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DT - CONSTRUCTION

DE L’EXPONENTIELLE
ET DU LOGARITHME NEPERIEN

Dans ce qui suit, on utilisera des arguments élémentaires et on ne suppose aucune connaissance des
fonctions exp et ln. Ce qui suit sert à les définir comme limites de deux suites.

Préliminaire : l’inégalité de Bernoulli

Propriété 1 Si a ≥ −1 et n ∈ N∗ , alors

(1 + a)n ≥ 1 + na .

Soit a ≥ −1 et Pn la propriété :
(1 + a)n ≥ 1 + na .
On démontre par récurrence, que pour tout n ≥ 1, la propriété Pn est vraie.

Cette propriété est vraie à l’ordre 1 puisque l’on a égalité dans ce cas. Supposons la propriété vraie à
l’ordre n. On écrit
(1 + a)n+1 = (1 + a)(1 + a)n ,
et en multipliant les deux membres de l’inégalité

(1 + a)n ≥ 1 + na

par le nombre positif 1 + a, on obtient

(1 + a)n+1 = (1 + a)(1 + a)n ≥ (1 + a)(1 + na) ,

donc
(1 + a)n+1 ≥ 1 + (n + 1)a + na2 ,
et puisque na2 est positif, on en déduit

(1 + a)n+1 ≥ 1 + (n + 1)a ,

ce qui est la propriété à l’ordre n + 1. La propriété est donc vraie pour tout entier n ≥ 1.
DT 2

La fonction exponentielle
Pour n ∈ N∗ et x ∈ R, on pose  x n
en (x) = 1 + ,
n
et si n > x,
1  x −n
fn (x) = = 1− .
en (−x) n

Propriété 2 Si n ≥ −x, alors


en (x) ≤ en+1 (x) .

On suppose n > −x. On a alors, en réduisant au même dénominateur


x
1+ nx + n2 + n
n+1 =
x nx + n2 + n + x
1+
n
x
= 1− .
(x + n)(n + 1)
x
Mais si l’on pose a = − , il résulte de ce qui précède que
(x + n)(n + 1)
x
1+
1+a = n + 1 > 0,
x
1+
n
on peut donc appliquer l’inégalité de Bernoulli, et
 x n+1
1+ x
 n+1 ≥ 1 + (n + 1)a = 1 − .
 x  x + n
1+
n
Donc  
en+1 (x) x x
≥ 1− 1+ .
en (x) x+n n
Mais  
x x n n+x
1− 1+ = = 1.
x+n n x+n n
On en déduit que
en+1 (x)
≥ 1,
en (x)
et, puisque en (x) est positif, que
en (x) ≤ en+1 (x) .
DT 3

Cette inégalité reste vraie si x = −n, puisque l’on a alors

en (−n) = 0 ≤ en+1 (−n) .

Finalement, pour tout n ≥ −x,


en (x) ≤ en+1 (x) .
Remarque : si l’on note n0 la partie entière de |x|, la suite (en (x))n≥n0 +1 est donc croissante.

Propriété 3 si n > |x|, alors

x2
1− ≤ en (x)en (−x) ≤ 1 .
n

On a n
x2

 x n  x n
en (x)en (−x) = 1 + 1− = 1− 2 ,
n n n
x2
et puisque n > |x|, on en déduit que − > −1 et l’on peut appliquer l’inégalité de Bernoulli. Alors
n2
 2
x x2
en (x)en (−x) ≥ 1 + n − 2 = 1 − .
n n

Par ailleurs
x2
1− ≤ 1,
n2
donc
en (x)en (−x) ≤ 1 .
On a donc bien les inégalités voulues.

Propriété 4 Si n > |x|, alors en (x) est majoré par fn (x) et les suites (en (x)) et (fn (x)) ont une
limite commune. Cette limite sera notée
 x n
exp(x) = lim 1 + .
n→∞ n

Il résulte de la propriété 3 que, si n > |x| et si n0 est la partie entière de |x|,

1
fn (x) = ≥ en (x) .
en (−x)

La suite (en (x))n≥n0 +1 est donc majorée par (fn (x))n≥n0 +1 .


DT 4

Enfin, comme (en (−x))n≥n0 +1 est croissante positive, on en déduit que son inverse (fn (x))n≥n0 +1 est
décroissante.

On a alors les résultats suivantes :

− la suite (en (x))n≥n0 +1 est croissante strictement positive et majorée par le nombre fn0 +1 (x). Elle
converge vers une limite ℓ non nulle.

− la suite (fn (x))n≥n0 +1 est décroissante et minorée par le nombre en0 +1 (x). Elle converge vers une
limite ℓ′ .

