Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Projet Tuteuré
Anne-Laure MATRAS, Valérie IVASSENKO, Chloé VÉRITÉ
Un grand merci à Mme BUDEANOU, monitrice-éducatrice au CADA qui nous a apporté des
éléments importants pour la compréhension et l’entrée en relation avec notre public, pour son
implication et sa contribution dans la conception de notre projet.
Sans public, il ne peut y avoir de projet, aussi nous remercions les enfants et les parents en demande
d’asile pour leur sympathie et leur engagement.
Enfin, nous adressons un remerciement particulier à notre tutrice, Madame Bertrand, pour son
accompagnement dans la réalisation de notre projet, sa bienveillance et ainsi que pour ses conseils.
SOMMAIRE
I- INTRODUCTION ........................................................................................................................ 1
II- APPROCHE THÉORIQUE ET DÉFINITION DU PROJET ...................................................... 2
1. Méthodologie ............................................................................................................................ 2
2. Quand santé globale et précarité s’intègrent à la sphère bucco-dentaire .................................. 2
3. Qu’est-ce qu’être demandeur d’asile en France ? ..................................................................... 3
4. La situation d’interculturalité .................................................................................................... 4
III- PRÉSENTATION DES RÉSULTATS DU RECUEIL DE DONNÉES .................................. 5
1. Diagnostic de territoire.............................................................................................................. 5
2. Rencontre avec les professionnels ............................................................................................ 5
3. Rencontre avec le public ........................................................................................................... 6
4. Mise en lumière des leviers d’actions ....................................................................................... 7
IV- CONCEPTION ET RÉALISATION DU PROJET .................................................................. 8
1. Objectifs et planification ........................................................................................................... 8
2. Justification des choix d’outils................................................................................................ 10
3. Analyse et évaluation de l’action ............................................................................................ 12
CONCLUSION .................................................................................................................................. 15
BIBLIOGRAPHIE .................................................................................................................................
ANNEXES .............................................................................................................................................
I- INTRODUCTION
Au cours des dernières décennies, la santé bucco-dentaire en France s’est nettement améliorée. La
mise en œuvre en 2007 des visites sans avance de frais chez un chirurgien-dentiste, avec le
programme MT Dents de l’assurance maladie, contribue à cette évolution favorable. Ce programme
permet aux enfants à partir de 6 ans, puis tous les 3 ans, de bénéficier d’un rendez-vous chez un
professionnel et des soins qui suivent, si nécessaire. Ainsi en 2015, 68% des élèves de CM2 n’ont
aucune carie, alors qu’ils étaient 60% en 2008 (Guignon, 2017). La mise en place d’un tel programme
de prévention vise à assurer à chacun un accès et droit à la santé et à réduire de surcroît les inégalités
sociales de santé.
Or malgré cette tendance favorable, de réelles inégalités persistent. Quel que soit l’âge des enfants,
la santé bucco-dentaire reste le miroir de disparités entre les différents milieux sociaux. Ainsi, les
enfants d’ouvriers présentent plus fréquemment des caries que les enfants de cadres. On peut alors
s’interroger sur la persistance d’inégalités sociales de santé dans un pays où 98% de la population est
couvert par l’assurance maladie et peut donc, en théorie, avoir égalitairement accès au système de
soins. Il faut alors aller voir du côté de l’environnement des populations : l’alimentation, le niveau de
diplôme, le revenu moyen, le territoire, l’offre de soins sont autant de déterminants à prendre en
compte pour comprendre une problématique de santé. Ainsi les populations les plus défavorisées font
plus de place au sucre dans leur alimentation, ont recours aux soins dentaires plus souvent en cas
d’urgence que de prévention, sont parfois contraints de renoncer aux soins faute de moyens financiers.
Dans le cadre de notre projet tuteuré, nous avons décidé de travailler sur la santé bucco-dentaire et la
précarité, en ciblant un public précis : les demandeurs d’asile. Dans un contexte, où le nombre de
demande d’asile augmente depuis 10 ans, il est intéressant de se questionner sur l’état de santé d’une
population fragilisée par l’exil, une situation administrative complexe, des conditions de vie précaires.
La barrière de la langue, le poids d’un quotidien qui relègue parfois les problématiques médicales au
second plan car jugée non prioritaires, la dimension culturelle des pratiques en matière de santé, sont
autant de freins pour accéder aux soins dentaires et aux messages de prévention. Nous avons donc
étudié et mis en œuvre une action de promotion de la santé visant à permettre aux enfants issus de
familles demandeuses d’asile d’améliorer leur santé bucco-dentaire malgré les différents obstacles
auxquels ils peuvent être confrontés.
Nous avons centré notre action sur un établissement particulier, le CADA de l’association CeCler à
Royat (Annexe I) Cette localisation de notre action sur une structure particulière s’est en effet avérée
nécessaire : elle nous permettrait de pouvoir apprécier avec davantage de finesse les différents enjeux
mobilisés autour de cette thématique de santé (diagnostic), de prendre appui sur les ressources
existantes au sein de la structure (humaines, matérielles, organisationnelles), de privilégier une
approche qui soit la plus participative possible et ainsi de concevoir un projet qui soit le plus adapté
aux besoins du public concerné. Partant de cette approche précise et localisée, le but ultime de notre
action serait de pouvoir ensuite être transférable à des établissements similaires.
Dans une première partie, nous commencerons par présenter notre approche théorique, dans le but de
préciser ce qu’est la santé bucco-dentaire et en nous interrogeant sur ses liens avec la précarité. Nous
étudierons ensuite ce que veut dire être demandeur d’asile en France en 2018. Enfin, nous nous
questionnerons sur la prise en compte de l’interculturalité en promotion de la santé. Dans un second
temps, nous détaillerons notre démarche de projet en expliquant d’abord la construction de notre
diagnostic, puis la conception de notre séance d’éducation à la santé. Nous présenterons enfin
l’analyse de notre intervention : ce que nous attendions, ce qui s’est effectivement passé et ce que
nous en avons retiré.
