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‘C
hief executive officer'. Ce terme anglo-saxon mener à bien une stratégie et assurer le développement
s'est banalisé ces dernières années. Il dési- de l'entreprise.
gne le directeur général, le directeur exécu- Quel est le profil type du CEO en 2010 ? Quelle est sa
tif, l'administrateur délégué, bref … le patron ou le durée de vie ? Qu'est-ce qui a changé dans son métier ?
numéro 1. Si ce terme s'est imposé, c'est aussi parce Qu'est-ce qui le motive à travailler en moyenne 65 heures
qu'il permet de faire une différence avec l'appellation par semaine ?
quelque peu désuète de PDG – président-directeur
général –, marquant ainsi le fait que le CEO n'est pas, ou Nous avons posé la question à des observateurs privilé-
du moins généralement pas, président du conseil d'ad- giés, à savoir des spécialistes de l''executive search', ces
ministration. Selon la plupart des observateurs, cette chasseurs de têtes mandatés par les conseils d'adminis-
séparation des pouvoirs, de plus en plus fréquente en tration pour trouver la perle rare. Et nous avons interro-
Europe, est d'ailleurs un gage de bonne gouvernance. gé les principaux intéressés, les CEO eux-mêmes. Cinq
d'entre eux, de secteurs et de profils très complémen-
Nous nous intéressons dans ce dossier aux CEO qui taires, jettent des regards souvent fort contrastés sur
n'ont a priori aucun lien historique ou familial avec l'en- une profession multifacette. Enfin, nous dressons un
treprise, qui n'en sont ni fondateurs ni propriétaires. Ils portrait-robot du 'top manager' et nous intéressons au
ont été choisis par un conseil d'administration pour nerf de la guerre, la rémunération.
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A nouvelle crise,
nouvelles qualités
requises
T
out comme les cinq CEO dont vous structurels, d'autres sont plus directement environnement, au sens strict, dans la di-
lirez les témoignages dans ce dos- liés à la crise économique, mais aussi crise mension écologique, mais aussi au niveau
sier, aucun spécialiste du recrute- de confiance, à laquelle certaines entrepri- politique et sociétal. La durabilité n'est pas
ment de CEO n'oserait affirmer que le mé- ses font face depuis 2008. un concept creux. Mais parallèlement, ces
tier de CEO est plus 'difficile' qu'au siècle gens doivent aussi être doués de 'leader-
dernier. Ils parlent plutôt d'un niveau d'exi- CEO à l'écoute ship' et pouvoir motiver les troupes. Trou-
gences globalement supérieur, de semai- "La crise a entraîné un retournement dans ver l'oiseau rare est plus difficile", explique
nes de 65 heures et d'une marge d'erreur l'opinion publique : les CEO sont beau- Jean Van den Eynde, du cabinet Russell
plus étroite, compensés, ils le reconnais- coup moins admirés qu'ils n'ont pu par Reynolds.
sent aussi, par un niveau de rémunération, exemple l'être en plein boom de l'internet.
surtout variable et surtout dans les grandes Les excès en termes de manque d'humili- Boudewijn Arts et Joost Maes, du bureau
entreprises, qui a bien enflé ces dernières té ou les excès de confiance de certains Egon Zehnder, épinglent également les
années, le 'marché' des CEO s'étant inter- CEO font non seulement que l'ensemble aptitudes du 'nouveau CEO' à gérer une
nationalisé et étant perméable aux normes des directeurs généraux vont devoir gérer réglementation grandissante et se montrer
anglo-saxonnes. une vague de réglementations, mais qu'en socialement responsable dès lors qu'il est
plus, le profil recherché par la plupart des davantage exposé publiquement que ja-
Les experts en 'executive search' pointent conseils d'administration est différent d'il y dis. Ils y ajoutent la dimension 'people ma-
toutefois un certain nombre de différences, à trois ans : le CEO flamboyant est moins nager' : "Le CEO doit, plus qu'auparavant,
ou changements d'accent, dans le profil demandé. Les 'boards' recherchent plutôt pouvoir s'intéresser à la dimension humai-
type du CEO. Certains changements sont des gens résistants et à l'écoute de leur ne de son entreprise. Il doit pouvoir con-
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“ansTrois
bien avec les contraintes. Ce tourer de gens souvent hyper com-
ans, c'est trop court. Sept qui m'inquiète plus, c'est que pétents dans leurs matières. C'est
plutôt positif, mais le patron peut
est un bel objectif et après dix de moins en moins de nos
moins se permettre d'être inco-
jeunes cadres prometteurs
ans, tout CEO doit se demander s'il ont l'occasion d'aller engran- hérent.
