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Le Mythe de La Liberté Et L
Le Mythe de La Liberté Et L
démocratique 1
Comment se fait-il que, sous les lambris et les lustres de leurs palais,
les chefs d'Etat du monde entier s'entourent de gardes au casque
baissé jusque sur les yeux, au sabre tiré du fourreau, la pointe levée
devant leur visage? Jusque sous la pourpre des Républiques, l'or et
l'acier rappellent que nous sommes des animaux armés jusqu'aux
dents. Quand les anthropologues de salon se souviendront de ce qu'il
n'est pas de nation digne de considération qui puisse renoncer aux
symboles les plus éloquents de la politique de la bête, ils
comprendront que l'héroïsme est toujours sanglant, parce que ce
bas-monde hume l'odeur des carnages.
Les Etats enlacés à leur chef d'au-delà des mers sont des plantons en
tenue de service. Leur employeur s'appelle le Traité de l'Atlantique
Nord (OTAN). Sont-ils, pour autant, des acteurs en chair et en os
sur la scène du monde ou jouent-ils seulement un rôle d'apparat sur
les planches d'un Continent définitivement vassalisé? Lorsque, en
mars 2014, la Russie a retrouvé la Crimée dans le cliquetis discret
des armes et aux applaudissements plus bruyants de la population, il
ne semble pas que les endimanchés de l'histoire aient jugé utile de
déplacer leurs dentelles de quelques pas au profit ou au détriment de
ces villages lointains. Mais ils savaient, semble-t-il, que leur
souverain d'outre-Atlantique se trouverait gravement offusqué par ce
remue-ménage. Aussi, dans toute l'Europe, les lustres ont-ils
tremblé. C'est dire que le Vieux Monde n'est pas livré seulement au
jeu des masques et des panaches de la servitude de ses
Républiques: les valets prennent au pied de la lettre les histoires de
sang qu'on raconte à toute leur maisonnée.
1 - La dictature angélique
Mais ce fut avec la candeur d'Abel le Juste que, deux jours seulement
avant le 6 juin 2014, le Président des Etats-Unis avait tenté, au
sommet du G8-1 de Bruxelles, d'évangéliser l'une après l'autre la
France, l'Allemagne, l'Italie et la Grande Bretagne et de les
convaincre de mettre le pécheur Vladimir Poutine en pénitence au
cours des cérémonies commémoratives du soixante dixième
anniversaire du débarquement. Naturellement, sitôt sur place, ce fut
autour du Président russe que les Etats d'une repentance avortée, au
nombre de dix-neuf, se sont empressés. Ils s'étaient donné le mot
pour voler ses ailes de séraphin au souverain du Nouveau Monde, qui
s'est trouvé empêché de mettre en scène la prééminence apostolique
qu'il avait solennellement étalée à Johannesburg quelques mois
auparavant à l'occasion des funérailles messianisées de M. Nelson
Mandela.
Déjà, tous les lundis et dans plus de cent villes allemandes, des
manifestations populaires proclament: "Soixante-dix ans
d'occupation, ça suffit. US go home." Une première marche sur Berlin
aura lieu le 27 juillet. Même les Bâlois s'y mettent. Seule la presse
française laisse la nation dans l'ignorance des signes avant-coureurs
de la chute inéluctable de l'empire américain.