1
II- APPROCHE THÉORIQUE ET DÉFINITION DU PROJET
1. Méthodologie
Afin de préciser les enjeux de notre sujet, nous avons tout d’abord effectué des recherches
documentaires. Notre action mobilise différentes problématiques qu’il a été nécessaire d’éclaircir tels
la santé bucco-dentaire, la parentalité ou encore les données probantes en terme de promotion de la
santé. Nous avons jugé pertinent que chacune investigue la littérature afin de recueillir une base de
données répertoriant des informations complémentaires. Ce projet se situant à la croisée de nos
compétences respectives, nous avons été vigilantes à nous situer dans une démarche de co-
construction et non pas simplement de superposition de savoirs. L’ensemble des ressources
bibliographiques sont issues de sources fiables. Nous avons attaché une attention particulière à la
provenance de nos références numériques (Google Scholar, Science Directe, Cairn) ou
professionnels. Nous avons par la suite mutualisé les éléments recueillis via l’outil collaboratif «
Zotero » dans le but de centraliser les apports. L’ensemble de nos lectures nous a conforté dans la
réalisation de ce projet.
La santé bucco-dentaire ne se limite pas à l’hygiène bucco-dentaire. C’est pourquoi, notre projet a
pour vocation de promouvoir la santé bucco-dentaire auprès des familles en demande d’asile. Il a
donc été important de bien distinguer ces deux notions. L’hygiène bucco-dentaire correspond à l’acte
du brossage des dents, contrairement à la santé bucco-dentaire qui s’inscrit dans un concept plus large.
En effet, elle se définit par une alimentation équilibrée avec une attention particulière au sucre, un
brossage de dents quotidien avec du matériel adapté (dentifrice fluoré) ainsi que des contrôles
fréquents chez le dentiste. (UFSBD & INPES, 2007).
A travers nos lectures, nous avons constaté que la santé bucco-dentaire était souvent négligée car
considérée comme moins importante que la santé globale. L’enquête « La santé bucco-dentaire des
français : des pratiques variée et perfectibles » indique que près de 50% des français interrogés ne
connaissent pas le lien entre santé bucco-dentaire et santé globale. (UFSBD & Pierre FABRE, 2017).
Or les données probantes donnent à voir le lien très étroit entre ces deux aspects. La cavité buccale
permet de mastiquer donc de favoriser la digestion, de s’exprimer ou encore de
respirer. La bouche ayant un rôle d’interface entre l’extérieur et l’intérieur de l’organisme, constitue
une barrière de protection. Dès lors qu’elle est endommagée, donc enclin à des infections, la santé
générale est en péril (INPES, 2012). De plus, outre l’impact physique, la santé bucco-dentaire
influence notre bien-être psychologique et social. Une mauvaise hygiène bucco-dentaire pourra
constituer un frein aux relations sociales professionnelles ou/et privées.
Pour être saisies dans toute leur complexité, les problématiques de santé appellent une approche et
un regard pluridisciplinaires. C’est pourquoi, il est fondamental d’impliquer les professionnels dans
et en dehors du système de santé. Les professionnels de la sphère sociale ont donc un rôle important
à jouer dans la promotion de la santé bucco-dentaire. Aussi, leur intégration au cœur de notre projet
est incontournable. En raison, notamment, de leur connaissance précise des populations fragiles et
donc des inégalités sociales de santé.
Ces dernières s’installent dès le plus jeune âge et le constat est identique vis-à-vis de la santé bucco-
dentaire. En effet, il ressort de nos recherches bibliographiques que la santé bucco-dentaire est un
2
marqueur privilégié des inégalités sociales, qui rend nécessaire de développer des actions spécifiques
en direction des populations les plus fragiles. Dans sa contribution à la Stratégie Nationale de Santé,
l’UFSBD pointe du doigt le fait que « les enfants des catégories sociales les plus défavorisées sont
plus nombreux à souffrir d’une mauvaise hygiène bucco-dentaire et des pathologies qui en résultent
». (UFSBD, 2014).
De plus, « 20% des enfants amassent 72% des pathologies dentaires », d’où la nécessité absolue de
maintenir des actions de prévention auprès des enfants et des adolescents en situation de précarité.
(UFSBD, s. d.). Ces lectures ont conforté la nécessité d’agir auprès du jeune public.
Malgré l’instauration de la Couverture Maladie Universelle (CMU) en 2000, la France est l’un des
pays européens où les inégalités de recours aux soins sont les plus fortes, notamment en termes de
recours aux soins de spécialistes ou préventifs. (Jusot, 2013). Notre public bien que bénéficiaire de la
CMUC ou en attente de l’obtenir, échappe donc aux dispositifs de prévention existants et qui sont
peu ou non adaptés. En effet, il faut prendre en considération la barrière de la langue ainsi que l’aspect
culturel. Les populations les plus fragiles sont donc les moins prises en compte alors que leurs besoins
sont grands.
Il existe une double complexité à ce phénomène. Les messages préventifs ne sont pas entendus et le
public lui-même ne considère pas la santé bucco-dentaire comme une priorité. Alors comment faire
la promotion de la santé bucco-dentaire auprès d’un public en grandes difficultés sociales et ayant
d’autres priorités ? L’une des solutions définies est de rencontrer
directement le public sur son lieu de vie. (UFSBD, 2014). L’objectif étant de rendre accessible les
informations clé et d’aider les populations en leur donnant les moyens d’être acteur de leur santé.
Dans le langage courant, on utilise le terme de “réfugié” sans forcément de distinction entre les
situations singulières de chaque catégorie de migrants. Il est important de différencier un réfugié d’un
demandeur d’asile, car la réalité sociale de ces statuts n’est pas la même. Selon la convention de
Genève du 28 Juillet 1951, le statut de réfugié est délivré à toute personne qui « craignant avec raison
d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain
groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne
peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays». Un demandeur
d’asile est une personne qui s’inscrit dans une procédure administrative visant à obtenir son statut de
réfugié.
