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L'exposition Pick-Up prend comme point de départ des oeuvres d’art qui utilisent la fragmentation
de sons, d'images, de textes pour en révéler de nouvelles potentialités cognitives et sensorielles.
À l'image des déictiques, ces courtes particules linguistiques qui ne cessent de changer de sens
en fonction du contexte dans lequel elles s’inscrivent, il s'agit (à travers le prélèvement, le
bégaiement, la décontextualisation, le déplacement) de déployer l’éventail des stratégies de
recadrage applicables aux flux les plus ordinaires de la communication.
Pick-Up évoque le prélèvement, le ramassage. Ici il s’agit de puiser dans la rumeur du monde, la
bribe de conversation, l’esquisse du geste, l’image arrachée. Tout ce qui relève à première vue du
banal, du quotidien, de la petite échelle, du prosaïque, mais en travaillant au contraire ce qui est
grand, objectif, poétique, fantastique ou violent dans les interstices de la communication courante.
Il ne s’agit pas alors de sonder l'infime, à la manière de l'entomologiste, mais plutôt : ouvrir vers
l'infini à travers l’inachevé.
Pick-Up est aussi une réflexion en acte sur l'exposition. Elle prévoit ainsi que les œuvres se
partagent non pas l'espace mais le temps de l'exposition. Un programme d’une durée précise
tourne en boucle. Un jeu automatique de lumières et de programmateurs électroniques
"déclenche" automatiquement les pièces sonores, les œuvres au mur, le diaporama, les films.
Pick-Up est l’occasion de prendre au mot et de jouer avec la notion de l’exposition comme
scénario.
La forme de Pick-Up, outre qu'elle permet que chaque pièce ait l'une après l'autre la totalité de
l'espace, est aussi une illustration possible du propos de l'exposition, chaque oeuvre représentant
un élément fragmenté et parcellaire de celui-ci, à la fois affirmative, puissante et évanescente,
démonstrative et irréductible à la démonstration, venant confirmer des intuitions tout en s’y
dérobant sans cesse.
Ce faisant, Pick-Up est une affirmation : chaque oeuvre comporte en elle-même une multitude de
lectures que le mode d’exposition peut révéler de manière toujours provisoire.
Guillaume Désanges
Dans Passage à l’acte, Martin Arnold utilise comme support de travail une scène extraite du film « To Kill a
Mockingbird » (Robert Mulligan, 1962, USA), qu’il manipule dans sa matérialité. Ce procédé simple de
fragmentation et de mise en boucle provoque des répétitions compulsives d’images et de sons qui dévoilent
les pulsions frénétiques et violentes qui agitent les personnages d’une scène a priori banale.
Dominique Petitgand
Les Symptômes, 2001
pièce sonore, 2’03’’
« La voix se précipite un peu comme des dominos qui tombent : tac .. tac... tac.... comme une machine qui
débite des choses mais semble ne jamais s’épuiser. C’est violent à la manière d’un match de boxe : on
prend des coups dans la gueule, de toute part, et ça ne s’arrête pas. Cela est induit par la façon qu’elle a de
prononcer ses mots, de raconter cette histoire. C’est une suite de déclencheurs qui constituent en eux-
même la musique de la pièce. Pour le récit de quelque chose d’anodin, il y a toute une violence à l’œuvre
que le montage a pu révéler. » (DP)
Joseph Grigely
Untitled Conversation (Sex), 1996
papiers, texte encadré et tirage pigmentaire,
Courtesy Galerie Air de Paris
Joseph Grigely développe depuis les années 1990 ses Conversations With the Hearing sous la forme
d’agencements de morceaux de papiers (de différentes factures, formats et couleurs) sur lesquels sont
inscrits des mots, phrases ou dessins, qui constituent autant de bribes de conversation manuscrites. Atteint
d’une surdité définitive durant l'enfance, Grigely a adopté l'écriture immédiate comme mode principal de
communication, par commodité et efficacité. Pourtant, si les conséquences pratiques de la surdité
définissent le point de départ du travail plastique, cet handicap n'est en aucun cas le sujet de l'œuvre.
Simple modalité de recueil : les pièces de Grigely parlent d'abord de ces « entendants », écrivains fortuits
forcés de converser sur papier. Ses Conversations Pieces manuscrites recouvrent de manière troublante
les caractéristiques essentielles de la conversation orale : concision, hésitations, superpositions, ruptures,
éparpillement… et illustrent de manière éclairante la polysémie de tout bribe de conversation recueillie et
recomposée.
Joseph Grigely est né en 1956 à East Longmeadow, Massachusetts (USA). Il travaille à New York (USA) et
enseigne à l’université du Michigan.
Il est représenté en France par la Galerie Air de Paris, Paris.
Claude Lévêque
Goût à rien, 2003
tubes néon, édition de 3
Courtesy Galerie Yvon Lambert, Paris
« Dans un espace obscur interviennent des problématiques de chocs visuels et sonores. Des mots en
écriture néon ont cette connotation du mal vivre : « goût à rien », « je suis une merde », « anormal », etc. et
même « la vie est belle ». Mais le non-dit importe plus encore, j'ai mes codes parfois indéchiffrables :
l'essentiel ne se met pas à plat. J'aime beaucoup que les gens en fassent ce qu'ils veulent. Mais il y a des
sens de lecture que je ne souhaite pas. » *
Beat Streuli
NYC 01, 2002
diaporama vidéo
Bertrand Georges
Les Bâtards, 2004
édition de 800 exemplaires
Cette édition, réalisée spécialement à l’occasion de l’exposition « Pick-Up », utilise comme matériau des
échanges verbaux entre joueurs de jeux vidéos. L’ouvrage est à lire sur place (en 4 minutes) et à emporter.
A propos de « Considérant », précédent livre publié en 2001 : « Ces passages sont choisis soit pour leur
étrangeté, soit pour leur mouvement particulier imprégné d’une sorte d’effet de réel. Considérant n’a pas la
violence politique du Cut-up, il s’écrit sur le mode plus doux du Pick-up. »
Omer Fast
CNN Concatenated, 2002
vidéo présentée sur moniteur, édition 5, 18’
Courtesy Galerie gb agency, Paris.
CNN Concatenated, est un montage constitués à partir des commentaires des présentateurs et reporters
des journaux d’informations de la chaîne de télévision américaine CNN. Ces allocutions sont fragmentées
mots par mots et remontées dans l’optique de former une toute autre énonciation qui prend la forme d’une
déclamation collective entre considérations métaphysique, politique, poésie et non-sens, qui malgré la
manipulation conserve l’autorité du journal télévisé et son endoctrinement
Collées sur des bouts de carton, des photos extraites de magazines sont sélectionnées pour leur
connotation immédiate (images de guerre, témoignage historique, politique, iconographie de produits
stigmatisant l’industrie capitaliste). Prélevées et stoppées dans le flux incessant des médias, elles sont
volontairement associées pour leur antinomie. A cette volonté de comparer l’incomparable s’ajoute des
annotations au stylo de commentaires qui stigmatisent cette dualité iconographique.
Pick-Up
Une proposition de Guillaume Désanges
Avec la collaboration de : Pauline Gauthron, Gilles Lambert, Emilie Renard / Public>
Merci à :
Didier Warin, Yann Géraud, Gregory Gicquel, Frédéric Cherboeuf, François Piron,
Boris Achour, Damien Arrii, Rebecca Lee, Galerie gb agency, Jean Brolly,
Galerie Yvon Lambert, Galerie Martin Janda, Galerie Air de Paris, Les Laboratoires
d’Aubervilliers.