Vous êtes sur la page 1sur 50

Amour et passion : Giovanni Agani

Amour et Passion : Giovanni Agani

Aldores Fidèle

Aldores Fidèle
Amour et passion : Giovanni Agani

Un soleil de plomb régnait en maître absolu sur la ville de


Cotonou. Les oiseaux les plus téméraires s’étaient réfugiés dans
les feuillages les plus denses des rares arbres qui subsistaient à la
modernisation de la ville. Comme à toutes les heures de pointe, la
circulation était extrêmement dense autour du carrefour La Vie. À
midi, les bureaux se vidaient comme des fourmilières et tout le
monde était pressé. Il n’y avait que trois heures de temps de libre
avant la reprise des activités.
Un policier essayait tant bien que mal de réglementer le trafic
routier. Sur cet axe qui se voulait particulier en raison de la
lugubre histoire sur son passé morbide, ce carrefour autrefois
appelé Carrefour La Mort continuait de faire parfois des victimes.
Tout à coup, un bruit assourdissant attira son attention. Lorsqu’il
se retourna, la catastrophe était à une seconde de se produire. Il
savait qu’il ne pourrait rien faire pour empêcher l’accident qui se
dessinait sous son nez.
Un camion venait de virer brusquement sur le côté droit de la
route. Un conducteur de voiture qui n’avait pas pris le temps de
laisser le gros porteur s’en aller bifurqua sur la gauche et tenta
dans une manœuvre malheureuse de passer à côté. C’est à ce
moment que le drame se produisit. Le conducteur du camion qui
ne vit le véhicule à côté de lui qu’au dernier moment tourna
brusquement son volant. Il dérapa et s’écrasa lourdement tout le
long de la route.
Une dame était debout juste devant l’énorme camion qui venait
de se renverser. La peur l’avait paralysée. Un pas de plus et elle
se retrouvait sous lui, écrasée comme une crêpe. Elle remarqua
Aldores Fidèle 1
Amour et passion : Giovanni Agani

soudain une main ensanglantée qui dépassait du dessous de la


carcasse métallique. Elle hurla de toutes ses forces et s’évanouit
sur-le-champ. Les badauds se rassemblaient en masse autour de
l’accident, difficilement contenus par le seul policier sur les lieux.

- Accident sur le carrefour La Vie. Je répète, accident sur le


carrefour La Vie. Une personne écrasée par un camion, envoyez
de toute urgence une ambulance, cracha-t-il nerveusement dans
le micro de sa radio portable.
La main qui dépassait du dessous du camion était celle d’un
homme. Une montre noire serrait son poignet et une bague était à
son auriculaire. Le policier demanda aux pompiers et à
l’ambulance de se hâter, ce qu’ils firent. Une fois sur les lieux, les
pompiers se chargèrent de dégager non sans peine la cabine de
conduite du camion écrasé. C’est alors que l’effroi se saisit de
toute la petite foule. Sous les débris de métal, il n’y avait pas
qu’un homme. Il y avait aussi un tout petit enfant, complètement
écrabouillé. Le monsieur, quant à lui, avait du sang partout sur le
corps. Il n’y avait aucun doute, les deux personnes étaient mortes.
Ou du moins, c’est ce que les passants affolés et ravagés par cette
image attristante pensaient. Lorsque l’ambulancier hurla, de
l’espoir revint dans certains cœurs.

- BRANCARD, VITE ! UN SURVIVANT !

L’homme était vivant. L’enfant lui, n’avait eu aucune chance de


l’être. Très vite, le véhicule hospitalier s’éloigna en lançant des
coups de sirène stridents. L’homme pouvait être sauvé.

Aldores Fidèle 2
Amour et passion : Giovanni Agani

L’émotion était à son comble lorsque que le policier se rendit


brusquement compte qu’il n’avait pas aperçu le conducteur du
camion. Serait-ce le monsieur qui venait d’être embarqué ? Pas
sûr, ce dernier n’y ressemblait pas le moins du monde. Il était trop
chichement habillé pour conduire un camion. Le téléphone
retrouvé écrasé à côté de lui était un haut de gamme. Le
conducteur n’aurait pas pu fuir non plus, tout le monde l’aurait
vu. Et avec la force de l’impact, il aurait dû être au moins blessé.
Alors, où diable se trouvait-il ?
Le policier se souvint alors qu’il avait entendu de nombreuses
histoires sur des gens ayant la capacité de se téléporter
littéralement d’un endroit à un autre après un accident. Il resta coi,
car il ne croyait pas en ces choses-là. Mais aucune trace du
conducteur ne venait lui ôter ses doutes. Cela demeurera un
mystère total pour lui.

7 mois plus tard...

- Madame, veuillez signer ici, s’il vous plaît, dit l’infirmière, un


large sourire sur le visage.
La dame à qui elle s’adressait était d’une beauté rare. Pour une
femme de trente ans, elle respirait la jeunesse et la santé de la
vingtaine. Plutôt courte de taille, son corps restait néanmoins
ferme et attrayant. Elle dégageait une impression de profonde
maturité et un sourire discret s’était dessiné sur ses lèvres. Elle
prit le stylo que lui tendait l’infirmière et apposa sa signature sur
le document qui lui était montré.

- Merci beaucoup madame. Rentrez bien monsieur Giovanni.


Aldores Fidèle 3
Amour et passion : Giovanni Agani

Prenez bien soin de lui, madame, dit l’infirmière en regardant la


dame qui s’éloignait en poussant un fauteuil roulant dans lequel
était installé un homme.

- Merci pour tout, Alice, répondit l’homme à qui elle s’adressait.


Prenez soin de vous aussi.
Dès qu’ils furent loin, la femme s’adressa à Giovanni, car c’était
le prénom de l’homme dans le fauteuil roulant.

- De quoi elle se mêle-elle ? C’est à elle de me dire comment je


suis censé prendre soin de mon mari ? Et puis pourquoi elle
t’appelle par ton prénom ? Ce n’est pas professionnel. Elle
devait dire Monsieur Agani et non Giovanni.

L’homme affichait un sourire amusé. Sa femme n’avait pas


changé d’un iota. Toujours aussi jalouse. Cela le rassurait en
partie. Soudain, il remarqua qu’ils n’avançaient plus. Il retourna
sa tête et la vit, les bras croisés, le dévisageant.

- Giovanni, tu ne me réponds pas ? Pourquoi cette femme est


aussi familière avec toi ? Sept petits mois que tu as passés
hospitalisé et tu as déjà trouvé une maîtresse dans la clinique ?
Giovanni !

Giovanni et sa femme se regardèrent. Elle, une moue choquée sur


le visage, lui, un sourire moqueur. Un dixième de secondes plus
tard, ils éclatèrent de rire et se remirent en route.

- Je suis heureuse que tu rentres enfin, chéri. Tu nous as manqué


à la maison, lui murmura-t-elle.

Aldores Fidèle 4
Amour et passion : Giovanni Agani

- Moi aussi je suis heureux de pouvoir rentrer. Merci, pour être


restée.

- Ne me remercie pas. Pour le meilleur et pour le pire, jusque dans


nos autres vies, non ?

- Jusque dans nos autres vies, répéta-t-il machinalement.


Giovanni se souvenait comme si c’était hier de son mariage.
Une cérémonie pleine de vie, de couleurs et de passion. Il avait
décidé avec sa femme de ne pas mettre de costume noir. « Je
vais à mon mariage, pas à un enterrement », disait-il. Tous deux
étaient magnifiquement accordés en blanc. Lorsque le prêtre
leur fit prononcer les vœux de mariage, Giovanni refusa de
répéter cette partie-là, sous prétexte que ça ne lui allait pas.

- Non, mon père. Ces vœux-là ne me correspondent pas. Un froid


glacial se saisit de l’assistance. Il continua pour virer toute
confusion :

- Je ne dis pas que je ne veux plus d’elle comme femme ! Mais la


mort ne peut pas nous séparer. Elle et moi, c’est au-delà des
frontières de la mort et jusque dans nos autres vies.

Après quelques secondes d’égarement, la foule explosa en


applaudissements et en rires. Le prêtre les regardait avec une
tendresse infinie. C’était devenu rare, de voir des gens aussi
complices se marier, s’aimer et se compléter aussi bien. Il accepta
de modifier sa formulation.

Aldores Fidèle 5
Amour et passion : Giovanni Agani

- Monsieur Giovanni Agani, acceptez-vous de prendre pour


épouse mademoiselle Vanessa Kouton comme femme, pour le
meilleur et pour le pire, jusque dans l’au-delà ?

- C’est maintenant que parlez comme il faut, mon Père. Oui, je le


veux, répondit alors Giovanni, empli de bonheur.
Cette phrase est devenue leur petit code, leur expression d’amour
propre à eux. Giovanni et Vanessa étaient ce que certaines
personnes appelaient des âme-sœurs. Leur fusion était telle qu’ils
partageaient les mêmes passions pour le sport et pour les jeux de
société. Depuis qu’ils se sont rencontrés au collège en troisième,
plus rien n’avait pu les éloigner l’un de l’autre. Vanessa était allée
étudier en France pendant trois ans, et même après cette longue
absence, ils n’avaient pas arrêté de s’aimer profondément. Ce fut
donc sans aucune surprise qu’ils se marièrent et vécurent jusquelà
heureux, sans aucune embrouille majeure.
Tout allait pour le mieux jusqu’à ce jour fatidique où Vanessa
reçut l’appel de la clinique où son mari avait été admis d’urgence.
Lorsqu’on lui annonça qu’il se trouvait entre la vie et la mort, ses
jambes flageolèrent. Elle ne put tenir debout. Ce fut son amie
Alakè qui l’emmena à la clinique. Elle ne put voir son mari
directement, car il était en pleine opération. Le docteur en charge
de l’opération mit du temps à sortir.

