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INTERDISCIPLINAIRE
DE LA RECHERCHE
EN SANTÉ
MÉMOIRE 2ÈME
ÉDITION
DU COLLOQUE
PRÉSENTÉ
JEUDI
5 AVRIL
2018
๏ RECHERCHE
FONDAMENTALE
Réalisé par les
๏ RECHERCHE
CLINIQUE étudiants en
๏ RECHERCHE EN SCIENCES licence SIAS de
HUMAINES ET SOCIALES l’UFR de Médecine
๏ RECHERCHE EN SANTÉ PUBLIQUE Paris VII Diderot
Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
PROGRAMME DE LA JOURNÉE 2
Invité de la conférence 3
Pr Robert BAROUKI, MD, PhD 3
Recherche CLINIQUE 13
Dr Hugo Peyre, MD, PhD 13
Article : Contributing Factors and Mental Health Outcomes of First Suicide Attempt
During Childhood and Adolescence: Results From a Nationally Representative Study 13
Dr André BIRGY, PhD 17
Article : ESBL-producing Escherichia coli ST131 versus non-ST131: evolution and risk
factors of carriage among French children in the community between 2010 and 2015 17
Recherche FONDAMENTAL 21
Dr Zineb Sbihi, PhD 21
Article : Gene expression profiling of circulating HHV-8-infected B cells in patients with
Multicentric Castleman Disease 21
Dr Asma Beldi Ferchiou, MD, PhD 22
Article : PD-1 mediates functional exhaustion of activated NK cells in patients with
Kaposi sarcoma 22
COMITÉ 32
1
Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
PROGRAMME DE LA JOURNÉE
Pr Corinne Alberti
Pr Robert Barouki
Le pouvoir aux marges : les femmes qui vivent avec le VIH, entre marginalité et
mobilité sociale (2016)
Dr Carolina De Rosis
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
Invité de la conférence
Pr Robert BAROUKI, MD, PhD
Chef de Service de Biochimie Métabolomique et Protéomique, Hôpital Necker Enfants Malades,
Paris
“L’exposome représente l’ensemble des expositions couvrant la vie entière qui peuvent influencer
la santé humaine. Il comprend les expositions physiques extérieures, le contexte psycho-social et
les régulations du milieu intérieur. Ce nouveau concept englobe l’ensemble des facteurs de risque
d’origine non génétique. De nouvelles méthodologies à large spectre (les « omiques ») permettent
d’aborder, du moins partiellement, les différentes composantes de l’exposome. À titre
d’illustration, l’étude des effets toxiques de tous les mélanges possibles de tous les produits
chimiques de notre environnement n’est pas faisable de manière systématique. En revanche, si
l’on aborde la question d’un point de vue mécanistique, le nombre de voies de toxicité biologiques
est beaucoup plus limité et il est envisageable d’étudier les interactions entre ces différentes voies.
Dans tous les cas de figure, il s’agit d’un grand défi scientifique pour les années à venir.“1
1
Environnement et santé : la combinatoire des expositions, Robert Barouki, Revue « Questions de santé
publique » (n°26), 2014
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
INTRODUCTION
La transition des soins pédiatriques aux soins adultes est une étape importante chez les
adolescents atteints de maladie chronique. Ce d’autant que depuis quelques années, un taux
inquiétant de ruptures de soins à cette période a été constaté. En effet, plusieurs facteurs - tels que
le passage d’une relation de confiance avec l’équipe pédiatrique à un personnel médical nouveau -
peuvent être déstabilisants pour le patient et sa famille et aboutir à une rupture avec le système de
santé.
Pour remédier à ce problème, des interventions telles que les consultations conjointes ou les
fichiers de transitions ont été mises en place. De nombreuses études ont tenté de démontrer si ces
dernières fonctionnent et apportent une amélioration dans la prise en charge. Cependant, ces
interventions sont complexes ; elles comportent plusieurs composantes qui sont en interaction et
qui donnent ainsi des résultats pluriels. Leur évaluation est donc un réel défi.
Cette étude de la littérature s’est concentrée sur les problèmes méthodologiques qu’il y a pu avoir
dans ces études interventionnelles afin de constituer des recommandations pour augmenter le
niveau de preuve, et donner ainsi des clés aux futurs chercheurs dans le domaine de la transition.
MÉTHODES
Afin de sélectionner les études pertinentes dans le cadre de cet article les auteurs ont suivi
le Preferred Reporting Items for Systematic Reviews and Meta-Analysis (PRISMA), et réalisé des
recherches documentaires via des bases de données telles que MEDLINE, EMBASE et
ClinicalTrial. Ces stratégies de recherche électronique ont permis d’identifier au total 2 592
références, dont 106 ont été sélectionnées en fonction de la pertinence des titres et des résumés.
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
Seules 39 études répondaient aux critères d’inclusion et ont été sélectionnées pour l’étude. En
effet, les études qui ont été incluses sont celles où l’effet de l’intervention a été comparé à un
groupe contrôle, soit dans le même groupe avant et après l’intervention, soit avec un ou plusieurs
groupes de comparaison.
Pour chaque étude, les éléments suivants ont été pris en compte ; informations générales,
population, caractéristiques de la méthodologie de l’étude (aveugle, taille de l’échantillon, groupe
de comparaison et intervention), collecte de données, caractéristiques de l’analyse et résultats.
Les critères utilisés pour mesurer l’effet des interventions de transition de chaque étude ont été
classés en trois groupes ; le ressenti des patients (satisfaction des soins ou de l’intervention,
bien-être psychologique, connaissance de la maladie, autogestion, problèmes sociaux ou
relationnels, état de santé perçu), les données pertinentes pour les professionnels de soins
(données cliniques et biologiques, observance du traitement médical) et celles pertinentes pour
les politiques de santé (utilisation des services de santé, coût).
RÉSULTATS
Les interventions ont été réalisées entre 1980 et 2015, étaient majoritairement délivrées en
pédiatrie et concernaient principalement des jeunes atteints d’une seule maladie chronique
spécifique.
L’étude a révélé des biais de mesure potentiels ; parmi les études utilisant des questionnaires, la
moitié d’entre elles seulement ont utilisé des questionnaires validés et il n’existe actuellement
aucun questionnaire validé qui mesure la satisfaction lié à la transition.
Le coût est utilisé comme paramètre principal dans une seule étude. Or, s’agissant d'une
intervention complexe, les chercheurs devraient systématiquement inclure des mesures
économiques car l'évaluation des coûts est cruciale pour évaluer la faisabilité à grande échelle.
Dans les études examinées, le moment de la collecte des données après le transfert des patients
varie entre 3 et 96 mois. Ainsi la standardisation des critères d'évaluation ne résoudront pas à eux
seuls le problème de la comparaison : le délai de mesure de ces critères doit aussi être unifié.
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
des jeunes en transition peuvent donc influencer sur le succès de l’étude et fausser la relation de
cause à effet.
Les études de transition incluses dans cette recherche comportent certaines lacunes. Par exemple,
en termes de population, l'âge de transfert est rarement rapporté bien que cette caractéristique
soit un élément clé de la description de la population dans le contexte d'une intervention de
transition. Pour l'intervention, il est important de clarifier, par exemple, quelle est la formation
initiale du coordonnateur de la transition, quels matériels sont utilisés lors des séances
d'éducation et s'il s’agit de séance individuelle ou en groupe.
Les soins habituels (notamment l’éducation thérapeutique (ETP)) doivent également être bien
décrits car le contenu d’un programme d'ETP varie considérablement d'une équipe à l'autre et
peut avoir un impact sur la préparation des jeunes au cours de la transition. De plus, les modalités
de transition pour les groupes contrôles recevant des soins habituels doivent être explicitement
décrites. En effet, dans les interventions complexes, la pratique standard utilisée comme contrôle
peut être aussi complexe que l'intervention.