A son arrivée en France, l’étranger souhaitant déposer une demande d’asile entame un réel parcours
du combattant. La procédure de demande d’asile (Annexe II) est rigoureusement cadrée, rythmée par
des délais stricts de dépôt de dossier, suspendue à des convocations auprès d’organismes organisant
l’asile sur le sol français. Durant cette procédure, le demandeur d’asile vit dans l’attente et dans la
crainte d’une décision qui va déterminer son avenir. De plus, le statut de demandeur d’asile relève
plus de l’exil que de la migration choisie. Du jour au lendemain, il quitte une vie, un statut social et
est projeté dans une précarité importante accompagnée d’un lourd questionnement identitaire.
Situation qu’il s’impose pour sa protection et celle de sa famille. Le voyage jusqu’en France, les
traumatismes subis dans leur pays, le déclassement social, la violence d’une réelle précarité
identitaire, fait des demandeurs d’asile un public particulièrement fragile.
3
Durant la période d’instruction de sa demande, le demandeur bénéficie des conditions matérielles
d’accueil de l’Office Français d’Intégration et d’Immigration (OFII), c’est à dire un logement, en
Centre d’Accueil de Demandeur d’Asile (CADA) par exemple, et une allocation mensuelle appelée
Allocation de demandeur d’asile. Dans les faits, tous les demandeurs d’asile ne peuvent être logés car
le dispositif national d’accueil est insuffisant. Après 3 mois de résidence en France, les demandeurs
d’asile peuvent bénéficier de la Couverture Maladie Universelle Complémentaire (CMUC), afin
d’avoir un accès facilité aux soins. L’accès au marché du travail reste restreint. Selon la loi, un
demandeur d’asile qui a déposé son dossier depuis plus de 9 mois, peut obtenir une autorisation de
travail auprès de la Préfecture sous réserve d’une promesse d’embauche et si l’emploi est dans un
secteur manquant de main d’œuvre. En réalité, une poignée de demandeurs d'asile obtient cette
autorisation. S’installe donc pour le demandeur d’asile une certaine dépendance aux aides financières
versées par l’état et aux aides ponctuelles des associations (vestimentaires, alimentaires). Le
demandeur d’asile a le désir de pouvoir s’insérer dans la société qui l’accueille, mais ne peut subvenir
à ses besoins et ne peut avoir son propre logement. Parallèlement, il est dans l’obligation de scolariser
ses enfants, qui vont eux se confronter à la société française, en apprenant rapidement la langue, en
découvrant la culture qui y circule.
Ainsi un accompagnement est nécessaire pour les demandeurs d’asile. Or, ils ne bénéficient pas tous
de la même prise en charge, en fonction de leur hébergement : CADA, HUDA, hébergements
d’urgence… Les demandeurs d’asile accueillis en CADA peuvent prétendre à un accompagnement
global (Guillard, 2017). Pouvoir bénéficier d’une place en CADA permet de se familiariser avec la
société française à divers niveaux : vie administrative, santé, école... De plus, des cours de français
sont dispensés, permettant ainsi de faire un pas de plus vers l’autonomie et l’adaptation à la vie dans
un nouveau pays.
4. La situation d’interculturalité
La dimension interculturelle vient se rajouter aux problématiques sociales dans le cas des familles en
demande d’asile, rendant nécessaire une prise en compte attentive de leurs besoins, fragilités
spécifiques et contexte de vie.
Il nous a donc paru essentiel d’interroger la littérature afin d’explorer comment la situation
d'interculturalité pouvait être prise en compte dans un projet de promotion de la santé. En effet, la
barrière de la langue et les écarts culturels sont autant d’éléments auxquels nous avons dû penser lors
de la conception. Si le recours à la médiation culturelle ou l’interprétariat peuvent être des ressources
utiles dans les situations d’interculturalité, nos lectures (Tessier, 2017) nous ont surtout confortées
dans l’idée que ce qui prime est le positionnement éthique : il s'agit avant tout d'adopter une posture,
un regard qui reconnaisse l'autre dans son altérité et rende possible la rencontre. Le préalable
nécessaire à toute action est en effet de s'ouvrir à l'autre dans sa différence, faire l'effort de se décentrer
et mettre à distance son système de références afin de pouvoir commencer à chercher, ensemble, une
solution qui fasse sens pour tous.
La parentalité est également mise à l'épreuve spécifiquement dans le cas des familles en demande
d'asile. Plusieurs ressources (Daviet, 2005 ; Bohr et al., 2011)) nous ont permis de mieux en
appréhender les enjeux. Les enfants de familles en demande d’asile sont confrontés à une situation
complexe voire paradoxale: s’approprier une nouvelle culture, sans pour autant renier leurs origines.
Les enfants apprennent le français et s'adaptent généralement plus vite que leurs parents à leur
nouveau pays, grâce à la scolarisation. La perte du statut social et professionnel antérieur du fait de
la migration, avec des histoires souvent douloureuses, viennent donc bouleverser en profondeur les
4
rôles et dynamiques familiales. Il importe donc de prendre attentivement en compte cet élément pour
l'intégrer dans la conception de notre projet. La littérature donne à voir l’importance d’impliquer les
parents afin de notamment consolider le lien avec leurs enfants.
L’interculturalité n’est donc pas un frein dans le domaine de la promotion de la santé, à partir du
moment où les professionnels ont pris en compte ces notions afin de proposer un projet adapté.