- Madame Agani, l’opération est toujours en cours. Pour l’instant,


nous ne pouvons rien dire par rapport à l’état de votre mari.
Nous faisons de notre mieux pour qu’il aille mieux.

Aldores Fidèle 6
Amour et passion : Giovanni Agani

Elle ne put répondre. Les cernes sous ses yeux et les larmes qui
dévalaient silencieusement ses joues témoignaient de toute la
douleur qu’elle ressentait sur le moment. Elle était perdue et son
cœur était comme compressé. Elle se demandait comment elle
ferait pour survivre s’il s’en allait, s’il la laissait pour rejoindre
les anges au paradis. - Ne dis pas ce genre de choses, Vanessa !
Gio va s’en sortir. C’est un homme fort, tu verras il s’en sortira,
lui répétait sans cesse son amie, Alakè.
Près de trois heures après être reparti en salle d’opération, le
docteur revenait enfin, un sourire contenu sur les lèvres.

- Il est vivant, nous avons fait tout ce qui était possible pour lui
sauver la vie. Toutefois, madame Agani, j’aimerais m’entretenir
en privé avec vous.
Alakè s’éloigna un peu et scrutait le visage de son amie pour y
déceler une émotion. Elle la vit pleurer, sourire puis se couvrir le
visage. Lorsque le docteur s’en alla, elle se rapprocha de son
amie.

- Il y a quoi, chérie ?

- Il ne marchera plus jamais. Toute la partie inférieure de son


corps est paralysée, répondit Vanessa, les yeux enflés à cause
des torrents de larmes qui séchait sur sa joue.

Alakè la consola du mieux qu’elle pouvait. Elle ne put sortir un


mot, parce qu’elle se doutait bien que cela ne servirait à rien. Il
fallait juste la laisser pleurer, se vider de tout ce qu’elle avait gardé
tout ce temps. Dans l’esprit de Vanessa, c’était une danse
folklorique endiablée de sentiments mitigés. Oui, elle était
Aldores Fidèle 7
Amour et passion : Giovanni Agani

heureuse. Oui, elle rendait grâce au ciel, son Giovanni était en vie.
Mais il était paralysé à vie. Elle imaginait tout ce que ça
entraînerait comme complications au quotidien et elle eut peur.
Mais elle l’aimait, ou du moins elle tenait assez à lui pour ne pas
l’abandonner à cause d’une infirmité. Giovanni, c’est son homme,
il a toujours été là pour elle. Alors elle restera jusqu’au bout.
Giovanni resta hospitalisé tout le reste de l’année. Ce fut
compliqué pour lui, parce qu’il avait toujours été quelqu’un de
très indépendant. Il devait attendre l’aide d’une personne tierce
pour ses besoins les plus primaires. Sa vision de la vie a changé,
en sept mois d’hospitalisation. Vanessa, sa charmante épouse, est
restée avec lui chaque jour qu’elle pouvait, sans toutefois porter
atteinte à son travail. Lorsqu’elle n’était pas là, c’était Alice qui
prenait soin de lui. Cette infirmière a été bonne pour lui du début
à la fin de son séjour. C’est donc logiquement que leur lien
d’amitié s’est tissé. Il prévoyait d’ailleurs lui faire parvenir un
bouquet de fleurs et un collier en reconnaissance de ses services
pour lui. Il savait Vanessa très possessive, mais il se sentait obligé
de le faire. Alors il le ferait, elle comprendrait.

Lorsqu’il rentra chez lui, il remarqua que tout était éteint. Puis, la
lumière jaillit brusquement et une foule de gens apparurent
comme par magie.

- Surprise !

Giovanni baissa la tête. Il s’attendait à quelque chose du genre de


sa femme et de ses proches, mais l’émotion restait tout de même
particulière. Il laissa couler deux larmes sur ses joues et releva le
visage, tout souriant.
Aldores Fidèle 8
Amour et passion : Giovanni Agani

- Bienvenue chez toi, chéri. Tu nous as manqué, lui dit sa femme


en, posant un baiser sur ses lèvres.

- Mon luxe m’a manqué,j’avoue, répondit-il, faisant rire toute la


petite assistance.
D’abord, ses deux enfants se précipitèrent sur lui. Ses deux petits
anges, ses filles adorées, Christelle et Auréa, le couvrirent de
bisous. Puis, chacune des personnes présentes passa lui dire un
mot gentil. Ses parents, ses beaux-parents ainsi que les amis
communs du couple étaient là. Il les salua tous, tout ému. La petite
fête commença. Les boissons sortaient de tous les recoins de la
pièce. Giovanni fut installé dans le fauteuil principal du salon. Il
y avait à manger pour un régiment entier, il eut l’embarras de
choix.
Après avoir dévoré tout ce que lui apportait sa femme, Giovanni
se pencha sur sa mère assise à côté de lui et lui demanda dans le
creux de l’oreille :

- Où est Patrick, maman ?

- Ton frère a été pris par son travail, chéri, lui répondit sa mère.
Il viendra beaucoup plus tard. Vanessa ne t’a pas dit ?

- Non, elle a dû oublier.

Le frère de Giovanni, Patrick, était son meilleur ami. C’était un


homme imposant, d’un teint profondément noir et au gabarit
digne de celui des plus grands boxeurs. Il se différenciait bien de
son frère d’ailleurs. Giovanni lui, était d’un teint un peu plus clair
et d’une carrure moins herculéenne. Patrick et Giovanni étaient
Aldores Fidèle 9
Amour et passion : Giovanni Agani

les seuls enfants de leurs parents. Ils n’ont jamais été vraiment
séparés et ont découvert la vie et ses difficultés ensemble. Il n’y
avait que deux ans d’écart entre les deux, Giovanni était le plus
vieux des deux.
Il était 19 heures lorsque Patrick passa le pas de la porte. Les
invités s’en étaient presque tous allés, ne laissant que le cercle
familial restreint sur place. Patrick enleva sa veste et l’accrocha
sur le dos d’une chaise et se dirigea vers son frère assis dans le
grand salon. Il salua son père, fit la bise à sa mère et s’accroupit
en face de son frère. Les deux hommes se regardèrent
intensément. Ils semblaient communiquer par télépathie. Patrick
regarda les jambes de son frère, dépité.

- Ils t’ont bien amoché en fin de compte, frérot, dit Patrick, les
yeux toujours baissés sur les jambes de son frère.

-Tu ne crois pas si bien dire, Pat.

- Tu vas gérer ?

- On s’y fait. Je suis ton grand-frère, non ?

- C’est exact, répondit alors Patrick en prenant la tête de son frère


entre ses deux mains. Tu es fort, Gio. Tu vas faire de belles
choses en fauteuil ou pas.
Les deux hommes fermèrent les yeux et leurs fronts se collèrent.

Ils restèrent ainsi une dizaine de secondes, puis Patrick se leva et


se dirigea vers la sortie.

Aldores Fidèle 10
Amour et passion : Giovanni Agani

- Je dois vous laisser, j’ai encore beaucoup à faire. La nuit sera


longue pour moi. Prenez soin de vous et de lui.
Il décrocha sa veste et sortit. Le fait est que Patrick est un grand
loup solitaire. Il passe du temps avec sa famille, certes, mais il
n’est pas du genre à être hyper démonstratif, et tout le monde le
savait, ça. Personne ne lui en voulait, parce qu’il répondait
toujours présent lorsqu’on avait besoin de lui.
Giovanni regarda son frère s’en aller. Il avait apprécié sa visite,
mais il avait remarqué une chose qui le chiffonnait un peu. Et il
voulait savoir ce qui se passait.

[...]
Il se faisait tard. Après mille et une péripéties, Giovanni avait pu
prendre une douche et se mettre au lit. Sa femme se lavait à son
tour. Lorsqu’elle finit, elle ressortit de la douche toute fraîche.
Giovanni n’était pas indifférent au sex-appeal de sa femme. Après
toutes ces années ensemble, la voir en robe de nuit transparente
lui faisait toujours cet effet. Il avait envie d’elle, envie de
s’amuser, de prendre son pied comme jamais auparavant. Il avait
besoin de se sentir homme, de voir toute sa virilité. Il sentit que
sa femme était dans le même état d’esprit que lui. Sept longs mois
qu’ils n’avaient pas fusionné, qu’ils n’avaient plus touché le
septième ciel ensemble. Aujourd’hui plus que jamais, c’était
l’occasion de se refaire une santé sexuelle.

Lorsqu’elle le regarda assis sur le lit, Vanessa se sentit toute moite.


Mais une question persistait. Comment fallait-il s’y prendre ? Elle
s’approcha lentement de lui, dans un jeu de séduction cinq étoiles.
Elle souleva le drap brusquement et se sentit tout de suite
Aldores Fidèle 11
Amour et passion : Giovanni Agani

rassurée. Son homme avait bel et bien une érection, belle et


imposante. Vanessa sourit et regarda son mari. Elle empoigna sa
verge et y posa malicieusement ses lèvres.
Cela ne dura qu’une trentaine de secondes. Elle sentit que ce
qu’elle tenait dans sa main se mettait à ramollir vertigineusement.
Dans un ultime élan, elle s’enhardit, se servait à la fois de ses
mains et de sa langue. Mais malgré qu’elle s’employa à l’avaler
goulûment de la meilleure des manières, rien n’y fit. Le sexe de
son homme mourut et se retrouva sous sa forme initiale, flasque
et froid.
Lorsqu’elle leva les yeux sur son mari, elle put lire tout
l’agacement dans ses yeux. Il était triste et sa dignité d’homme
venait de prendre un grand coup de massue. Elle se sentit obligée
de le rassurer pour que le reste de confiance qu’il avait en lui ne
disparaisse pas.

