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CONTRÔLE NON DESTRUCTIF DE STRUCTURES COMPOSITES

POUR L’AÉRONAUTIQUE
NON DESTRUCTIVE TESTING OF COMPOSITE MATERIALS IN
AERONAUTICS
G.FRAMEZELLE, F.LEPILLER - INSTITUT DE SOUDURE
J.HATSCH, S.REMOND - COMPOSITE INTEGRITY
Composite Park - Route de Diesen / De Vernejoul - 57890 Porcelette
Tél. +33 (0)3.87.00.00.12
E-mail : j.hatsch@compositeintegrity.com

Résumé

Les matériaux composites sont de plus en plus employés dans de nombreux secteurs
industriels. Ils sont utilisés dans les domaines de pointe tels que l’aéronautique pour leurs
propriétés mécaniques très intéressantes. Cependant, que ce soit au cours de leur
fabrication ou pendant leur utilisation, des défauts sont susceptibles d’apparaître. Ces
défauts engendrent une concentration de contraintes et peuvent avoir de lourdes
conséquences. Il est donc important d’inspecter les structures composites pour s’assurer de
leur intégrité.
De ce fait, de nombreuses techniques de contrôle non destructif sont utilisées ou
développées. Le contrôle ultrasonore (mono-élément, multi-éléments, jet d’eau) permet de
détecter de nombreux défauts avec une bonne fiabilité. D’autres techniques ultrasonores
annexes telles que les ultrasons sans contact présentent aussi des avantages dans certains
cas. Certaines méthodes optiques comme la shearographie et la thermographie offrent la
possibilité de faire une inspection rapide et sans contact. De plus, ces deux dernières
techniques ont profité des nombreux développements réalisés dans le but d’améliorer leur
détectabilité. Ces développements ont donné naissance à des couplages entre techniques
CND comme par exemple la vibrothermographie.
Toutes les techniques utilisées offrent des résultats différents. Ainsi en fonction des défauts
recherchés et des conditions d’utilisation, une technique sera privilégiée par rapport à une
autre.

Abstract

Composite materials are more and more used in many industrials sectors. Their mechanical
properties are very interesting, that is why this material is often used in advanced field such
as aeronautics. However, during manufacturing process or in service, flaws may be
generated. Defects may create stress concentration with serious consequences. It is
therefore important to test composite structure to ensure their integrity.
As a result, a lot of nondestructive testing techniques are used or developed. Ultrasonic
testing (single probe, phased array, squirter scanning) can detect many flaws with good
reliability. Other contactless ultrasonic techniques show advantages in some cases. Then,
some optical method like shearography and thermography allow a quick control without
contact. Moreover, these last techniques took advantage of many developments in order to
improve their detectability. These developments gave rise to couplings between NDT
techniques such as the vibrothermography.
All techniques provide different results. Thus according to the defect sought and operating
conditions, a technique is favored over another.

-1-
INTRODUCTION

Dans le secteur aéronautique, le Contrôle Non Destructif (C.N.D.) se développe


particulièrement autour du contrôle de structures en matériaux composites. L’objectif est
d’améliorer et de développer des systèmes performants pour permettre le contrôle précis et
rapide de tels matériaux. C’est dans ce cadre qu’a été fondé Composite Integrity créé
conjointement par le Pôle de Plasturgie de l’Est (PPE) et l’Institut de Soudure (IS).
Composite Integrity développe ses activités autour du contrôle en production, du
développement de systèmes de contrôle (par l’intermédiaire de partenariat avec des
entreprises, universités et de ses maison mères), de la recherche et du développement, de
l’expertise et de la formation. Composite Integrity a accès à de nombreux équipements
permettant le contrôle de matériaux composites par jet d’eau, phased array, thermographie,
shearographie… Bénéficiant de toutes ses technologies innovantes, l’IS travaille
actuellement, en relation avec le PPE et Composite Integrity, sur des projets dont l’objectif
est d’optimiser le contrôle des matériaux composites pour l’aéronautique. Ce document
présente les techniques employées pour le contrôle de matériaux composites pour
l’aéronautique.

LES METHODES ULTRASONORES

Le contrôle ultrasonore est basé sur la propagation de faisceaux ultrasonores dans un


matériau et sur l’évaluation des défauts provenant des perturbations du signal à la surface
du défaut. La méthode la plus classique pour effectuer un contrôle ultrasonore utilise des
traducteurs mono-élément.

La technologie mono-élément

Un système ultrasonore typique est constitué d’un poste ultrasonore qui émet et reçoit des
impulsions électriques d’un traducteur piézo-électrique qui convertie l’énergie acoustique en
énergie électrique et inversement. Le contrôle ultrasonore mono-élément peut être effectué
selon deux techniques différentes, soit en échographie, soit par transmission.
Dans le cas d’un contrôle ultrasonore par échographie, le traducteur émet et reçoit des
ondes ultrasonores qui se réfléchissent soit sur le fond de la pièce, soit sur un défaut. En
présence d’un défaut, une partie du faisceau ultrasonore est réfléchie sur le défaut et génère
un signal électrique qui se traduit par l’apparition d’un écho supplémentaire.

