Anesth Reanim.

2022; 8: 338–345

en ligne sur / on line on

www.em-consulte.com/revue/anrea
www.sciencedirect.com

Revue
Traitement des infarctus cérébraux éligibles
à une recanalisation

Théo Hancer 1,2, Estelle La Porte 1,2, Richard Macrez 2,3,4, Emmanuel Touzé 1,2,4

Disponible sur internet le :
24 juin 2022
1. CHU de Caen-Normandie, service de neurologie, 14000 Caen, France
2. Normandie Université, UNICAEN, Caen, France
3. CHU de Caen-Normandie, Département d'accueil et de traitement des urgences
adultes, 14000 Caen, France
4. Inserm, UMR-S U1237, Physiopathology and Imaging of Neurological Disorders
(PhIND), Institut Blood and Brain @Caen-Normandie (BB@C), GIP Cyceron, Caen,
France

Correspondance :
Emmanuel Touzé, CHU de Caen-Normandie, service de neurologie, 14000 Caen,
France.
emmanuel.touze@unicaen.fr

Mots clés Résumé

AVC
Parcours de soins L'accident vasculaire cérébral ischémique est le plus fréquent des accidents vasculaires cérébraux
Ischémie cérébrale (85 %) et constitue une urgence thérapeutique. La création des unités neurovasculaires, la
Thrombolyse thrombolyse, puis la thrombectomie mécanique ont constitué des avancées thérapeutiques
Thrombectomie majeures. De plus en plus de patients peuvent accéder à une recanalisation, et de plus en plus
Unité neurovasculaire rapidement, grâce à une organisation de la filière d'urgence organisée de façon pluridisciplinaire
(notamment médecins urgentistes, neurologues et radiologues). Dans cette revue, nous ferons
dans un rappel des grandes étapes de la prise en charge des patients en allant du pré-hospitalier
à l'intra-hospitalier et nous verrons à chaque étape les progrès de la recherche.

Summary
Ischaemic stroke is the most common type of stroke (85 % of strokes) and requires urgent
intervention to reduce the risk of permanent disability. Stroke units, thrombolysis, and more
recently endovascular therapy (mechanical thrombectomy) have been major advances. More
and more patients are eligible to recanalisation and can be treated more rapidly, thanks to
spreading of pluri-disciplinary neurovascular networks, implying notably emergency physicians,
neurologists, and radiologists. In this paper, we will review the major steps in patient mana-
gement, from pre-hospital to intra-hospital, and will describe innovative research in progress.

Abréviations UNV unité neurovasculaire

HAS Haute autorité de santé
AVC accident vasculaire cérébral ESO European Stroke Organisation
SAMU service d'aide médicale urgente VSAV véhicule de secours et d'assistance aux victimes

