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Présence Africaine Editions

Instruments de musique africains


Author(s): A. M. Jones
Source: Présence Africaine, Nouvelle série, No. 34/35 (octobre 1960 - janvier 1961), pp. 132-
150
Published by: Présence Africaine Editions
Stable URL: http://www.jstor.org/stable/24345751
Accessed: 08-12-2017 19:11 UTC

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A. M. Jones

Instruments de musique africains

C'était l'usage, voici quelques temps, de qualifier tous les peuples


dont le niveau de culture apparente était au-dessous de la civilisation
urbaine occidentale de « primitifs », à un degré plus ou moins grand.
L'étude superficielle d'un peuple, sans tenir compte du contexte, du
milieu et des capacités naturelles, laisserait voir un manque total de
culture, cependant que ces mêmes traits, très habituels à l'observateur,
parce que très différents de ceux correspondants à sa propre culture,
risqueraient de passer inapperçus et même de n'être pas décelés. Il tirera
ainsi les conclusions sur une évidence inadéquate, évidence qui peut
avoir un caractère négatif. Aucun observateur scientifique ne se permet
tra consciemment d'avoir des préjugés de ce genre, mais c'est un fac
teur contre lequel il faut constamment se garder. De plus, la majorité
des gens ont tendance à condamner ce qui ne leur est pas habituel.
Ainsi, dans le domaine de la musique, le citoyen britannique moyen
qui capte à la radio de la musique hindoue changera vivement de poste
et son geste ne montrera pas une haute estime. La raison en est évi
dente : nourri dans un système musical très développé, il doit subite
ment faire face à une musique qui est le produit avancé d'un système
de sons tout à fait différent. Il n'est pas surprenant que l'auditeur se
refuse à la reconnaître comme une vraie musique — vraie, c'est-à-dire
selon l'idée qu'il se fait de la musique, et il la condamne sur le champ.
Inconsciemment, nous adoptons cette même méthode lorsque nous pro
cédons à l'étude de culture autre que la nôtre. Il est très difficile de
concevoir, en Afrique, que les actes de l'Africain puissent être basés sur
des motifs et des considérations aussi hautement civilisés que ceux qui
dirigent notre vie selon des orientations différentes. Il n'est pas de
branche de l'activité africaine où ce ne soit aussi vrai que dans le
domaine musical. Les civilisations occidentales expriment leur âme
musicale selon les termes de la musique occidentale. Cette musique

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INSTRUMENTS DE MUSIQUE AFRICAINS 133

découle de deux sources différentes, vocale et instrumenta


combinaison des deux. Jusqu'ici nous sommes en terrain c
l'Africain. Puis, dans la musique que nous faisons et selon
le genre d'instruments dont nous nous servons pour l'expr
qu'il y ait divergence de vue.
Avant de suivre l'Africain dans les méandres de la culture museale,
et avant d'essayer, d'estimer ses capacités techniques et l'étendue de sa
maîtrise des choses musicales, il serait préférable de nous arrêter afin
de considérer notre musique occidentale à partir de ces points de vue.
Car nous ne pouvons juger de sa musique avant d'avoir quelqu'idée de
ce que veut dire l'expression « culture musicale ». La musique que nous
connaissons et dont nous pouvons parier est celle de notre propre
civilisation. Si, en premier lieu, nous examinons notre propre
système musical nous serons d'avantage en mesure d'approcher un
système qui nous est étranger.
On peut définir la musique ainsi : une série organisée de sons. à
ton fixe. En ce qui concerne les sons ou les notes que nous choisissons,
il n'est pas de lois en ce domaine, naturelles ou esthétiques. Cest en
grande partie une question de coutume, quoique la nature exerce une
forte influence sur notre choix. Nous pourrions prendre au hasard une
série donnée de notes dont le nombre de vibrations a peu ou pas de
ressemblance à celles qui nous sont familières, et jouer des airs sur
cette gamme : si nous n'étions pas influencés par des lois naturelles, c'est
ce que nous aurions été amenés à faire. Mais il est certain que la nature
nous guide énormément dans ce choix. Par exemple, nous pinçons la
corde d'un arc et nous obtenons ainsi une note. Si nous plaçons \fn
doigt au milieu de la corde, chaque moitié donnera maintenant Uüe
note de fréquence double, c'est-à-dire, d'un octave plus élevé. Cette
nouvelle note à l'audition a une consonnance semblable à la première :
« elle a le même son mais plus aigu ». L'effet combiné des notes graves
et aiguës jouées ensemble est très agréable à notre sens esthétique, et
nous le jugeons beau. L'octave donc, qu'il soit considéré objectivement
comme la division d'une corde vibrante, ou subjectivement piar son ëffet
plaisant, est une division de gamme naturelle. De la même façon, l'es
intervalles de la quatrième et cinquième s'imposent naturellement à
notre oreille. Ils sont produits en divisant la corde en de très simples
proportions, et ainsi ont un effet consonant particulier à notre oreille.
Mais à cause des exigences de l'histoire et des besoins de la nature, nous
avons organisé toute une série de notes appelées gammes, notes inclues
dans l'octave et qui peuvent être répétées en plus aigu ou en phis
grave. Depuis Bach, nous avons essayé de placer l'accord de façon à ce
que chaque demi-ton soit exactement de la même hauteur, procédé
arbitraire connu sous le terme de Tempérament Egal. Cela nous donne
une grande liberté d'harmonie et le choix des clefs, mais cela veut dire
que notre musique occidentale est bâtie sur un système totalement
arbitraire dans lequel l'intervalle « soit-disant » parfait du quatrième

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octave est toujours en dièse et l'in


