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Le Drapeau rouge

Le Drapeau rouge version 2

Le Tombeau des fusillés

J’ai faim

Elle n'est pas morte

Le Temps des cerises

Le Mouvement du 18 mars

Quand viendra-t-elle ?

Le sire de Fisch-ton-kan

L'Insurgé

Le Capitaine au mur

Le moblot

La semaine sanglante

La Communarde

La canaille

Paris n’est pas perdu

La Défense de Paris

L’Armistice

L’Internationale

Le Chant des ouvriers

Jean Misère

Leur bon Dieu


Le Drapeau rouge

de Paul Brousse

Les révoltés du Moyen-Âge


L’ont arboré sur maints beffrois.
Emblème éclatant du courage,
Toujours il fit pâlir les rois.

Refrain
Le voilà !, Le voilà ! Regardez ! Noble étendard du prolétaire,
Il flotte et fièrement il bouge, Des opprimés sois l’éclaireur.
Ses longs plis au combat préparés, À tous les peuples de la terre
Osez, osez le défier ! Porte la paix et le bonheur !
Notre superbe drapeau rouge !
Rouge du sang de l’ouvrier ! (bis) Les braves marins de Russie,
Contre le tsarisme en fureur,
Il apparut dans le désordre Ont fait flotter jusqu’en Asie
Parmi les cadavres épars, Notre drapeau libérateur !
Contre nous, le parti de l'Ordre
Le brandissait au Champ de Mars Un jour sa flamme triomphale
Luira sur un monde meilleur,
Puis planté sur les barricades, Déjà l’Internationale
Par le peuple de février Acclame sa rouge couleur !
Il devint pour les camarades,
Le drapeau du peuple ouvrier.

Quand la deuxième République


Condamna ses fils à la faim,
Il fut de la lutte tragique,
Le drapeau rouge de juin !

Sous la Commune il flotte encore


À la tête des bataillons
Et chaque barricade arbore La première version de ce chant
Ses longs plis taillés en haillons ! (couplets I, III et VI) fut écrite en 1877 par
le socialiste Paul Brousse, ancien
Variante : Communard réfugié en Suisse, sur un air
Sous la Commune il flotte encore local, Armons-nous enfants de l'Helvétie
À la tête des bataillons
L’infâme drapeau tricolore
En fit de glorieux haillons !
Drapeau rouge (1877)
1877
Paroles : Achille Leroy à partir de la
chanson de Paul Brousse [1]
Musique : Air suisse anonyme

Les révoltés du Moyen Age


Sous la Commune, il flotte encore
L’ont arboré sur maints beffrois.
À la tête des bataillons.
Emblème éclatant du courage,
L’infâme drapeau tricolore
Toujours il fit pâlir les rois.
En fit de glorieux haillons.

Refrain
Refrain
Le voilà, le voilà, regardez !
Il flotte et fièrement il bouge,
Un jour sa flamme triomphale
Ses longs plis au combat préparés,
Luira sur un monde meilleur
Osez, osez le défier,
Déjà l’Internationale
Notre superbe drapeau rouge,
Acclame sa rouge couleur.
Rouge du sang de l’ouvrier. (bis)

Puis planté sur les barricades 1. ↑ Achille Leroy a retravaillé la


Par le peuple de Février chanson de Paul Brousse, a rajouté un
couplet et entièrement changé le
Lui le signal des fusillades dernier. Les changements par rapport à
Devint drapeau de l’ouvrier. la version de Paul Brousse sont
indiqués en italique.

Refrain

Quand la deuxième république


Condamna ses fils à la faim
Il fut de la lutte tragique
Le drapeau rouge de Juin.

Refrain
Le Tombeau des fusillés
mai 1887: Jules Jouy Air de "La chanson J’ai faim
des Peupliers" de F. Doriat
En hommage aux 147 communards fusillés au Père
Lachaise le 28 mai 1871. Eugène Pottier
1848
Ornant largement la muraille,
Au citoyen FAUVERT.
Vingt drapeaux rouges assemblés
Cachent les trous de la mitraille
J’ai faim ! j’ai faim ! dit le corps,
Dont les vaincus furent criblés.
Je n’ai pas le nécessaire ;
Le ver ronge moins les morts
Bien plus belle que la sculpture
Que les vivants, la misère.
Des tombes que bâtit l'orgueil,
Quand donc aurais-je du pain ?
L'herbe couvre la sépulture
J’ai faim, dit le corps, j’ai faim !
Des morts enterrés sans cercueil.

J’ai faim ! j’ai faim ! dit l’esprit,


Ce gazon, que le soleil dore,
Je ne vais pas à l’école ;
Quand mai sort des bois réveillés,
En vain la nature écrit,
Ce mur que l'histoire décore,
On croit l’erreur sur parole.
Qui saigne encore,
Quand donc aurai-je du pain ?
C'est le tombeau des fusillés. (bis)
J’ai faim, dit l’esprit, j’ai faim !

Loups de la Semaine Sanglante,


J’ai faim ! j’ai faim ! dit le cœur,
Sachez-le, l'agneau se souvient.
Et je n’ai pas de famille ;
Du peuple, la justice est lente,
Mon fils est un escroqueur
Elle est lente, mais elle vient !
Et ma fille est une fille.
Le fils fera comme le père ;
Quand donc aurai-je du pain ?
La vengeance vous guette au seuil ;
J’ai faim, dit le cœur, j’ai faim !
Craignez de voir sortir de terre
Les morts enterrés sans cercueil !
J’ai faim ! j’ai faim ! dit le tout,
Faim d’amour et de justice ;
Tremblez ! Les lions qu'on
Sème ton grain, que partout
courrouce
La triple moisson jaunisse.
Mordent quand ils sont réveillés !
Alors l’homme aura du pain,
Fleur rouge éclose dans la mousse,
Nature n’aura plus faim !
L'avenir pousse
Sur le tombeau des fusillés ! (bis)
La Commune de Paris Paroles d'Eugène Pottier (1886) sur l'air de
Elle n'est pas morte T'en fais pas Nicolas de Parizot

