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interstellaire

Laurent Sacco

Exobiologie : le sucre de l'ADN peut naître dans le milieu


interstellaire

Une équipe de chercheurs de la Nasa a montré que le 2-désoxyribose, un sucre qui est un constituant
fondamental de l’acide désoxyribonucléique – le mythique ADN –, pouvait se former dans le milieu
interstellaire et ensuite dans les météorites et comètes frappant la jeune Terre. Cela renforce la thèse
qu'une chimie prébiotique universelle peut faire naître la Vie partout dans la Voie lactée et au-delà.

Une vue d'artiste de la chimie prébiotique apportée sur Terre. © Nasa, Hrybyk-Keith, Mary P.

Il y a plus de 60 ans, alors que la conquête spatiale commençait vraiment, tous les astrochimistes, ou peu s'en faut,
s'attendaient à trouver des molécules organiques à la surface des planètes comme Mars, ou des satellites comme la Lune,
mais certainement pas dans l'environnement froid et hostile du milieu interstellaire. On savait déjà qu'il était parcouru par
des rayons cosmiques très énergétiques, dont certains sont même des particules d'antimatière. Cela semblait impliquer
que la chimie du milieu interstellaire se devait d'être pauvre. En tout état de cause, les fragiles molécules organiques ne
devaient pas y survivre longtemps.

Et pourtant, l'ouverture de la fenêtre des ondes centimétriques et décimétriques en radioastronomie révéla l'existence dans
ce milieu, d'abord du radical hydroxyle HO (en 1963) et ensuite des premières molécules polyatomiques : l'ammoniac NH3

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(en 1968), l'eau (H2O) et le formaldéhyde H2CO (en 1969). L'accès à la fenêtre observationnelle des ondes millimétriques et
submillimétriques, à partir des années 1970, allait conduire finalement à une explosion qui a permis de découvrir la plupart
des molécules interstellaires. Plus de 150 sont connues à ce jour.

Depuis, on envisage sérieusement qu'une chimie prébiotique très active et complexe se produit déjà dans les nuages
moléculaires interstellaires denses où se forment de nouvelles étoiles et planètes. Les molécules produites, briques de la
vie ou précurseurs de ces briques, se seraient alors trouvées dans les météorites et comètes bombardant les jeunes
exoterres en formation. Ce scénario est testable de multiples façons, aussi bien en poursuivant les observations qu'en
analysant sur Terre les météorites et en reconstituant en laboratoire ce qui se passe dans ces nuages interstellaires.

Les années passant, on découvre de plus en plus que des briques de la vie et de l'ADN peuvent
apparaître sur la poussière du milieu interstellaire et finalement dans les météorites à l'aube de
l'histoire du Système solaire. Cette vidéo de la Nasa en est un bon exemple. Pour obtenir une
traduction en français assez fidèle, cliquez sur le rectangle blanc en bas à droite. Les sous-titres en
anglais devraient alors apparaître. Cliquez ensuite sur l'écrou à droite du rectangle, puis sur « Sous-
titres » et enfin sur « Traduire automatiquement ». Choisissez « Français ». © NASA Goddard

On sait ainsi que les grains de poussière silicatés et carbonés dans ces nuages sont à des températures de 4 à 10 kelvins

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environ et qu'ils sont enrobés d'une couche essentiellement formée de glaces, d'eau principalement mais pas seulement,
car l'hydrogène, l'hélium et le néon gèlent sur ces grains de poussière froids. En fait, l'étude des spectres infrarouges des
nuages interstellaires montre que la composition de ces glaces varie en fonction des conditions physiques locales.
Généralement dominées par H2O, elles contiennent souvent une foule d'autres molécules simples, notamment le méthanol
(CH3OH), le monoxyde de carbone (CO), le dioxyde de carbone (CO2), le méthane (CH4), etc.

Le milieu interstellaire reconstitué sur Terre

On sait aussi que ces glaces sont exposées à diverses formes de rayonnement de hautes énergies, des rayons cosmiques
mais surtout des photons ultraviolets (UV), capables de rompre bon nombre des liaisons chimiques des molécules dans les
glaces. Cela entraîne la production d'ions, de radicaux et d'autres espèces chimiques hautement réactives qui peuvent
réagir pour former de nouveaux composés chimiques qui n'existaient pas auparavant dans la glace.

Les chercheurs états-uniens de l'Ames’ Astrophysics and Astrochemistry Lab, en Californie, explorent ces phénomènes
depuis des années en reconstituant en laboratoire les conditions du milieu interstellaire (voir le précédent article de
Futura, ci-dessous). Et tout récemment, ils sont arrivés à un résultat très intéressant dont ils ont rendu compte dans un
article publié dans Nature Communications.

Ils ont introduit un mélange gazeux de vapeur d'eau et de méthanol dans une chambre avec un vide poussé de 10-8
millibars (la pression sur Terre est de un bar) où des températures de 4 à 15 K peuvent être reproduites. De la glace se
forme alors, qui a été bombardée par des photons UV similaires à ceux des jeunes étoiles dans les nuages interstellaires.

L'analyse de ces glaces a montré pour la première fois qu'elle contenait du désoxyribose (C5H10O4), ou plus exactement le
2-désoxyribose, un pentose dérivé du ribose et qui constitue la charpente de l'acide désoxyribonucléique, c'est-à-dire l'ADN,
alors que le ribose est la charpente de l'ARN.

