PIERRE GRANDBESANÇON

70
dais avec en poche l’adresse de gens
où aller (…) Ils sont des jeunes gens
et des jeunes fi lles de 15 à 18 ans,
jetés de 150 m d’altitude avec un
fusil-mitrailleur chacun et huit jours
de vivres. Certains pleurent et de-
mandent pitié quand on va les fusil-
ler, disant qu’ils ne savaient pas où
on les emmenait”. La propagande
et l’horreur des récits n’ont pas fi ni
d’alimenter la hantise d’une cin-
quième colonne, accréditant les
rumeurs de complots qui se pro-
pagent tant chez les civils que chez
les militaires : “Trahison de la moi-
tié de l’armée hollandaise”, écrit
Pierre Grandbesançon citant
l’exemple de “ce lieutenant arrivé à
17 heures, venant de faire fusiller
son capitaine juste avant de partir”.
DR
Quelques La situation est grave mais pas dé-
Anvers et il faut que nous repassions sera partagée entre les deux pilotes. MS.406 sespérée : “La Hollande est presque
l’Escaut. Comme il faut absolument Isolé après l’accident à Maldegem partagent entièrement perdue et l’attaque est
tenir Anvers, on va lancer sur ce de son coéquipier, le sgt/c. Rapinat, avec les Bloch violente sur la Belgique. Mais tout
secteur de fortes patrouilles de l’adj. Clerc rentre seul sur Calais. En du GC II/8 le ça leur coûte cher…”
chasse, sans arrêt… Une patrouille chemin, il aperçoit à plus basse alti- terrain avancé
triple de la “4” me succède et a plus tude deux He 111. Profitant de de Maldegem “Ils ne sont
de chance : un Heinkel descendu en l’effet de surprise, il surgit du soleil en soutien
allant à Flessingue, un autre en mer et, en une passe, crachant de toutes de l’opération
pas venus”…
en revenant, devant Ostende.” ses armes, abat l’un d’eux qui Dyle. Mercredi 15 mai 1940. “Journée
L’affaire n’avait pourtant pas s’écrase en mer devant Ostende. Le calme. On ne nous a pas demandé
bien débuté… la triple patrouille de II/8 ajoute une troisième victoire… de mission. Deux alertes aux alen-
la “4” commence par perdre un tours de Marck, sans résultat. Toute
avion, celui du sgt/c. Rapinat qui La hantise l’après-midi, des avions anglais sont
rate son décollage de Maldegem. passés sans arrêt vers l’est. Des
Au-dessus d’Anvers, l’activité aé-
d’une cinquième colonne Loire-Nieuport de bombardement
rienne est intense. Les Allemands De retour à Marck, le cne Grand- en piqué aussi avec leurs bombes de
bombardent et mitraillent indiffé- besançon est surpris par “la quan- 500 kg. Ils allaient faire sauter des
remment troupes et civil. La forma- tité d’avions hollandais qui viennent ponts en Hollande. Il est bon pour
tion, conduite par le cne Vaublanc, s’y poser, fuyant l’invasion”. Ces le moral de voir de grosses forma-
pique à travers une couche de appareils néerlandais proviennent tions alliées. Mes types sont fous de
nuages et engage les bombardiers, majoritairement de la base de joie de penser que les fritz vont
laissant la patrouille haute de Flessingue. Interceptés par la pa- prendre des bombes sur la figure…”.
l’adj./c. Mir et du sgt/c. Gaubert aux trouille de protection, ils se sont La formation de Loire-Nieuport
prises avec un He 111 isolé qu’ils posés en tous sens sur le terrain et LN.401 qui survole Marck appar-
finissent par abattre après un violent ses alentours. Il note : “Les officiers tient à l’escadrille AB2 de l’Aéro-
combat au-dessus de l’estuaire de hollandais racontent des choses nautique navale basée à Berck. Elle
l’Escaut. L’appareil allemand dispa- effarantes. Les parachutistes alle- fait route vers les Pays-Bas avec
raît en mer devant Flessingue. La mands surgissent partout dans les pour objectifs des colonnes enne-
victoire – la seconde du GC II/8 – villes, déguisés en soldats hollan- mies près de Yerseke, petit port sur
l’Escaut. Ce même jour, note encore
Loire- Grandbesançon, “le cdt de Roussey,
Nieuport 401 de adjoint au chef du Groupement,
l’escadrille AB2. vient nous dire que la mission de la
Efficaces mais
veille était la plus dure demandée
tragiquement
sur le front. L’état-major s’attendait
sous-motorisés,
à voir une trentaine de bombardiers
les LN.401 et 410
sont les seuls
protégés par une vingtaine de
bombardiers en Messerschmitt 110 et à ne voir ren-
piqué produits trer personne de chez nous ! Ils ne
en France. sont pas venus…” De fait, l’activité
aérienne allemande faiblit dans le
Nord : toutes les îles de la Zélande
sont désormais occupées. L’effort
de la Luftwaffe se porte sur la
Meuse… Le piège tendu aux armées
alliées a fonctionné ! Au soir du
15 mai, les Pays-Bas capitulent. Q
À suivre
DR/COLL. B. BOMBEAU

71
CE JOUR-LÀ… 23 DÉCEMBRE 1991

La cellule est
réduite à sa
plus simple
expression avec
le “K-Max”,
véritable grue
volante.