est toujours à sa place” Jean Van den Eynde ger de l'expérience à l'étran-
- Même si la hiérarchie est générale-
ger. Les entreprises sont plus
ment moins pesante que par le
regardantes et nous avons passé au niveau des organes de
la pérennité de l'entreprise. Or, personne aussi de moins en moins de centres de direction, la distance entre celui
ne peut faire des miracles, même pas les décision en Belgique, susceptibles de for- qui décide et celui qui doit exécu-
meilleurs CEO … Peut-être qu'avec la cri- mer ces futurs CEO", exprime Jean Van ter a tendance à s'élargir. "La diffi-
se les mentalités vont lentement évoluer. den Eynde. "Les formations universitaires culté est dès lors de savoir mobili-
Après tout, les conseils d'administration sont heureusement de plus en plus inter- ser jusqu'aux échelons les plus bas
ont les CEO qu'ils méritent." Heureuse- nationales, mais les jeunes risquent ensui- de l'entreprise", pointe Marc
Daelemans. Bref, le risque pour le
ment, selon Marc Daelemans, que la majo- te d'être freinés dans leur élan."
CEO de s'enfermer dans une tour
rité des entreprises belges, plutôt familia-
d'ivoire est bien présent.
les et avec un actionnaire de référence, Boudewijn Arts et Joost Maes pensent
sont plus mesurées dans leurs exigences. que le CEO a toujours été une fonction cri- - L'internationalisation n'est plus un
tique, mais l'évolution démographique fait luxe, mais une absolue nécessité, y
Durée de vie idéale effectivement qu'il ne sera pas toujours compris vers des pays (en Asie par-
Marc Daelemans estime certainement qu'il simple de remplacer la vague de CEO ticulièrement) qui exigent une plus
faudrait plus d'alternance au sommet des 'baby boomers'. Ils pointent également le grande ouverture culturelle du
entreprises. Trop de CEO restent trop fait que la fonction de CEO est de plus en CEO.
longtemps en place. Mais il n'y a pas de plus concurrencée par d'autres métiers
- Les patrons sont globalement
règle universelle : "Certaines entreprises très valorisants, dans le secteur des inves-
mieux payés, mais travaillent aussi
sur des marchés relativement prévisibles, tissements (private equity) ou dans les davantage d'heures. Le rythme est
dans l'industrie notamment, s'en sortent grands bureaux de consultance. plus élevé, la semaine de 65 heures
très bien avec des CEO d'une grande lon- est la norme, "ce qui n'était pas le
gévité. D'autres entreprises, sur des mar- Olivier Fabes cas il y a 20 ans", observe Jean Van
chés en transformation, ont besoin régu- den Eynde.
lièrement de sang neuf à leur tête". Jean
Van den Eynde est un peu plus catégo- (*) Selon une étude de Booz Allen, le turnover - Le CEO est plus exposé dans les
médias et généralement plus écou-
rique : "Trois ans, c'est trop court. Sept ans des CEO américains a augmenté de 59% par an
té en dehors des murs de son
est un bel objectif et après dix ans, tout entre 1995 et 2006. Il y a 15 ans, seul 1 CEO
entreprise.
CEO doit se demander s'il est toujours à sur 8 était prié de prendre la porte. En 2006,
sa place". Les experts d'Egon Zehnder ont c'était 1 sur 3…
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“J’
ai moi aussi ressenti les ef- l’on a besoin de toute la motivation de l’équipe pour être créa-
fets de la crise ces deux der- tif et entreprenant. C’est parfois un exercice très difficile.”
nières années. L’environne-
ment a totalement changé, le nombre L’équilibre entre le court et le long terme a, selon Sabine Sagaert,
de facteurs imprévisibles a considéra- lui aussi subi de profondes modifications. “À l’heure actuelle, il
blement augmenté. Il y a aujourd’hui ne faut pas seulement penser sur le long terme, les résultats à
tant d’interrogations auxquelles un court terme doivent également être là. Il faut semer pour pou-
CEO ne peut répondre en s’appuyant voir récolter. Or, semer coûte cher. Autrefois, on accordait beau-
sur les recettes du passé. Cela im- coup plus d’attention au long terme. La bourse joue peut-être
plique de se réinventer un peu et de en cela un rôle important. Un petit écart dans les résultats inter-
prendre des décisions audacieuses et médiaires peut avoir un impact énorme sur le cours boursier.
