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1 Travail comparatif-BAP1116 Alexandre Davoine

« Spotify : Les avantages de la création de contenu original


basés sur l’expérience de Netflix »
Sommaire :

I. Introduction ……………………………………………………………………………………… Page 1

II. Genèse d’un nouveau mode de consommation ………………………………… Page 2

III. Gestion des licences/droits d’auteur …………………………………………………. Page 3

IV. Les différentes routes vers le profit …………………………………………………… Page 4

V. Création de contenu original ……………………………………………………………. Page 6

VI. Conclusion ………………………………………………………………………………………… Page 8

VII. Bibliographie ……………………………………………………………………………………… Page 9


I. Introduction

L’avènement des plateformes de streaming a révolutionné le marché des médias digitaux, et


cela a commencé il y a presque dix ans. L’explosion du nombre de foyers connectés, du
nombre de smartphones et autres tablettes ont permis à certaines plateformes de dépasser
la barre de plusieurs dizaines de millions d’utilisateurs en quelques années seulement. Les
investisseurs restent cependant sceptiques sur la capacité de ces plateformes à garder un
bénéfice net stable au fil des ans.

Netflix lançait son offre de vidéo à la demande en 2007 et Spotify l’année suivante son offre
de streaming musical, tous deux ont connu depuis une croissance fulgurante d’année en
année, tant au niveau du nombre d’utilisateurs que du chiffre d’affaire global. Les deux
plateformes, bien que proposant des médias différents, sont basées sur le principe de
fichiers à la demande, l’utilisateur n’est pas propriétaire du contenu, mais y a accès de
manière illimitée dans le temps, pour le prix d’une souscription mensuelle.
Elles partagent de nombreux points communs, beaucoup sauf un : la rentabilité. Spotifiy,
depuis son lancement a accusé pertes sur pertes, celles-ci ont atteint 173 millions de dollars
en 2015 (Ingham, 2016).

C’est un constat étonnant quand on sait que pour la même année Spotify a fait un chiffre
d’affaire de 2.18 Milliard de dollars. Malgré ce résultat record pour l’entreprise suédoise,
celle-ci n’arrive pas à dégager de profit. Netflix de son côté arrive à dégager un bénéfice net
dans sa proposition de vidéos à la demande, et ceci depuis plusieurs années. Nous verrons
dans quelle mesure nous pouvons comparer les activités des deux entreprises, ainsi que leur
approche du marché du streaming, mais nous nous pencherons plus particulièrement sur la
décision de Netflix dès 2013 d’investir considérablement dans la création de contenu
original, que ce soit des films ou des séries, et nous verrons comment un tel modèle
pourrait être profitable pour une entreprise telle que Spotify.

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II. Genèse d’un nouveau mode de consommation

Alors que les chaines de télévision étaient toutes puissantes, et que les magasins de location
de VHS et DVD dominaient le marché des vidéos à la demande, un nouveau mode de
consommation va permettre aux utilisateurs de profiter des films, des séries ou même de la
musique sur n’importe quel support, où bon leur semble et de manière illimitée. Cette
évolution a été grandement facilitée par l’accès internet de plus en plus normalisé dans les
foyers à travers le monde (en 2006 la moitié des foyers américains y avaient accès
(Ebersole, 2013)). Le mode de consommation des médias va changer de manière drastique
au cours des années qui suivent, et cela grâce à des entreprises comme Netflix et Spotify.

Ces plateformes de streaming vont aussi très tôt utiliser des algorithmes complexes qui
facilitent l’expérience de l’utilisateur mais qui recueillent également de précieuses
informations sur leurs habitudes et leur mode de consommation. Ces données vont se
révéler cruciales pour le choix du contenu de la librairie de médias présente sur les
plateformes de streaming, et leur donner un avantage sur leurs compétiteurs.

