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au départ toutes les variables liées à la variable expliquée où les données sont souvent des variables binaires (obtention
avec un seuil de signification p = 0,20 voire 0,25. En effet, bien de la narcose ou non lors de l’injection d’un hypnotique par
que ce soit une exception, certaines variables indépendantes exemple) (10). Le modèle requiert en principe certaines condi-
entre elles peuvent ne pas être liées significativement avec la tions : indépendance des observations entre elles, normalité
variable expliquée en analyse unidimensionnelle et trouver de la distribution des variables quantitatives et linéarité de
leur caractère lié seulement en analyse multivariée. leur relation avec la variable dépendante pour certains (4). Si,
Les logiciels statistiques proposent des analyses dites « pas pour une variable, cette condition n’est pas remplie, on peut
à pas ». Deux stratégies, à peu près équivalentes sont possi- la transformer en variable ordinale en créant des classes. Il
bles : ascendante ou descendante. est surtout fondamental que les effectifs soient importants.
Dans la méthode ascendante, on introduit en premier la On recommande un effectif minimum N de 400 et en prin-
covariable la plus significativement associée à la variable cipe, on ne doit pas analy ser plus de √ N covariables (11).
expliquée. Puis on étudie à chaque pas l’impact sur l’expli-
cation du pronostic de l’introduction dans le modèle de la Accrochez-vous, le concept est un peu abstrait : la fonction
covariable suivante. Bien entendu, on ne garde en définitive logistique est l’inverse du logit qui, à la probabilité p de surve-
que les covariables associées à une significativité ≤ 0,05 au nue d’un événement binaire, fait correspondre le logarithme
sein du modèle multivarié. népérien de l’odds (11) (la signification des coefficients est
Dans la méthode descendante, toutes les covariables sont expliquée plus bas) :
introduites d’emblée dans le modèle. A chaque pas, on
élimine une variable du modèle, de façon à ce qu’il ne reste p
lors du dernier pas que les covariables associées significati- Logit (p) = ln ( ) = b0 + b1x1 + b2x2, etc.
vement (p ≤ 0,05) à la variable expliquée (le pronostic). 1-p
En pratique, à l’issue de l’analyse univariée, deux catégories traite («hyperespace») dès lors qu’une quatrième variable est
de variables expliquantes peuvent être intégrées dans le introduite. De même, si on a 20 covariables mesurées chez
modèle de départ : celles pour lesquelles l’association avec 100 individus, prendre deux à deux chacune des colonnes
la variable dépendante est suffisamment forte (valeur de p pour faire les graphes de toutes les combinaisons possibles
≤ 0,20 parfois 0,25) et celles qui ont une pertinence clinique serait non seulement fastidieux, mais ne présenterait surtout
avérée (variables dites « forcées »). aucun intérêt.
La déclinaison des procédures « pas à pas » descendantes Le concept de l’ACP peut se comparer à la prise d’une pho-
ou ascendantes permet de rechercher les phénomènes tographie qui prétend représenter un objet tridimensionnel
d’interaction ou de confusion à prendre en compte lors de par une représentation à deux dimensions. Le problème du
l’interprétation. En fin d’analyse, plusieurs modèles peuvent photographe est de choisir l’angle de prise de vue qui rendra
s’avérer satisfaisants sur un plan statistique. Des tests d’adé- le plus fidèlement compte de l’objet photographié. Similaire-
quation permettent de retenir le modèle le plus pertinent (4). ment, celui de l’ACP est de choisir judicieusement le plan de
Certaines variables seront impérativement conservées dans projection du nuage de points (à 20 dimensions dans notre
le modèle : la variable explicative d’intérêt principal et les exemple) pour sélectionner dans cette masse d’information
facteurs de confusion. abstraite les dimensions saillantes les plus représentatives
du nuage. Ces axes « synthétiques », ou composantes prin-
cipales, selon lesquels le nuage de points s’éloigne le plus de
MODÈLE DE COX son centre d’inertie peuvent être la résultante de l’influence
Basé sur le même principe que les deux modèles précédents, d’une ou plusieurs variables ou observations.
le modèle de Cox, qui répond aux mêmes impératifs que la Imaginez que le photographe tente de vous faire deviner
régression logistique, s’applique aux variables expliquées l’identité d’un animal en ne vous montrant que sa silhouette
dites tronquées ou censurées, comme un taux de décès ou prise de face. Si c’est un dromadaire, rien ne vous garantit
un taux de récidives (6). Il décrit une fonction de risque ins- qu’il ne s’agit pas en fait d’un chameau, simplement parce
tantané (9) à partir du délai de survenue (t) de l’événement : que l’angle d’analyse n’est pas le plus informatif. Il vous aurait
fallu disposer d’une vue de profil pour pouvoir conclure avec
certitude (Figure 2). De la même manière, l’ACP fournit les
h (t) = h0 (t) x e (b1x1+b2x2, etc.) axes (et donc les plans) susceptibles de nous renseigner au
mieux sur la forme du nuage de points.
h(t) : risque instantané
h0(t) : fonction de risque au temps 0 (c’est une
constante)
x1, x2 : covariables
b1, b2 : ces coefficients représentent l’effet de chaque
covariable sur la survenue de l’événement. Si b est nul,
la covariable n’a pas d’effet ; le risque instantané est
augmenté si b est positif, diminué si b est négatif.