tome 8 > n84 > juillet 2022

https://doi.org/10.1016/j.anrea.2022.05.008
© 2022 Société française d'anesthésie et de réanimation (Sfar). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
338
Anesth Reanim. 2022: 8
SMUR structure mobile d'Urgence et de Réanimation
MSU MobileStrokeUnit
FAST Fast Arm Speech Time
NIHSS National Institute of Health Stroke Score
RACE Rapid Arterial oCclusion Evaluation
LAMS Los Angeles Motor Scale
TM thrombectomie mécanique
TIV thrombolyse intraveineuse
Introduction
L'accident vasculaire cérébral (AVC) est la deuxième cause de
mortalité dans le monde après les maladies cardiaques [1].
Chaque année, en France, environ 150 000 personnes sont
victimes d'un AVC. Environ 40 % des survivants gardent un
handicap, l'AVC étant ainsi la première cause de handicap acquis
chez l'adulte. Malgré les progrès thérapeutiques majeurs obte-
nus au cours des 25 dernières années, tant en prévention que
dans le traitement aigu, le nombre de personnes victimes d'AVC
continue d'augmenter, notamment en raison de l'allongement
de l'espérance de vie. La prévalence en Europe est de 5 % chez
les moins de 75 ans, et plus de 10 % chez les plus de 80 ans [2].
L'AVC de mécanisme ischémique (infarctus cérébral) représente
80 % des AVC. On estime qu'au moins 15 % des infarctus
cérébraux seraient éligibles à un traitement de recanalisation,
qui doit être réalisé le plus tôt possible pour réduire le risque de
handicap. Ces accidents sont en effet les plus sévères car ils
correspondent à une occlusion d'une artère proximale. Cet
article fait le point sur le traitement de l'infarctus cérébral
éligible à une revascularisation depuis le préhospitalier jusqu'à
l'admission en unité neurovasculaire (UNV).
Phase préhospitalière
Evoquer le diagnostic d'AVC
Afin d'assurer une prise en charge rapide des patients suspects
d'AVC, l'organisation de la phase préhospitalière est cruciale. Elle
repose sur la régulation médicale du Service d'aide médicale
urgente (SAMU). Pour le médecin régulateur, l'exercice est
rendu difficile aussi bien par les multiples symptômes cliniques
pouvant faire évoquer un AVC que par la nécessité de prendre
une décision rapide. Le caractère soudain et focal doit rester la
règle d'or. Dans un objectif de standardisation, il est recom-
mandé d'utiliser des échelles diagnostiques. L'échelle FAST (Face
Arm Speech Time) est classiquement utilisée [3], mais il existe
de nombreuses autres échelles développées par différentes
équipes à travers le monde [4]. Une fois la suspicion d'AVC
confirmée, le médecin régulateur doit choisir le vecteur (pom-
piers, ambulance privée ou transport médicalisé) le plus rapi-
dement disponible et le plus adapté pour le transport du patient.
Seuls les patients ayant des signes de gravité clinique (détresse
respiratoire, coma, convulsion, détresse circulatoire au bilan
secouriste) relèvent d'un transport médicalisé par la Structure
mobile d'urgence et de réanimation (SMUR) [3]. En parallèle, le
médecin régulateur doit se mettre en relation avec le
tome 8 > n84 > juillet 2022
339
Revue
neurologue de l'UNV. Cette stratégie doit permettre d'anticiper
l'arrivée du patient à l'hôpital et de réduire le délai entre le
début des symptômes et la mise en route d'un traitement de
recanalisation.
Stratégie de routage préhospitalier
Avant l'avènement de la thrombectomie mécanique (TM) en
2015, en concertation avec le neurologue neurovasculaire, le
médecin régulateur devait adresser le patient vers l'UNV de
proximité ou vers le centre de télé-AVC le plus proche de son
domicile [5]. La généralisation de la TM a profondément modifié
et complexifié les habitudes de travail des filières. Le médecin
régulateur peut toujours proposer l'UNV de proximité pour la
réalisation d'une thrombolyse intraveineuse (TIV), mais s'il y a
indication à une TM après réalisation d'un examen d'imagerie
cérébrale et vasculaire, un transport secondaire médicalisé vers
l'UNV de recours avec neuroradiologie interventionnelle doit
être organisé (stratégie « drip and ship »). C'est pourquoi,
pouvoir accéder en première intention à la TM si la situation
clinique est suspecte, sur la base de l'examen physique et de
l'interrogatoire (stratégie « mothership ») pourrait être une
stratégie plus efficace (figure 1). La stratégie « drip and ship »
permet d'accéder à la TIV plus rapidement mais retarde l'accès
à la TM, à l'inverse la stratégie « mothership » permet d'accéder
à la TM plus rapidement, de diminuer le recours aux transferts
secondaires, mais a pour inconvénient de transporter inutile-
ment certains patients n'ayant pas d'indication à une TM et de
retarder la TIV si elle indiquée (tableau I). La difficulté est qu'à ce
jour, il n'y a aucun signe ou score clinique ou tout autre moyen
pour identifier facilement les patients avec une occlusion proxi-
male éligible à une TM. Le NIHSS n'étant pas adapté au pré-
hospitalier, plusieurs échelles, quasi toute dérivées du NIHSS,
ont été développées [6]. Plusieurs études ont comparé ces
échelles et ont montré une discrimination modérée pour iden-
tifier les patients ayant une occlusion artérielle éligible à la TM
(sensibilité 50 à 67 % et spécificité 82 à 87 %) [6,7]. Deux scores
semblent néanmoins supérieurs, RACE et LAMS. Le score RACE
(Annexe 1), développé pour les secouristes catalans, est
l'échelle ayant fait l'objet d'une validation optimale avec une
sensibilité de 85 %, une spécificité de 68 % et une valeur
prédictive positive de 42 % [7]. En effet, une validation sur
une cohorte de dérivation incluant du préhospitalier a pu être
réalisée ainsi qu'une cohorte de validation externe [7]. C'est
d'ailleurs cette échelle qui est utilisée pour sélectionner les
patients dans les deux principaux essais cliniques multicentri-
ques comparant les stratégies « drip and ship » et « mothership » :
RACECAT en Espagne [8] et PRESTO-F en France (NCT04121013).
L'étude RACECAT, récemment publiée [8], n'a pas montré de
supériorité de la stratégie « mothership » sur l'autonomie ou la
mortalité. Néanmoins, ces résultats ne peuvent être extrapolés
à la France. En effet, la meilleure stratégie doit être définie par
des facteurs locaux, comme le temps de parcours (plus que la
T. Hancer, E. La Porte, R. Macrez, E. Touzé