- Chéri, ce n’est rien je t’assure. Tu n’as pas à te sentir coupable


ou quoi que ce soit du genre, dit Vanessa à son mari.

- Coupable, non. Honteux, oui. Cet accident a bien foutu ma vie


en l’air. Je ne peux même plus profiter de ma femme sans
craindre que tout ne se débranche subitement. Et pourtant, j’ai
envie de toi. Je meurs d’envie de toi. Mais voilà à quoi je suis
réduit, Vanessa. Voilà à quoi je suis réduit.

- Giovanni...

Vanessa se blottit doucement dans les bras de son mari.

Aldores Fidèle 12
Amour et passion : Giovanni Agani

- Arrête de te tourmenter avec des idées du genre. On trouvera


bien d’autres moyens de se satisfaire ensemble. Rien ne presse.
Il ne répondit pas. Il resta là, le regard évasif, perdu entre ses
pensées et tous les doutes que lui inspirait son nouveau statut
d’handicapé. Ses doutes avaient été d’un seul coup nourris par la
scène qui s’est déroulée dans son salon ce soir, lorsque son frère
vint. Personne ne semblait avoir remarqué, mais lui avait vu et
maintenant soupçonnait beaucoup de choses. Pour l’instant, il
fallait attendre, chercher des preuves pour confirmer ou infirmer.
Il voulait en avoir le cœur net. Tout doucement, il posa une bise
sur le front de sa femme qui se redressa pour le laisser se coucher.
Deux semaines passèrent depuis le retour de Giovanni. Il avait
essayé tant bien que mal de découvrir des preuves pour étayer ses
lourdes suspicions, mais sa femme semblait être plus sincère qu’il
ne l’avait cru. Il se sentait idiot d’avoir douté d’elle alors même
qu’elle se donnait corps et âme pour lui. Lui n’allait plus au
travail, ou du moins, pas physiquement. Il avait le contrôle de son
entreprise depuis sa maison. Il continuait de jouer
exemplairement son rôle de chef de famille sur ce plan. Mais sur
le plan sexuel, il était devenu l’ombre de lui-même. Trois fois que
sa femme et lui avaient essayé d’avoir des moments intimes, trois
fois qu’il ne comprit pas pourquoi il n’arrivait pas à garder son
engin bien droit. Et ça l’agaçait. Mais un matin, alors qu’il
commençait à oublier tout ce qu’il avait pu avoir comme doute, il
avait eu la preuve ultime pour ne pas croire en la bonne face de sa
femme, et de son frère.
Ce fut une discussion téléphonique étouffée qui réveilla Giovanni.

Aldores Fidèle 13
Amour et passion : Giovanni Agani

Lorsqu’il ouvrit les yeux, il vit sa femme debout devant sa


garderobe. Elle lui faisait dos, elle ne pouvait donc pas savoir
qu’il était réveillé. Giovanni referma donc les yeux pour ne laisser
aucun soupçon. Il tendit l’oreille pour entendre la conversation de
sa femme. Bien qu’il ait beaucoup de mal à saisir ses paroles, il
put capter des bribes de paroles.

«Non, arrête ça, tu ne peux pas parler ... Il est sorti de l’hôpital,
pourquoi tu fais ça ? ... Je t’ai dit que c’était une erreur. Ne sois
pas idiot. Tu ne peux pas faire ça, Patrick. Je t’ai dit que c’était
une foutue erreur. Allô ? Allô ? L’imbécile».
Vanessa se retourna subitement, comme si elle avait eu
l’impression qu’on l’épiait. Elle regarda son mari couché qui
feignait de dormir, mais cela, elle ne pouvait pas s’en rendre
compte. Elle se dirigea alors tranquillement vers la porte, sortit
puis ferma derrière elle.
Giovanni se redressa, le visage tout pâle et les mains
tremblotantes. Ce qu’il avait entendu n’était qu’une infirme partie
de la conversation. Il pourrait s’agir de n’importe quoi d’autre.
Mais son intuition lui hurlait que quelque chose s’était passé entre
sa femme et son frère. Cela justifierait parfaitement l’attitude de
Patrick la veille lorsqu’il vint voir son frère. Il n’adressa pas un
mot à Vanessa. Pas un sourire, pas un regard.
Ce fut une poignée de main sèche. Giovanni remarqua la froideur
entre les deux et les doutes sont nés. Au fur et à mesure qu’il y
pensait, de nombreux détails lui revenaient en tête. Des détails
qui, jusque-là, n’auraient alarmé personne.

Aldores Fidèle 14
Amour et passion : Giovanni Agani

Pourquoi la plupart du temps, c’était Patrick qui amenait Vanessa


à l’hôpital pour lui rendre visite ? Pourquoi il la ramenait souvent
à la maison ? Pourquoi passait-il la voir quelquefois et passait du
temps avec elle et les enfants ? Et puis Vanessa aussi avait parfois
des comportements bizarres. Il arrivait qu’elle ne puisse pas faire
ses courses et elle les confiait à Patrick. Il est vrai qu’il n’y avait
pas meilleure personne pour le remplacer que son frère, mais
pourquoi c’était devenu aussi fréquent ?

Et puis un jour, environ un mois avant sa libération de l’hôpital,


Patrick était soudainement devenu trop occupé pour
accompagner Vanessa. Il préférait appeler et se faisait de plus en
plus rare. Était-ce un cas de conscience subit qu’il avait eu ou
était-il vraiment trop occupé ? Pourquoi avait-il ignoré Vanessa le
soir précédent et surtout, de quoi lui parlait-il au téléphone ?
Giovanni essayait de répondre à toutes ses questions lorsque sa
femme rentra dans la chambre. Elle remarqua sa mine toute
renfrognée et s’en inquiéta :

- Bonjour chéri tu vas bien ? Tu as sale mine.


Giovanni savait qu’il était trop tôt pour accuser qui que ce soit. Il
n’avait aucune preuve que sa femme l’avait trompé avec son frère.
Il fallait donc jouer le jeu pour qu’elle ne puisse se douter de rien.

- J’ai fait un cauchemar. Bonjour mon amour.

- Encore l’accident ?

- Oui, encore l’accident. J’espère que ça finira par me lâcher. Et


sinon, toi tu as bien dormi ? demanda-t-il pour changer de sujet.
Aldores Fidèle 15
Amour et passion : Giovanni Agani

- Oui, c’était bien, répondit-elle, toute guillerette.

- Bien. Tu m’aides ? Je veux prendre une douche.

- Bien-sûr, chéri. Tes désirs sont des ordres pour moi.

Clopin-clopant, encore mal habitués à l’équipement qu’ils


s’étaient procurés pour faciliter les douches, le couple put
ressortir de la salle de bain avec un Giovanni aussi frais qu’un
morceau de glaçon. Toutefois, dans sa tête le mystère restait
toujours aussi dense, aussi intense. Il allait chercher des preuves
par tous les moyens. Et il allait les trouver. Pour l’instant, il
nourrissait sa colère et sa frustration tout doucement, comme le
doux et fort nectar qu’est la jalousie.
Tout le salon sentait bon le café fraîchement moulu. Lorsque
Giovanni se saisit de sa tasse, de beaux souvenirs lui revinrent en
mémoire. Vanessa avait toujours su préparer des tasses de café au
dosage parfait. Il s’en délectait avec passion, lui qui avait toujours
été un accro au café bien noir. Il était perdu dans l’émission de
télévision qui passait lorsque la sonnerie de son téléphone le
ramena brutalement à la réalité. Son cœur rata un battement d’un
coup. Il sentit les nombreux poils de son bras se hérisser. Une
sueur froide glissa tout le long de son dos et lui refila des frissons
qu’il eut du mal à contenir. Sur l’écran du téléphone, il y avait
écrit « Appel entrant de Patrick ».
Sa femme était à la cuisine. Il se demandait si cet appel avait un
lien direct avec la discussion qu’il avait entendue en matinée. Il
resta figé jusqu’à ce que l’appel ne se coupe. Il décida alors de
rappeler son frère. L’autre décrocha presque aussitôt.
Aldores Fidèle 16
Amour et passion : Giovanni Agani

- Patou comment vas-tu ?

- Tu m’as l’air bien heureux, toi. Je vais bien Giovanni. Tout va


comme tu veux ?

- Je vais bien, frérot. Depuis quand mon frère m’appelle aussi


matinalement ?

Giovanni ressentit la toute petite seconde d’hésitation avant la


réponse de son frère. Lorsque vous vous méfiez de quelqu’un,
certains détails deviennent trop évidents pour que vous les
loupiez.

- Je prenais juste de tes nouvelles, grand frère.

- C’est gentil frérot.

- Bien, ça te dirait un dîner ce week-end ?

- Oui, je suis partant, ça faisait vachement longtemps.

- Parfait, Gio. A samedi alors ! Le restaurant Le Privé, 20 heures


?

- A samedi, Patrick. C’est entendu, Le Privé à 20 heures. Je


viendrai avec ma femme. De toutes façons, je ne peux plus
vraiment me déplacer sans elle, littéralement parlant.