Le financement va lui aussi changer, auparavant celui ci était basé sur les revenus
publicitaires, le prix était déterminé par l’audience engendrée par un film ou une série, c’est
ainsi que les chaines de télévision faisaient et font encore aujourd’hui le plus important de
leur chiffre d’affaire (Ebersole, 2013). Les plateformes de streaming font leur chiffre
d’affaire à l’aide d’une souscription mensuelle dont les utilisateurs s’acquittent afin de
bénéficier du contenu de manière illimitée. Libre à eux de regarder un film ou écouter un
morceau plus de cent fois, et cela quand bon leur semble. Mais cette mise à disposition
illimitée de contenu a un prix, et les studios et autres labels ont tout de suite vu le potentiel
financier, faisant payer à prix d’or leurs productions aux plateformes de streaming par le
biais de licences et de droits d’auteur.

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III. Gestion des licences/droits d’auteur

Les librairies de médias disponibles sur les deux plateformes sont constituées avec des
méthodes très différentes, Netflix gère la sienne grâce aux données collectées sur ses
utilisateurs, et leur propose un éventail de films correspondant à leurs goûts tout en la
renouvelant fréquemment. Cependant, cette librairie n’est constituée que de quelques
milliers de titres et dépend du pays de l’utilisateur. Spotify propose quant à lui 30 millions
de morceaux, et en ajoute en moyenne vingt mille par jour (Smith, 2016).

Le modèle de gestion des frais de licence/droits d’auteur est donc logiquement très
différent pour les deux plateformes, et ceci est en grand partie dû à la nature de son
contenu. Dans le cas de films, les frais de licence sont négociés et payés avant l’ajout de
l’œuvre à la librairie, car dans la plupart des cas, un utilisateur va visionner le film qu’un
nombre limité de fois, le prix sera aussi déterminé par le succès de l’œuvre dans les salles de
cinéma (Hiller, 2015). Dans le cas de la musique, les droits d’auteur sont payés en fonction
du nombre d’écoutes, chaque fois que l’utilisateur clique sur le morceau d’un artiste, celui-
ci touche une petite somme. Ce qui rend l’estimation des dépenses liées aux droits d’auteur
compliquée pour une plateforme telle que Spotify. On peut facilement imaginer que si la
taille de la librairie de Netflix équivalait à celle de Spotify, l’entreprise serait incapable de
générer le moindre bénéfice à cause des droits d’auteur. Par contre, du point de vue des
utilisateurs, la taille incroyable de la librairie de Spotify est indéniablement un gros
argument de vente.

Spotify dit sur son site reverser 70% de ses revenus aux ayant droits, mais la réalité est toute
autre, en 2015 la plateforme leur a en réalité reversé 84% de son chiffre d’affaire (soit 1.63
Milliard de dollars) (Ingham, 2016). Cette difficulté à évaluer les coûts de droits d’auteur est
donc un problème important pour la firme, qui, si elle voulait arriver à l’équilibre de sa
balance financière, ne devrait reverser que 66% de son revenu aux ayants droits, ce qui
serait bien évidemment préjudiciable pour toute l’industrie musicale (Ingham, 2015). La
solution est donc à chercher ailleurs.

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Annexe 1

Dépenses par catégories de Spotify, 2013-2015, Source : http://cdn.mbw.44bytes.net/files/2016/05/Screenshot-2016-05-23-at-08.43.26.png

IV. Les différentes routes vers le profit

Lorsqu’il s’agit de résultats financiers, il est compliqué de comparer les deux firmes, qui ne
sont pas sur un pied d’égalité. En effet, avant de se lancer dans le streaming de films, Netflix
était déjà une société rentable depuis plusieurs années, ce avec son système de location de
DVD envoyé par la poste qui avait déjà révolutionné le marché de la location de films aux
Etats-Unis (Ebersole, 2013). Ce qui lui a permis de négocier le virage du streaming avec plus
de souplesse, car sa santé financière était au beau fixe. Mais quand il s’agit d’une
plateforme de streaming, quelle qu’elle soit, les problèmes sont les mêmes pour réussir à
dégager un bénéfice net à la fin de l’année, le principal étant de gérer au mieux les
dépenses liées aux droits d’auteur, qui représentent le plus gros des dépenses annuelles.
Mais d’autres pistes méritent aussi d’être examinées.