1. Diagnostic de territoire
Nous avons tout d’abord cherché à cerner les caractéristiques et spécificités de notre territoire, en
particulier grâce à l’outil Géoclip®. (Annexe III)
Parce que les inégalités s’ancrent dans les territoires et nécessitent d’être analysées dans leur
spatialité, nous avons cherché à mettre en relation et voir comment s’articulaient les différents aspects
géographiques, démographiques, sociaux et sanitaires de notre problématique. Nous avons ensuite
recherché des corrélations entre offre de soins et consommation de soins. Celles-ci sont observables,
mais nécessitent d’être pondérées avec d’autres facteurs, notamment ceux relatifs au niveau socio-
culturel.
Nous avons ainsi pu mettre en lumière que pour l’agglomération de Clermont-Ferrand, malgré une
offre de soins importante, une corrélation est observable entre revenu disponible par unité de
consommation et consommation de soins dentaires. Si les données relatives à la précarité sont souvent
disponibles à une échelle trop importante pour que nous puissions les exploiter dans le cadre de ce
projet, ce travail nous a cependant permis de dresser un portrait de territoire indispensable en
préambule à notre action.
Pour contextualiser les éléments issus de nos recherches documentaires à notre territoire, recueillir
des données précises concernant les besoins et échanger sur notre projet, nous avons programmé un
rendez-vous avec des spécialistes du secteur. Nous avons ainsi eu la chance de rencontrer deux
chirugiens dentistes du service d’Odontologie du CHU de Clermont-Ferrand, spécialisés notamment
dans l’accueil des jeunes enfants polycariés ainsi que le médecin responsable des urgences dentaires
du CHU, également médecin de santé publique et travaillant tout particulièrement autour de la
problématique précarité et santé dentaire. Cet entretien nous a permis de dégager ou confirmer
plusieurs points fondamentaux :
Le besoin d’actions de prévention visant les populations les plus vulnérables est évident : leurs
services de soins sont surchargés.
5
De nombreux enfants de demandeurs d’asile ont été reçus dernièrement, avec des maladies
carieuses graves, nécessitant des soins multiples sous anesthésie générale. Les messages de
prévention sont compliqués par les différences de langue et de culture. La situation
d’immigration récente engendre beaucoup de changements et de pertes de repères
alimentaires, avec une offre nouvelle en produits sucrés en particulier, ce qui en fait une
situation à risque élevé.
La santé bucco-dentaire est souvent négligée, car considérée à tort comme mineure par rapport
à la sante générale, par les personnes elles-mêmes mais aussi les professionnels de santé. Ceci
constitue un réel frein à la réussite des actions de prévention. La santé bucco-dentaire est
pourtant un excellent indicateur de santé et la relier à la santé globale de la personne pourrait
constituer un bon levier d’action.
Les mauvaises habitudes alimentaires sont les principales responsables de la maladie carieuse,
le brossage n’étant qu’un facteur protecteur. Il est important de les cibler en priorité dans les
actions.
Il semblerait important de rechercher une pérennisation de notre action avec une
sensibilisation et implication des professionnels du CADA.
Un entretien avec une des monitrices-éducatrices du CADA a permis de recueillir des informations
précises concernant l'organisation et le parcours-santé des résidents à l'arrivée dans le centre. Ces
informations sont en effet capitales afin de pouvoir concevoir une action qui soit adaptée au contexte
de fonctionnement de la structure et impliquer les professionnels dans notre projet.
Une première rencontre avec les enfants et les familles du CADA a également été organisée, afin de
faire connaissance, instaurer une relation de confiance et leur présenter notre projet. Pour que notre
action puisse être réellement adaptée à notre public, nous avons voulu partir de leurs représentations
de la santé bucco-dentaire et de leurs pratiques, et recueillir leurs éventuelles demandes, attentes et
besoins en lien avec notre thématique.
6
Pour cette rencontre, nous avons souhaité privilégier une approche informelle et conviviale, afin de
faciliter l'entrée en relation et établir un lien. Afin de recueillir leurs représentations, nous avons choisi
le photolangage, qui offre l'avantage d'être compréhensible pour tous, au-delà des problèmes de
langues. Il est un support propice à l'échange et présente le bénéfice de ne pas mettre les personnes
en difficulté de compréhension ou de se sentir dans une position d'évaluation.
Nous nous sommes posées la question de solliciter un interprète. Pour cette première rencontre, nous
avons fait le choix de communiquer par nous-mêmes, afin de ne pas induire de distance dès la prise
de contact. Nous nous sommes laissées la possibilité de recourir à des aides supplémentaires si le
besoin s’en faisait sentir lors de cette première rencontre. Nous avons rencontré mamans et enfants
séparément, pour favoriser l'entrée en relation, accéder plus facilement aux représentations de chacun
et adapter le contenu et déroulé de la séance en fonction de chaque public.
Plusieurs éléments ressortent de ces ateliers : mamans comme enfants globalement connaissent les
discours de prévention (brossage des dents, éviter le sucre). Les mamans disent cependant avoir des
difficultés à les faire observer à leurs enfants et expriment un besoin d’aide à ce sujet. Surtout, les
familles s’en remettent entièrement aux professionnels du CADA pour les démarches de soins. La
non maîtrise de la langue et du dispositif sanitaire français complique leur accès aux soins et nécessite
un réel besoin d’accompagnement. L’enjeu serait de les aider à devenir plus autonomes dans leurs
démarches, en vue de préparer leur sortie du dispositif du CADA notamment.
A la lumière des différents éléments recueillis lors de notre diagnostic se précisent ainsi les contours
de notre action.
Celle-ci s’établira au CADA de Royat, sur le lieu de vie de notre public. Mener notre action au cœur
de ce qui fait la réalité quotidienne de notre public est en effet un élément important, relayé par la
littérature et les données probantes : nous venons à sa rencontre, sur son lieu de vie. Nous accédons
ainsi à une compréhension plus fine des enjeux spécifiques de la problématique pour celui-ci et nous
enracinons notre action dans son lieu de vie.