- Bien-sûr, je ne l’ai pas dit parce que cela va de soi. Viens avec
elle, plus est de fous, plus on rit, répondit Patrick. Prends soin
de toi, ajouta-il en raccrochant.
Il sentait que ce dîner dans quatre jours serait riche en émotions.
Aldores Fidèle 17
Amour et passion : Giovanni Agani

Peut-être qu’il était juste très paranoïaque. Mais les phrases de sa


femme de ce matin ne laissaient la place à aucun doute possible.
Giovanni sentit tout d’un coup qu’un regard était posé sur lui. Il
y a une croyance populaire qui dit que lorsque quelqu’un vous
regarde intensément en pensant fortement à vous, vous pouvez le
ressentir. C’est ce qui lui arriva sur le moment. Machinalement, il
se retourna et regarda dans toute la pièce. Mais il n’y avait
personne. Presque en même temps, sa femme sortit de la cuisine.
Un sourire forcé étirait ses lèvres qu’elle avait pulpeuses. C’était
à peine perceptible. Elle vint s’asseoir juste à côté de lui et lui prit
la main, comme elle avait l’habitude de le faire.

- Tu vas bien, chéri ?


Giovanni ne savait pas exactement pourquoi, mais il se sentait
extrêmement mal à l’aise sur le coup. Il avait peur, mais il ne
savait pas de quoi. Il se sentait tout d’un coup impuissant parce
qu’il n’avait plus de jambes et ne pouvait plus vraiment se
défendre. « Mais se défendre de qui ? De quoi ? » pensa-t-il.

- Je suis là, je ne me plains pas. Et toi ?

- Je vais bien, chéri. Tu es avec moi, chez nous. Donc je vais bien.

- D’accord.

Un silence lourd et pesant s’installa dans le salon. Quelques


secondes plus tard, Vanessa enchaîna :

- Tu étais au téléphone tout à l’heure avec ton frère ? J’ai cru


entendre son nom.

Aldores Fidèle 18
Amour et passion : Giovanni Agani

Giovanni comprit que la sensation de regard qui pesait sur lui un


peu plus tôt provenait de là. Lorsque sa femme l’entendit
prononcer Patrick, elle avait écouté le reste de la conversation
sans qu’il ne le sache.

- Oui. Il voudrait que lui et moi dînions ensemble le samedi, dans


quatre jours. Il nous invite à deux d’ailleurs, rétorqua-t-il.

- D’accord, chéri.
La voix de Vanessa était devenue légèrement tremblotante. Elle
était devenue très nerveuse et n’arrivait pas à la cacher
convenablement. Elle se leva et se rendit tranquillement dans la
chambre.

Je vais prendre une douche, lança-t-elle avant de disparaitre


dans le petit couloir.

[...]

Ce soir-là, les anges s’étaient arrêtés de dessiner dans le ciel de


beaux motifs avec les étoiles. La lune, toute ronde, dominait
majestueusement la voûte céleste et éclairait aussi puissamment
qu’elle le pouvait. Un halo parfait l’entourait, clair et tout aussi
grand. Cette soirée-là n’était pas une soirée à faire des révélations.
Ce soir, il fallait prendre du plaisir, s’amuser, rigoler, picoler et
dormir ensuite jusqu’au petit matin.
Mais Patrick ne voyait pas les choses du même œil. En fait, il se
foutait éperdument du temps qu’il faisait. Sa décision était prise,
il fallait qu’il parle. Se murer dans le silence et garder pour lui
cette histoire abjecte était synonyme de lâcheté pour lui. Et jamais
Aldores Fidèle 19
Amour et passion : Giovanni Agani

il n’avait été lâche de sa vie. Il ressentait le besoin de faire éclater


la vérité et de faire sortir de l’ombre ce secret qu’il gardait et qui
commençait à peser lourd sur lui. Et peu importe qui il écrasait
dans ses confidences, il le ferait.
Patrick arriva au restaurant Le Privé comme convenu, avec une
bonne heure d’avance. Il avait réservé une table. Il commanda une
bouteille de vin rouge, fit sauter le bouchon-liège et commença à
boire tout seul, en attendant son frère. De son côté, Giovanni
finissait de se préparer. Il avait une heure d’avance parce qu’il
fallait que sa femme se prépare. Elle, elle était devenue un
véritable mur depuis la dernière fois, depuis l’appel. Elle semblait
très préoccupée, mais faisait mine d’aller bien.
Vanessa savait que cette soirée marquerait un tournant dans sa vie.
Elle savait que ce soir, tout pouvait s’écrouler, comme un vulgaire
château de cartes. Mais il lui restait une chance, une toute petite
chance. Elle pouvait encore réussir à convaincre Patrick de tout
garder pour lui. Et pour cela, il fallait réussir à montrer au frère
de son mari à quel point il détruirait son couple s’il parlait. Elle
était bien déterminée à le faire.
Lorsqu’il sonna vingt heures pile, le couple Agani entra dans le
restaurant. Ils virent directement Patrick assis à une table, tout
seul. Seulement voilà, la table n’était pas une table de trois
personnes. C’était plutôt une longue table de six. Giovanni ne
comprenait pas pourquoi il y avait autant de chaises.

- On n’est pas seuls ce soir ? Tu as invité toutes tes maîtresses ?


Patrick se leva et embrassa son frère. Puis, comme si de rien
n’était, il prit la main de Vanessa et la serra fort dans la sienne en
Aldores Fidèle 20
Amour et passion : Giovanni Agani

lui souriant. Elle se sentit extrêmement gênée. Aurait-il changé de


décision ? Il installait le doute de façon subtile en elle.

- Bonsoir mon frère. Non, pas de maîtresses ce soir. Je peux bien


m’en passer pour une nuit, dit Patrick en riant. Par contre, oui,
nous avons quelques invités à notre table. Ils viendront dans
quinze minutes.

- Je pensais que c’était entre frères, rétorqua Giovanni sur un ton


un peu réprobateur.

- Allez ne boude pas grand frère, plus on est de fous, plus on rit !
Installez-vous donc. Serveur ! Une bouteille de vin s’il te plaît !
Giovanni remarqua la bouteille que son frère avait entamée. Il
n’en restait que le quart. Patrick n’était pas un alcoolique mais il
tenait très bien l’alcool. Il ne prit donc pas la peine de lui
demander pourquoi il dégommait une bouteille entière à lui seul.
- Bonsoir !

Giovanni se retourna et son cœur sursauta. C’était leurs parents


que Patrick avait rajoutés.

- Tu aurais pu me dire que tu invitais papa et maman tu sais,


j’aurais très bien compris. Patrick, il se passe quoi ? Tu agis
bizarrement. Tout va bien ?

- Oh oui, mon frère. Tout va absolument bien. Je veux passer un


moment avec ma famille, c’est normal, non ? répondit Patrick,
un sourire large jusqu’aux dents sur les joues. Bonsoir papa,
bonsoir maman. Prenez place et merci d’être venus. J’ai

Aldores Fidèle 21
Amour et passion : Giovanni Agani

commandé un menu entier famille. Il viendra d’ici là. En


attendant, comment allez-vous ?
Un silence embarrassant se saisit de la petite table. Raclements de
gorge, petits coups d’œil, tous les invités se posaient la même
question : qu’est-ce qui se passe ? Tous, sauf une personne.
Vanessa était blême. Son visage trahissait une inquiétude
immense. À mille kilomètres à la ronde, on pouvait ressentir toute
la frayeur qu’elle dégageait. La lumière tamisée sous laquelle était
la table cachait bien les sueurs froides qui lui traversaient le dos
et la moiteur de ses mains. Il n’allait pas s’arrêter là, Patrick avait
bien pour intention de détruire son couple. Elle allait en être
témoin, sans pouvoir piper le moindre mot.
Les repas apparaissaient comme par magie. Très vite, la table fut
bondée de nourriture. Giovanni ne se fit pas prier. Avec l’aide de
Vanessa, il se servit et se mit à manger, sans attendre quiconque.
Les autres personnes autour de la table firent de même, mais
Patrick ne toucha pas à son assiette. Il continua de boire, encore
et encore, sans parler. Lorsque tous furent repus, il se décida enfin.

- Levons nos verres. Je veux porter un toast à Giovanni, qui a bien


failli nous laisser. Tu es un homme béni mon frère. À Giovanni
! dit-il en levant son verre plein de vin.
Les autres firent de même, toujours plongés dans
l’incompréhension. La voix de leur père éclata soudain. - Bon, ça
suffit, cette mascarade. Patrick, pourquoi sommes-nous ici ?

Aldores Fidèle 22
Amour et passion : Giovanni Agani

Qu’est-ce que tu célèbres ou qu’est-ce que tu veux nous dire ? Je


crois que tout le monde autour de cette table a compris que ce
n’était pas un dîner de famille comme les autres.

- Ce que je veux dire ? Nous y venons. Doucement. Nous allons


parler ce soir. Ou plutôt, je vais parler et vous allez m’écouter.
J’ai des histoires à raconter, lui répondit Patrick.

- Alors parle, au lieu de tourner autour du pot. C’est que ça


devient fatiguant à la fin, s’énerva le père des deux hommes.

- Patrick, vous avez couché ensemble ?


Silence de mort autour de la table. Tous les regards se tournèrent
vers Giovanni qui venait de parler, consternés, surpris.

- Qu’est-ce que tu viens de dire, mon frère ? Répète s’il te plaît,


demanda Patrick.

- Ne fais pas l’idiot. J’ai vu votre petit jeu depuis un moment. Et


ça me brûlait de l’intérieur de le demander. Alors, est-ce que oui
ou non, pendant que j’étais à l’hôpital, tu t’es tapé ma femme,
frérot ?

C’est ce moment que Vanessa choisit pour intervenir.

- Chéri, comment peux-tu penser ça ? Moi, avec ton frère ?

Elle regarda Patrick qui était toujours bouche bée. Papa et maman
Agani l’étaient plus que lui d’ailleurs. Puis, dans un grand bruit,
Patrick explosa de rire.

Aldores Fidèle 23
Amour et passion : Giovanni Agani

- Non mais tu t’entends ? Coucher avec ta femme ? Je ne suis pas


marié moi, Giovanni. Je fais ce que je veux, avec qui je veux.
Mais pas avec la femme de mon frère tout de même. Tu me
déçois, Gio.