intuitives plutôt que de se fonder sur une analyse approfondie. Tout est bien plus sensible qu’avant.” En conséquence, un CEO
On pourrait dire qu’un CEO doit être davantage entrepreneur est beaucoup plus rapidement jugé sur ses résultats qu’avant.
qu’auparavant. La crise a également exercé une pression sur le
chiffre d’affaires et sur les marges, ce qui oblige automatique- L’irrésistible propension à la bonne gouvernance est-elle une
ment à bien maîtriser les coûts. Dans bien des cas, cela donne bonne chose ? “En principe oui, car la bonne gouvernance est
lieu à des économies et à des restructurations, à un moment où un must. Par contre, est-ce que tout doit être réglementé ? J’es-
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Différent ? Certainement”
trés pour se plaindre que leur job est devenu plus dur qu'il y a 15 ou 20 ans. Mais tous pointent des évo-
lutions notables, positives comme négatives, qui font que les exigences ont changé. Le CEO se doit d'êt-
re à l'aise sur un nombre croissant de terrains. Rassurer tout en osant prendre des risques. Cinq patrons de
différents horizons se livrent à un exercice d'introspection.
L
a crise financière, puis économique va sans doute laisser
des traces, durables ou pas, sur le métier de CEO, a for-
tiori dans le secteur financier lui-même, accusé aujour-
d’hui de tous les maux. Ce n'est pas à cause de la crise que
Pierre Francotte a décidé de quitter Euroclear (sa décision
bourse (Arseus est entrée Sabine Sagaert a pris 3 mois était prise bien avant 2008), mais il admet que l'image du pa-
en bourse en 2007 en tant pour faire son choix. “Je tron d'organisme financier est mise à rude épreuve : “Il est nor-
que filiale d’Omega Phar- pouvais entrer en fonction mal que l'opinion publique soit choquée par les parachutes
ma) et je siège au comité sans délai, mais j’ai choisi
dorés qu'ont pu recevoir certains grands patrons de banques
directeur, ce qui est tout de d’examiner avec soin toutes
qui ont échoué. L'inflation ces dernières années de la rémuné-
même important pour moi, les options. Et j’ai profité de
parce que je peux prendre cette période pour faire des ration variable par 'stock options' est également choquante.
en charge la totalité de la choses que je n’avais jamais Mais il faut toutefois faire attention à ce que certains patrons,
politique. Cela me donne eu le temps de faire. Com- lassés par une médiatisation à outrance de certains excès, ne
énormément de motivation me suivre un cours de cata- se disent : 'mais finalement pourquoi est-ce que je ne suis pas
et d’énergie.” maran par exemple.” le numéro 2 ou 3 de l'entreprise ?'. C'est pourquoi il est tout
de même sain de bien rémunérer les patrons qui réussissent”.
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“chent
tées quelques années de trop à la tête d'une entreprise.
Les conseils d'administration recher- Je ne voulais pas rater l'opportunité de partir au bon
moment", explique ce diplômé en droit de l'ULB et de
désormais un CEO qui inspire Cambridge, qui a débuté chez Euroclear en 1993, après
la confiance plutôt que quelqu'un qui soit avoir été conseiller général adjoint auprès du FMI. Selon
lui, la durée de vie d'un CEO dans une société comme
uniquement brillant, voire flamboyant” Euroclear ne doit pas excéder dix ans, au risque de
devenir synonyme d'ossification pour l'entreprise. Son
pointe deux changements plus structurels dans le profil type du départ était planifié de longue date. En fait, Pierre
CEO. Premièrement, vu l'internationalisation du paysage con- Francotte serait déjà bien parti il y a deux ans, à l'occa-
currentiel, les directeurs généraux devront avoir l'ouverture né- sion de ses 50 ans, mais la crise financière l'a poussé à
cessaire pour comprendre des mécanismes cultu- prolonger le bail de deux ans. Selon lui, le CEO doit par-
rels de plus en plus complexes, notamment tir avant de devenir un frein au développement de nou-
velles idées. "Au fil des années et de l'expérience, le
dans les pays émergents. Deuxièmement, ils
directeur général est renforcé dans certaines convic-
devront pouvoir répondre aux nouvelles
tions. On ne peut pas attendre de lui qu'il soit capable
attentes des collaborateurs et en particulier
de se réinventer indéfiniment."