Revue
Figure 1
Stratégie de routage des
patients victimes d'un AVC
à la phase aiguë en
préhospitalier. Stratégie A
« drip and ship » (flèches
noires) : 1/transfert du
patient au centre de
proximité et si indication
à une TM 2/transfert au
centre de recours ; stratégie
B « mothership » (flèche
rouge) : transfert direct au
centre de recours.

TABLEAU I
Principaux avantages et inconvénients des stratégies A « drip and ship » et B « mothership »

Stratégie A Stratégie B

Avantages Trie rapide entre infarctus cérébral et hémorragie cérébral Délai pour une thrombectomie mécanique diminué

Diagnostic différentiel rapide Temps de reperfusion plus court ?

Accès rapide à une thrombolyse intraveineuse

Prise en charge rapide des facteurs d'agression cérébrale d'origine systémique

Meilleure sélection des patients éligibles à une thrombectomie mécanique

Inconvénients Perte de temps si indication à une thrombectomie mécanique Délai pour thrombolyse augmenté

Ressources/Transport/Coût des transports ? Transfert de patients inéligibles à

une thrombectomie mécanique

Transport/Ressources en personnel

distance) ou les ressources disponibles, plutôt qu'une approche
valable pour tous [8]. L'étude randomisée PRESTO-F vise
à comparer ces deux stratégies en impliquant plus de 50 SAMU
en France.
Télémédecine et innovations organisationnelles
La télémédecine (télé-AVC, comportant le plus souvent la télé-
radiologie en plus de la téléexpertise pour la prise en charge
médicale) s'est largement implantée dans de nombreux pays
afin de permettre un accès équitable à la TIV (environ 150 sites
en France). La TIV réalisée en télémédecine est aussi efficace et
sécurisée que lorsqu'elle est administrée dans des centres neu-
rovasculaires [9]. L'évaluation en télémédecine permet aussi de
sélectionner les patients éligibles à un transfert immédiat pour
réaliser une TM.
Depuis quelques années, plusieurs équipes évaluent l'intérêt
d'un scanner embarqué dans une ambulance (appelée Mobi-
leStrokeUnit, MSU). Une récente méta-analyse montre qu'ils
sont associés à une amélioration de 65 % des chances
d'excellente autonomie à 3 mois, et une diminution de
30 minutes en moyenne sur le délai de mise en œuvre
d'une TIV [10].

