Par Antoine Sirand et Marie Niasse, experts-comptables et commissaires aux comptes
La complémentarité des missions
de l’expert-comptable
L’EXPERTISE DU CHIFFRE
et du commissaire aux comptes
« Si la finalité des travaux de l’expert-comptable est créatrice de valeur pour l’entité,
celle du commissaire aux comptes est créatrice de confiance pour les tiers. »
A
ujourd’hui, 98 % des entreprises
françaises ont moins de 50 sala-
riés, et 80 % des mandats de
commissariat aux comptes sont
concernés par ces dernières.
Par ailleurs, 80 % des entreprises fran-
çaises ont recours aux services d’un
expert-comptable. Les deux professions
se côtoient donc en permanence. Le
bon fonctionnement de la relation de
ce couple constitue un facteur clef de
succès pour nos entreprises. Mais si les
complémentarités sont évidentes sur
certains aspects, elles sont parfois plus
difficiles à percevoir sur d’autres. Quelles
sont-elles véritablement ?
Nous entendons souvent les diri-
geants nous dire :
« Je ne comprends pas pourquoi mon
commissaire aux comptes vérifie une
déclaration élaborée par mon expert-
comptable ! En fait, vous refaites deux fois
la même chose ! »
« Si je suis obligé d’avoir un commissaire
aux comptes, je n’ai plus besoin de mon
expert-comptable ! »
« Mais l’expert-comptable ne me l’a pas
demandé, pourquoi, vous, commissaire
aux comptes, avez-vous besoin de cette
information ? »
« C’est bon, les comptes sont faits, vous
(commissaire aux comptes) n’avez plus
rien à faire ! »
al 62 LES AFFICHES DE GRENOBLE ET DU DAUPHINÉ
Ces réflexions trouvent leur origine
dans l’incompréhension de l’objec-
tif et de la nature des missions bien
distinctes de l’expert-comptable et
du commissaire aux comptes et dans
le déroulement de l’intervention de
chacun des deux professionnels sur
les comptes annuels.
Concernant l’objectif
et la nature des missions
La mission de l’expert-comptable est
contractuelle et relève d’un besoin ex-
primé par le client lui-même. En effet,
l’entité peut choisir de faire appel à un
expert-comptable pour l’accompagner
de manière ponctuelle ou permanente,
pour une mission complète ou spéci-
fique. Elle peut également choisir d’éla-
borer ses comptes elle-même. L’expert-
comptable fournit généralement une
mission normée de « présentation des
comptes annuels », ayant pour objec-
tif d’élaborer des comptes annuels
conformes aux règles et aux lois. Les
clients font appel aux services d’un
expert-comptable pour s’assurer qu’ils
répondent bien à toutes leurs obliga-
tions légales en matière comptable, fis-
cale ou sociale. Les missions d’accom-
pagnement et de conseil constituent le
deuxième volet essentiel de sa mission.
L’expert-comptable propose donc des
réponses techniques aux contraintes
économiques et légales de l’entité.
Le commissaire aux comptes, de son
côté, a une mission légale. Elle est
prévue par le Code de commerce. Cette
obligation légale est souvent perçue
d’un premier abord par l’entité contrô-
lée comme une contrainte. Cependant,
il n’en est rien. Certes, le commissaire
aux comptes contrôle la fiabilité des
comptes, puisqu’à travers sa mission
normée de certification, il s’assure de la
régularité, de la sincérité et de l’image
fidèle que les comptes vont refléter
de la situation de l’entité contrôlée. Il
vérifie également que les choix rete-
nus en matière comptable, fiscale,
sociale ou juridique respectent les
obligations légales et réglementaires.
Mais sa mission se traduit aussi par une
approche de sécurisation basée sur
l’analyse des risques. En effet, par cette
analyse, le commissaire aux comptes
est en mesure de mettre en exergue
les éventuelles faiblesses dans les pro-
cédures internes de l’entité contrôlée.
Par ses travaux, il met en évidence des
risques avérés qui n’ont pas été antici-
pés par l’entité. Cela permettra à l’entité
contrôlée d’améliorer et de sécuriser
ses procédures. Le commissaire aux
comptes participe donc également à
l’accompagnement de l’entité.