.toujours en bémol. Mais c'est le systè
Ce n'est naturellement pas le seul mo
pour s'en servir musicalement.
Pendant plus de huit cents ans no
d'harmonie, et nous avons développé
grande sélection d'accords nous parais
et qui placés dans les séquences dict
tradition musicale, nous donne satis
de supposer que d'autres peuples se se
notre sélection particulière de note
propre musique nous opérons des tr
des qualités de la musique « moderne
ou de séquences inhabituelles à ceux
Pour arriver à ce stade il nous a fallu des centaines d'années de
théories et de recherches, et en conséquence notre musique est devenue
« sophistiquée ». Nous ne sommes plus capables maintenant d'improviser
une ligne de basse ou de tenor, sans connaître auparavant le thème
exact auquel songeait le compositeur, son choix d'harmonies possibles
étant trop vaste. Il faut lire sur la partition la partie de tenor ou de
basse, ou l'apprendre par cœur. Toute la structure de notre musique a
été formée d'une manière intellectuelle autant qu'esthétique.
Nos instruments musicaux ont suivi la même évolution. I.a musique
occidentale évoque l'image de grands orchestres composés de beaucoup
d'instruments divers, ou de grandes orgues contenant des milliers de
tuyaux. Tous ces instruments sont d'une précision telle qu'il leur est
possible de jouer ensemble, avec une intonation précise
Chaque instrument a une longue histoire dans sa propre évolution,
et l'état actuel du perfectionnement inclue des facteurs tels : la tonalité,
la gamme, la facilité de maniement, l'apparence, la solidité évitant les
petites réparations fréquentes. La science de notre développement indus
triel est la base de la fabrication de n'importe lequel de nos instruments.
Nous pouvons forer avec précision à l'aide de nos tours, nous pouvons
courber un tube de métal dans n'importe quelle forme, nous compre
nons le principe des leviers et des ressorts, et nous ne sommes plus
obligés de disposer tous les trous de nos instruments à vent là où ils
conviennent le plus à nos doigts, donc nous n'avons plus à limiter leur
nombre. Nos pianos et nos orgues sont une synthèse de connaissance
scientifiques, techniques et mécaniques et des théories appliquées du son.
Notre musique et nos Instruments sont des produits de notre
esthétique musicale ; de toute la science et de l'adresse mécanique que
notre civilisation a pu produire. Sans les tours, les fabriques de fil de
fer; les ateliers tie brassage, et ainsi de suite, notre musique serait diffé
rente de ce qu'elle est. Nous avons mis toute notre science et notre

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INSTRUMENTS DE MUSIQUE AFRICAINS 135

adresse au service de notre musique : le résultat est


produit de notre milieu.
Le but de ce relevé, extrêmement incomplet ,est de s
dans la culture occidentale, pour faire de la musique, no
servis au mieux de nos connaissances du phénomène
et de notre habileté à contrôler les matériaux à notre di
Maintenant considérons l'Africain :
Nous pourrions aller assister aux danses d'un village africain. Ce
serait une expérience fructueuse pour le musicien judicieux. Mais nous
voulons particulièrement discerner l'adresse avec laquelle l'Africain se
sert du matériau grâce auquel il a produit sa musique. La façon la plus
objective d'approcher ce sujet est d'étudier ses instruments musicaux.
Nous pourrions naturellement faire une incursion dans ce vaste
continent, en écoutant les instruments dans leur propre décor. Cepen
dant commençons à les examiner là où ils ne sont pas dans leur
contexte idéal : muets et solitaires dans les vitrines d'un musée.
Ce qui nous frappe tout d'abord c'est que l'Africain a lui-même
senti qu'il lui était possible de faire de la musique par les mêmes
moyens que nous. Les trois genres d'instruments de base : corde, vertt
et percussion — sont tous représentés en quantité. Nous pourrions
présenter une classification plus détaillée. Parmi les instruments à corde,
il y a des modèles africains du type de cordes pincées, mais aussi celui
d'archet ; il y a des instruments à corde unique et à cordes multiples.
Cette dernière catégorie donne, comme en Occident, le type de lyre où
les cordes pendant l'exécution sont sur une ligne éloignée du corps, et
aussi du type cithare, où le plan des cordes se trouvent être en travers
et au-devant du corps. Maintenant la qualité même du travail ou des
matériaux employés à la fabrication de ces instruments varie beaucoup
de tribu en tribu : mais cela n'a rien à voir avec le fait essentiel et
important que l'Africain fabrique lui-même ses propres instruments.
Jusqu'à quel point peut-il se vanter d'en être l'auteur? C'est autre
chose. On pourrait soutenir la thèse selon laquelle les « bol-lyres » de
l'Uganda, du Soudan, et d'autres lieux descendent directement des ins
truments semblables gravés dans les anciennes tombes d'Egypte. Les
détails sont analogues. Même encore, la question se pose : quels étaient
les premiers inventeurs, les Egyptiens ou bien les tribus africaines ? Ces
questions sont naturellement insolubles, et en appréciant l'art et la
dextérité indigènes on ne doit pas pousser trop loin les choses. Déclarer
que la lyre ou la cithare sont de véritables instruments africains impli
que ni plus ou moins que l'on puisse affirmer que la cornemuse est un
instrument national écossais. Nous maintenons que l'Africain les
« possède » pleinement : eux et leur fabrication, et qu'ils font intégrale
ment partie de son héritage musical.
En examinant ces instruments, nous remarquons un grand nombre
de sifflets, de flûtes et de trompettes. Les sifflets peuvent être simples ou
accolés (flûtes de Pan). On peut jouer de ces flûtes en soufflant à une

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extrémité ou sur le côté. De même


fois, à savoir, dans la section d'inst
l'Africain a produit et exploité exac
rendre le son par la pression du ven
même. Il n'y a pas d'orgues à tuyaux,
l'essence seulement un système élabor
extrémité. Ce que nous ne voyons pas
Cette classe d'instruments n'a pas é
l'ensemble, la famille d'instruments à v
apparence par une extrême simplicité
dans cette section, quelque chose de
ment travaillés des « lyres-écuelles »
partie de cette section à vent nous
nettement contre eux.

Nous passons aux instruments de percussion, et nous ne som


pas tellement frappés de ce qu'il y ait des tambours, mais une vari
extraordinaire de formes et de tailles. Il est évident que le tam
occupe une place prépondérante dans la musique africaine. Ici
voyons l'habileté artisanale à son apogée. Il y a des exemples d
lqs stades de développement, des modèles grossiers plutôt asymétr
avec des peaux de tambour attachées sans aucun sens artistique
instruments superbes, avec du bois finement et artistement trava
avec des peaux soutendues par un grand nombre de petites lan
régulièrement disposées (riems), de telle sorte qu'elles sont belles t
en ayant une fonction définie, et formant un dessin splendide aut
du tambour. Nous observons que les tambours africains sont différ
ciés de la même manière que les nôtres en Occident. Il y a to
famille des timbales — qui à l'origine consistait sans doute en
membrane tendue sur un pot d'argile, et elles s'étalent entre en
trente-trois centimètres à un mètre ou plus de diamètre. Puis il y
masse de tambours, dont le corps est essentiellement en tube d
ayec une membrane tendue sur une extrémité ou bien sur les
De plus nous trouvons une troisième classe de tambours qui ne figu
pas dans notre musique « sophistiquée » — le tambour à friction (d
le principe est de faire vibrer la peau du tambour non pas en frap
mais en plaçant ou en fixant un bâton au centre de la peau et p
ffottant le bâton généralement avec un chiffon mouillé tenu dans
poing fermé, afin de transmettre à la peau du tambour les vibrati
engendrées dans le bâton). Ici nous avons un nouveau bruit, qu
chose d'étrange à notre oreille, mais c'est un rythme puissant,
trant et hurlant qui peut s'étendre à un « mile » ou deux dans la n
et peut donner de très beaux effets rythmiques.
La famille des xylophones et ses proches parents, les métallopho
appartiennent à ce groupe d'instruments à percussion mais formen
catégorie par eux-mêmes. En Occident, les xylophones ou « glo
piçl » (carillpns) ou les cloches tubulaires servent plus souven

