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T R A V A U X D I R IG E S
Mme Anne-Marie VOUTYRAS-PIERRE
Licence 1
Année 2022-2023
2è semestre
_______________________________________________________________
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OBSERVATIONS PRELIMINAIRES
Ainsi, ce travail régulier qui est demandé, sera noté et formera par la
moyenne des notes obtenues, le contrôle continu. Un partiel a lieu en
fin de semestre et porte sur le cours.
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Sommaire - Histoire de la vie politique en France
La Restauration p. 4 à p. 32.
La Monarchie de Juillet p. 32 à 56.
La Deuxième République p. 56 à 85.
Le Second Empire p. 85 à 101.
La Troisième République de 1870 à 1914 p. 101 à 153.
(Cette République s’arrête en juillet 1940 quand s’instaure le régime
de Vichy).
Thèmes
3
Pour répondre aux questions sur les textes , les étudiants se reportent au cours :
Ils doivent bien connaître les thèmes placés à l’en-tête des périodes traitées pour
pouvoir répondre aux questions posées sur les textes.
Les questions qui sont posées, figurent en bas de chaque texte et on y répond
brièvement mais précisément. Le cours permet d’y répondre, sauf quand il est
précisé qu’une petite recherche est demandée.
- L A R E S T A U R A T I O N (1814-1830)
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Gouvernement devait faire des fautes; peut-être en a-t-il fait. Il est des
temps où les intentions les plus pures ne suffisent pas pour diriger, où
quelquefois même elles égarent.
L'expérience seule pouvait avertir : elle ne sera pas perdue. Je veux tout
ce qui sauvera la France.
Mes sujets ont appris par de cruelles épreuves, que le principe de la
légitimité des souverains est une des bases fondamentales de l'ordre
social, la seule sur laquelle puisse s'établir, au milieu d'un grand peuple,
une liberté sage et bien ordonnée. Cette doctrine vient d'être proclamée
comme celle de l'Europe entière. Je l'avais consacrée d'avance par ma
charte, et je prétends ajouter à cette charte toutes les garanties qui
peuvent en assurer le bienfait... L'unité du ministère est la plus forte
que je puisse offrir. J'entends qu'elle existe, et que la marche franche et
assurée de mon conseil garantisse tous les intérêts et calme toutes les
inquiétudes.
On a parlé, dans les derniers temps, de la dîme et des droits féodaux.
Cette fable inventée par l'ennemi commun, n'a pas besoin d'être
réfutée ; on ne s'attendra pas que le Roi de France s'abaisse jusqu'à
repousser des calomnies et des mensonges; le succès de la trahison en a
trop indiqué la source. Si les acquéreurs des biens nationaux ont conçu
des inquiétudes, la Charte aurait dû suffire pour les rassurer. N'ai-je pas
moi-même proposé aux Chambres et fait exécuter des ventes de ces
biens ? Cette preuve de ma sincérité est sans réplique.
Dans ces derniers temps mes sujets de toutes les classes m'ont donné
des preuves égales d'amour et de fidélité. Je veux qu'ils sachent
combien j'y ai été sensible ; et c'est parmi tous les Français que j'aimerai
à choisir celles qui doivent approcher de ma personne et de ma famille.
Je ne veux exclure de ma présence que ces hommes dont la renommée
est un sujet de douleur pour la France et d'effroi pour l'Europe. Dans la
trame qu'ils ont ourdie, j'aperçois beaucoup de mes sujets égarés et
quelques coupables.
Je promets, moi qui n'ai jamais promis en vain (l'Europe entière le sait )
de pardonner aux Français égarés, tout ce qui s'est passé depuis le jour
où j'ai quitté Lille au milieu de tant de larmes jusqu'au jour où je suis
rentré dans Cambrai au milieu de tant d'acclamations.
Mais le sang de mes enfants a coulé par une trahison dont les annales
du monde n'offrent pas d'exemple : cette trahison a appelé l'étranger
dans le coeur de la France... Je dois donc, pour la dignité de mon trône,
pour l'intérêt de mes peuples, pour le repos de l'Europe, excepter du
pardon les instigateurs et les auteurs de cette trame horrible. Ils seront
désignés à la vengeance des lois par les deux Chambres que je me
propose d'assembler incessamment. Français, tels sont les sentimens
que rapporte au milieu de vous celui que le temps n'a pu changer, que
le malheur n'a pu fatiguer, que l'injustice n'a pu abattre.
Le Roi, dont les pères règnent depuis huit siècles sur les vôtres, revient
pour consacrer le reste de ses jours à vous défendre et à vous consoler ».
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Donné à Cambrai ce 28e jour du mois de juin de l'an de grâce 1815 et de
notre règne le vingt-unième.
Signé, LOUIS.
Par le Roi,
Le Ministre d'Etat Secrétaire des Affaires étrangères,
Signé, Talleyrand, Bulletin des Lois, Série VIII. t. I. 1 n° 1. p. 2.
QUESTIONS
1) Dans le texte, quelle est la base de l’ordre social aux yeux du Roi
Louis XVIII ? Comment est-il assuré ?
2) Dans le texte, le Roi dit que la Charte va rassurer les acquéreurs de
biens nationaux. Expliquez de quoi, il s’agit.
3) « Je dois donc… excepter du pardon les instigateurs et les auteurs de
cette trame horrible. » A la date où le Roi parle de sanctions, à quel
événement récent fait-il allusion ? En quoi cet événement a t’il eu un
fort impact pour l’avenir politique de la France ?
Nous avons dû, à l'exemple des rois nos prédécesseurs, apprécier les
effets des progrès toujours croissants des lumières, les rapports
nouveaux que ces progrès ont introduits dans la société, la direction
imprimée aux esprits depuis un demi-siècle, et les graves altérations qui
en sont résultées : nous avons reconnu que le voeu de nos sujets pour
une Charte constitutionnelle était l'expression d'un besoin réel ; mais en
cédant à ce voeu, nous avons pris toutes les précautions pour que cette
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Charte fût digne de nous et du peuple auquel nous sommes fiers de
commander. Des hommes sages, pris dans les premiers corps de l'Etat,
se sont réunis à des commissions de notre Conseil, pour travailler à cet
important ouvrage.
Article 1. - Les Français sont égaux devant la loi, quels que soient
d'ailleurs leurs titres et leurs rangs.
Article 10. - L'Etat peut exiger le sacrifice d'une propriété, pour cause
d'intérêt public légalement constaté, mais avec une indemnité préalable.
[…]
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Article 14. - Le roi est le chef suprême de l'Etat, il commande les forces
de terre et de mer, déclare la guerre, fait les traités de paix, d'alliance et
de commerce, nomme à tous les emplois d'administration publique, et
fait les règlements et ordonnances nécessaires pour l'exécution des lois
et la sûreté de l'Etat.
Article 18. - Toute la loi doit être discutée et votée librement par la
majorité de chacune des deux chambres.
Article 20. - Cette demande pourra être faite par chacune des deux
chambres, mais après avoir été discutée en comité secret : elle ne sera
envoyée à l'autre Chambre par celle qui l'aura proposée, qu'après un
délai de dix jours.
Article 21. - Si la proposition est adoptée par l'autre Chambre, elle sera
mise sous les yeux du roi ; si elle est rejetée, elle ne pourra être
représentée dans la même session.
Article 23. - La liste civile est fixée pour toute la durée du règne, par la
première législature assemblée depuis l'avènement du roi.
Article 25. - Elle est convoquée par le roi en même temps que la
Chambre des députés des départements. La session de l'une commence
et finit en même temps que celle de l'autre.
[…]
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Article 27. - La nomination des pairs de France appartient au roi. Leur
nombre est illimité ; il peut en varier les dignités, les nommer à vie ou
les rendre héréditaires, selon sa volonté.
Article 28. - Les pairs ont entrée dans la Chambre à vingt-cinq ans, et
voix délibérative à trente ans seulement.
Article 30. - Les membres de la famille royale et les princes du sang sont
pairs par le droit de leur naissance. Ils siègent immédiatement après le
président ; mais ils n'ont voix délibérative qu'à vingt-cinq ans.
Article 33. - La Chambre des pairs connaît des crimes de haute trahison
et des attentats à la sûreté de l'Etat qui seront définis par la loi.
Article 35. - La Chambre des députés sera composée des députés par les
collèges électoraux dont l'organisation sera déterminée par des lois.
Article 37. - Les députés seront élus pour cinq ans, et de manière que la
Chambre soit renouvelée chaque année par cinquième.
Article 38. - Aucun député ne peut être admis dans la Chambre, s'il
n'est âgé de quarante ans, et s'il ne paie une contribution directe de
mille francs.
Article 41. - Les présidents des collèges électoraux seront nommés par
le roi et de droit membres du collège.
Article 42. - La moitié au moins des députés sera choisie parmi les
éligibles qui ont leur domicile politique dans le département.
[…]
Article 48. - Aucun impôt ne peut être établi ni perçu, s'il n'a été
consenti par les deux Chambres et sanctionné par le roi.
[…]
Article 50. - Le roi convoque chaque année les deux Chambres ; il les
proroge, et peut dissoudre celle des députés des départements ; mais,
dans ce cas, il doit en convoquer une nouvelle dans le délai de trois
mois.
Article 51. - Aucune contrainte par corps ne peut être exercée contre un
membre de la Chambre, durant la session, et dans les six semaines qui
l'auront précédée ou suivie.
Article 53. - Toute pétition à l'une ou l'autre des Chambres ne peut être
faite et présentée que par écrit. La loi interdit d'en apporter en personne
et à la barre.
Des ministres
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Article 54. - Les ministres peuvent être membres de la Chambre des
pairs ou de la Chambre des députés. Ils ont en outre leur entrée dans
l'une ou l'autre Chambre, et doivent être entendus quand ils le
demandent.
De l'ordre judiciaire
Article 57. - Toute justice émane du roi. Elle s'administre en son nom
par des juges qu'il nomme et qu'il institue.
Article 68. - Le Code civil et les lois actuellement existantes qui ne sont
pas contraires à la présente Charte, restent en vigueur jusqu'à ce qu'il y
soit légalement dérogé.
Question :
« c'est un traité de paix signé entre les deux partis qui ont divisé les
Français » .
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Quelle réconciliation vise t’il ?
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La France avait donc une constitution. Aussi, et parce que la France avait une
constitution, et une forte constitution, elle s'était agrandie de règne en règne
même sous les plus faibles; toujours enviée, jamais entamée ; souvent troublée,
jamais abattue
note 1 Dans la monarchie indépendante, le roi fait les lois, par conseils,
doléances ou remontrances. Dans la monarchie dépendante, il fait la loi, ou
plutôt la loi est faite par opposition et par débats entre pouvoirs égaux, Le roi
plaide ou fait plaider en faveur de sa loi, comme un particulier dans sa cause
devant des juges.
note 2 C'est une idée chère à tous les royalistes, sous la Restauration que ce
Parlement « efficace contre-poids » de la puissance royale, avant 1789. Ils y
voient « l'essence d’une monarchie tempérée» certaines lois fondamentales,
qui étaient l’ancienne constitution non écrite de la France ne pouvant être
enfreintes.
L’historiographie actuelle dément cette idée car les parlements qui étaient
composés de la haute noblesse dans leur opposition aux réformes voulues par
les ministres des rois ont été plus que les contrepoids, les fosssoyeurs de la
Monarchie.
Jean-Louis HAROUEL, « La Pré-Révolution, 1787-1789 » in
Les révolutions françaises. Les phénomènes révolutionnaires en France du
Moyen-âge à nos jours, F. BLUCHE et S. RIALS ( dir.), Paris, 1989, pp181-
196.
Questions
Le mal n’a rien de commun avec l'existence: il ne peut créer, puisque sa force
est purement négative : le mal est le schisme de l'être; il n’est pas vrai. (1)
Dans quelle page de l'histoire trouvera-t-on une aussi grande quantité de vices
agissant à la fois sur le même théâtre? Quel assemblage épouvantable de
bassesse et de cruauté! Quelle profonde immoralité ! Quel oubli de toute
pudeur! Comment croire à la durée d'une liberté qui commence par la
gangrène? Ou, pour parler plus exactement, comment croire que cette liberté
puisse naître et que du sein de la corruption la plus dégoûtante puisse sortir
cette forme de gouvernement qui se passe de vertus moins que toutes les
autres...
La révolution française a parcouru, sans doute, une période dont tous les
moments ne se ressemblent pas cependant son caractère général n’a jamais
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varié, et dans son berceau même elle prouva tout ce qu’elle devait être. C’était
un certain délire inexplicable, une impétuosité aveugle, un mépris scandaleux
de tout ce qu'il y a de respectable parmi les hommes; une atrocité d’un nouveau
genre, qui plaisantait de ses forfaits: surtout une prostitution impudente du
raisonnement, et de tous les mots faits pour exprimer les idées de justice et de
vertu.
Est-ce donc de cette fange sanglante que doit sortir un gouvernement durable?
Qu'on ne nous objecte point les mœurs féroces et licencieuses des peuples
barbares, qui sont cependant devenus ce que nous voyons. L'ignorance barbare
a présidé, sans doute, à nombre d'établissements politiques; mais la barbarie
savante, l'atrocité systématique, la corruption calculée, et surtout l’irréligion,
n'ont jamais rien produit.”
(1) De Maistre, donne cette autre raison dans ses Considérations sur la France,
Ch. 10, p. 155: «Que les premières places fussent de plus difficile abord au
simple citoyen, c'était une chose très raisonnable. Il y a trop de mouvement
dans l'Etat, et pas assez de subordination, lorsque tous peuvent prétendre à tout.
L'ordre exige qu'en général les emplois soient gradués comme l’état des
citoyens, et que les talents, et quelquefois même la simple protection abaissent
les barrières qui séparent les différentes classes. De cette manière, il y a
émulation sans humiliation, et mouvement sans destruction. » :
Or, ce qui distingue la révolution française, et ce qui en fait un événement
unique dans l'histoire, c’est qu'elle est mauvaise radicalement; aucun élément
de bien n'y soulage l'œil de l'observateur c'est le plus haut degré de corruption
connu ; c’est la pure impureté.
Question
Nous avons changé tout cela mais si tel est l'attribut du peuple, le peuple donc
est Dieu : et où réside cette divinité ? Nous la chercherions en vain. Le mot de
peuple est un nom collectif qui représente une idée abstraite, pure création de
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la pensée, qui, faisant abstraction des individus dont le peuple se compose en
compose elle-même un être sans réalité, un être fictif, et que, à cause de cela,
on appelle un étre de raison : Non, le peuple n'est pas souverain, public ou
politique ; il est souverain domestique, pouvoir dans la famille où il a son
ministre, ses sujets, ses serviteurs, l'administration de ses biens... Cependant,
comme le peuple souverain est incapable d'exercer sa prétendue
souveraineté,.… force a été qu’il se donnât ou qu’il reçût quelqu’un qui pût les
représenter et dans lequel cette abstraction se réalisât, et dans le gouvernement
représentatif, la démocratie s’est donné un roi, autre fiction, fiction de royauté
comme le peuple est une fiction de souveraineté; un roi qui n'a pas de sujet, et
qui est lui même le premier sujet du peuple souverain, un roi qui règne et ne
gouverne pas un roi enfin qui ne peut parler et agir que par les ministres qui,
eux-mêmes, avec une fiction de responsabilité, représentent la raison,
l'intelligence et la volonté du roi .
- La démocratie ne fait pas et ne peut pas faire corps. Elle est une agrégation
fortuite d’une multitude de petits corps, sociétés ou familles indépendantes les
unes des autres qui ont chacune leurs intérêts, chacune leur pouvoir
domestique. La démocratie est la maladie organique du corps social, elle en
affecte les parties nobles, les pouvoirs et les devoirs ; et si des circonstances de
temps de lieux ou de personnes en suspendent momentanément les ravages,
aucun moyen ne peut en corriger le principe.
Question :
Par l'imprudence des hommes qui ont agi depuis un demi-siècle, tout a disparu
de l’ancien édifice social : les ruines même ont péri. C'est la première fois que
l’on auru vu un ordre de choses nouveau ne pas résulter de l’ordre des choses
qui a précédé. Mais cela est devenu nécessaire, parce que le marteau des
hommes s’est uni au marteau du temps. Voudriez-vous soutenir de tristes pans
de muraille lorsque le reste de l'édifice, consumé par un incendie dévorant, est
déjà presque tout entier caché sous l'herbe? C’est un malheur, sans doute, mais
il est irréparable, On a fait, en quelque sorte solution de continuité; et, s’il faut
le dire d’une manière sévère, les déplorables évènements de 1792 et 1793 ont
prononcé un divorce éternel
QUESTION
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Selon ces propos de Ballanche, qu’est-ce qui distingue les royalistes
constitutionnels des Ultras royalistes ?
(1) F.-R. de Chateaubriand écrit aussi dans les Réflexions politiques, décembre
1814. Ch. 19 et 20, t. XVIII. P. 172 et suiv. : «Quand nous voudrions tant que
les choses fussent arrangées autrement qu'elles le sont, elles ne pourraient
l'être, ,. Notre admiration, nos pleurs, nos regrets ne nous rendront pas du
Guesclin, la Hire et Dunois... Enfin nous ne pouvons pas faire que le XIXe
siècle soit le XIVè, le XVè, le XVIè, Tout change, tout se détruit, tout passe !
On doit pour bien servir sa Patrie, se soumettre aux révolutions que les siècles
amènent; et, pour être l'homme de son pays, il faut être l'homme de son temps
».
Il réhabilite la gloire de la Révolution : « Et Pourquoi ne pas le dire avec
franchise ! Certes, nous avons beaucoup perdu par la Révolution ; mais aussi
n’avons-nous rien gagné ? N'est ce rien que vingt années de victoires ? N'est-ce
rien que tant d'actions héroïques, tant de dévouements généreux ? » Réflexions
politiques. Ch.23, p. 190.
Question
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romantisme politique souvent opposé aux Lumières mais pas toujours qui a
connu un grand succès en France ( V. Hugo, A. de Lamartine) et en Allemagne
(Novalis, Schlegel, Müller, Görres, de Haller etc…).
Est-ce que dans ce texte, Chateaubriand vous semble reprendre ou s’opposer à
la doctrine des Ultras ?
Il me semble que la première condition du salut, c'est que nous soyons bien
établis sur le terrain de la France nouvelle, de la France vivante. Après cela il
est de notre devoir moral d'en ouvrir l'accès aux débris de la France ancienne,
de leur accorder l'hospitalité, à leurs malheurs et à leurs nobles souvenirs. Bien
reçus comme hôstes, repoussés comme conquérants, tel est l'accueil qu’ils ont
à espérer.