L’ACP fournit deux résumés graphiques qui permettent de teurs (MAR), deux tiers pratiquant dans le secteur public, le
détecter quelles variables et observations influencent le plus reste dans le privé, 241 réanimateurs (15%) et 204 IADE (12%),
les axes extraits : peu d’urgentistes (Figure 3). On dénombrait 972 Hommes
- la représentation « directe » des points-observations dans (60,3%) et 622 Femmes (38,6%). Leur présence hebdoma-
l’espace des variables. daire à l’hôpital était de 52,9 ± 14,3 heures, avec une activité
- la représentation « duale » dans l’espace des observations clinique moyenne de 47,0 ± 15,3 heures (0 -107) et une
des points-variables, dont les coordonnées correspondent moyenne rapportée de 5,7 ± 7,5 gardes par mois, avec des
aux coefficients de corrélation de chaque variable pour les extrêmes sujets à caution (0-60).
nouveaux axes. 40,8% craignaient quotidiennement de faire une erreur mé-
dicale. 42,0 vivaient des situations de tension avec leurs
supérieurs hiérarchiques, 58,9% avec leurs collègues et 26,6%
EXPRESSION DES RÉSULTATS : EXEMPLE DE avec les patients.
L’ENQUÊTE 2009 SUR LE BURNOUT Le repos de sécurité était prévu et pris dans 69,2 % et 64,4 %
Pour illustrer l’ensemble de cette démarche, nous chemine- des cas respectivement. Il servait au repos dans 47,8 % des
rons dans l’analyse multivariée d’une enquête sur le burnout cas ou à des activités non cliniques (39,5%).
syndrome (BOS), dont nous avons publié les résultats préli- 37,4% des sujets étaient traités pour anxiété, 19,5% pour
minaires en 2009 (13,14). dépression et 8,1% pour un état de stress post-traumatique.
Le BOS est un concept tridimensionnel mesurable notam- 10,9% prenaient des anxiolytiques, 9,9% des antidépresseurs
ment par le score élaboré dans les années 70 par Christina et 8,9% des somnifères. 12,1% souffraient d’un ulcère gas-
Maslach à Berkeley (15). Le Maslach Burnout Inventory (MBI) troduodénal, 7,7% d’une pathologie cardiovasculaire, 7,3%
est devenu un instrument de mesure de référence qui com- d’une douleur chronique, 2,9% d’une dysthyroïdie, 2,2% d’un
porte 22 items permettant de coter les trois composantes cancer, 1,4% d’un diabète, et 0,3% d’une épilepsie. Enfin, 0,2%
du BOS : étaient séropositifs pour le VIH.
1. l’épuisement émotionnel, Si seulement 1,3% des individus avaient déjà fait une tentative
2. la déshumanisation de la relation au patient, d’autolyse, 32,3% reconnaissaient des pensées suicidaires oc-
3. la perte du sentiment d’accomplissement personnel. casionnelles. 1,1% avouaient avoir été traités pour alcoolisme
et 0,4% pour consommation de drogue. 68,3% choisiraient
MATÉRIEL ET MÉTHODES : à nouveau la même spécialité, mais 39,7% envisageaient
Un questionnaire a été élaboré au cours de l’année 2008, d’arrêter prématurément leur activité clinique. Enfin, 17,0%
dans le cadre d’un sujet de thèse. Mis en ligne en 2009, il ne avaient déjà été poursuivis en justice dans le cadre de leur
pouvait prétendre - et ne prétendait pas - être représentatif de activité professionnelle.
la population explorée : infirmiers et médecins francophones
travaillant dans le champ de l’anesthésie, de la réanimation
et des urgences. En effet, il n’était pas possible de savoir
combien, parmi les personnes concernées, y répondraient.
L’objectif principal de cette étude pilote était seulement de
cerner dans cette population les facteurs en lien avec le BOS
mesuré par le MBI.
A cet effet ont été recueillis les données démographiques et
le mode d’exercice, ainsi que des items mesurant la charge
de travail, la fatigue, la perception subjective de la qualité
de la vie privée et professionnelle, les scores de BOS (MBI),
d’addiction (score Face), de dépression (score Hands), l’orga-
nisation du repos de sécurité, les tensions dans les rapports
humains, ainsi que des items relatifs à la santé physique, dont
les habitudes addictives ou les traitements prescrits. Figure 4. Résultats : 3 composantes du BOS.