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parure qu'à l'œuvre musicale de base. Parmi nombre de tri


le xylophone est un instrument essentiel de danse. Quand
on en joue souvent en ensembles, remplaçant les tambo
instruments de fond. D'un autre côté, les Africains comme nous, se
servent souvent du xylophone comme instrument solo. Quel que soit
la façon dont il s'en serve, le fait en est que l'Africain a assimilé et
exploité toutes les possibilités inhérentes de faire de la musique en
frappant des plaques de bois, choisies avec soin, accordées au diapason
voulu, et disposées dans un ordre connu des scientistes occidentaux
comme étant celui d'une série de « free-free bars » (barres libres des
deux extrémités). 11 nous faudra par la suite entrer dans les détails à
propos de cette particularité remarquable.
Les métallophones sont étrangers à la musique occidentale. A
l'exception des boîtes à musique, nous ne nous servons pas d'un tel
instrument, bien que l'on retrouve leur principe musical sous une autre
forme, comme dans nos harmoniums, nos orgues américains, nos accor
déons et autres instruments à anche. Le principe est celui de l'anchç,
où une extrémité d'une lame est fixée et l'autre est libre de vibrer. En
Occident, nous faisons invariablement vibrer une anche en no.us servant
de la pression de l'air. L'Africain la met en vibration en la pinçant.avec
ses pouces. Chez nombre de tribus de l'Afrique Centrale et Occidentale,
ces petits métallophones sont très répandus. Ils peuvent être, et sont la
plupart du temps considérés comme instruments de musique privée
ou bien servent à jouer en solo ou pour accompagner la voix. Dans
quelques tribus, on les accorde entre eux pour jouer dans des ensembles.
Il y a plusieurs variétés de cet instrument : ils sont de tailles différentes,
et le nombre de notes de métal varie, ainsi que leur top relatif. Et
encore, le terme « métallophone » s'applique mal à cet instrument, car
souvent les lames vibrantes sont faites de bambou, ou de roseaux durs.
En fait, il semble qu'il n'y ait pas de limites à la variété des matériaux
que l'on puisse employer, ou des légères modifications qui s'opèrent be
tribu en tribu dans tous les instruments musicaux. Comme nous l'ayons
dit, on se sert en général, des métallophones comme instruments person
nels, et si, comme c'est le cas, ils occupent approximativement dans
la vie africaine, la place que l'harmonica occupe dans la nôtre, il n'est
pas moins vrai qu'ils donnent un ton beaucoup plus doux et musical,
et peuvent rendre une plus grande subtilité d'effets rythmiques. C'est
une expérience saisissante pour n'importe quel musicien d'entendre un
bon artiste jouer sur un de ces «Tulimba ».
En passant en revue ces instruments africains nous avons sdemnient
omis une de leurs particularités qu'il vaudrait mieux considérer séparé
ment : l'usage que font les Africains des résonateurs et des tables d'har
monie dans beaucoup de leurs instruments. Autant que nous le savons,
tous leurs instruments à cordes , ont, soit des résonateurs (caisse de
résonance) ou tables d'harmonies, fixes ou appliqués durant le jeu. fa
plupart des xylophones ont. des résonateurs, cependant que les métal

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lophones ont généralement une tab


Maintenant pour le musicien occident
cateurs du son est courant : nous avons des tables d'harmonie dans nos
pianos et dans nos instruments à cordes plus portatifs : cordes pincées
comme dans la guitare, ou à archer comme dans la famille des violons ;
ces modèles portatifs ont aussi une caisse de résonance, car c'est à quoi
servent les corps de ces instruments. Mais n'est-il pas remarquable que
ces villageois africains si simples (non sophistiqués) aient trouvé préci
sément le même moyen subtil et scientifique pour amplifier le volume
des sons normalement si faibles de leurs instruments ? De plus dans le
cas de leurs xylophones, ils ont poussé le procédé à un stade beaucoup
plus développé que nous en Occident. Notre habileté normale étant de
disposer d'un résonateur assez grand qui s'accomoderait de tous les sons
que l'instrument soit capable de produire. Cependant les xylophones
africains ont des résonateurs accordés, c'est-à-dire que chaque note a
un résonateur séparé, accordé de telle sorte que sa fréquence vibratoire
normale est précisément celle de la lame de bois formant la note, et à
laquelle il est attaché. L'usage de tables d'harmonie et de résonateurs,
est véritablement une exploitation subtile de la nature. Scientifiquement
parlant, si par exemple, une corde vibre dans l'air libre, elle produit
un son faible quand elle s'agite de long en large, l'air qui l'entoure
s'esquive pour la laisser passer et en subit à peine le mouvement. Si
cependant, nous plaçons tout près derrière la corde une planche assez
grande et plate, l'air qui normalement se recule se trouve ainsi pris au
piège par la planche ; comme il ne peut s'échapper assez vite, il lui
communique les compressions et les décompressions résultant du
va-et-vient de la corde. L'air engendre ainsi une série d'ondes qui influent
à leur tour sur tous les molécules d'air aux alentours proches de la
planche. II en résulte que la corde n'est plus la seule propagatrice
d'ondes de son, mais un volume considérable d'ondes est projeté de
toute la superficie de la table d'harmonie, ce qui entraîne une nette
augmentation du volume du son perceptible.
Ce même procédé explique l'emploi des cavités résonantes ou des
gourdes (caisses de résonance). Si l'objet en vibration se trouve tout près
de leur ouverture, l'air dans ces récipients ne peut s'échapper, donc
vibre harmoniquement, et les ondes du son formées augmentent la
puissance de la note originale. Aussi simples ou primitives que puissent
paraître beaucoup' de ces instruments de musique africaine, on doit se
rappeler qu'ils incorporent ces traits parfaitements scientifiques, il est
vrai que nous en Occident, nous avons en certains cas, — le piano par
exemple — étudié la science détaillée de la table d'harmonie en points
précis et soimmes alors capables de spécifier les tailles, les formes, gros
seurs et qualités des matériaux qu'il faudrait pour avoir les meilleurs
résultats. Ce raffinement découle du penchant scientifique de notre
propre culture. L'Africain de son côté, quoique ne possédant pas la
précision de la mesure scientifique a cependant, dans le cadre de sa

