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Au sujet de Carl Friedrich Zimpel, dit aussi Charles Franz Zimpel et

dont les livres sont souvent signés Ch. F. Zimpel, voici un article
publié dans la revue philosophique et religieuse de 1855, qui n’est
pas des plus élogieux à propos de la secte de John Wroé et de son
représentant, le Dr Zimpel, à l’exposition Universelle de 1855:

REVUE DU MOIS
-------------
UNE NOUVELLE SECTE CHRETIENNE

Connaissez-vous John Wroé ?

Il est probable qu’aucun des lecteurs de la Revue ne


connait John Wroé.

John Wroé est le fondateur d’une secte issue, comme tant


d’autres, de la copulation de la Bible et de l’Evangile. Est-il
nécessaire d’ajouter que cette secte a vu le jour en Amérique (*),
au sein de la race anglo-saxonne. Elle a cru devoir se faire
représenter à l’exposition universelle de Paris, où elle a passé
inaperçue au milieu des mille merveilles du génie industriel. Et
cependant la secte des Israélites-chrétiens est une des plus
curieuses productions de cette terre qui a donné au monde les
Mormons et nous a expédié les Aztèques.

M. Ch. Zimpel est disciple de John Wroé et a été chargé de


le représenter à Paris. Il s’intitule lui-même : Missionnaire israélite-
chrétien pour les pays d’Europe où l’on parle allemand et français.

M. Zimpel est un vrai type d’apôtre. Sa taille est grande,


droite et pleine de noblesse; il possède une magnifique barbe
blanche qui descend majestueusement sur sa poitrine ; ses yeux
sont bleus et pleins de douceur ; ses joues paraissent avoir été
creusées par la prière et l’ascétisme ; il parle lentement et comme
quelqu’un qui écouterait les paroles qu’un autre lui soufflerait à
l’oreille ; enfin il porte un habit gris, aux basques longues et
carrées, orné de grands boutons d’acier, et sa tête est couverte
d’un feutre aux larges bords. Son costume vous rappelle Franklin ;
mais hélas ! M. Zimpel, en endossant l’habit Franklin n’en a pas
revêtu l’admirable bon sens. Non pas qu’il manque absolument de
raison et de savoir ; M. Zimpel raisonne sainement sur tout ce qui
ne concerne pas sa croyance religieuse ; il parle purement

*) Constance Descartes : erreur du journaliste ; la secte de John Wroé


s’est d’abord développée en Angleterre avant d’essaimer aussi aux USA,
puis en Australie.
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Le français et possède l’anglais et l’allemand comme on possède


sa langue maternelle. Ajoutez qu’il est docteur en médecine et
pratique avec distinction l’homoepathie. – Je ferai remarquer à ce
propos que l’homoephatie est surtout affectionnée par les natures
portées au mysticisme, par les tempéraments spiritualistes, et que
tous les spéculateurs en religion en préconisent la pratique. Ce qui
ne prouve du reste ni n’infirme la vérité de cette doctrine.

L’apôtre des Israélites-chrétiens a demandé au


Gouvernement français l’autorisation d’exposer publiquement sas
croyances, prévenant le ministre qu’il attendait sa réponse jusqu’au
15 septembre, mais que, ce délai expiré, il quitterait paris en luis
laissant la responsabilité d’un refus qui compromettrait le salut de
tout un peuple. Le Gouvernement n’ayant pas cru devoir autoriser
les prédications de M. Zimpel, nous avons été privés du plaisir de
l’entendre, mais nous avons obtenu qu’il nous fit connaitre la
doctrine de son maitre John Wroé, telle que celui-ci l’a exposée
dans ses douze premiers sermons et telle qu’elle se trouve
reproduite dans LE LIVRE DE LA LOI ET DU TEMOIGNAGE. Voici ce que
nous en avons pu retenir et comprendre :

Comme beaucoup d’hérésiarques, les Israélites-chrétiens


interprètent la Bible symboliquement, et leurs interprétations sont
on ne peut plus bizarres. Sans parler des 144,000 élus qui leur
semblent clairement indiqués dans l’Apocalypse sous les noms des
12 anges, des 12 tribus, des 12 apôtres de l’Agneau, des 12
fondements ou par tout autre nombre 12 multiplié par les 12 mille
stades de la Cité sans temple, ou encore par les 144 coudées de la
muraille en ajoutant trois zéros, on peut se faire une idée de la
singularité de leur méthode par la manière dont ils expliquent le
péché originel.