Question :
Quant au Roi, serait-il plus le maître en vertu des anciens règlements, que par
la Charte qu'il nous a donnée? D’un bout de la France à l'autre, une Loi passée
dans les deux Chambres met à sa disposition notre vie, nos enfants, notre
fortune... A-t-il à essuyer ces remontrances sans fin, souvent justes, mais
quelquefois inconsidérées, quand il a besoin du plus faible impôt ? Rencontre-
t-il dans toutes les provinces, dans toutes les villes des privilèges, des coutumes,
des corps qui lui disputent les droits les plus légitimes, ôtent au gouvernement
l'unité d’action et la rapidité de la marche ? Derrière les deux Chambres, rien
ne peut l'atteindre; uni aux deux
Chambres, sa force est inébranlable, Les orages sont pour ses Minisires; la paix,
le respect et l'amour sont pour lui.
Question :
3) Les Libéraux
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La nécessité des gouvernements libres, c'est-à-dire des monarchies limitées
pour les grands Etats, et des républiques indépendantes pour les petits, est
tellement évidente, qu’on est tenté de croire que personne ne peut se refuser
sincèrement à reconnaitre cette vérité.
Quand depuis tant de siècles toutes les âmes généreuses ont aimé la liberté;
quand les plus grandes actions ont été inspirées par elle; quand l'antiquité et
l’histoire des temps modernes nous offrent tant de prodiges opérés par l'esprit
public; quand nous venons de voir ce que peuvent les nations; quand tout ce
qu’il y a de penseurs parmi les écrivains a proclamé la liberté;.. quand les
beaux-arts, la poésie, les chefs-d'œuvre du théâtre, destinés à émouvoir les
cœurs humains, exaltent la liberté : que dire de ces petits hommes à grande
fatuité qui vous déclarent avec un accent fade et maniéré comme tout leur être,
qu’il est de bien mauvais goût de s'occuper de politique, qu'après les horreurs
dont on a été témoin, personne ne se soucie plus de la liberté ; que les élections
populaires sont une institution tout à fait grossière, que le peuple choisit
toujours mal, et que les gens comme il faut ne sont pas faits pour aller, comme
en Angleterre, se mêler avec le peuple ?.….
[…]
La liberté! répétons son nom avec d'autant plus de force, que les hommes qui
devraient au moins le prononcer comme excuse, l’éloignent par flatterie (les
ralliés : anciens révolutionnaires ou anciens bonapartistes) ; répétons-le sans
crainte de blesser aucune puissant respectable : car tout ce que nous aimons,
tout ce que nous honorons y est compris. Rien que la liberté ne peut remuer
l'âme dans les rapports de l’ordre social.
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QUESTIONS
1) Dans le cours, il est écrit que les libéraux sous la Restauration « veulent
fonder la vie politique sur la raison » et non sur la tradition. Qu’est-ce qui dans
ce texte vous semble l’illustrer ?
2) Relevez une phrase du texte qui montre que Mme de Staël a foi dans
l’homme.
Puisque nous vivons dans les temps modernes, je veux la liberté convenable
aux temps modernes, et puisque nous vivons sous des monarchies, je supplie
humblement ces monarchies de ne pas emprunter aux républiques anciennes
des moyens de nous opprimer.
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affections, pour l'indépendance des individus. Elle doit porter sur tous ces
objets une main plus prudente et plus légère.
Cette réserve de l'autorité, qui est dans ses devoirs stricts, est également dans
ses intérêts bien entendus; le despotisme qui était possible chez les anciens
n’est plus possible chez les modernes.
Que le pouvoir s’y résigne donc; il nous faut la liberté et nous l’aurons; mais
comme la liberté qu’il nous faut est différente de celle des anciens, il faut à
cette liberté une autre organisation que celle qui pouvait convenir à la liberté
antique... De là vient, Messieurs, la nécessité du système représentatif. Le
système représentatif n’est autre chose qu’une organisation à l’aide de laquelle
une nation se décharge sur quelques individus de ce qu'elle ne peut ou ne veut
pas faire elle-même...
Question
Constant pensait que les anciens jouissaient d’une liberté politique complète «
qui se composait de la participation active et constante au pouvoir collectif »;
mais dans la vie privée c'était « l’assujettissement de l’individu à l’ensemble.»
Rien n’était accordé à l'indépendance individuelle.
Dans les états modernes, les territoires plus grands, la disparition de
l'esclavage, le développement du commerce et des affaires font que « l'individu,
indépendant dans la vie privée, n'est même dans les Etats les plus libres,
souverain qu’en apparence.
Benjamin Constant dans ce texte fait une articulation entre la liberté politique
et la liberté individuelle, expliquez comment et citez ce qui à ses yeux est le
fondement de la liberté politique ?
Les doctrinaires ont dû à une autre cause et leur nom et leur influence qui a été
réelle malgré leur petit nombre : c'étaient, d'abord Royer-Collard, Camille
Jordan, Olivier de Serre, le duc de Broglie, auxquels se joignit F. Guizot. « Ils
sont quatre, disait un journal de gauche, qui tantôt se vantent de n'être que trois,
parce qu'il leur paraît impossible qu'il y ait au monde quatre têtes d'une telle
force, et tantôt prétendent qu'ils sont cinq, mais c'est quand ils veulent effrayer
leurs ennemis par leur nombre. »
22
THUREAU-DANGIN, Le parti libéral sous la Restauration, Paris, Plon. 1876,
Note p.79.)
Je me hâte d’en convenir; il y avait aussi, dans cette tentative, un grand orgueil,
mais un orgueil qui commençait par un acte d'humilité, car il proclamait les
terreurs d'hier en même temps que la volonté et l'espérance de n’y pas retomber
aujourd’hui. C'était à la fois rendre hommage à l'intelligence humaine et
l’avertir des limites de sa puissance; c'était faire acte de respect pour le passé
sans défection envers le présent et sans abandon de l'avenir. C'était
entreprendre de donner à la politique une bonne philosophie, non pour
souveraine maîtresse, mais pour conseillère et pour appui.
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leur importance comme leur nom. […] Les doctrinaires […] avaient à cœur
l'honneur intellectuel comme le bon ordre de la société; leurs idées se
présentaient comme propres à régénérer en même temps qu’à clore la
Révolution. Et ils avaient, là ce double titre, tantôt avec ses partisans, tantôt
avec ses adversaires, des points de contact qui leur attiraient, sinon une
complète sympathie, du moins une sérieuse estime : le côté droit les tenait pour
des royalistes sincères, et le côté gauche même en les combattant avec aigreur,
savaient bien qu'ils n'étaient les défenseurs ni de l’ancien régime ni du pouvoir
absolu.
François Guizot, Mémoires pour servir à l'histoire de mon temps, Paris, 1858,
t. 1 Ch. 5. p. 157 sqq.
Questions :
Article 1 - Tout Français jouissant des droits civils et politiques de, âgé de
trente ans accomplis, et payant 300 francs de contributions directes, est appelé
à concourir à l’élection des députés du département où il a son domicile
politique.
Article 8 - Les collèges électoraux sont convoqués par le Roi ; ils ne peuvent
s'occuper d’autres objets que de l'élection des députés; toute discussion, toute
déclaration leur sont interdites.
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Article 9 Les électeurs se réunissent en une seule assemblée, dans les
départements où leur nombre n’excède pas 600. Dans ceux où il y en a plus de
600, le collège électoral est divisé en sections, dont chacune ne peut être
moindre de 300 électeurs. Chaque section concourt directement à la
nomination des députés, que le collège électoral doit élire.
[…]
Article 11 Les électeurs votent par bulletins de liste. Il n’y a que trois tours de
scrutin.
[…]
Article 19 Les députés à la Chambre ne reçoivent ni traitement indemnités.
Questions :
La Charte, et c’est là une des plus grandes vues de son auguste fondateur, la
Charte a fait porter son système électoral tout entier sur la propriété. Et certes
dans le renversement violent de toutes nos institutions dans cette destruction
absolue de tout ce qui existait d'honorable ou d’utile, dans ce naufrage général
de toute vertu, de tout sentiment généreux, de toute mora
rale, il avait bien fallu s'attacher à la seule planche qui nous restait encore.
C’est donc là aussi, Messieurs cette planche qu’il faut saisir: nous ne pouvons
pas nous flatter de rencontrer toujours des hommes d'un caractère honorable,
d’un talent connu, d’une moralité éprouvée
ce sont des exceptions qu'il faut découvrir : mais en matière d'élection, il faut
des bases plus générales. ll en faut surtout qui puissent offrir une garantie plus
universelle; et quelle garantie, en ce genre, plus universelle de la propriété ? .
Le propriétaire ne peut pas ne pas aimer son pays; il tient au sol par des
racines qui prennent chaque jour plus de force; il a un grand intérêt à l’ordre, à
la stabilité du gouvernement, à sa légitimité, au repos public ; cet intérêt doit
même naturellement augmenter sans cesse ;
les révolutions doivent l'effrayer; tout ce qui est trouble même, tout ce qui est
désordre, fermentation , mouvement, doit lui donner de vives sollicitudes ; son
plus grand besoin doit être de s’en affranchir,et comme il ne peut s’en
affranchir qu’en concourant
lui-même à la tranquillité générale, en l'affermissant, en l'appuyant sur des
bases qu'on ne puisse pas renverser il est impossible qu'il ne travaille pas à y
contribuer de tout son pouvoir.
Raymond DE SÈZE. Chambre des pairs, 30 janvier 1817, Arch. Parl.T. XVIII.
p. 463.
25
Question
......................................................................................................
......................................................................................................
Art. 7. - Nul ne peut être élu député aux deux premiers tours de scrutin,
s'il ne réunit au moins le tiers plus une des voix de la totalité des
membres qui composent le collège, et la moitié plus un des suffrages
exprimés.
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......................................................................................................
Art. 11. - Les dispositions des lois des 5 février 1817 et 25 mars 1818
auxquelles il n'est pas dérogé par la présente, continueront d'être
exécutées, et seront communes aux collèges électoraux de département
et d'arrondissement.
3 - La durée des engagements volontaires sera de six ans dans les légions
départementales et de huit ans dans les autres corps. ;
6 Chaque année, dans les limites fixées par l'art. 5, le nombre d'hommes
appelé sera réparti entre les départements, arrondissements et cantons,
proportionnellement à leur population.
7- Le contingent assigné à chaque canton sera fourni par un tirage au sort entre
les jeunes Français qui auront leur domicile légal dans le canton, et qui auront
atteint l’âge de vingt ans révolus, dans le courant le l'année précédente,
Questions :
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1) A quand remonte la conscription ?
2) Cette loi est-elle égalitaire ?
En même temps que Charles X mécontente ceux qui sont ses alliés naturels, un
camp se constitue qui rassemble, provisoirement, les différentes familles
libérales avec les républicains plus radicaux, en passant par les anticléricaux
révulsés par les prétentions théocratiques. La société française est agitée par
leurs mouvements plus ou moins secrets : ouvertement, l'association Aide-toi
le Ciel t'aidera soutient activement et efficacement les libéraux au moment des
élections. La Charbonnerie, implantée dans tout le pays, a tenté des coups de
force dès 1821-1822 qui ont été sévèrement réprimés, continue son action mais
elle n’est qu’un courant parmi tous ceux qui, au même moment, rassemblent
des jeunes gens désireux d’imaginer de nouveaux cadres de vie. Une recherche
tumultueuse mêle toutes les aspirations et ose tous les rapprochements :
messianisme révolutionnaire devant se réaliser dans les communautés,
inventions de relations personnelles tout à la fois mystiques et économiques
des saint-simoniens, critique sociale issue du catholicisme, vision fouriériste
d’un univers organisé jusque dans les concordances psychologiques, les
rénovations sociales les plus inédites sont envisagées pour trouver une issue à
la crise ouverte depuis 1789, débouchant sur des solutions qualifiées plus tard
d’utopiques. Naissent ainsi des sociétés industrielles, mâtinées de mysticisme,
des phalanstères réunissant des contractants représentatifs des types humains,
ou des familistères, toutes organisations qui associent les dimensions humaines
et spirituelles aux considérations politiques et sociales pour réussir là où la
Révolution a échoué. Il faut examiner ces projets avec indulgence puisqu'ils
essaient de résoudre les tensions apparues précisément
entre l'Etat et la Nation, qu’ils engendreront ici et là des organismes durables
actifs localement et qu’ils diffusent une culture politique parmi les classes
populaires qui abandonnent
peu à peu des pratiques violentes traditionnelles . Dans l’immédiat, ces
courants instables contribuent davantage à alourdir le climat qu’à impulser une
ligne politique. 1848 leur devra
beaucoup, dans sa réussite initiale comme dans ses échecs. Bien plus tard, ils
inspireront des situations « alternatives aux sociétés occidentales ou
soviétiques. Grâce à eux, l’héritage révolutionnaire est réinterprété et trouve
une seconde jeunesse.
Les libéraux, qu’ils insistent sur le recours aux notables détenteurs de la raison
d’État, sur les libertés individuelles sur un catholicisme considéré comme
garant de la démocratie forment toujours l’aile marchante de la critique du
régime regroupent derrière eux tous ceux, toujours plus nombreux qui se
sentent bridés par les lois toujours plus réactionnaires.
Les mouvements culturels renforcent la tendance, puisque les romantiques
français (même si le mot recouvre une réalité complexe, voire contradictoire)
28
qui avaient enraciné initialement leur esthétique dans la défense de la
catholicité et de la monarchie, contre la raison et la Révolution, glissent peu à
peu vers un libéralisme artistique qui se combine avec le libéralisme politique
et qui attire les jeunes générations. L’évolution de Victor Hugo, qui devient
précisément en 1830, l’un des chefs de cette sensibilité est significative. La
préface d’Hernani affirmant, en mars 1830, que « le romantisme n’est à tout
prendre, que le libéralisme en littérature », illustre l’effritement de la position
de la monarchie traditionnelle dans tous les domaines. Hugo incarne l’une des
« voix de la liberté selon la formule de M. Winock, qui s'élève contre le régime
avec d’autant plus d’éclat qu’il en avait été un des soutiens remarqués dix ans
plus tôt.
29
Révolutionnaires et socialistes
30
commuée en déportation. Blanqui arrêté à son tour en octobre, subit la même
peine. De nombreux condamnés avaient déjà été poursuivis pour leur activisme
républicain, composant une sorte de réserve de révolutionnaires professionnels.
Leur erreur et celle de leurs chefs avait été de croire que, à partir de la prise de
l'Hôtel de Ville, ils parviendraient à mobiliser la population parisienne ; or,
dans son ensemble, le « peuple » resta inactif.
31
De même, le socialisme utopique d’Étienne Cabet, auteur du Voyage en Icarie
à grand succès.
Opposé à la violence, il a foi dans une transformation progressive de la société,
grâce à un régime démocratique transitoire issu du suffrage universel, qui
établira l'inégalité décroissant le droit au travail, le salaire minimum, en
attendant la socialisation générale de l’économie. Refus des conspirations, rèjet
de Ia violence, c’est aussi le parti pris de Proudhon, défenseur de l’anarchie, un
temps admiré par Marx pour son essai sur la propriété, et qui développe une
théorie de la banque du peuple. Tous ces mouvements de pensée, auxquels il
faut joindre les noms de Pierre Leroux, de Constantin Pecqueur, de tant
d’autres, favoriseront un climat spécifique à la révolution de 1848, qui fut
considérée comme la première révolution socialiste. Les deux méthodes, celle
du socialisme insurrectionnel et celle du socialisme ouvrier s’y affronteront.
Questions :
II L a M o n a r c h i e d e J u i l l e t ( 1830- 1848).
1) Qui est à gauche, qui est à droite sous la Restauration ? Sous la Monarchie
de Juillet ? (voir les forces politiques en présence).
2) Que peut-on dire de l’opinion ?
3) Quelles sont les grandes phases du régime ?
TRAVAIL A EFFECTUER :
32
Chambres le 7 août et acceptée par nous le 9, sera de nouveau publiée
dans les termes suivants :
Article 1. - Les Français sont égaux devant la loi, quels que soient
d'ailleurs leurs titres et leurs rangs.
Article 10. - Toutes recherches des opinions et des votes émis jusqu'à la
Restauration sont interdites : le même oubli est commandé aux
tribunaux et aux citoyens.
Article 16. - Toute loi doit être discutée et votée librement par la
majorité de chacune des deux Chambres.
Article 17. - Si une proposition de loi a été rejetée par l'un des trois
pouvoirs, elle ne pourra être représentée dans la même session.
Article 19. - La liste civile est fixée pour toute la durée du règne par la
première législature assemblée depuis l'avènement du roi.
Article 21. - Elle est convoquée par le roi en même temps que la
Chambre des députés. La session de l'une commence et finit en même
temps que celle de l'autre.
Article 22. - Toute assemblée de la Chambre des pairs qui serait tenue
hors du temps de la session de la Chambre des députés, est illicite et
nulle de plein droit, sauf le seul cas où elle est réunie comme cour de
justice, et alors elle ne peut exercer que des fonctions judiciaires.
34
Article 24. - Les pairs ont entrée dans la Chambre à vingt-cinq ans, et
voix délibérative à trente ans seulement.
Article 26. - Les princes du sang sont pairs par droit de naissance : ils
siègent immédiatement après le président.
Article 28. - La Chambre des pairs connaît des crimes de haute trahison
et des attentats à la sûreté de l'Etat, qui seront définis par la loi.
Article 30. - La Chambre des députés sera composée des députés élus
par les collèges électoraux dont l'organisation sera déterminée par des
lois.
Article 32. - Aucun député ne peut être admis dans la Chambre, s'il
n'est âgé de trente ans et s'il ne réunit les autres conditions déterminées
par la loi.
Article 34. - Nul n'est électeur, s'il a moins de vingt-cinq ans, et s'il ne
réunit les autres conditions déterminées par la loi.
Article 35. - Les présidents des collèges électoraux sont nommés par les
électeurs.
Article 36. - La moitié au moins des députés sera choisie parmi les
éligibles qui ont leur domicile dans le département.
Article 37. - Le président de la Chambre des députés est élu par elle à
l'ouverture de chaque session.
35
Article 38. - Les séances de la Chambre sont publiques mais la demande
de cinq membres suffit pour qu'elle se forme en Comité secret.
Article 40. - Aucun impôt ne peut être établi ni perçu, s'il n'a été
consenti par les deux Chambres et sanctionné par le roi.