ceux de la génération Y (grosso modo les 15
- 30 ans), “plus curieux mais aussi plus exi- Pierre Francotte admet qu'il n'aurait pas pu "tenir" dix
geants en matière d'équilibre vie privée-vie ans dans un environnement trop stable. Chez Euroclear,
professionnelle et en termes d’évo- il a dû gérer des défis comme le lancement de l'euro,
lution de carrière, mais pas tou- l'introduction du passeport financier et une série de
jours prêts à faire les mêmes fusions-acquisitions.
efforts que leurs aînés”. Selon
lui, le CEO ne peut plus être Il quitte l'entreprise de son propre gré et "sans compen-
une personne à une seule sation financière", se plaît-il à souligner. "Je vois tou-
facette, mais un 'chef d'or- jours mon avenir dans l'industrie financière au sens
chestre' qui communique large, mais plutôt dans le conseil et la réflexion straté-
beaucoup, autant vers l'in- gique." Pierre Francotte compte également consacrer
térieur que l'extérieur, en davantage de temps au secteur caritatif (il est déjà prési-
s'appuyant sur un argu- dent de United Fund for Belgium) et à l'enseignement. Il
se réjouit de donner prochainement un cours sur la régu-
mentaire convaincant.
lation financière et la bonne gouvernance à la Solvay
Olivier Fabes Business School.
Evolutions négatives
- Certains CEO ou candidats CEO vont jeter l'éponge face à la crise actuelle
- Le poids démesuré pris par les compensations financières variables, même pour des patrons qui ont échoué
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e métier de CEO est-il plus dur en 2010 qu'en 1980 nières années. "Le CEO d'une
ou 1990 ? Il est difficile de répondre, car chaque si- entreprise cotée en bourse
tuation est spécifique et il faut bien distinguer les doit vraiment veiller à ne pas
défis conjoncturels immenses du moment et les évolutions plus être aspiré par cette tenta-
structurelles. Ce qui est certain néanmoins, c'est que 'faire des tion du court terme. Celle-ci
affaires' est devenu plus difficile, car tout va plus vite et est dé-
sormais à l'échelle internationale. Je constate aussi que les rela-
tions sont devenues plus strictement formelles, purement 'busi-
ness', alors qu'il y avait davantage de place pour l'humain Le CEO n’est plus ce qu’il était
lorsque j'ai démarré comme patron de Ter Beke”, observe sans
nostalgie Luc De Bruyckere, qui se demande au passage si tout Evolutions positives
- Prise de conscience que les aptitudes priment sur les diplômes
cela n'est pas la conséquence logique d'un monde informatisé,
- Les PME belges résistent globalement au 'court-termisme' anglo-saxon
où l'information circule de plus en plus vite. Evolutions négatives
- Le monde des affaires a tendance à se déshumaniser
“damner
- Les patrons, peu populaires, doivent gérer une pression sociale de plus
Autant il est normal de con- en plus forte
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ohn Goossens et Johnny Thijs respirations en dehors de leur travail et qui savent séparer vie
étaient ou sont des exemples de privée et vie professionnelle", résume le CEO de Sonaca. Si la
patrons qui savent réellement conjoncture très difficile complique bien évidemment la tâche
écouter et qui, de ce fait, valorisent leurs à de nombreux CEO (et Bernard Delvaux ne voit pas d'amé-
interlocuteurs. Des patrons qui savent lioration significative pour l'emploi avant fin 2011), la crise a,
faire preuve d'une véritable empathie. selon lui, au moins cet avantage de ramener certains actionnai-
Leur deuxième force est de savoir créer res à la raison : non, "the sky is not the limit", la croissance à
une équipe autour d'eux et de la moti- deux chiffres n'est pas infinie et oui, le CEO peut échouer.
ver. Ils apprécient les gens qui prennent
des risques. Je ne crois pas aux CEO qui Dès lors qu'il s'agit de transformer l'entreprise, parfois doulou-
font tout tout seuls. Enfin, ce sont des per- reusement, pour l'adapter à un nouvel environnement, le CEO
sonnalités fortes mais qui savent prendre du doit plus que jamais être un excellent communicateur. "Les tra-
recul par rapport à leur métier, qui ont des vailleurs ont besoin d'une perspective et cette perspective
n'est pas uniquement le cours de bourse. Le CEO doit proje-
ter un avenir et communiquer ouvertement aux travailleurs à
propos de l'avenir de l'emploi, de l'évolution des compéten-
Le CEO n’est plus ce qu’il était ces, etc. Cette communication et les actions qui l'accompa-
Evolutions positives gnent doivent être cohérentes pour que le lien émotionnel
- La crise nous rappelle qu'un CEO peut échouer avec l'entreprise ne soit pas brisé par le processus de transfor-
- Le reporting informatique aide le CEO à prendre des décisions clés très vite mation", explique Bernard Delvaux.