KAMAN

Premier vol du Kaman “K-Max” a plupart des constructeurs

Petit mais L conçoivent leurs appareils


avec des signes particuliers
qui permettent de les dis-
tinguer immédiatement de
leurs contemporains. Il en est ainsi
de l’Américain Charles Kaman

costaud avec ses hélicoptères à rotors engre-


nants. Le principe est assez simple :
deux rotors parallèles synchroni-
sés tournent en cadence. L’effet
Kaman lance au début des années de couple de chaque rotor annule
celui du rotor opposé qui tourne en
1990 une grue volante qui se distingue sens inverse. Ici pas besoin de rotor
anticouple ; toute la force motrice
immédiatement par sa petite taille est consacrée à la sustentation et la
et ses performances, le “K-Max”. propulsion. Une autre particularité
fait que le pilote contrôle chaque
Par Alexis Rocher pale avec un volet orientable, ce qui
78
Le “K-Max” de proposer une grue volante. En
en action effet l’usage de l’hélicoptère dans
sur un chantier les travaux publics ou le transport de
en Bolivie. charges pondéreuses se généralisait
Il peut soulever à grande vitesse.
près de 2 t
de charge Tout dans
en altitude.
la musculature
Le K-1200 “K-Max” s’articule
autour d’un fuselage effilé sup-
portant les rotors engrenants et la
turbine Lycoming T-53 de 1 500 ch.
Cette dernière propulse aussi le
Bell UH-1 “Huey” ; c’est un moteur
fiable dont les pièces détachées sont
très communes. Rien d’autre sur le
“K-Max”, à part un pilote, 865 l de
kérosène et le crochet pour accro-
cher les charges sous une élingue.
Voici donc un appareil de 2 100 kg à
vide capable d’emporter 2 700 kg au
niveau de la mer, et encore 1 900 kg
à 4 570 m d’altitude. Difficile de
faire mieux comme haltérophile !
Après ses essais en vol, le “K-Max”
fut certifié en 1994.
U ne première série de 38
“K-Max” fut produite de 1994 à
2003. La plupart sont toujours
exploitées aux États-Unis, mais ils
soulèvent aussi des pylônes élec-
triques en Australie, des troncs de
séquoia au Canada ou des pylônes de
remonte-pente dans les Alpes autri-
chiennes. Il est engagé dans des mis-
sions contre les narcotrafiquants en
Colombie et au Pérou. Les forces ar-
mées américaines s’y intéressèrent.
Les Marines demandèrent qu’il soit
transformé en drone pour gagner
encore en charge et en envoyèrent
deux exemplaires sous l’uniforme
en Afghanistan – dénomination offi-
cielle CQ-24A – entre 2011 et 2014.
Le “K-Max” fit office de démonstra-
teur pour un drone de transport aux
troupes en première ligne. Le 5 juin
2013, l’un d’eux s’écrasa, déséquili-
KAMAN
bré par une brusque rafale de vent
permet d’éviter un moyeu central Viêtnam. Seule exception avec son qui fit tourner la charge sous élingue.
complexe à concevoir et à entre- rotor classique, le SH-2 “Seasprite”, L’expérimentation du “K-Max” se
tenir. Kaman produisit plusieurs qui dota l’US Navy. poursuivit toutefois.
hélicoptères reprenant tout ceci À la fin des années 1980, Charles Il faut croire que la petite flotte de
dans les années 1950 et 1960. Le Kaman se lança dans la conception Ce “K-Max” vola “K-Max” civils n’était pas suffisante
HH-43 “Husky” devint familier au d’un nouvel hélicoptère avec l’idée pour Central car sa production en série a repris en
KAMAN
Copters aux 2017 avec une première tranche de
États-Unis, dix exemplaires. Les deux premiers
avec cette partirent pour la Chine dans le rôle
immatriculation, de pompier du ciel – il peut larguer
à partir de 1997. jusqu’à 2 660 l de retardant. Selon
Il fut ensuite Kaman, les utilisateurs de grues
employé par volantes se manifestent toujours,
différents certes pas en grand nombre, mais
opérateurs suffisamment pour poursuivre sa
en Autriche, en construction en série. 30 ans après
Allemagne puis son premier vol, il y a fort à parier
de nouveau que le très original “K-Max” à en-
aux États-Unis. core de beaux jours devant lui. Q