Article 41. - L'impôt foncier n'est consenti que pour un an. Les
impositions indirectes peuvent l'être pour plusieurs années.
Article 42. - Le roi convoque chaque année les deux Chambres : il les
proroge et peut dissoudre celle des députés ; mais, dans ce cas, il doit
en convoquer une nouvelle dans le délai de trois mois.
Article 43. - Aucune contrainte par corps ne peut être exercée contre un
membre de la Chambre durant la session et dans les six semaines qui
l'auront précédée ou suivie.
Des ministres
De l'Ordre judiciaire
Article 48. - Toute justice émane du roi ; elle s'administre en son nom
par des juges qu'il nomme et qu'il institue.
36
[…]
Questions :
37
1) Comment Tocqueville voit la classe moyenne ? De quoi est-elle le
support ?
2)
Quelle catégorie sociale triomphe selon lui dans la révolution de 1830 ?
Question
« Dans ce monde politique (...) ce qui manquait le plus (...) c’était la vie
politique elle-même. Elle ne pouvait guère naître ni se soutenir dans le
cercle légal que la constitution avait tracé ; l’ancienne aristocratie était
vaincue, le peuple était exclu. Comme toutes les affaires se traitaient
entre les membres d’une seule classe, dans son intérêt, dans son esprit,
on ne pouvait trouver de champ de bataille où de grands partis
puissent se faire la guerre. Cette singulière homogénéité de position,
d’intérêt et, par conséquent, de vues, qui régnait dans ce que M. Guizot
38
avait appelé le pays légal, ôtait aux débats parlementaires toute
originalité et toute réalité, partant toute passion vraie. ».
Questions
Une question préalable doit être traitée, si le trône est vacant, nous sommes
libres de choisir la forme de notre gouvernement.
Avant d'offrir la couronne à un individu quelconque, il est bon de savoir dans
quelle espèce d’ordre politique nous constituerons l'ordre social. Etablirons-
nous une république ou une monarchie nouvelle ?.….
Une république aurait d’abord contre elle les souvenirs de la république même.
Ces souvenirs ne sont nullement effacés.
Un roi nommé par les Chambres ou élu par le peuple sera toujours, quoi qu’on
fasse, une nouveauté. Or, je suppose qu'on veut la liberté, surtout la liberté de
la presse. Toute monarchie nouvelle sera forcée, ou plus tôt ou plus tard, de
baillonner cette liberté. Fille nos malheurs et esclave de notre gloire, la liberté
de la presse ne vit en sûreté qu'avec un gouvernement dont les racines sont déjà
profondes. Une monarchie bâtarde d’une nuit sanglante, n'aurait-elle rien à
craindre de l’indépendance des opinions ?.….
Charles et son fils sont déchus ou ont abdiqué mais le trône n’est pas vacant;
après eux venait un enfant.
J'ai transporté le combat sur le terrain de mes adversaires; je ne suis point allé
bivouaquer dans le passé sous le vieux drapeau des morts, drapeau qui n'est pas
sans gloire, mais qui pend le long du bâton qui le porte, parce qu'aucun souflle
de vie ne le soulève. Quand je remuerais la poussière des 35 Capets, je n'en
tirerais pas un argument qu’on voulût seulement écouter. L'idolâtrie d’un nom
est abolie; la monarchie n’est plus une religion, c’est une forme politique,
préférable dans ce moment à tout autre, parce qu'elle fait mieux entrer l’ordre
dans la liberté.
Questions
40
François Guizot se montre très méfiant envers tous les mouvements populaires
ainsi quand il s’inquiète que « les prétentions révolutionnaires grondaient
autour de nous ».Ceci peut s’expliquer par le traumatisme qu’il subit quand à
l’âge de sept ans, il perdit son père guillotiné sous la première République,
pendant la Terreur car il était favorable aux girondins.
Je suis monarchique en France par les mêmes raisons et dans les mêmes
intérêts;... la monarchie est, de nos jours, en France, le gouvernement naturel et
vrai, le plus favorable à la liberté comme à la paix publique, le plus propre à
développer les forces légitimes et salutaires comme à réprimer les forces
perverses et destructives de notre société.
Mais la monarchie est autre chose qu’un mot et une apparence. Il y avait autant
de légèreté que de confusion dans les idées à parler sans cesse d’un trône
entouré d'institutions républicaines comme de la meilleure des républiques.
La monarchie que nous avions à fonder n'était pas plus une monarchie élective
qu’une République.
Amenés par la violence à rompre violemment avec la branche ainée de notre
maison royale, nous en appelions à la branche cadette pour maintenir la
monarchie en défendant nos libertés. Nous ne choisissions point un Roi ; nous
traitions avec un prince que nous trouvions à côté du trône et qui pouvait seul,
en y montant, garantir notre droit public et nous garantir des révolutions.
L'appel au suffrage populaire eût donné à la monarchie réformée précisément
le caractère que nous avions à cœur d'en écarter ; il eût mis l’élection à la place
de la nécessité et du contrat. C’eût été le principe républicain profitant de
41
l'échec que le principe monarchique venait de subir pour l’expulser
complètement et prendre, encore sous un nom royal, possession du pays.
Questions
Voilà donc la Charte de 1814 promulguée avec des modifications. Mais par
cela seul que c'est la charte de 1814 la restauration n'est-elle pas conservée ?
Et c’est là ce qu'on appelle la révolution de juillet, les institutions de juillet, le
roi de juillet ou des barricades ! Non, non, c’est la contre-révolution de Juillet,
ce sont les institutions de la restauration, c’est l'élu de 219 députés sans mandat,
et de quelques pairs sans pouvoir !
Et ils se disent les sauveurs ... Oui, ils sont les sauveurs de la restauration, de
l’aristocratie, d’eux-mêmes et peut-être de la légitimité. Mais ils sont les
destructeurs de la révolution et de la cause populaire
Tous ceux des deux cent vingt et un qui n'approuvaient pas la révolution
étaient des vaincus destitués par la victoire : comment pouvaient-ils imposer
des lois aux vainqueurs ?
Les autres n’étaient plus que des rebelles, des insurgés, des révolutionnaires,
qui n'avaient aucun madat ni pour faire un roi ni pour rédiger une constitution.
42
Nous n’avons pas même une charte entière, mais seulement une demi-charte,
une quasi-charte ; car elle ne contient ni l’organisation de la pairie, ni les
dispositions qui sont le plus essentiellement constitutionnelles, celles relatives
à la représentation nationale, au droit d'élection et d'éligibilité, aux
administrations municipale et départementale, à la garde nationale et à
l'instruction publique ; elle abandonne tous ces objets d’une importance si
capitale à la forme et à la mobilité des simples lois, qui sont préparées et
sanctionnées par le roi, et qui peuvent être continuellement changées ; en sorte
que, par exemple, dans un moment de crise et de victoire, le gouvernement et
des chambres vendues ou complices pourraient diminuer encore le nombre des
électeurs et des éligibles, et détruire plus complètement la représentation
nationale.
Faite par des députés provisoires, comme disait Benjamin Constant, elle ne
peut être elle-même qu'une Constitution provisoire : les citoyens ont le droit de
la critiquer sans cesse; et c'est un devoir pour les députés de demander un
congrès national qui la remplace par une constitution definitive.
Question :
Il y eut de nombreuses lois, sur la garde nationale, sur les élections, sur
l’organisation de la pairie etc
3. — Les maires et les adjoints sont nommés par le Roi, ou en son nom par le
préfet. Dans les communes qui ont 3.000 habitants et au-dessus, ils sont
nommés par le Roi, ainsi que dans les chefs-lieux d'arrondissement... — Les
maires et les adjoints seront choisis parmi les membres du conseil municipal.…
43
10. Les conseillers municipaux sont élus par l'assemblée des électeurs
communaux.
1°) Les citoyens les plus imposés aux rôles des contributions directes de la
commune, âgés de 21 ans accomplis, dans les proportions suivantes : pour les
communes de 1.000 âmes et au-dessous, un nombre égal au 1/10 de la
population... Ce nombre s’accroîtra de 5 par 100 habitants... de 1.000 à 5.000,
de 4 par 100 habitants de 5.000 à 10.000, de 3 par 100 habitants au dessus de
10.000.
2°) Les membres des cours et tribunaux, les juges de paix... ; les membres des
chambres de commerce des conseils de manufacture, des conseils de
prud’hommes ; les membres des commissions administratives des collèges, des
hospices et des bureaux de bienfaisance; les officiers de la garde nationale; les
membres et correspondants de l’Institut, les membres de sociétés savantes, les
docteurs d’une ou plusieurs facultés ; les avocats.…, les avoués, les notaires... ;
les anciens fonctionnaires de l’ordre administratif ou judiciaire jouissant d’une
pension de retraite ;... les officiers de terre et de mer jouissant d’une pension de
retraite, les citoyens appelés à voter aux élections des membres de la Chambre
des députés ou des conseils généraux.
27- La dissolution des conseils municipaux peut être prononcée par le Roi.
47 -Aucun électeur ne pourra déposer son vote qu’après avoir prêté entre les
mains du président serment de fidélité au Roi des Français, d’obéissance à la
Charte constitutionnelle et aux lois du royaume.
44
des portes et fenêtres, les redevances fixes et proportionnelles des mines,
l'impôt des patentes, et les suppléments d'impôts de toute nature connus sous le
nom de centimes additionnels.
38 - La Chambre des députés est composée de 159 députés.
47- Avant de voter pour la première fois, chaque électeur prête le serment
prescrit par la loi du 31août 1830.
48- Chaque électeur, après avoir été appelé; reçoit du président un bulletin
ouvert, sur lequel il écrit ou fait écrire secrètement son vote... sur une table
disposée à cet effet et séparée du bureau. Puis remet son bulletin écrit et fermé
au président...
59 - Nul ne sera éligible à la Chambre des députés, si, au jour de son élection,
il n'est âgé de 30 ans et s’il ne paie 500 fr. de contributions directes.
66- La Chambre des députés a seule le droit recevoir la démission d'un de ses
membres.
67- Les députés ne reçoivent ni traitement ni indemnités.
Questions
1) Quel type de suffrage est repris dans ce texte de loi pour être électeur ?
2) Que signifie le mot contribution ? Quand a t’il commencé à être utilisé en
droit électoral ?
3) De quand datent les contributions visées dans l’article 4 ?
I LE MOUVEMENT
Qu'est-ce que nous voulons ? Nous ne voulons pas autre chose que ce que nous
avons voulu en juillet. Nous étions libres alors de toute affection personnelle,
de tout engagement de serment, de l'influence des faits consommés, du respect
d'institutions fondées, nous pouvions créer à nouveau, nous étions en
présence de notre seule conviction. Alors, par la seule force de cette conviction,
nous avons voulu la monarchie héréditaire, nous l'avons voulue forte pour
qu'elle garantît l'unité de l'Empire... Nous l'avons voulue forte pour qu’elle pût
protéger la loi envers et contre tous; mais nous l’avons voulue avec des
conditions qui lui sont propres, qu’elle ne peut pas éviter... c'est-à-dire une
monarchie avec des institutions populaires, une monarchie qui ne s’appuie ni
sur des intérêts de famille, de caste, d’aristocratie, ni sur le patronage de
l'étranger, mais une monarchie qui s’identifie avec les intérêts de la patrie, avec
les sentiments nationaux, qui répond à ce besoin d'égalité qui se fait sentir dans
la société.
45
Voilà la monarchie que nous avons voulue en juillet, et que nous voulons
toujours..…; hors d’une monarchie ainsi instituée, il n’y a que des
impossibilités.
Question
Je crois que ce ne sera jamais qu’au nom de la liberté que l’on pourra
combattre le désordre et l'anarchie. Je crois que le meilleur moyen de rallier la
population à la défense des lois, c’est de lui montrer que par là seulement elle
obtiendra toutes les garanties de paix, de liberté auxquelles elle a droit. Certes,
le gouvernement actuel ne voudrait pas, quand il le pourrait employer les
moyens de violence contre des hommes qui peuvent n'être qu'égarés : il ne
voudrait pas, avant que les moyens de conciliation eussent été épuisés,
46
déployer une force matérielle qui pourrait avoir pour résultat de faire couler le
sang français, si ce n’est à la dernière de toutes les extrémités.
Question
Quelle est dans ce texte, une cause de la Révolution de 1830 selon O. Barrot ?
LA RESISTANCE
Quoi de plus choquant que de faire du pouvoir appelé à présider aux destinées
d’une nation, un serviteur qu'elle peut congédier quand il lui plaît ? Et quel
mensonge que la prétention d’élire un roi au moment même où l’on invoque la
monarchie comme ancre de salut! J'étais toujours tenté de sourire quand
j'entendais dire, du roi Louis : Philippe, le Roi de notre choix, comme si, en
1830, nous avions eu à choisir, et si M. le duc d'Orléans n’avait pas été
l’homme unique et nécessaire. J'attaquai hautement ces illusions d’une
badauderie vaniteuse et ces sophismes de la force matérielle qui veut se
satistaire et n'ose s’avouer. Je niai la souveraineté du peuple, c'est-à-dire du
nombre, et le droit permanent d'insurrection. Je montrai, dans M. le duc
d'Orléans, ce qu’il était en effet, un prince du sang royal heureusement trouvé,
près du trône brisé, et que nécessité avait fait roi. La France avait traité avec lui
comme on traite, pour se sauver, avec le seul qui puisse vous sauver. En
présence de l'anarchie imminente, un tel contrat peut devenir une bonne base
de gouvernement et de gouvernement libre, car il a lieu entre des forces
réellement distinctes l’une de l’autre, et il admet des droits et des devoirs
mutuels sans que, ni à l'un ni à l’autre des contractants, il suppose ou confère
souveraineté... La volonté des peuples ne suffit pas à faire des rois ; il faut que
47
celui qui devient roi porte en lui-même et apporte en dot, au pays qui l’épouse
quelques-uns des caractères naturels et indépendants de la royauté.
Questions :
Dans nos affaires intérieures, la Charte, toute la Charte, rien que la Charte. En
empruntant ces paroles à un illustre ami, j’y trouve notre symbole politique.
Oui, c’est dans l’enceinte sacrée de la Charte que nous avons renfermé
l'exercice de notre autorité : nous voulons marcher jusqu’à ses dernières limites
mais les dépasser, jamais. Qui pourrait dire que ce système n’est pas conforme
à l'esprit de la Révolution de Juillet, qu'il résiste à son mouvement, qu'il
s’oppose à ses conséquences ?
Elle est venue, non recommencer, mais terminer notre première Révolution.
Elle n’est pas un signal donné à la France et au monde pour les appeler à
d’aventureuses expériences et à d’interminables combats...
Tel est donc notre système... C’est de faire de la Charte la règle invariable de
nos actes; c’est de reconstituer le pouvoir, et de lui rendre la force et l'unité qui
lui manquent; c’est de rasseoir tous les intérêts, en leur créant des garanties
d’ordre et de stabilité ; c'est de respecter les lois, de puiser dans l’ordre légal
dans la force morale qui en découle, tous les moyens d'action et d'influence...
Casimir Périer, Discours à la Chambre des députés, 9 août 1831. Arch. Parl. t.
LXIX. p. 68 et suiv.
Question :
48
Qu’est ce qui dans le propos de Casimir Périer illustre les idées du parti de la
résistance ?
La Charte n’a pas fait deux pouvoirs actifs et un pouvoir inerte. Elle a créé
dans la royauté quelque chose de réel, de vivant, d’agissant, comme les deux
autres pouvoirs. Ce n’est pas un être abstrait, une personnification impalpable
placée au sommet de la pyramide constitutionnelle, comme une idole muette et
sans mains. Ce serait là le comble de l'absurde et le comble du danger; car, je
vous le demande, quel sens cela aurait-il ? Ne serait-ce pas une vraie dérision
du pouvoir social que d’avoir placé au sommet des institutions d’un grand
peuple l'image de la stupidité, là où vous avez voulu placer l'inviolabilité, sans
doute, mais aussi la souveraine dignité, la souveraine intelligence la souveraine
prévoyance et la souveraine liberté ?
Eh bien, Messieurs, dans le système de nos adversaires, que faites-vous de
cette action réelle de la royauté ? Vous faites de la royauté une abstraction
couronnée. Vous ne personnifiez en elle une part de souveraineté nationale, et
toutes les hautes fonctions d'unité, de majesté, de permanence des pouvoirs,
pour les frapper plus haut de nullité et de moquerie. Vous lui dites : « Nous te
créons à condition d’être inutile: nous t’adorons à condition d’être
impuissante ; tu seras roi à condition de n'avoir pas même cette part inaliénable
de liberté d'action, de volonté politique qu'a chez nous le dernier des citoyens
du pays. »
Votre Roi serait hors la loi... Non jamais un tel roi ne se rencontrera chez un tel
peuple ; jamais un tel peuple ne se contenterait d’un pareil roi.
C’est aussi l'opinion véritable de Guizot, bien qu'alors engagé dans la coalition
contre le ministère Molé :
On aura beau dire : le roi règne et ne gouverne pas ; on ne fera jamais, dans la
pratique, sortir de ces paroles, la conséquence effective que le roi qui règne ne
soit rien dans son gouvernement. Quelque limitées que soient les attributions
de la royauté, quelque complète que soit la responsabilité de ses ministres, ils
auront toujours à discuter et à traiter avec la personne royale pour lui faire
accepter leurs idées et leurs résolutions, comme ils ont à traiter avec les
Chambres pour y obtenir la majorité. Et dans toute dicussion, dans toute
délibération, l'homme dont le concours est nécessaire, exerce infailliblement,
dans la mesure de son habileté, de son caractère, des circonstances plus ou
moins favorables, une part d’influence.
49
F. Guizot, Mémoires, T. VIII. p. 85.
Question
« Le trône n’est pas un fauteuil vide » montrer à partir des deux textes de
Lamartine et de Guizot à quelle conception de la monarchie se rattache cette
déclaration de F.Guizot.
Questions :
50
Les notables, le terme sert aux contemporains pour définir la catégorie
dirigeante : aristocrates, pseudo-nobles ou grande bourgeoisie. Un préfet
arrive-t-il dans son département? Il écrit le plus rapidement possible comme
Bocher, d’Auch en mai 1839 :
« J'ai déjà eu l’honneur de recevoir une partie des notables de la ville ».