Tim Ingham explore donc plusieurs autres possibilités dans son article « How Spotify can
become profitable » pour amener Spotify au profit. Parmi ses propositions, l’une évoque
une meilleure gestion des coûts additionnels, une autre est d’engendrer plus de revenus
avec ses utilisateurs « freemium » (utilisateurs non payants). Ces utilisateurs ont rapporté
en moyenne 2.44 dollars chacun en 2014, ce revenu est généré par la publicité, mais reste
bien insuffisant d’après l’auteur.

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Spotify tout comme Netflix est très dépendant de ses utilisateurs payants, qui font la grande
majorité de ses revenus. Dans le cas de Spotify cela représentait 91% de ses revenus en
2014 (Ingham, 2015). Une autre solution est donc d’augmenter le revenu moyen par
utilisateur (ARPU), Netflix l’a fait progresser de 5% en 2015, d’une part en contraignant sa
clientèle à payer plus cher sa souscription (1 dollar d’augmentation aux Etats-Unis) et
d’autre part en attirant ses utilisateurs vers les formules plus chères proposées par la
plateforme (CSA Conseil Supérieur de l'Audiovisuel, 2016). Spotify, dans cette optique, a
lancé cette année une version « famille » de son abonnement pour un prix de 19.90 en
Suisse.

Pour revenir à la gestion des coûts liés aux droits d’auteur, les montants dépensés par
Netflix sont devenus colossaux depuis quelques années, par exemple l’ajout de l’intégral de
la série « Lost » leur a couté 45 millions de dollars, 26 millions pour « Scrubs », et en 2011 la
plateforme à versé 200 millions de dollars pour exploiter une partie de la librairie de Disney
(Investopia, 2015). Ces coûts exorbitants et quelques autres facteurs déterminants que nous
développerons plus bas vont pousser Netflix à changer sa stratégie de production. Ce qui
nous amène logiquement à une autre solution pour gérer les coûts engendrés par les droits
d’auteur, le contenu original, qui a pris une place considérable dans les investissements de
Netflix depuis 2013.

Annexe 2 Annexe 3

Source : http://cdn.mbw.44bytes.net/files/2016/05/IMG_0270.png

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V. Création de contenu orignal

En 2013 Netflix perd des contrats de licence avec HBO (son principal compétiteur) et
Universal, qui signent un contrat pour exclure leur contenu de la plateforme pour dix ans,
ajoutons à cela le scindement de son activité de location de DVD, que Netflix a renommé
Quickster en 2011, et l’action de l’entreprise connait une plongée fulgurante (Ebersole,
2013). Netflix réalise alors que la solution est de réaliser son propre contenu, bien que cela
représente d’énormes sommes d’argent à investir, les bénéfices sont multiples : Pas de
droits de licence à payer aux auteurs, un contrôle artistique et créatif quant au contenu de
ses productions, et la possibilité de revente des droits à d’autres médias. Ils disposent aussi
d’un avantage non négligeable, les données fournies par ses utilisateurs que la firme
exploite depuis plusieurs années pour composer la librairie de son offre à la demande, qui
va leur permettre dans une certaine mesure d’anticiper le succès d’une série ou d’un film.

Le résultat sera la sortie en 2013 de House of Cards, et sera un franc succès critique et
financier. En 2016 Netflix a sorti 126 séries, plus que n’importe lequel de ses compétiteurs
(Wikipedia, 2017). En Janvier 2016 Reed Hastings et David wells réaffirmaient vouloir
développer encore plus de contenu original ces prochaines années, ceci dans une lettre
adressée aux actionnaires : « Increasingly, our goal is to own more of our original
programming to allow for greater creative and business control and to ensure global access
to content ». Netflix a aussi commencé à produire des contenus « locaux », comme la série
« Narcos » ou la série « Marseille », dans le but de fidéliser une clientèle dans les pays de
production, mais aussi pour aider l’entreprise à s’exporter sur d’autres marchés, car Netflix
a ouvert son offre à beaucoup de nouveaux pays, principalement durant les quatre
dernières années (Cf. Annexe 4). L’entreprise était présente dans 190 pays au début 2016
(CSA Conseil Supérieur de l'Audiovisuel, 2016). De plus une récente étude menée par la
banque SG Cowen, montre que 58% des utilisateurs de Netflix restent fidèles à la
plateforme grâce à ses contenus originaux (Trefis Team, Forbes contributors, 2016).