− l’encadrement
x2 en (x)
1− ≤ ≤ 1,
n fn (x)
permet de conclure que la suite (en (x)/fn (x))n≥n0 +1 converge et admet pour limite 1. Comme elle
admet pour limite ℓ/ℓ′ , on en déduit que ℓ = ℓ′ , et cette limite sera notée exp(x).

Propriété 5 Pour tout x réel, on a

exp(x) exp(−x) = 1 .

Le passage à la limite dans les inégalités de la proposition 3 donne alors

1 ≤ lim en (x) lim en (−x) ≤ 1 ,

donc
exp(x) exp(−x) = 1 .

Propriété 6 On a les inégalités suivantes :


(1) pour tout x ∈ R, exp(x) ≥ 1 + x,
(2) pour tout x ∈ R, exp(x) > 0,
1
(3) pour tout x < 1, exp(x) ≤ .
1−x

Il résulte de l’inégalité de Bernoulli que, si n ≥ −x,


x
en (x) ≥ 1 + n = 1 + x.
n
(1) Alors par passage à la limite dans cette inégalité,

exp(x) ≥ 1 + x .
DT 5

(2) On a en (x) ≥ 0 donc on en déduit que exp(x) ≥ 0. Mais exp(x) exp(−x) = 1. Donc exp(x) n’est
pas nul, et exp(x) > 0.

(3) On a en particulier exp(−x) ≥ 1 − x, donc, si x < 1,


1 1
exp(x) = ≤ .
exp(−x) 1−x

Propriété 7 On a les propriétés suivantes


1
(1) si |h| < 1, alors 1 + h ≤ en (h) ≤ ,
1−h
(2) si une suite (hn ) converge vers 0, alors (en (hn )) converge vers 1,
(3) si une suite (xn ) converge vers x, alors (en (xn )) converge vers exp(x).

(1) Si |h| < 1, on a −h < 1 et h < 1 , donc si n ≥ 1, l’inégalité de Bernoulli donne

n ≥ −h et en (h) ≥ 1 + h ,
ainsi que
n ≥ h et en (−h) ≥ 1 − h > 0 ,
soit
1 1
en (h) = ≤ .
en (−h) 1−h
(2) Si (hn ) converge vers zéro, alors, à partir d’un certain rang |hn | < 1, et
1
1 + hn ≤ en (hn ) ≤ .
1 − hn
Il résulte du théorème d’encadrement que (en (hn )) converge vers 1.

(3) On écrit  n
hn
en (xn )en (−x) = 1+ = en (hn ) ,
n
avec
xxn
hn = xn − x − .
n
Alors (hn ) converge vers 0 et donc (en (hn )) converge vers 1. Alors en écrivant
en (xn ) = (en (xn )en (−x))fn (x) = en (hn )fn (x) ,
on en déduit que (en (xn )) converge vers 1 × exp(x) = exp(x).

Propriété 8 Quels que soient x et y réels

exp(x + y) = exp(x) exp(y) .


DT 6

On écrit  zn n
en (x)en (y) = 1 + = en (zn ) ,
n
avec
xy
zn = x + y + .
n
Comme (zn ) converge vers x + y, on en déduit que en (zn ) converge vers exp(x + y), mais par ailleurs,

(en (zn )) = (en (x)en (y)) ,

converge vers exp(x) exp(y), d’où la relation

exp(x) exp(y) = exp(x + y) .

Propriété 9 Quels que soient les nombres réels x, y :

(y − x) exp x ≤ exp(y) − exp(x) ≤ (y − x) exp(y) .

En appliquant la relation (1) de la propriété 6 à x − y, on obtient

exp(x) exp(−y) = exp(x − y) ≥ 1 + x − y ,

d’où
exp(x) ≥ exp(y)(1 + x − y) ,
ou encore
exp(y) − exp(x) ≤ (y − x) exp(y) .
En permutant les rôles de x et de y,

exp(x) − exp(y) ≤ (x − y) exp(x) ,

donc
(y − x) exp(x) ≤ exp(y) − exp(x) .

Propriété 10 La fonction exp est


(1) strictement croissante sur R
(2) continue sur R
(3) dérivable sur R avec une dérivée égale à elle-même.

(1) Si x < y, on a alors, d’après la propriété 9,

0 < (y − x) exp(x) ≤ exp(y) − exp(x) .


DT 7

La fonction f est donc strictement croissante.

(2) Soit a un nombre réel, et x dans l’intervalle [ a − h, a + h ] . Alors, comme exp est croissante, on a

exp(a − h) ≤ exp(x) ≤ exp(a + h) ,

et exp est bornée sur [ a − h, a + h ] . On a alors

(x − a) exp(a) ≤ exp(x) − exp(a) ≤ (x − a) exp(x) .