Ainsi Adam n’a pas péché parce qu’il a goûté à l’arbre de la


science du bien et du mal, mais parce qu’il a connu sa femme
pendant qu’elle avait ses règles. C’est pour cela que nous naissons
tous souillés. Ecoutez les propres paroles de John Wroé expliquant
la chute de l’homme, et tâchez de comprendre : « La femme
s’adonnant à Satan, le cosmopolite, celui-ci en devint l’époux
spirituel ; il les gouverna tous deux, ils devinrent les esclaves du
375 LA REVUE

Prince de ce monde (Jean, 12, 31) ; et pendant qu’elle enfantait


des enfants, atteints de ce mal, elle en devint la marâtre … C’est
pourquoi l’homme quittera son père et sa mère (le mal de son père
et de sa mère, l’homme du péché et la mère des impudiques), et
s’attachera à sa femme (la Jérusalem d’en haut), et les deux seront
une même chair. « (Marc, 10, 7,8. Gen., 2, 24.) Christ et la
Jérusalem et l’esprit de l’homme ; ces trois se trouvant dans un
temple le rendent par cela immortel. » Voilà ce que John Wroé
appelle une explication, et toutes ses explications sont aussi
claires, et tous ses sermons sont écrits de ce style qui rappelle
assez bien celui de notre compatriote Madrolle, le disciple de
Vintras. (* Constance Descartes : voir en fin, l’article que j’ai trouvé sur Madrolle
et Vintras.)

Vient ensuite une autre explication de laquelle il résulte que


les chérubins logés vers l’orient du jardin d’Eden avec une épée
pour garde l’arbre de vie ne sont autre chose que les règles de la
femme ; « car Eden est le corps immortel ; leurs esprits nommés
homme furent chassés du corps ; et comme le sang du corps par la
force de l’esprit en est la vie, le corps devint mortel et fut livré à
Satan pour la destruction de la chair, afin que l’âme soit sauvée. »
Il parait qu’il y a des personnes qui comprennent ces choses-là.

J’ai parlé des 144,000. C’est là un des points les plus


importants de la doctrine. Il importe de l’expliquer ;

Après la captivité, tous les Israélites ne retournèrent pas à


Jérusalem. Beaucoup restèrent parmi les Gentils, et, d’après John
Wroé, qui ne cite pas ses autorités, la plupart se répandirent dans
l’Occident. Comme ces fils d’Israël étaient hors de la Judée à la
venue du Christ, ils ne peuvent être solidaires du crime commis par
les juifs sur la personne du Fils de Dieu. Leurs mains sont pure du
sang du Juste ; c’est pourquoi ils rentreront dans l’alliance de Dieu,
d’Abraham et de Jacob. C’est parmi eux que doivent être choisis
les 144,000 qui vivront 1,000 ans. Pour faire partie de cette sainte
phalange, il suffit de croire à la divinité de la Bible et de l’Evangile,
et à l’interprétation que John Wroé donne du texte des Ecritures.
De plus, il faut se faire baptiser si on ne l’a pas été, et se faire
circoncire si on ne l’est déjà.
374 LA REVUE

Ce qui est surtout remarquable à notre époque où de tous


côtés la femme se trouve exaltée, c’est le profond mépris dans
lequel on la tient chez les Israélites-chrétiens. C’est à elle que
s’applique le mot de la bête : « Elle est la grande Babylone, la
mère des impudicités et des abominations. Si quelqu’un adore la
bête et son image (la bête est le corps de la femme dans ses
règles, e tle fruit, engendré pendant ses fleurs, est l’image qui en
était sortie avec l’ivraie. » (Matthieu, 12, 33.) Aussi ne peut-elle être
rachetée de la mort. Elle ressuscitera pour le premier jugement,
mais elle ne fera pas partie des 144,000 qui vivront 1,000 ans.
Cependant un temps viendra où la femme sera pure : c’est quand
trois esprits seront réunis dans son corps (le Père, le Fils et le
Saint-Esprit) ; « alors elle concevra sans liaison avec le sexe
masculin, ainsi que l’a fait la vierge Marie. »