Contrôle ultrasonore par échographie. Gauche : zone saine ; droite : zone défectueuse.

-2-
Dans le cas d’un contrôle par transmission, deux traducteurs sont utilisés, l’un en émetteur,
l’autre en récepteur. Les deux traducteurs sont placés de part et d’autres de la pièce. La
présence d’un défaut bloque la propagation des ondes ultrasonores et se traduit sur
l’échogramme par l’atténuation de l’écho.

1
Contrôle par transmission

Ces systèmes de base peuvent être facilement optimisés pour s’adapter aux besoins de la
production. Ainsi, les contrôles en cuve, par jet d’eau et les systèmes de numérisation
automatique font leur apparition et rendent le contrôle plus attractif.
Le contrôle de matériaux composites par la technique ultrasonore mono-élément permet la
détection de défauts de type délaminages, porosités ou inclusions2.

2
Contrôle par transmission (gauche) et en cuve (droite) d’un matériau composite

Lors d’un contrôle par jet d’eau, les pièces sont placées entre deux traducteurs alimentés par
jet d’eau. Les traducteurs se déplacent mécaniquement suivant un cycle de balayage
préétabli. Le signal ultrasonore est mémorisé sur support informatique et permet de générer
des cartographies de type C-scan. Ce type de technologie est particulièrement employé pour
le contrôle de pièce en aéronautique. Le C-scan jet d’eau à Composite Integrity est illustré
sur la figure ci-dessous. Cet équipement permet le contrôle notamment des pièces de fin de
fabrication pour l’aéronautique.

Système ultrasons C-scan Jet d’eau à Composite Integrity (Porcelette)

-3-
La Technologie Phased array

Pour s’adapter aux cadences de production industrielle, le


contrôle non destructif ultrasonore doit évoluer. C’est en
partie pour cette raison que s’est développée la
technologie phased array ou multi-éléments.
La technologie multi-éléments permet non seulement un
gain de temps, mais elle augmente également la fiabilité
du scan en améliorant « l’insonification » des endroits
difficilement accessibles3.

Le principe du phased array repose sur l’utilisation de


traducteurs décomposés en éléments individuels pouvant Balayage angulaire d’un 3traducteur
être pilotés indépendamment. Ainsi, par rapport à la multi-éléments
technologie mono-élément, le traducteur multi-éléments
permet un balayage plus rapide de la pièce, une focalisation électronique du faisceau, et une
déflexion permettant d’émettre un faisceau suivant plusieurs angles d’incidence. Le
traducteur multi-éléments permet de réduire la zone morte et augmente la résolution. La
rapidité de contrôle est quant à elle obtenue grâce à un faisceau convergeant de la zone à
contrôler sans qu’il soit nécessaire de déplacer le traducteur
Les traducteurs peuvent adopter différentes géométries (linéaire, annulaire, matricielle et
circulaire).

Le contrôle ultrasonore des matériaux composites, à l’aide de traducteur multi-éléments,


permet de détecter de nombreux défauts tels que les délaminages, les fissures, les
décohésions fibre / matrice, les manques de fibres, la corrosion et les dommages suite à un
impact4. Dans le cadre d’un projet réalisé à l’IS, un contrôle en phased array a été réalisé sur
des plaques en matériaux composites carbone / époxy monolithiques, les résultats obtenus
sont illustrés sur la figure ci-dessous. Les défauts visualisés sont des inserts de tailles
variables et à différentes profondeurs.

C-scan obtenu par contrôle ultrasonore multi-éléments d’une plaque en matériau composite munie de
défauts type délaminages. Cartographie en amplitude (gauche) et en temps de vol (droite).

Cette technique permet de positionner et dimensionner les défauts dans le matériau.

-4-
Afin d’améliorer l’exactitude des informations recueillies, une méthode basée sur la
combinaison du phased array et de la méthode SAFT (Synthetic Aperture Focus Technique)
a été développée. Elle est encore aujourd’hui rarement utilisée en contrôle. Cette technique
séduit par ses nombreux avantages, notamment l’amélioration de la sensibilité et de la
résolution dans le champ proche5.

La première étape consiste à appliquer la méthode du Sampling Phased Array (SPA). Elle
repose sur l’utilisation d’un traducteur multi-éléments pour lequel un signal émis par un seul
élément émetteur est réceptionné par tous les autres éléments libres du traducteur. Cette
opération est réitérée pour tous les éléments du traducteur.

5
Principe de la méthode Sampling Phased Array

Ainsi pour chaque position de contrôle les données sont enregistrées, et elles constituent les
données d’entrées pour la reconstruction d’images 2D et 3D.