Mais exp est bornée et x − a tend vers zéro lorsque x tend vers a, donc (x − a) exp(x) tend vers 0. Par
ailleurs (x − a) exp(a) tend aussi vers zéro. Il résulte du théorème d’encadrement que exp(x) − exp(a)
tend vers zéro. Donc f est continue en a. Il en résulte que exp est continue sur R.

(3) Si x > a, on déduit de

(x − a) exp(a) ≤ exp(x) − exp(a) ≤ (x − a) exp(x) ,

les inégalités suivantes


exp(x) − exp(a)
exp(a) ≤ ≤ exp(x) .
x−a
Comme la fonction exp est continue, il en résulte que lorsque x tend vers a, exp(x) tend vers exp(a)
et, en utilisant le théorème d’encadrement, on en déduit l’égalité
exp(x) − exp(a)
lim = exp(a) .
x→a+ x−a
Si x < a, les inégalités s’inversent et on en déduit cette fois,
exp(x) − exp(a)
exp(a) ≥ ≥ exp(x) ,
x−a
et donc
exp(x) − exp(a)
lim = exp(a) .
x→a− x−a
La fonction exp est donc dérivable, et pour tout a réel

exp′ (a) = exp(a) .

La fonction logarithme

Propriété 11 On a l’identité

(∗) nan+1 − (n + 1)an + 1 = (a − 1)2 (1 + 2a + · · · + nan−1 ) .


DT 8

On démontre la relation en développant le membre de droite.


n
X
Calculons Sn = (a − 1)2 kak−1 . On a
k=1
n
X n
X n
X
k+1 k
Sn = ka − 2ka + kak−1 ,
k=1 k=1 k=1

et en changeant les indices de sommation

n+1
X n
X n−1
X
Sn = (k − 1)ak − 2kak + (k + 1)ak
k=2 k=1 k=0
n−1
X
= ((k − 1) − 2k + (k + 1))ak + (n − 1)an + nan+1 − 2nan − 2a + 1 + 2a
k=2
n+1
= na − (n + 1)an + 1 .

Pour y > 0 et n ∈ N∗ , on définit


 
√ 1
ℓn (y) = n( y − 1) et kn (y) = −ℓn
n
.
y

Propriété 12 La suite (ℓn (y)) est décroissante et la suite (kn (y)) est croissante et majorée par
(ℓn (y)).


En appliquant (*) à a = n(n+1) y, on obtient

√ √
n n y − (n + 1) n+1 y + 1 = (a − 1)2 (1 + 2a + · · · + nan−1 ) .

Comme a est positif, le membre de droite est positif, et donc, pour tout n ≥ 1,

√ √
n n y − (n + 1) n+1 y + 1 = ℓn (y) − ℓn+1 (y)

est également positif. On en déduit que la suite (ℓn (y)) est croissante.
  
1
La suite ln est croissante, alors son opposée (kn (y)) est décroissante.
y
DT 9

Enfin

 
√ 1
ℓn (y) − kn (y) = n( y − 1) + n √
n
n y
−1
√ 
1− ny


= n( y − 1) + n
n

n y
 
√ 1
= n( y − 1) 1 − √
n
n y


( n y − 1)2
= n √n y
.

On en déduit que, pour tout n ≥ 1, le nombre ℓn (y) − kn (y) est positif. Donc (kn (y)) est majorée par
(ℓn (y)).

Propriété 13 Les deux suites (ℓn (y)) et (kn (y)) ont une limite commune. On la note

ln(y) = lim n( n y − 1) .
n→∞

En développant,

 
1 √ 1
ℓn (y)kn (y) = −n( n y − 1) √ − 1
n n y
 
√ 1
= n n
y−1+ √ n y
−1

= ℓn (y) − kn (y) .

On a alors les résultats suivantes :

− la suite (ℓn (y)) est décroissante minorée par le nombre k1 (y) donc converge vers une limite ℓ.

− la suite (kn (y)) est croissante majorée par le nombre ℓ1 (y) donc converge vers une limite ℓ′ .
 