Ces catégories dirigeantes exercent leur pouvoir au niveau local, car c'est en
province que prend naissance leur puissance qu’il s'agisse des grands
propriétaires fonciers ou des chefs d’entreprises industrielles annonçant le
grand capitalisme ultérieur. Mais, maîtres de l'administration locale, les
notables ne maîtrisent plus leur région sans participer aussi à la direction
nationale, en dominant le parlement, l’administration, les institutions
51
économiques (encore peu développées) ou intellectuelles, par eux-mêmes ou
par mandataires interposés. :
L'expansion économique.
Succédant à une époque de crise (en 1840) et à une période d'instabilité (15
ministères en dix ans...), le cabinet Soult-Guizot bénéficie de la crainte
ressentie par les notables et par une grande partie de la bourgeoisie à l'encontre
de la guerre et de la révolution.
Il va jouer sur cette crainte et lui opposer comme programme de gouvernement
la paix, la stabilité et la prospérité.
Une bonne gestion financière contribue à cette prospérité, même si les efforts
du ministre des Finances Humann pour accroître le rendement de l'impôt
provoquent une agitation fiscale au moment du recensement de 1841. Les
dépenses de l'État deviennent un facteur de croissance, 534 millions sont
engagés dans des travaux publics surtout dans les chemins de fer, mais leur
répartition aggrave les inégalités régionales.
52
industries du verre, du sucre, dans la filature ainsi qu’on peut le voir avec les
autorisations accordées par le gouvernement pour la formation des sociétés
anonymes.
De plus l’État fausse cette concurrence par la protection douanière mais aussi
par les liens étroits entre l'autorité politique, l’autorité administrative et les
grandes affaires. Après la loi du 11 juin 1842 qui devient la charte de la
construction ferroviaire en France, associant l’État, les communautés locales et
les grandes compagnies concessionnaires, ces dernières peuplent leurs conseils
d’administration de pairs de France, de députés, de généraux, de magistrats ou
de détenteurs de titres de noblesse. Entre les groupes rivaux prenant appui sur
des antagonismes locaux opposant ville à ville ou département à département
dans le choix des tracés, ou quartier à quartier pour l'emplacement des gares,
l’État joue un rôle d’arbitre dont les décisions ne sont pas dénuées parfois de
préférences politiques.
Ainsi donc, le libéralisme n'est pas la complète neutralité de l'État. Par sa non-
intervention et aussi par les formes de son intervention, il avantage les
producteurs aux dépens des consommateurs et aussi par la protection douanière
et plus encore par une fiscalité tirant la plus grande partie de ses ressources des
taxes et contributions indirectes pesant le plus lourdement sur les
consommateurs des classes populaires.
Mais l'État est obligé d'intervenir en raison des nouveaux problèmes qui se
posent à lui; volens nolens, la monarchie de Juillet fit voter la loi du 22 mars
1841 réglementant le travail des enfants dans les manufactures (n’interdisant le
travail il est vrai qu’au dessous de huit ans). C'était le résultat de longues
négociations entamées sous de précédents ministères. Laissant indifférente une
bonne partie de la Chambre (il n'y eut que 235 députés présents sur 459 au
moment du vote), la loi ne fut que lentement appliquée.
Il semble bien que Guizot et Duchatel aient souhaité donner une impulsion à
l’activité économique mais des oppositions au projet d'union commerciale avec
la Belgique (et peut-être la Hollande) les firent renoncer à ce qui aurait été un
stimulant pour l’industrie française. L’essai de Consultation des conseils
généraux de département, en 1845 notamment, sur des problèmes agricoles et
sur le crédit agricole, tourna court. I! était bien difficile de légaliser
l’innovation dans un système conservateur; l'expansion économique sur
laquelle nous reviendrons faisait éclater la société traditionnelle, appuyée sur
les notables, au moment où se durcissait au contraire le système
gouvernemental qui en était la traduction politique.
53
De la stabilité à la stagnation politique.
54
Or, l'agitation légitimiste qui s’anime à la fin de 1843 est utilisée par le
gouvernement de Guizot qui exagère volontiers le péril pour se maintenir,
L'opposition légitimiste avait paru moins dangereuse en devenant
parlementaire, avec Berryer notamment. Or, la mort du duc d'Orléans, en
affaiblissant la nouvelle dynastie, relevait les espoirs du jeune duc de Bordeaux.
Poussés à la fois par la nécessité de regrouper les tendances divergentes du
légitimisme et par le désir de confirmer son rôle de prétendant (ne serait-ce que
pour enrayer les ralliements à Louis-Philippe), ses partisans organisèrent un
voyage à Londres sous l’incognito vite connu du comte de Chambord: à la fin
de novembre et en décembre 1843 près d’un millier de légitimistes allèrent
saluer dans sa résidence de Belgrave Square celui qui était pour eux « Henri V
». La présence d’un Pair de France et de cinq députés souleva à la Chambre des
députés un débat à la suite duquel fut flétrie la visite à Londres des députés
qui avaient ainsi donné une marque d’adhésion à une autre forme de
gouvernement; ce vote ne fut acquis que par 220 voix contre 190 après un
débat très passionné contre Guizot. Cet incident permettait certes au régime de
Juillet d’éviter le reproche d'oublier ses origines; mais en arrêtant le ralliement
des notabilités légitimistes au système conservateur, il affaiblit celui-ci et
aggrave les tensions au sein des catégories dirigeantes.
III L A D E U X I E M E R E P U B L I Q U E
55
2) Lors des élections des 23 et 24 avril pour former l’Assemblée
nationale Constituante, quelle est la position de l’extrême gauche face
au suffrage universel et quelle justification y apporte-t’elle ?
3) Les caractéristiques de la Constitution du 4 novembre 1848 ?
4) Les élections du 10 décembre 1848. Comment s’explique leur
résultat ?
5) élections législatives du 13 mai 1849 : quelle évolution traduisent-
elles au regard des débuts de la IIe République ?
6) La politique de l’Assemblée législative.
7) Les relations entre l’Assemblée législative et le Président de la
République.
8) Le leg de la IIe République.
Durant cette journée, je n’aperçus pas dans Paris un seul des anciens
agents de la force publique, pas un soldat, pas un gendarme, pas un
agent de police ; la Garde nationale avait disparu. Le peuple seul portait
les armes, gardait les lieux publics, veillait, commandait, punissait ; (...)
Questions
56
2) Tocqueville dans son texte évoque une démocratie naissante : relevez
le passage pertinent sur ce point.
Question
Aussitôt après avoir voté moi-même, je leur dis adieu, et, montant en voiture,
je partis pour Paris.
Questions :
1) « l’égalité brutale était affichée sur tous les murs » que veut dire l’auteur par
cette phrase ? Quel est le changement réalisé en matière politique que le texte
évoque ? Est-ce nouveau ?
2) Qu’est-ce qui manque encore à la population pour l’exercice de ce
changement ?
......................................................................................................
Chapitre premier
Art. 24. - Les collèges électoraux s'ouvrent au jour fixé par la loi pour les
élections auxquelles ils doivent procéder. - Le jour de l'ouverture du
scrutin devra toujours être un dimanche ou un jour férié, sauf toutefois
le cas prévu par le troisième paragraphe de l'article 31 de la
Constitution.
......................................................................................................
Art. 65. - Dans les cas où le nombre des candidats réunissant au moins
ce chiffre de voix est resté inférieur au nombre de représentants attribué
au département par la loi, l'élection est continuée au deuxième
dimanche qui suit le jour de la proclamation du résultat du premier
scrutin, et alors elle a lieu à la majorité relative, quel que soit le nombre
des suffrages obtenus.
Art. 66. - Dans tous les cas où il y a concours par égalité de suffrages, le
plus âgé obtient la préférence.
[…]
59
ART. 1er. Dans les trente jours qui suivront la promulgation de la
présente loi, la liste électorale sera dressée par le maire, assisté de
deux délégués désignés pour chaque commune par le juge de paix et
domiciliés dans le canton.
[…]
60
assistés de deux témoins domiciliés dans la commune, devant le maire,
pour faire leurs déclarations.
Ceux qui n’auront pas requis cette inscription ne pourront voter qu’au
lieu de leur domicile.
6. Les militaires présents sous les drapeaux dans les armées de terre
ou de mer seront inscrits sur la liste électorale de la commune où ils
auront satisfait à l’appel.
9° Ceux qui auront été condamnés à trois mois de prison au moins, par
application des articles 439, 443, 444, 445, 446, 447 et 452 du Code
pénal ;
10° Ceux qui auront été déclarés coupables des délits prévus par les
articles 410 et 411 du Code pénal et par la loi du 21 mai 1836 portant
prohibition des loteries ;
62
fonctions, ou envers un témoin à raison de ses dépositions, pour délits
prévus par la loi sur les attroupements et la loi sur les clubs, et pour
infractions à la loi sur le colportage, ainsi que les militaires envoyés par
punition dans les compagnies de discipline, ne pourront pas être
inscrits sur la liste électorale, pendant cinq ans, à dater de l’expiration
de leur peine.
Les causes de cette journée sont assez confuses. Les élections du 23 avril 1848
malgré la première application du suffrage universel ont porté à l’assemblée
une majorité de « républicains du lendemain » (en fait des monarchistes et des
bonapartistes). Ils sont peu favorables aux réformes du gouvernement
provisoire. Les républicains parisiens sont mécontents du refus du ministère
des Affaires étrangères d'aider les révolutionnaires polonais alors écrasés par
les troupes prussiennes à Posnen. Cette politique poursuit celle du
gouvernement provisoire et plus loin encore les positions républicaines de
1830 (aide aux peuples européens opprimés). C'est surtout les premières
mesures de l’Assemblée qui excitèrent les inquiétudes et coalisèrent les
mécontentements. Le 10, elle nommait une commission de 5 membres pour
exercer le pouvoir exécutif : Arago, Garnier-Pagès, Marie, Lamartine, Ledru-
63
Rollin, « C'était, dit Louis Blanc, le gouvernement provisoire, moins l’idée du
travail ; c'était la Révolution de février moins ce qui était toute la Révolution :
le Peuple. »
Barbès tombe dans le piège qui est de vouloir pactiser avec l’invasion de
l’assemblée qui fait croire qu’une seconde révolution est en cours. Les forces
de l’ordre sont inconsistantes face à la manifestation dont certains leaders
n’ont pas l’intention d’aller plus loin ( Blanqui, Buchez). Sans doute s’agit-il
d’un piège pour les révolutionnaires (voir M. Agulhon, 1848 ou
l’apprentissage de la République, 1848-1852, p.62-64).
La manifestation va déclencher une reprise en main par l’Assemblée de la
situation et l’arrestation de chefs Républicains.
L'émeute vaincue, le 19 mai, l'Assemblée adressa la proclamation suivante au
peuple français :
Français,
Une poignée de séditieux avait tenté le plus grand des crimes dans un pays
libre, le crime de lèse-majesté nationale, l’usurpation violente de la
souveraineté du peuple... Déjà, ils nous dictaient leurs insolents décrets.
Citoyens, par aucune délibération, par aucune parole par aucun signe, vos
représentants n’ont accepté l’oppression de la force...
Ceux dont l’audace prétendait usurper son nom et sa voix ignoraient-ils donc,
les insensés, que, si leur triomphe était possible un seul jour, toute la France se
lèverait pour nous délivrer ou pour nous venger.
La liberté ne vit que par l'ordre, l'égalité s’appuie sur le respect des lois, la
fraternité veut la paix; ce n'est qu’au sein d’une société tranquille que le travail
prospère et que le progrès s’accomplit. Que tout ce qui souffre espère en nous.
Travailleurs de nos villes et de nos champs, tous les vœux, tous les besoins,
64
toutes les misères nous créent des devoirs sacrés, notre dévouement les
remplira; ce que la République a déjà fait pour votre dignité en vous rendant
vos droits de citoyens, elle s’efforcera de le faire pour votre bonheur.
Question :
Les ouvriers, qui y entrent avec les intentions les plus droites, y sont
promptement circonvenus, subjugués, ou en butte aux plus odieux traitements.
L’oisiveté y est devenue une doctrine qui règne par la violence là où elle n’a pu
pervertir le cœur et l'intelligence. La loi faite au camarade s'impose ensuite au
patron ; on y est entré parce qu'on n'avait pas d'ouvrage; on refuse d'en sortir,
lors même que l'ouvrage se présente, ou bien l’on impose des conditions
65
inacceptables.. Une commande considérable était arrivée de l’une de nos
colonies. Les ouvriers des ateliers nationaux, auxquels on s’adressa...
demandèrent une rétribution tellement exorbitante que la commande a dû être
transportée à l’étranger. Plusieurs de nos provinces appellent aussi vainement
le secours des bras qui leur manquent: le même refus est opposé à leurs
instances.
De Falloux, Rapport sur les ateliers nationaux, 29 mai 1848, Moniteur, 30 mai.
no 151. p. 1201.
Questions
II La répression.
66
communisme et les excitations au pillage se produisent audacieusement sur les
barricades.
Vive la République !
Questions
1) A qui s’adressent les critiques des députés contre ceux qui dirigent les
insurgés ?
2) Qui était le général Cavaignac ? (petite recherche).
Article premier : Seront transportés par mesure de sûreté générale, dans les
possessions d’outre-mer autres que celles de la Méditerranée, les individus
actuellement détenus qui seront reconnus avoir pris part à l’insurrection des 23
juin et jours suivants.
Les femmes et les enfants des individus ainsi transportés hors du territoire
seront admis à partager le sort de leurs maris et pères.
67
Article 4 : Le pouvoir exécutif est chargé de procéder sans délai à l’exécution
du présent décret.
Questions
1) Sur la transportation qui n’est pas une peine du Code pénal mais un mode
d’exécution de la peine des travaux forcés, trouvez dans le texte la mention du
motif invoqué pour son application.
2) D’après le texte (que vous citerez) : les personnes condamnées vont-elles
dans une colonie pénitentiaire en Algérie ?
3) Les personnes poursuivies sont de droit commun et pourtant le texte
mentionne que ce sont des conseils de guerre qui conduisent l’instruction
(article 2) dans le même article, trouver l’expression qui vous indique pourquoi
ces conseils sont compétents.
a) Les principes.
Ces méfiances, par cela seul qu'elles existent ont leur danger. En inspirant des
doutes sur l’avenir, elles pourraient énerver et paralyser toutes les activités
sociales ;.… le citoyen vivrait au jour le jour, inquiet du lendemain ; il
s’attacherait peu à un gouvernement qui ne lui donnerait pas plus de sécurité, et
son indifférence ferait l'espoir des facteurs de toute couleur, qui rêvent la ruine
de la République... Ces craintes sincères, mais funestes, font notre faiblesse
actuelle ; nous pensons que le Gouvernement doit s'attacher énergiquement à
les combattre; il doit faire comprendre aux populations, leur faire sentir qu’une
République n’est pas nécessairement inquiète, turbulente, agitée sans relâche et
sans but, qu’elle n’est pas une révolution en permanence… qu'elle ne peut être
solidement assise que sur les bases éternelles de toute société humaine, la
liberté, la propriété, la famille, l'inviolable respect de tous les droits, que plus
que tout autre gouvernement, peut-être, elle demande l'ordre ; l'ordre non pas
arbitraire et despotique, mais l'ordre selon les lois, exigé de tous
impartialement mais inflexiblement.
68
Le pays, aujourd’hui, ne songe plus à la monarchie, il demande, il veut un
gouvernement d'ordre, et l’instinct d’un peuple intelligent comme le nôtre ne se
trompe pas, il pressent aisément que sans cette condition il n’est pas de durée
pour un Etat...
Cette pensée n'a-t-elle pas été la vôtre, lorsque par de sages décrets, vous avez
tantôt mis un frein aux désordres qui pouvaient agiter la société, tantôt rassuré
tant de droits inquiets, et raffermi tant de propriétés ébranlées ? Nous voulons
que les principes que vous avez si sagement proclamés, descendent en pratique
jusque dans les derniers détails de l’administration, et que le plus humble des
citoyens se sente à tout instant libre et inviolable sous la main protectrice de
la République.
Question :
Préambule
III. - Elle reconnaît des droits et des devoirs antérieurs et supérieurs aux
lois positives.
69
IV. - Elle a pour principe la Liberté, l'Egalité et la Fraternité. Elle a pour
base la Famille, le Travail, la Propriété, l'Ordre public.
70
Article 4. - Nul ne sera distrait de ses juges naturels. - Il ne pourra être
créé de commissions et de tribunaux extraordinaires, à quelque titre et
sous quelque dénomination que ce soit.
Article 10. - Tous les citoyens sont également admissibles à tous les
emplois publics, sans autre motif de préférence que leur mérite, et
suivant les conditions qui seront fixées par les lois. - Sont abolis à
toujours tout titre nobiliaire, toute distinction de naissance, de classe ou
de caste.
[…]
71
Article 15. - Tout impôt est établi pour l'utilité commune. - Chacun y
contribue en proportion de ses facultés et de sa fortune.
Article 16. - Aucun impôt ne peut être établi ni perçu qu'en vertu de la
loi.
[…]
Article 18. - Tous les pouvoirs publics, quels qu'ils soient, émanent du
peuple. - Ils ne peuvent être délégués héréditairement.
Article 22. - Ce nombre s'élèvera à neuf cents pour les Assemblées qui
seront appelées à réviser la Constitution.
Article 25. - Sont électeurs, sans condition de cens, tous les Français
âgés de vingt et un ans, et jouissant de leurs droits civils et politiques.
Article 26. - Sont éligibles, sans condition de domicile, tous les électeurs
âgés de vingt-cinq ans.
Article 27. - La loi électorale déterminera les causes qui peuvent priver
un citoyen français du droit d'élire et d'être élu ….
[…]
72
Article 30. - L'élection des représentants se fera par département, et au
scrutin de liste. - Les électeurs voteront au chef-lieu du canton…
Article 37. - Ils ne peuvent être arrêtés en matière criminelle, sauf le cas
de flagrant délit, ni poursuivis qu'après que l'Assemblée a permis la
poursuite. - En cas d'arrestation pour flagrant délit, il en sera
immédiatement référé à l'Assemblée, qui autorisera ou refusera la
continuation des poursuites. Cette disposition s'applique au cas où un
citoyen détenu est nommé représentant.
73
Article 41. - Aucun projet de loi, sauf les cas d'urgence, ne sera voté
définitivement qu'après trois délibérations, à des intervalles qui ne
peuvent pas être moindres de cinq jours.
Article 42. - Toute proposition ayant pour objet de déclarer l'urgence est
précédée d'un exposé des motifs. - Si l'Assemblée est d'avis de donner
suite à la proposition d'urgence, elle en ordonne le renvoi dans les
bureaux et fixe le moment où le rapport sur l'urgence lui sera présenté.
