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DYNAMIQUE DE L’EROSION AU NIVEAU DES VERSANTS EN ZONE

MEDITERRANEENNE ALGERIENNE : FACTEURS EXPLICATIFS DE


VARIATION DU RUISSELLEMENT ET DE L’EROSION SOUS
DIFFERENTES OCCUPATIONS DU SOL
Boutkhil MORSLI, Mohammed HABI , Mohamed MEDDI
Résumé :
Sur les versants des zones méditerranéennes du Nord ouest algérien, la dynamique de
l’érosion hydrique est très active. Les processus érosifs ne cessent de s’amplifier et continuent
de poser de sérieux problèmes: dégradation des terres, chute des rendements, envasement des
barrages, destructions d’infrastructures et inondations. L’érosion hydrique est devenue un
phénomène très répandu et tellement grave qu'on peut le médiatiser de catastrophe. La
maîtrise de l’érosion est devenue donc un enjeu prioritaire. Les stratégies et les techniques
largement utilisées n’ont donné que des résultats partiels, les échecs sont essentiellement dus
aux erreurs d’appréciation des types d’érosion, à la complexité du phénomène, à la
méconnaissance ou à la négligence des facteurs sociologiques et du milieu et surtout à la
méconnaissance des facteurs prépondérants quant au déclenchement du ruissellement et de
l’érosion. Devant cette situation, il s’est manifesté un besoin de recherche dans ce domaine et
plus particulièrement sur les causes et les facteurs conditionnels des processus. C’est dans ce
cadre, que s’inscrit ce travail. L’objectif étant l’analyse des facteurs conditionnels, facteurs
explicatifs, des variations du ruissellement et de l’érosion et de l’impact des modes
d’utilisation du sol. Pour atteindre cet objectif, notre démarche a été menée de la façon
suivante : étude de transect homogène sur le plan lithologique le long duquel plusieurs
occupations de sols se succèdent. Deux transects ont fait l’objet d’étude: un sur
terrain marneux, l’autre sur terrains gréseux (principalement sols rouges), types
de toposéquences les plus représentatifs de la zone. L’approche est basée sur le
suivi de critères morphologiques et analytiques et sur l’étude des facteurs du
déclenchement du ruissellement et de l’érosion (observation et suivi sur terrain,
utilisation des méthodes de quantification : parcelles d’érosion, simulation des
pluies et techniques nucléaires (Cs-137)). Cette étude a permis d’obtenir des données
quantifiées relatives au fonctionnement et au comportement des sols des versants vis avis de
l’érosion en zones de montagnes semi arides. A l’échelle des transects, les variations
morphologiques et analytiques du sol (couleur, texture, MO, état de surface, épaisseur, charge
caillouteuse…) le long du versant sont dues à la dynamique érosive qui est-elle même liée
aux facteurs écologiques et anthropiques. Les résultats montrent que ce sont surtout les
caractéristiques du couvert végétal, de pente (évacuation et accumulation), du mode
d’utilisation et des aménagements qui conditionnent cette dynamique. A la variation
d’occupation de sol (formations naturelles arbustives ou buissonnantes, parcours, cultures,
arboriculture) correspond également une variation de la dynamique érosive. Ces transects
présentent différents faciès nettement distincts: le faciès d’appauvrissement et de
dégradation où le sol, situé sur forte pente et occupé par une végétation clairsemée, est
fortement affecté par l’érosion (le décapage du sol est si important que l’érosion a fini par
provoquer l’affleurement de pavages de cailloux et la diminution de l’infiltration des eaux
gênant ainsi fortement la régénération des végétaux), le faciès de stabilité où le sol est plus ou
moins stable et le faciès d’évolution sous couvert végétal dense où l’enrichissement du sol en
humus et le colluvionnement favorisent de plus en plus la stabilité et l'évolution
pédogénétique. Sur les versants de sol brun calcaire sur marne, le kram reste inférieur à
15 % : 3 à 12 sur sol nu, 0,5 à 6 sur sol cultivé et 1 à 5 % sur sol en jachère, Par contre, le
ruissellement maximum, surtout durant les pluies orageuses, a dépassé les 30 % sur le sol nu
et il atteint même les 60 % durant les averses exceptionnelles tombant sur les terres battues
(averses de novembre 2001). Ce sont ces ruissellements exceptionnels qui constituent les
pointes de crue qui à leur tour contribuent à l’exportation des terres vers l’aval. L’érosion
annuelle est de 1 à 2 t/ha/an sur les sols en jachère, 1 à 3 t/ha/an sur sols travaillés et de 4 à
6 t/ha/an sur sols nus. L’érosion en nappe, comparée au seuil de tolérance, reste modérée.
Mais dans une zone comme la notre où les sols sont souvent superficiels, squelettiques et où
la pédogenèse est défavorisée par l’aridité (taux d’altération relativement faible+ exploitation
minière), ces seuils de tolérance doivent être revus. En plus, ces seuils ne prennent pas en
considération le phénomène de sélectivité de l’érosion, les stocks en carbone peuvent chuter
de plus de 28%. L’érosion linéaire qui prend le relais de l’érosion en nappe est importante sur
roches tendres telles que les marnes. Les masses d’eau ravinantes proviennent dans une large
proportion des versants. C’est lors des évènements exceptionnels que se déclenchent les
graves manifestations de ruissellement et de l’érosion. L’intensité du ruissellement et de
l'érosion est en étroite relation avec les états de surface, eux-mêmes conditionnés par le mode
d’occupation du sol. La pluie d'imbibition (Pi) est nettement supérieure pour un sol stable et
rugueux (Pi>30mm) que pour un sol dégradé (1<Pi<5 mm), les Pi peuvent diminuer de plus
de cinquante fois. Cette étude a apporté des éléments de réponses très utiles à la
compréhension du déclenchement du ruissellement et de l’érosion ainsi qu’à la lutte
antiérosive. Les résultats ont mis en évidence le rôle de l’intensité de pluie, de la pente et
surtout de l’état de surface (rugosité, compacité, fissuration, croûtes superficielles, taux de
couverture, pierrosité et humidité) dans le déclenchement et la variation du ruissellement et
de l érosion. En parallèle, deux facteurs semblent jouer un rôle prédominant dans la sensibilité
du milieu : le déficit hydrique de plus en plus prolongé et les modes de gestion appliqués qui
ne suivent plus l’évolution bioclimatique du milieu naturel.