Cette découverte laisse songeur car l'on a mis en évidence la présence d'acides aminés et d'une véritable base azotée de
l'ADN dans des météorites. Cela conforte bien un scénario dans lequel la chimie prébiotique est universelle. Elle se
développe déjà dans le milieu interstellaire et devrait donc faire naître la vie sur bien des exoplanètes habitables dans la
Voie lactée et au-delà.

Pour en savoir plus

Une des bases de l'ARN peut apparaître dans l'espace

Article de Laurent Sacco publié le 13/11/2009

Des chercheurs de la Nasa viennent de synthétiser en laboratoire l'une des lettres du code génétique. En
simulant les conditions régnant à l'intérieur des nuages interstellaires, les cosmochimistes ont vu
apparaître une des bases de l'ARN, l'uracile.

Il y a 50 ans, la plupart des rares chercheurs spéculant sur les conditions de l'apparition de la vie dans le cosmos auraient
certainement déclaré impossible l'existence de molécules organiques ailleurs qu'à la surface ou dans l'atmosphères des
planètes.

Ils avaient tort...

Ce n'est pas à la surface de la Lune mais à l'intérieur des nuages moléculaires riches en poussières que l'on découvrit des
dizaines de molécules carbonées, comme le méthane (CH4), l'alcool éthylique (C2H5OH), l'acide acétique (CH3COOH),
l'acétone (CH3COCH3) et même un sucre, le dihydroxyacétone ((CH2OH)2CO).

L'étude des météorites révéla aussi son lot de surprises avec la découverte d'acides aminés dans certaines d'entre elles, et
surtout, des hydrocarbures aromatiques polycycliques, communément appelés HAP, qui peuvent servir à la synthèse de

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molécules organiques importantes pour les êtres vivants.

On commença donc à envisager l'hypothèse que des briques de la vie n'étaient pas apparues sur Terre des suites de
processus géochimiques similaires à ceux proposés dans le cadre de la célèbre expérience de Stanley Miller. Elles auraient
été synthétisées d'abord dans l'espace puis apportées sur Terre par les météorites. Au cours des ans, devait alors se
constituer la toute jeune discipline qu'est l'exobiologie, ou astrobiology comme l'on dit dans les pays anglo-saxons.

© R. Ruiterkamp-Observatoire de Lieden

Pour expliquer l'apparition dans les nuages moléculaires et dans les météorites de composés organiques, on fait intervenir
une chimie complexe dans la fine couche de glace enrobant les poussières carbonées et silicatées que l'on sait exister dans
ces nuages. Les réactions sont produites sous l'action des rayons ultraviolets émis par les jeunes étoiles venant de naître
dans certains de ces nuages. La température dans ces derniers est d'une dizaine de kelvins tout au plus et la pression est y
très faible. Peu denses, les nuages moléculaires le sont tout de même suffisamment pour absorber une grande partie des
ultraviolets et ainsi empêcher que ce rayonnement détruise les molécules qu'il a engendrées.

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Une comparaison entre les molécules de pyrimidine et d'uracile. © Nasa

Des briques essentielles de la vie sur Terre


C'est pour simuler cette cosmochimie que des chercheurs du NASA's Ames Research Center ont mélangé de la pyrimidine
et à de la glace et ont exposé ce cocktail à un rayonnement ultraviolet intense dans un vide poussé. La pyrimidine est une
molécule azotée hétérocyclique aromatique (C4H4N2) voisine de la pyridine et comportant deux atomes d'azote. Or
certains de ses dérivés, parmi ce qu'on appelle les bases pyrimidiques, sont aussi bien connus des biologistes puisqu'il
s'agit des bases azotées, cytosine, thymine et uracile, que l'on trouve dans l'ADN et l'ARN.

La pyrimidine elle-même n'a pas encore été détectée dans les nuages moléculaires mais comme les HAP l'ont été, on a de
bonnes raisons de penser qu'elle doit y être présente. Cependant, rien n'empêchait de tester la résistance de la pyrimidine
à des conditions semblables à celles auxquelles sont soumises les poussières glacées dans les nuages moléculaires ou
dans les comètes. Surtout, il s'agissait d'explorer la possibilité de voir apparaître des bases pyrimidiques.

Un zoom sur le dispositif à ultravide avec de la glace enrichie en pyrimidine exposée à des
photons UV. © Nasa

Les chercheurs ont découvert que non seulement la pyrimidine était plutôt bien protégée des photons UV destructeurs une
fois qu'elle se trouvait dans la glace mais qu'effectivement des réactions photochimiques conduisaient à la fabrication de
l'uracile, la fameuse base azotée, désignée par la lettre U, que l'on trouve dans l'ARN.

Ce sont donc des résultats encourageants pour les exobiologistes car ils donnent encore plus de poids à l'idée qu'une part
importante des réactions chimiques prébiotiques s'est déroulée dans l'espace et pas sur Terre, peut-être même dans les
comètes .

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S'il était encore parmi nous, cette découverte aurait certainement beaucoup plu à Carl Sagan. Le 9 novembre 2009, le
grand planétologue et exobiologiste, devenu mondialement célèbre avec la série Cosmos, aurait eu 75 ans.

De gauche à droite, Stefanie Milam, Michel Nuevo et Scott Sandford devant le dispositif
simulant les conditions régnant dans les nuages moléculaires. © Dominic Hart/Nasa

Une vidéo est présente à cet emplacement dans la version web de l'article publié sur Futura;
elle a été retirée de ce document PDF pour des raisons techniques.

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