- Sur ce rapport, si l'Assemblée reconnaît l'urgence, elle le déclare, et
fixe le moment de la discussion. - Si elle décide qu'il n'y a pas urgence,
le projet suit le cours des propositions ordinaires.
Article 53. - Il négocie et ratifie les traités. - Aucun traité n'est définitif
qu'après avoir été approuvé par l'Assemblée nationale.
Article 57. - Les lois d'urgence sont promulguées dans le délai de trois
jours, et les autres lois dans le délai d'un mois, à partir du jour où elles
auront été adoptées par l'Assemblée nationale.
[…]
75
Article 65. - Il a le droit de suspendre, pour un terme qui ne pourra
excéder trois mois, les agents du pouvoir exécutif élus par les citoyens. -
Il ne peut les révoquer que de l'avis du Conseil d'Etat. - La loi
détermine les cas où les agents révoqués peuvent être déclarés
inéligibles aux mêmes fonctions. - Cette déclaration d'inéligibilité ne
pourra être prononcée que par un jugement.
Article 66. - Le nombre des ministres et leurs attributions sont fixés par
le pouvoir législatif.
Doc.11 Jules Grévy avait proposé l'amendement suivant aux art. 41, 43 et
de la Constitution :
Art. 45 — Le président du conseil des ministres est élu pour un temps illimité
est toujours révocable.
Je conviens que le président n’a pas dans la confection des lois la part plus
nominale qu’effective qui appartient à la royauté ; je conviens que pour les
affaires étrangères, sa prérogative est un peu moins étendue; mais... à
l'intérieur... le président de la République a tous les pouvoirs de la royauté :il
dispose de la force armée, il nomme aux emplois civils et militaires; il dispense
toutes les faveurs; il a tous les moyens d'action, toutes les forces actives
qu'avait le dernier roi. Mais ce que n’avait pas le roi, et ce qui mettra le
président de la République dans une position bien autrement formidable, c’est
qu'il sera l’élu du suffrage universel; c’est qu'il aura la force immense que
donnent des millions de voix. Il aura, de plus, dans l’Assemblée, un parti plus
ou moins considérable. Il aura donc toute la force matérielle dont disposait
l’ancien roi, et il aura de plus une force morale prodigieuse.…
Je dis que le seul fait de l'élection populaire donnera au président de la
République une force excessive.
Et vous dites que vous voulez fonder une république démocratique? Que
feriez-vous de plus si vous vouliez…. restaurer la monarchie ? Un semblable
pouvoir, conféré à un seul, quelque nom qu’on lui donne, roi ou président, est
un pouvoir monarchique.…
Il est vrai que ce pouvoir, au lieu d’être héréditaire, sera temporaire et électif ;
mais il n'en sera que plus dangereux pour la liberté.
Etes-vous bien sûrs que, dans cette série de personnes qui se succèderont tous
les quatre ans au trône de la présidence, il n’y aura que de purs républicains
pressés d’en descendre? Etes-vous sûrs qu’il ne se trouvera jamais un
ambitieux tenté de s’y perpétuer ? Et si cet ambitieux est un homme qui a su se
rendre populaire, si c’est un général victorieux, entouré de ce prestige de la
77
gloire militaire auquel les Français ne savent pas résister; si c'est le rejeton
d’une des familles qui ont régné sur la France, et s’il n'a jamais renoncé
expressément à ce qu'il appelle ses droits : si le commerce languit, si le peuple
souffre, s'il est dans un de ces moments de crise où la misère et la déception le
livrent à ceux qui cachent sous des promesses des projets contre sa liberté,
répondez-vous que ces ambitieux ne parviendra pas à renverser la République ?
Jusqu'ici toutes les républiques sont allées se perdre dans le despotisme : c'est
de ce côté qu'est le danger, c’est donc contre le despotisme qu’il faut les
fortilier, Législateurs de la démocratie... quelles précautions avez-vous prises
contre l'ennemi capital? Aucune. Que dis-je ? Vous lui préparez les voies!
Vous élevez dans la République une forteresse pour le recevoir!
Jules Grévy au début de la IIIè République, après la crise du 16 mai 1877, fera
un déclaration sur le rôle du président de la République que l’on appellera
« la consitution Grévy » en raison de la déformation coutumière qui sera alors
donnée à la Constitution de la IIIè République.
Question
L'ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE
78
Je ne suis pas un ambitieux qui rêve tantôt l'Empire et la guerre, tantôt
l’application de théories subversives.
Elevé dans les pays libres, à l’école du malheur, je resterai toujours fidèle aux
devoirs que m’imposeront vos suffrages et les volontés de l'Assemblée.
Eviter cette tendance funeste qui entraîne l'Etat à exécuter lui-même ce que les
particuliers peuvent faire aussi bien que lui. La centralisation des intéréts et des
entreprises est dans la nature du despotisme.
La nature et la République repoussent le monopole. Enfin, préserver la liberté
de la presse des deux excès qui la compromettent toujours, l'arbitraire et sa
propre licence...
79
QUESTION sur : « le prince Louis-Napoléon candidat » :
« Nul parti n’est assez puissant pour tenir en échec cet homme taciturne,
d’apparence apathique, qui est soutenu par une idée fixe et qui en
poursuit la réalisation avec une obstination de maniaque. Il laisse les
orateurs parler, les journalistes écrire, les députés se quereller, les
généraux [qu’il a] destitués l’injurier, les meneurs de groupes
parlementaires le vitupérer, il reste seul, muet, impénétrable. Ses
adversaires le traitent d’idiot et se rassurent. Enfermé à l’Elysée,
tortillant sa longue moustache, fumant ses cigarettes, et marchant, le
front baissé, à l’ombre des grands arbres, il écoute toutes ces rumeurs et
mûrit ses projets ».
80
L'Empire exaltant le peuple, bouleversant le monde..., mettant la France sens
dessus dessous pour introniser les plus braves... c'était la Révolution, la
Révolution personnifiée, couronnée, si vous voulez mais enfin la Révolution.
Le vieil idéal de la Révolution accompli par un Bonaparte subsistait au fond
des cœurs.
QUESTIONS :
Le moment décisif approche. Encore trois jours et vous tous, ouvriers des villes
et des campagnes, vous allez être appelés à consolider votre œuvre, l’œuvre du
10 décembre ou à la renverser. Il s’agit de savoir aujourd’hui si vous resterez
fidèles à la pensée de salut qui s’est emparée subitement de vos esprits, dans
ces tristes jours où la patrie haletante expirait lentement sous le pouvoir
anarchique du général Cavaignac. Sachez-le bien, les incorrigibles
révolutionnaires que vous avez vaincus par l'élection de Louis Bonaparte, vous
pressent de toutes parts. Ils vous entourent, ils cherchent, par tous les moyens
en leur pouvoir, à
vous circonvenir.
Pour vous séduire, ils vous prodiguent des promesses mensongères, qu'ils
n'auront jamais ni le pouvoir ni la volonté de tenir. Demain, si vous étiez assez
insensés pour souscrire à leurs coupables insinuation vous vous trouveriez
plongés dans un abime de ma dont vous ne pouvez calculer l'affreuse
profondeur.
Dites : Arrière à tous ces vils imposteurs ! Dites-le que le masque dont ils
couvrent leur visage ne vous empêche pas de reconnaître leurs traits hideux.
Les hommes qui s'appellent socialistes aujourd’hui, s'appelaient, il y a 60 ans,
jacobins et sans-culottes. Et demandez aux anciens de vos communes l’histoire
des temps où régnaient ces sans-culottes et ces jacobins. Ils vous diront que
dans ces jours à jamais déplorables les villes étaient en proie à la plus affreuse
anarchie.
Les fils dénonçaient leurs pères, le frère son frère, le domestique son maître;
des milliers de malheureux étaient entassés dans d’affreuses prisons et n’en
sortaient que pour marcher au supplice. Dans les campagnes, la misère était à
son comble. L’affreuse famine régnait en souveraine, les travaux des champs
partout étaient suspendus, les églises fermées, et vos prêtres en fuite ou
81
massacrés. Le peuple, dont ces infâmes démagogues se prétendaient les
représentants était réduit à un tel degré de misère, que des familles entières de
paysans ont été vues, dans ce département, réduites à brouter l'herbe des
champs et à manger le gland du chêne de nos forêts. Et, croyez bien, ces temps,
qui sont déjà loin de vous, ils reviendraient demain si vous vous laissiez égarer
comme furent vos pères par les discours insidieux et les promesses trompeuses
des démagogues socialistes d’aujourd’hui.
Les rouges ont fait leurs preuves... Le souvenir de l ‘année qui vient de
s’écouler, de cette année néfaste est là.
Electeurs, voulez-vous ajouter un second acte à ce drame lugubre : à ce drame
de sang; voulez-vous une misère plus profonde encore, voulez-vous un surcroit
d’impôts écrasants, voulez-vous le retour de la guerre civile et de ses horreurs ;
voulez-vous la confiscation de la propriété, la ruine de la famille, la destruction
de l’ordre social; voulez-vous enfin, un bouleversement général, votez avec
tous ceux qui n’ont rien à perdre et tout à gagner dans la révolution, votez pour
les socialistes, pour les républicains rouges, pour les montagnards.
Questions :
On s’habituait peu à peu à l'idée d'un coup de force, qui devait dénouer la crise
politique où l’on se débattait et renverser la République, Mais triompherait le
parti qui posséderait la force armée. D’après la Constitution, le Président
commandait toutes les forces militaires et nommait tous les officiers ; mais
l’armée et la garde nationale de Paris étaient placées depuis 1849 sous le
commandement de Changarnier, général monarchiste, dévoué à la majorité de
l’Assemblée. Pour s'attacher les soldats le Prince passait de nombreuses revues,
faisant crier : « Vive Napoléon ! Vive l'Empereur! » après d’abondantes
distributions de vivres et de champagne. Après la plus célèbre de ces
manifestations (Satory, 10 octobre 1850), Changarnier, voulant couvrir un
général de division, Neumayer,qui avait été destitué par le Président pour avoir
empêché ses troupes de manifester, lança un ordre du jour (2 novembre)
rappelant aux troupes qu’elles « devaient s'abstenir de toute démonstration et
ne proférer aucun cri sous les armes ». Le 3 janvier, le prince destituait
Changarnier, et le 10 janvier partageait entre deux généraux dévoués à ses
ambitions les commandements de l’armée de la garde nationale. L'Assemblée
interpella le ministère sur ces faits.
82
Contesterez-vous que dans ces revues on ait poussé les cris de : Vive
l’empereur ?..…. Eh bien, nous tous, hommes d'ordre, nous avons été
profondément affligés, je dirai presque, si vous voulez que je donne au mot
toute l'énergie du sentiment que j'ai ressenti, indignés... Savez-vous pourquoi ?
C'était quelque chose de plus sacré encore que la légalité violée, quoique galité
soit quelque chose de bien respectable sous toutes les constitutions, c'était l’ère
des Césars préparée, celle où les légions proclamaient les empereurs... Voilà ce
que j'appelle le fait de prétoriens : ce sont les armées faisant la destinée des
nations et voulant la leur imposer...
Eh bien, permettez-moi de vous le dire, cela est sans exemple ; je ne sais pas
un acte aussi hardi sous aucun des gouvernements qui ont précédé... La
question est ici tout entière : pour des cris de : Vive l’empereur ! qu'un général
n'avait pas encouragés, qu’un autre a interdits... deux généraux, le général
Neumayer et le général Changarnier ont été destitués.
Si vous vouliez dire qu'il avait une grande importance, cela est vrai... Pour
nous qui tenions beaucoup à ce que l'ordre fût, non seulement inattaqué mais
inattaquable, et qu’il y eût un homme d'une telle énergie à la tête de la force
publique qu’on ne songeât pas même à troubler l’ordre: oh! pour nous, il avait
une valeur immense à ce point de vue. Il en avait une seconde. L’idée s'était
répandue, pardonnez-nous cela, que M. le général Changarnier, étant à la tête
de la force publique, l’Assemblée avait, outre son inviolabilité de droit, une
inviolabilité de fait qui n’est pas à dédaigner... Oui, c’est vrai, il y avait là... un
général qui rassurait tous les gens d'ordre ,... qui... répondait à ce besoin de
sécurité qu’une Assemblée placée seule, sans intermédiaire, en présence du
pouvoir exécutif qui a le commandement des armées, a besoin
d’éprouver. M. le général Changarnier avait ces deux importances là.
Ne vous étonnez donc pas de notre attitude. elle est forcée, nous ne pouvions
pas en tenir une autre, et il fallait bien que nous n’en pussions pas tenir une
autre pour que je vinsse faire ce grand acte
83
de me séparer du gouvernement dans une circonstance aussi grave...
Maintenant vous dites: On va provoquer un conflit !... Et quel était le moyen de
l’éviter ? Qu'est-ce qui l'a commencé ?...
Question
Le Second Empire
TITRE I
Article 11. - Il présente, tous les ans, au Sénat et au Corps législatif, par
un message, l'état des affaires de la République.
TITRE IV - Du Sénat
Article 29. - Le Sénat maintient ou annule tous les actes qui lui sont
déférés comme inconstitutionnels par le gouvernement, ou dénoncés,
pour la même cause, par les pétitions des citoyens.
Article 36. - Les députés sont élus par le suffrage universel, sans scrutin
de liste.
Article 42. - Le compte rendu des séances du Corps législatif par les
87
journaux ou tout autre moyen de publication, ne consistera que dans la
reproduction du procès-verbal, dressé, à l'issue de chaque séance, par
les soins du président du Corps législatif.
Article premier
La dignité impériale est rétablie.
Article 2
La dignité impériale est héréditaire dans la descendance directe et
légitime de Louis-Napoléon Bonaparte, de mâle en mâle, par ordre de
primogéniture, et à l'exclusion perpétuelle des femmes et de leur
descendance.
88
Article 8
La proposition suivante sera présentée à l'acceptation du Peuple
français dans les formes déterminées par les décrets des 2 et 4 décembre
1851 :
Résultat du plébisicite :
- 7.820.000 votes favorables et
- 253.000 votes défavorables
Ce senatus-consulte est promulgé le 2 décembre 1852.
......................................................................................................
......................................................................................................
Art. 12. - Sont électeurs, sans condition de cens, tous les Français, âgés
de vingt et un ans accomplis, jouissant de leurs droits civils et
politiques.
......................................................................................................
Art. 26. - Sont éligibles, sans condition de domicile, tous les électeurs
âgés de vingt-cinq ans.
Questions
90
En conséquence, Monsieur le Préfet, prenez des mesures pour faire connaitre
aux électeurs de chaque circonscription de votre département, par
l’intermédiaire des divers agents de l'administration, par toutes les voies que
vous jugerez convenables, selon l'esprit des localités, et au besoin, par des
proclamations attachées dans les communes, celui des candidats que le
Gouvernement de Napoléon juge le plus propre à l’aider dans son œuvre
réparatrice.
Question
91
législatif, rédigés par des secrétaires rédacteurs placés sous l'autorité du
président de chaque assemblée, sont adressés chaque soir à tous les journaux.
En outre, les débats de chaque séance sont reproduits par la sténographie et
insérés in extenso dans le journal officiel du lendemain. » .
Question :
Les libéraux vrais trouvèrent que l'Empereur n’était pas resté immobile, qu'il
avait fait plus qu'un demi-tour à gauche. Ils jugeaient les concessions
considérables. Sans doute elles étaient insuffisantes, puisqu'elles n'établissaient
ni la liberté de la presse, ni la responsabilité ministérielle, ni la liberté des
élections, ni la spécialité budgétaire, mais elles y conduisaient inévitablement.
Il fallait donc s’en réjouir, en savoir gré, les accepter avec confiance, sauf à en
tirer plus tard ce qu'elles contenaient implicitement.. « Ceux qui n’apprécient
pas encore ce progrès à sa juste valeur, écrivait, le 2 décembre 1860, dans le
Journal des Débats, Prévost-Paradol, lui rendront bientôt plus de justice en
sentant se répandre dans l’air ce je ne sais quoi qui annonce dans un grand pays
le réveil de la vie publique... ».
92
Emille Ollivier, L’Empire libéral, Paris, Garnier, 1900, T.V, p.91, sqq.
Question
1. - Le budget des dépenses est présenté au Corps législatif avec ses divisions
en sections, chapitres et articles. Le budget de chaque ministère est voté par
sections... La répartition, par chapitres, des crédits accordés pour chaque
section est réglée par décret de l'Empereur, rendu en Conseil d'Etat.
2. - Des décrets spéciaux, rendus dans la même forme, peuvent autoriser des
virements, d'un chapitre à un autre dans le budget de chaque ministère.
On ne possède que des détails très sommaires sur les budgets de 1852 à 1860.
L'Empire avait changé le mode de votation du budget: la loi de finance, au lieu
d'être votée comme sous les gouvernements libres, dans les détails, avec
spécialisation des crédits, c’est-à-dire avec destination précise donnée aux
sommes mises à la disposition de l'administration, était établie par grandes
divisions, et les ministres restaient libres d'opérer à leur gré des virements
entre les chapitres du budget de leur département. Le Corps législatif, dans ces
conditions, se trouvait incapable d'exercer une action sérieuse sur les finances
de l'Etat.
Question :
93
du pouvoir destiné à le protéger, ils auraient manqué leur but. Il faut que le
citoyen soit garanti contre la violence individuelle, et contre tout acte arbitraire
du pouvoir. Ainsi, quant à cette liberté individuelle, je n’insisterai pas, et c’est
bien celle-là qui mérite le titre d’incontestable et d’indispensable.
Mais, quand le citoyen a obtenu cette sécurité, il n’a presque rien fait encore.
S’il s’endormait dans une tranquille indolence, cette sécurité, il ne la
conserverait pas longtemps. Il faut en effet que le citoyen veille sur la chose
publique, pour cela, il faut qu’il y pense, et il ne faut pas qu’il y pense seul, car
il n’arriverait ainsi qu’à une opinion individuelle ; il faut que ses concitoyens y
pensent comme lui ; il faut que tous ensemble échangent leurs idées, et arrivent
ainsi à produire cette pensée commune qu’on appelle l’opinion publique. Or,
cela n’est possible que par la presse. Il faut donc qu’elle soit libre, mais,
lorsque je dis liberté, je ne dis pas impunité. De même que la liberté
individuelle du citoyen existe à la condition qu’il n’aura pas provoqué la
vindicte des lois, la liberté de la presse est à cette condition que l’écrivain
n’aura ni outragé l’honneur des citoyens, ni troublé le repos du pays.