DISCUSSIONS
Cependant, les interventions complexes posent des défis importants aux chercheurs. Ainsi, les
auteurs ont identifié des domaines susceptibles d’être améliorés notamment via le recours à la
randomisation, le calcul d'une taille d'échantillon réaliste, l’utilisation d'une évaluation à l’aveugle,
des questionnaires validés, des critères de jugement standardisés ainsi qu’une grille de reporting
des résultats d’étude adaptée.
Certains problèmes peuvent donc être résolus. Par exemple, permettre aux jeunes patients de
s’impliquer de façon active peut aider à la conception éthique et à la conduite de la recherche.
Ainsi, l’étude est plus pertinente tout en étant utile et bénéfique pour les patients.
La nature des interventions rend souvent impossible l’aveugle des participants ou du personnel.
Cependant, le recueil des résultats cliniques et physiologiques par un évaluateur indépendant
permettrait de satisfaire des exigences de qualité et d’éviter des biais de mesure. Des mesures
fiables passent par l’utilisation d’outils validés, précis et reproductibles. De plus, pour permettre
une comparaison inter-pathologie, l’utilisation de questionnaires non spécifiques à une maladie
serait pertinent.
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
L'utilisation des bases de données administratives pour les évaluations peut s’avérer utile en
permettant l’accès à des données régulièrement mises à jour, sans frais supplémentaires, en
s’affranchissant du biais de volontariat.
CONCLUSION
Peu d'études évaluatives utilisant une méthodologie adaptée existent dans le domaine de
la transition. Ceci a des conséquences sur le niveau de preuve, mais peut s'expliquer en partie par
la complexité des études portant sur des interventions à multiples facettes, avec de multiples
intervenants, des critères de jugement multiples, un aveugle difficile et, dans le contexte de la
pédiatrie, un faible nombre de patients éligibles.
Cependant, des domaines peuvent être améliorés dont certains peuvent d’ores et déjà être mis en
place en se basant sur ce qui est déjà connu. D'autres en revanche nécessitent des recherches
méthodologiques supplémentaires.
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
Article : A Study of the Cost-effectiveness of Fenestrated/branched EVAR Compared with Open Surgery for
Patients with Complex Aortic Aneurysms at 2 Years
M.Michel, J-P.Becquemin, J.Marzelle, C.Quelen, I.Durand-Zaleski on behalf of the WINDOW Trial participants
INTRODUCTION
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
L'objectif de cette étude est d'évaluer la rentabilité des endoprothèses sur 2 ans, en
comparant ses résultats et ses coûts avec celles de l'OSR pour les AAA ou TAAA complexes. Ces
résultats pourront également aider les cliniciens à savoir quels sont les patients qui devraient
bénéficier de ces dispositifs coûteux et innovants.
MÉTHODES
Afin d’assurer la comparaison, ont été choisis des patients ayant été traités par
endoprothèse d’après le registre WINDOW et des patients ayant été opérés par chirurgie ouverte
entre 2010 et 2012 (groupe OSR) selon les bases de données hospitalières françaises.
Le protocole a été approuvé par le comité d’éthique de l’hôpital Hôtel Dieu à Paris et tous les
patients traités par endoprothèse ont donné leur accord par consentement écrit pour participer à
l’étude.
En ce qui concerne les critères de sélection, dans le groupe f / b EVAR ont été retenus les
patients ayant un haut risque d’intervention chirurgical avec un anévrisme de l’aorte abdominal
supérieur à 50 mm chez l’homme et supérieur à 45 mm chez la femme, et une élongation de
l’anévrisme sur l’aorte surrénal inférieure à 10mm.
Les urgences ou les ruptures d'anévrisme ainsi que les dissections de l'aorte ont été exclus de
l’étude. Les patients étaient divisés en trois groupes selon leur type d'un anévrisme : anévrisme de
l’aorte abdominal (AAA) para/juxtarénal ; anévrisme de l’aorte thoraco-abdominal (TAAA)
infra-diaphragmatique ; anévrisme de l’aorte thoraco-abdominal supra-diaphragmatique.
De plus, seules les informations issues des bases de données nationales dans les deux
groupes ont été prises en compte pour pouvoir effectuer la comparaison.
Ont aussi été extraits des bases de données nationales, les informations concernant la mortalité et
le diagnostic primaire pour lequel le patient a été admis au moment de son décès.
Toutes les réadmissions ont été incluses dans les analyses, après avoir exclu les patients qui sont
décédés pendant les 30 premiers jours de l’étude.
L’évaluation économique s’est faite sur 2 ans en incluant toutes les hospitalisations graves
et les réadmissions sur une période de deux ans après la première intervention.
Un rapport coût-efficacité incrémental a été calculé pour évaluer le coût différentiel en fonction
de l’augmentation du pourcentage de décès évités avec l’endoprothèse vs les décès évités avec
l’opération chirurgicale.
Les analyses ont été réalisées sur tout l’échantillon et pour les trois sous-groupes définis
prospectivement. Les variables dichotomiques ont été comparées en utilisant le test du chi² ou le
test de Fisher tandis que les variables continues, définies par la moyenne et l’écart-type ont été
évaluées via le test de Student (ou test t). Les analyses avec une ou plusieurs variables sur la
mortalité à 2 ans ont été faites selon une régression de Cox. La méthode de bootstrap a été
employée pour examiner la distribution des différences de coût et d’efficacité.
RÉSULTATS
Pour comprendre les résultats de cette étude, il faut revenir sur les caractéristiques des
patients. Ainsi sur les 325 patients évalués pour éligibilité (grâce au registre WINDOW), 268 ont
été traités efficacement par endoprothèse. Un total de 1678 patients, traités par chirurgie ouverte,
ont été extraits de la base de données nationale des rejets, pendant la même période. Plus de 90%
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
des patients étaient des hommes. Les patients du groupe f / b EVAR étaient significativement plus
âgés que ceux dans le groupe OSR (71,6 8,5 contre 69,2 8,9 ans, p <0,001). On a constaté que
certaines maladies étaient plus fréquentes selon le type d’intervention effectuée. En effet,
certaines maladies telles que la dyslipidémie individuelle, l'hypertension, les maladies
pulmonaires chroniques et les insuffisances cardiaques congestives, ont été significativement plus
fréquentes chez les patients traités par endoprothèse. D’autre part, les maladies occlusives
artérielles étaient quant à elles plus fréquentes chez les patients traités par chirurgie ouverte.
En ce qui concerne la mortalité à 2 ans, 39 patients (14,9%) étaient décédés dans le groupe
f / b EVAR contre 198 (11,8%) dans le groupe OSR (p ¼ .150). Des résultats similaires ont été
trouvés pour les patients avec un AAA para / juxtarenal (11,2% vs 11,4%, p ¼, 960), pour les
patients avec un TAAA infra-diaphragmatique (17,1% contre 8,4%, p ¼ .090), et pour les patients
avec un TAAA supra-diaphragmatique (28,6% vs 31,0%, p ¼, 790). La mortalité était due à
l'anévrisme dans la majorité des décès (53,8% chez les patients traités par f / b EVAR et 57,1%
chez les patients traités par OSR). Les autres principales causes de décès incluaient les infections
(12,8% et 5,6%, respectivement), des raisons cardiaques ou vasculaires (10,3% et 10,6%,
respectivement), des raisons gastro-intestinales (5,1% et 6,6%, respectivement) et le cancer (10,3%
et 8,6%, respectivement).