tome 8 > n84 > juillet 2022

340
Anesth Reanim. 2022: 8
Figure 2
Différentes séquences de l'IRM multimodale à réaliser à la phase aiguë de l'AVC. A : Séquence diffusion ; B : séquence 2D FLAIR ; C :
séquence de susceptibilité magnétique ; D : séquence volumétrique TOF. Ici, occlusion de l'artère cérébrale moyenne, segment M1 à
droite avec thrombus visible en SWI et TOF (D-B, flèches noires).
Une équipe allemande a évalué l'intérêt d'une équipe mobile de
neuroradiologie interventionnelle héliportée et montré une
réduction du délai de prise en charge et de transfert vers un
centre de TM, sans amélioration du pronostic à 3 mois [11].
Phase hospitalière
L'UNV : pierre angulaire de la prise en charge
La prise en charge hospitalière s'articule autour des UNV, en
particulier des USINV (unités de soins intensifs). Les UNV sont
des unités pluridisciplinaires de personnels de santé aguerris au
diagnostic et au traitement des AVC (neurologues, infirmiers,
personnels de rééducation, psychologue, neuroradiologues, car-
diologues) et partageant des procédures communes. Le béné-
fice d'une prise en charge en UNV est démontré depuis les
années 1980, et est indépendant de tous les traitements moder-
nes de recanalisation : réduction du risque de décès de 17 %, de
handicap de 31 % et d'institutionnalisation de 25 % [12]. Des
décrets récents ont défini les conditions de fonctionnement des
tome 8 > n84 > juillet 2022
341
Revue
USINV, selon l'existence et la typologie des activités de neuro-
radiologie interventionnelle [13]. Schématiquement, on distin-
gue les UNV de proximité qui ne disposent que des activités
médicales, les UNV de recours de niveau A qui disposent d'une
activité de neuroradiologie interventionnelle restreinte au trai-
tement de l'ischémie cérébrale aiguë et les UNV de recours de
niveau B ayant tout le plateau de neuroradiologie intervention-
nelle et de neuroradiologie.
Chez un patient n'ayant pas de défaillance vitale immédiate,
une imagerie cérébrale et vasculaire doit être réalisée en
urgence. Elle permet avant tout de diagnostiquer s'il s'agit
d'une hémorragie, d'un infarctus, ou d'un autre diagnostic. Un
scanner cérébral complété d'un angioscanner ou une IRM
complétée d'une angio-IRM doivent être réalisés en première
intention. L'IRM cérébrale multimodale comporte des séquences
en diffusion (visualise l'infarctus en phase hyper-aiguë), FLAIR
(visualise un infarctus constitué), time of flight (TOF, visualise les
artères intracérébrales) et une séquence de susceptibilité
T. Hancer, E. La Porte, R. Macrez, E. Touzé

magnétique (SWI/SWAN ou T2*, visualisant les saignements et
thrombi) (figure 2A-D). La durée de réalisation totale des
séquences est d'en moyenne 8 à 10 minutes, avec des proto-
coles plus courts pouvant être réalisés en 6 minutes [14]. En cas
d'heure de début incertaine ou dans une fenêtre plus tardive
(jusqu'à 12 heures en théorie), une imagerie de perfusion
(scanner ou IRM) doit être réalisée afin d'identifier s'il existe
encore du tissu cérébral à sauver (zone de pénombre isché-
mique) (figure 3).
Modalités de reperfusion
En cas d'infarctus cérébral, le traitement consiste à reperfuser le
cerveau le plus vite possible par une TIV et/ou une TM. En effet,
toutes les études ont démontré une relation entre le délai de
Revue
reperfusion et le pronostic. La TIV par altéplase 0,9 mg/kg (10 %
en bolus suivi des 90 % restant en perfusion sur 1 heure) est
indiquée dans les 4 h 30 qui suivent le début des symptômes. La
TIV augmente la probabilité (bénéfice absolu) d'être indépen-
dant de 10 % lorsqu'elle est administrée dans les 3 heures et de
7 % si elle est administrée entre 3 h et 4 h 30 [15]. Elle peut être
administrée chez les patients ayant un horaire de début inconnu
en présence d'un mismatch FLAIR-diffusion sur l'IRM, c'est-à-
dire un infarctus visible uniquement sur la séquence de diffusion
[16]. Il s'agit souvent d'un accident constaté au réveil (jusqu'à
20 % des AVC). La tenecteplase, thrombolytique déjà recom-
mandé dans le traitement du syndrome coronarien aigu [17],
présente une affinité plus élevée pour la fibrine, une demi-vie
plus longue et est plus simple d'utilisation (une seule injection

