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« Wade, l’avocat et le diable » par Souleymane Jules Diop

Souleymane Jules Diop, auteur de « Wade, l’avocat et le diable » « Entre Wade et Idy, il y a
beaucoup de rapports mystiques »

Pavé dans la mare de la campagne électorale ou pamphlet de plus contre Wade et sa famille ?
La biographie du couple présidentielle écrite par Souleymane Jules Diop risque de faire
grand bruit. Et pour cause, son auteur établi actuellement au Canada et qui s’est illustré par
son blog dévastateur contre le président de la République durant l’incarcération de Idrissa
Seck a mené des investigations jusque dans la privée du successeur de Diouf. Jules comme le
surnomment ses intimes revient également sur l’affaire du fonds taïwanais et sur l’assassinat
de Me Sèye pour affirmer que les montants de dédommagement dépassent de très loin ceux
annoncés jusqu’ici. L’ancien conseiller en communication de Idy pense que ce dernier
n’aurait dû jamais renouer avec Wade. L’auteur affirme qu’entre les deux hommes, il y a
beaucoup d’affaires mystiques. Et ne croit pas aux chances de Wade d’être réélu. Entretien

Souleymane Jules Diop, pouvez-vous revenir sur les raisons qui vous ont poussé à écrire une
biographie du président Abdoulaye Wade ?

La décision d’écrire ce livre remonte à très loin, avant l’alternance. En 2000, je m’en étais
ouvert à Me Abdoulaye Wade qui m’avait d’ailleurs encouragé. Il m’avait promis de prendre
toutes les dispositions pour m’aider à accéder à certaines informations. Autant dire donc que
j’ai essayé de faire des investigations très poussées, en partant de l’enfance de Wade jusqu’à
son accession à la magistrature suprême. Souvenez vous qu’il n’y a pas longtemps,
quelqu’un a écrit une biographie de l’homme, en parlant de ses premières amours et cela
n’avait choqué personne.

Vous voulez parler de Cheikh Diallo qui a écrit « Si prés loin si loin avec Wade » ?

Bien sûr. Donc je ne vois pas pourquoi je poserai problèmes en écrivant sur certains aspects
de la vie de Wade.

Que peut-on apprendre de nouveau sur la vie du couple Wade ?

J’ai consacré ce livre à l’homme très complexe qu’est Abdoulaye Wade en qui certains
voient l’avocat des bonnes causes et d’autres, un diable. C’est-à-dire celui qui est accusé de
vol, de détournement et même d’assassinat. J’ai voulu cerner ce personnage qui cristallise
l’ambivalence à tous les égards. Le livre pouvait même s’intituler « l’ange et le démon ».
Vous allez le lire. Il parle de l’enfance de Me Wade, de sa jeunesse, de sa jeunesse et de sa
famille. J’évoque les circonstances dans lesquelles il a rencontré son épouse Viviane Wade.
Parce que la version que le couple donne sur ce domaine n’est pas du tout la bonne. J’ai
poussé mes investigations jusque dans le village natal de Viviane Wade.Un petit village très
pauvre qui se nomme Trépeau et qui ne fait pas plus de 300 habitants. Les gens ont beaucoup
épilogué sur la fortune de ses parents (tous les deux étaient des enseignants). Mais mon livre
permettra aux Sénégalais de découvrir la vérité là-dessus. On a dit que Viviane était une
jeune fille lorsqu’elle a rencontré Wade pour la première fois. Ce qui n’est pas vrai car elle
avait une autre histoire avant de connaître Wade. Le président de la République a aussi connu
une autre histoire avant de connaître Viviane. Mais je trouve que le mérite de la première
dame du Sénégal est d’avoir tout sacrifié à un moment donné pour soutenir son mari.

Il semble qui vous êtes allé très loin en fouillant dans le jardin secret du couple Wade.

Je dois dire que je n’ai pas fouillé dans les poubelles. Quand on écrit la biographie d’une
personne, on est obligé d’en cerner tous les aspects. Je ne dis rien de choquant, je fais juste
un travail d’investigation, d’autant plus que tout ce que je raconte a des incidences certaines
sur la vie de la nation. Aujourd’hui personne n’ignore l’influence que Viviane et ses fils ont
sur la marche du pays. Une influence qui remonte de très loin et qui peut s’expliquer par
l’investissement humain de Viviane sur son mari et sur le Pds. C’est pourquoi d’ailleurs
Viviane revendique aujourd’hui la même légitimité que les militants de la première heure du
Sopi. Elle croit qu’elle est actionnaire au même titre qu’Idrissa Seck et Ousmane Ngom…
Mais encore une fois, je ne suis pas intéressée par la vie privé des gens, je n’ai aucune
intention malveillante contre le couple Wade. Il faut simplement reconnaître que quand un
homme public exerce certaines fonctions, sa vie privée devient intéressante. Loin des
caniveaux, ce livre est le résultat d’une longue enquête, de dix années de prises de notes
assez minutieuses. Prévu pour étaler sur 500 pages, il a finalement été réduit à moins de 300
pages pour que les Sénégalais puissent le lire sans difficultés.

Ne craignez vous pas que votre livre soit censuré comme l’a été celui de Abdoulatif
Coulibaly (Ndlr : « Sénégal, Affaire Me Sèye, Un meurtre sur commande ») ?

Je m’investirai pour que les Sénégalais aient accès à mon livre parce que la censure ne me
paraît pas être une bonne chose…

Après avoir décrit la vie de Wade et de son épouse, j’imagine que vous avez parlé de leurs
fils Karim et Sindiély.