Inutile de pousser plus loin cette analyse ? Quoique bien


incomplète, elle suffit pour faire comprendre que la conception
jusaïco-chrétienne de John wroe n’est qu’un chapitre de plus à
ajouter à l’histoire des Folies religieuse. En voyant ce que l’esprit
humain peut tirer de la Bible on serait disposé – si n’était le
principe de la liberté de penser qui doit passer avant tout – on
serait disposé à approuver la sage prévoyance de la cour de Rome
lorsqu’elle en interdit la lecture aux laïques. Que d’impuretés, que
d’immondices dans ce livre divin ! – je parle de l’Ancien
Testament ; le Nouveau est tout autre ! – Combien de dangereux
exemples ; quelle idée grossière de la divinité ; quelle fausse
science ; quelle absence du sens moral, même chez les élus du
Seigneur ; quels grossiers mobiles aux actions humaines ; quelle
morale étroite, stérile, sèchement négative, froidement usuraire,
souvent atroce : - « Œil pour œil, dent pour dent ! » Et cependant
c’est dans se livre que la réforme, je veux dire la liberté, a trouvé
ses meilleures armes ; c’est sur ce livre que la raison renaissante
s’est appuyée pour marcher d’un pas résolu à la conquête de la
terre et du ciel !

CH. FAUVETY.

(Constance Descartes : L’Expostion Universelle de paris de 1855 se tint


du 15 mai au 31 octobre, je suppose que le Dr Zimpel était venu y
présenter le livre qu’il avait fait éditer en français en 1855 « Le
Commandement de la Loi et du Témoignage pour les douze tribus de
toute la maison d’Israël nommée Israélites-Crétiens » )
*) Informations sur Madrolle et Vintras évoquées dans l’article
précedent.

Partie IX - Synthèse   Chapitre LVII - Calendrier   Calendrier et Fin des Temps   

Le millénarisme est la croyance dans l'avènement d'un règne


terrestre du Christ lors de la Parousie, établissant la paix et la justice
pendant mille ans pour les justes ressuscités, avant la seconde
résurrection. …

… ... …
Partie IX - Synthèse   Chapitre LVII - Calendrier   Les ratés du Saint Esprit   

… … …

Sion par Houécourt - 28 septembre (Point particulier : Houécourt)

Trois prêtres lorrains, les frères Baillard, entreprirent, au milieu du


XIXème siècle, de relever de leurs ruines plusieurs couvents et
s'efforcent de les faire revivre, en particulier le célèbre pèlerinage
de Sion, situé sur la colline si chère aux Lorrains. Ils y fondent
l'Institut des frères de Notre-Dame de Sion-Vaudémont. Mais l'évêque
de Nancy, inquiet des expédients financiers qu'ils emploient,
intervient pour éviter un scandale latent. Il interdit les quêtes,
principales ressources de l'institut. La ruine survient. Les frères
Baillard sont priés de faire retraite chez les Chartreux. Pendant son
séjour à Bosserville, Léopold eut plusieurs entretiens avec le Père
vicaire qui, dans les chartreuses, est chargé de s'occuper des
retraitants. Il se nommait le Père Magloire. Il avait lu les ouvrages
d'Antoine Madrolle, publiciste célèbre, qui, depuis 1847, était
devenu le disciple de Vintras et avait écrit des ouvrages en faveur
de l'œuvre de la Miséricorde. Il fit à Léopold l'éloge de leur auteur
qu'il appelait le Jérémie de la France. Il lui parla de Michel Vintras,
laïque de Tilly- sur-Seulles en Normandie, un homme
extraordinaire qui passait pour être un grand prophète. Léopold, qui
ne connaissait ni Madrolle ni Vintras, fut frappé de ce que lui
apprenait le Père Magloire et il résolut de se mettre en rapports avec
eux. Vintras se disait inspiré de Dieu pour préparer l'avènement
prochain d'une nouvelle société chrétienne, renouveler l'Église
corrompue et sa hiérarchie, enfin établir sur terre le règne du Saint-
Esprit. Proche des milieux naundorfistes, Vintras (1807-1875), né à
Bayeux, est à l'origine de l'Œuvre de la Miséricorde, à la suite de
l'apparition, à Tilly-sur-Seulle, où il gérait une cartonnerie, puis à
Paris, d'un mystérieux vieillard en qui il vit la figure de saint
Joseph. Dès lors, Vintras s'emploiera à annoncer le règne du Saint-
Esprit et s'activera à la régénération de l'Eglise catholique romaine.
Il a des extases, des visions et fait communier ses adeptes avec des
hosties ensanglantées. Chaque membre y prend le nom d'un ange,
Vintras prenant celui de Sthratanael. L'apparition d'hosties
sanglantes à partir de 1841, à Tilly-sur-Seulle, vient conforter
l'œuvre, tandis que l'Eglise catholique s'inquiète de voir des
membres de son clergé rejoindre les rangs de la secte. Inculpé
d'escroquerie, Vintras passera six ans en prison, avant d'être libéré,
en 1848, puis exilé à Londres de 1852 à 1862. Il y publie l'Evangile
éternel. De retour en France, il institue à Lyon le Carmel d'Elie car il
est convaincu d'être la réincarnation du prophète Elie. Dorénavant
pontife d'amour et réincarnation du prophète Élie, Vintras, se voue à
ses disciples, groupés en "carmels éliaques". Il mourra à Lyon, en
1875. L'abbé Boullan échouera à succéder à Vintras. Joris-Karl
Huysmans, qui le rejoint à Lyon en juillet 1891 avec sa servante-
médium vintrasienne Madame Thibault, l'immortalisera en 1891
dans Là-Bas en Docteur Johannès. Boullan, se présentant comme
réincarnation de saint Jean-Baptiste, avait créé avec Adèle
Chevalier, une nonne du Couvent de La Salette (Fallavaux), en 1859
la Société pour la Réparation des Âmes, et recommandait des "
rapports fluidiques " avec des entités célestes pour racheter le péché
d'Adam. Boullan s'attira les foudres des Rose-Croix menés par
Stanislas de Guaïta qui le condamna " à mort par magie ". Lassé par
les pratriques occultes du prêtre, Huysmans quitta Boullan, qui
mourra en 1893, et Lyon. A son tour, en 1913, Maurice Barrès
s'intéressera à la secte dans La Colline inspirée.