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INSTRUMENTS DE MUSIQUE AFRICAINS 139

propre culture scientifique développé avec précision cette


thode d'amplification du son. Et nous ne devons pas non plu
en regardant son œuvre souvent quelque peu rustique, que «
quel petit bout de bois» serait suffisant. C'est loin d'être la v
bon fabriquant d'instruments africains est aussi soigneux et
dans le choix des bons matériaux pour les différentes par
instrument, que les artisans occidentaux, ses collègues. Il ne
mesure de donner une explication en termes de science m
l'emploi de tel bois ou tel autre selon la convenance, et ainsi
cependant il sait où chercher ce qui lui conviendra le m
d'avoir le meilleur sous la main. En considérant les choses sous cet
angle, on pencherait vers un plus grand respect pour l'habileté et lé
savoir des artisans d'instruments de musique africains, que n'en suggère
l'apparence de beaucoup ou même de la plupart de leurs œuvres.
Un coup d'œil aux objets musicaux esposés dans le musée, nous a
montré en premier lieu, que l'africain connaît et se sert de tous les
moyens principaux de la production musicale qui nous soient connus, à
l'exception de Tanche à pression du vent, et en second lieu, l'étonnante
variété de formes dans lesquelles il incorpore ces principes. Le professeur
Percival Kirby dans son livre intitulé « Les instruments musicaux des
races indigènes de l'Afrique du Sud » en parlant de l'Afrique du Sud
seulement, fait une liste d'index de plus de 800 instruments de musique
différents. Nous pouvons nous demander si nous en Occident, pouvons
égaler ou battre ce record. En troisième lieu, nous nous rendons compte
que dans le cas de nos propres instruments, nous sommes habitués à un
niveau très élevé de précision, de forme et de mécanisme dans le fini
d'un art poli, né d'une civilisation mécanique et précise : cependant ce
sont des détails mineurs. L'instrument africain en majeure partie, man
que en apparence de précision et de fini. Cependant ils produisent leur
musique en employant exactement les mêmes principes physiques que
leurs contreparties plus sophistiquées de l'occident. Leur différence d'ap
parence découle en majeure partie de la différence dans le niveau de
la conquête du matériau dans les deux cultures. Mais le manque dé
précision ou de fini en forme et apparence n'est absolument pas l'indi
cation d'un manque d'appréciation et d'habileté dans l'art de se servir
des matériaux et des outils dont l'artisan peut disposer dans les limites
de sa propre culture. Afin d'avoir une appréciation de la maîtrise et de
l'habileté avec lesquelles un artisan de village africain fait usage musicaf
des matériaux que la nature met à sa disposition dans sa propre localité,
nous ferions mieux de considérer en détails quelques instruments repré
sentatifs et la façon dont l'africain les fait.
Prenons pour commencer, cet instrument fondamental et universel :
le tambour. En principe c'est tout simplement la section d'un tronc
d'arbre évidée. Evidée ? — considérons le plus attentivement. Si quel
qu'un prend un tronc d'arbre et le vide, surtout dans un pays tropical,
il craquera et l'africain sait tout aussi bien que nous qu'une fêlure dans

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140 PRÉSENCE AFRICAINE

une instrument musical est fatale ; la qu


ruiné. D'une façon ou d'une autre, le tron
Quelle science et quelle habileté permet au
à cela ? ou encore, est-il évidé n'importe
il ne rendrait certainement pas ce ton
africain. Non, l'artisan africain connaît son travail. Il a une connais
sance supranormale et insolite de ce qu'il doit faire, et même avec les
instruments simples dont il dispose, il a trouvé les moyens de plier la
nature à sa volonté. Détaillons un tambour de type simple : une peau
et un trou à l'extrémité opposée. Nous remarquons qu'il a été évidé
ayec soin, le bois est nettement épais à l'extrémité supérieure, là où il
doit supporter la tension de la peau — il devient plus mince vers le
milieu du tronc—, au fait aussi mince que possible sans être fragile, tout
ceci à seule fin de lui donner une résonance ; la base épaissit considéra
blement pour lui donner la résistance voulue contre l'usure ; la base
repose sur le sol en position oblique quand on joue du tambour. En fait
tout le corps de tambour forme un résonateur excellent et très bien
conçu.
Encore une fois, examinons la peau tendue. Il y a trois façons
différentes de l'attacher au tambour, chacune d'elle illustrant la connais
sance accumulée et les aptitudes de l'art populaire (folkcraft). La plus
simple méthode est de laisser tremper la peau, de la tendre fortement
au-dessus du tambour dans n'importe laquelle de deux façons ingé
nieuses ; et de fixer en enfonçant des chevilles de bois dans des trous
préparés d'avance autour du tambour ; puis, de couper la peau superflue.
En ne faisant qu'une seule phrase, nous avons naturellement omis toutes
sortes de petits détails qui sont importants et intéressants, chacun ame
nant une contribution et au son et au travail de fonctionnement. On
pourrait penser qu'une telle méthode entraînerait l'impossibilité d'ac
corder le tambour ; ce n'est pas du tout le cas ; dans les régions où les
peaux de tambour sont de ce type fixe, l'accordage se fait en échauffant
la peau sur un feu pendant quelques minutes jusqu'à ce qu'elle atteigne
une tonalité sonore et satisfaisante. Elle gardera cette tonalité des heures
durant, bien qu'il soit nécessaire de la réchauffer encore si le tambour
est utilisé toute la nuit.
Quand il y a deux peaux on a souvent recours à une méthode plus
soignée ; il s'agit d'attacher les peaux ensemble avec un grand nombre
de, lanières très joliment tordues d'une façon égale et placées tout près
de sorte qu'elles se touchent tout autour du tambour. Dans ce style
toutes les extrémités des peaux sont soigneusement taillées afin d'avoir
un dessin attrayant et artistique autour du tambour, et un tel tambour
est d'une grande beauté. On l'accorde en défaisant le bout de la lanière,
en tirant graduellement et en le resserrant autour du tambour, nous ne
sommes cependant pas certains que ce soit bien là la méthode employée.
On pourrait aussi l'accorder en le réchauffant. Le tambour en forme de
sablier appartient aussi à cette catégorie. De petite dimension afin qu'on