Si l’on se penche un peu plus sur les réadmissions, on constate que 170 patients (69,7%)
dans le groupe f / b EVAR avaient subi une réadmission à temps plein ou au moins 24h dans les 2
ans de l'intervention comparé à 1015 (64,2%) dans le groupe OSR (p ¼ 0,096). Il n'y avait pas de
différence en fonction du type d’anévrisme. De plus, il y avait en moyenne 2,2 réadmissions dans
le f / b Groupe EVAR contre 1,7 dans le groupe OSR (p ¼ 0,001). Les réadmissions étaient
significativement plus fréquentes dans le groupe f / b EVAR pour les patients avec un TAAA
infra-diaphragmatique. De plus , il y avait plus de réadmissions de haute gravité dans le groupe f /
b EVAR que dans le groupe OSR (13,3% réadmissions contre 9,6%, p ¼, 003). La différence était
surtout due en raison du sous-groupe AAA para / juxtarénal (12,9% vs 9,2%,p ¼ .011). En
revanche, le sous-groupe TAAA supra-diaphragmatique avait un taux de réadmission plus faible
(16,0% contre 33,2%, p <0,001). Il n'y avait pas de différence dans le sous-groupe TAAA
infra-diaphragmatique (11,5% contre 6,3%, p ¼ 0,058).
Les coûts hospitaliers sur 2 ans étaient significativement plus élevés pour le groupe f / b
EVAR (46 039 € vs. 22 779 €, p < .001). Ces coûts plus élevés s’expliquent par une différence de 22
071 € de l’admission initiale, bien que le coût moyen des réadmissions était aussi significativement
plus élevé chez les patients traités par endoprothèse que ceux qui ont été opérés (12 791 € vs. 11
749 €, p <.001). En ce qui concerne le type d’anévrisme, cette même tendance pour les coûts
totaux a été retrouvée chez tous les sous-groupes sauf pour les patients avec un TAAA
supra-diaphragmatique où il n’y avait pas de différence. Le coût des réadmissions n’était pas
impacté par le type d’anévrisme.
Dans le groupe f / b EVAR, une différence significative a été trouvée selon le fait que le patient a
reçu une endoprothèse fenêtrée ou multibranches, avec un coût nettement plus élevé pour les
multibranches à l’admission initiale et sur 2 ans. Cependant, les différences entre les groupes f / b
EVAR et OSR restent significatifs quand les analyses ont été réalisées sur le sous-groupe ayant
reçu l’endoprothèse fenêtrée la moins chère.
Sur 2 ans, le f / b EVAR était dominé[Lemmor Bg2] : plus de patients sont décédés et les
coûts hospitaliers étaient significativement plus élevés sauf pour le sous-groupe TAAA
supra-diaphragmatique L’analyse du bootstrap confirme les résultats pour chaque sous-groupe
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
avec une petite incertitude concernant les résultats pour les sous-groupes AAA para / juxtarénal
et TAAA infra-diaphragmatique. Seuls les patients du sous-groupe TAAA supra-diaphragmatique
peuvent bénéficier de cette technique et être rentable ; cependant l’incertitude autour de ce
résultat est très élevée. Puisque la comparabilité des deux groupes au départ peuvent mettre ces
résultats en question, une seconde analyse de la rentabilité a été effectuée sur une population
appariée sur score de propension (n ¼ 720). D’après les résultats, même si le f/b EVAR n’était
plus dominé dans la population globale, cette technique n’est toujours pas rentable du fait que
l’incrément du ratio coût-efficacité soit extrêmement élevé (405 960 000 € par mort évité).
Comme dit précédemment, les résultats n’étaient pas en faveur du f / b EVAR pour les
sous-groupes AAA para/juxtarenal et TAAA infra-diaphragmatique, même si ce rapport augmente
pour les patients avec un TAAA supra-diaphragmatique.
DISCUSSIONS
Cette étude a mis en évidence que, à deux ans, les patients traités avec les endoprothèses
ne soit pas une option rentable pour les patients ayant un anévrisme de l’aorte abdominal (AAA)
para/juxtarénal ou pour ceux ayant un anévrisme thoraco-abdominal (TAAA)
infra-diaphragmatique.
Bien qu'il n'y ait aucune différence significative sur la mortalité à 2 ans entre les patients avec un
risque élevé f / b EVAR ainsi que les patients avec un bas et un moyen risque d’OSR. Les coûts
étaient significativement plus élevés pour le groupe f / b EVAR que pour le groupe OSR autant
dans le AAA para/juxtarenal que dans le TAAA infra-diaphragmatique. En revanche, dans le
TAAA supra-diaphragmatique, il n’y avait pas de différence significative en ce qui concerne le
coût.
Les limitations de cette étude sont notamment associées à la randomisation. Celle-ci n’a
pas pu être faite de manière correcte et n'a pas permis de choisir des patients parfaitement
semblables dans les bases de données nationales. Cette contrainte a créé une différence dans les
deux groupes. Les patients ayant été traités par endoprothèse étaient plus vieux et plus malades
que ceux qui ont subi une opération chirurgicale ouverte. Cela s’explique avec le fait que dans le
groupe OSR, l'image préopératoire n'était pas disponible dans le groupe. Il n’y avait donc pas la
possibilité de tirer une conclusion d'un point de vue anatomique en dehors de la mesure et des
limites du processus d'anévrisme.
D’autres part, bien que l'analyse de la population marque des résultats de mortalité semblables, il
faut prendre en considération que les patients ne possédaient pas tous des caractères semblables,
ce qui peut fausser les résultats, et pourrait avoir mené à une sous-estimation de mortalité ainsi
que des coûts dans le groupe OSR.
En tant que tel, l'absence de différence des taux de mortalité entre les deux groupes est
encourageante pour les endoprothèses. Des études supplémentaires sont nécessaires pour les
patients de risque faible pour évaluer si les endoprothèses sont associées à l'efficacité améliorée
dans cette population, bien qu'il soit peu probable qu'il sera associé aux coûts inférieurs en raison
du coût important de la greffe de stent et le fait que la survie s'améliorant est habituellement
associée aux coûts accrus en raison des réadmissions supplémentaires.
Une autre limite était qu'il n'y avait aucune donnée disponible sur la santé et la qualité de la vie
des patients, ce qui peut influencer la rentabilité. En effet, les endoprothèses étant moins invasifs
que la chirurgie ouverte, cette technique a plus de chance d’intéresser les patients surtout dans les
systèmes de santé où les patients n'encourent pas eux-mêmes le coût de la greffe de stent. Il est
important de prendre en compte que cette analyse de la rentabilité nationale était française et ne
pouvait donc pas être applicable à d'autres pays. De plus, la base de données enregistrait
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seulement des morts hospitalières, ce qui signifie que les taux de mortalité à 2 ans sont
probablement sous-estimés dans les deux groupes.
Malgré ces limitations, cette étude est toujours la première comparaison à moyen terme
des endoprothèses contre la chirurgie ouverte pour tous les types AAA et TAAA complexes. Du
point de vue de l’efficacité, les données de mortalité sont semblables à d'autres études publiées
tant sur la chirurgie ouverte que sur les endoprothèses. Concernant les coûts, il n'y a eu aucune
étude comparant la rentabilité de la chirurgie ouverte et les endoprothèses.
Une étude en Allemagne a rapporté que le coût index de l'hospitalisation était de 57 000 $ pour
les endoprothèses fenêtrées et 91 000 $ pour les endoprothèses multibranches, ce qui est plus
élevé que ce qui a été estimé dans cette étude. Les réadmissions à 2 ans avaient un petit impact
sur les coûts totaux (moins de 10 %). Une des solutions pour augmenter la rentabilité des
endoprothèses serait de diminuer le coût de la greffe de stent et d’améliorer la technique pour
diminuer les réadmissions.
CONCLUSION
En conclusion, les patients à haut risque traités par f / b EVAR ne semblent pas avoir une
survie différente à 2 ans par rapport aux patients éligibles à la OSR et donc susceptibles de
présenter un risque plus faible. C'est un résultat encourageant pour f / b EVAR.
Néanmoins, ce dernier reste plus onéreux, en particulier chez les patients avec un AAA para /
juxtarénal et un TAAA infra-diaphragmatique. Le coût est principalement déterminé par le prix
de l'endoprothèse. En effet, celui-là n’est pas compensé par la baisse de la consommation de
ressources de santé. Des études complémentaires sont donc nécessaires pour évaluer la rentabilité
du risque des endoprothèses chez les patients qui pourraient éprouver moins de complications.