Notre intervention visera et impliquera conjointement les parents et enfants. Beaucoup d’actions de
prévention, notamment celles qui sont menées auprès des enfants en milieu scolaire ne sont pas
efficaces, car elles ne sont pas relayées à la maison auprès des parents (Bracconi et al., 2016). Une
intervention commune auprès des enfants et des parents nous a ainsi semblé importante à plusieurs
niveaux : pour des critères d’efficacité de notre action bien-sûr, car les messages et les actions de
prévention sont partagés par les parents et les enfants, mais aussi et peut-être surtout pour que cette
action soit l’occasion d’un moment de partage et de complicité entre parents et enfants, dans ce
contexte où la parentalité est souvent fragilisée par la situation de demande d’asile.
Elle aura pour objet de promouvoir la santé bucco-dentaire (et non la simple hygiène bucco-dentaire)
et visera à s’inscrire dans la durée en donnant les moyens aux professionnels du CADA de faire
perdurer notre action.
Notre action s’inscrira pour chacun dans une logique d’empowerment : elle aura pour objectif de
développer le pouvoir d’action des individus, tant des familles, leurs enfants que des professionnels
du CADA.
7
IV- CONCEPTION ET RÉALISATION DU PROJET
1. Objectifs et planification
La réalisation de notre diagnostic fait ressortir plusieurs leviers sur lesquels nous avons choisi de
mener une action :
La santé bucco-dentaire est un indicateur de santé, important à relier à la santé globale ;
Le projet doit être à destination des enfants, des parents et des professionnels ;
Les actions visent le développement de l’autonomie et l’acquisition de compétences.
Afin de pouvoir mettre en place une action qui soit pertinente et efficace, il est primordial d’aller à la
rencontre du public. Intervenir sur le lieu de vie permet de pouvoir faire tomber les barrières que les
demandeurs d’asile peuvent avoir (financiers, transport, langue…), d’accéder à une connaissance plus
fine des différents enjeux que prend notre problématique de santé pour les familles et de permettre
une durabilité de notre action.
Pour atteindre ces objectifs, nous avons choisi de réaliser une mallette pédagogique qui permettra aux
professionnels du CADA de pérenniser l’action grâce à des outils adaptés. En apportant aux
travailleurs sociaux les moyens de pouvoir mener une action de promotion de la santé, on leur permet
de pouvoir se sentir légitimes à intervenir. La santé et le social sont deux mondes qui ne se
comprennent pas toujours, mais qui partagent les mêmes valeurs. La santé est vue comme un domaine
de spécialistes, seuls légitimes à pouvoir intervenir. Or les travailleurs sociaux, formés à la démarche
de projet, ont les compétences pour s’emparer de ces problématiques de santé. De plus, ils agissent
sur les déterminants de la santé (logement, accès aux droits, lien social…), leviers d’actions tout aussi
importants en matière de santé.
La mallette pédagogique comporte trois séances distinctes. Lors de l’élaboration de ces séances, nous
nous sommes attachées à couvrir les trois axes de la promotion de la santé: protection, prévention et
éducation à la santé, selon le modèle de Downie et Tannahill (1996). Nous développons la prévention
en transmettant des informations et connaissances sur la santé bucco-dentaire aux familles. Nous
travaillons sur la protection en agissant sur l’environnement des familles, notamment en leur
permettant d’identifier les ressources sur le territoire en matière de santé bucco-dentaire. Enfin, nous
construisons des séances d’éducation à la santé, en permettant de développer les attitudes et
compétences nécessaires afin de faire un choix personnel et responsable pour leur santé bucco-
dentaire et celles de leurs familles, ainsi que devenir plus autonomes dans la gestion de leur santé.
La première séance, « Mes dents, mon sourire, ma santé » est construite autour du lien entre la santé
bucco-dentaire et la santé globale. Nous avons également voulu privilégier un travail par binôme
parent/enfant au cours de la séance.
8
Tableau 1 : Définition des objectifs de la séance 1
La seconde séance « Cache-cache avec le sucre », destinée à s’intégrer aux ateliers cuisine mis en
place au CADA, se centre sur la place du sucre dans notre alimentation et son impact sur la santé
bucco-dentaire.
9
La dernière séance “Ma santé au bout du fil!” vise plus le développement de compétences
psychosociales permettant de prendre en charge au mieux sa santé, notamment la prise de rendez-
vous. Cette séance est construite afin de rendre le public le plus autonome possible à sa sortie de
structure et donc de se détacher de l’accompagnement d’un tiers.
Pour mener à bien ce projet, il a fallu mettre en place une planification des étapes. En effet, il a été
nécessaire de s’organiser, tant entre les membres du groupe qu’avec les professionnels ressources.
(Annexe IV)
Afin de respecter une certaine cohérence avec les constats établis lors de notre investigation de la
littérature, nous souhaitions que notre première action d’éducation à la santé renforce le lien
parents/enfants. Lors de la conception de notre intervention, nous avons dû prendre en compte les
difficultés en lien avec la langue, les écarts culturels et l’hétérogénéité du public ciblé. Nous nous
sommes donc attachées à ce que les supports, outils et techniques d’animation soient adaptés afin de
favoriser une compréhension optimale. (Annexe V)
Il nous a, tout de suite, paru essentiel de commencer la séance avec un jeu « brise-glace ». En effet,
il n’est pas évident de se livrer et d’échanger avec des inconnues, d’autant plus sur une thématique
qui a trait à la sphère privée. Aussi, malgré le fait que deux d’entre nous avaient déjà rencontré
certaines familles, nous voulions instaurer un climat de confiance dès le départ de la séance. Notre
choix s’est porté sur le « jeu des appartenances ». Se positionner en cercle, les uns à côté des autres
permet tout d’abord de rompre une première distance. Le fait que les animatrices soient présentes au
10
sein de cette ronde, donne à voir au public l’image d’un groupe uni. Nous nous plaçons selon un
schéma horizontal qui efface l’angoisse d’une domination potentielle. Au fil des propositions faites,
nous apprenons à nous découvrir et pouvons échanger sur des sujets ordinaires. L’animatrice invite
les participants à questionner le groupe afin qu’ils puissent davantage s’investir et donc se sentir
totalement inclus. L’idée à travers cette technique d’animation est d’introduire en douceur le thème
de la santé bucco-dentaire. C’est pourquoi, la dernière affirmation spécifique à notre sujet permet de
faire le lien avec la suite de la séance. Au-delà des bénéfices précédemment cités, nous avons souhaité
via le choix des affirmations, valoriser le groupe notamment concernant leur maîtrise de diverses
langues. La difficulté à s’exprimer en français peut constituer pour certains un embarras qui engendra
un manque de participation par honte ou peur de se prononcer. Aussi, le choix de nos phrases telle
“Je parle plusieurs langues” permettra de dédramatiser le fait que certains ne parle pas tout à fait
correctement notre langue.