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INSTRUMENTS DE MUSIQUE AFRICAINS 141

puisse le porter sous le bras, ses peaux sont resserrées à l'aide


de cuir, de la façon qu'on vient de décrire. Mais le milieu du
lieu de grossir au maximum, fait juste le contraire — il f
échancrure à la taille de sorte qu'il y a un espace appréciable
et les lanières. Cela permet une ingénieuse manière de jouer :
est tenu sous le bras, les lanières peuvent être serrées ou bie
modifiant ainsi la tension de la peau et naturellement sa ton
le rythme du tambour joue aussi un air.
Au Ghana et autre lieux on a adopté une méthode supér
perce des trous d'environ 12 centimètres au-dessous du haut d
et séparés de 15 à 18 centimètres, cela dépend de la taille du
un cerceau de lianes fortes ou d'autres matériaux convenables,
diamètre que la tête du tambour est cousu très serré sur la p
taillée pour cadrer soigneusement avec lui. Des boucles de for
dépassent de ce cerceau de bois. Celles-ci passent sur des c
forme de crochet, de telle sorte qu'en enfonçant ces cheville
trous sur les côtés du tambour, la peaq peut être tendue sur
quelle longueur voulue. Grâce à cette méthode on obtient trè
accordage précis, avant ou même pendant le jeu.
L'artisan ne manque pas, nous le voyons, d'ingéniosité :
ses problèmes musicaux, il a développé et conçu des méthode
parfaitement adaptées aux matériaux et aux outils dont il
est, par exemple, tout à fait extraordinaire, que quelques
façonnées grossièrement et s'adaptant tant bien que mal dan
qui ne sont pas vraiment circulaires, percés tout à fait appro
ment, puissent tenir parfaitement et sans glisser, une peau
serrée, sur laquelle un maître, joueur de tambour frappe
heures avec une force considérable. C'est un parfait exemple
appliquée qui englobe les moments des forces et les effets de
Sans connaître ces théories, l'africain a découvert leur applic
tique, c'est le même principe qui a été employé sur les croch
démodés des vieux charpentiers anglais. C'est en faisant atten
tels détails qui sont néanmoins absolument essentiels comme
nous pourrons nous faire une idée juste de l'ingéniosité du fa
d'instruments de village.
Arrêtons-nous à la famille des instruments à vent. Si on a u
et les outils convenables, évidemment la marche à suivre pou
instrument ressemblant à une flûte sera de percer un trou d
du matériau choisi. C'est le procédé essentiel et fondam
l'africain n'a pas développé un tour de précision capable d
longs trous : cela ne Ta pas du tout découragé, l'artisan d'inst
musicaux est arrivé au but désiré par différentes métho
pousse beaucoup de bambous, c'est chose simple que de percer
d'un fer chauffé à blanc les nœuds d'une tige de bambou, obt
un tuyau dont l'intérieur est assez lisse. Mais il y a des grand
africains où ne poussent pas le matériau qui comme le bambo

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142 PRÉSENCE AFRICAINE

si bien, et où, pourtant, la flûte es


peuvent servir à faire des sifflets —
patte de l'oiseau « secrétaire » (serpen
que du Sud ont des flûtes faites de
chat sauvage. Les BUSHMEN se serven
seur Kirby rappelle que le terme « tib
seulement l'os du tibia, mais aussi un
ont un précédent classique pour leur
sifflets qui sont fabriqués en Afrique
rien d'autre que la pierre de talc. Il
culièrement remarquer au sujet de ce
lible de l'africain qui a le génie de fai
les plus simples.
Les Swazi ont un modèle plus rem
Kirby nous dit : « On l'appelle « luvev
parce que maintenant le gibier est r
le sont aussi. Un bout de bois dur est taillé en forme de corne d'une
jeune antilope, tel un impala, puis est soigneusement divisé au centre.
Chaque moitié est alors évidée, mises ensemble elles forment un tube
conique, qui est recouvert de la peau mouillée d'une queue de bœuf.
Quand elle est sèche, une boucle de cuir ou une lanière est attachée
autour de l'instrument de sorte qu'il peut être suspendu au cou du
musicien. » Ceci est un exemple intéressant de la victoire de l'art sur les
matériaux et les outils. Quoiqu'un africain puisse facilement évider un
tambour, il n'a pas les outils voulus pour faire un trou symétrique et
lisse dans un objet aussi petit qu'un sifflet ou une courte flûte. Il adopte
l'audacieux expédient de façonner l'extérieur d'abord, puis de couper
l'objet en deux et d'évider chaque partie. Maintenant, il est prouvé que
les instruments à vent sont notoirement sensibles aux fuites d'air : une
seule petite fuite d'air et ils ne sont pas utilisables. Alors, au lieu
d'attacher les deux moitiés avec une lanière de cuir — qui entraînerait
probablement une fuite d'air, l'africain adopte une méthode parfaite
pour résoudre ce problème; la peau de queue de bœuf, est un boyau
qui ne laisse pas passer une fuite d'air : étendue sur les deux sections
de bois lorsqu'elle est encore mouillée, elle se contracte en séchant,
resserre fortement les jointures. Un meilleur procédé ne saurait être
inventé. 11 est parfaitement adapté aux circonstances.
Si l'on doit se servir des flûtes pour des ensembles, on doit pouvoir
les accorder entre elles. Les tribus sud-américaines qui ont des ensembles
de flûtes, les accordent à l'aide d'une cheville amovible (placée) dans
le tuyau et dont la position peut être ajustée en se servant d'un bâton
enfoncé dans le tuyau qui varie ainsi le ton. Ici, à part cette façon tris
pratique d'accorder, nous notons l'usage des flûtes « bouchées ». Cepen
dant que nous en Occident nous employons ce système de blocage des
tuyaux, principalement dans les orgues, où on trouve par exemple un
diapason « ouvert » et un diapason « bloqué », ce qui veut dire que dans