Figure 3
IRM de perfusion à la phase aiguë d'un AVC ischémique sur occlusion de l'artère cérébrale moyenne, segment M1 à gauche. A : FLAIR ;
B : Diffusion ; C : Relative cerebral blood flow rCBF ; D : Temps de transit moyen TTM. On observe une diminution du rCBF et une
augmentation du TTM > 6 secondes significative dans le territoire sylvien gauche (pénombre ischémique), bien supérieure au volume
ischémique en diffusion en faveur d'un geste de recanalisation.

tome 8 > n84 > juillet 2022

342
Anesth Reanim. 2022: 8
en bolus). L'intérêt et la dose optimale de la tenecteplase sont
toujours en évaluation, compte tenu de résultats pour l'instant
contradictoires [18]. Cependant, l'utilisation à la dose de
0,25 mg/kg préalablement à une TM est une option récemment
proposée [19]. L'essai randomisé ACT, qui a inclus 1600 patients,
suggère une non-infériorité de la tenecteplase dans une popu-
lation plus large de patients [20].
Chez les patients ayant une occlusion artérielle proximale de la
circulation antérieure (notamment terminaison de l'artère caro-
tide interne et/ou cérébrale moyenne), une TM est indiquée. La
fenêtre thérapeutique la plus documentée est de 6 heures après
le début des symptômes [21–24]. Si le patient est éligible à la TIV,
il doit la recevoir car les études randomisées n'ont pas démontré
la non-infériorité de la TM seule par rapport à la TM associée à la
TIV [25–29]. Il ne faut pas attendre l'effet de la TIV pour débuter
la procédure de TM. Le bénéfice de la TM a été moins bien évalué
dans les occlusions de la circulation postérieure, notamment en
raison de leur moindre fréquence et de leur plus grande hété-
rogénéité, mais les quelques études randomisées suggèrent un
bénéfice [30]. Les patients qui ne peuvent pas recevoir de TIV
(prise d'anticoagulant ou autre contre-indication) restent éligi-
bles à la TM. Il n'y pas de limite d'âge pour proposer une TM si le
patient présente un bon état général. L'intérêt de la TM dans les
infarctus mineurs ou à l'inverse très sévères est en cours d'éva-
luation. L'utilisation de l'imagerie multimodale (scanner et IRM
de perfusion notamment) permet d'identifier des patients qui
bénéficient encore d'une recanalisation endovasculaire, jusqu'à
24 heures après le début des symptômes [31].
Le bénéfice absolu de la TM en termes de réduction de risque de
handicap est très important [32]. Comme pour la TIV, ce bénéfice
dépend fortement du délai par rapport au début des symptô-
mes, allant de 39 % si la TM est réalisée dans les 6 heures
à environ 16 % à 8 heures.
L'amélioration des techniques et des dispositifs de traitement
endovasculaire permettent d'atteindre des taux de recanalisa-
tion complète de 80 % ou plus.
Place de l'anesthésiste
L'équipe d'anesthésie-réanimation doit être impliquée pour la
réalisation d'un geste endovasculaire. Il n'existe pas de consen-
sus sur la meilleure approche entre sédation consciente et
anesthésie générale. Certaines études observationnelles ont
suggéré que l'anesthésie générale était associée à plus de
complications et à un moins bon pronostic fonctionnel
[33,34]. Cependant, l'étude randomisée française AMETIS, sug-
gère qu'il y a moins d'épisodes d'hypotension en cas de sédation
consciente [35], mais sans différence de pronostic entre les deux
bras. En pratique, dans la grande majorité des cas, le geste est
réalisé sous anesthésie locale et autant que possible sous
tome 8 > n84 > juillet 2022
343
Revue
sédation consciente, l'anesthésie générale étant réservée aux
patients présentant initialement des troubles de la vigilance.