Le jeune martiniste lyonnais Joanny Bricaud (1881-1934) a hérité


de la lignée éliaque (il publiera en 1927 L'Abbé Boullan, sa vie, sa
doctrine et ses pratiques magiques, Huysmans et le Satanisme et
Huysmans occultiste et magicien). Sans quitter son poste de commis
aux écritures au Crédit Lyonnais (où l'on retrouvera Arlette
Laguiller) à Lyon, cet ancien séminariste devint Président de la
Société occultiste internationale, Grand Maître de l'Ordre
Martiniste, Docteur de la Rose-Croix Kabbalistique et Gnostique,
Grand Hiérophante pour la France du Rite de Memphis Misraïm,
Patriarche de l'Eglise Gnostique Universelle et évêque catholique
anglican. Il se fit proclamer Souverain Pontife de l'EGU sous le
nom de Jean II. (http://sergecaillet.blogspot.com).

De retour à Sion, dont il était resté curé, Léopold écrivit à Madrolle,


qui l'engagea à aller voir Michel Vintras. Léopold se rendit à Tilly-
sur-Seulles. Léopold demeura longtemps seul à Tilly. François et
Quirin, attirés par Léopold, se rendirent à leur tour à Tilly. Ils
écoutèrent les sermons de Vintras, furent témoins de ses extases et
de ses prestiges, suivirent les exercices de sa chapelle. Quand ils
revinrent au milieu du mois d'août 1850, Léopold était sacré pontife
et apôtre de l'Œuvre de la Miséricorde. Ce fut le 8 septembre 1850,
fête de la Nativité de la sainte Vierge et jour de pèlerinage, que
Léopold prêcha à la messe, dans la chaire de Sion, les idées de
Vintras. L'évêché de Nancy, qui avait été surpris de la longue
absence de Léopold, et renseigné sur sa propagande parmi le clergé
et les fidèles, fut bientôt instruit de ce qui venait de se passer. Une
suspense provisoire leur était appliquée. Comme ils affirmaient leur
adhésion complète à la doctrine de Vintras ils furent frappés
d'interdit. Ils répandaient à Saxon des Révélations, des Visions et
des Miracles. Beaucoup de personnes de Saxon et des paroisses
environnantes venaient assister à leurs cérémonies et écouter leurs
discours. Ils se crurent favorisés de miracles dans leur chapelle : des
hosties blanches sur lesquelles étaient formés en couleur rose foncé
des cœurs d'où sortaient des flammes, des palmes, puis un A (amour
à Jésus), ou AM (aimer Marie), venaient se placer sur l'autel
pendant les prières.