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INSTRUMENTS DE MUSIQUE AFRICAINS 143

le dernier cas tous les tuyaux sont bouchés à l'autre extré


verture. L'africain a découvert et se sert du même pri
ensembles de flûtes et aussi de la méthode pour l'accordéo
les deux cas se fait en bougeant la cheville jusqu'à obte
voulue. Il pourrait naturellement adopter une des autres m
aurait pu avoir une partie réglable du tuyau afin de pouvo
ou le raccourcir, ou bien il pourrait avoir un nombre d
avec des chevilles détachables, et percés près de l'ouvertur
le fait souvent en Angleterre, dans des flûtes de bambous
mais la méthode qu'il a adoptée par goût est exactemen
celle qui, par expérience, nous a satisfait.
Prenons un autre cas. Il y a assez largement répandu
tout au moins au sud, au centre et à l'ouest du contine
métallophone appelé par quelques tribus « SANSA » et
d'Européens le « Tiano Kaffir ». Il consiste en une table d'
la grandeur varie entre 12 centimètres de long sur 9 de la
de long sur 21 cm de large. Une rangée de fourchons dont
de six à environ quatorze est fixée sur cette table. Ils sont
sement accordés, mais les diapasons varient de tribus e
que l'ordre des notes. Par exemple, quelques modèles on
nos pianos, la note la plus basse à l'extrême basse, et vers
notes suivent un ordre de tons ascendants, tandis qu'une
aiguës auxiliaires sont habituellement incluses au milieu d
afin de faciliter le jeu des mélodies soprano. D'autres mod
avoir les notes basses au centre et les notes aiguës distrib
côté. Dans tous les cas, les mains soutiennent un résonateur
sous l'instrument qui lui-même est tenu par le majeur de
Les notes métalliques sont pincées par les pouces et u
obtient ainsi une musique d'une haute valeur artistique. En
on voit un tel instrument on ne peut pas imaginer le b
musique qu'il peut rendre, ou la maîtrise de détails qu
construction. C'est réellement une merveille d'ingéniosité
une connaissance approfondie des sons et de l'art de fabriqu
ments. La simplicité même de l'application de ces principe
au génie qui l'a conçu, car n'est-il pas généralement vrai q
au plus parfait développement d'un mécanisme quand o
son expression la plus simple ? Nos propres invention
étaient d'abord encombrantes, lourdes, et incommodes; dev
de les rendre plus efficaces, elles s'allègent, les détails
supprimés, et leur simplicité finale est souvent esthétiqu
on peut dire de même pour la SANSA. Pour qui a l'ha
science appliquée, et de l'artisanat, une simple SANSA
quelque chose digne d'admiration. Quelques détails serv
hommage à cette ingéniosité. Chaque instrument est basé s
connu : la vibration d'une anche. Si la lamelle d'un mét
fixée à une extrémité et libre de l'autre, elle émettra une n

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144 PRÉSENCE AFRICAINE

met en vibration ; mais il faut un m


cela en fabriquant ses notes avec du fe
clous français. Or, les clous sont de fer
tout du fer malléable. Aussi dans les de
fois sur une forge de charbon où les
en les martelant constamment quand i
à blanc — ils sont plus ou moins « for
leur composition chimique et leur trai
ticité à ce fer, qui était en premier lie
musical, a été transformé par les moy
possédant de bonnes propriétés musica
Maintenant, le ton d'une note don
sa longueur et de sa grosseur, mais
faisons une gamme ascendante de four
nous aurons une série de lamelles de
régulièrement, et cette longueur dimi
bre vibratoire, mais en fonction de so
grande différence de longueur entre l
aiguës, et nous aurons un instrument
d'une façon incertaine des doigts du
l'affaire, parce que le jeu est rapide, à p
et pour jouer juste, les notes, quand el
en ligne ou sur une courbe douce. L'Af
les lamelles basses et en augmentant
lamelles en remontant la gamme. Ce q
doivent être beaucoup plus longues q
avaient été de la même grosseur que le
est en mesure d'ajuster les grosseurs a
accord et en ligne. Comment celui-ci a
avancée ? Nous lui devons hommag
les tables de carrés mathématiques, ni
graduée, et pourtant avec les outils les
pour enclume, un marteau et un souff
tat musical et pratique. Mais il y a p
de la même grosseur, cela n'aurait p
changé le volume du son et l'aisance
extrêmement faibles et beaucoup trop
donc la largeur régulièrement, lorsqu'i
les notes basses deviennent plus rig
seraient autrement. On pourrait répond
avec des bouts de fer tous de même
pour former une gamme descendante,
d'avoir les notes basses il aurait eu à
automatiquement plus large, ce peut
est de la nature d'un non sequitur, c
de la symétrie dans la largeur de ses n

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INSTRUMENTS DE MUSIQUE AFRICAINS 145;

les notes basses en se servant d'un bout de fer moins long, qu


même diamètre. Cela lui donnerait un fourchon qui serait mo
mais de la même largeur que celle des notes aiguës. 11 n'e
moins vrai qu'actuellement ses notes basses sont plus larg
notes aiguës, et possèdent de ce fait les qualités nécessaires de
et de sonorité si l'instrument est bien conçu.
Parlons maintenant de la fixation des lamelles. Avec le matériel
disponible et l'absence totale de boulons et vis, il lui faut un moyen
de fixer solidement les lamelles pour les empêcher de trembler là où<
elles reposent sur le support de l'instrument, de laisser assez de sou
plesse pour permettre le remplacement aisé d'une note abimée ou
insastisfaisante, et aussi l'accordage délicat de la lamelle en la déplaçant
un peu soit en avant soit en arrière. L'Africain a triomphé de cette
difficulté. Nous nous permettons donc une petite digression pour signa
ler l'éclat de sa découverte. Tout récemment l'auteur avait voulu
construire un appareil dans lequel un grand nombre d'anches devaient
être montées tout près l'une de l'autre sur un résonateur de façon à
permettre un accordage délicat d'environ 2 vibrations par seconde.
C'était un problème de construction presqu'insurmontable, et il demande
conseil au directeur d'une firme fabriquant des instruments de bois.
Cette homme avait quarante ans d'expérience. Ce directeur a déclaré
que d'accorder des anches dans les limites si étroites était une chose
extrêmement délicate, qu'il faudrait les « gratter sans les toucher » et
même qu'ainsi cela demanderait une grande patience, que ce ne serait
peut-être pas possible de les monter si près l'une de l'autre. Il refusa de
le faire. Réduit à nos seules ressources, nous pensâmes à l'Africain et à
son piano-kaffir, et nous nous dîmes : « voici une méthode parfaitement
simple qui nous permettra de réussir si seulement nous y ajoutions un
peu de la précision de 1 l'artisanat occidental. Réussira-t-elle ? » Natu
rellement si. L'instrument fut un succès du premier coup, et nous avons
émis l'hypothèse que ce devrait être là le seul instrument de précision
pour mesurer le son, dont un des principes a été emprunté directement
au village africain. Il est bon de savoir et de noter que l'on se sert de
cet appareil pour analyser le langage africain. Ainsi l'Africain a contri
bué personnellement à l'analyse scientifique de sa propre langue.
La façon dont l'Africain fixe ses fourchons est si simple qu'on pour
rait s'attendre à ce que ce soit mauvais, mais comme nous l'avons
démontré, cette méthode est scientifiquement exacte. Tout ce qu'il fait
est de placer sur la table d'harmonie une mince bande de métal servant
de support ; derrière celle-çi, il met un bloc de bois à peu près de la
même taille ; entre ces deux pièces et au-dessus d'eux il fixe un crochet
de métal. Les trois pièces sont parallèles. Quand il place un fourchon, il
le pousse par-dessus le bloc de bois, sous le crochet de fer et par-dessus,
le support. Ces trois pièces le tiennent en position, et c'est tout. On
pourrait penser, spécialement dans le cas des notes plus étroites, qu'avec
les anches délicates et minuscules dont nous nous servons dans notre