Evolutions négatives
- Difficulté grandissante chez certains à séparer vie privée et vie professionnelle Contacts informels avec les syndicats
- Tendance dans le monde syndical à ne plus se préoccuper que du court terme
Ces dix dernières années, il a mené de larges restructurations
et plans sociaux, autant chez Belgacom et à La Poste que, en
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automne dernier, chez Sonaca. Il en tire trois leçons sur l'attitude personnelles avec les leaders syndicaux. Je suis un grand partisan
du CEO comme acteur de la concertation sociale. "Première- des contacts informels. Même si cela n'empêche pas qu'à un
ment, le CEO doit avoir une histoire à raconter, du contenu et pas moment donné, un patron doit savoir dire non. Le cadre doit être
de vagues formules. Il doit la communiquer le plus possible par très clair et il faut s'y tenir. Troisièmement, il faut pouvoir se met-
voie directe. A La Poste, nous avons tenu avec Johnny Thijs 2 x tre à la place de son interlocuteur."
“à raconter
Le CEO doit avoir une histoire
et doit la communiquer
Le monde syndical s'est-il radicalisé ? "Je ne dirais pas cela. Mais
je m'inquiète du fait que certains syndicalistes, comme certaines
entreprises d'ailleurs, ne se préoccupent plus que du court terme
et jugent que tout ce qui est bon à prendre doit être pris. Cette
le plus possible par voie directe” réaction s'explique par le fait qu'ils sentent qu'ils perdent,
comme les hommes et femmes politiques, la possibilité d'in-
600 meetings, en laissant la place à des 'questions-réponses' fluencer sur la vie économique à long terme. 'Pourquoi se battre
frontaux. Plus c'est animé, plus les gens apprécient. Deu- pour modérer les salaires si l'entreprise peut quand même délo-
xièmement, il faut prendre le temps d'établir de bonnes relations caliser demain', entend-on."
OF
“L
a pression exercée sur le CEO a fortement augmenté dre une série de décisions négatives : faire
ces dernières années”, estime Luc Missorten. “Sur- des économies de coûts par exemple. Il
tout depuis la crise économique. On attend du capi- est aujourd’hui difficile pour un directeur
taine qu’il guide le navire dans la tempête. Ce qui complique les général de réaliser les restructurations
choses, c’est que l’on est confronté en permanence à plusieurs nécessaires, d’une part, et de continuer
facteurs négatifs. La proportion de mauvaises nouvelles est plus à se concentrer sur le potentiel de crois-
importante que celle de bonnes nouvelles. Et cela oblige à pren- sance, d’autre part. C’est comme si
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Le CEO n’est plus ce qu’il était du CEO est variable. Plus la carrière évolue, plus l’élément salaire
diminue et plus l’élément rémunération du risque augmente. Il
Evolutions positives
n’empêche que les rémunérations exorbitantes sont inadmissibles,
- La barre est placée plus haut qu’autrefois
- L’indignation suscitée par les parachutes dorés exorbitants surtout en cas de mauvaises performances. Par ailleurs, je trouve
Evolutions négatives bon que les cadres dirigeants acquièrent une participation dans
- Les CEO sont parfois jugés injustement l’entreprise. Cela engendre une rémunération supplémentaire,
- Trop de règles autour des bonnes pratiques de gouvernance mais seulement lorsque l’entreprise engrange de bons résultats.”