Hostie pentaculaire de Vintras - Michèle Brocard, Lumières sur la sorcellerie


et le satanisme

On délégua tour à tour à Sion deux jeunes oblats de la maison de


Nancy, les Pères Soullier et Conrard. Ils avaient la consigne de
combattre la doctrine de Vintras au dehors par leur influence
personnelle, dans des démarches individuelles et des conversations
où ils devaient remettre les choses au point. La lutte dura du 12
novembre 1850 au 27 juin 1851. De nombreux habitants de Saxon,
le maire Munier en tête, et trois des conseillers de la fabrique étaient
favorables aux Baillard. Ils exerçaient un puissant ascendant sur
leurs anciens paroissiens ; ils continuaient à visiter les malades, à
donner de bons conseils et ils affectaient une grande modération.
Cependant la nouvelle secte ne faisait plus de prosélytes, et elle ne
conservait que ses quarante adeptes. Le Père Conrard lut au prône
l'interdit lancé par Mgr Menjaud contre les Baillard. La lecture du
bref laudatif de Pie IX produisit sur tous une profonde impression;
quelques schismatiques en furent effrayés. Les Baillard étaient de
plus en plus déconsidérés. Le bon ordre fut rétabli à Saxon, et la
mission des oblats était remplie. Les Baillard continuèrent dans leur
chapelle le culte vintrasien devant un nombre assez restreint
d'adeptes. Les Baillard ne tardèrent pas à être aux prises avec de
nouvelles difficultés pécuniaires. M. Madrolle avait vu la situation
précaire des Baillard, et il avait offert à l'un d'eux une de ses
maisons de campagne dans la Côte-d'Or. Quirin accepta plus tard
cette offre. Il fut employé dans les imprimeries de Dijon pendant
quelques mois, enfin durant huit années il s'occupa d'assurances
contre l'incendie et la grêle. Après onze ans de séjour en
Bourgogne, il revint à Sion. Le 17 mars 1852, le préfet du Calvados
prit une mesure énergique contre la secte de Vintras; il fit arrêter à
Tilly les derniers adhérents, au nombre desquels se trouvaient trois
prêtres interdits et deux dames d'un nom honorable. Après le départ
de Quirin, Léopold et François furent expulsés de Sion par exploit
d'huissier, et se réfugièrent à Saxon dans la maison de Mlle Sellier
qui leur était dévouée. Pour faire cesser les réunions qu'ils tenaient,
l'évêque de Nancy demanda l'intervention de la magistrature. Elle
n'autorisa pas officiellement l'interdiction des réunions clandestines
des Baillard. Le nouveau maire de Sion, Janot, nommé à cet effet,
se chargea de disperser la secte, qui ne comptait plus qu'une
quinzaine d'adeptes, filles ou femmes. Il était sûr d'être approuvé
par l'autorité civile. Ce fut le jour de la Pentecôte, 30 mai 1852,
grande fête du Saint-Esprit pour les enfants du Carmel. Léopold
célébrait clandestinement la messe, à dix heures du matin, dans la
grange de Pierre Mayeur. Le maire, accompagné du garde
champêtre, pénétra dans la grange pendant le sermon. Pris dans une
rixe, François fut condamné à deux mois de détention. Léopold fut
invité à se présenter à Nancy devant le procureur de la République.
Il prit rapidement le chemin de Londres, pour rejoindre Vintras. On
fit néanmoins son procès. Il fut condamné par contumace à un an de
détention, parce qu'en prêchant à Sion l'Œuvre de la Miséricorde, il
avait offensé la morale et la religion catholique. Le 2 juin 1852,
Mgr Menjaud interdit aux trois frères Baillard le port du costume
ecclésiastique. Quand François eut purgé sa peine, il revint à Saxon,
chez Marie-Anne Sellier. Après cinq années de séjour à Londres,
Léopold crut que sa peine était prescrite, et il quitta la Grande-
Bretagne pour rentrer en France (1857). Il répondait à l'invitation
d'un vicomte qui connaissait l'Œuvre de la Miséricorde et désirait
entretenir dans son château un des abbés Baillard. Il fut bien reçu
dans cette maison hospitalière. Le curé du lieu fut averti que
Léopold exposait les doctrines de Vintras au château. La police
prévint le vicomte qu'il ait à faire évader Léopold s'il ne voulait pas
être inquiété. Arrivé à Château-Gontier, Léopold fut appréhendé par
les gendarmes. Il en appela au tribunal d'Angers, qui confirma le
premier jugement. Sa peine accomplie, il revint à Sion en 1858 et il
y habita, avec François, toujours chez Marie-Anne Sellier. Ils
s'occupèrent à leur tour d'assurances contre la grêle et l'incendie
jusqu'à leur mort. Ils n'oubliaient pas toutefois l'Œuvre de la
Miséricorde, dont ils pratiquaient les exercices dans leur maison.
Léopold était en relations continues avec Vintras. Cependant Quirin
arriva à Saxon avec Sœur Marthe. Moins d'un mois après son
arrivée, le 4 juin, François mourut après une courte maladie à l'âge
de 65 ans. Léopold était absent et Quirin assista le mourant.
François fut inhumé au cimetière de Sion, et ses frères lui firent
élever un petit monument funèbre. Quirin alla, avec sœur Marthe,
s'établir à Nancy, où il se trouvait encore, le 12 juillet 1868, date à
laquelle il terminait la rédaction de son Histoire des trois frères. La
guerre de 1870 survint. Léopold l'avait attendue et annoncée comme
l'Année noire. Elle paraissait être la confirmation et le triomphe de
ses sombres pronostics. Pour tenter le retour de Léopold, Mgr
Foulon fit part à Léopold de la conversion de son frère Quirin. Dans
une lettre en réponse à ses avances, Léopold regrettait la " faiblesse
" de son frère, mais il ne pouvait discuter les raisons qu'il ne
connaissait pas. Pour lui, il demeurait fidèle à ses convictions,
établies sur les miracles dont il avait été témoin, et il était sûr que
les prophéties de Vintras s'accompliraient. Il rectifiait l'exposé que
Mgr Turinaz lui avait fait de la doctrine de Vintras et il se déclarait
catholique. Finalement, Léopold se rétracte et le 23 mai 1883, dix
jours après, il mourut. Par ordre de Mgr Turinaz, les obsèques de
Léopold furent catholiques, mais sans les cérémonies traditionnelles
usitées aux funérailles des prêtres (Eugène Mangenot, La Colline inspirée -
Un peu d'histoire à propos d'un roman).