On l’a tuée à coups de chassepot,


À coups de mitrailleuse
Et roulée avec son drapeau
Dans la terre argileuse.
Et la tourbe des bourreaux gras C’est la hache de Damoclès
Se croyait la plus forte. Qui plane sur leurs têtes.
À l’enterrement de Vallès,
Refrain Ils en étaient tout bêtes
Tout ça n’empêche pas Nicolas Fait est qu’on était un fier tas
Qu’ la Commune n’est pas morte. À lui servir d’escorte
Tout ça n’empêche pas Nicolas
Qu’ la Commune n’est pas morte ! C’ qui prouve en tous cas Nicolas,
Qu’la Commune n’est pas morte.
Comme faucheurs rasant un pré, C’ qui prouve en tous cas Nicolas,
Comme on abat des pommes, Qu’la Commune n’est pas morte !
Les Versaillais ont massacré
Pour le moins cent mille hommes. Bref tout ça prouve au combattant
Et les cent mille assassinats, Qu’ Marianne a la peau brune,
Voyez ce que ça rapporte. Du chien dans l’ ventre et qu’il est temps
D’crier vive la Commune !
On a bien fusillé Varlin, Et ça prouve à tous les Judas
Flourens, Duval, Millière, Qu’si ça marche de la sorte
Ferré, Rigault, Tony Moilin,
Gavé le cimetière. Ils sentiront dans peu nom de Dieu,
On croyait lui couper les bras Qu’la Commune n’est pas morte.
Et lui vider l’aorte. Ils sentiront dans peu nom de Dieu,
Qu’la Commune n’est pas morte !
Ils ont fait acte de bandits,
Comptant sur le silence.
Achevez les blessés dans leur lit,
Dans leur lit d’ambulance
Et le sang inondant les draps
Ruisselait sous la porte.

Les journalistes policiers,


Marchands de calomnies,
Ont répandu sur nos charniers
Leurs flots d’ignominie.
Les Maxim’ Ducamp, les Dumas
Ont vomi leur eau-forte.
Le Temps des cerises
Le Temps des cerises est une chanson dont les paroles furent écrites en 1866 par Jean-
Baptiste Clément et la musique composée par Antoine Renard en 18681. Cette chanson est
fortement associée à la Commune de Paris de 1871, l'auteur étant lui-même un communard
ayant combattu pendant la Semaine sanglante. Le Temps des cerises fut dédiée par l'auteur à
une infirmière morte lors de la Semaine sanglante, longtemps après la rédaction de la
chanson2.

Quand nous en serons au temps des cerises


(Quand nous chanterons le temps des cerises)
Et gai rossignol et merle moqueur
Seront tous en fête
Les belles auront la folie en tête
Et les amoureux du soleil au cœur
Quand nous en serons au temps des cerises
Sifflera bien mieux le merle moqueur

Mais il est bien court le temps des cerises


Où l'on s'en va deux cueillir en rêvant
Des pendants d'oreilles
Cerises d'amour aux robes pareilles (vermeilles)
Tombant sous la feuille en gouttes de sang...
Mais il est bien court le temps des cerises
Pendants de corail qu'on cueille en rêvant !

Quand vous en serez au temps des cerises


Si vous avez peur des chagrins d'amour
Évitez les belles !
Moi qui ne crains pas les peines cruelles
Je ne vivrai pas sans souffrir un jour…
Quand vous en serez au temps des cerises
Vous aurez aussi des peines d'amour !

J'aimerai toujours le temps des cerises


C'est de ce temps-là que je garde au cœur
Une plaie ouverte !
Et Dame Fortune, en m'étant offerte
Ne pourra jamais calmer (fermer) ma douleur…
J'aimerai toujours le temps des cerises
Et le souvenir que je garde au cœur !
Le Mouvement du 18 mars
L. Ferré P. Dupont

Vous voulez nous faire la guerre


Messieurs de la réaction, Vos maximes sont arbitraires.
Nous vous réduirons en poussière, Loin d’être de vaillants guerriers,
Car votre lâche trahison Vous avez, lâches sanguinaires,
A pour longtemps perdu la France. Frappé de vos coups meurtriers,
Les républicains sont tous prêts Et nos enfants et nos compagnes ;
A faire éclater leur vengeance, Vous êtes d’ignobles soldats ;
Vos lauriers seront des cyprès. (bis) Et nos frères de nos campagnes
Sont trahis par vous scélérats ! (bis)
Refrain: Refrain
Tremblez (bis), argousins et
gendarmes,
Car les républicains français
Vous punissant de vos forfaits Oui, votre guerre de sauvage
Feront de glorieux hauts faits. Vous causera mille tourments,
Tout le peuple a crié (aux armes !) Car vous n’aurez pas l’avantage
(ter) De revenir en conquérants.
Et certes il aura les succès. Croyez-bien que votre furie
Recevra sa juste rançon.
Commençant la guerre civile Nous paierons votre barbarie
Vous criâtes vive le Roi ; Par la mitraille et le canon. (bis)
Mais dans Paris la grande ville Refrain
En vous tous on n’a plus foi,
Nous garderons la République. Nous sommes tous levés en masse :
A bas vos projets dictateurs ! Pour vous c’est l’heure du danger.
Vous êtes vaincus sans réplique Nous allons vous faire la chasse ;
Infâmes capitulateurs. (bis) Vous êtes pour nous l’étranger ;
Refrain Contre vous la France s’est levée,
Ainsi que son rouge drapeau.
Notre République est sauvée :
Tyrans descendez au tombeau.

Refrain
Quand viendra-t-elle ?
E. Potttier / Max Rongier

Au citoyen MIJOUL

Bétail, on m’attelle ;
J’attends une belle
Esclave on me vend.
Une belle enfant,
La guerre est cruelle,
J’appelle, j’appelle,
L’usurier pressant.
J’en parle au passant.
Ah ! je l’attends, je l’attends,
Ah ! je l’attends, je l’attends,
L’attendrai-je encore longtemps ?
L’attendrai-je encore longtemps ?
La guerre est cruelle,
J’appelle, j’appelle,
L’usurier pressant.
J’en parle au passant,
L’un suce ma moelle,
Que suis-je sans elle ?
L’autre boit mon sang.
Un agonisant.
Ah ! je l’attends, je l’attends,
Ah ! je l’attends, je l’attends,
L’attendrai-je encore longtemps ?
L’attendrai-je encore longtemps ?
L’un suce ma moelle,
Que suis-je sans elle ?
L’autre boit mon sang.
Un agonisant.
Ma misère est telle,
Je vais sans semelle,
Que j’en suis méchant.
Sans rien sous la dent.
Ah ! je l’attends, je l’attends,
Ah ! je l’attends, je l’attends,
L’attendrai-je encore longtemps ?
L’attendrai-je encore longtemps ?
Ma misère est telle,
Je vais sans semelle,
Que j’en suis méchant.
Sans rien sous la dent.
Ah ! viens donc la belle,
Transi quand il gèle,
Guérir ton amant !
Sans gîte souvent.
Ah ! je l’attends, je l’attends,
Ah ! je l’attends, je l’attends,
L’attendrai-je encore longtemps ?
L’attendrai-je encore longtemps ?