L’ensemble de la démarche d’analyse statistique a été prise
en charge par le logiciel StatEL (module StatEL AD), que nous
avons eu l’occasion de présenter dans cette revue (3). Le calcul des différents scores à partir des items cochés dans
les questionnaires permettait de définir la variable dépendan-
PREMIÈRE ÉTAPE : STATISTIQUES DESCRIPTIVES : te, le score de Maslach, et de le confronter à une trentaine de
A l’issue de l’enquête, 1603 questionnaires ont été collectés, covariables. La valeur médiane des différentes composantes
émanant de plus de 1000 médecins anesthésistes réanima- (Figure 4) n’est en elle-même pas très informative :
Score d’épuisement : 19,7 ± 11,6
Score de déshumanisation : 9,4 ± 6,4
Score d’accomplissement : 34,3 ± 9,4
La distribution des trois composantes du score est plus in-
téressante et à l’évidence non gaussienne (Figure 5). 58%
des individus ont des scores élevés au MBI. 35, 17 et 5%
ont respectivement une, deux ou trois des composantes
dans la « zone rouge » définie par Maslach. Moins de 10%
des soignants réunissent des scores faibles dans les trois
dimensions du MBI (Figure 6).
Si ces résultats sont intéressants en soi, ils ne nous rensei-
gnent aucunement sur le lien de chacune de ces covariables
Figure 3. Mode d’exercice principal. avec le BOS.
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Fig. 8 : L’ACP confirme d’une part la validité du MBI : les scores d’épuisement
émotionnel et de déshumanisation ont un poids prépondérant dans la variabi-
lité du nuage. On soupçonne d’ores et déjà un lien entre ces deux items, mais
aussi avec la dépression et la fatigue (sous nuage rose). Inversement, le sen-
timent d’accomplissement personnel se retrouve diamétralement opposé, et
visiblement lié au ressenti de la vie personnelle et professionnelle (nuage vert
sombre). Le nuage violet nous laisse penser que les conduites addictives sont
liées entre elles et vraisemblablement aux covariables du nuage rose. Enfin, si
les gardes ou les astreintes se retrouvent comme on pouvait s’y attendre sur
des axes opposés (fréquences inversement proportionnelles des unes et des
Figure 5. Distribution autres), on peut éprouver une relative surprise avec le fait que ce déterminant
des 3 composantes potentiel de la fatigue est sur l’axe perpendiculaire au MBI, donc a priori peu
du BOS. ou pas influent. Cependant, vous pouvez noter que cette représentation ne
rend compte que de 25% de l’inertie totale du nuage, ce qui reste assez faible
pour une explication.
troduction dans le modèle des covariables quantitatives et quation du modèle de régression : le modèle reste correct
qualitatives (Figure 15). On veille à ne pas analyser plus de s’il n’y a pas plus de 5% de « covariate patterns » mal ajustés
√ N de covariables. (ici 4,4%).
Les énormes calculs
sont assumés par Sta- DERNIÈRE ÉTAPE
tEL qui fournit très ra- Il doit être admis sans réserve que lien ne signifie pas rapport
pidement un rapport de causalité. L’état dépressif est – il la cause ou le résultat
complet de l’analyse du BOS ? Cette étude ne permet absolument pas d’y répon-
(tableau III). dre.
Ainsi, en analyse En revanche, la transformation du score au MBI en une
multivariée, on ne variable dichotomique, préliminaire obligé à une analyse
retrouve pas de lien
indépendant entre
BOS et présence à
l’hôpital, nombre de
gardes, cotation de
la vie privée, pensées
suicidaires, conflits
avec les collègues
ou les supérieurs.
Figure 15. Introduc- En revanche, la ré-
tion des covariables. gression logistique montre un lien indépendant entre BOS
et famille monoparentale (p=0,03), sexe (qui ne « sortait »
pas en analyse univariée, ici p<0,01), perception de la qualité Figure 16. BOS catégorisé.
du travail (p<0,03), du niveau de fatigue (p<0,04), dépression
(p<0,0002), tensions avec les patients (p=0,005) et désir de
quitter prématurément la profession (p=0,03).
StatEL teste également la significativité du modèle global :
le Test du Rapport de Vraisemblance montre qu’il existe au
moins un estimateur du modèle qui est significativement
différent de 0 (ici p<0,0000001). Le logiciel étudie enfin l’adé-
Tableau 3. Résultat de l’analyse multivariée. Figure 18. BOS catégorisé - arrêt prématuré.
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multivariée des covariables associées au BOS, n’empêche l’être à l’issue d’un raisonnement - clinique ou épidémiolo-
pas d’aller plus loin dans l’analyse en catégorisant les répon- gique - et les facteurs de confusion doivent avoir été repérés,
ses au MBI, ici en 5 classes (Figure 16). Ainsi, l’intensité du sous peine d’erreurs non seulement dans l’interprétation du
BOS est fortement corrélée à la fatigue ressentie (Figure 17) modèle, mais aussi dans sa conception, ce qui peut avoir des
ou au désir de quitter la profession (Figure 18). répercussions bien plus difficiles à corriger. n
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