Ainsi, selon moi, la seconde liberté nécessaire, c’est pour les citoyens cette
liberté d’échanger leurs idées, liberté qui enfante l’opinion publique. Mais,
lorsque cette opinion se produit, elle ne doit pas demeurer un vain bruit, et il
faut qu’elle ait un résultat. Pour cela il faut que des hommes choisis viennent
l’apporter ici au centre de l’État, cela suppose la liberté des élections, et par
liberté des élections, je n’entends pas que le gouvernement, qui est chargé de
veiller aux lois, n’ait pas là un rôle, que le gouvernement, qui est composé de
citoyens, n’ait pas une opinion : je me borne à dire qu’il ne faut pas qu’il puisse
dicter les choix et imposer sa volonté dans les élections. Voilà ce que j’appelle
la liberté électorale.
Mais ce n’est pas tout, messieurs. Quand ces élus, mandataires de l’opinion
publique, chargés de l’exprimer, sont réunis ici, il faut qu’ils puissent, d’une
liberté complète, il faut qu’ils puissent à temps… (veuillez bien, messieurs,
apprécier la portée de ce que je dis en ce moment), il faut qu’ils puissent, à
temps, opposer un utile contrôle à tous les actes du pouvoir. Il ne faut pas que
ce contrôle arrive trop tard, et qu’on n’ait que des fautes irréparables à déplorer.
C’est là la liberté de la représentation nationale, sur laquelle je m’expliquerai
tout à l’heure, et cette liberté est, selon moi, la quatrième des libertés
indispensables.
Enfin vient la dernière (je ne dirai pas la plus importante, elles sont toutes
également importantes), mais la dernière, dont le but est celui-ci : c’est de faire
que l’opinion publique, bien constatée ici à la majorité, devienne la directrice
de la marche du gouvernement.
Messieurs, les hommes, pour arriver à cette liberté qui est, on peut le dire, la
liberté tout entière, ont imaginé deux moyens, la république et la monarchie.
Dans la république, le moyen est bien simple : on change le chef de l’État tous
les quatre, six ou huit ans, suivant le texte de la Constitution.
De leur côté, les partisans de la monarchie ont voulu, eux aussi, n’être pas
moins libres que les citoyens de la république, et quel moyen ont-ils imaginé ?
C’est au lieu de faire porter l’effort de l’opinion publique sur le chef de l’État,
de le faire porter sur les dépositaires de son autorité, d’établir le débat non pas
avec le souverain, mais avec des ministres, de manière que, le souverain ne
changeant pas, la permanence du pouvoir étant assurée, quelque chose
94
changeât, la politique, et qu’ainsi s’accomplit ce beau phénomène du pays
placé sous un monarque étranger à toutes les vicissitudes, du pays se
gouvernant lui-même par sa propre pensée et pas sa propre opinion.
Questions
1) Quelles sont les libertés réclamées par Thiers dans ce discours ? (appuyez
votre réponse par des citations du texte).
2) Est-ce que les demandes faites dans ce discours correspondent à l’Etat
napoléonien au moment où Thiers s’exprime ?
2. - Toute demande d'interpellation doit être écrite où signée par cinq membres
au moins. Cette demande explique sommairement l’objet des interpellations;
elle est remise au président, qui la communique au ministre d’État et la renvoie
à l'examen des bureaux.
7. - Chacun des ministres peut, par une délégation spéciale de l'Empereur, être
chargé, de concert avec le ministre d'Etat, de représenter le Gouvernement
devant le Sénat ou le Corps législatif, dans la discussion des affaires ou des
projets de loi.
8. - Sont abrogés les articles 1er et 2è de notre décret du 24 novembre 1860, qui
statuent que le Sénat et le Corps législatif voteront tous les ans, à l'ouverture de
la session, une adresse en réponse à notre discours.
Question
95
DOC.10 Sénatus-consulte sur les pouvoirs législatifs du Sénat : 14 mars
1867.
Art. 26. — Le Sénat s'oppose à la promulgation des lois qui seraient contraires
ou qui porteraient atteinte à la Constitution, à la religion, à la morale, à la
liberté des cultes, à la liberté individuelle, à l'égalité des citoyens devant la loi,
à l’inviolabilité de la propriété et au principe de l'inamovibilité de la
magistrature ; de celles qui pourraient compromettre la défense du territoire.
- Le Sénat peut, en outre, avant de se prononcer sur la promulgation d'une loi,
décider, par une résolution motivée, que cette loi sera soumise à une nouvelle
délibération du Corps législatif. Cette nouvelle délibération n’aura lieu que
dans une session suivante, à moins que le Sénat n’ait reconnu qu'il y a urgence.
Question
3.- Les ministres ne peuvent être membres du Sénat et du Corps législatif. Ils
ont entrée dans l’une et l’autre assemblée et doivent être entendus toutes les
fois qu'ils le demandent.
5.- Le Sénat peut, en indiquant les modifications dont une loi lui parait
susceptible, décider qu'elle sera renvoyée à une nouvelle délibération du Corps
législatif.
96
8. - Aucun amendement ne peut être mis en délibération s’il n’a été envoyé à la
commission charges d’examiner le projet de loi et communiqué au
Gouvernement.
9. -Le budget des dépenses est présenté au Corps législatif par chapitres et
articles. Le budget de chaque ministère est voté par chapitres.
Question :
Citoyens,
97
Au nom du suffrage universel, base de toute organisation politique ou sociale,
donnons mandat à notre député d'affirmer les principes de la démocratie
radicale et de revendiquer énergiquement :
- l'application la plus radicale du suffrage universel, tant pour l’élection des
maires et conseillers municipaux, sans distinction de localité, que pour
l'élection des députés ;
- la répartition des circonscriptions effectuée sur le nombre réel des électeurs
de droit, et non sur le nombre des électeurs inscrits ;
- la liberté individuelle désormais placée sous l’égide des lois, et non soumise
au bon plaisir
et à l'arbitraire administratifs ;
- l’abrogation de la loi de sûreté générale (1) ;
- la suppression de l'article 75 de la Constitution de l'an VIII (2) et la
responsabilité directe de tous les fonctionnaires ;
- les délits politiques de tous ordres déférés au jury ;
- la liberté de la presse dans toute sa plénitude, débarrassée du timbre et du
cautionnement ;
- la suppression des brevets d'imprimerie et de librairie ;
- la liberté de réunion sans entraves et sans pièges avec la faculté de discuter
toute matière religieuse, philosophique et sociale ;
- l’abrogation de Particle 291 du Code pénal (3);
- la liberté d'association pleine et entière ;
- la suppression du budget des cultes et la séparation des Églises et de l’État :
- l'instruction primaire laïque, gratuite et obligatoire, avec concours entre les
intelligences d’élite pour l'admission aux cours supérieurs, également gratuits ;
- la suppression des octrois, la suppression des gros traitements et des cumuls
et la modification de notre système d'impôts ;
- la nomination de tous les fonctionnaires publics par l’élection ;
- la suppression des armées permanentes, cause de ruine pour les finances et les
affaires de la nation, source de haines entre les peuples et de défiance à
l’intérieur ;
- l’abolition des privilèges et monopoles que nous définissons par ces mots :
primes à l’oisiveté ;
- les réformes économiques, qui touchent au problème social, dont la solution,
quoique subordonnée à la transformation politique, doit être constamment
étudiée et recherchée au nom du principe de justice et d'égalité sociale. Ce
principe généralisé et appliqué peut seul en effet faire disparaître l’antagonisme
social et réaliser complètement notre formule.
(1) La loi de sûreté générale est une loi du 1er février 1858, promulguée le 27
février 1858, qui permet de punir de prison toute tentative d'opposition et
autorise l'arrestation et la déportation sans jugement d'un individu condamné
pour délits politique depuis 1848. Elle ne fut plus que très rarement appliquée
dès le mois de mars 1858.
(2) Cet article 75 est un article de la constitution de 1799. Il dispose : « Les
agents du gouvernement, autres que les ministres, ne peuvent être poursuivis
98
pour des faits relatifs à leurs fonctions, qu'en vertu d'une décision du Conseil
d'État : en ce cas, la poursuite a lieu dans les tribunaux ordinaires. »
(3) Article 291 du code pénal de 1810 : « Nulle association de plus de vingt
personnes, dont le but sera de se réunir tous les jours à certains jours marqués
pour s'occuper d'objets religieux, littéraires et politiques ou autres, ne pourra se
former qu'avec l'agrément du gouvernement, et sous les conditions qu'il plaira
à l'autorité publique d'imposer à la société ». Ce texte fut abrogé par la loi de
1901 sur les associations.
20. - Les ministres peuvent être membres du Sénat ou du Corps législatif. Ils
ont entrée dans l’une et l’autre assemblée, et doivent être entendus toutes les
fois qu'ils le demandent.
24. - Les décrets de nomination des sénateurs sont individuels. Ils mentionnent
les services et indiquent les titres sur lesquels la nomination est fondée. Aucune
autre condition ne peut être imposée au choix de l'Empereur.
26. - Le nombre des sénateurs peut être porté aux deux tiers de celui des
membres du Corps législatif.
99
45. - Les changements et additions apportés au plébiscite des 20 et 21
décembre 1851, par la présente Constitution, seront soumis à l'approbation du
Peuple...
Question
Vous avez été presque unanimes, il y a dix-huit ans, pour me conférer les
pouvoirs les plus étendus ; soyez aussi nombreux aujourd’hui pour adhérer à la
transmission du régime impérial.
100
Napoléon, 23 avril 1870, Journal officiel. n° 113. p.624.
Questions
LA TROISIEME REPUBLIQUE
102
En présence d'un pareil état de choses, y a-t-il, peut-il y avoir deux
politiques ? Et, au contraire, n’y en a-t-il pas une seule, forcée,
nécessaire, urgente consistant à faire cesser le plus promptement
possible les maux qui nous accablent ?
Quelqu'un pourrait-il soutenir qu'il ne faut pas, plus tôt, le plus
complètement possible, faire cesser l’occupation étrangère, au moyen
d'une paix courageusement débattue, et qui ne sera acceptée que si elle
honorable ; débarrasser nos campagnes de l'ennemi qui les foule et les
dévore; rappeler des prisons étrangères nos soldats, nos officiers,
reconstituer avec eux armée disciplinée et vaillante, rétablir l'ordre
troublé ; remplacer ensuite et sur le champ les administrateurs
démissionnaires ou indignes, réformer par l'élection nos conseils
généraux, nos conseils municipaux dissous, reconstituer ainsi notre
administration désorganisée,... relever sinon nos finances, du moins
notre crédit,... faire renaître le travail partout interrompu, le travail qui
peut seul procurer le moyen de vivre à nos ouvriers, à nos paysans ?
Est-il personne qui pourrait nous dire qu'il y a quelque chose de plus
pressant que tout cela ?
[…]
Quand cette oeuvre de réparation sera terminée, et elle ne saurait être
bien longue, le temps de discuter, peser ces théories de gouvernement
sera venu ; et ce ne sera plus un temps dérobé au salut du pays. Déjà
peu éloigné des souffrances d'une révolution, nous aurons retrouvé
notre sang-froid ; ayant opéré notre reconstitution, sous le
gouvernement de la République, nous pourrons prononcer en
connaissance de cause sur nos destinées...
Telle est la seule politique possible, nécessaire, adaptée aux
circonstances douloureuses où nous nous vivons... C'est celle à laquelle,
pour ma part, malgré l'âge et les fatigues d'une longue vie, je suis prêt à
consacrer les forces qui me restent, sans calcul, autre ambition, je vous le
jure, que celle d'attirer sur mes derniers jours les regrets de mes
concitoyens...
Devant le pays qui souffre, qui périt, toute considération personnelle
serait impardonnable. Unissons-nous, et disons-nous bien qu'en nous
montrant capable de concorde et de sagesse, nous obtiendrons l’estime
de l'Europe, avec son estime, son concours. Faites donc renvoyer à un
terme qui, du reste, ne saurait être bien éloigné, les divergences de
principes qui nous ont divisés, qui nous diviseront peut-être encore,
mais n'y revenons que lorsque ces divergences, résultat, je le sais, de
convictions sincères, ne seront plus un attentat contre l'existence et le
salut du pays.
Question :
103
Quel est le programme politique qu’expose Thiers dans le Pacte de
Bordeaux ( justifiez votre réponse par des citations du texte).
LA COMMUNE DE PARIS
Cette fois encore, Paris travaille et souffre pour la France entière, dont il
prépare, par ses combats et ses sacrifices, la régénération intellectuelle,
morale, administrative et économique, la gloire et la prospérité. Que
demande-t-il ?
Questions :
1) Qui sont les hommes, visés dans le texte, qui siègent à Versailles ?
2) Jules Vallès a prononcé ce discours. Qui était-il ?
3) A quelle conception du socialisme se rattache ce texte ?
4) Quels sont les buts de la recherche des alliés dans les autres
communes françaises que Paris ? En d’autres termes, contre quels
ennemis veut lutter la Commune ? A quel type d’organisation
territoriale songe t’elle ?
Ce n’est pas la race : jetez en effet les yeux sur l’Europe et vous verrez bien
que les peuples ne sont presque jamais constitués d’après leur origine primitive.
Les convenances géographiques, les intérêts politiques ou commerciaux sont
ce qui a groupé les populations et fondé les États. Chaque nation s’est ainsi peu
à peu formée, chaque patrie s’est dessinée sans qu'on se soit préoccupé de ces
raisons ethnographiques que vous voudriez mettre à la mode. Si les nations
correspondaient aux races, la Belgique serait à la France, le Portugal à
l'Espagne, la Hollande à la Prusse ; en revanche, l'Écosse se détacherait de
l'Angleterre, à laquelle elle est si étroitement liée depuis un siècle et demi, la
Russie et l'Autriche se diviseraient chacune en trois ou quatre tronçons. [...}
105
Ce qui distingue les nations, ce n’est ni la race ni la langue. Les hommes
sentent dans leur cœur qu’ils sont un même peuple lorsqu'ils ont une
communauté d'idées, d'intérêts, d’affections, de souvenirs et d’espérances.
Voilà ce qui fait la patrie. Voilà pourquoi les hommes
veulent marcher ensemble, travailler ensemble, combattre ensemble, vivre et
mourir les uns pour les autres. La patrie, c’est ce qu’on aime. Il se peut que
l’Alsace soit allemande par la race et par le langage ; mais par la nationalité et
le sentiment de la patrie elle est française.
Et savez-vous ce qui l’a rendue française ? Ce n’est pas Louis XIV, c’est notre
révolution de 1789. Depuis ce moment, l’Alsace a suivi toutes nos destinées ;
elle a vécu notre vie.
Tout ce que nous pensions, elle le pensait ; tout ce que nous sentions, elle le
sentait. Elle a partagé nos victoires et nos revers, notre gloire et nos fautes,
toutes nos joies et nos douleurs.
Elle n’a rien eu de commun avec vous. La patrie, pour elle, c’est la France.
L’étranger, pour elle, c’est l’Allemagne.
M. Hamel était monté dans sa chaire, et de la même voix douce et grave dont il
m'avait reçu, il nous dit : « Mes enfants, c’est la dernière fois que je vous fais
la classe. L’ordre est venu de Berlin de ne plus enseigner que de l’allemand
dans les écoles de l’Alsace et de la Lorraine. Le nouveau maître arrive demain.
Aujourd’hui, c’est votre dernière leçon de français. Je vous prie d’être bien
attentifs. » C’est en l’honneur de cette dernière classe qu’il avait mis ses beaux
habits du dimanche, et maintenant je comprenais pourquoi ces vieux du
village étaient venus s’asseoir au bout de la salle. Cela semblait dire qu’ils
regrettaient de ne pas y être venus plus souvent, à cette école. C’était aussi
comme une façon de remercier notre maître de quarante ans de bons services,
et de rendre leurs devoirs à la patrie qui s’en allait. [...] « Vos parents n’ont pas
assez tenu à vous voir instruits. Ils aimaient mieux vous envoyer travailler à la
terre ou aux filatures pour avoir quelques sous de plus. Moi-même, n’ai-je rien
à me reprocher ? Est-ce que je ne vous ai pas souvent fait arroser mon jardin au
lieu de travailler ? Et quand je voulais aller pêcher des truites, est-ce que je me
gênais pour vous donner congé ? » [...] Alors d’une chose à l’autre, M. Hamel
se mit à nous parler de la langue française, disant que c’était la plus belle
langue du monde, la plus claire, la plus solide : qu’il fallait la garder entre nous
et ne jamais l’oublier, parce que, quand un peuple tombe esclave, tant qu’il
tient bien sa langue, c'est comme s’il tenait la clef de sa prison. [...]
106
m'avait paru si grand. « Mes amis, dit-il, mes amis, je... je... » Mais quelque
chose l’étouffait, il ne pouvait pas achever sa phrase.
Alphonse Daudet, « La dernière classe. Récit d’un petit Alsacien », extrait des
Contes du lundi, Paris, 1873.
Question
107
Art.2 — Ie Président de la République promulgue les lois dès qu'elles
lui sont transmises par le président de l'Assemblée nationale. Il assure
et surveille l'exécution des lois. Il réside au lieu où siège l'Assemblée.
Il est entendu par l'Assemblée nationale toutes les fois qu'il le croit
nécessaire, et après avoir informé de son intention le président de
l'Assemblée.
Questions :
« Avec l’ordre, nos ateliers se sont rouverts, les bras ont repris leur
activité, les capitaux sont revenus vers nous, le calme a reparu avec le
travail et déjà la France relève la tête, et, chose plus surprenante encore !
une forme de gouvernement, qui d’ordinaire la troublait profondément,
commence à entrer peu à peu dans les habitudes . Les événements ont
donné la République, et remonter à ses causes pour les discuter et pour
les juger serait aujourd’hui une entreprise aussi dangereuse qu’inutile.
La République existe, elle sera le gouvernement légal du pays, vouloir
autre chose serait une nouvelle révolution et la plus redoutable de
toutes. Ne perdons pas notre temps à la proclamer, mais employons-le
à lui imprimer ses caractères désirables et nécessaires. Une commission
nommée par vous il y a quelques mois lui donnait le titre de
République conservatrice. Emparons-nous de ce titre et tâchons surtout
qu’il soit mérité. Tout gouvernement doit être conservateur, et nulle
société ne pourrait vivre sous un gouvernement qui ne le serait point.
La République sera conservatrice ou ne sera pas. La France ne peut pas
vivre dans de continuelles alarmes. »
108
Questions
Doc. 6 Loi du 15 février 1872. Relative au rôle éventuel des conseils généraux
dans les circonstances exceptionnelles (Loi Tréveneuc).