Les CEO sont de plus en plus vite et de plus en plus souvent jugés
sur les résultats qu’ils réalisent. “Je ne vois là rien de mal en soi,
L
es patrons d’entreprises cotées en tion et les responsabilités plus éten-
Bourse ont comme tout le monde res- dues que doivent assumer les diri-
senti la crise économique dans leur por- geants d’entreprise. “Alors qu’il y a
tefeuille personnel. Pour 2008, il ressort d'une quinze ans, les entreprises du Bel 20
enquête réalisée par la Vlerick Leuven Gent étaient principalement actives au
Management School et GUBERNA que la ré- niveau local et régional, leur rayon
munération cash totale des CEO d’entrepri- d’action s’est nettement élargi, et
ses belges cotées en Bourse a en effet dans la plupart des entreprises opèrent
l’ensemble baissé d’un tiers par rapport à maintenant au niveau mondial. Le
2007. Mais cette baisse n'a été que temporai- rôle des cadres dirigeants est dès
re, comme il ressort d’une analyse des salaires lors plus complexe et les responsabili-
des CEO des entreprises du Bel 20, basée sur tés plus lourdes. La globalisation fait
les rapports annuels relatifs à 2009. Le packa- également en sorte que le champ de recru- tionnaire. Tandis que la rémunération varia-
ge salarial a l’année dernière de nouveau tement est devenu plus large. On recher- ble était jadis plutôt une récompense pour
grimpé de pas moins de 20% en une prestation supplémentaire, elle est de-
moyenne.
“d’entreprise
Les rémunérations des dirigeants
belges se situent
venue aujourd’hui un élément structurel du
package salarial. Et c’est là un phénomène
Moyenne du peloton universel”, affirme Marcel Rottiers.
européen aujourd’hui à peu près au milieu
“Le package salarial des cadres di- La part plus importante de la composante
rigeants a ces dix à quinze dernières du peloton européen” Marcel Rottiers salariale liée à la prestation dans le package
années clairement surpassé l’infla- salarial total explique également en partie
tion”, affirme Marcel Rottiers, managing che des cadres dirigeants non seulement pourquoi les salaires des cadres dirigeants
consultant de Towers Watson Belgique. Il y a sur le marché du travail belge, mais aussi en ont augmenté. “La rémunération variable
plusieurs explications à cela. Les salaires des dehors. Et ceci explique aussi pourquoi les est une arme à double tranchant. Si les ré-
cadres dirigeants font ces dernières années salaires des cadres dirigeants belges ont sultats d’exploitation sont décevants, le bo-
l’objet d’une plus grande transparence. De- augmenté. Les cadres dirigeants étrangers nus est lui aussi plus modeste”, signale Mar-
puis 2005, le Code belge de gouvernance ont généralement des attentes salariales cel Rottiers. "L’idée sous-jacente est que si
d’entreprise stipule que les entreprises cotées plus élevées”, précise Marcel Rottiers. les actionnaires font du bénéfice, le diri-
en Bourse doivent rendre publics les salaires geant d’entreprise peut lui aussi en profiter,
du CEO et des autres membres du manage- Rémunération liée à et inversement.”
ment exécutif. “L’accroissement de la trans- la prestation Marcel Rottiers ne s’attend pas à ce que la
parence, non seulement chez nous, mais aus- Non seulement les salaires ont augmenté, nouvelle loi en matière de bonne gouver-
si dans d’autres pays européens, a conduit à mais l’architecture du package salarial n’est nance modifie substantiellement la structure
un alignement des salaires des cadres diri- plus comparable à celle d’il y a dix ou quin- du package salarial. “Seules les modalités
geants. Autrement dit, les pays où les cadres ze ans. “Une partie substantielle du salaire changeront. La nouvelle loi impose, entre
dirigeants étaient moins bien rémunérés ont est liée à la prestation et donc variable. On autres, d’étaler le paiement des bonus an-
rattrapé leur retard. Il ressort par exemple de opère encore dans cette partie variable une nuels dans le temps. L’obligation de joindre
nos enquêtes que les rémunérations des diri- distinction entre les bonus à court et à long un rapport de rémunération au rapport an-
geants d’entreprise belges se situent aujour- terme. Les bonus à court terme, les bonus nuel ne fait qu’augmenter la transparence
d’hui à peu près au milieu du peloton euro- annuels, sont greffés sur des critères opéra- entourant la rémunération, ce qui permet
péen”, affirme Marcel Rottiers. tionnels. Les bonus à long terme, comme d’éviter les excès. Et c’est là l’objectif princi-
Un autre motif, plus important, de la hausse les (options sur) actions et les bonus cash, pal de la nouvelle loi.”
des salaires, est la complexification de la fonc- sont liés à la création de valeur pour l’ac- Hilde Vereecken
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