- Alors qu’est-ce qu’il y a bon sang, tu vas parler oui ? Depuis


tout à l’heure tu n’arrêtes pas tourner. Tu sèmes le doute ? On
est adultes, alors parle, qu’on en finisse, Patrick.
Giovanni était rouge. Rouge d’impatience, de colère et de
frustration.

- Calme-toi, mon frère. Ne sois pas pressé. Je n’ai pas couché ta


femme. Enfin, moi non.
Ce bout de phrase jeta un froid glacial sur la table. Vanessa se
décomposait littéralement. Patrick, maître du jeu, sortait une à une
ses cartes. C’était une partie de poker qu’il avait gagné avant
même qu’elle ne commence. Sa mère posa une main sur la sienne
et s’adressa à lui :

- Mon fils, s’il te plaît, il faut que tu parles. Mon cœur n’en peut
plus. Si tu as des révélations à faire, fais-les.

- C’est vrai. Si tu as quelque chose à dire, dis-le ou tais-toi et laisse


nous partir. C’est quoi ce jeu vicieux de cachotteries ?

N’importe quoi ! ajouta monsieur Agani, le père des deux


hommes.

Aldores Fidèle 24
Amour et passion : Giovanni Agani

Seule Vanessa restait silencieuse. La face baissée, elle retenait tant


bien que mal ses larmes, espérant un miracle. Elle aurait voulu
que cet imbécile puisse devenir muet tout d’un coup.

- Vanessa !
Elle leva la tête et remarqua que tout le monde la fixait. C’était
Patrick qui venait de crier son prénom.

- Vanessa ! Est-ce que ça va ? Tu as l’air perdue. Bon, je


demandais si tu lui dis toi-même ou si tu préfères que je le fasse.
Vanessa regarda méchamment Patrick. C’était un monstre, une
immonde créature sans cœur. Elle préféra ne pas répondre du tout.

- Bien. Tu ne veux pas te décider. C’est dommage. En plus d’être


infidèle, tu n’as pas le courage d’assumer tes actes.

- Patrick, s’il te plaît, parle-moi, supplia Giovanni. Qu’est-ce que


tu essayes de dire ? Ma femme m’a trompée ? Mais arrête de
parler à demi-mot nom de Dieu !

Patrick se tourna lentement de l’autre côté de la table et regarda


son père.

- Je ne sais pas, Gio. On pourrait demander à notre père, non ?


Giovanni sentit sa colonne vertébrale se raidir tout d’un coup. Il
eut l’impression que quelqu’un venait de lui déposer une masse
de cent kilogrammes sur le dos. Il tourna machinalement la tête et
posa ses yeux sur son père.

Aldores Fidèle 25
Amour et passion : Giovanni Agani

Le père des hommes, monsieur Agani, écarquilla des yeux tout


ronds. Il transpirait à grosses gouttes. Ce n’est que sur le moment
que tout le monde put voir à quel point il contenait une peur et
une nervosité extrêmes. Sa femme le regardait, ébahie.

- Comment ça, demander à papa, Patrick ? Papa a quoi à voir avec


une histoire du genre ? Patrick, tu veux bien m’expliquer ce qui
est en train de se passer là ? Papa, de quoi parle-t-il ?

Patrick sourit, prit son verre et le leva ;

- Au vice et à la famille ! dit-il, serein comme un homme mort.

Deux mois avant...

- Je passerai demain en soirée, on ira chercher les filles chez ta


mère à Cotonou ensemble.

- D’accord, merci pour tout Patrick.

- C’est un plaisir, Vanessa. C’est la famille.

Vanessa sortit de la voiture de son beau-frère et rentra chez elle.


Il faisait particulièrement frais ce soir-là. Une petite brise vint
caresser sa joue, lui rappelant de beaux souvenirs de soirs comme
celui-ci, lorsque son mari était avec elle. Elle sentit un léger
pincement au cœur, mais il passa très vite. Elle se dirigea vers la
grande porte d’entrée du salon qu’elle ouvrit.

- Déjà rentrée ? Il va bien ?

Elle sursauta d’abord, puis répondit.


Aldores Fidèle 26
Amour et passion : Giovanni Agani

- Avertis au moins quand tu viens ! Imagine si Patrick avait décidé


d’entrer.

- Ah, c’est bon. Il n’est pas entré. Alors ?

- Oui. Ton fils va bien. Il se rétablit doucement mais sûrement. Et


je suis sûr qu’il me trompe.
Monsieur Rodrigue Agani, le père de Patrick et Giovanni, se
retourna et regarda sa belle-fille de haut en bas.

- Le type est à l’hôpital. Ses pieds sont cassés. Toi, tout ce que tu
trouves à penser, c’est qu’il te trompe ? Et avec qui il te
tromperait d’abord ?

- Son infirmière. Si tu voyais les regards qu’elle lui lançait.

- Tu es sacrément hypocrite, toi. De toutes façons, même s’il le


faisait, tu ne devrais pas te plaindre. Tu ne vaudrais pas mieux
que lui.
Vanessa fit la moue et se dirigea vers la chambre à coucher. Elle
s’étala tout le long de son grand matelas et inspira un grand coup.
Elle savait que ce qu’elle faisait était la pire des abominations et
l’un des péchés les plus cruels qui soient, aussi bien envers Dieu
qu’envers son mari.

Mais si le péché est aussi apprécié des hommes, c’est parce qu’il
est excitant. Il a un goût particulier, une saveur qui pousse chaque
pécheur à être tenté de recommencer, encore, et encore, et encore.
Cette envie de recommencer, Vanessa y avait succombé, même
après toutes ces années. Et à chaque fois qu’elle décidait de tenir
Aldores Fidèle 27
Amour et passion : Giovanni Agani

tête à ses démons, la tentation revenait, plus forte, plus


entraînante. Et alors elle trouvait encore plus de plaisir à violer
tous les principes moraux.
Elle se leva, se changea et se dirigea vers la douche. Elle y était
lorsqu’elle entendit monsieur Agani crier son prénom. Elle ne
s’en occupa pas. Elle s’attendait à le voir faire irruption dans la
chambre d’une minute à l’autre, mais il ne vint pas. Elle résuma
sa douche, mit son peignoir et ouvrit la porte de la chambre.
Soudain, elle s’arrêta tout d’un coup. Précipitamment, elle
retourna dans la chambre.
Il était là. Elle était certaine d’avoir entendu sa voix. Patrick était
dans le salon, avec son père. Pourquoi était-il revenu ? Elle enfila
une tenue plus respectable pour n’éveiller aucun soupçon. Mais
elle savait que Patrick était loin d’être dupe. Il n’était parti qu’il y
a quinzaine de minutes. Il fallait qu’elle soit sereine.

- Tu as oublié un truc ?

- Mes clés sont dans ton sac, je crois.

- Ah oui. Je vais les chercher.

Vanessa s’empressa de retourner dans la chambre. Elle fouilla


nerveusement son sac, se saisit du trousseau de clé et sortit le
remettre à son beau-frère. Ce dernier se leva, serra la main de son
père, et les laissa, un franc sourire sur les lèvres. Lorsqu’elle
entendit sa voiture démarrer, elle se laissa choir dans le fauteuil le
plus proche, la main sur le visage.

Aldores Fidèle 28
Amour et passion : Giovanni Agani

Elle regarda Rodrigue, qui avait l’air quant à lui parfaitement


serein.

- Tout ça ne te dit rien ? Pourquoi tu restes aussi calme ? N’as-tu


pas peur le moins du monde de ce que ton fils pourrait
découvrir?

- Premièrement, je n’ai rien fait de mal. Ou du moins, les


apparences ne révèlent strictement rien. Je suis juste venu voir
ma belle-fille après avoir fini mon cours à l’université.
Deuxièmement, tu veux que je dise quoi ? De toutes façons, il
est déjà venu. Maintenant, il n’y a plus rien à faire. Arrête de
stresser.

Vanessa gardait les yeux fermés. Elle murmura tout doucement :

- C’est quoi toute cette histoire ? Regarde tout ce qu’on risque en


continuant de se voir. C’est devenu difficile, Rodrigue. Je ...

Avant qu’elle ne puisse finir sa phrase, elle sentit sur ses lèvres le
contact chaud de celles de Rodrigue. Avant même qu’elle ne
puisse s’en rendre compte, il l’avait délestée de sa robe. Dans sa
précipitation, Vanessa avait oublié de mettre des dessous. Elle se
retrouva donc toute nue, sous l’emprise et sous le charme de son
beau-père.

Le fait est que Rodrigue était loin du prototype du beau-père tout


boudiné, le ventre en avant et les dents jaunies par le tabac et
l’alcool. Il n’avait jamais fumé et jamais dépassé deux bouteilles
de bières de sa vie. Très grand sportif, il entretenait son corps
comme un temple et ne faisait pas les 54 ans que la vie lui donnait.
Aldores Fidèle 29
Amour et passion : Giovanni Agani

Sa stature d’homme imposant et attirant avait réussi à faire


succomber Vanessa. Elle ne lui résista pas et s’offrit même à lui.
Le péché était entamé. Plutôt que de faire dans la demi-mesure,
autant le consommer encore une fois jusqu’à la fin. Après, on
verrait.

- Dans la chambre ou ici sur le canapé ? demanda monsieur Agani.

- Prends-moi ici, mais c’est la dernière fois qu’on le fait,


Rodrigue.
L’homme la retourna, la mit contre le divan, descendit son
pantalon et s’engouffra profondément en elle. Lorsqu’elle ouvrit
la bouche pour laisser sortir un gémissement, il lui susurra à
l’oreille :

- Oui, bien-sûr, c’est la dernière fois, répondit-il, un sourire amusé


sur les lèvres.

