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Premier interlude : Deux amis.

Une coquille pleine, une absence de vie,


Une surface bien terne, par une mère vernie.
Une brise soudaine, par des ailes causée,
Quand les grands ours hibernent, la coquille est fermée.

Quand l’hiver est trop rude, la coquille durcit,


Car le froid est prélude, d’une perte de vie,
Pour cet être chétif, qui n’est encore vivant.
Le vent est encore vif, et ce froid est mordant.

L’hiver est encore là et la vie arrêtée,


Derrière un mur calcaire où elle est retranchée,
Ne sait si à l’aurore elle se mettra en branle,
Bien qu’après cet hiver, un doux printemps s’ébranle.

Et le printemps arrive, et voit naître les vies,


Que le Soleil ravive, et que la pluie nourrit.
Les plantes enfin bourgeonnent, les animaux s’éveillent,
La coquille résonne, frigorifiée la veille.

Mille et un mécanismes, se déroulent en cette cage,


Et c’est un vrai séisme causant nombreux ravages,
Là, derrière ces murs, où fructifie l’amour.
Dehors l’air est si pur, et IL veut voir le jour.

Et l’été arrivé, la coquille se brise,


Et l’été arrivé, un museau apparaît,
Et l’été arrivé avec sa douce brise,
On voit le nouveau-né enfin se libérer.

Maman, Papa sont là, et ils veillent sur IL


Qui, encore maladroit, frileux et si fébrile,
Ne peut encore rien faire sinon s’émerveiller,
A l’heure où il fait clair, IL se sent aveuglé.

IL grandit tant et bien, et IL grandit si vite,


Qu’IL veut voir bien plus loin que les bords de son nid.
IL apprend tant et bien, et IL apprend si vite,
Que le jeune galopin déjà dévore la vie.

De longs crocs apparaissent, des ailes se déploient,


Alors que plus bas paissent, ses repas de demain.
IL est là, à l’affût, mais IL est impatient,
IL salive à leur vue, ils sont appétissants.

Demain est arrivé et IL saute du nid,


Fond sur ce beau gibier, se sent au Paradis.
D’un souffle IL brûle tout, magnifique brasier,
Victimes de son courroux, ils étaient son gibier.

Et IL grandit encore, terreur des alentours,


Son Papa est très fort, sa Maman est velours.
IL est violence et mort, mais Il est avisé,
Car il apprend encore, cet être de pensée.

IL part à l’aventure, quittant Papa, Maman,


Et se fait un Royaume loin, loin vers le couchant.
Ses écailles sont dures, son esprit est velours,
Son amour est nature, ELLE est son seul amour.

IL fonde une famille, ELLE lui donne des enfants,


Tant que le Soleil brille, il a encore le temps.
Et l’hiver, doucement, arrive en son Royaume,
C’est le recommencement, à la fin de l’automne.

Tel est le simple cycle, des grands maîtres ailés,


Tel est le simple cycle, de ceux qui sont chassés.
Mais ils vivent de Magie, qu’ils soient mauvais ou bons,
Tant qu’ils auront la vie, ils seront les Dragons.

Extrait de « Contes et Légendes de la jeune Daifen », auteur inconnu.

« Deux enfants naquirent le même jour en le sein de La Grande, par la suite renommée
Althârïs dans les annales. L’un était nain, fils de Althôr, Khân sous la montagne et héritier de
sang de la lignée Anthâar, fondée par l’illustre Gondarduïn l’Illusionniste. L’autre était Drâck,
fils de Kadrâck, Seigneur des nuées et Dragon d’Airin, dans les derniers parmi les siens. Ainsi
au cours de la nuit qui précédait l’été deux êtres virent la Lune pour la première fois. Althâr,
Héritier du Royaume, et Drâckyöon, Enfant des Nuées.

L’un vivait sous la voûte du ciel, l’autre était éduqué sous la voûte du Palais impérial.
Mais tous deux se retrouvaient chaque soir au bord du Lac des Cieux, installé dans son bassin
au sommet de La Grande. Ils étaient vieux amis, malgré leur très jeune âge, et se savaient
destinés par le cours du temps à vivre l’un avec l’autre, l’un pour l’autre, et ce jusqu’à la fin
des temps. Et même s’ils se trompaient, quoiqu’il eut pu arriver, ils avaient décidé qu’il en
serait ainsi, de l’aube de leur vie jusqu’au crépuscule des plans.

Drâckyöon reçut une éducation fort singulière pour un dragon. Tant et si bien qu’il
choisit de conserver une forme humanoïde dès son plus jeune âge. Il était voué par son père et
par le Khân à devenir un Chevalier Dragon, ainsi que toute la jeune génération Drâcke de La
Grande. Mais ce fait le confortait d’autant plus que cet état de faits rendait les jeux encore
plus aisés entre lui et son ami Althâr, le Fils du Patron de Papa.

Althâr adorait son père et était très mature pour son âge. A cinq ans il avait déjà
compris que Papa, bien que très talentueux philologue et incomparable historien, était le plus
piètre régent qu’avait connu La Grande aussi loin que les archives pouvaient s’en souvenir.
Mais son père était si prévenant et si bon combattant que l’amour et le respect martial
l’emportaient sur le partisanisme patriarcal, voire politique.

Le jour de leurs six ans, Drâckyöon le Dragon immortel et Althâr le Nain mortel se
retrouvèrent sur les berges du Lac des Cieux. Là ils devisèrent gaiement et jouèrent à la guerre
comme ils se plaisaient tant à le faire. L’issue de cette bataille était connue : le Rite de la
Fraternité. Pour l’occasion, Althâr avait subtilisé une dague dans l’une des salles d’armes du
palais, et chacun coupèrent la peau du revers de leurs mains droites. Alors ils tendirent les
bras l’un vers l’autre et s’éloignèrent jusqu’à ce que les plaies soient accolées. Une phrase
rituelle, « Par mon sang et par le tien, par le don qui est le nôtre, Fraternité est apôtre de nos
vies et de nos liens » scellait le pacte qui faisait d’eux des frères.

Onze millénaires passèrent qui virent les frères de sang se côtoyer. Et ces onze
millénaires avaient vu Althâr apprendre à maîtriser le feu et la lévitation, tandis que sa vie ne
semblait vouloir connaître de fin. Et ces onze millénaires avaient aussi vu l’endurance de
Drâckyöon accrue, alors qu’il était le seul Chevalier Dragon à pouvoir maîtriser les flux de
magie.

Althâr, par un pacte, avait subi sa première évolution à l’âge de six ans. L’avait-il
prémédité ? Nul ne le sait, et nul ne le saura sans doute jamais.

Quoiqu’il en soit, Drâckyöon trouva la mort alors qu’il cherchait un artefact Drâcke.
Et c’est sombrant dans les Abymes de la mort qu’il le remit à Althâr. Et c’est ce joyau qui est
désormais serti sur le front du Khân, alors qu’en dernier hommage à son frère de sang et pour
respecter le pacte qui avait été le leur, il fusionna l’esprit du défunt au sien pour qu’à jamais
ils soient deux, comme ils l’avaient été pendant une éternité. »

Extrait de " Chroniques Althârï " par Karnednoduïn IX, scribe particulier du Khân.

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