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géographes français
Résumé
Résumé. - L'incendie d'août 1989 a provoqué une accélération considérable de la dynamique des ruisseaux intermittents,
d'abord par une forte accumulation en 1989-1990, puis par une incision en 1990-1991. Il était alors possible de penser à une
stabilisation précoce de la morphogenèse grâce à la recolonisation végétale rapide. Cependant, la crue exceptionnelle de
septembre 1991 montre que cette stabilisation reste imparfaite.
Abstract
Abstract. - The 28 August 1989 wildfire caused an important acceleration of the activity of sporadic streams, first with a thick
filling during 1989-1990 and then with a cutting-down during 1990-1991. Then, it was possible to think that a precocious
stabilization of morphogenesis occured owing to the swift recolonization by the vegetation. However, an exceptional flood in
September 1991 showed that the stabilization remains partial.
Ballais Jean-Louis. L'érosion consécutive à l'incendie d'août 1989 sur la montagne Sainte-Victoire : trois années d'observations
(1989-1992) (Erosion resulting from the fire of august 1989 on the Montagne Sainte-Victoire : three years of observations
(1989-1992). In: Bulletin de l'Association de géographes français, 70e année, 1993-5 ( décembre). Facteurs anthropiques de
l'érosion. pp. 423-437;
doi : https://doi.org/10.3406/bagf.1993.1710
https://www.persee.fr/doc/bagf_0004-5322_1993_num_70_5_1710
Jean-Louis BALLAIS*
Le versant méridional (fig. 1) a éfté choisi d'abord parce qu'il a été le plus
dévasté par l'incendie, mais aussi parce qu'il présente de vastes
affleurements d'argiles, argilites et marnes à la base du grand front de
chevauchement constitué de calcaires (Jorda, Provansal, 1992). Ainsi, le haut
bassin-versant du Bayon (fig. 1) est principalement localisé dans ce substrat
meuble dont l'imperméabilité favorise l'écoulement superficiel quasi
instantané lors des fortes pluies. Cette imperméabilité limite, par ailleurs, la
formation de sources pérennes et de réseaux d'alimentation souterrains
facilités par les calcaires et imprime, en fonction du climat méditerranéen
subhumide, un fonctionnement temporaire à saisonnier à tous les cours
d'eau, à l'exception du ruisseau de Roques-Hautes. Avant l'incendie, les
eaux s'écoulaient par un réseau de ravines vigoureusement entaillées, en
particulier à l'ENE de Saint-Antonin sur Bayon, avant de confluer dans
quelques rares ruisseaux orientés NNE-SSW. Vers l'aval, la rupture de
pente au contact du Cengle (fig. 1) favorise le dépôt de la charge
transportée et l'infiltration des eaux: en général, la discontinuité de l'écoulement
dans le temps s'accompagne d'une discontinuité dans l'espace car les
affluents atteignent rarement le Bayon. En somme, ces affluents
fonctionnent comme de petits oueds torrentiels.
Dans le détail, les trois années d'observations (1989-1990, 1990-1991 et
1991-1992) se caractérisent par une évolution différente qui impose un
plan d'étude chronologique.
Poids cumulés
en %
- V2 Al
- V2 A2
•- Vi A3
Q3-75
02.50
Poids cumulés
en%
Q3-75
Q2-50
Fig. 3. - Courbes g ra nu lorn étriqués cumulatives et simples des dépôts du ruisseau de Roque Vaoutade.
RV 1 dépôt antérieur à l'incendie; RV 2 dépôt de l'automne 1989;
RV 3: dépôt du printemps 1990; RV 4: dépôt du printemps 1991.