Transi quand il gèle,


Sans gîte souvent.
J’ai dans la cervelle
Des mots et du vent…
Ah ! je l’attends, je l’attends,
L’attendrai-je encore longtemps ?

J’ai dans la cervelle


Des mots et du vent…
Bétail, on m’attelle ;
Esclave on me vend.
Ah ! je l’attends, je l’attends,
L’attendrai-je encore longtemps ?
Le sire de Fisch-ton-kan Ses voisins,
La politiqu', c'est un' roulette,
Paul Burani 1870 Rouler, on ne sort jamais d'là,
Jamais d'là,
Il avait un’ moustache énorme,
Mais lui roulait sa cigarette,
Un grand sabre et des croix partout,
Puisqu'il ne pouvait rouler qu'ça,
Partout, partout !
Vait rouler qu'ça.
Mais tout ça c’était pour la forme,
Et ça n’servait à rien du tout,
Refrain
Rien du tout,
C’était un fameux capitaine
Des pieds et des mains tout'sa vie,
Qui t’nait avant tout à sa peau,
Il avait tant fait qu'certain soir,
A sa peau !
Qu'certain soir,
Un jour il voit qu’son sabre l’gêne,
Sur le trône, objet d'son envie,
Aux enn'mis, il en fait cadeau,
Il avait fini par s'asseoir,
Quel beau cadeau !
Par s'asseoir !
Depuis sans crainte et sans secousse,
Refrain :
Il veillait au trésor surtout,
V’là le sir’ de Fisch-ton-Kan
'Sor surtout :
Qui s’en va-t-en guerre,
En y mettant quatr' doigts et l'pouce,
En deux temps et trois mouv’ments,
Histoir' d'avoir la main partout,
Sens devant derrière,
La main partout !
V’là le sir’ de Fisch-ton-Kan
Qui s’en va-t-en guerre,
Refrain
En deux temps et trois mouv’ments [1],
Badinguet, fich’ ton camp,
Il était d'un' force incroyable,
L’pèr’, la mèr’,Badingue,
Il inventa plus d'cent canons,
A deux sous tout l’paquet,
D'cent canons,
L’pèr’, la mèr’Badingue,
Mais l'bruit lui f'sait un' peur du diable,
Et le p’tit Badinguet ! [2]
Puis ça troublait ses digestions !
Digestions !
Comm' diplomat', c'était un maître,
Un jour pourtant, jour héroïque,
Il en r'montrait aux plus malins,
Il vit un pétard éclater.
Aux plus malins,
Éclater :
Mais il ne l'faisait point paraître,
Mais il en eut un' tell' colique,
Pour ne pas humilier ses voisins,
Que tout l'monde en fut ennuyé,
Fut ennuyé. Croyait César !
Sous ce grand homm’ de contrebande,
Refrain V’là qu’on n’trouve [3] plus qu’un
mouchard,
Un beau jour, il avait pris femme, Qu’un mouchard !
Comme le sir' de Framboisy, Chez c’bonhomm’là, tout était louche,
De Framboisy, Et la moral’ de c’boniment,
Et tout marchait sur la mêm' gamme, C’est qu’étant porté sur sa bouche,
C'était un ménage assorti, Il devait finir par Sedan,
Assorti. Par Sedan !
Sur l'air connu d'la reine Hortense,
Ell' lui disait d'sa plus douc' voix,
D'sa douc' voix : Le Sire de Fisch Ton Kan est une chanson
écrite en 1870 par Paul Burani sur une
"Ah ! sacré nom ! t'as tant d'vaillance musique d’Antonin Louis. Elle fut créée
Que je te trouve l'air Dunois, par Joseph Arnaud au Théâtre de l'Ambigu
et reprise par Jules Perrin au Cirque
T'as l'air Dunois".
National.1.

Refrain Ce chant est avant-coureur de la Commune


de Paris. Il fustige l’Empereur Napoléon
III, qui, avec son état-major de ganaches et
Par un étrange phénomène, de traîne-sabres parfaitement
Voilà qu'il eut un héritier, incompétents, mena la France au désastre
et à la défaite de Sedan, d’où les nombreux
Un héritier. jeux de mots contenus dans cette chanson.
Et pour prouver qu'c'était d'sa graine,
Sous la Commune, cette chanson
On en fit d'suite un p'tit troupier,
vengeresse contre l’Empire et ses militaires
Un troupier. incapables, chanson de surcroit
Dans des bataill's pyramidales, entrainante, fut reprise par les insurgés
parisiens. Elle fit date et on la chante
On voyait l'pèr' mais pas d'très près, encore aujourd'hui au Caf' conç' et dans les
Pas d'très près, réunions publiques.
Et le p'tit ramassait les balles,
Qu'on avait mis là tout exprès,
Tout exprès.