Dans sa voiture, Patrick chantait à tue-tête. Il adorait cette


sensation de dominer le monde autour de lui. Vitres complètement
montées, il s’égosillait à rapper le dernier morceau en vogue.
Soudain, sa musique s’arrêta. La mine toute renfrognée, il jeta un
coup d’œil à l’écran de son téléphone. C’était sa mère. Il se relaxa
immédiatement et décrocha en haut-parleur.
- Comment va la plus belle femme du monde ? Bonsoir maman.

- Bonsoir chéri. Je vais bien et toi ?

- Je vais bien, maman. Tout va bien. Je suis entrain de rentrer là.

Aldores Fidèle 30
Amour et passion : Giovanni Agani

- Du boulot ? Tu rentres tôt aujourd’hui.

- Oui oui, je suis sorti un peu plus vite pour amener Vanessa chez
mon frère. Je l’ai ensuite déposée à leur maison. J’ai même vu
ton mari là-bas. Il a dit qu’il a profité pour passer la saluer après
ses cours.

- C’est mon mari mais c’est aussi ton père, insolent. Il m’a dit
qu’il finirait les cours et rentrerait juste après. Mais bon, ça lui
est venu en tête juste comme ça, probablement.

- Oui, certainement. Bon maman, je te rappelle quand je rentre. Je


suis au volant.

- Pas besoin. Je voulais juste entendre ta voix.

- Tu es la meilleure. À plus tard, mon amour. Bisous.

- À plus tard, Patou.

Patrick ne remit pas en marche sa musique. Dans son esprit, du


doute s’était installé. Son père n’était pas du genre à prendre des
décisions à l’improviste. Il avait toujours été très organisé, de
sorte à établir son programme de la journée la veille. Cela
l’étonnait donc qu’il puisse changer son programme comme ça.
Et puis, il s’est retourné quinze minutes après avoir déposé
Vanessa lorsqu’il se rendit compte de l’absence de ses clés. Son
père aurait donc eu le temps de faire rentrer sa voiture, de s’être
installé, d’avoir allumé la télévision et d’avoir presque fini une
bouteille de jus d’orange ? Et Vanessa dans tout ça ? Elle était
sortie toute fraîche de la chambre. Elle a eu le temps d’accueillir

Aldores Fidèle 31
Amour et passion : Giovanni Agani

son beau-père, d’avoir pris une douche alors même qu’il était là ?
Tout cela en quinze petites minutes ?
Patrick commençait à se sentir idiot de se poser autant de
questions. Douter de son père et de sa belle-sœur ? Il fallait être
sacrément culotté. Il se disait qu’il se faisait trop de films. Il rentra
donc chez lui, l’esprit toujours embrumé, désormais un peu plus
méfiant. Il ne savait pas pourquoi, mais des jours sombres
approchaient et il le sentait étrangement.
Une semaine entière s’écoula depuis le petit incident. Vanessa
semblait s’être calmée, oubliant presque que son beau-frère était
venu la retrouver seule avec son beau-père chez elle. C’était idiot
de sa part, de s’imaginer qu’il y aurait pu avoir un quelconque
doute. De quoi pouvait-il bien douter de toutes façons ? Il n’y
avait rien de bien compromettant. Mais le diable a le chic de se
mêler de ce qui ne le regarde pas, à tort et à travers. Et pour cette
fois-là, seulement pour cette fois-là, il avait bien fait de trahir
Vanessa. Elle s’enfonça seule une dague dans la poitrine, une
dague en forme de parole.
Un soir, alors que Patrick la ramenait comme d’habitude de
l’hôpital où était son mari, Vanessa se lança dans une longue
diatribe contre l’infirmière de son mari qui portait des tenues trop
décolletées à son goût. Et alors qu’elle déversait sa haine et son
venin sur la pauvre femme, un mot fit tilter Patrick. Vanessa ne
s’arrêta pas de parler, elle ne semblait visiblement pas avoir
remarqué son erreur, pourtant fatale.

- Patrick, cette femme est une provocatrice. Elle veut mon


mari, elle s’occupe même de lui au-delà de ce qu’elle devrait faire.
Aldores Fidèle 32
Amour et passion : Giovanni Agani

Je suis certaine que la nuit elle se rend discrètement dans sa


chambre pour lui faire des choses. Et cet imbécile de Rodrigue,
vois comment il la dévore des yeux. Il se permet même de plonger
son regard dans les seins de cette sorcière.
Jamais il n’avait été aussi étonné auparavant. Mais il garda un
calme olympique. Les doutes qu’il s’efforçait de supprimer de sa
tête revenait maintenant en boucle, comme un film trop suivi. Dès
qu’il la posa devant son portail et s’éloigna un tout petit peu, il
sortit son téléphone et passa un coup de fil qu’il aurait dû passer
depuis bien plus longtemps.

- Adrien, ça va ? ... Oui je vais bien. J’ai besoin de tes


services ... Tu vas mener une petite enquête pour moi, mais je
veux du rapide et du propre. Je mettrai les moyens qu’il faut ...
Vanessa Kouton et Rodrigue Agani. Je t’envoie les adresses par
messagerie ... Ce que je veux savoir ? Tout. Tout sur leur relation.
Absolument tout.

Piste-les, découvre des indices, je veux des photos, des


documents, fouille tout sur ce qui les lierait ... Je te fais un premier
virement sur ton compte bancaire.
Le reste après les résultats. Merci. Résultats rapides s’il te plaît.

Avant que son interlocuteur puisse répondre, il raccrocha. Au plus


profond de lui, il espérait sincèrement ne rien découvrir. Il ne
voulait pas avoir à garder un secret trop lourd sur la conscience.
Si jamais son père entretenait une relation avec sa belle-sœur
Vanessa, comment était-il censé gérer cela ? Le dire à son frère ?
Menacer son père et son idiote d’amante ?
Aldores Fidèle 33
Amour et passion : Giovanni Agani

Il décida de ne pas y penser jusqu’à ce qu’André lui rapporte des


résultats. Et ça prendrait environ un mois en fonction de la taille
de ce qu’il découvrirait. Il passa son temps à travailler pour ne pas
y penser. Il évita Vanessa toute la semaine pour ne pas avoir à y
repenser. Et un soir, vingt et un jours après son coup de fil, Patrick
découvrit toute une flopée de révélations dont il aurait bien voulu
se passer.
Il rentra chez lui, fit des copies du document et enferma
soigneusement la version originale dans son coffre-fort. Il ouvrit
une bouteille de Whisky et se mit à boire. Puis, il appela Vanessa.
Il était 21 heures.

- Ma belle-sœur adorée ! Tu vas bien ?

- Oui, Patou. Je vais bien. Enfin tu te souviens de moi. Tu m’as


bien négligée dernièrement.

- Excuse-moi, j’ai été submergé par le travail. Tu sais quoi ? Passe


me voir. On va boire un verre ensemble.

- Euh ... Tu es sûr que c’est une bonne idée ?


Quelle traînée ! pensa Patrick. Elle osait faire la pudique sur le
coup ? Il n’avait même pas fait d’allusion ! Elle joue la sainte
alors qu’elle couche avec le père et le fils ! Il fit un effort
surhumain pour garder son sang-froid avant de continuer la
discussion.
- Allez. Tu crains quoi ? Je suis trop respectueux. Allez. De toutes
façons demain, c’est vendredi.

Aldores Fidèle 34
Amour et passion : Giovanni Agani

Après quelques secondes, Vanessa accepta sa proposition, à


condition qu’elle soit rentrée à 22 heures trente au maximum. Il
accepta. Une vingtaine de minutes plus tard, la porte de son salon
s’ouvrait. Elle était arrivée.
Patrick, son verre de whisky en main, avait une expression faciale
dure qui trahissait sa colère. Il réussit tout de même à décocher
des mots gentils.

- Tu es magnifique, belle-sœur. Vas-y, installe toi.


Vanessa se douta de quelque chose. Elle regarda la bouteille de
whisky. La moitié du liquide avait déjà été ingurgitée par son
propriétaire.

- C’est parce que tu es saoul que tu m’as appelée ? Je ne suis pas


une de tes pétasses, Patrick.

C’était le mot de trop, la goutte d’eau qui faisait déborder le vase.


Un rictus de haine profonde se dessina sur le visage de Patrick, le
rendant presque méconnaissable.

- Assieds-toi, connasse.
Vanessa semblait offusquée. Elle posa une main sur sa poitrine et
l’autre sur sa bouche. Avant qu’elle ne puisse dire un mot, il
continua :

- Tu vas t’asseoir ou j’appelle Rodrigue Agani pour qu’il te le dise


?

Aldores Fidèle 35
Amour et passion : Giovanni Agani

Vanessa crut que son âme sortirait de son corps. Pourquoi Patrick
appelait-il son père par son prénom ? Elle se posait encore des
questions lorsqu’il se répéta.

- J’ai dit de t’asseoir. Prends ce document. Il est à toi. Lis-le. Lis


le contenu de ce foutu document, petite fille ingrate des bas
quartiers. Prostituée de luxe. Tu as aimé hein ? Prendre le père
et le fils. Tu ne voudrais pas m’ajouter ? Comme ça tout le
monde saura à quel point tu es attachée à la famille Agani.
Idiote.

Lentement, Vanessa ramassa le document sur la table et l’ouvrit.


Ses jambes la lâchèrent et elle se retrouva affalée sur le sol,
incapable de prononcer un mot.

- Patrick ... Je vais t’expliquer.

Il ouvrit des yeux ronds et éclata de rire.