Saint Esprit et Jérusalem

Depuis au moins les Actes des Apôtres, Jérusalem est lié à l'Esprit
Saint : " Après qu'il eut souffert, il leur apparut vivant, et leur en
donna plusieurs preuves, se montrant à eux pendant quarante jours,
et parlant des choses qui concernent le royaume de Dieu. Comme il
se trouvait avec eux, il leur recommanda de ne pas s'éloigner de
Jérusalem, mais d'attendre ce que le Père avait promis, ce que je
vous ai annoncé, leur dit-il; car Jean a baptisé d'eau, mais vous,
dans peu de jours, vous serez baptisés du Saint Esprit. Le jour de la
Pentecôte, ils étaient tous ensemble dans le même lieu. Tout à coup
il vint du ciel un bruit comme celui d'un vent impétueux, et il
remplit toute la maison où ils étaient assis. Des langues, semblables
à des langues de feu, leur apparurent, séparées les unes des autres,
et se posèrent sur chacun d'eux. Et ils furent tous remplis du Saint
Esprit, et se mirent à parler en d'autres langues, selon que l'Esprit
leur donnait de s'exprimer ". L'Apocalypse de Jean confirme : " Et
l'Esprit et l'Epouse disent : Viens. Et que celui qui entend dise :
Viens. Et que celui qui a soif vienne ; que celui qui veut prenne de
l'eau de la vie, gratuitement. " (Ap 22, 17), l'Epouse étant la ville
sainte, la Jérusalem céleste.

La Jérusalem céleste correspond à cet âge de l'Evangile et du


Fils, et non à celui de l'Esprit, comme l'indique la scène entre
Jésus et la Samaritaine au puits de Jacob. " La femme lui dit : "
Seigneur, je vois que tu es un prophète... Nos pères ont adoré
sur cette montagne et vous, vous dites : C'est à Jérusalem qu'est
le lieu où il faut adorer. " Jésus lui dit : " Crois-moi, femme,
l'heure vient où ce n'est ni sur cette montagne ni à Jérusalem
que vous adorerez le Père. Vous, vous adorez ce que vous ne
connaissez pas ; nous, nous adorons ce que nous connaissons,
car le salut vient des Juifs. Mais l'heure vient - et c'est
maintenant - où les véritables adorateurs adoreront le Père en
esprit et en vérité, car tels sont les adorateurs que cherche le
Père. Dieu est esprit, et ceux qui adorent, c'est en esprit et en
vérité qu'ils doivent adorer. "

Jérusalem est partout et finalement nulle part.