Refrain

Enfin, pour finir la légende


De c’monsieur qu’on croyait César,
Le Sire de Fisch-Ton-Kan

Commentaires :
Cette chanson satirique qui connut une
énorme popularité, fut composée pendant la Le titre, assez curieux, Le Sire de Fisch-Ton-
Commune (mars - mai 1871). Le librettiste, Kan, appelle quelques explications. Il évoque
Urbain Roucoux (1845-1901), était auteur, deux choses. On peut y voir d'abord l'ordre
acteur et chansonnier. Non seulement éditeur de « ficher le camp » donné à la famille
des journaux musicaux Le Calino, Café « Badinguet ». Ensuite, ce titre dégage une
Concert et La chanson illustrée, il fut aussi forte saveur chinoise. « Ton Kan » peut faire
l'auteur de plus de 70 chansons populaires, référence à la ville chinoise de Tonkin,
dont les plus connues sont Les pompiers de d'autant que la date de publication de la
Nanterre, Le Sire de Fisch ton kan et La chanson coïncide avec un engouement du
Fauvette du temple (musique par André public pour toute chose chinoise. Nous
Messager, 1885). Roucoux fut aussi librettiste sommes à l'époque de l'opérette chinoise de
pour le compositeur classique Emmanuel Offenbach Ba-Ta Clan (1855), et en 1873
Chabrier (opérette Le roi malgré lui, qui eut Emmanuel Chabrier écrivit une seconde (et
sa première à l'Opéra-comique en 1887). inachevée) parodie de Napoléon III avec le
poète Paul Verlaine (la première parodie fut
La musique de cette chanson fut composée écrite avec Verlaine en 1864 sous le titre
par Antoine Magdeleine Louis (décédé en Vaucochard et fils Ier) appelé Le Sire de Fisch
1915), qui fut aussi le partenaire de Roucoux Ton Kan, avec une intrigue pleine de
pour la chanson, Les Pompiers de Nanterre, références chinoises. L'armée française avait
une oeuvre si populaire qu'elle fut jouée par participé au (tristement) célèbre sac du Palais
une fanfare prussienne pour faire marcher d'été à Pékin dix ans auparavant (en octobre
des prisonniers français… 1860) et avait mis en déroute les troupes
mandchoues à Palikao. Napoléon III avait
Les paroles de cette chanson satirique décoré le commandant en chef des
(politiquement incorrectes à souhait) opérations, le général Cousin de Montauban,
parodient Napoléon III et la famille impériale avec le titre de Comte de Palikao. Il n'est pas
– en effet, la publication de telles chansons surprenant qu'un des personnages de l'opéra
aujourd'hui aboutirait sans aucun doute à un de Chabrier s'appela « Pélican » ! Roucoux et
procès. Si l'empereur n'est pas nommé Chabrier collaborèrent dans les années 1880,
explicitement, il est assez clairement indiqué sans doute se connaissaient-ils en 1871, d'où
par son surnom moqueur, « Badinguet ». la coïncidence de titre. Pourtant, la raison
Cette appellation fut donnée par Victor Hugo précise pour laquelle Roucoux en 1871 donna
(entre autres) d'après le nom de l'ouvrier à Napoléon un nom « chinois » nous
auquel Napoléon-Louis emprunta ses échappe.
vêtements pour s'échapper du fort de Ham
où il était emprisonné (1840-1846). Eugénie
et le Prince impérial sont également évoqués
(toujours implicitement) avec les mots, « La
mère Badingue » et « le petit Badinguet ».
Au fil des six versets, la chanson se moque
de la diplomatie de l'empereur, de sa
prouesse militaire et de son intérêt pour
l'artillerie, de son fils, de son ambition à
devenir empereur, de ses prouesses
sexuelles, et finalement de son échec à
Sedan – il y a même une parodie des paroles
de Partant pour la Syrie, la « Marseillaise »
du Second Empire.
L'Insurgé
L'Insurgé est une chanson écrite par Eugène Pottier en 1880 selon Martin Pénet sur une
musique d'Hervé Ghesquière, chez l'Éditeur Hayard1. Selon d'autres auteurs, la chanson
aurait été écrite entre 1884 et 1887, et la musique en serait de Pierre Degeyter. Il l’aurait
écrite pour le premier numéro (15 mars 1885) d’un journal bruxellois du même nom. Elle a
été écrite à propos de la Commune de Paris en hommage à l' "insurgé" Auguste Blanqui.

L'insurgé, son vrai nom, c'est l'Homme, En combattant pour la Commune,


Qui n'est plus la bête de somme Il savait que la terre est une,
Qu'on ne doit pas la diviser.
Qui n'obéit qu'à la raison Que la nature est une source
Et qui marche avec confiance Et le capital une bourse
Car le soleil de la science Où tous ont le droit de puiser
Se lève rouge à l'horizon.
Il revendique la machine,
Et ne veut plus courber l'échine
Refrain Sous la vapeur en action.
Devant toi, misère sauvage, Puisque l'exploiteur à main rude
Fait l'instrument de servitude
Devant toi, pesant esclavage, Un outil de rédemption.
L'insurgé se dresse
Le fusil chargé. Contre la classe patronale,
Il fait la guerre sociale
Dont on ne verra pas la fin
On peut le voir en barricades Tant qu'un seul pourra, sur la sphère
Descendr' avec les camarades, Devenir sans rien faire
Riant, blaguant, risquant sa peau. Tant qu'un travailleur aura faim !
Et sa prunelle décidée
S'allum' aux splendeurs de l'idée, A la bourgeoisie écoeurante
Aux reflets pourprés du drapeau. Il ne veut plus payer de rente
Combien de milliards tous les ans ?
Il comprend notre mèr' aimante, C'est sur vous, c'est sur votre viande
La planète qui se lamente Qu'on dépèce un tel dividende
Sous le joug individuel. Ouvriers, mineurs, paysans.
Il veut organiser le monde
Pour que de sa mamell' ronde
Coul' un bien-être universel.
Le Capitaine au mur
Jean-Baptiste Clément

Refrain:
Au mur disait le capitaine 3.
La bouche pleine et buvant dur Quatre blessures
Au mur Six campagnes et deux congés
Qu'avez-vous fait ? Je leur en ai fait voir de dures
Je suis Lorrain, ils sont vengés
Moi, j'étais dans une ambulance
Les femmes ne se battent pas
1. Et j'ai soigné sans différence
Je suis des vôtres Fédérés et soldats
Je suis vicaire à Saint Bernard Moi, je m'appelle Auguste
J'ai dû pour échapper aux autres Et j'ai treize ans tout juste
Rester huit jours dans un placard
Qu'avez vous fait ? Refrain
Oh! Pas grand chose
De la misère et des enfants
Il est temps que je me repose
J'ai soixante dix ans 4.
Allons-y tout de suite Oh! Je suis mort
Et fusillez-moi vite Un soldat sans doute enivré
A tué mon père à la porte
Refrain Et mon crime est d'avoir pleuré
Qu'avez-vous fait ?
Sale charogne
Fais moi vite trouer la peau
2. Car j'en ai fait de la besogne
Voici la liste Avec mon chassepot
Avec les noms de cent coquins Et d'un, tu vois ma lune
Femmes et enfants de communistes Et deux, vive la commune !
Fusillez-moi tous ces gredins.
Qu'avez-vous fait ?
Je suis la veuve d'un officier Refrain
Mort au Bourget
Et tenez en voici la preuve
Regardez s'il vous plaît.
Oh! Moi je porte encore
Mon brassard tricolore

Refrain
Le Moblot
Eugène Pottier

Jeunesse héroïque
Arme ton flingot
Pour la République
En avant, Moblot !