Types de sols Ruissellement Erosion Indice Erodibilité Erodibilité

Kram % Krmax % (t/ha/an) d’instabilité Kusle x1000) (nomogramme.)

Brun calcaire vertique 3,5 – 9,3 32,62 1,5 - 6,8 0,4 - 0, 8 2-8 0,11 - 0,15
Brun calcaire limoneux 4,1-12,2 32,20 2,6 - 8,5 2,9 - 3,2 18 - 40 0,26 - 0,40
Rouge fersiallitique 2,2 -13,6 27,00 2,4 - 5,20 1,2 - 4,2 14 - 20 0,21 - 0,34
Vertisol 3,05 - 6,8 25,00 1,4 - 6,5 0,3 - 0,8 0,04 - 0,15
Brun calcaire colluvial 10,2 36 4,1 0,8 - 1,8 4 - 15 0.15 - 0.20
Tableau 1 : érodibilité des principaux types de sols de la région.
Site Occupation Pente Etat de M.O. Prof. Text. CaCo3 Charg. Infilt.P Erosion
% surface % (cm) % % Cail.% i mm
Matorral dense >20 Litière 2,5 60 LA 2 1à2 25 Traces
I Agriculture Meuble 1à2 > 80 LSA 2 -
intense+ GCES 3à10 poreux 25 --
Ampelodesma Fermé 1à 1,5 40 SL 2 30 décapage
II Maurit. Dissaie >25 et tassé 3 fort
Forêt dense 6à20 Litière 4,5(sol) >50 SL - - 35 --
Agriculture + Meuble 1,3 > 80 LS 3 2 colluvion
Aménagements 3à6 poreux 15 nement
Matorral >20 Fermé 2,2 30 LS 2,5 15 décapage
III clairsemé Tassé 5 rigoles
Arboriculture 10 Fermé 1,5 60 LS 1,5 5 décapage
(Oliviers) 10 griffes
Céréales 6 Meuble 1,5 >80 LS 3 2 15 Griffes
Tableau 2 : caractéristiques des sols de différentes occupations d’une toposéquence sur sol rouge.
Mots clés : Ruissellement ; Erosion ; Sol ;Occupation du sol ; Transect ;Parcelles
d’érosion ;Simulation de pluies ; Ouest algérien.

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