79
MAQUETTES Par Hangar 47

Do 27A-1 des Forces aériennes d’Allemagne en 1977. 1955 est semble-t-il l’année des papillons,
comme pour cette Mercedes 300SL, le Do 27 et un dessinateur tourangeau bien connu…

Les options sont nombreuses (capot et train d’atterrissage par exemple) ;


Dornier 27/Casa C-127 les gouvernes séparées permettent d’animer l’aspect final de la machine.
Le plan d’installation des haubans est clair. La maquette est superbe
Special Hobby, 1/72 mais la délicatesse de certains éléments et la nature même d’un biplan
La première boîte de réservent son montage à des maquettistes expérimentés. Côté décorations
Do 27, sortie il y a le choix est large et coloré ! Un avion aux ailes jaunes et fuselage bleu,
trois ans, concerne un tout rouge, un tout bleu, quatre vert olive égayés de marques colorées
les versions allemande, belge diverses, et trois à base de marron eux aussi bien “customisés”.
et espagnole. La gravure des
surfaces est précise et bien Notre appréciation : très belle maquette, finement détaillée,
appuyée. Pour faciliter le et options de décoration aussi nombreuses que colorées : une bonne
montage, la voilure est intelli- combinaison pour les amateurs de cette période !
gemment découpée de façon à présenter des bords d’attaque et
de fuite monoblocs. La profondeur et la direction, moulées d’une pièce,
ont aussi une épaisseur réaliste. La cabine est bien aménagée ; ses Supermarine “Sea Otter”
quatre grandes portes peuvent rester ouvertes. Le moteur est figuré
par un trompe-l’œil. Une décalcomanie représente les instruments.
Mk I/ASR Mk II
Cette boîte offre trois options de peinture : un avion camouflé vert Special Hobby, 1/72
et gris avec quatre extrémités orange haute visibilité, un second
entièrement vert olive et un dernier alu dessus et bleu dessous. Sortie il y a dix ans
sous la marque Azur,
Notre appréciation : bonne petite maquette pour un sujet original. la maquette bénéficie
d’un nouvel emballage fort bien
illustré, de nouvelles pièces en
Camel and Co. résine et de nouvelles décalco-
Eduard, 1/48 manies. Les surfaces entoilées
sont bien figurées, la gravure
On trouve dans la boîtee des gouvernes un peu trop marquée peut être rectifiée facilement.
de cette édition limitéee Un aménagement basique est fourni pour la cabine, avec tableau de bord
type “Dual Combo”, et harnais photodécoupés. Le moteur, le capot et l’échappement en résine
comme son nom l’indique, sont très réalistes. Certains petits détails sont également prévus en
deux maquettes du “Camel”, résine. Un croquis décrit le haubanage pour les courageux. Le montage
deux plaquettes de métal d’un biplan type série limitée demande soin et méthode, l’emplacement
photodécoupé (tableau de bord des divers mâts est ici juste repéré, sans trous ni plots de fixation.
prépeint), des masques pour Les décalcomanies offrent trois options : camouflage vert, gris
peindre certains éléments, et surtout deux grandes feuilles de décalcomanies et sky pour le danois, jaune uni pour le néerlandais, et gris, gris-vert
regroupant les motifs pour dix choix de décoration. Rappelons le lardage et sky (avec tons éclaircis pour la voilure basse) pour le français.
de l’entoilage finement reproduit sur la voilure, l’étonnante précision du
moulage des petites pièces, en particulier les divers mâts qu’il faudra Notre appréciation : maquette de type série limitée offrant
dégrapper avec le plus grand soin. Poste de pilotage, moteur et armement de belles qualités mais dont le montage demande une bonne
sont, avec le renfort des pièces en métal, très finement reproduits. expérience. Décorations intéressantes et sujet très original.
80
Tachikawa Ki-54 “Hei/Hickory” “Mirage” F1 AZ/CZ SAAF
Spécial Hobby, 1/72 Special Hobby, 1/72
Intéressantee Nouvelle boîte
nouveauté au pour la versionn
profit d’un sud-africaine du
petit bimoteur de F1, et bien entendu dé-
transport peu connu, corations correspondant..
cette maquette de Rappelons le niveau de
type série limitée détail satisfaisant pour
présente de belles le poste de pilotage,
qualités. La gra- les logements de train
vure des surfaces et la tuyère, la gravure
est fine sur le fuselage, un peu moins sur les ailes et nacelles moteurs. un peu molle des surfaces, les bords d’attaque et de fuite bien conçus
L’entoilage des gouvernes est réaliste. L’intrados moulé d’une pièce pour garder une épaisseur réaliste, la verrière moulée en deux éléments
facilite le montage. Le poste de pilotage et la cabine (six sièges) et les deux types de missiles fournis. Un nez différent et quelques
sont très bien aménagés, avec l’aide de décalcomanies pour simuler pièces en résine complètent l’ensemble. Cette fois deux sortes
les instruments de bord et ceintures. Le train est bien reproduit, de réservoirs supplémentaires sont prévus sous le fuselage.
ses logements sont basiques. Les moteurs en trompe-l’œil sont La feuille de décalcomanies comporte de très nombreux et parfois
acceptables. Les feux et phares sont moulés transparents. La porte de minuscules marquages ; elle permet de choisir entre quatre
la cabine peut rester ouverte. L’ensemble des petites pièces est moulé camouflages, deux avions sable et vert, un brun et vert olive,
avec finesse et précision. Les décalcomanies concernent un avion gris et un original en trois tons de gris aux marquages extrêmement discrets.
vert clair uni (repêché dans un lac en 2012 et exposé dans un musée),
et trois autres camouflés de spaghettis vert foncé sur fond gris vert Notre appréciation : nouvelles décorations pour une maquette
clair, l’un portant les croix blanches de “capitulation”. maintenant bien connue.