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146 PRÉSENCE AFRICAINE

appareil, elles trembleraient ou gliss


cause du mouvement de leur propre vi
L'Africain a découvert un moyen parf
d'anches minuscules.
Nous pourrions continuer à donner des exemples du succès de cet
instrument en ce qui concerne l'exploitation des matériaux et des prin
cipes scientifiques, mais il faut être bref. Il nous suffit de dire que le
principe de tables d'harmonie est très employé, que le résonateur de
calebasse a un très joli rebord de fibres tissées autour de l'ouverture,
ce qui remplace l'emploi du feutre dans les pianos européens, et évite
ainsi le tremblement causé par le libre contact de surfaces dures et
vibrantes quand le résonateur est tenu sous la table d'harmonie pendant
le jeu, et qu'en façonnant les clous selon la forme voulue, l'artisan
semble être conscient des problèmes causés par les harmoniques, voulues
-ou pas voulues. Celles-ci peuvent-être contrôlées par les dimensions
exactes de la forme du fourchon, et l'auteur en éprouva l'efficacité
quand il fabriqua lui-même un fourchon pour un de ces pianos afri
cains. Lorqu'il l'eut terminé, le fourchon avait la bonne longueur et
donnait la bonne note, mais il y a quelque chose qui n'allait pas,
qu'il ne pouvait rectifier. C'était sourd et ce n'était pas la sonorité riche
du modèle. Cela n'avait pas l'air musical. 11 y avait quelque chose qui
m'était pas bien dans les harmoniques. Oh oui, le « piano-kaffir » est uh
exemple frappant de l'art appliqué et du savoir. L'Africain a créé un
Instrument musical qui produit un très joli son.
Les modèles les plus avancés de l'art des instruments musicaux
d'Afrique que nous connaissons, sont des xylophones des Chopi de
l'Afrique Orientale Portugaise. Un xylophone africain est essentielle
ment composé d'une série de plaques de bois accordées, d'une moyenne
de 50 centimètres de long par 10 de large et de 2,5 centimètres
-d'épaisseur aux extrémités, approximativement, attachées par des
lanières au-dessus d'une série de résonateurs en calebasse. Ic xylophone
peut avoir à peu près dix-huit notes. Les chopi jouent de ces instruments
en orchestres, démontrant ainsi qu'ils ont maîtrisé l'art d'accorder un
nombre d'instruments de la même tonalité uniforme. C'est en soi une
grande prouesse. De plus, ces instruments ne servent pas seulement
pour jouer à l'unisson, ils sont employés en harmonie, puisque certains
sont soprano, alto, tenor, basse et double basse, et accordés de telle
sorte que les notes aiguës des xylophones tenor réapparaissent comme
les notes basses de l'alto, l'alto et le soprano ayant la même parenté.
Voici donc un parfait orchestre d'instruments accordés, chose surpre
nante en Afrique, où dans la majorité des cas, les instruments
quoiqu'ils soient accordés à la même gamme particulière de la tribu,
ne sont pas néanmoins accordés entre eux, car l'Africain n'attache pas
généralement beaucoup d'importance, et n'est probablement pas cons
cient du ton absolu. Il accorde ses instruments sur n'importe quelle note
fondamentale qui lui convient. Mais retournons au xylophone des Chopi.

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INSTRUMENTS DE MUSIQUE AFRICAINS 147

La seule façon d'estimer et d'apprécier pleinement l'instrum


est de découvrir autant que possible les infimes détails de sa
tion. Ce n'est pas facile. Le fabricant africain considère com
acquis les différents facteurs présents, et le chercheur euro
facilement perdre de vue ce que cela signifie. Cependant
du xylophone, Mr. Hugh Tracey dans son livre « Musicie
(International African Institute, 1948) nous donne tous les d
nous voulons et s'étend plus longuement que nous ne pouvon
ici. Prenons quelques points saillants :
Que les plus grands artisans ont un sens extraordinaire
absolu, du fait qu'ils ont l'air de fabriquer un nouveau xy
de l'accorder sans se référer à l'ancien comme modèle. La note centrale
ou tonique de l'instrument est appelée « Hombe ». Quelques-uns des
fabricants, écrit Mr. Tracey, prétendent qu'ils peuvent dire le ton exact
de 1« Hombe » sans se baser sur aucun autre instrument. J'ai vérifié
cela avec mon diapason, cette prétention semble être justifiée dans beau
coup de cas. J'ai trouvé la même sûreté de ton chez les musiciens
« Shona » de la Rhodésie du Sud, et bien que l'on ne possède pas un
dossier suffisant pour le prouver, on peut dire néanmoins qu'ils sont
aussi capables de définir leurs propres tons familiers, que ceux d'entre
nous qui prétendent avoir le ton absolu.
Mr. Tracey compare l'accordage de plusieurs grands fabricants de
xylophones. Prenons les trois premières notes de trois de ces instru
ments. Les vibrations par secondes de chacun sont respectivement :

XYLO. A XYLO. B XYLO. C

Première note 316 320 316


Deuxième note 288 284 288
Troisième note 256 260 260

Il serait juste de dire qu'il cite aussi d


une corrélation si serrée. Mais les exemple
ne peuvent pas être seulement de la coï
que tout ceci se fait par oreille, la justesse
qu'extraordinaire, surtout lorsque nous
veulent établir un octave dans la gamme m
ser l'octave en sept parties égales, chacu
ton entier. A l'oreille ils devinent assez
communs d'une gamme heptatonique à i
nous estimons impossible d'imiter en Occi
Un double procédé est nécessaire pour ac
plaque de bois et son résonateur doivent êt
plaque de bois est taillée sous les côtés et c
les deux extrémités épaisses. En creusant d
on rabaisse le ton en éminçant les extré