Bulletin des Lois, 12. série, IV, no 921, p. 178 et Journal officiel, 23 fé-
vrier 1872.
109
Questions :
Doc. 7 Loi du 13 mars 1873 ayant pour objet de régler les attributions
des pouvoirs publics et les conditions de la responsabilité ministérielle.
ARTICLE PREMIER. - La loi du 31 août 1871 est modifiée ainsi qu'il suit.
Le Président de la République communique avec l'Assemblée par des
messages qui, à l'exception de ceux par lesquels s'ouvrent les sessions,
sont lus à la tribune par un ministre. Néanmoins, il sera entendu par
l'Assemblée dans la discussion des lois, lorsqu'il le jugera nécessaire, et
après l'avoir informée de son intention par un message. La discussion à
l'occasion de laquelle le Président de la République veut prendre la
parole est suspendue après la réception du message, et le Président sera
entendu le lendemain, à moins qu'un vote spécial ne décide qu'il le sera
le même jour. La séance est levée après qu'il a été entendu, et la
discussion n'est reprise qu'à une séance ultérieure. La délibération a lieu
hors la présence du Président de la République.
Bulletin des Lois, 12e série, VI, n° 1837, p. 161 et Journal officiel, 19 mars
1873.
Question :
Que s’efforce de faire l’assemblée par ce texte ? Contre quel personnage
politique est-il orienté ?
Question :
Pourquoi cette loi du septennat a t’elle été adoptée ?
Doc. 9 Renonciation au pouvoir du chef de la branche aînée des
Bourbons.
Lettre du comte de Chambord à Chesnelong en 1873.
111
Délégué par la Commission des Neuf, qu'avait formée la majorité monarchique de
l'Assemblée, Charles Chesnelong, député des Basses-Pyrénées, rencontre le comte
de Chambord à Salzbourg, le 14 octobre 1873. Le prétendant, inquiet de
l'interprétation donnée à son attitude, s'en explique le 27 octobre par une lettre
publique.
Il ne s'agit rien moins que de constituer sur ses bases naturelles une société
profondément troublée, d'assurer avec énergie le règne de la loi; de faire
renaître la prospérité au dedans, de contracter au dehors des alliances
durables et surtout de ne pas craindre d'employer la force au service de
l'ordre et de la justice.
On parle de conditions. M'en a-t-il posé ce jeune prince dont j'ai
ressenti avec tant de bonheur la loyale étreinte et qui, n'écoutant que
son patriotisme, venait spontanément à moi, m'apportant au nom de
tous les siens des assurances de paix, de dévouement et de
réconciliation ?
On veut des garanties. En a-t-on demandé à ce Bayard des temps
modernes dans cette nuit mémorable du 24 mai, où l'on imposait à sa
modestie la glorieuse mission de calmer son pays par une de ces paroles
d'honnête homme et de soldat, qui rassurent les bons et font trembler
les méchants?
Je n'ai pas, c'est vrai, porté comme lui l'épée de la France sur vingt
champs de bataille, mais j'ai conservé intact, durant quarante-trois ans, le
dépôt sacré de nos traditions et de nos libertés. J'ai donc le droit de
compter sur la même confiance et je dois inspirer la même sécurité.
…
HENRI.
Lettre du comte de Chambord à Chesnelong, Salzbourg, 27 octobre 1873.
in A. DE FALLOUX, Mémoires d’un royaliste, Paris, 1888, t.III. p. 325.
Question :
Question :
N'est-ce pas l'avertissement caractéristique que le pays, après avoir essayé bien
des formes de gouvernement, veut enfin s'adresser à une autre couche sociale
pour expérimenter la forme républicaine ?
Questions
(…) Vous savez que cette Constitution est courte ; elle contient deux lois et
trois chapitres : il y a une Chambre des députés nommés par le suffrage
universel direct ; il y a un Président de la République nommé par la Chambre
des députés et par la seconde Chambre, seconde Chambre qui compose le
troisième pouvoir et qui est le Sénat.
(…) Je dis tout d’abord, qu’il n’y a pas à s’y méprendre et que ceux qui ont eu
les premiers l’idée de constituer un Sénat ont voulu, dès l’origine, créer là une
115
citadelle pour l’esprit de réaction, organiser là une sorte de dernier refuge pour
les dépossédés ou les refusés du suffrage universel. (Hilarité. – Bravos). Il n’est
pas douteux que dans l’esprit de tous les législateurs, la première pensée qui a
présidé à l’organisation du pouvoir législatif en deux Chambres a été une
pensée de résistance contre la démocratie républicaine. (Marque générale
d’assentiment). Mais il faut voir si ceux qui ont eu cette pensée l’ont bien
réalisée. Il s’agit de reconnaître si, étant par hasard imprégnés eux-mêmes, et
plus profondément qu’ils ne le croyaient, de l’esprit démocratique qui palpite
dans tout le pays, et voulant créer une Chambre de résistance, une citadelle de
réaction, ils n’ont pas organisé un pouvoir essentiellement démocratique par
son origine, par ses tendances, par son avenir. Messieurs, quant à moi, telle est
ma conviction, et je vais essayer de l’établir.
Un Sénat, vous n’ignorez pas que c’est une institution qui remonte fort loin
dans les annales des hommes. Il y en a eu dans tous les pays de l’Europe, sous
les latitudes les plus diverses, avec les régimes les plus variés et les plus
opposés, dans l’antiquité et dans les temps modernes.
(…) Le Sénat sera composé de 300 membres, dont 225 seront choisis par le
corps électoral (…). Le corps électoral qui nomme les 225 membres est formé
de quatre éléments : les députés, c’est à dire les représentants les plus autorisés
du suffrage universel dans le département ; les conseillers généraux et les
conseillers d’arrondissement, c’est à dire l’expression du suffrage des divers
groupes de citoyens qui composent le département, et, enfin, les délégués de
chaque commune.
C’est ici, Messieurs, que je veux arrêter votre attention. Je veux que vous
saisissiez bien quel admirable instrument d’ordre, de paix, de progrès
démocratique cette intervention de l’esprit communal dans le règlement des
grandes affaires politiques peut procurer à la France. J’ai longtemps hésité, tout
d’abord, à croire que l’Assemblée certainement la plus monarchique, la plus…
comment dirais-je ? … la moins laïque… (Hilarité prolongée) qu’ait eue la
France, imbue des préjugés du gouvernement oligarchique, j’hésitais à croire
que cette Assemblée, ayant à constituer une seconde Chambre, en arriverait à
lui donner pour point de départ, quoi ? Ce qu’il y a de plus démocratique en
France, ce qui constitue les entrailles mêmes de la démocratie : l’esprit
communal, c’est à dire les trente-six mille communes de France.
Oui, Messieurs, le Grand Conseil des Communes françaises, tel est le nom
qu’il convient d’adopter. Ecartons de nos esprits la vieille étiquette, elle est
116
usée, mettons-la au rebut ; non, ce n’est pas un Sénat à l’usage des monarchies,
un Sénat à l’ancienne mode, nous avons bien d’autres prétentions !
Question
117
La confiance a continué et elle s’est accrue... Nous avons pu faire ce nouvel et
dernier emprunt de 3 milliards et demi, qui avait bien moins d'exemple encore
que le précédent, dont tout le monde s’épouvantait. Aujourd'hui, tandis que
toutes les places financières de l’Europe sont gênées, qu'il y a des crises partout,
nous qui avons à payer des sommes si énormes, nous étonnons l’Europe par la
ponctualité de nos paiements. Nous avons payé 4 milliards; le paiement du
dernier milliard va commencer dans huit jours... Les fonds pour le 1er juin sont
prêts: il sont assurés pour le 1er juillet, pour le 1er août, pour le 1er septembre.
Questions
1) A partir du cours, expliquez ce que sont ces emprunts lancés par Thiers.
2) Qu’ont-ils révélé ?
Question :
[…]
ART. 3. — Nul ne peut être sénateur, s'il n'est Français, âgé de 40 ans
au moins et s'il ne jouit de ses droits civils et politiques.
Art. 6. — Les sénateurs des départements et des colonies sont élus pour
neuf années et renouvelables par tiers, tous les trois ans. Au début de la
première session, les départements sont divisés en trois séries,
contenant chacune un nombre égal de sénateurs. Il sera procédé, par la
voie du tirage au sort, à la désignation des séries qui devront être
renouvelées à l'expiration de la première et de la deuxième période
triennale.
121
et la sûreté de l'État le permettent. Les traités de paix, de commerce,
les traités qui engagent les finances de l'État, ceux qui sont relatifs à
l'état des personnes et au droit de propriété des Français à l'étranger,
ne sont définitifs qu'après avoir été votés par les deux Chambres.
Nulle session, nul échange, nulle adjonction de territoire ne peut
avoir lieu qu'en vertu d'une loi.
ART. 9. — Ie Président de la République ne peut déclarer la guerre
sans l'assentiment préalable des deux Chambres.
ART. 10 — Chacune des Chambres est juge de l'éligibilité de ses
membres et de la régularité de leur élection ; elle peut seule recevoir
leur démission.
[…]
ART. 12 — Le Président de la République ne peut être mis en
accusation que par la Chambre des députés, et ne peut être jugé que
par le Sénat. Les ministres peuvent être mis en accusation par la
Chambre des députés pour crimes commis dans l'exercice de leurs
fonctions. En ce cas, ils sont jugés par le Sénat. Le Sénat peut être
constitué en cour de justice par un décret du Président de la
République, rendu en Conseil des ministres, pour juger toute
personne prévenue d'attentat contre la sûreté de l'État, Si
l'instruction est commencée par la justice ordinaire, le décret de
convocation du Sénat peut être rendu jusqu'à l'arrêt de renvoi. Une
loi déterminera le mode de procéder pour l'accusation, l'instruction
et le jugement.
ART. 13 — Aucun membre de l'une ou de l'autre Chambre ne peut,
pendant la durée de la session, être poursuivi ou arrêté en matière
criminelle ou correctionnelle qu'avec l'autorisation de la Chambre
dont il fait partie, sauf le cas de flagrant délit. La détention ou la
poursuite d'un membre de l'une ou de l'autre Chambre est
suspendue pendant la session, et pour toute sa durée, si la Chambre
le requiert.
Question
123
Questions
Question
125
Dans les projets de loi qu'il présentera au vote Chambres et dans les
questions soulevées par l'initiative parlementaire, le Gouvernement
s'inspirera des besoins réels, des voeux certains du pays, d'un esprit de
progrès et d'apaisement ; il se préoccupera surtout du maintien de la
tranquillité, de la sécurité, de confiance, le plus ardent des voeux de la
France, plus impérieux de ses besoins.
Dans l'application des lois, qui donne à la politique générale son
caractère et sa direction, il se pénétrera de la pensée qui les a dictées...
Tout en tenant un juste compte des droits acquis des services rendus,
aujourd'hui que les deux grands pouvoirs sont animés du même esprit,
qui est celui de la France, il veillera à ce que la République soit servie
par des fonctionnaires qui ne soient ni ses ennemis ni ses détracteurs.
C'est par cette politique libérale et vraiment conservatrice, que les
grands pouvoirs de la République toujours unis, animés du même
esprit, feront porter ses fruits naturels au Gouvernement que la France...
s'est donné comme le seul qui puisse assurer son repos.
J. GRÉVY. Discours politiques et judiciaires, 1888, t. II. p. 512.
Questions :
Je sais que ce qu’on attaque en moi, ce n’est pas la personne — d'aucuns même
disent que la personne n’est pas déplaisante — ce qu’on attaque en moi c’est la
politique, c’est le système, c'est la méthode de défense et de protection des
intérêts de la démocratie française. C’est cette politique que je viens défendre,
non parce qu’elle est attaquée, mais parce que j’ai un souci qui domine tous les
autres : c’est d'empêcher les intelligences loyales, les cœurs honnêtes que
certaines difficultés de la vie sociale et politique excitent et passionnent, de
grossir le troupeau que veulent monter des sophistes et des démagogues sans
vergogne. Voilà pourquoi je veux m'expliquer encore une fois ici, et pourquoi
je tiens que ce soit à Belleville que cette politique reçoive encore une fois sa
sanction et sa consécration.
Cette politique, on l'a appclée d'un nom mal fait, d’un véritable barbarisme.
Pour une chose mal conçue, il fallait un mot mal conçu : on l’a appelée «
opportunisme ». Si ce barbarisme signifie politique avisée, ne laissant jamais
126
passer l’heure propice, les circonstances favorables, mais ne sacrifiant rien ni
au hasard, ni à l'esprit de violence, on pourra tant que l’on voudra appliquer à
cette politique une épithète malsonnante et même inintelligible,
mais je dirai que je n’en connais pas d’autre, car c’est la politique de la raison.
Il y a tout un ensemble de réformes politiques et sociales qu’il faut accomplir.
« Seulement, vous connaissez la méthode que j’ai toujours préconisée devant
vous : elle ne consiste pas à tout aborder de front, à toucher à la fois à toutes les
questions, à se mettre pour ainsi dire tous les matériaux de la maison à
construire sur les bras, sauf à rester épuisé sous le fardeau, la maison ne se
construisant pas. Non ma méthode consiste à sérier les questions, à leur donner
pour ainsi dire des numéros d'ordre et d'urgence.
Question :
Expliquez ce que l’on entend par opportunisme pour les républicains de cette
époque en vous appuyant sur des citations du texte.
LE BOULANGISME (1886-1889)
Les parlementaires, qui ont tout fait pour me rendre inéligible, sont
aujourd'hui affolés à l'idée de me voir élu. Mon épée les inquiétait. Ils
me l'ont retirée. Et les voilà plus inquiets qu'à l'époque où je la portais
encore. En réalité, ce n'est pas de moi qu'ils ont peur, c'est du suffrage
universel, dont les jugements réitérés témoignent du dégoût qu'inspire
au pays l'état d'abâtardissement où leur incapacité, leurs basses
intrigues et leurs discussions fastidieuses ont réduit la République.
Il leur est, en effet, plus commode de me rendre responsable du
discrédit où ils sont tombés que de l'attribuer à leur égoisme et à leur
indifférence pour les intérêts et les souffrances du peuple.
Pour ne pas être obligés de s'accuser eux-mêmes, c'est moi qu'ils
accusent en me prêtant les plus invraisemblables projets dictatoriaux.
Car on m'a renversé comme ministre sous prétexte que j'étais la guerre,
et on me combat comme candidat sous prétexte que je suis la dictature.
La dictature ! N'est-ce pas nous qui l'avons subie sous toutes les formes ?
Ne propose-t-on pas tous les jours d'inventer des lois d'exception pour
nos électeurs et pour moi ? Si la pensée de jouer au dictateur avait pu me
venir, il me semble que c'eût été quand j'avais, en qualité de ministre de
la Guerre, toute l'armée dans la main. Rien dans mon attitude a-t-il pu
alors justifier ce soupçon injurieux ? Non ! J'ai accepté les sympathies de
tous sans songer à « voler » la popularité de personne. Qu'y a-t-il donc
de dictatorial dans un programme qui réclame une révision
127
constitutionnelle par le système le plus démocratique, c'est-à-dire au
moyen d'une Constituante, où chaque député aura toute facilité de
défendre et de faire prévaloir ses opinions ?
Les chefs du parti républicain s'étaient fondés sur mon républicanisme
pour m'ouvrir les portes du ministère. En quoi ai-je donc depuis lors
démérité de la République ? Qu'on me dise un seul acte, une seule
profession de foi où je ne l'aie pas nettement affirmée !
Mais je veux, comme la France veut aussi, une République composée
d'autre chose que d'une réunion d'ambitions et de cupidités.
Que pouvons-nous espérer de gens qui, après s'être, de leur propre
aveu, trompés depuis quinze ans, osent se représenter à vous en vous
redemandant votre confiance ? Électeurs de la Seine,
La France a aujourd'hui soif de justice, de droiture et de
désintéressement. Tenter avec vous de l'arracher au gaspillage qui
l'épuise et aux compétitions qui l'avilissent, c'est pour moi la servir
encore.
La Patrie est notre patrimoine à tous. Vous l'empêcherez de devenir une
proie pour quelques-uns.
Vive la France !
Vive la République !
Question
Montrer les éléments dans cette profession de foi qui construisent le courant
antiparlementaire.
Eh bien, oui ! Cette popularité est venue trop vite à quelqu'un qui aimait trop le
bruit, ou, pour être plus juste, qui ne le fuyait pas assez, cela n'est pas douteux
Alors est venue la question des princes d'Orléans (1). Ce que je sais, c'est que
le général Boulanger a frappé les princes d'Orléans d'accord avec le cabinet...
Je dis que ce jour-là on a fait un acte d'énergie, un acte de haute politique
républicaine contre les ennemis de la République. C’est là encore... ce qui a fait
la puissance de ce nom et ce qui a pu grouper autour de lui tant d'éléments
divers.
Ce n’est pas tout... Je dis que cette popularité a été servie par les événements
qui se sont passés en Alsace-Lorraine, qu'il ne dépendait pas de nous
d'empêcher et qui ont douloureusement retenti dans nos cœurs (2). Et puis
j'ajoute... que la presse allemande a systématiquement attaqué le général
Boulanger... De sorte que les esprits superficiels ont pu voir en lui l’incarnation
de la patrie. Enfin, les droites! Par rancune de la décision prise contre les
princes d'Orléans, l'ont attaqué avec une extrême violence, si bien que
beaucoup, le voyant attaqué systématiquement par les ennemis de la
République, ont pu voir en lui l’incarnation de la République.
Questions :
129
République et à la patrie. Cette crise, il faut l'étudier dans ses causes, il faut
apprécier le mal dans son principe et appliquer résolument le remède
nécessaire. Ce remède est, à mon avis, dans la révision des lois
constitutionnelles.
La France souffre depuis plusieurs années d’un mal matériel et moral qui ne
peut se prolonger sans dommage pour tous... Divisée contre elle-même,
tiraillée par les partis, compromise par des querelles misérables où l’on voit
s’user, sans profit pour elle et sans honneur pour personne, les forces qui
appartiennent à la patrie et qui ne devraient être employées qu’à son service,
elle répudie hautement la politique des partis, et elle appelle de tous ses vœux
un régime nouveau. Pour répondre à cet ardent désir et tout en apportant des
garanties plus eflicaces que celles du régime actuel à la liberté et au grand
principe du gouvernement du pays par le pays, ce régime nouveau doit être
l’antithèse du régime anarchique, anti-démocratique qui pèse en ce moment sur
elle.