:
Nom de SiO2 AL2O3 Fe2O3 MgO CaO K2O Na2O TiO2 MnO H?O- H2O+
Téchantilon
V2A1 10,88 3,79 1,38 2,37 40,75 0,56 0,05 0,13 0,019 1,27 37,48
V2A2 21,32 5,60 2,05 1,13 28,39 0,89 0,11 0,21 0,045 3,88 35,40
V2A3 16,99 3,77 1,36 1,04 38,60 0,50 0,07 0,14 0,030 1,24 35,11
RV1 33,13 6,49 2,57 0,78 26,80 0,93 0,11 0,28 0,047 1,79 25,16
RV2 21,15 4,38 2,55 0,49 33,87 0,48 0,10 0,18 0,046 2,00 33,65
RV3 12,19 3,19 1,60 0,45 39,44 0,32 0,10 0,13 0,035 1,86 39,10
RV4 40,21 7,78 2,85 0,95 22,21 1,20 0,11 0,34 0,045 2,07 21,26
Covo, 1991), soit assez tardivement. Mais les pluies de la veille, plus
abondantes (63 mm à Trets, 50,6 mm à Vauvenargues) et plus intenses
(intensités horaires moyennes: 6 mm/h et 5,1 mm/h, intensités horaires
maximums: 16,4 mm/h et 9 mm/h) avaient déjà partiellement saturé les sols et
formations superficielles. Cependant, la date tardive des pluies efficaces
(les précipitations d'octobre 1989 sont inférieures de plus de 50 % à la
normale mensuelle) a permis au sol de se tasser après la dilatation due à
l'incendie, limitant ainsi cette efficacité. L'importance de l'ablation et du
transport résulte donc, en premier lieu, de la suppression à peu près totale
du couvert végétal par l'incendie, des effets mécaniques du feu et de la
succession de deux épisodes pluvieux importants dont le cumul a
provoqué un ruissellement abondant.
Au cours de l'hiver, la recolonisation végétale a commencé de façon peu
perceptible d'abord. Les herbacées, en particulier les Graminées, ont assez
vite colonisé les dépôts fins des talwegs (ruisseau des Deux-Aiguilles) et
Quercus coccifera a vigoureusement rejeté de souche. Au printemps, ce fut
le tour des Quercus ilex et Quercus pubescens (Baccouche, 1990). La
conséquence en fut que, malgré des pluies de printemps particulièrement
abondantes (plus de 200 mm en mai à Vauvenargues; plus généralement,
le maximum se plaça au printemps, et non en automne comme en
moyenne), l'ablation et le transport restèrent très modérés. La composition
géochimique des alluvions déposées au printemps 1990 (fig. 4) paraît
confirmer cette progression du couvert végétal. En effet, les échantillons
RV 3 et V2A 3 ressemblent beaucoup plus à ceux déposés avant l'incendie
(RV1 et V2A 1) qu'à ceux de l'automne (RV 2 et V2A 2). On peut interpréter
cela en disant que ce sont les mêmes affleurements qui ont fourni d'abord
les dépôts antérieurs à l'incendie puis ceux du printemps 1990, ce qui
signifie que la végétation a recolonisé les territoires qu'elle occupait
précédemment et protégeait de l'ablation avant l'incendie. En conséquence, la
maigre formation végétale, cette garrigue à chêne kermès du printemps
1990, protégeait autant la surface de l'érosion pluviale et du ruissellement
que la garrigue ou forêt claire à Pinus halepensis
- L'importance de l'entaille
- La stabilité depuis
maximas étant atteintes le 1er juin avec 7,7 mm/h. A cette occasion, le
ruisseau des Deux Aiguilles a connu sa première crue depuis le 4 avril, crue
qui a affecté l'ensemble de son cours alors que la précédente s'était
arrêtée à l'aval de la station 3. Cette crue du 1er juin n'a cependant eu qu'une
action étroitement limitée au chenal non encore totalement végétalisé de
la station 3 qu'elle a entaillé de 0,5 cm. Les nombreuses autres crues du
mois de juin n'ont eu aucune efficacité morphogénique.
Le rôle décisif du couvert végétal est prouvé également par le
comportement du plunge-pool dont le bassin-versant reste encore peu protégé
par les petits buissons qui ont repoussé et où les Graminées restent rares.
Sans entrer dans le détail de l'évolution complexe de sa partie basse où
accumulation et entaille se succèdent (comme en septembre 1991), on
peut dire qu'il a réagi nettement lors des pluies du 1er juin, mais aussi aux
fortes pluies de la 3e décade.
CONCLUSION
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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