Il appartient maintenant aux responsables et aux organismes nationaux d'assurance maladie de
s'assurer qu'il est financièrement viable pour leurs citoyens et pour les fournisseurs de soins de
santé. On pourrait par exemple envisager d’établir des plafonds annuels ou de limiter l'accès à
certains sous-populations.
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
Recherche CLINIQUE
Dr Hugo Peyre, MD, PhD
Maître de conférences et Praticien hospitalier (MCU-PH), Service de Psychiatrie, Hôpital Robert
Debré, Paris.
Le Dr Hugo PEYRE est actuellement Maître de conférences et Praticien
hospitalier (MCU-PH) en Psychiatrie à l’Hôpital Robert Debré. Au cours de
ses études de médecine effectuées à Montpellier, il choisit de se spécialiser en
Santé Publique et effectue son internat en Ile-de-France. Il utilise son droit au
remords, change de spécialité et s’oriente vers la Psychiatrie. En 2012, il est
nommé Chef de Clinique-Assistant dans le service de Psychiatrie de l’Hôpital
Robert Debré, puis exerce en tant que Praticien Hospitalier. Enfin, il est
nommé Maître de conférences et Praticien hospitalier en septembre 2017. À
ce jour, il assure des enseignements, notamment les « ateliers de simulation
afin de former les étudiants en médecine à l’examen du risque suicidaire ». Titulaire d’un Master
2 de Méthodologie de la Recherche Clinique en spécialité Épidémiologie (Université Paris XI),
dont le sujet était le « traitement des données manquantes dans les questionnaires de qualité de
vie », il est titulaire d’une thèse de Sciences portant sur « l’Épidémiologie du développement
cognitif de l’enfant pendant la période préscolaire». Il a par ailleurs participé à différents travaux
de recherche. Il a actuellement contribué à 42 publications dans des revues internationales.
Article : Contributing Factors and Mental Health Outcomes of First Suicide Attempt During
Childhood and Adolescence: Results From a Nationally Representative Study
Hugo Peyre, MD, PhDa,b,*; Nicolas Hoertel, MD, MPHc,d,e; Coline Stordeur, MDa; Gaële Lebeau, MDd; Carlos Blanco, MD, PhDf;
Kibby McMahon, BAg; Romain Basmaci, MD, PhDh; Cédric Lemogne, MD, PhDc,d,e; Frédéric Limosin, MD, PhDc,d,e; and Richard
Delorme, MD, PhDa
INTRODUCTION
MÉTHODES
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
Dans le but de répondre à cet objectif, une étude multicentrique rétrospective a été
réalisée à l’aide d’un grand échantillon tiré de la NESARC (National Epidemiologic Survey on
Alcohol and Related Conditions) de 34653 adultes.
Les données ont été collectées via des interviews en face-à-face par le NIAAA (National
Institute on Alcohol Abuse and Alcoholism) de la manière suivante : une première vague
d’interviews de 2001 à 2002 et une deuxième entre 2004 et 2005. Tous les participants ayant
complété les deux vagues d’interviews ont ainsi pu être inclus dans les analyses.
Concernant les méthodes d’estimation des tentatives de suicide, trois questions étaient
posées à chaque participant. En se basant sur de précédentes recherches, une séparation en deux
groupes a ainsi pu être effectuée : un premier groupe répertoriant les participants ayant fait leur
première tentative de suicide avant leurs treize ans, appelé “enfants” ; un second groupe
répertoriant ceux l’ayant fait entre treize et dix-sept ans, appelé “adolescents”. Enfin, le terme
“tentatives multiples de suicide” est employé lorsqu’au moins deux tentatives ont été réalisées.
RÉSULTATS
L’analyse des données a permis de montrer que les participants ayant tenté de se suicider
pendant l'adolescence pour la première fois étaient plus susceptibles de faire un épisode dépressif
majeur avant de se suicider que ceux ayant tenté de se suicider pendant l'enfance. Les participants
qui ont tenté de se suicider pour la première fois durant leur enfance ont plus souvent été exposés
à des expériences traumatisantes (agressés physiquement et/ou sexuellement, battus ou blessés)
ou à une négligence d’un parent.
Les participants ayant fait une tentative de suicide durant l'enfance étaient davantage
susceptibles de déclarer des antécédents de manie ou d'hypomanie et de troubles paniques avec
ou sans agoraphobie que ceux qui l’ont fait durant leur adolescence. Après ajustement pour le
sexe et l’origine ethnique, le risque de récidive de tentative de suicide (soit au moins 2 tentatives)
était plus élevé chez les participants ayant réalisé leur tentative durant l'enfance que chez ceux
l’ayant réalisé durant l’adolescence.
Les personnes ayant fait une tentative avant l'âge de 18 ans présentaient des taux plus
élevés de troubles psychiatriques au cours de la vie et de l'année précédente. Ils ont également
présenté des scores de qualité de vie liés à la santé plus faibles.
DISCUSSIONS
L’ensemble des résultats montre une nette augmentation des tentatives de suicide après
l’âge de 12 ans. Bien que de nombreux autres facteurs entrent en jeu, ces résultats semblent
indiquer que les tentatives de suicide dans l’enfance seraient plus fortement liées à de la
maltraitance, tandis que les tentatives dans l’adolescence seraient plus fortement liées à un
épisode dépressif majeur. Une première tentative durant l’enfance est également associée à un
plus grand risque de tentatives multiples par la suite ainsi qu’à de nombreuses maladies
psychiatriques à l’âge adulte (manie, hypomanie, trouble panique…) et à un fonctionnement social
à l’âge adulte plus pauvre.
De nombreux facteurs peuvent expliquer cette hausse de l’incidence. Tout d’abord, la
douzième année signe le début d’une phase importante de développement mental : un
développement ainsi qu’une maturation physique et des capacités cognitives ; un développement
et une maturation de la conscience que l’adolescent a de ses émotions. Ces facteurs peuvent
conduire à de nombreux troubles psychiatriques et ainsi augmenter le risque de tentative de
suicide. Il est également possible de noter un décalage significatif entre, d’une part, la maturation
des émotions et du comportement liée aux changements hormonaux au début de la puberté et,
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
Cette étude présente plusieurs limites : La première tient au fait que les participants de
l’étude n’ont expérimenté que des tentatives non fatales. De ce fait, les résultats peuvent ne pas
être extrapolables aux personnes décédées des suites de leur tentative. Les rapports rétrospectifs
de tentatives de suicide et de maltraitance infantile peuvent être sujets à des biais de mémoire.
Ajoutons à cela que l’information clinique portant sur la tentative de suicide était limitée puisque
le NESARC n’avait pas initialement pour but d’examiner spécifiquement les comportements
suicidaires. De futures recherches devraient permettre de retrouver ces résultats en utilisant
davantage d’évaluations du comportement suicidaire, tel que l’Enquête sur les tentatives de
suicide par automutilation**. Un lien a été établi entre certains troubles mentaux spécifiques (tel
que les troubles bipolaires) ou un contexte particulier d’environnement parental (tel qu’un
désaccord familial) et une intention suicidaire plus élevée. Malheureusement, aucune information
sur ces éléments n'était disponible dans le NESARC.
Une dernière limitation concerne les moyens utilisés lors des tentatives de suicide. En
effet, les adolescents et les enfants semblent utiliser des moyens différents. Cependant, aucune
donnée sur les moyens utilisés n’était disponible dans le NESARC et ils n’ont donc pas pu être
étudiés.
CONCLUSION
Pour conclure, les tentatives de suicide chez les enfants et les adolescents diffèrent
considérablement quant à leurs facteurs contributifs et à l'état de santé mentale chez les adultes
qu’ils deviendront. La prévention de la maltraitance infantile et l'intervention précoce en cas de
troubles psychiatriques devraient apporter de grands bénéfices pour réduire non seulement la
souffrance de ces enfants et adolescents, mais également le fardeau du suicide.