Dans 1 à 10 % des cas, l'infarctus cérébral peut se compliquer
d'un infarctus sylvien malin défini par infarcissement d'au moins
deux tiers du territoire vasculaire de l'artère cérébrale moyenne
associé à un œdème (généralement entre 2 et 5 jours après
l'évènement). Le taux de mortalité spontanée atteint 80 % [36].
Une hémicraniectomie décompressive réduit très significative-
ment la mortalité et améliore le pronostic fonctionnel chez ces
patients [37]. Elle est indiquée en cas d'infarctus étendu (145 cc)
chez des patients de moins de 60 ans (ou de plus de 60 ans sans
comorbidité majeure) ayant une aggravation de l'état clinique
et/ou une altération de la vigilance. Dans tous les cas, un
traitement médical optimal doit être entrepris en neuroréani-
mation [38].
Conclusion
Le traitement de l'infarctus cérébral a vécu plusieurs révolutions
depuis 30 ans : les UNV dans les années 1990, l'imagerie de
diffusion et la TIV dans les années 2000, puis la TM depuis un peu
moins de 10 ans. Ces progrès thérapeutiques majeurs permet-
tent de réduire les conséquences des AVC. Cependant, le chemin
à parcourir est encore long car de nombreux patients n'accèdent
pas ou ne sont pas éligibles à ces progrès thérapeutiques. Les
campagnes d'information du grand public et l'optimisation de
l'organisation des filières d'accès aux soins doivent rester des
objectifs prioritaires (applications de géolocalisation, stratégie
de routage, développement des imageries embarquées. . .). Les
progrès technologiques doivent se poursuivre pour augmenter
la proportion de patients éligibles à une recanalisation (notam-
ment dans des artères de plus petit calibre). L'optimisation de la
TIV reste également pertinente compte tenu de son accès
beaucoup plus facile. Le traitement de recanalisation de l'infarc-
tus cérébral aigu évoluera nécessairement vers une plus grande
personnalisation avec l'amélioration des outils de diagnostic et
de prédiction de réponse au traitement.
Déclaration de liens d'intérêts : les auteurs déclarent n'avoir aucun conflit
d'intérêt.
Matériel complémentaire
Le matériel complémentaire accompagnant la
version en ligne de cet article est disponible sur
http://www.sciencedirect.com et https://doi.org/
10.1016/j.anrea.2022.05.008.
T. Hancer, E. La Porte, R. Macrez, E. Touzé
Références
[1] Hankey GJ. Stroke. Lancet 2017;389:641–54.
[2] Béjot Y, Bailly H, Durier J, Giroud M. Epi-
demiology of stroke in Europe and trends for
the 21st century. Presse Med 2016;45:e391–8.
[3] https://www.has-sante.fr/upload/docs/
application/pdf/2009 07/avc_prise_en_
charge_precoce_-_recommandations.pdf.
(consulté le 18 mai 2022).
[4] Zhelev Z, Walker G, Henschke N, Fridhandler
J, Yip S. Prehospital stroke scales as screening
tools for early identification of stroke and
transient ischemic attack. Cochrane Database
Syst Rev 2019;4 [CD011427].
[5] Jauch EC, Saver JL, Adams HP, Bruno A,
Connors JJB, Demaerschalk BM, et al. Guide-
lines for the early management of patients
with acute ischemic stroke: a guideline for
healthcare professionals from the American
Heart Association/American Stroke Associa-
tion. Stroke 2013;44:870–947.
[6] Duvekot MHC, Venema E, Rozeman AD,
Moudrous W, Vermeij FH, Biekart M,
et al. Comparison of eight prehospital stroke
scales to detect intracranial large-vessel
occlusion in suspected stroke (PRESTO): a pro-
spective observational study. Lancet Neurol
2021;20:213–21.
[7] Nguyen TTM, van den Wijngaard IR, Bosch J,
van Belle E, van Zwet EW, Dofferhoff-Ver-
meulen T, et al. Comparison of Prehospital