Ayant alors instauré une dynamique favorable aux échanges, nous pouvons faire émerger les
représentations du public via un brainstorming. Nous avons choisi cette technique car elle fait appel
à des capacités orales plus facilement mobilisables par notre public que la rédaction. Il n’y a pas
nécessité d’utiliser de matériel pouvant complexifier l’exercice comme avec le méta-plan par
exemple. L’animatrice pose la question oralement « À quoi ça sert les dents ? » et illustre au même
moment cette interrogation de manière symbolique avec une affiche. (Annexe VI) Avant de
mutualiser les réponses du groupe, nous avons voulu offrir un temps d’échange privilégié entre les
membres d’une même famille afin qu’ils puissent réfléchir tous ensemble. Le lien parents/enfants se
consolide alors peu à peu.
Toujours en accord avec les critères de validation permettant d’attester que notre séance est une
séance d’éducation à la santé, nous avons voulu que notre public soit acteur. Aussi, la frise réalisée
par l’organisme belge « Sourire pour tous », nous a semblé très intéressante. Nous l’avons donc
adaptée de telle manière qu’elle soit en parfaite cohérence avec nos objectifs. (Annexe VII) En effet,
nous avons inséré quelques aliments riches en glucides afin de mettre en avant le rôle du sucre dans
les pathologies dentaires. Cette frise symbolisant les différentes étapes de la journée d’un enfant met
en perspective différents aspects autour de la santé bucco-dentaire (rapport au sucre et à l’hygiène
bucco-dentaire notamment). Les familles et plus particulièrement les enfants sont invités à aller
apposer des vignettes « dents » aux différents moments où les personnages les utilisent.
Travailler autour de ce support très visuel permet avant tout de matérialiser nos informations de
manière concrète. En effet, les familles peuvent visualiser sur une journée entière, tous les moments
où les dents sont sollicitées : pour manger, parler, sourire et être en forme. Le fait que les enfants
aillent eux-mêmes coller les vignettes « dents » leur permet de faire le constat que les dents sont
essentielles pour la santé et le bien-être. De plus, en lien avec les données de l’apprentissage,
l’intégration des messages que nous leur transmettons sera amplifiée.
Une synthèse sur les rôles des dents est menée à travers deux affiches bilan créées par nos soins, à
partir des images de la frise. (Annexes VIII) L’objectif étant de faire un rappel et de consolider les
apports.
Afin d’aborder plus particulièrement la thématique de l’hygiène bucco-dentaire, nous avons jugé plus
pertinent un échange oral avec le public. Une discussion avec les enfants et leurs parents permet de
venir compléter les acquis. L’objectif n’est pas d’inonder les familles avec un surplus d’informations
mais de mettre en lumière les éléments majeurs. Après avoir pointé des notions telles la douleur, les
personnes ressources et l’origine de la carie, le public est mis en situation d’apprentissage. Sur le
même schéma qu’avec le rôle des dents, le public se voit distribuer, des vignettes symbolisant des
morceaux de sucre. Les familles peuvent alors identifier les sources de sucre sur la frise.
11
Nous avons souhaité que cette séance se conclue par un temps d’activité manuelle (Annexe IX),
partagé en famille. En plus du bénéfice du moment passé ensemble, la création d’un objet rituel, en
l’occurrence un sablier, encouragera le brossage des dents. L’objectif étant de créer un objet qui
pourra faire le lien entre cette séance et le domicile. Le sablier pourra servir de support aux parents
pour rappeler à leurs enfants l’importance de prendre soin de ses dents.
A travers cette séance, les participants développent des compétences psychosociales telles :
Savoir communiquer efficacement
Prendre des décisions
Esprit créatif
Gérer ses émotions
Pour que le public puisse s’exprimer sur la séance vécue, nous avons imaginé un support en forme de
roue fragmentée en six quartiers. (Annexe X) Au sein de chaque section, un item différent pourra être
jugé en fonction d’un niveau d’appréciation. Les participants auront simplement à coller une
gommette dans la case de leur choix.
Notre projet vise à ce que nos actions soient reconductibles par les professionnels du CADA. Aussi,
une des monitrices-éducatrices étant présente lors de la séance, il nous paraît indispensable de
recueillir son ressenti. Nous avons donc créé un guide visant à percevoir l’évaluation de la
professionnelle. (Annexe XI)
Enfin, il était important que chacune d’entre nous puisse porter un regard personnel sur le déroulé de
la séance et le moment vécu. Nous avons, pour ce faire, élaboré une grille d’auto-évaluation qui
permettra de mettre en lumière d’éventuels leviers ou axes d’amélioration sur lesquels agir.
(Annexe XII)
Pour cette séance, nous avions défini un groupe d’une quinzaine de personnes maximum, afin de
permettre une dynamique de groupe restreint et la participation effective de tous les participants.