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
Article : ESBL-producing Escherichia coli ST131 versus non-ST131: evolution and risk factors of
carriage among French children in the community between 2010 and 2015
André Birgy1–3, Corinne Levy4–6, Philippe Bidet1–3, Franck Thollot4,7, Véronique Derkx4, Ste ́phane Be ́chet4, Patricia
MarianiKurkdjian3, Robert Cohen4–6,8 and Stéphane Bonacorsi1–3* 1IAME, UMR 1137, INSERM, F-75018 Paris, France; 2IAME,
UMR 1137, Univ Paris Diderot, Sorbonne Paris Cite ́ , F-75018 Paris, France; 3AP-HP, Laboratoire de Microbiologie, Centre National
de Référence associé Escherichia coli, Hôpital Robert-Debré F-75019 Paris, France; 4Association Clinique The ́rapeutique Infantile du
Val de Marne (ACTIV), Saint Maur des Fosse ́s, France; 5Groupe de Pathologie Infectieuse Pe ́ diatrique (GPIP), Paris, France;
6Centre de Recherche Clinique du Centre Hospitalier Intercommunal de Cre ́teil, Créteil, France; Association Franc ̧aise de Pe
́diatrie Ambulatoire (AFPA), Paris, France; 8Unité Court Séjour, Petits Nourrisson, Service de Ne ́onatologie, Centre Hospitalier
Intercommunal de Cré́teil, Cre ́teil, France *Corresponding author. E-mail: stephane.bonacorsi@aphp.fr
INTRODUCTION
Les entérobactéries sont les causes les plus fréquentes d’infections communautaires et
nosocomiales. Elles sont généralement traitées par des bêtalactamines, dont les pénicillines, les
sulfamides et les carbapénèmes (imipénem, méropénem, ertapénem), ou encore les
fluoroquinolones.
Le taux de portage fécal de BLSE-E a été principalement étudié dans le cas d'éclosions
nosocomiales, chez des voyageurs adultes ou chez des enfants fréquentant des garderies ;
cependant, peu d'études ont évalué le portage intestinal chez les enfants de la communauté.
L’objectif de cette étude est donc d’évaluer l’évolution et les facteurs de risque de transport
d’entérobactéries E. Coli productrices de BLSE chez les enfants de 6 à 24 mois.
MÉTHODES
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
Entre octobre 2010 et juin 2015, 18 pédiatres français répartis dans trois régions (Ile de
France, Lorraine et Provence-Alpes-Côte d'Azur) ont participé à une étude prospective dans
laquelle un échantillon rectal a été prélevé chez des enfants âgés de 6 à 24 mois lors de bilans de
santé normaux ou d'une otite moyenne aiguë. Les critères d'exclusion comprenaient le traitement
par antibiotiques dans les 7 jours précédents et une maladie sous-jacente grave. Une fois le
consentement éclairé écrit obtenu, les parents ou tuteurs légaux étaient interrogés sur les
caractéristiques démographiques et les facteurs de risque de transmission de bactéries résistantes,
notamment l'utilisation de tout antibiotique (entre 7 jours et 3 mois avant l'inscription), la
modalité de fréquentation, la naissance prématurée ou l’accouchement par césarienne, toute
fratrie, hospitalisation antérieure (au cours des 6 derniers mois et depuis la naissance),
antécédents de voyage et zones géographiques visitées au cours des 6 derniers mois.
RÉSULTATS
De manière générale des E. coli producteurs de BLSE ont été retrouvés chez 98.6% des
participants. Parmi ces patients, 12 présentaient 2 souches différentes et 6 autres une souche d’E.
coli productrice de BLSE ainsi qu’une autre espèce d’entérobactérie. Seul 2 patients étaient
porteurs de souche Klebsiella pneumoniae producteur de BLSE. Ainsi, 162 BLSE-E ont pu être
isolés, incluant 154 E. coli. Parmi ces 162 isolats, 54.3% (trimethoprim/sulfamethoxazole) et 36.4%
(fluoroquinolones) présentaient une résistance, de même pour les aminoglycosides, la
gentamicine et l’amikacine. Cependant, toutes les souches étaient sensibles à l’imipenem ainsi
qu’à l’ertapenem.
Au total, 160 isolats de BLSE semblaient typables et la plupart d’entre eux présentaient le
type CTX-M (90%) (codé par le gène BLA). Parmi tous les isolats d’E. coli producteurs de BLSE,
123 possédaient au moins 1 gène de virulence, tel que les gènes iucC (61.5%) et fyuA (55.8%). Sur
l’analyse multivariée, les facteurs de risque associés à un portage de BLSE incluaient : les enfants
pris en charge à la maison ; l’utilisation récente d’antibiotiques ; des antécédents de voyages.
Un haut niveau de diversité génomique pour l’isolat 112 non-ST131 a pu être mis en
évidence. Le groupe clonal ST131 a pu être retrouvé dans 25.8% des isolats d’E. coli producteurs
de BLSE isolés entre 2010 et 2015 : le taux de ST131 est alors passé de 5% à 37%. Les groupes
clonaux CTX-M-1, 14, 15 et 27 constituaient les 4 variants majeurs parmi tous les ST131 isolés.
Parmi les souches ST131, le gène fyuA présentait la prévalence la plus élevée (100%), suivit de
près par le gène iucC (95%) ; les autres gènes ne représentaient en comparaison qu’un faible
pourcentage (< 15%).
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
DISCUSSIONS
En 2010, une étude suédoise a trouvé un taux de portage communautaire de 2.9% chez
des enfants en très bas âge (préscolaires). En 2012, une étude française a quant à elle rapporté un
taux 6.7%. Dans une étude réalisée la même année par l’équipe du Dr. BIRGY, le taux retrouvé est
similaire (6.9%). En 2014, une publication provenant du nord de l’Espagne a reporté un taux à
24% chez des enfants sains. Finalement, dans l’étude longitudinale ici présentée, une
augmentation graduelle du portage de BLSE-E, principalement due à E. Coli en communautaire, a
ainsi pu être confirmée.
Tel que l’avait prédit l’équipe, il a été observé qu’E.Coli constituait l’espèce
d’entérobactéries la plus prompte à présenter des gènes BSLE, gènes pour lesquels le type CTX-M
prédominait. Une grande diversité génomique a également pu être observée quant aux isolats
n’appartenant pas aux groupes clonaux ST131, démontrant ainsi clairement la virulence des BLSE,
et particulièrement celles des gènes CTX-M, parmi différents contextes génétiques. Dans leur
analyse globale, 3 facteurs significativement associés à une augmentation de la prévalence de
portage de BLSE-E ont été trouvés : un historique de voyage dans les 6 derniers mois ; une prise
en charge à domicile des enfants ; une utilisation d’antibiotiques dans les 3 derniers mois.
Quant à la prise en charge à domicile, l’hypothèse, concernant le fait que ce type d’enfant
présentait un pourcentage beaucoup plus élevé de portage de BLSE, serait que les enfants en
contact avec d’autres enfants pourraient augmenter leurs chances de renouvellement de la flore
intestinale par la diversité de contacts, et auraient ainsi une plus grande capacité d’échange de
leurs souches productrices de BLSE. Concernant l’utilisation des antibiotiques, la modification
majeure en terme de type d’antibiotique prescrit pourrait en partie expliquer la diminution dans
le portage de BLSE entre le période 2 et 3 (figure 4). Enfin, le portage de souches ST131, non
associé à l’usage d’antibiotiques et prédominant durant la dernière période, pourrait expliquer la
ré-ascendance du portage de souches productrices de BLSE.