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148 PRÉSENCE AFRICAINE

naison judicieuse de ces deux procédés p


sa note la tonalité voulue. Comment fa
sur le xylophone sans déformer les vibrat
pas fixée d'une façon immobile en auc
■connue en physique du son comme un « f
En effet chaque extrémité est libre de vib
elle vibre, a deux nodules, c'est-à-dire d
est nulle. Ceux-là se trouvent à environ
plaque. Comme il n'y a pas de vibration
■dommage se servir d'une attache quelcon
ment. Les Chopi connaissent parfaitement
aux deux nodules ils percent un trou à
lanière de cuir pour attacher la plaque à la
Chaque plaque à son propre résonateur d
le fabricant sait choisir la calebasse de la taille voulue pour une note
■donnée. Il le rogne tout autour de l'orifice jusqu'à ce qu'elle réponde
par vibration sympathique à une note un peu plus aiguë que celle de la
plaque à laquelle elle est destinée. Il applique alors autour de cette
ouverture un col de cire, abaissant par ce moyen le ton, et continue
de le faire, tout en frappant sur la plaque placée au-dessus, jusqu'à ce
■que le résonateur produise une tonalité pleine et ronde qui proclame
sans équivoque que l'instrument est accordé dans la juste mesure. Il
■est remarquable que le villageois africain soit capable de connaître les
•caractéristiques hautement sélectives des résonateurs sympathiques.
Tandis que nous en Occident, si nous pensons à des résonateurs sympa
thiques, nos pensées se tournent vers les laboratoires de physique de
Berlin où le professeur Helmholtz, le père de la physique du son, fit
et se servit des « bouteilles Helmholtz ». Nous ne nous attendons pas à
trouver le même genre d'appareil dans un village africain mais il s'y
trouve en grand nombre, au vu et su de n'importe qui.
Voici seulement quelques points d'intérêt technique, choisi parmi
beaucoup. On pourrait par exemple continuer à démontrer que les Chopi
•connaissent parfaitement bien les qualités différentes d'une note pro
duite par la grosseur ou le degré de dureté des marteaux que les joueurs
•de tambour emploient pour frapper. Ce qui fait qu'ils ont à leur dispo
sition toute une série de marteaux à l'usage des différentes notes de leurs
instruments. Mr Tracey nous dit : — « Le principe est le suivant : Que
le coup frappé sur la surface de MBILA doit évoquer immédiatement la
note fondamentale en faisant vibrer le bois. Si le marteau est trop dur,
les ondes courtes sont mises en jeu et la note fondamentale peut rester
morte. Cela donne un son sec et maigre que l'on associe aux xylophones
■européens. D'un autre côté, si le marteau est trop mou, il ne rendra pas
de note du tout dans les registres aigus ; c'est pour cette raison que les
joueurs Chopi ont dans leur main droite un marteau plus lourd que
■dans leur main gauche (exception faite des joueurs gauchers) ; cela im
plique, dans l'ensemble de l'orchestre, une gradation de marteaux de

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INSTRUMENTS DE MUSIQUE AFRICAINS 149

six ou sept degrés de dureté — le marteau le moins dur


grosse tête.
Nous avons commencé nos recherches en examinant les instruments
africains, tous muets dans un musée. Mais l'on reconnaît l'arbre à son
écorce. — Quel genre de musique rendent-ils ? Quel son ont-ils ? —
Beaucoup de ces instruments, on doit l'admettre facilement, sont d'une
étendue limitée, donnant peut-être trois ou quatre notes seulement, et
beaucoup ont l'air de n'être accordés qu'approximativement. D'un autre
côté, les instruments importants dont se servent les musiciens africains
sont de véritables instruments capables de produire de la musique sub
tile, bien accordée et certainement belle. Naturellement l'accordage des
notes ne donnera pas nos échelles européennes. Nous avons déjà fait
observer au commencement de cet essai que notre 3 « TEMPÉRAMENT
ÉGAL », le matériel même avec lequel nous construisons nos gammes,
est une idiosyncrasie conçu par notre propre sélection des accords de
musique, et nous ne pouvons pas nous attendre à ce que d'autres gens
adoptent nécessairement les mêmes moyens pour créer de la musique
agréable. Mais on ne peut mettre en doute la beauté intrinsèque de la
musique africaine. Au sujet du « piano-kaffir » nous avons déjà eu l'oc
casion d'écrire « la mélodie est courte mais répétée plusieurs fois, mais
un bon joueur introduit continuellement des variations subtiles de
mélodies, de rythme ou d'harmonie, et il n'est pas de passages ennuyeux
pour ceux qui savent ce qui se passe : Le joueur joue seul ; il murmure
la partition du chanteur ; le chœur se joint à lui doucement et avec
sentiment ; ils s'arrêtent ; et il continue à jouer solo pendant environ
trente secondes ; puis il chante la partition du chanteur pour le second
verset et ainsi de suite. C'est une belle performance. Il a exprimé un
regret, un charme lointain qui dépasse la description. Mais si quelqu'un
veut trouver l'âme même de la beauté de la musique africaine, il lui
faut écouter le soir, un groupe d'Africains conduit par un joueur
KANKOWELA.
De la même manière, mais de façon plus emphatique, on pourrait
le dire des orchestres de xylophones ou de tambours. Entendre un
ensemble de xylophones est une expérience aussi excitante que d'enten
dre un concert symphonique joué par un orchestre européen de premier
ordre. La virtuosité du jeu, les cadences en cascades des passages. La pose
momentanée pendant que le joueur joue solo, et puis le plongeon dra
matique de tout l'orchestre dans un bain de sons effrénés, cependant
conscients et co-ordonnés, est vraiment saisissant. De même avec les
tambours malgré leur apparence grossière ou simple, quand ils réson
nent ensemble, que les gens frappent des mains, chantent et dansent,
aucun musicien digne de ce nom ne pourra s'empêcher d'en être captivé.
C'est une musique d'ordre supérieur. Différente de la nôtre ? — oui —
parce qu'elle est basée sur un principe rythmique différent, mais qui ne
vaut pas moins une considération sérieuse et une approbation aussi
honnête que la nôtre. Tout ceci est l'expression musicale d'une race

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ISO PRÉSENCE AFRICAINE

musicale, qui, afin de donner une expr


esthétique, en dépit de l'handicap, à ce
et d'outils inadéquats, a produit des instr
capables de satisfaire ce besoin pressan
peuvent être que beaux, jugés du point de
culture musicale. Elle renferme d'ailleurs
paraître. Ces instruments sont témoins to
lequel l'africain a triomphé de son milieu
de son savoir, et de son habileté comme ar

A. M. Jones.
Professeur à l'Ecole des langues orientales et Africaines, à Londres.

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