- M’expliquer ? Tu veux m’expliquer quoi ? Tout est clair, noir


sur blanc ! Tu as quoi à m’expliquer ? Vas-y tout de même. Je
meurs d’envie de savoir ce que tu as à me dire.
Vanessa fondit en larmes. Elle tomba sur ses genoux, à la grande
surprise de Patrick. Cela ne le déconcerta pas pour autant.

- Eh, la péripatéticienne, lève toi, s’il te plaît. Ne souille pas la


moquette de mon appartement avec les ondes négatives qui
proviennent de cette chose que tu as entre les jambes. Tu es
démoniaque, Vanessa.

Aldores Fidèle 36
Amour et passion : Giovanni Agani

- Patrick, murmura t-elle dans des sanglots étouffés, Patrick je


t’en conjure n’en parle nulle part. Je t’en supplie.

- En plus ! De mieux en mieux. Tu me demandes de me taire ? De


garder cette affaire gravissime pour moi et de la fermer ? Tu
veux peut-être que je continue à t’emmener voir mon frère tous
les jours en sachant ça ? Que je t’autorise à déposer ton corps
spirituellement souillé dans mon véhicule et que je te regarde
faire des bisous langoureux à Giovanni avec la bouche avec
laquelle tu fais des saloperies à ton beau-père tranquillement ?

Patrick éclata de rire bruyamment. Il n’y avait pas que lui qui
parlait sur le moment. Jack Daniel l’y aidait un peu.

- Tu es sacrément ingrate. Mon détective a fait un boulot


impressionnant. Je t’ai appelée pour que tu viennes voir ce que
tu essayais de cacher. C’est comme ça, Vanessa. Rien ne reste
éternellement caché.

Vanessa continuait de pleurer. Comment diable avait-il réussi à


trouver des dossiers aussi confidentiels, ce détective privé ?
Comment s’était t-elle retrouvée dans cette situation inconfortable
? Comment pourrait-elle s’en sortir ?

- Vanessa, sors de chez moi maintenant. Rentre, va réfléchir sur


ton sort. J’attendrai que mon frère sorte de cette foutue clinique
pour dévoiler le pot aux roses. Et je tiens à bien t’avertir de deux
choses. Premièrement, si tu tentes de le dire à mon père, ton
amant, je balance tout dans la minute qui suivra. Je te le jure.
Deuxièmement, si tu essayes par un quelconque moyen de t’en
prendre à moi, sache qu’une copie des documents est déposée
Aldores Fidèle 37
Amour et passion : Giovanni Agani

chez un de mes amis. S’il n’a pas de mes nouvelles pendant 72


heures de suite, il se chargera d’envoyer ce document à mon
frère, à ma mère et à la presse locale. Ta belle histoire fera le
titre des grands journaux de la ville. Réfléchis avant de tenter
quoi que ce soit. Maintenant, débarrasse le plancher.
Vanessa était désorientée. Elle savait que l’idée de le supprimer
pour maintenir son couple l’aurait traversée tôt ou tard. Mais il
avait tout prévu. Ce n’était plus qu’une question de temps avant
que toute l’affaire ne s’ébruite. Elle se leva, ramassa son sac à
main qu’elle avait laissé tomber et sortit de chez Patrick, les yeux
enflés. Sur le trajet du retour, elle se maudissait d’avoir cédé la
première fois et toutes les autres fois. Elle se maudissait d’avoir
accepté de revoir cet homme encore et encore. Ses souvenirs
remontaient à la surface à vitesse grand V et défilaient dans sa
mémoire aussi vite que ses larmes sur sa joue.

La première fois que le père de son mari lui fit des avances, ils
sortaient déjà ensemble. Elle était seulement en deuxième année
à université et elle accompagnait Giovanni pour la première fois
chez lui. Tout de suite, elle fut subjuguée par tout le luxe de la
villa des Agani. Et lorsqu’elle vit le père de son petit ami ce jourlà,
elle sentit qu’il la regardait beaucoup plus qu’il ne le devrait. Ses
avances ont commencé à peine deux semaines après, parce qu’il
avait son numéro. Il s’est d’abord mis à lui écrire une fois en
passant, et puis c’est devenu très régulier. Il avait de la
conversation et était très mature. Vanessa, curieuse et passionnée
de provocation, jouait habilement à flirter avec ce monsieur. Mais
dans sa tête à l’époque, il était clair qu’elle ne voulait pas d’une
quelconque relation. Elle s’amusait. Et comme un papillon de
Aldores Fidèle 38
Amour et passion : Giovanni Agani

nuit, elle a fini par se laisser attirer par le feu qu’était le charme
magnétique et la fortune insolente de Rodrigue Agani. Son petit
ami lui donnait de l’argent, mais c’était une occasion inespérée de
se servir à la source. C’était un sugar daddy comme il n’y en avait
que très peu. Séduisant, bien entretenu, généreux et discret.
Et puis un jour, ils décidèrent de se voir et de passer une bonne
soirée ensemble. Un petit trip incognito sur Grand-Popo, le petit
paradis et la ville aux mille et un vices. Elle savait parfaitement
dans quoi elle s’engageait. Mais la première fois qui était censée
être la seule entraîna la deuxième, puis la troisième, puis les
dizaines d’autres fois. Vanessa s’est alors retrouvée enfermée
dans une boucle de laquelle elle n’arrivait plus à sortir, se
demandant à chaque fois pourquoi elle faisait ça et répétant la
même bêtise encore et encore.
[...]

- Tu n’es qu’un sombre idiot, cracha Vanessa à Patrick. Ses yeux


étaient le miroir de toute la haine qui bouillonnait en elle. Elle
mourait d’envie de se saisir de son couteau de table et de le lui
planter dans le cou, pour qu’il se vide de son sang comme le
cochon qu’il était.

Madame Agani, la mère des garçons, devenait de plus en plus


livide. Son cœur semblait perdre pied. Elle avait le regard hagard,
les mains tremblotantes et une expression figée sur son visage.
Rodrigue tendit la main pour la toucher.

- Amandine, je ...

Aldores Fidèle 39
Amour et passion : Giovanni Agani

Prestement, la femme se saisit de la fourchette juste devant elle et


balaya l’air avec, juste devant Rodrigue. Seul son réflexe sauva
ses doigts d’une blessure certaine.

- Ne me touche pas, Rodrigue Agani. N’as-tu pas honte ?


Comment as-tu pu ? Coucher avec la femme de ton fils ! Ton
propre fils ! Me tromper n’aurait pas été un problème en soi.
Mais avec les centaines de femmes qui courent les rues de
Cotonou à la recherche d’hommes comme toi, c’est avec la
femme de mon garçon, de notre garçon, que tu me trompes ?

- Euh ... Maman, dit Patrick, en se raclant la gorge. Je vais te


donner encore plus de raisons de le détester. Ce n’est pas
méchant, j’essaye juste de rétablir la vérité. Mais je ne sais pas
si tu pourras supporter tout ce que j’ai à dire.

Aldores Fidèle 40
Amour et passion : Giovanni Agani

-
De toutes façons, on ne peut pas faire plus grave, répondit
madame Amandine Agani.

- C’est là que tu te trompes. C’est pourquoi je veux être sûr que


tu es prête, rétorqua Patrick.

- Tant qu’on y est, plus rien ne pourrait m’étonner. Allons-y.


Patrick se tourna vers son frère. Ce dernier tapotait doucement la
table avec ses doigts. Il avait les yeux fermés, à écouter,
simplement. Patrick imaginait bien l’état dans lequel il était. Mais
il se devait de finir ce qu’il avait commencé. Il se devait de parler
jusqu’au bout.

- Giovanni, je suis désolé de devoir te dire ce que je vais dire là


tout de suite. Je suis vraiment désolé de devoir t’apprendre cela
comme ça, mais c’est mon rôle de frère. Je ne peux pas garder
ça pour moi, ça me tuerait à petit feu.

Il ne répondit pas, les yeux toujours fermés.

- Papa, dis-lui. Tu sais de quoi je veux parler. Dis-lui. Vanessa,


parle. Merde, vous m’énervez. Dites-lui.
Il prit son verre, le remplit, l’avala, le remplit une deuxième fois,
l’avala encore, puis finit sa phrase.

- Dites-lui qu’il n’est pas le père de Christelle, putain de merde.

Aldores Fidèle 41
Amour et passion : Giovanni Agani

-
Patrick se leva, remplit pour la troisième fois son verre
successivement, le but encore, tapa du poing sur la table et se
rassit.

Eh oui, ma petite maman. L’aventure de ton odieux mari avec ta


dégueulasse de belle-fille a commencé il y a très longtemps.
Pour tout te dire, il a commencé à lui tourner autour depuis
qu’elle est officiellement entrée dans la famille. Officiellement
parce que moi, je la connaissais depuis bien plus longtemps,
lorsqu’on était encore tous jeunes et que mon frère s’était épris
d’elle. Lorsqu’il vous l’a présentée en deuxième année
d’université, tout a commencé. Mais personne ne pouvait s’en
douter ! Leur jeu d’acteur était fantastique ! Et puis il y a eu un
premier rendez-vous, puis un deuxième, et ça ne s’est plus
arrêté. Il a assisté au mariage de son fils en tant qu’invité
d’honneur alors qu’il se faisait des galipettes avec elle. Et jamais
elle n’a arrêté. Des examens médicaux ont été réalisés avec soin
par un de mes amis docteur sur la demande de mon détective.
J’ai payé pour cela. J’ai payé très cher. Mais l’analyse ADN a
été claire. Christelle, ta première fille, est en réalité notre petite
sœur.

- Non, non ce n’est pas possible. Rodrigue, tu m’as fait ça ? Tu as


fait ça à ton enfant ? Notre premier enfant ?