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Annexe 4

Serait-ce donc si fou de penser que la même chose pourrait aider Spotify à trouver la voie
du profit ? Du contenu original permet de se démarquer des plateformes concurrentes, et
permet à terme de réduire les coûts liés aux droits d’auteur. Il est vrai cependant que la
prédictibilité du succès d’un album ou d’un single est potentiellement plus compliquée que
celui d’un film ou d’une série. Mais cela ne devrait pas inquiéter outre mesure l’entreprise,
qui comme Netflix dispose de très importantes données sur les habitudes de sa clientèle, ce
qui devrait lui permettre de créer un contenu original en fonction de la consommation de
ceux-ci.

Quand on regarde les coûts liés à une telle décision, on remarque que si ceux-ci seront
probablement importants au début, ils permettront par la suite de mieux gérer les dépenses
liées aux droit d’auteur, comme nous l’a démontré Netflix sur ces dernières années. Ainsi la
dépendance au labels tiers se fera moins forte, et garantirait à Netflix une grande liberté
créative et artistique sur du contenu original. La première saison de « House of Cards » a
couté près de 100 millions de dollars à Netflix (Ebersole, 2013), on peut dès lors imaginer
que le coût de production d’un album de musique est bien meilleur marché, ce qui, avec un
investissement similaire, permettrait de rapidement étoffer la librairie musicale de la
plateforme avec des enregistrements estampillés Spotify.

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On peut cependant imaginer qu’une telle décision risque de froisser les grands labels dont la
librairie intégrale est présente sur la plateforme de streaming, mais quand on se rend
compte que Spotify représentait déjà la moitié des revenus de l’industrie musicale suédoise
en 2012 (Macias, 2012) et que l’entreprise a reversé 1.63 milliard, soit 84% de son chiffre
d’affaire en 2015 (Ingham, 2016), on voit mal les labels faire une croix sur ces revenus
substantiels, même si Spotify venait à débaucher quelques artistes pour les produire eux-
mêmes.

VI. Conclusion

Bien qu’il soit impossible d’affirmer qu’une telle solution puisse être bénéfique pour une
entreprise comme Spotify, il est certain que la plateforme a besoin de solutions concrètes
pour réussir à dégager un profit sur les cinq prochaines années, afin d’être viable à long
terme. Néanmoins nous avons vu que les avantages de produire du contenu orignal sont
nombreux, et de plus, bien que proposant un média différent, Netflix a démontré que cette
solution était profitable tant au niveau financier que pour fidéliser de nouveaux utilisateurs.

Il est encore à noter que si la croissance du nombre d’utilisateur de Spotify reste stable, la
société devrait dégager 3.25 milliard de dollars de revenu en 2017. Il devrait donc lui rester
environ 500 million de dollars après payement des droits d’auteur, ce qui devrait, si ses frais
annexes n’augmentent pas de manière drastique dans le même temps, lui permettre de se
stabiliser financièrement au cours de ces prochaines années (Ingham, 2015). Il serait
intéressant de se pencher, dans une prochaine étude, sur d’autres plateformes de
streaming (musique, vidéos à la demande ou encore de jeux vidéos) ayant elles aussi crées
du contenu original ces dernières années. Cela permettrait de mettre en perspective les
excellents résultats obtenus par Netflix.

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VII. Bibliographie

CSA Conseil Supérieur de l'Audiovisuel, 2016. Netflix: Résultats annuels 2015 et perspectives
2016, s.l.: s.n.
Ebersole, A., 2013. From Netflix to Netflixed: Digital Television Production in the Post-TV
Platinum age of the Audience. In: Netflix to Netflixed. s.l.:s.n.
Hiller, S. R., 2015. Profitably bundling information goods: evidence from the evolving video
library of Netflix, s.l.: SSRN.
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year-as-losses-hit-194m/
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