Partout dans les cercles templiers, colline de Jérusalem dans le


cercle de Lussan, lieu-dit Jérusalem à Muret, Mont Sion et Montagne
de Sion dans le cercle du Sarnieu (Groisy) - c'est dans ce cercle que
Pierre Plantard déclara sont fameux Prieuré de Sion en 1956 -,
Colline de Sion à Houécourt, lieue de Jérusalem dans la Basilique de
Saint-Quentin (cercle d'Homblières).

A Mimizan (Point particulier : Mimizan), d'après l'interprétation de J.


Lacoste, on aurait une évocation symbolique de la Jérusalem
nouvelle dans les représentations du portail de l'église Sainte-Marie.
Cette ville est à la fois cité céleste et cité messianique et par
conséquent est une image de l'Eglise. Deux arbres apparaissent dans
l'adoration des Mages du tympan. J. Lacoste voit dans ces arbres
une référence à l'arbre de vie de la Jérusalem Nouvelle. Ils sont
alors une source de nourriture et de guérison : " Au milieu de la
place, de part et d'autre du fleuve, il y a des arbres de Vie qui
fructifient douze fois, une fois chaque mois, et leurs feuilles peuvent
guérir les paiens. " (Apocalypse 22,1-2). Les vierges folles et les
vierges sages de la voussure intérieure encadrent le palais de
l'Epoux. L'aile gauche qui est orientée vers les vierges sages est
ajourée et possède une riche décoration (colonne cannelée, colonne
torsadée, coupole). Cette partie dégage donc un aspect merveilleux
qui invite les " élus " à pénétrer dans la Jérusalem Céleste.

De la transhumance du siège spirituel, Dante s'en fait le témoin.

Dante est lui-même un pèlerin malmené par la mélancolie d'amour


(Purg. VIII, 1) et rencontre au purgatoire d'autres pèlerins. Puis,
s'avançant vers le Paradis, tel un pèlerin qui veut rentrer chez lui,
il fixe enfin le soleil qui darde ses rayons et achève sa
pérégrination dans le ciel où s'embrassent la lumière et l'amour,
dans le foyer central de l'esprit divin où son âme est enclose, pour
admirer la Jérusalem Céleste, la Nouvelle Rome Jubilaire, dont il
est devenu le citoyen éternel, "de cette Rome où le Christ est
romain" (Purg. XXXII, 102), tel que cela lui sera annoncé au
Purgatoire (Franco Giacone, Le cinquiesme livre).

Présence de l'Antéchrist
Les hérésies donnant la prééminence au saint Esprit semblent vivre
dans la nostalgie des siècles précédent l'an mille, tournant où
l'attente de la Parousie fut particulièrement déçue, ce qui entraîna,
en Occident, une hiérarchisation plus stricte de l'Eglise. " C'est en
effet entre le IXème et le XIIIème siècle que est effectué le passage
une conception mystérique de Eglise considérée jusque-là avant tout
comme peuple de Dieu en marche vers la Jérusalem céleste sous la
conduite de l'Esprit-Saint à une notion beaucoup plus restrictive
celle d'un corps dont le pape est la tête en tant que vicaire du Christ
et dont sont membres ceux qui se soumettent à l'autorité du
sacerdoce hiérarchique. L'auteur à juste titre insiste sur le tournant
décisif que constituent les XIème et XIIème siècles dans histoire de
l'ecclésiologie. L'affirmation de la primauté de juridiction et de la
souveraineté du pape sur l'Eglise entraîne la rupture avec l'Orient.
Le schisme et la réforme grégorienne favorisent le triomphe de
conceptions qui s'étaient déjà fait jour dans les milieux romains au
Vème et au IXème siècles mais qui n'avaient pu jusque-là s'imposer
à l'ensemble de la chrétienté : définition juridique de l'Eglise,
affirmation de la papauté comme pouvoir, centralisation romaine.
Dès lors que ce tournant est pris les Structures de catholicité
verticale ne feront que gagner en rigidité. " ( André Vauchez, Yves Congar -
L'Eglise de saint Augustin à l'époque moderne).