Le maire et le garde-champêtre Jeunesse héroïque

Disaient Les rouges sont des loups Arme ton flingot

Doux moutons, ne songez qu'à paître Pour la République

Notre berger veille sur nous En avant, Moblot !

Notre berger n'était qu'un lâche


Le vieux Judas nous a trahis Jeunesse héroïque

La République pris sa tâche Arme ton flingot

On va défendre le pays Pour la République


En avant, Moblot !

Jeunesse héroïque
Arme ton flingot
Pour la République
En avant, Moblot !

Si nos villes leur sont soumises


Si ces casqués sont les plus forts
Ils prendront nos sœurs, nos promises
Ah ce jour-là nous serons morts
La République c'est nous autres
Les richards et les indigents
Tous ceux qui s'arment sont des nôtres
Les gens braves et les braves gens
La semaine sanglante
de Jean-Baptiste Clément écrite en 1871 à Paris où
il se cachait et chantée sur l'air du Chant des Nous voilà rendus aux jésuites
Paysans de Pierre Dupont1. Aux Mac-Mahon, aux Dupanloup.
Il va pleuvoir des eaux bénites,
Sauf des mouchards et des gendarmes, Les troncs vont faire un argent fou.
On ne voit plus par les chemins, Dès demain, en réjouissance
Que des vieillards tristes en larmes, Et Saint-Eustache et l’Opéra
Des veuves et des orphelins. Vont se refaire concurrence,
Paris suinte la misère, Et le bagne se peuplera.
Les heureux mêmes sont tremblants.
La mode est aux conseils de guerre, - Refrain -
Et les pavés sont tous sanglants.
Demain les manons, les lorettes
- Refrain : Et les dames des beaux faubourgs
Oui mais ! Porteront sur leurs collerettes
Ça branle dans le manche, Des chassepots et des tambours
Les mauvais jours finiront. On mettra tout au tricolore,
Et gare ! à la revanche Les plats du jour et les rubans,
Quand tous les pauvres s’y mettront. Pendant que le héros Pandore
Quand tous les pauvres s’y mettront. Fera fusiller nos enfants.

Les journaux de l’ex-préfecture - Refrain -


Les flibustiers, les gens tarés,
Les parvenus par aventure, Demain les gens de la police
Les complaisants, les décorés Refleuriront sur le trottoir,
Gens de Bourse et de coin de rues, Fiers de leurs états de service,
Amants de filles au rebut, Et le pistolet en sautoir.
Grouillent comme un tas de verrues, Sans pain, sans travail et sans armes,
Sur les cadavres des vaincus. Nous allons être gouvernés
Par des mouchards et des gendarmes,
- Refrain - Des sabre-peuple et des curés.

On traque, on enchaîne, on fusille - Refrain -


Tout ceux qu’on ramasse au hasard.
La mère à côté de sa fille, Le peuple au collier de misère
L’enfant dans les bras du vieillard. Sera-t-il donc toujours rivé ?
Les châtiments du drapeau rouge Jusques à quand les gens de guerre
Sont remplacés par la terreur Tiendront-ils le haut du pavé ?
De tous les chenapans de bouges, Jusques à quand la Sainte Clique
Valets de rois et d’empereurs. Nous croira-t-elle un vil bétail ?
À quand enfin la République
- Refrain – De la Justice et du Travail ?

- Refrain -
Et nous savons qu'alors
La Communarde
Trent'-cinq mille en sont morts !
Jean Baptiste Clément
Refrain
Comme des rats dedans Paris
Par trahison on nous a pris ;
Pour faire bien sans être long,
Le macadam et les pavés
La mitrailleuse avait du bon.
De notre sang furent lavés,
Qu'on en soit ou qu'on n'en soit pas,
Lavés et tant lavés
Ils les ont fusillés au tas !
Qu'ils en sont déjointés.
Pour eux un ouvrier
N'est qu'un bon à tuer.
Refrain :
Dansons la communarde
Refrain
Et tenons bon ! (bis)
Dansons la communarde,
Tous les bagnes, tous les pontons,
Et tenons bon;
Tous les forts, toutes les prisons,
Nom de nom !
Ont regorgé de malheureux
A moitié nus, le ventre creux ;
Les gredins de capitulards
Pendant que leurs bourreaux
Ont mitraillé les communards,
Mangeaient de bons morceaux.
Mais devant messieurs les Prussiens,
Tremblants comme des petits chiens,
Refrain
Ils ont vendu leur peau,
Leur pays, leur drapeau.
Avec les bourgeois aujourd'hui,
Entre nous tout est bien fini.
Refrain
Quant aux gendarmes, aux roussins,
Aux fusilleurs, aux assassins,
Tous les Thiers, tous les Mac -Mahon,
Leur compte sera bon
Pour se laver de leur affront,
Aux jours du rigodon !
Ont voulu prendre un bain de sang
Ils l'ont pris en nous égorgeant.
Refrain
Mais ils en ont tant pris
Qu'ils en sont avachis.
Que voulions-nous : la Liberté
Et le bien de l'humanité.
Refrain
Pour nous venger des chenapans
Il nous faut faire des enfants,
Mais avec eux, ça n'est pas tout,
Et faire des gaillards
Les bons bourgeois ont fait le coup.
Et de francs communards.
Et comme en Juin, tous les premiers,
Ils ont traqué les ouvriers.
La canaille
Paroles : A Bouvier Musique : J Darcier
Force à rejeter ses haillons,
Dans la vieille cité française Quand sonne sa vingtième année,
Existe une race de fer, Pour entrer dans nos bataillons.
Dont l’âme comme une fournaise Chair à canon de la bataille,
A de son feu bronzé la chair. Toujours il succombe sans cris…
Tous ses fils naissent sur la paille, C’est la canaille ! Eh bien ! j’en suis !
Pour palais, ils n’ont qu’un taudis.
C’est la canaille ! Eh bien ! j’en suis ! Ils fredonnaient la Marseillaise,
Nos pères, les vieux vagabonds,
Ce n’est pas le pilier du bagne ; Attaquant en quatre-vingt-treize
C’est l’honnête homme dont la main Les bastilles dont les canons
Par la plume ou le marteau gagne, Défendaient la vieille muraille !
En suant, son morceau de pain. Que de trembleurs ont dit depuis :
C’est le père, enfin, qui travaille « C’est la canaille ! » Eh bien ! j’en suis !
Les jours et quelquefois les nuits.
C’est la canaille ! Eh bien ! j’en suis ! Les uns travaillent par la plume,
Le front dégarni de cheveux.
C’est l’artiste, c’est le bohème Les autres martèlent l’enclume,
Qui, sans souper, rime rêveur Et se soûlent pour être heureux ;
Un sonnet à celle qu’il aime, Car la misère, en sa tenaille,
Trompant l’estomac par le cœur. Fait saigner leurs flancs amaigris...
C’est à crédit qu’il fait ripaille, C’est la canaille ! Eh bien ! j’en suis !
Qu’il loge et qu’il a des habits.
C’est la canaille ! Eh bien ! j’en suis ! Enfin, c’est une armée immense,
Vêtue en haillons, en sabots.
C’est l’homme à la face terreuse, Mais qu’aujourd’hui la vieille France
Au corps maigre, à l’œil de hibou, Les appelle sous ses drapeaux,
Au bras de fer à main nerveuse On les verra dans la mitraille,
Qui sortant d'on ne sait pas où, Ils feront dire aux ennemis :
Toujours avec esprit vous raille, C’est la canaille ! Eh bien ! j’en suis !
Se riant de votre mépris.
C’est la canaille ! Eh bien ! j’en suis !