Je parle évidemment des fils Wade. J’évoque leur vie professionnelle. Mais je dois vous dire
que le militantisme et l’engagement de Wade ont eu des incidences sur ses relations avec ses
enfants. C’est un père qui n’a pas eu beaucoup de temps pour s’occuper de sa progéniture. A
certains moments, il a même été très dur avec ses enfants. C’est un comportement hérité de
son père Momar Wade qu’on surnommait « taureau ». Au tout début, Sindiély ne connaissait
pas son père, Karim l’a connu à peine.

Mais pourquoi donc cette omniprésence de sa famille une fois que Me Wade est arrivé au
pouvoir ?

Cela est dû au fait que le président de la République a voulu se racheter. Il a pris de l’âge et a
senti le désir de se rapprocher de sa famille. Je comprends l’invite qu’il a adressée à Karim
Wade, au lendemain de la naissance du fils de ce dernier. C’est comme qui dirait que le
grand père a voulu se rapprocher de ses petits-enfants.

Dans votre livre, vous semblez insinuer que Me Wade a eu des enfants autres que Karim et
Sindiély. Qu’en est-il exactement ?
Sans aucune intention de nuire, je crois que certains aspects de la vie de Wade doivent être
connus du grand public. Karim et Sindély sont les fils officiels. Mais, dans le livre, il y a des
informations qui permettront de découvrir la véritable progéniture de Wade. Ceux qui le
liront apprendront beaucoup sur l’Abdoulaye Wade qu’ils ont connu jusqu’ici.

Vous êtes également revenu sur l’assassinat de Me Sèye

J’ai reproduit le témoignage d’un des enfants de Me Babacar Sèye qui accuse clairement Me
Wade. Car jusqu’ici c’étaient des témoignages indirects. Mais au-delà de cet aspect, je
reviens sur les conditions de dédommagement de la famille de l’ancien vice-président du
Conseil constitutionnel. Les montants qui ont été alloués en toute illégalité dépassent de très
loin ceux qui sont avancés officiellement.

Plus de 200 millions, plus de 600 millions ?

Les montants donnés à la famille de Me Sèye sont au-delà de tout cela. Je ne peux en dire
plus parce que j’ai des contraintes vis-à-vis de ma maison d’édition. Je dois ajouter que la
famille de Me Sèye a été très digne dans cette affaire. Et contrairement à ce que certains
avancent, la demande de dédommagement a été faite bien avant l’alternance. Ce n’est pas
Abdoulaye Wade qui a pris l’initiative de l’indemnisation.

Votre livre revient aussi sur le financement de l’avion présidentiel et sur les six milliards de
Taiwan.

Effectivement. Je suis parti de la réfection de la « Pointe de Samgomar » pour arriver à


l’affaire des milliards de Taiwan. Pour dire qu’il y a eu Taiwan 1 et Taiwan 2. Rappelez-vous
que c’est sous l’impulsion de Me Wade ministre d’Etat dans le gouvernement de Diouf qu’en
1995 le Sénégal a rompu ses relations diplomatiques avec la Chine populaire.

Autrement dit c’est Wade qui est à l’origine de la rupture puis de la normalisation avec
Pékin.

Absolument, j’ai mené des enquêtes pour conclure qu’avec la récente affaire des six milliards
et dans toutes les autres, il y a une histoire d’argent. Je l’ai démontré avec des documents
comme des échanges épistolaires. Je suis revenu sur l’implication de Pierre Aïm et d’autres
personnes proches du chef de l’Etat.

J’image que l’ancien Premier ministre Idrissa Seck dont vous avez été le conseiller en
communication, figure également dans votre livre.

C’est le journaliste d’investigation qui a écrit un livre qui est très critique à l’endroit de
Idrissa Seck

Votre attitude ne trahit-elle pas un retournement contre votre ancien mentor ?

Du tout. Je suis sur mon chemin et je pense que le temps permettra aux gens de comprendre
ma démarche. J’ai collaboré avec Idrissa Seck, c’est un homme qui a beaucoup de mérite.
Mais je n’ai pas manqué d’analyser comment à partir de 1987, il a commencé à prendre le
contrôle du Pds jusqu’à en devenir le numéro 2, c’est-à-dire un homme incontournable dans
le système de l’alternance. Le livre est remis à l’éditeur, il y a deux mois, mais il anticipe sur
ce qui se passe aujourd’hui entre Idrissa Seck et Me Wade. J’ai eu également à expliquer
qu’entre les deux hommes, il y a beaucoup de rapports mystiques. Et je vous promets que les
lecteurs ne seront pas déçus quand ils liront ces choses-là. Car comme vous le savez l’aspect
mystique joue un rôle très important dans nos sociétés. Par ailleurs je pense qu’Idrissa Seck
n’aurait dû jamais faire ce qu’il a fait (Ndlr : en scellant les retrouvailles avec Wade). Je
désapprouve totalement sa façon. Je crois pas qu’il n’a été ni fidèle à sa parole et ni sincère
avec lui-même. L’ancien Pm a surpris et déçu beaucoup de gens.

Vous considérez comme un réfugié politique ou comme quelqu’un qui craint pour sa vie ?

Dans l’histoire récente du Sénégal, ces gens-là ont démontré ce dont ils sont capables. Et
nous devrions faire très attention. Je suis persuadé que je ne pourrais pas échapper à Me
Wade s’il décidait de me faire du mal. Mais je ne suis pas un exilé. Je vis dans un beau pays
(le Canada) et le moment opportun, je reviendrai chez moi au Sénégal.

Un mot sur l’issue du scrutin présidentiel du 25 février.

Je crois aux chances d’Ousmane Tanor Dieng ou d’Abdoulaye Bathily. Mais je ne crois pas à
celles de Wade.

Auteur: serigne saliou samb

Le Mensonge peut courir un an, la vérité le rattrape en un jour, dit le sage Haoussa
Ma devise:
se surpasser, ne jamais abdiquer, toujours rester humble

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