13 janvier 2017

Concernant l’intervention
sur les comptes et la mise
en œuvre des missions
L’intervention du commissaire aux
comptes est souvent perçue comme
ponctuelle et en aval de l’élaboration
des comptes. Cependant, sa mission est
bel et bien permanente, puisqu’il peut
intervenir dans l’entité contrôlée tout
au long de l’année, afin notamment de
s’assurer de la bonne mise en œuvre
des procédures assurant la sécurisa-
tion des éléments financiers. Il s’assure
également de manière régulière de la
santé financière de l’entité, notamment
par l’examen des états financiers inter-
médiaires et du niveau de trésorerie,
participant à la garantie d’une bonne
continuité de l’exploitation. Le commis-
saire aux comptes a donc un rôle essentiel
de garant de la bonne santé financière
affichée par l’entité. La planification de
sa mission amène le commissaire aux
comptes à chercher à anticiper les sujets
et les éventuelles difficultés quant à la
clôture des comptes et à faire part de
ces éléments à son client.
Le commissaire aux comptes n’intervient
cependant pas au niveau de l’élabora-
tion des comptes ou des états finan-
ciers intermédiaires, contrairement à
l’expert-comptable. En effet, ce dernier
participe directement à la « fabrication »
des comptes. Il intervient de manière
ponctuelle ou permanente, en fonc-
Échéancier
• Employeurs occupant au moins 50 sala-
riés : paiement des charges sociales sur les
salaires de décembre 2016 payés entre le 11 et
le 20 janvier 2017.
25 janvier 2017
13 janvier 2017
tion de la demande du client. Il traite
et analyse les données comptables et
financières de l’entité. Il peut également
élaborer les déclarations fiscales, sociales.
Les « fameuses » missions de conseil
sont effectuées en collaboration avec
les professionnels du droit (avocats
comme notaires) ou encore avec les
conseils financiers de l’entité (banquiers,
conseillers en gestion de patrimoine…).
L’élaboration des missions de production
de documents comptables, fiscaux ou
sociaux s’effectue souvent en aval de la
décision de gestion, alors que les mis-
sions d’accompagnement et de conseil
sont effectuées en concertation avec tous
les interlocuteurs, afin d’aider le dirigeant
à anticiper et à trancher sur les décisions
stratégiques et de gestion de l’entité. À
ce niveau, l’expert-comptable a un rôle
prépondérant d’accompagnement pour
le client.
Si nous pouvions faire un parallèle
avec la construction d’un bâtiment,
l’expert-comptable serait l’architecte,
le maçon, le charpentier, l’électri-
cien… Le commissaire aux comptes
serait quant à lui l’entreprise certifica-
trice chargée d’établir les attestations
de conformité. Et c’est notamment
ce qu’il fait lorsqu‘il certifie dans son
rapport sur les comptes annuels que
« les comptes annuels sont réguliers et
sincères et qu’ils donnent une image fidèle
• Tous employeurs : déclaration
annuelle des salaires versés en 2016
(DADS) et régularisation des cotisations
versées pour l’année 2016.
31 janvier 2017
LES AFFICHES DE GRENOBLE ET DU DAUPHINÉ
L’EXPERTISE DU CHIFFRE
du résultat des opérations de l’exercice
écoulé ainsi que de la situation financière
et du patrimoine de l’entité à la fin de cet
exercice ».
Si la complémentarité des deux mé-
tiers est une évidence, il n’en ressort
pas moins une absolue nécessité de
bien appréhender les divergences des
deux professions afin d’en optimiser
les bénéfices en favorisant notamment
la communication tripartite expert-
comptable/commissaire aux comptes/
entité auditée pour :
• Définir un planning concerté permet-
tant à chacun de permettre l’accomplis-
sement et la coordination des différentes
diligences,
• Des échanges réguliers permettant
d’anticiper les éventuels arbitrages en
matière d’arrêté de comptes.
Si les travaux de chacun des deux pro-
fessionnels peuvent être divergents et
complémentaires, ces professions font
partie intégrante d’un cercle vertueux : si
la finalité des travaux de l’expert-comp-
table est créatrice de valeur pour l’entité,
celle du commissaire aux comptes est
créatrice de confiance pour les tiers. Cette
dualité constitue un des vecteurs favo-
risant la constitution d’un socle solide
pour notre économie : accompagner des
porteurs de projets et sécuriser ceux qui
les suivent. ■
• Entreprises soumises à l’impôt sur
les sociétés ayant clos leur exercice le
31 octobre 2016 : télétransmission de la
déclaration annuelle des résultats et des
annexes.
al 63