C’est l’enfant que la destinée


Paris n’est pas perdu
: C'est le vieux Badinguet qui a quitté Paris,

Qui va crier partout que Paris sera pris ;

Ce sont les Parisiens qui lui ont répondu


« Va donc, mon vieux Badingue, Paris n'est pas perdu. »
Pour lors, le vieux Badingue, Guillaume s'en fut trouver,
Dit : « J'ai perdu Péris, faites m'y donc rentrer ! »
Et le compère Guillaume qui lui a répondu :
« Donnez une récompense, il vous sera rendu. »
« Je prendrai donc l'Alsace, et Metz avec Strasbourg,
Je garderais Paris avec des forts autour,
De plus, quelques milliards feraient bien mon affaire
Tout cela vous va-t-il ? - Oui, ça me va, mon frère. »
Le compère Guillaume lui répond : « Mon enfant,
C'est que votre Paris n'a pas l'air patient.
Il va tout renversé, il fait la guerre, je crois,
Aux princes, aux empereurs, aux voleurs et aux rois... »
Le compère Guillaume croyait faire un bon coup,
Et convoitant Paris s'avançait à pas d'loup ;
Il croyait bien le prendre et répétait tout bas
« Attends mon vieux Paris, j'vais t'mettre dans mes États. »
Mais sans en avoir l'air, Paris dit aux coquins
« Tu vas avoir affaire à moi, mon vieux gredin ! »
Puis sortant tout à coup, vite il le déconfit,
Puis avec politesse, il le reconduisit...
Cette guerre tant maudite :
La Défense de Paris Paris qui n’y est pour rien

Anonyme À cette heure en souffre bien.

1870
5.[3]
Que de chagrin, que de peine !
Musique : sur l'air de Fualdès
Pour un moment d’abandon ;
Si l’on avait voté non,
1.
La France Républicaine,
Non jamais sur cette terre
Pour l’instant, ne serait pas
On ne vit en vérité,
Dans un si triste embarras.
Pareille calamité,
Ni plus affreuse misère,
6.
Que celle que l’on subit
Quand on pense que nous sommes
Sous le siège de Paris.
Privés de relations,
[4]
De communications,
2.
Avec le reste des hommes ;
Paris ! cette ville aimable,
Du monde pour nous le bout
Qui donc ose l’assiéger ?
Ne va pas même à Saint-Cloud.
Serait-ce cet étranger,
Qu’avec un accueil affable
7.
Elle admettait dans son sein ?
Quand le ballon nous emporte
Oui, c’est lui son assassin.
Dans tous les[5] départements.
Des lettres pour nos parents,
3.
Jamais il ne nous rapporte
C’est d’accord avec l’infâme
Les[6] réponses, ce qui fait
Celui qui livra Sedan :
Qu’on en est très inquiet.
Bonaparte, ce[1] tyran !
Ce gredin sans cœur, sans[2] âme !
8.
Que la Prusse avec ardeur,
Nous n’avons de leurs nouvelles
Accomplit notre malheur.
Qu’au moyen de nos pigeons ;
Mais des Prussiens, les faucons
4.
Les chassent à tire-d’aile :
Lors du fameux plébiscite,
Sur[7] dix, il en revient deux ;
Sans tous ceux qu’ont voté oui
On le voit, c’est très chanceux.
On n’aurait pas aujourd’hui
9. D’une mort plus recherchée,
L’aspect de toutes nos rues Vis-à-vis de l’ennemi,
Est lugubre, car, hélas ! En défendant le pays.
On a supprimé le gaz
Même avant une heure indue, 14.
Et les magasins, le soir, Et nos pauvres ménagères
Font vraiment du mal à voir. Attendent en pataugeant,
Souvent trois heures durant,
10. Pour obtenir d’ordinaire
D’ailleurs, toutes les boutiques Un pot-au-feu de cheval
N’ont plus rien d’étalagé, Ce brave et noble animal.
A part chez le boulanger,
C’est en vain que les pratiques 15.
Chercheraient quoi que ce soit ; C’est en pleurant qu’on le mange,
On n’a plus même de bois. Et l’on n’en a pas toujours ;
Il arrive bien des jours
11. Que, par force, l’on s’arrange
Car dans cet horrible siège D’un plat, qui n’est pas très gros,
On est bien privé de tout ; De riz cuit avec de l’eau.
Mais de chauffage surtout,
Et sur nos toits, blancs de neige, 16.
L’hiver, en signe de deuil, Il est des êtres rapaces !
Vient étendre son linceul. J’en rougis ; mais des marchands
Exploitent les pauvres gens ;
12. Jugez où va leur audace,
Un jour une pauvre mère Ils vendent un[8] mauvais chou
Privée de bois, de charbon, Jusqu'à des six francs dix sous.
Attend la distribution
Une journée tout entière ; 17.
Dans ses bras cruel effroi ! On se nourrit d’épluchures,
Son enfant est mort de froid ! De chats, de chiens et de rats ;
On vend des choses au tas
13. Que l’on jetait aux ordures ;
On a vu dans les tranchées Mais on s’en repaît enfin,
Des soldats, de froid périr ; Pour ne pas mourir de faim.
Ils préféreraient mourir
18.
Dans une pauvre mansarde,
Moralité
Située rue Desnoyers
La femme vient d’expirer,
22.
Et, seul, son mari la garde ;
Eh ! bien de tous ces ravages,
Quand, privé de tout secours,
Nous souffrons sans murmurer ;
De faim, il meurt à son tour.
Loin de nous désespérer
Ils augmentent nos courages :
19.
On ne vaincra pas Paris,
Et le matin quand on rentre
Tant que nous serons unis !
De la garde rempart,
Des pommes de terre au lard
Feraient tant de bien au ventre ; 1. ↑ le dans l'interprétation de
Mais ce légume est passé ; Mouloudji.
Du moins, c’est pour les blessés. 2. ↑ ni. Idem
3. ↑ Mouloudji ne chante pas
20. cette strophe, ni les
Or, toutes les ambulances 10,11,12,13,17,18,19,20 et
Que l’on a fait à grands frais, 21.
Sont pleines, ou à peu près, 4. ↑ Et. Idem
Sans compter ceux que la France, 5. ↑ Nos. Idem.
Parmi ses enfants perdus, 6. ↑ De. Idem.
Ne reverra jamais plus ! 7. ↑ De. Idem.
8. ↑ de. Idem.
21.
Que de mères en alarmes !
Gémissent en ce moment
Sur le sort de leurs enfants
Qu’a trahi celui des armes ;
Mort sous le plomb meurtrier,
Ou tout au moins prisonnier !
L’Armistice