Notre appréciation : maquette de qualité pour cet original


petit bimoteur de transport. Potez 25 B2 “Polish Jupiter”
Special Hobby, 1/72
P-51D-15-NA “Mustang” Special Hobbyy
“Late Version” et Azur Frrom
se partagent
Revell, 1/32 les différentes versions
de cette maquette déjà
Les 169 analysée dans notre
pièces duu rubrique. La version ici
récent concernée est équipée
P-51 Revell du moteur en étoile
annoncent un “Jupiter”. Rappelons
niveau de détail la bonne conception des ailes moulées d’une pièce pour faciliter le montage
très élevé, plus et garder une épaisseur réaliste, le poste de pilotage biplace bien meublé,
proche de celui les mâts divers bien pensés avec plots de fixation et trous correspondants
du modèle dans les ailes ou le fuselage. Une plaquette photodécoupée reprend divers
Tamiya que de guignols de commande et ferrures. Les camouflages polonais ne sont pas
ce proposaient les très variés : bleu ciel dessous et vert olive foncé dessus.
références plus anciennes. Cette seconde édition concerne les versions
du “Mustang” utilisées à la fin du second conflit mondial. Rappelons Notre appréciation : bonne maquette pour une version originale
d’abord la fine gravure des surfaces qui n’inclut pas le rivetage mais de l’un des biplans les plus construits entre les deux guerres.
bien toutes les vis de fixation des divers panneaux amovibles.
Le poste de pilotage, le radiateur ventral et les logements de train sont
très bien détaillés. Des décalcomanies reprennent les instruments de L’agenda du maquettiste
bord et le harnais (avec une étrange couleur jaune !). Les gouvernes
Ces annonces gratuites sont réservées aux manifestations propres
et volets sont moulés séparés. Le train et ses roues sont fidèlement au maquettisme. Vous pouvez adresser votre texte par courriel à
reproduits. Les options comprennent trois types de verrière, des fanaaviation@editions-lariviere.fr en mentionnant “agenda maquettes”
roquettes, des bombes et deux sortes de réservoirs supplémentaires. dans l’objet. Prenez garde de n’oublier ni la date ni le lieu.
Tout est fourni pour monter facilement un “Mustang” bien détaillé
et fidèle à l’original. Les décalcomanies incluent tous les marquages Lailly-en-Val (45), 5 et 6 février 2022, 2e Salon “Entre Val et Sologne” de la
maquette et de la figurine, salle de la Lisotte, chemin des amandiers, organisé
nécessaires ainsi que les bandes rouges et damiers jaune et vert utiles
par le Maquettes Club Plastique de l’Orléanais (MCPO), et le soutien de la
pour choisir entre deux avions sur base alu (peinture sur les ailes, métal municipalité de Lailly et du Cotec Beaugency. Le samedi de 10 h 00 à 18 h 00,
naturel sur le fuselage et les gouvernes). L’un arbore des bandes jaunes le dimanche de 9 h 00 à 17 h 00 - Rens. Tél. : 06 08 11 58 85 - 06 62 02 90 15
et rouges, l’autre, fort bien illustré sur la boîte, un fuselage et des ou courriel mcpo.maquettes@gmail.com
empennages vert olive. Bissegem-Courtrai (Belgique), 24 avril 2022, 25e Exposition
de maquettisme, concours, bourse d’échange, organisée par IPMS Moorsele,
Notre appréciation : très belle maquette pour un sujet salle Troubadour, Vlaswaagplein 3 à 8510, de 9 h 30 à 17 h 30.
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