La prégnance de la croyance en la Parousie s'accompagne de celle


en l'Antéchrist. Pour guetter les signes de la seconde venue du
Christ, il n'est pas impossible que certains s'inventent des
Antéchrists sans cesse, l'un chassant l'autre, comme ce fut le cas de
Jean de Roquetaillade (né à Marcolès). Le plan apocalyptique qui se
dessine à travers l'œuvre de Jean de Roquetaillade place le roi de
France à la tête de tous les rois de la chrétienté, faisant de lui le roi
des derniers jours. Une autre idée dans le système de pensée de Jean
de Roquetaillade (idée, d'ailleurs, qui est beaucoup plus importante
que le rôle du roi de France aux derniers jours ...) est sa conception
tripartite de l'histoire. Cette idée est en partie empruntée à Joachim
de Flore, ce qui a pu induire en erreur bon nombre de lecteurs mal
renseignés, au point où l'on attribuait assez facilement des écrits de
Jean de Roquetaillade à l'abbé Joachim. (Tobin Matthew. Une collection de
textes prophétiques du XVe siècle : le manuscrit 520 de la Bibliothèque de Tours ).

La révision du schème historique faisant passer du binaire au


ternaire ou binaire modifié imposait à Joachim une révision
semblable à propos de sa conception de l'Antéchrist. Selon la
Tradition, l'Antéchrist était attendu à la fin des temps. Joachim
devait alors répondre à la question suivante : l'Antéchrist serait-il
venu à la fin du deuxième état, c'est-à-dire bientôt, ou bien à la fin
du troisième état, qui correspondrait à la véritable fin de
l'histoire ? Sans aucun doute, vers la fin des années 1180, Joachim
pensait que l'Antéchrist était déjà né et qu'il se manifesterait
prochainement. Il pensait, à proprement parler, aux ennemis de
l'Église dans les derniers jours : le premier avait déjà surgi en
Orient, autour de Jérusalem ; le deuxième devait rapidement surgir
en Occident. Voici un autre élément original introduit par Joachim.
Selon la tradition, l'Antéchrist aurait dû se manifester d'abord à
Jérusalem, près des ruines du temple de Salomon, ou alors dans le
temple bâti à nouveau. Et, à dire vrai, il s'agit là d'une opinion
partagée par Joachim lui-même, au début de sa carrière. Mais
bientôt, il élabore une conviction nouvelle : l'Antéchrist est déjà né
en Occident et il va se manifester bientôt. Le " Temple " dont parle
la Bible ne peut être interprété que métaphoriquement car il
signifie le sommet de la hiérarchie de l'Église romaine ! Joachim
mettait à jour une légende ou, pour mieux dire, une rhétorique qui,
après la chute de Jérusalem en 1187, risquait d'être dépourvue de
son ubi consistam. En déplaçant la scène en Occident, Joachim
rendait disponible cette rhétorique pour de nouvelles applications :
la polémique contre les hérétiques, cathares et vaudois. L'abbé
sollicitait l'Église, de façon pressante, afin qu'elle s'engage dans
ces nouvelles batailles (Gian Luca Potestà, Joachim de Flore dans la recherche
actuelle).

9 vs 7

Saint Paul donne dans ses épîtres plusieurs séries de dons du Saint
Esprit. En particulier une série de 9 dans 1 Corinthiens 12, 8-11,
abondamment commentés par les Pentecôtistes.

1 Corinthiens 12, 8-11 : En effet, à l'un est donnée par l'Esprit une
parole de sagesse ; à un autre, une parole de connaissance, selon le
même Esprit; à un autre, la foi, par le même Esprit ; à un autre, le
don des guérisons, par le même Esprit ; à un autre, le don d'opérer
des miracles; à un autre, la prophétie ; à un autre, le discernement
des esprits ; à un autre, la diversité des langues ; à un autre,
l'interprétation des langues. Un seul et même Esprit opère toutes
ces choses, les distribuant à chacun en particulier comme il veut.

Ils ne figurent pas en tant que tels dans les dons tels qu'exprimés
dans le catéchisme catholique qui en distingue 7 issus d'Esaïe
auxquels est rajoutée la piété, mais sont reconnus dans les
mouvements catholiques du Renouveau charismatique.

De même, chez Paul, dans Galates 5, 22, neuf fruits sont énumérés :

Galates 5, 22 : Mais le fruit de l'Esprit, c'est l'amour, la joie, la


paix, la patience, la bonté, la bénignité, la fidélité, la douceur, la
tempérance.

 
[1] Vincent F. Hopper, « La symbolique médiévale des nombres », Montfort
   

[2] Maurice Pezet, « L'épopée des Camisards », Seghers


   

[1] Vincent F. Hopper, « La symbolique médiévale des nombres », Montfort

[2] Maurice Pezet, « L'épopée des Camisards », Seghers

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