Alphonse Leclerc —

Bazaine se rend qu’importe


Bismarck qui n’est pas en peine
Nous conserverons Verdun
D’affamer les Parisiens
Nancy peut ouvrir sa porte
Nous demande la Lorraine,
On s’illustre à Châteaudun,
L’Alsace et les Alsaciens,
À Toul, à Strasbourg, Dunain
La honte pour nos soldats
Pas un homme pour complice
Des milliards à son service

Refrain
Refrain
Ah ! zut à ton armistice
Prends nous donc par la famine
Bismarck, nous n’en voulons pas.
Viens diplomate du Nord
Mais rongés par la vermine
On nous permettra du reste
Nous résisterons encor
Pendant vingt, vingt-cinq jours
Mieux un vaillant trépas
De manger ce qui nous reste
Qu’accepter un tel supplice.
De vieux chats, de rats et d’ours,
Mais pas le moindre repas
Refrain
Après le vote aux comices.

Nous nous levons tous en masse


Refrain
Pour répondre à l’insolent
Pas un ne fait la grimace
« Je fais la guerre à l’empire »
Qu’il soit rouge, noir ou blanc,
Disait le maître effronté
Fier de courir au combat
Et le palais qui est pire
Pour l’honneur et la justice.
Pourchasse la Liberté,
Tu nous croyais donc bien bas
Pour vouloir ce sacrifice

Refrain
L’Internationale Il n’est pas de sauveurs suprêmes :
Ni Dieu, ni César, ni tribun,
Eugène Pottier — Producteurs, sauvons-nous nous-
mêmes !
Décrétons le salut commun !
Pour que le voleur rende gorge,
Pour tirer l’esprit du cachot,
Soufflons nous-mêmes notre forge,
Battons le fer quand il est chaud !

(Refrain)

L’État comprime et la loi triche ;


L’Impôt saigne le malheureux ;
Nul devoir ne s’impose au riche ;
Le droit du pauvre est un mot creux.
C’est assez, languir en tutelle,
L’égalité veut d’autres lois ;
Au citoyen LEFRANÇAIS, membre de la Commune.
« Pas de droits sans devoirs, dit-elle
« Égaux, pas de devoirs sans droits ! »

Debout ! les damnés de la terre !


(Refrain)
Debout ! les forçats de la faim !
La raison tonne en son cratère :
Hideux dans leur apothéose,
C’est l’éruption de la fin.
Les rois de la mine et du rail
Du passé faisons table rase,
Ont-ils jamais fait autre chose
Foule esclave, debout ! debout !
Que dévaliser le travail ?
Le monde va changer de base :
Dans les coffres-forts de la bande
Nous ne sommes rien, soyons tout !
Ce qu'il a créé s’est fondu
En décrétant qu’on le lui rende
Refrain :
Le peuple ne veut que son dû.
C’est la lutte finale :
Groupons-nous, et demain,
(Refrain)
L’Internationale
Sera le genre humain
Les Rois nous soûlaient de fumées,
(bis)
Paix entre nous, guerre aux tyrans !
Appliquons la grève aux armées,
Crosse en l’air, et rompons les rangs !
S’ils s’obstinent, ces cannibales,
À faire de nous des héros,
Ils sauront bientôt que nos balles
Sont pour nos propres généraux

(Refrain)

Ouvriers, paysans, nous sommes


Le grand parti des travailleurs ;
La terre n’appartient qu’aux hommes,
L’oisif ira loger ailleurs.
Combien de nos chairs se repaissent !
Mais si les corbeaux, les vautours,
Un de ces matins, disparaissent,
Le soleil brillera toujours !

C’est la lutte finale :


Groupons-nous, et demain,
L’Internationale
Sera le genre humain

Paris, juin 1871.


Le Chant des ouvriers
Pierre Dupont —
1846

Nous dont la lampe, le matin,


Nous ne sommes que des machines.
Au clairon du coq se rallume,
Nos Babels montent jusqu'au ciel,
Nous tous qu'un salaire incertain
La terre nous doit ses merveilles :
Ramène avant l'aube à l'enclume,
Dès qu'elles ont fini le miel,
Nous qui, des bras, des pieds, des mains,
Le maître chasse les abeilles.
De tout notre corps luttons sans cesse,
Sans abriter nos lendemains
Refrain
Contre le froid de la vieillesse.