Scales for Predicting Large Anterior Vessel
Occlusion in the Ambulance Setting. JAMA
Neurol; 2021;78:157–64.
[8] Pérez de la Ossa N, Abilleira S, Jovin TG,
García-Tornel Á, Jimenez X, Urra X, et al.
Effect of direct transportation to thrombect-
omy-capable center vs local stroke center on
neurological outcomes in patients with sus-
pected large-vessel occlusion stroke in non-
urban areas: the RACECAT randomized clinical
trial. JAMA 2022;327:1782–94.
[9] Lazarus G, Permana AP, Nugroho SW, Audrey
J, Wijaya DN, Widyahening IS. Telestroke
strategies to enhance acute stroke manage-
ment in rural settings: A systematic review
and meta-analysis. Brain Behav 2020;10:
e01787.
[10] Turc G, Hadziahmetovic M, Walter S, Churilov
L, Larsen K, Grotta JC, et al. Comparison of
mobile stroke unit with usual care for acute
ischemic stroke management: a systematic
review and meta-analysis. JAMA Neurol
2022;79:281–90.
[11] Hubert GJ, Hubert ND, Maegerlein C, Kraus
F, Wiestler H, Müller-Barna P, et al. Asso-
ciation between use of a flying intervention
team vs patient interhospital transfer and
time to endovascular thrombectomy
among patients with acute ischemic stroke
in nonurban Germany. JAMA 2022;327:
1795–805.
[12] Collaborative systematic review of the rando-
mised trials of organised inpatient (stroke
unit) care after stroke. Stroke Unit Trialists'
Collaboration. BMJ. 1997; 314:1151-1159.
[13] https://www.legifrance.gouv.fr/download/
file/
cOdN1i2AI7uKqTG6sMXeUlIsrsa00QFujiQScSI_
fAU=/JOE. (consulté le 18 mai 2022).
[14] Nael K, Khan R, Choudhary G, Meshksar A,
Villablanca P, Tay J, et al. Six-minute magnetic
resonance imaging protocol for evaluation of
acute ischemic stroke: pushing the bound-
aries. Stroke 2014;45:1985–91.
[15] Hacke W, Kaste M, Bluhmki E, Brozman M,
Dávalos A, Guidetti D, et al. Thrombolysis
with alteplase 3 to 4.5hours after acute
ischemic stroke. N Engl J Med
2008;359:1317–29.
[16] Thomalla G, Simonsen CZ, Boutitie F, Ander-
sen G, Berthezene Y, Cheng B, et al. MRI-
Guided thrombolysis for stroke with
unknown time of onset. N Engl J Med
2018;379:611–22.
[17] Assessment of the safety and efficacy of a
new thrombolytic (ASSENT-2) investigators.
et al. Single-bolus tenecteplase compared
with front-loaded alteplase in acute myocar-
dial infarction: the ASSENT-2 double-blind ran-
domised trial. Lancet 1999;354:716–22.
[18] Coutts SB, Yu AYX. Tenecteplase for acute
stroke: the thrombolysis puzzle. Lancet Neurol
2022;21:496–7.
[19] Berge E, Whiteley W, Audebert H, De
Marchis GM, Fonseca AC, Padiglioni C,
et al. European Stroke Organisation (ESO)
guidelines on intravenous thrombolysis for
acute ischaemic stroke. Eur Stroke J 2021;6
[I–LXII].
[20] https://2022.eso-conference.org/wp-
content/uploads/2022/05/ESOC-22-Daily-
Press-Release-1-Wed-4-May-FINAL-2.0.pdf..
(consulté le 18 mai 2022).
[21] Berkhemer OA, Fransen PSS, Beumer D, van
den Berg LA, Lingsma HF, Yoo AJ, et al. A
randomized trial of intraarterial treatment for
acute ischemic stroke. N Engl J Med
2015;372:11–20.
[22] Campbell BCV, Mitchell PJ, Kleinig TJ, Dewey
HM, Churilov L, Yassi N, et al. Endovascular
therapy for ischemic stroke with perfusion-
imaging selection. N Engl J Med
2015;372:1009–18.
[23] Goyal M, Demchuk AM, Menon BK, Eesa M,
Rempel JL, Thornton J, et al. Randomized
assessment of rapid endovascular treatment
of ischemic stroke. N Engl J Med
2015;372:1019–30.
[24] Saver JL, Goyal M, Bonafe A, Diener HC,
Levy EI, Pereira VM, et al. Stent-retriever
thrombectomy after intravenous t-PA vs. t-PA
alone in stroke. N Engl J Med 2015;372:2285–