Madame Agani suffoquait presque. Elle pleurait à s’en vider le


corps. Aucun des deux amants ne put contredire Patrick. Ils
avaient les yeux baissées, honteux jusqu’à la moelle épinière.

Aldores Fidèle 42
Amour et passion : Giovanni Agani

-
- Comment tu sais tout ça ? lui demanda Giovanni, toujours
immobile, les yeux toujours fermés.

C’est la partie du film où tu remets ma sincérité en question à


cause de ton amour aveugle ? Très bien, frérot. Je vais te le dire,
moi. Un jour, j’ai déposé ta femme chez vous alors que tu étais
encore hospitalisé. J’avais mis mes clés dans son sac pour ne
pas les perdre. Elles auraient pu rester dans la voiture, c’est vrai.
Mais ce jour-là, elles étaient dans son sac. Jusque-là, rien de bien
grave. Je l’ai déposée et j’ai oublié de récupérer mes clés. Je suis
revenu environ quinze minutes après, et papa était déjà assis
chez toi, une bouteille de jus d’orange presque vide. En si peu
de temps, c’était possible mais le connaissant, ça aurait été
compliqué. Mais passons, je me suis dit que c’était une bouteille
entamée avant qu’il ne vienne. Ensuite, il y a ta femme qui sort
de la chambre, toute fraîche. J’avoue que ça m’avait un peu
étonné, de voir que son beau-père était dans son salon et qu’elle
soit allée prendre une douche. Mais passons, la société se
modernise je suppose. Passons.

Vanessa, tu t’es livrée toi-même. C’est dommage. Ou pas, en fin


de compte. Tu as vendu ton secret, parce que tu parlais trop. Tu
parlais sans te contrôler, tu déblatérais plein de conneries à propos
de l’infirmière qui prenait soin de ton mari pendant que tu
t’envoyais en l’air avec son père. Tu as dit «Rodrigue» au lieu de
Giovanni. Et j’ai tiqué, mais je n’ai pas réagi. Pour avoir le cœur
tranquille, j’ai envoyé un détective privé sur vos pistes. Voilà tout.
Vous savez tout.

Aldores Fidèle 43
Amour et passion : Giovanni Agani

-
Autour de la petite table, une aura de dégoût profond s’était
installée. Patrick, longtemps chargé de ce lourd fardeau, venait de
le jeter à la face de toutes les personnes présentes. Sa mère

Aldores Fidèle 44
Amour et passion : Giovanni Agani

pleurait, le regard fixé sur Vanessa. Elle aussi coulait un flot de


larmes, le visage caché entre ses mains. Son amant lui, avait une
expression dure sur le visage. Il se donnait une certaine
contenance, essayait de rester fier malgré le déshonneur qui venait
de s’abattre sur lui.
Giovanni était étrangement calme. Il avait gardé la même position
depuis le début de toute la séance de révélations. Il était passé par
toutes les émotions possibles. De l’étonnement, il est passé à
l’inquiétude. De l’inquiétude, il est passé à la terreur, et ensuite
au désespoir. Et petit à petit, tout son désespoir se muait en une
haine profonde. Ce sentiment noir prenait petit à petit place dans
son cœur, s’enracinant jusque dans ses entrailles. Il rassembla tout
le peu de bon sens qui lui restait sur le moment et demanda dans
une voix cassée à sa femme :

- Pourquoi, Vanessa ?
Blanche comme un cadavre, la femme de Giovanni se tourna
lentement vers lui. Elle se leva, repoussa sa chaise et se mit à
genoux. Elle saisit son pied et se mit à le supplier.

- Je t’en prie pardonne-moi mon amour. Je t’en supplie, dit-elle


entre deux sanglots. Je ne sais pas pourquoi j’ai fait ça, Gio.
C’est le diable, Gio. Je t’en conjure, pardonne-moi.
À la grande surprise de tout le monde, Giovanni éclata de rire. Il
riait à gorge déployée à en pleurer même. Sa mère le regardait,

Aldores Fidèle 45
Amour et passion : Giovanni Agani

inquiète. Patrick, lui, souriait encore, un énième verre de vin en


main.

- Te pardonner ? Répète voir. Te pardonner ? Non. Je ne vais pas


te pardonner. Au contraire, Vanessa.

Tout se passe ensuite très vite. Personne n’eut le temps de réagir.


En une fraction de seconde, Giovanni se saisit du couteau de table
posé devant lui. Il tira le bras de sa femme et lui planta le couteau
dans la poitrine, tellement violemment que l’arme traversa la
chair comme du beurre. Patrick fut le premier à réagir. Avant que
son frère ne puisse retirer le couteau et le planter encore comme
il en avait l’intention, il le tira et le maintint.

- Merde, une ambulance, hurla t-il aux gens qui étaient horrifiés
par la scène insolite qui se déroulait sous leurs yeux. Un serveur
appela alors la police pour leur signaler l’agression qui
ressemblait en tout point à un meurtre.
Vanessa gisait dans une flaque de sang qui grandissait petit à petit.
Elle ne bougeait presque plus. Traumatisée, Amandine, la mère
des garçons, criait à s’en rompre les cordes vocales.

- Laisse-moi, Patrick. J’ai commencé. Laisse-moi finir. Elle doit


mourir, dit Giovanni.

- Tu as perdu la tête ? Tu viens de poignarder quelqu’un ! Tu as


poignardé ta femme !

Aldores Fidèle 46
Amour et passion : Giovanni Agani

- Je l’ai ratée. Elle n’est pas morte. Mais j’espère qu’elle mourra.
Je suis un Agani. On ne me roule pas. Personne ne me roule.
Elle s’est jouée de moi pendant toutes ces années, et tu me
demandes de la laisser ? Et toi, dit-il en tournant sa tête vers son
père. Je sais que j’irai probablement en prison pour tentative de
meurtre. Mais je te retrouverai, papa. Handicapé ou pas, je te
retrouverai et je te ferai payer cela. Je te le jure. Patrick, tu peux
me laisser merde. Tu veux que j’aille où, mec ? Je suis
handicapé.

- Je t’ai dit tout ça pour que tu sortes de ce cercle vicieux, pas pour
que tu te mettes à planter tout le monde !

- Oh parce que maintenant tu te sens coupable ? Tu culpabilises ?


Et puis, tu sais quoi ? Tu aurais dû te taire, Patrick. Tu aurais dû
me laisser dans mon ignorance, pauvre imbécile. Fous moi la
paix avec ton histoire de cercle vicieux. Je ne t’ai rien demandé,
nom de Dieu !
Patrick lâcha la main de son frère et recula. C’était une désillusion
totale. Il essayait d’aider et maintenant on se retournait contre lui
?

- Ah c’est comme ça ? Tu te fais tromper pendant des années et tu


aurais préféré rester dans l’ignorance ? Je vais te dire c’est qui
l’imbécile. C’est toi. Tout ce temps, comment as-tu pu passer à
côté de ça ? C’est toi, l’idiot.

Aldores Fidèle 47
Amour et passion : Giovanni Agani

- Tu sais quoi ? Casse-toi. Prends ta foutue voiture et disparais


mec, répondit doucement Giovanni.

Patrick et lui se regardèrent, se dévisageaient.

- Parfait, rétorqua Patrick.

Il se saisit de la bouteille de vin entamée sur la table et tourna la


talons. Il sortit du restaurant. Les sirènes de la police et de
l’ambulance se rapprochaient. Il s’assit dans sa voiture, démarra
et s’en alla tranquillement.
Giovanni resta immobile. Lorsque les policiers vinrent, ils le
menottèrent et l’ambulance ramassa Vanessa, aux portes de la
mort. Le couteau avait manqué les organes vitaux, mais la femme
était évanouie et perdait une quantité démentielle de sang.
Les policiers emportèrent avec eux Amandine et Rodrigue Agani,
ainsi que leur fils, en état d’arrestation pour tentative de meurtre
sur sa femme Vanessa. Personne ne demanda sur le moment
d’après Patrick. Ce dernier, une fois arrivé chez lui, envoya un
message à son détective, André.
«Je quitte le pays ce soir, je vais rester un moment à l’autre bout
de la terre. Les copies originales des documents, tu les trouveras
dans mon coffre-fort, chez moi. Prends-les et envoie-les à la
police. De façon anonyme, bien évidemment. Je n’ai plus rien à
faire ici. Je crois que j’ai foutu des vies en l’air, mais c’est pour
la bonne cause». Les heures qui suivirent, son avion se posait à
Rio de Janeiro, au Brésil.

Aldores Fidèle 48
Amour et passion : Giovanni Agani

Un mois plus tard ... Le grand portail de


la prison civile s’ouvrit et le bus des détenus entra. Un gardien tira
vaille que vaille Giovanni hors du véhicule et le mit dans sa chaise
roulante. Il était méconnaissable. Ses cheveux et sa barbe étaient
drus et son regard était d’une noirceur à faire peur au diable. Après
son arrestation, il avait attendu un bon mois pour son procès.
Quinze ans pour tentative d’homicide, dont huit fermes, sans
possibilité de libération conditionnelle. Vanessa était vivante,
mais gardait des séquelles physiques et psychologiques
profondes. Il s’en voulait de ne l’avoir pas achevée. Mais dans sa
tête, il n’y avait qu’une personne. Il n’y avait qu’un nom qui lui
revenait sans cesse.

Dans sa barbe, il ne cessait de marmonner la même phrase


incessamment. Il n’arrêtait pas de répéter cette même menace.
C’était comme s’il se le rappelait, comme s’il voulait se le dire
autant de fois que possible pour ne pas oublier.

- Je te retrouverai, Rodrigue Agani. Je te retrouverai.

Fin.

Aldores Fidèle 49

Vous aimerez peut-être aussi