Au fils chétif d'un étranger


Aimons-nous, et quand nous pouvons
Nos femmes tendent leurs mamelles,
Nous unir pour boire à la ronde
Et lui, plus tard, croit déroger
Que le canon se taise ou gronde
En daignant s'asseoir auprès d'elles ;
Buvons ! Buvons ! Buvons !
De nos jours, le droit du seigneur
A l'indépendance du monde !
Pèse sur nous plus despotique :
Nos filles vendent leur honneur
Nos bras sans relâche tendus,
Aux derniers courtauds de boutique.
Aux flots jaloux, au sol avare,
Ravissent leurs trésors perdus,
Refrain
Ce qui nourrit et ce qui pare :
Perles, diamants et métaux,
Mal vêtus, logés dans des trous,
Fruits du coteau, grains de la plaine ;
Sous les combles, dans les décombres,
Pauvres moutons, quels bons manteaux
Nous vivons avec les hiboux
Il se tisse avec notre laine !
Et les larrons amis des ombres ;
Cependant notre sang vermeil
Refrain
Coule impétueux dans nos veines ;
Nous nous plairions au grand soleil
Quel fruit tirons-nous des labeurs
Et sous les rameaux verts des chênes.
Qui courbent nos maigres échines ?
Où vont les flots de nos sueurs ?
Refrain
A chaque fois que par torrents
Notre sang coule sur le monde,
C'est toujours pour quelques tyrans
Que cette rosée est féconde ;
Ménageons-le dorénavant,
L'amour est plus fort que la guerre ;
En attendant qu'un meilleur vent
Souffle du ciel ou de la terre.

Aimons-nous, et quand nous pouvons


Nous unir pour boire à la ronde
Que le canon se taise ou gronde
Buvons ! Buvons ! Buvons !
A l'indépendance du monde !
Jean Misère
Eugène Pottier

À Henri ROCHEFORT De ces détrousseurs inhumains,


L’Église bénit les sacoches ;
Et leur bon Dieu nous tient les mains
Décharné, de haillons vêtu, Pendant qu’on fouille dans nos poches.
Fou de fièvre, au coin d’un impasse, Ah ! mais...
Jean Misère s’est abattu. Ça ne finira donc jamais ?...
« Douleur, dit-il, n’es-tu pas lasse ? »
Ah ! mais... Un jour, le Ciel s’est éclairé,
Ça ne finira donc jamais ?... Le soleiil a lui dans mon bouge ;
J’ai pris l’arme d’un fédéré
Pas un astre et pas un ami ! Et j’ai suivi le drapeau rouge.
La place est déserte et perdue. Ah ! mais...
S’il faisait sec, j’aurais dormi, Ça ne finira donc jamais ?...
Il pleut de la neige fondue.
Ah ! mais... Mais, par mille on nous coucha bas ;
Ça ne finira donc jamais ?... C’était sinistre au clair de lune ;
Quand on m’a retiré du tas,
Est-ce la fin, mon vieux pavé ? J’ai crié : Vive la Commune !
Tu vois : ni gîte, ni pitance, Ah ! mais...
Ah ! la poche au fiel a crevé ; Ça ne finira donc jamais ?...
Je voudrais vomir l’existence.
Ah ! mais... Adieu, martyrs de Satory,
Ça ne finira donc jamais ?... Adieu, nos châteaux en Espagne !
Ah ! mourons !... ce monde est pourri ;
Je fus bon ouvrier tailleur. On en sort comme on sort d’un bagne.
Vieux, que suis-je ? une loque immonde. Ah ! mais...
C’est l’histoire du travailleur, Ça ne finira donc jamais ?...
Depuis que notre monde est monde.
Ah ! mais... A la morgue on coucha son corps,
Ça ne finira donc jamais ?... Et tous les jours, dalles de pierre,
Vous étalez de nouveaux morts :
Maigre salaire et nul repos, Les Otages de la misère !
Il faut qu’on s’y fasse ou qu’on crève, Ah ! mais...
Bonnets carrés et chassepots Ça ne finira donc jamais ?...
Ne se mettent jamais en grève.
Ah ! mais...
Paris, 1880.
Ça ne finira donc jamais ?...

Malheur ! ils nous font la leçon,


Ils prêchent l’ordre et la famille ;
Leur guerre a tué mon garçon,
Leur luxe a débauché ma fille !
Ah ! mais...
Ça ne finira donc jamais ?...
Leur bon Dieu
Eugène Pottier —

Au citoyen Joseph DURAND, de Lyon.

Dieu jaloux, sombre turlutaine,


Cauchemar d’enfants hébétés, Macaire t’a graissé la patte.
Il est temps, vieux croquemitaine, Larrons en foire sont d’accord.
De te dire tes vérités. Saint Pierre tire la savate
Le Ciel, l’Enfer : fables vieillottes, Sitôt qu’on s’attaque au veau d’or.
Font sourire un libre penseur. Des compères de Bas-Empire,
Bon dieu des bigotes C’est encor toi le plus marlou.
Tu n’es qu’un farceur. Bon dieu des vampires,
Tu n’es qu’un filou.
Tu nous fis enseigner par Rome
En face du disque vermeil, Juin 1848.
Que Josué, foi d’astronome,
Un jour arrêta le soleil.
Ton monde, en six jours tu le bâcles,
O tout puissant Ignorantin.
Bon dieu des miracles,
Tu n’es qu’un crétin.

La guerre se fait par ton ordre,


On t’invoque dans les deux camps.
Comme à deux chiens prêts à se mordre,
Tu fais kss kss à ces brigands.
Les chefs assassins tu les sacres,
Tu les soûles de ta fureur.
Bon dieu des massacres,
Tu n’es qu’un sabreur !

On connaît tes capucinades


Et l’on te voit, mon bel ami,
Te pourlécher des dragonnades,
Humer les Saint-Barthélemy.
Bûchers flambants font tes délices,
Tu fournis la torche à Rodin.
Bon dieu des supplices,
Tu n’es qu’un gredin.

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