95.
[25] Fischer U, Kaesmacher J, Plattner SP, Büti-
kofer L, Mordasini P, Deppeler S, et al. SWIFT
DIRECT: SolitaireTM With the Intention For
344
Revue
Thrombectomy Plus Intravenous t-PA Versus
DIRECT SolitaireTM Stent-retriever Thrombect-
omy in Acute Anterior Circulation Stroke:
Methodology of a randomized, controlled,
multicentre study. Int J Stroke 2021.
[26] Mitchell PJ, Yan B, Churilov L, Dowling RJ,
Bush S, Nguyen T, et al. DIRECT-SAFE: A
randomized controlled trial of DIRECT endo-
vascular clot retrieval versus standard brid-
ging therapy. J Stroke 2022;24:57–64.
[27] Ciccone A. Alteplase and Thrombectomy -
Not a Bridge to Dismantle. N Engl J Med
2021;385:1904–5.
[28] Campbell BCV, Kappelhof M, Fischer U. R;
2022;53:2085–92.
[29] Turc G, Tsivgoulis G, Audebert HJ, Boogaarts
H, Bhogal P, De Marchis GM, et al. European
Stroke Organisation (ESO)-European Society
for Minimally Invasive Neurological Therapy
(ESMINT) expedited recommendation on indi-
cation for intravenous thrombolysis before
mechanical thrombectomy in patients with
acute ischemic stroke and anterior circulation
large vessel occlusion. J Neurointerv Surg
2022;14:209.
[30] Pirson FAV, Boodt N, Brouwer J, Bruggeman
AAE, den Hartog SJ, Goldhoorn RJB, et al.
Endovascular treatment for posterior circula-
tion stroke in routine clinical practice: results
of the multicenter randomized clinical trial of
endovascular treatment for acute ischemic
stroke in the Netherlands registry. Stroke
2022;53:758–68.
[31] Nogueira RG, Jadhav AP, Haussen DC, Bonafe
A, Budzik RF, Bhuva P, et al. Thrombectomy
6 to 24 hours after stroke with a mismatch
between deficit and infarct. N Engl J Med
2018;378:11–21.
[32] Goyal M, Menon BK, van Zwam WH, Dippel
DWJ, Mitchell PJ, Demchuk AM, et al. Endo-
vascular thrombectomy after large-vessel
ischaemic stroke: a meta-analysis of indivi-
dual patient data from five randomised trials.
Lancet 2016;387:1723–31.
[33] Campbell BCV, van Zwam WH, Goyal M,
Menon BK, Dippel DWJ, Demchuk AM,
et al. Effect of general anaesthesia on func-
tional outcome in patients with anterior cir-
culation ischaemic stroke having
endovascular thrombectomy versus standard
care: a meta-analysis of individual patient
data. Lancet Neurol 2018;17:47–53.
[34] Feil K, Herzberg M, Dorn F, Tiedt S, Küpper C,
Thunstedt DC, et al. General anesthesia
versus conscious sedation in mechanical
thrombectomy. J Stroke 2021;23:103–12.
[35] Chabanne R, Fernandez-Canal C, Degos V,
Lukaszewicz AC, Velly L, Mrozek S, et al.
Sedation versus general anaesthesia in endo-
vascular therapy for anterior circulation acute
ischaemic stroke: the multicentre randomised
controlled AMETIS trial study protocol. BMJ
Open 2019;9:e027561.
tome 8 > n84 > juillet 2022
Anesth Reanim. 2022: 8
[36] Hacke W, Schwab S, Horn M, Spranger M, De
Georgia M, von Kummer R. "Malignant''
middle cerebral artery territory infarction:
clinical course and prognostic signs. Arch Neu-
rol 1996;53:309–15.
[37] Vahedi K, Hofmeijer J, Juettler E, Vicaut E,
George B, Algra A, et al. Early decompressive
tome 8 > n84 > juillet 2022
surgery in malignant infarction of the middle
cerebral artery: a pooled analysis of three
randomised controlled trials. Lancet Neurol
2007;6:215–22.
[38] Powers WJ, Rabinstein AA, Ackerson T,
Adeoye OM, Bambakidis NC, Becker K,
et al. 2018 Guidelines for the early
345
Revue
management of patients with acute ischemic
stroke: a guideline for healthcare profes-
sionals from the American Heart Associa-
tion/American Stroke Association. Stroke
2018;49:e46–110.