En définitive, dix-neuf enfants et parents se sont présentés. Une famille ayant initialement laissé
entendre qu’elle n’était pas intéressée est finalement venue. Nous l’avons accueillie, en cohérence
avec la position de la monitrice-éducatrice du CADA présente lors de la séance.
Les professionnels du CADA s’étaient chargés de cibler et d’inviter les familles qu’ils estimaient les
plus concernées par la thématique. Nous les avions laissés gérer cet aspect, dans une logique
12
participative. Ce groupe comportait des enfants d’âge très hétérogène, de 2 ans ½ à 13 ans. Cette
hétérogénéité a été une difficulté supplémentaire, impliquant notamment la gestion de l’énergie des
plus jeunes lors des phases d’échanges. Mais nous en retenons surtout que cette action a réussi à
impliquer tous les enfants à des niveaux différents, et qu’elle est donc reproductible facilement, sans
induire de contraintes trop importantes concernant le profil d’âge des participants.
Le déroulement et la réalisation de ce projet depuis le départ nous ont ainsi permis d’évoluer très
significativement sur cette question du public ciblé par l’intervention. Nous souhaitions initialement
une action ciblée sur un public d’âge scolaire entre 6 ans et 10 ans, pour des actions plus cohérentes,
adaptées au développement des enfants et plus d’homogénéité au sein du groupe. Le diagnostic auprès
des professionnels du secteur et la rencontre initiale avec les familles nous avaient amenées à revoir
cette cible et à l’élargir. La prise en compte du contexte, des caractéristiques et contraintes spécifiques
à la structure, à savoir le CADA de Royat (fluctuation des familles et des âges des enfants hébergés
selon les moments, mode de fonctionnement des familles par rapport aux activités proposées) rendait
en effet nécessaire de concevoir une intervention qui puisse être adaptable au plus grand nombre.
La participation des enfants comme des parents a été excellente. L’identification par les badges a
permis de pouvoir communiquer plus facilement et de façon personnalisée.
L’activité brise-glace a été très réussie et le choix des phrases (“ Je parle plusieurs langues”, “j’aime
le chocolat”, “je pratique un sport”) s’est avéré très judicieux et efficace pour induire une atmosphère
conviviale et détendue, valoriser les familles et positionner animateurs comme familles sur un pied
d’égalité. Les familles ont pu mettre en valeur qu’elles parlaient pour la plupart de nombreuses
langues, ce qui a permis de les décomplexer de leur maîtrise imparfaite du français et favoriser leur
participation ultérieure.
Ainsi, en dépit de niveaux de français assez limités, la plupart des parents et enfants ont osé
s’exprimer. Nous avons été agréablement surprises de la bonne participation des parents sur les
périodes d’échanges. Les nombreux supports visuels créés pour faciliter la compréhension semblent
avoir été utiles et nous avons eu le sentiment que notre discours avait bien été compris.
Les enfants ont montré beaucoup d’entrain à venir participer aux différentes activités: confection des
badges, venir coller les vignettes sur la frise, confection du sablier.
Au final, nous avons eu le sentiment que tous ont passé un bon moment et ont appris des choses, avis
conforté par leur évaluation de la séance.
La gestion du temps
Nous avions prévu une séance d’une heure, elle a au final duré plus d’une heure et demie. La
participation du public a été importante, c’est un point très positif, mais qui, du coup, a entraîné des
phases plus longues que prévu. Il nous semblé important de ne pas restreindre les prises de parole
pour des raisons de respect du temps. La fiche descriptive de la séance qui sera laissée au CADA pour
les professionnels se devra de revoir à la hausse la durée annoncée, en précisant les phases qui peuvent
être condensées pour une séance plus courte ou adaptée aux plus jeunes.
13
La gestion spatiale
Nous avions prévu d’arriver plus tôt afin de nous installer au mieux et pouvoir prendre possession
des lieux. Nous avons souhaité éviter la traditionnelle séparation spatiale entre intervenants et public,
les uns faisant face aux autres. Les différentes phases de l’intervention ont pu être réparties et varier
dans l’espace de la pièce, pour plus de dynamisme, favoriser la participation et l’interaction.
Lorsqu’elles ne participaient pas activement à l’une des activités, les animatrices prenaient soin de se
mêler aux familles.
Au final, cet aspect a été très apprécié, il nous a été signifié spontanément par la professionnelle du
CADA, et il a sans doute contribué à la bonne participation du public.
La co-animation
Notre animation s’est organisée à trois voix. En amont, nous avions défini les animatrices pour chaque
phase de l’intervention, le plus souvent en duo, pour plus de dynamisme. Nous avions soigneusement
travaillé nos contenus et transitions, pour garantir la fluidité et la cohérence du tout.
Au final, l’animation à trois nous a certainement apporté des contraintes supplémentaires, en terme
d’organisation, de synchronisation et a induit un certain vécu de rigidité dans les interventions, même
si nos vécus respectifs ne sont pas tous les mêmes sur ce point. Il y a de fait moins de place pour
l’improvisation ou l’adaptation du discours lorsque les contenus à aborder sont étroitement répartis
entre les personnes. Deux d’entre nous ont ainsi regretté un certain manque de spontanéité ou de
liberté dans leurs interventions.
Le retour de la professionnelle du CADA et des participants nous ont permis de mesurer l’écart entre
notre ressenti et la perception qu’en avait eu le public. Nous avons ainsi été surprises de constater les
retours très positifs à ce sujet. L’animatrice du CADA a insisté spontanément sur le dynamisme, la
fluidité, la cohérence de notre animation à trois.
Nous en retenons que l’animation à trois impose une très grande rigueur dans la préparation et
l’organisation, elle limite la liberté d’intervention des intervenants, mais au bénéfice d’une attractivité
et d’un dynamisme plus grand de la séance.