Les E. Coli producteurs de BLSE pourraient par ailleurs être responsables d’infections. En
effet, à Taiwan, près de 65% des 111 isolats provenant d’infections des voies urinaires acquises
dans la communauté (chez des enfants) causées par des E. Coli producteurs de BLSE entre 2009
et 2012 étaient du groupe ST131. Ce taux était cependant de 33% dans une étude française. Dans
d’autres études, les souches ST131 présentaient de nombreux facteurs de virulence ; en particulier,
aucune souche ne contenait l'adhésine PapGII. Cette adhésine est cependant rare dans d'autres E.
coli producteurs de BLSE et pourrait ainsi expliquer pourquoi les infections des voies urinaires
dues à E. coli producteurs de BLSE sont encore rares chez les enfants sans anomalie du tractus
urinaire.
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
Cette étude comporte cependant quelques limitations. En effet, les pays concernés par les
voyages ont été regroupés pour avoir un nombre important d'enfants dans chaque groupe,
diminuant ainsi l'information individuelle pour les pays considérés. De plus, seuls ont été inclus
dans cette étude les enfants âgés de 6 à 24 mois et aucun échantillon n'a été prélevé sur d'autres
membres de la famille. Enfin, l'échantillonnage impliquait un prélèvement rectal, ne permettant
ainsi que la détection du clone dominant et, de ce fait, certains clones minoritaires ont pu être
manqués.
CONCLUSION
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
Recherche FONDAMENTAL
Dr Zineb Sbihi, PhD
Chercheuse Post-Doctoral, Imagine Institute of Genetic Diseases
La maladie de Castleman est une maladie lymphoproliférative rare associée à une hyperplasie des
ganglions et de la rate. Elle peut concerner un unique ganglion lymphatique, on parle alors de
maladie de Castleman unicentrique ou plusieurs, la forme est alors plus sévère et on parle de
maladie multicentrique. Cette dernière se développe chez les patients infectés par le virus de
l’herpes humain HHV-8. Ce virus est lui même associé au sarcome de Kaposi, à l’origine de
tumeurs cutanées, chez les patients atteints du VIH. L’analyse du profil d’expression génétique
des LB infectés par le virus HHV-8 chez ces malades permettrait de caractériser l’origine de la
maladie immunitaire.
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
LANA (Latency Associated Nuclear Antigen) ce qui a permis d’isoler la population infectée.
Figure A: Pourcentage d’expression de l’antigène viral LANA, des IgM et de la chaine légère λ dans les
cellules du sang et de la rate de malades.
Figure C: Expression de différents marqueurs dans les cellules B infectées, mémoires et naïves.
Cela à montré que les cellules B infectées HHV-8 sont IgM+, λ +, CD40-, CD20-,
CD19low, CD27+/-, Ki67+, CD38high, CD138-, permettant ainsi d’isoler 90% de cellules LANA+.
Cependant, pour effectuer une cytométrie en flux grâce à LANA, il faut perméabiliser la
membrane cytoplasmique et nucléaire, ce qui dégrade l’ARN à cause de l’ARNase présente dans
le milieu. Or, l’ARN est nécessaire pour effectuer une analyse du transcriptome.
Apres avoir réalisé ce tri, l’ARN a été extrait de ces cellules afin d’effectuer une analyse
transcriptomique des lymphocytes B infectés, marginaux et mémoires sur la base de 48000 gènes.
L’analyse à montré que les celles LANA+ sont significativement différentes du pool de cellules
PBMCs (circulant dans le sang) et des autres sous populations de lymphocytes B comme on peut
le voir sur la figure D.
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
Il apparait que les cellules LANA+ sont très différentes, une liste de gènes a été dressée pour
mettre en évidence les differences génétiques entres les trois sous-populations des LB, c’est-à-dire
infectés, marginaux et mémoires.
Figure E: Analyse transcriptomique des gènes des 3 sous-populations. Sur exprimé en rouge et sous exprimé
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
en bleu.
Cette analyse a montré quels gènes étaient sur- ou sous- exprimés dans les cellules B infectées. Les
gènes sous-exprimés sont les gènes du système immunitaire, permettant à la cellule d’y échapper,
au contraire les gènes sur-exprimés sont ceux permettant la prolifération.
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
Dr Asma Beldi Ferchiou a suivi une formation médicale en tant que médecin biologiste.
Après son internat, elle a commencé à travailler sur une thèse de science, en immunologie, qu'elle
a validé en 2014.
Actuellement, elle est Assistante Hospitalo-Universitaire, elle alterne entre médecine,
recherche et enseignement en immunologie, à l'hôpital Henri Mondor.
PD-1 (Programmed Death-1) est un récepteur inhibiteur que l’on savait exprimé par les
lymphocytes B et T activés, et impliqué dans leur autorégulation naturelle. Ce récepteur et ses
ligands sont exploités par certains cancers pour faciliter la survie des tumeurs, en provoquant
l’épuisement fonctionnel de lymphocytes, qui ne peuvent alors plus éliminer les cellules
tumorales.
Cette étude réalisée sur quatre ans a pour but d’étudier la régulation de cellules NK par la
molécule PD-1, dans les cas de sarcomes de Kaposi (tumeurs cutanées liées à l’infection du virus
HHV8, souvent développées par les individus immunodéprimés).
Il a été constaté que PD-1 était surexprimé sur les cellules NK, dans certains cancers, sans
explication connue, et c’est ce que l’équipe de recherche a voulu montrer et étudier. Ils ont
analysé les marqueurs des cellules NK dans le cas de sarcome de Kaposi, grâce à
l’immunohistochimie, et ont remarqué que la surexpression de PD-1 était associée à une
sous-population de cellules NK présentant le marqueur CD56 de façon diminué. Ils ont étudié les
fonctions de ces cellules, avec notamment leur capacité à libérer leur interféron gamma, et ont pu
montrer que PD-1 était un marqueur de leur déficience fonctionnelle. Ils ont même pu, in vitro,
transduire PD-1 à des cellules NK témoins, et reproduire cette perte de fonction, ce qui mime
l’effet de la stimulation exercée par les cellules tumorales in vivo.
PD-1 a donc été montré comme jouant un rôle critique dans la médiation des cellules NK,
jusqu’à leur épuisement. Ainsi, la manipulation des fonctions de PD-1 pourrait être une stratégie
pour contourner les effets des cellules tumorales sur les cellules NK, et non plus seulement des
lymphocytes T.
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Article : Le pouvoir aux marges : les femmes qui vivent avec le VIH, entre marginalité et
mobilité sociale
Carolina De Rosis
INTRODUCTION
Le sida est apparu en tant que phénomène morbide inconnu au cours des années 1980 aux
États-Unis et dans d’autres pays occidentaux (dont la France) où il fut d’abord considéré comme
une maladie typiquement masculine affectant majoritairement les homosexuels. Cette hypothèse
pourtant erronée, formulée par la biomédecine a contribué à la fois à négliger les femmes en tant
que sujets exposés à cette maladie et de la sorte à rendre invisibles celles atteintes. Ainsi, alors que
des diagnostics de sida sont progressivement posés pour des femmes au courant des années 1980,
deux catégories épidémiologiques sont rapidement construites celle des prostituées et des femmes
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
enceintes. Les femmes sont alors regardées davantage comme des vecteurs de l’infection que des
malades à part entière. En revanche, la féminisation du sida dans les années 90 plus spécialement
dans les pays de l’Afrique subsaharienne, où on peut par ailleurs observer des épidémies
généralisées de VIH/sida, a induit l’introduction d’un nouveau paradigme épidémiologique, à
savoir la vulnérabilité des femmes.
En ce qui concerne l’Éthiopie, le taux de prévalence du VIH est plus élevé parmi les
femmes que parmi les hommes. En 2005, les enquêtes sérologiques menées dans les centres de
consultation prénatale en Éthiopie estimaient que, sur 1,32 million de personnes vivant avec le
VIH, 730 000 (55 %) étaient des femmes. Durant la même année, les femmes représentaient
également 54,5 % des décès dus au sida (99 814) et 53,2 % des nouvelles infections. Cette situation
est similaire à la plupart des pays de l’Afrique subsaharienne.