1
Alors, la suite ℓn (y)kn (y) a pour limite 0 × ℓ × ℓ′ = 0. donc (ℓn (y) − kn (y)) converge vers 0. Mais
n
elle converge vers ℓ − ℓ′ , et il en résulte que ℓ = ℓ′ . On note cette limite ln(y).
DT 10

Propriété 14 On a les
 propriétés
 suivantes
1
(1) pour tout y > 0, ln = − ln(y),
y
y−1
(2) pour tout y > 0, ≤ ln(y) ≤ y − 1,
y
(3) pour tout x > 0 et tout y > 0, ln(xy) = ln(x) + ln(y),
y−x y−x
(4) pour tout x > 0 et tout y > 0, ≤ ln(y) − ln(x) ≤ .
y x

(1) En passant à la limite dans la relation


 
1
kn (y) = −ℓn ,
y

on obtient  
1
ln(y) = − ln .
y
y−1
(2) On peut appliquer l’inégalité de Bernoulli avec a = , car
n

y−1 −1
a= ≥ > −1 ,
n n

on obtient  n
y−1
1+ ≥ 1 + (y − 1) = y ,
n
d’où
y−1 √
1+ ≥ n y,
n
et enfin
y−1 √
≥ n y − 1.
n
On en déduit donc
ℓn (y) ≤ y − 1 ,

et par passage à la limite


ln(y) ≤ y − 1 .

Puis  
1 1 1−y
− ln(y) = ln ≤ −1= ,
y y y
d’où l’on déduit
y−1
ln(y) ≥ .
y
DT 11

(3) On a

ℓn (xy) = n( n xy − 1)
√ √ √
= n( n x − 1) n y + n( n y − 1)

√ n( n y − 1)
 

= n( x − 1) 1 +
n
+ n( n y − 1)
n
 
ℓn (y)
= ℓn (x) 1 + + ℓn (y) ,
n
et lorsque n tend vers l’infini, on en déduit

ln(xy) = ln(x) + ln(y) .

(4) est obtenue en appliquant les inégalités (2) à y/x.

Propriété 15 La fonction ln : R∗+ −→ R est


(1) strictement croissante sur R∗+
(2) continue sur R∗+
1
(3) dérivable sur R∗+ avec une dérivée égale à .
y

(1) Si y > x, on déduit de ce qui précède que


y−x
0< ≤ ln(y) − ln(x) .
x
Donc la fonction ln est strictement croissante.

(2) Si a est un réel positif, on a


x−a x−a
≤ ln(x) − ln(a) ≤ .
x a
Lorsque x tend vers a, il résulte du théorème d’encadrement que ln(x) a une limite qui vaut ln(a). La
fonction ln est continue en a, et ceci pour tout réel positif a. Elle est donc continue sur R∗+ .

(3) Si x > a, il résulte des inégalités précédentes que


1 ln(x) − ln(a) 1
≤ ≤ ,
x x−a a
et lorsque x tend vers a, le théorème d’encadrement permet de conclure que
ln(x) − ln(a) 1
lim = .
x→a+ x−a a
Si x < a, il résulte cette fois
1 ln(x) − ln(a) 1
≥ ≥ ,
x x−a a
DT 12

et lorsque x tend vers a, le théorème d’encadrement permet de conclure cette fois que

ln(x) − ln(a) 1
lim = .
x→a− x−a a
On en déduit que la fonction ln est dérivable en a et que
1
(ln)′ (a) = .
a

Le lien entre les deux

Propriété 16 Soit n ∈ N∗ .
(1) Pour tout x > −n, on a ℓn (en (x)) = x.
(2) Pour tout y > 0, on a en (ℓn (y)) = y.

(1) Si x > −n, alors en (x) > 0, et


 r 
x n
ℓn (en (x)) = n n
1+ −1 = x.
n

(2) Si y > 0, alors ℓn (y) > −n et



n( n y − 1) n
 
en (ℓn (y)) = 1 + = y.
n

Propriété 17 Pour tout y > 0,


exp(ln(y)) = y .

La suite (ℓn (y)) converge vers ln y, donc d’après la propriété 7 (3), la suite (en (ℓn (y)) converge vers
exp(ln y). Alors la propriété 16 (2) donne l’égalité

exp(ln(y)) = y .

Propriété 18 Pour tout x ∈ R,


ln(exp(x)) = x .
DT 13

La suite (en (x)) étant croissante, elle est majorée par sa limite, donc

en (x) ≤ exp(x) ,
√ √
D’autre part, si 0 < u < v, on n
u≤ n
v et il en résulte que la fonction ℓn est croissante. On en déduit
alors
x = ℓn (en (x)) ≤ ℓn (exp(x)) .
Pour tout y > 0, la suite (ℓn (y)) étant décroissante elle est minorée par sa limite et

ℓn (y) ≥ ln y .

En particulier, si y = en (x), on en déduit

x = ℓn (en (x)) ≥ ln(en (x)) ,

d’où l’encadrement
ln(en (x)) ≤ x ≤ ℓn (exp(x)) .
Or, la suite (ℓn (exp(x))) converge vers ln(exp(x)), et en utilisant la continuité de la fonction ln, la suite
(ln(en (x))) converge elle aussi vers ln(exp(x)). Il résulte alors du théorème d’encadrement que

ln(exp(x)) = x .

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