Le travail partenarial
D’un point de vue global, le projet tuteuré nous a permis d’appréhender au mieux la notion de travail
partenarial. Le travail en groupe et à distance nous a obligé à créer des moyens de communication
efficaces pour avancer sur la construction de notre projet. Nous avons donc utilisé des outils comme
“drive” pour la rédaction et nous avons beaucoup communiqué en “facetime” afin de toujours faire
un point sur les actions en cours et de s’assurer que nous allions toutes dans le même sens. Nous
avons pu mesurer à quel point nos différences de parcours, de formation, de sensibilités, de
compétences, s’avéraient complémentaires et avaient pu nous permettre de nous emparer de toute la
complexité de notre problématique de santé. Au final, cette expérience nous a permis de mesurer en
quoi la collaboration, si elle apporte parfois certaines difficultés, apporte indéniablement une
diversification et un enrichissement des regards et des approches, au bénéfice d’un projet final plus
abouti.
14
CONCLUSION
En nous donnant l’opportunité de concevoir un projet depuis ses prémisses, c’est-à-dire le choix du
sujet, jusqu’à sa réalisation, nous avons eu l’opportunité de mettre en œuvre l’ensemble des phases
constitutives d’une démarche de projet, en approcher les difficultés, les contraintes, ou au contraire
les éléments facilitants. Nous avons ainsi pu mettre en pratique les différents enseignements de la
licence, ce qui leur a donné un éclairage nouveau et ont révélé toute leur portée.
La démarche collaborative en particulier, toute d’abord au sein de notre groupe d’étudiantes, et
ensuite avec les partenaires de notre action, à savoir les professionnels du CADA, de la faculté
dentaire, et les familles a été très riche d’enseignement. Celle-ci a significativement fait évoluer notre
projet au fil des mois, pour finalement aboutir à un résultat final que nous souhaitons pertinent, et
surtout adapté aux besoins et demandes des personnes qui le feront vivre. Il nous a fait mesurer
combien la prise en compte effective de la demande et des besoins du public et des acteurs était
fondamentale dans la conception de tout projet, pour que ceux-ci lui donnent un sens, s’en emparent
et puissent ainsi le pérenniser.
Ce projet n’en est, nous l’espérons, qu’à sa première étape. Nous sommes impatientes de savoir
comment et si les professionnels vont réutiliser cet outil, se l’approprier, et/ou le faire évoluer. Le fait
que l’une d’entre nous travaille au sein de la même association va certainement nous donner une
meilleure visibilité sur le devenir de ce projet. Comme nous l’avait suggérée Dr Machat, si les
premiers retours très encourageants sur ce projet se confirment sur un plus long terme, la question de
sa transférabilité à d’autres structures pourra très sérieusement s’envisager.
15
BIBLIOGRAPHIE
Articles de revues
Articles de journaux
Guillard, A. (2017). Le centre d’accueil, une parenthèse pour préparer le futur des exilés. Le
Monde. Repéré à http://www.lemonde.fr/societe/article/2017/04/12/demandeurs-d-asile-au-
centre-d-accueil-une-courte-parenthese-pour-preparer-le-futur_5109969_3224.html
Rapports
Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides. (2017). Rapport d’activité 2016.
Repéré à
https://ofpra.gouv.fr/sites/default/files/atoms/files/rapport_dactivite_ofpra_2016_1.pdf
UFSBD. (2006). La santé bucco-dentaire des enfants de 6 et 12 ans en France, 1‑3. Repéré à
http://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/La_sante_bucco-
dentaire_des_enfants_de_6_et_12_ans_en_France_en_2006.pdf
Ouvrage
Potvin, L. Moquet, M. J. & Jones, C. M. (s. d.). (2010). Réduire les inégalités sociales en
santé. Saint-Denis : INPES, coll. Santé en action. Consulté à
http://inpes.santepubliquefrance.fr/CFESBases/catalogue/pdf/1333.pdf
Thèses
Actes de colloques
Actes de la 8e journée de santé publique dentaire. (2008). Présenté à Quelles actions publiques
de prévention ? Méthodes, évaluations, résultats, ASPBD. Consulté à l’adresse
http://aspbd.free.fr/documents/JSPBD/8_JSPBD1.pdf
Actes de la 15e journée de santé publique dentaire. (2015). Présenté à Quelles éducations en
santé bucco-dentaire ? (Education pour la santé - Education thérapeutique). Consulté à
l’adresse http://aspbd.free.fr/documents/JSPBD/15_JSPBD.pdf
Watt, R. G. (2010). Les stratégies de promotion de la santé bucco-dentaire scientifiquement
fondées. In La santé bucco-dentaire dans la promotion de la santé. Créteil. Consulté à
l’adresse http://aspbd.free.fr/documents/JSPBD/10_jspbd.pdf
Documents web - sitographie
CeCler est une association implantée sur le territoire clermontois depuis 1994, visant à répondre aux
différentes situations d’exclusion et à proposer des solutions d’hébergement. Aujourd’hui,
l’association propose près de 590 places d’hébergement réparties sur 8 structures différentes. CeCler
accompagne des publics variés (demandeurs d’asile, mineurs non accompagnés, personnes en
isolement social, personnes malades…) en facilitant leur insertion sociale et professionnelle via 4 axes
d’actions:
l’accueil et l’hébergement, principalement dans les situations d’urgence
la prise en compte de la santé et le développement de l’estime de soi
le soutien et l’accompagnement social afin d’inscrire la personne dans un processus
d’autonomisation
l’adaptation à la vie active, l’insertion sociale et professionnelle
Le Centre d’Accueil de Demandeurs d’Asile situé à Royat accueille 70 personnes (familles et isolés).
La structure a pour mission d’accueillir, d’hébergement et d’accompagner les demandeurs d’asile
dans leurs démarches sociales et administratives. Une équipe pluridisciplinaire permet d’assurer
différents services :
un service éducatif et d’animations
un service logistique et d’entretien
un service administratif
un service de surveillance
Annexe II : Schéma simplifié de la procédure d’asile et du séjour des demandeurs d’asile