Hormis le fait que les femmes soient moins nombreuses que les hommes à avoir recours
au test de dépistage volontaire, elles peuvent néanmoins bénéficier d’occasions de dépistage
auxquelles les hommes n’ont pas nécessairement accès, par exemple à travers les programmes de
prévention de transmission mère-enfant (PTME). En outre, à l’instar d’autres pays de l’Afrique
subsaharienne, en Éthiopie les femmes séropositives sont également proportionnellement plus
nombreuses que les hommes parmi les usagers de divers programmes sociosanitaires de
prévention du VIH et de prise en charge des malades. Plus précisément en Éthiopie les usagers de
ces programmes sont presque exclusivement des patient-e-s exposé-e-s à différentes formes de
privation économique et de désaffiliation sociale.
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
MÉTHODOLOGIE
De novembre 2007 à 2010, l’auteure a mené des enquêtes ethnographiques à Gondär, ville
située au nord-ouest de l’Éthiopie, sur les formes de prises en charge du VIH/Sida destinées aux
femmes séropositives. Il s’agissait d’observations au sein du North Gondar University Hospital,
mais aussi dans des Centres de soins d’Arada et Azazo, et dans deux associations de personnes
vivant avec le VIH (PVVIH). Ces femmes faisaient notamment parties du programme de soins
palliatifs et de prise en charge de PVVIH mis en œuvre par des associations locales d’entraide
sous l’égide de Family Health International-Ethiopia.
Au total, 50 femmes ont été interviewées. Elles ont été recrutées par le biais de personnes
intermédiaires. Les critères d’inclusions étaient la connaissance de la séropositivité, être volontaire
et avoir entre 18 et 40 ans. Ces femmes recevaient les informations sur l’étude ; la confidentialité
et l’anonymat étaient garantis via un système de codage de leur prénom.
RÉSULTATS
En Éthiopie, l’accès gratuit aux antiviraux en 2005 a eu un impact significatif sur les
personnes vivants avec le VIH et sur l’accès aux formes de préventions secondaires. Les femmes
sont plus touchées par l’épidémie que les hommes mais bien que ces derniers soient plus
nombreux à effectuer un test dans les centres de dépistages volontaires, les femmes dépistées sont
au total plus nombreuses en raison de la proposition du test du VIH comme test de routine au
cours de la grossesse. D’autre part, bien que les hommes aient eu initialement un accès plus facile
aux antiviraux que les femmes, cela tend à changer depuis l’apparition du PEPFAR et du Fonds
Mondial, c’est-à-dire à partir du moment où les médicaments sont devenus gratuits. Cette forme
d’inégalité de genre par rapport à l’accès aux soins et à la prévention secondaire est en lien avec
l’accès discriminatoire des femmes dans le monde du travail. En effet, la plupart d’entre-elles
travaillent dans le secteur informel qui n’est ni rentable, ni ne leur offre de protection sociale.
Au sein de ces associations, les membres ont alors pour missions d’informer et de
sensibiliser sur la maladie, dont la stratégie est essentiellement basée sur des témoignages publics
des malades. Elles offrent également des programmes de soutien psychosocial, destinés aux
orphelins ainsi qu’aux enfants vulnérables nés de parents vivant avec le VIH. Enfin, elles
proposent des programmes dits d’« aide alimentaire » qui ont pour objet de promouvoir
l’autonomie économique des patientes et des patients grâce à la distribution de microcrédits
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
facilitant la gestion d’activités lucratives ou grâce à leur participation à des projets de production
agricole.
Cependant, cette participation active des femmes séropositives a révélé une contradiction
et une rupture avec les images convenues de femmes vulnérables. En effet, il est apparu que ces
femmes prenaient des risques, faisant apparaître un phénomène de mobilité interne de la zone
rurale vers la zone urbaine à dominante féminine. Il s’agit dans la plupart des cas de jeunes
femmes adultes séparées ou veuves, ou encore de jeunes adolescentes qui se séparent de leur
famille paternelle et vont vers les villes dans l’espoir d’une vie meilleure. Les femmes atteintes par
le VIH/sida ont progressivement acquis une « légitimité » dans l’accès aux soins et à des formes
matérielles et symboliques de bien social. Dans la plupart des cas, c’est le personnel soignant de
l’hôpital et des centres de soin qui orientent les patients et les patientes en difficulté vers les
associations. Ces personnes sont alors munies d’un document, le PLWHIV Referal Format,
attestant leur condition de grave précarité économique, voire d’indigence, qui les autorise à
bénéficier de différentes formes d’aide et d’un soutien psychosocial. D’autre part, les politiques
sociales ont pour cible principale les femmes du fait de leur rôle social de mère.
CONCLUSION
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
sentiment de confiance personnelle, voire d’estime de soi qui provient du « pouvoir solidaire »
émanant des réseaux de relations qu’elles ont créés au sein du contexte de la lutte contre le sida.
DISCUSSIONS
Pour les femmes interviewées, dont les récits de vie ont mis en avant tant les conditions
de pauvreté matérielle que l’infériorité sociale subie et la faiblesse des liens sociaux, l’émergence
du VIH a représenté tout d’abord un facteur aggravant leur situation de précarité et de
marginalité sociale. Et cela, pour des raisons de différents ordres, allant de la manifestation de
maladies opportunistes fort débilitantes, qui ont eu comme conséquence l’interruption de leur
activité lucrative, jusqu’à la perte ou à la séparation de leur propre conjoint. Toutefois, loin d’être
vécu exclusivement comme un problème de santé, pour les femmes socialement défavorisées le
VIH s’appréhende comme un facteur de mobilité sociale biographique. Il participe en effet à leur
mobilité occupationnelle et économique, tout en transformant le rapport social institué de ces
femmes avec leur milieu d’origine.
L’insertion sociale de 43 femmes (sur 50) a été permise soit grâce à la participation au projet de
production agricole mis en place dans Fərehəywät, soit grâce à la distribution de microcrédits
pour démarrer ou bien rendre plus rentables des activités lucratives telles que la filature du coton,
la fabrication et la vente de boissons locales ou l’élevage de poules. Dans les cas étudiés, ces
activités n’ont pas engendré d’ascension sociale. Celle-ci semble dépendre d’un ensemble de
facteurs et de circonstances, plus particulièrement des compétences effectives et du niveau de
scolarité des individus.
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
Article : Les demandeurs de l’aide médicale d’État pris entre productivisme et gestion spécifique
Céline Gabarro
INTRODUCTION
Dans une volonté des autorités françaises de garantir le principe de marché commun et de
libre circulation dans l’espace Schengen, et de protéger non seulement les travailleurs et leurs
ayant droit, mais également l’ensemble des résidents en France contre les risques maladie, en
2000 sont créées la couverture médicale universelle (CMU) et son complément l’aide médicale
d’État (AME). Si la CMU est destinée aux résidants en situation régulière, l’AME est quant à elle
réservée aux personnes en situation irrégulière.
La création de l’AME a été une « avancée sociale » en tant que modèle social vis-à-vis des autres
pays européens. Cependant, certains la jugent régressive et discriminatoire, dans la mesure où elle
réserve un traitement à part aux personnes en situation irrégulière. L’accès à une couverture
maladie se fait donc sur critère juridico-administratif, conférant ainsi des droits différents et des
traitements différenciés. Ceci aboutit à l’existence d’un système de santé à plusieurs vitesses.
Bien qu’à ses origines l’AME tendait à améliorer la situation des personnes en situation
irrégulière en prenant en charge des personnes résidant en France quelle que soit leur nationalité
ou leur statut administratif, elle fait depuis sa création l’objet de débats politiques et médiatiques.
En effet, en plus de son coût - puisque les étrangers ne participent pas au système de cotisations
sociales - ce modèle social trop « généreux » causerait des risques de voir apparaître un «
tourisme médical ».
Les multiples réformes sur les conditions d’accès à une couverture médicale ont eu pour
conséquence l’exclusion de la CMU des étrangers en situation irrégulière depuis moins de 3 mois.