Il est aisé de se rendre compte de l’état d’esprit que le régime cher aux
opportunistes devait produire... Les manifestations ont fait explosion autour de
moi. Les élections de l'Aisne, de la Dordogne et du Nord n'ont point d'autres
causes... On s’est étonné que des conservateurs et des républicains aient
confondu leurs suffrages sur mon nom. C’est qu'ils avaient confondu
préalablement leurs griefs et leurs souffrances et que leur patriotisme ulcéré
n’avait plus qu'un cri...
130
composition du Parlement. Le système même dont je procède me le défend, car
en même temps qu’il exalte toutes les convoitises coupables, il paralyse toutes
les bonnes volontés. » Récemment élu sur un programme révisionniste, je me
fais, à mon tour, par la proposition que j'ai l'honneur de déposer sur le bureau
de la Chambre, l'interprète de la volonté populaire.
Je viens d'indiquer le mal et ses causes, Le remède est évidemment dans une
réformation de nos mœurs politiques, mais cette réformation est elle-même
subordonnée à la réformation intégrale de nos institutions. La Constitution de
1875 n’est ni républicaine, ni démocratique. Elle est oligarchique et
parlementaire, c’est-à-dire en contradiction constante avec l'esprit, les mœurs,
les intérêts et les besoins de la France contemporaine. Le parlementarisme est
très séduisant en théorie... Malheureusement... tel que nous le pratiquons, tel
qu’il découle nécessairement de la large base démocratique de notre société
française, il ressemble plutôt à une anarchie constitutionnelle qu'à un
Gouvernement. Le suffrage universel élit des représentants qu’il ne connaît pas
toujours, sur la foi de programmes que les élus s’empressent d'oublier. À peine
arrivés au Palais-Bourbon, les députés se distribuent en groupes; et, au lieu de
suivre une politique purement nationale, ils ne servent que des intérêts de parti
et des ambitions de coterie.
Ce sont ces groupes, tantôt divisés et tantôt coalisés qui disposent du
gouvernement; les ministres n’ont point et ne peuvent point avoir de politique
propre...
Au bout de quelques semaines d’exercice les coteries évincées recrutent
quelques mécontents et deviennent à leur tour la majorité ; une coalition
nouvelle se noue; le ministère tombe, un ministère nouveau s'élève dans les
mêmes conditions pour courir la même destinée. La France est lasse jusqu’au
dégoût de ce régime qui n’est qu’agitation dans le vide, désordre, corruption,
mensonge et stérilité. Il faut le réformer, et on le réformera en modifiant de
fond en comble l'assiette du pouvoir et les attributions de ceux qui doivent
l'exercer.
Et tout d'abord, faut-il donner à la République un président. La question est
controversée […]
Ce qui importe, c’est que le chef du pouvoir exécutif cesse d’avoir la situation
effacée que lui a faite la Constitution de 1875, situation bizarre qui heurte le
sentiment populaire, comme la raison des hommes politiques, et qui fait du
premier magistrat de l’État un soliveau, sans cesser, — les événements du 16
mai l'ont prouvé, — d’en faire une menace.
131
Quant au Sénat, Boulanger le verrait disparaître « sans inconvénient et sans
regret ». Toutefois si on veut le conserver « il faut qu'il partage l’origine
démocratique de toutes nos institutions » et émane du suffrage universel
suivant un mode à déterminer.
Questions.
Questions
Question
L’Affaire Dreyfus.
133
"M. le capitaine Dreyfus est accusé d’avoir, en 1894, pratiqué des
machinations ou entretenu des intelligences avec un ou plusieurs
agents des puissances étrangères, dans le but de leur procurer les
moyens de commettre des hostilités ou d’entreprendre une guerre
contre la France en leur livrant des documents secrets (...). La base de
l’accusation contre le capitaine Dreyfus est une lettre-missive écrite
sur du papier pelure, non signée et non datée, établissant que des
documents militaires confidentiels ont été livrés aux agents d’une
puissance étrangère (...). De l’examen attentif de toutes les écritures de
MM. les officiers employés dans les bureaux de l’état-major, il ressortit
que l’écriture du capitaine Dreyfus présentait une remarquable
similitude avec l’écriture de la lettre-missive incriminée."
Question :
Qu’est-il advenu de cet acte d’accusation ? (petite recherche sur Hubert Henry).
La révision.
L'affaire Dreyfus, ah ! Messieurs, elle est devenue bien petite à l'heure actuelle,
elle est bien perdue et bien lointaine, devant les terrifiantes questions qu’elle a
soulevées. Il n’y a plus d’affaire Dreyfus, il s’agit désormais de savoir si la
France est encore la France des Droits de l’homme, celle qui a donné la liberté
au monde et qui devait lui donner la justice. Sommes- nous encore le peuple le
plus noble, le plus fraternel, le plus généreux? Allons-nous garder en Europe
notre renom d'équité et d'humanité ? Puis ne sont-ce pas toutes les conquêtes
que nous avions faites et qui sont remises en question ? Un peuple n’est point
bouleversé de la sorte, sans que sa vie morale elle-même soit en danger.
L'heure est d’une gravité exceptionnelle, il s’agit du salut de la nation.
Il n’est qu’un seul remède possible : dire la vérité, rendre la justice... Le rôle
des bons citoyens, de ceux qui sentent l’impérieux besoin d’en finir, est
d'exiger le grand jour.
134
d’ « opter » c’est-à-dire soit de quitter l'Alsace-Lorraine et choisir la nationalité
française, soit de renoncer à la nationalité française, de demeurer en Alsace
Lorraine annexée du IIè Reich et être rattaché à la nationalité allemande.
Quel a été le choix de la famille Dreyfus ? Quelle était alors sa situation
économique ?
2) Emile Zola entend lutter contre l’injustice, une des plus graves violations
des droits de l’Homme. Que lui valut son article dans l’Aurore ?
Il n'y a pas de plus absurde injure que de nous dire : « Vous insultez l'armée ! »
Non, nous n’insultons pas l’armée. Nous l'honorons en l’invitant au respect de
la loi, car elle n’est rien que par la loi, car nous la voulons grande par la loi.
Nous avons des devoirs envers elle, elle a des devoirs envers nous.
Messieurs, la France poursuit depuis 25 ans une double entreprise qui parait
contradictoire à quelques uns. Nous sommes des vaincus et nous avons d'abord
conçu la pensée de refaire la puissance de la France. Cela est nécessaire, il faut
que cela soit, parce qu'il n’y a pas de loi civile, il ne sert à rien d’instituer le
droit, la justice, si nous ne sommes pas d’abord maître chez nous. Et puis, nous
avons conçu une seconde idée, l’idée de nous débarrasser de tous les
despotismes de personnes ou d’oligarchies et de fonder dans notre pays une
démocratie de liberté et d’égalité.
Alors, la question s’est posée de savoir si ces deux vues ne sont pas en
contradiction l’une de l'autre. Le principe de la société civile, c'est le droit, la
liberté, la justice ; le principe de la société militaire, c'est la discipline, la
consigne, l’obéissance. Et comme chacun... est porté par la conscience de
l'utilité de sa fonction à vouloir empiéter sur autrui, la société militaire qui
dispose de la force, tend à empiéter sur l'autorité civile et à considérer la
société civile d’un peu haut quelquefois. C’est un tort, Les soldats n’ont de
raison
d'être que parce qu'ils défendent le principe que la société civile représente. Il
faut que la réconciliation se fasse entre ces deux institutions.
135
nous aurions abandonné ce qui a fait jusqu'ici dans le monde la gloire et le
renom de la France parmi les hommes.
Il faut que ces deux sociétés s'entendent, cela est nécessaire. Il faut que la
société militaire jouisse de tous ses droits pour accomplir tous ses devoirs. Il
faut que la société civile, consciente de ses devoirs envers la Patrie, envers
l’armée, maintienne inflexible ses droits, non seulement dans l'intérêt du
principe qu’elle représente, mais aussi pour le maximum d’efficacité de
l'institution militaire. Parler ainsi, est-ce insulter l’armée ou la servir ?
Ah ! oui, il faut que l’armée soit forte, mais comme l'abnégation des uns et le
commandement absolu des autres sont destinés à se fondre dans in immense
effort de vie et de mort pour la défense du territoire, il faut que la société civile,
par la supériorité de son principe, conserve son plein pouvoir de contrôle.
Questions
136
de justice pour le sentiment de la majorité de la nation, et de respect
pour les droits inaliénables de l’Église catholique, comment ne serions-
Nous pas saisi d’une vive douleur? Et quand Nous voyons se révéler,
l’une après l’autre, les conséquences funestes de ces coupables attaques
qui conspirent à la ruine des mœurs, de la religion et même des intérêts
politiques sagement compris, comment exprimer les amertumes qui
Nous inondent et les appréhensions qui nous assiègent?
[…]
Questions :
138
Il ne prétend connaître que la règle civile qu'elles adoptent, leur
fonctionnement, leur personnel, leur patrimoine, leur but.
Fidèle à la pensée du Concordat et respectueux observateur des règles
qui président à l'exercice du culte, il voit dans les évêques les chefs
hiérarchiques de tous ceux qui, dans le diocèse, participent à la pratique
de ce culte. Il demande aux Congrégations de se soumettre à cette
hiérarchie et d'accepter la juridiction épiscopale.
Il n'a point, à l'occasion d'une loi spéciale, à définir l'autorité des
évêques, ni à spécifier les matières soumises à leur juridiction.
... Sous le bénéfice de ces observations, j'ai toujours pensé, Monsieur le
Ministre et cher Collègue que, dans l'application de la loi du ler juillet
1901, le Gouvernement devait s'inspirer de la plus large tolérance et du
libéralisme le plus bienveillant.
C'est ainsi que, dès le principe, j'ai donné les instructions nécessaires
pour que les demandes d'autorisation formées en exécution du § 1er de
l'article 18 soient acceptées et les récépissés délivrés dès lors que les
statuts contiennent la déclaration de soumission à l'ordinaire et
l'approbation de celui-ci, sans apprécier les formules employées. Mais il
ne m'est pas permis d'aller plus loin, et, en tout état de cause, le Pouvoir
législatif aurait seul qualité pour faire cette appréciation puisque, aux
termes de l'article 13, la loi nécessaire pour autoriser une Congrégation
déterminera en même temps les conditions de son fonctionnement ».
WALDECK-ROUSSEAU.
Question
Doc. 31 supprimé
Questions
Article premier
140
La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice
des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre
public.
Article 2
Pourront toutefois être inscrites auxdits budgets les dépenses relatives à des
services d’aumônerie et destinées à assurer le libre exercice des cultes dans les
établissements publics tels que lycées, collèges, écoles, hospices, asiles et
prisons.
Article 3
2° des biens de l’État, des départements et des communes dont les mêmes
établissements ont la jouissance.
Article 4
Dans le délai d’un an, à partir de la promulgation de la présente loi, les biens
mobiliers et immobiliers des menses, fabriques, conseils presbytéraux,
consistoires et autres établissements publics du culte seront, avec toutes les
charges et obligations qui les grèvent et avec leur affectation spéciale,
141
transférés par les représentants légaux de ces établissements aux associations
qui, en se conformant aux règles d’organisation générale du culte dont elles se
proposent d’assurer l’exercice, se seront légalement formées
[…]
Article 12
Les édifices qui ont été mis à la disposition de la nation et qui, en vertu de la
loi du 18 germinal an X, servent à l’exercice public des cultes ou au logement
de leurs ministres (cathédrales, églises, chapelles, synagogues, archevêchés,
évêchés, presbytères, séminaires), ainsi que leur descendance immobilière, et
les objets mobiliers qui les garnissaient au moment où lesdits édifices ont été
remis aux cultes, sont et demeurent propriétés de l’État, des départements et
des communes.
[…]
Article 25
Les réunions pour la célébration d’un culte tenues dans les locaux appartenant
à une association cultuelle ou mis à sa disposition sont publiques. Elles sont
dispensées des formalités de l’article 8 de la loi du 30 juin 1881, mais restent
placées sous la surveillance des autorités dans l’intérêt de l’ordre public.
Article 26
Il est interdit de tenir des réunions politiques dans les locaux servant
habituellement à l’exercice d’un culte.
Article 27
Les sonneries des cloches seront réglées par arrêté municipal, et, en cas de
désaccord entre le maire et le président ou directeur de l’association cultuelle,
par arrêté préfectoral.
142
Article 28
Article 29
Les contraventions aux articles précédents sont punies des peines de police.
Sont passibles de ces peines, dans le cas des articles 25, 26 et 27, ceux qui ont
organisé la réunion ou manifestation, ceux qui y ont participé en qualité de
ministres du culte et, dans le cas des articles 25 et 26, ceux qui ont fourni le
local.
Article 30
Il sera fait application aux ministres des cultes qui enfreindraient ces
prescriptions, de l’article 14 de la loi précitée.
[…]
Article 34
Tout ministre d’un culte qui, dans les lieux où s’exerce ce culte, aura
publiquement par des discours prononcés, des lectures faites, des écrits
distribués ou des affiches apposées, outragé ou diffamé un citoyen chargé d’un
service public, sera puni d’une amende de 25 000 francs et d’un
emprisonnement d’un an, ou de l’une de ces deux peines seulement.
La vérité du fait diffamatoire, mais seulement s’il est relatif aux fonctions,
pourra être établi devant le tribunal correctionnel dans les formes prévues par
l’article 52 de la loi du 29 juillet 1881. Les prescriptions édictées par l’article
65 de la même loi s’appliquent aux délits du présent article et de l’article qui
suit.
Article 35
143
mois à deux ans, sans préjudice des peines de la complicité, dans le cas où la
provocation aurait été suivie d’une sédition, révolte ou guerre civile.
Questions
Recherchez dans le texte de la loi de 1905 les réponses aux questions suivantes
1) Pour quel motif la loi pose t’elle des restrictions à la liberté de conscience?
Question
La loi du 9 décembre 1905 ne fut exécutée que par les protestants et les juifs,
Pie X défendant aux catholiques de former des associations cultuelles. Le
Gouvernement, à la suite des incidents violents provoqués par les inventaires,
n'osa pas faire exécuter les articles de la loi de séparation qui prévoyaient la
désaffectation des églises, à défaut d'associations cultuelles, Pour éviter de
fermer les églises et en laisser la libre disposition au clergé, il fit voter la loi
suivante :
147
Bulletin des Lois. Série XII, T. LXXIV, no 2811. p. 1366.
Question
Que modifie cette loi du 2 janvier 1907 à la loi du 9 décembre 1905 en matière
d’association cultuelle ?
Article 1er
Par.1. Les biens des établissements ecclésiastiques, qui n’auront pas été
réclamés par des associations cultuelles constituées dans le délai d’un an à
partir de la promulgation de la loi du 9 décembre 1905, seront attribués par
décret à des établissements communaux de bienfaisance ou d’assistance situés
dans les limites territoriales de la circonscription ecclésiastique intéressée, ou,
à défaut d’établissement de cette nature, aux communes ou sections de
communes, sous la condition d’affecter aux services de bienfaisance ou
d’assistance tous les revenus ou produits de ces biens, sauf les exceptions ci-
après :
3° Les immeubles bâtis, autres que les édifices du culte, qui n’étaient pas
productifs de revenus lors de la promulgation de la loi du 9 décembre 1905 et
qui appartenaient aux menses épiscopales, aux chapitres et séminaires, ainsi
que les cours et jardins y attenant, seront attribués par décret, soit à des
départements, soit à des communes, soit à des établissements publics pour des
services d’assistance ou de bienfaisance ou des services publics.
6° Les biens des caisses de retraite et maisons de secours pour les prêtres âgés
ou infirmes seront attribués par décret à des sociétés de secours mutuels
constituées dans les départements où ces établissements ecclésiastiques avaient
leur siège.
Pour être aptes à recevoir ces biens, lesdites sociétés devront être approuvées
dans les conditions prévues par la loi du 1er avril 1898, avoir une destination
conforme à celle desdits biens, être ouvertes à tous les intéressés et ne prévoir
dans leurs statuts aucune amende ni aucun cas d’exclusion fondés sur un motif
touchant à la discipline ecclésiastique.
Les biens des caisses de retraite et maisons de secours qui n’auraient pas été
réclamés dans le délai de dix-huit mois à dater de la promulgation de la
présente loi par des sociétés de secours mutuels constituées dans le délai d’un
an de ladite promulgation, seront attribués par décret aux départements où ces
établissements ecclésiastiques avaient leur siège, et continueront à être
administrés provisoirement au profit des ecclésiastiques qui recevaient des
pensions ou secours ou qui étaient hospitalisés à la date du 15 décembre 1906.
Les ressources non absorbées par le service de ces pensions ou secours seront
employées au remboursement des versements que les ecclésiastiques ne
recevant ni pension ni secours justifieront avait faits aux caisses de retraites.
Le surplus desdits biens sera affecté par les départements à des services de
bienfaisance ou d’assistance fonctionnant dans les anciennes circonscriptions
des caisses de retraite et maisons de secours……
Question
La loi du 13 avril 1908 modifie la loi du 9 décembre 1905 en particulier sur les
associations cultuelles (sur ces associations voir cours) sur quels points ?
149
Jean JAURÈS, Les grands orateurs républicains, Monaco, Éd. Hemera (1952)
t. IX, p. 165-166, cit. Jean Imbert, H.Morel, R.-J.Dupuy, La pensée, op.cit.,
p.445, n°236.
Mais la vérité est tout autre : la vérité, c’est que jamais une société ne prépare
mieux des citoyens à la discipline réfléchie qui doit être la discipline d’une
armée, dans une démocratie et dans une République, que la société présente.
Question :
150
LA RÉDUCTION DES CHARGES MILITAIRES
18. — Au point de vue des aptitudes physiques, le conseil de révision classe les
jeunes gens présent en quatre catégories :
1° Ceux qui sont reconnus bons pour le service armé ; 2° Ceux qui, étant
atteints d'une infirmité relative sans que leur constitulion soit douteuse, sont
reconnus bons pour le service auxiliaire ; 3° Ceux qui, étant d'une constitution
physique trop faible, sont ajournés à un nouvel examen ; 4° Ceux chez qui ont
une constitution générale mauvaise ou certaines infirmités, déterminent une
impotence fonctionnelle partielle ou totale et qui sont exemptés de tout service
militaire.
22. — Les familles des jeunes gens qui remplissaient effectivement avant leur
départ pour le service les devoirs de soutien indispensable de famille pourront
recevoir sur leur demande, en temps de paix, une allocation journalière de 0, 75
fr.
Questions :
151