Ces derniers dépendent donc de l’AME qui deviendra en 2004 « la couverture maladie des
personnes en situation irrégulière ». De plus, l’accès à l’AME est aujourd’hui triplement
conditionné : condition de ressources (ne pas dépasser un certain plafond), condition de
résidence (vivre en France de façon stable et ininterrompue depuis plus de trois mois) et
paiement d’un droit d’entrée annuel de trente euros (qui était avant 2010 gratuite).
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
Ainsi, l’AME correspond à une prestation d’assistance tandis que la CMU dépend de l’assurance
maladie. Il s’agit d’une différence entre assistance et assurance qui se traduit par des droits et une
reconnaissance différentes entre les bénéficiaires.
La CMU et l’AME sont censées garantir un accès aux soins pour tous. Or, dans cet article,
l’auteure tente de mettre en lumière le parcours mené par les personnes en situation irrégulière
dans l’accès à l’AME entre le traitement différencié et la gestion productiviste des agents des
caisses d’assurance maladie. L’étude porte sur trois « champs » dans lesquels la spécificité de
l’AME peut avoir des effets concrets en termes d’accès aux soins : le droit et son interprétation,
l’organisation des caisses d’assurance maladie, et enfin les pratiques des agents de ces caisses.
MÉTHODOLOGIE
L’enquête a été menée au sein de deux caisses primaires d’assurance maladie (CPAM) où
sont instruites les demandes : la Caisse des champs et la Caisse des Lys. Chacune des deux caisses
gèrent l’assurance maladie dans un département comptant une population précaire nombreuse et
un taux important de bénéficiaires de la CMU et de l’AME.
Au sein de la CPAM des Champs, l’observation s’est faite pendant près d’une année dans
trois services différents. Les trois premiers mois ont été réalisés dans le service de la
réglementation CMU-AME où les agents retranscrivent les réglementations nationales sous forme
de notes internes destinées aux agents. Les six mois suivants ont eu lieu dans le service de l’AME
au sein d’une équipe d’agents - les « gestionnaires de dossiers » - formés à l’instruction des
dossiers d’AME. Enfin, durant un mois et demi, il s’agissait d’observer au sein de trois centres
d’accueil, l’accueil des demandeurs de l’AME par des agents d’accueil – les « gestionnaires de
clientèle » - qui vérifient également la constitution des dossiers lors des « entretiens AME ». Ces
dossiers sont par la suite transmis au service central de l’AME.
A contrario, l’enquête auprès de la CPAM des Lys s’est limitée à l’accueil de l’AME, avec
pour objectif d’accompagner les demandeurs dans les permanences de l’assurance maladie situées
dans les hôpitaux. Bien que cette enquête soit moins conséquente que celle menée auprès de la
CPAM des Champs, la proximité avec les demandeurs a permis de les questionner et d’échanger
avec eux.
RÉSULTATS
Les CPAM fonctionnent comme des organismes autonomes, libre dans leur organisation
et du type d’usagers reçus. Le processus de traitements des demandes varie dont selon la
localisation. Cela se traduit par une distinction légale dans l’accueil entre les bénéficiaires de la
CMU (guichet avec les autres assurés sociaux) ou de l’AME (guichet spécifique). Les demandeurs
de l’AME peuvent s’informer dans les centres d’accueil standard, mais les agents de ces centres ne
sont pas formés à l’AME, et ne peuvent donc pas les renseigner. L’AME étant différente de la
CMU, les demandeurs n’ont pas à répondre aux mêmes conditions ou à fournir les mêmes pièces.
D’autre part, en raison d’une politique d’embauche qui ne prévoit pas le remplacement des
départs à la retraite, l’accueil du public de l’AME est réduit, ce qui conduit les demandeurs à
attendre plusieurs heures avant d’être reçus et certains vont faire la queue tôt le matin à
l’extérieur des centres, attendant leur ouverture. Il faut parfois attendre un mois pour obtenir un
rendez-vous, entrainant un retard aux soins. Certains demandeurs vont envoyer leur dossier
eux-mêmes par la poste au service AME, mais au risque de le voir retourné ou refusé, parce que
mal rempli. A cela s’ajoute la barrière de la langue, qui peut retarder les démarches de demandes
d’AME.
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
En outre, les impératifs managériaux se répercutent sur les demandeurs de l’AME. Dès
leur arrivée en centre d’accueil, les temps d’attente et de réception des usagers sont chronométrés.
Ces temps chronométrés permettent à la CPAM d’obtenir et de conserver sa norme qualité,
d’évaluer ses différents centres d’accueil et d’accorder des primes et des promotions à leurs
salariés. Les agents doivent par conséquent respecter les temps d’attente et de réception propres à
chaque catégorie d’accueil. Ainsi, le temps de réception ne doit pas dépasser trois minutes au
pré-accueil, vingt minutes en deuxième niveau, trente minutes en rendez-vous et en entretien
AME. En cas de dépassement du temps imparti ou en cas d’erreurs dans les dossiers traités, les
cadres de l’accueil – qui sont également notés en fonction des résultats de leurs agents - les
comptabilisent pour l’évaluation annuelle des agents. Ainsi, plutôt que de courir le risque
d’envoyer un mauvais dossier et d’être sanctionnés, les gestionnaires de clientèle vont exiger du
demandeur la production d’un maximum de documents qui ne conditionnent pourtant pas
l’obtention de l’AME. La plupart du temps, le demandeur doit revenir, allongeant le délai
d’obtention de l’AME (parfois de 6 mois).
Par ailleurs, la pression managériale à laquelle sont soumis les agents chargés de l’accueil affecte
leurs rapports aux bénéficiaires. Pour tenir les temps d’attente et de réception, par lesquels ils sont
évalués, les agents doivent parfois sacrifier les considérations de politesse ou d’aide sociale.
L’existence de deux prestations distinctes multiplie ainsi les procédures, les services, les
structures et accroît le travail des gestionnaires de clientèle. Lors de leur formation, les agents
acquièrent une somme de connaissances techniques et juridiques, mais très peu concernant
l’AME. En 2010, à la CPAM des Champs, la formation au métier de gestionnaire de clientèle est
de deux mois, comprenant à la fois des cours et des temps d’immersion sur le terrain. Une seule
journée est consacrée à la présentation de la CMU et de l’AME. Les connaissances à acquérir sont
très denses, d’autant que les règles de droit ne cessent d’évoluer et les modalités de
remboursement d’être réformées. Les agents sont alors informés des réformes par les notes
d’instruction qu’ils reçoivent via Intranet. Mais le manque de temps et de connaissances pour les
maîtriser relèvent d’un vrai travail d’interprétation. Ceci a pour conséquence la multiplication
d’erreurs dans le traitement des dossiers et donnent lieu à des pratiques variables selon les
gestionnaires de clientèle. Ainsi certains vont réclamer aux demandeurs des papiers non requit
pour le dossier.
CONCLUSION
La distinction entre l’AME et la CMU entraîne de nombreuses difficultés pour les
demandeurs de l’AME. Maintenues à la marge du système, devant se rendre dans des locaux
spécifiques, dépendant de procédures particulières, ces personnes se retrouvent confrontées à un
véritable parcours du combattant. Cette course d’obstacles à l’obtention de l’AME est aggravée
par la mise en place de nouvelles normes de management au sein des caisses d’assurance maladie.
Face aux exigences de productivité évaluée à partir d’indicateurs quantitatifs biaisés, les
responsables et agents des caisses d’assurance maladie mettent en place des stratégies pour
pouvoir traiter toujours plus de dossiers, toujours plus vite. La politique managériale du service
AME se combine avec les errances administratives générées par les hésitations ou décisions
malencontreuses dans les accueils des caisses, pour produire des refus et des retours en nombre,
retardant l’accès aux soins.
DISCUSSIONS
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
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Jeune colloque de la recherche - 5/03/18
COMITÉ
COMITE SCIENTIFIQUE
- RECHERCHE CLINIQUE
- RECHERCHE FONDAMENTALE
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