La seconde étape consiste à reconstruire les images à partir des données enregistrées. Pour
cela, une analyse des A-scans, basée sur le calcul du temps de parcours entre les éléments
émetteur et récepteur et des amplitudes des échos des réflecteurs présents dans la pièce,
est effectuée. Par conséquent, il est possible de réaliser virtuellement un balayage angulaire
et des focalisations en différentes profondeurs après l’acquisition des données. Non
seulement la vitesse du contrôle est significativement écourtée par la virtualisation du
contrôle, et la focalisation dans le champ proche augmente la sensibilité et la résolution5.

C-scans obtenus par contrôle en immersion d’un matériau composite type CFRP, en phased array
6
conventionnel (gauche) et en mode Sampling Phased Array

-5-
Outre ces avantages, la méthode REserve PHase MATching (REPHAMAT) développée à
partir des données issues de la combinaison des méthodes SPA et SAFT permet d’améliorer
la détection des défauts dans les milieux hétérogènes et anisotrope tels que les matériaux
composites. Cette méthode consiste à prendre en compte le fait que les caractéristiques
acoustiques (vitesse de phase et vitesse de groupe) varient en fonction du milieu hétérogène
et anisotrope (caractérisé par sa matrice d’élasticité)5,7 . Les vitesses sont calculées en
fonction des constantes élastiques, le temps de vol est ensuite calculé par tracé de rayons
ou grâce à des logiciels de simulation. Enfin la reconstruction 2D ou 3D s’effectue avec la
méthode SAFT.
Cette méthode s’étend également aux matériaux composites multi-couches. Ainsi la
méthode du Gradient Elastic Constants Descent Method (GECDM) permet d’ajuster de
manière itérative les propriétés élastiques du matériau composite (matrice) et ainsi d’obtenir
une reconstruction d’images fidèle à la réalité5,7.

CONTROLE ULTRASONORE SANS CONTACT

Contrôle par Laser ultrasonore

Le contrôle de matériaux composites peut s’avérer difficile pour des structures à géométries
complexes. L’intérêt du laser ultrasonore réside dans sa capacité à détecter des défauts
dans des structures de forme irrégulière. Sa rapidité d’exécution, son application sans
contact et sa maniabilité pour le contrôle de pièce à géométrie particulière en font ses
principaux atouts8.
Le laser ultrasonore fonctionne avec deux faisceaux laser qui entrent en interaction avec la
surface du composant. Le premier laser génère de brèves impulsions lumineuses qui au
contact de la pièce qui créé des ondes ultrasonores tandis que le second réceptionne les
ondes en émettant de longues impulsions. L’onde ultrasonore générée se propage à
l’intérieur du matériau, et se réfléchit soit sur le fond de la pièce soit sur un défaut. Le
mouvement provoqué à la surface par l’onde réfléchie, engendre une variation de la
fréquence de la lumière rétrodiffusée du laser qui détecte les ondes. Le signal est ensuite
démodulé puis transformé en signal électrique par l‘intermédiaire d’un système optique.
Enfin, le signal électrique est analysé par un système équivalent au contrôle ultrasonore
mono-élément et est affiché sur un oscilloscope9.

9
Principe de fonctionnement du Laser ultrasonore

Pour le contrôle des matériaux composites, la technique du laser ultrasonore est notamment
utilisée pour détecter les défauts, tels que les fissures9, des délaminages8, ou encore de
porosités.
Cette méthode est facilement utilisable lors de la fabrication, l’assemblage de pièces et
également lorsqu’elles sont en service. La vitesse de contrôle est comparable à celle d’un

-6-
système C-scan10. Trétout10 a montré le potentiel de cette méthode pour la détection de
corrosion et de délaminages dans les matériaux composites CFRP.

10
C-scan obtenu par Laser ultrasonore de voilure d’un Falcon 10

Pour un contrôle plus performant, cette méthode peut également être couplée avec des
traducteurs ultrasonores par couplage air.

Méthode de couplage à l’air

Dans les techniques ultrasonores conventionnelles, un couplant, en général de l’eau ou du


gel, assure la transmission du signal ultrasonore. Le contrôle ultrasonore de structure en
matériau composite peut alors s’avérer délicat en présence d’obstacles à la surface de la
pièce. Afin de s’affranchir de ces contraintes géométriques, une solution consiste à utiliser
un couplage à l’air.

Le principe du couplage par l’air est basé notamment sur la mesure de variation de
l’amplitude des ondes de Lamb à travers un matériau par le biais de traducteurs adaptés.
Deux méthodes de fonctionnement se distinguent. La première configuration nécessite
d’effectuer le contrôle en disposant les traducteurs en mode émetteur / récepteur (ou pitch /
catch). Dans la seconde configuration, les traducteurs sont orientés dans la même direction,
où le récepteur capte les ondes de Lamb diffusées et réfléchies par le défaut11.

Principe de la méthode par couplage à l’air – a : méthode pitch and catch ; b : méthode de diffusion et
11
réflexion. E : Emetteur ; R : Recepteur .

-7-
Cette technique principalement employée dans le domaine aéronautique, permet de détecter
dans les matériaux composites (CFRP, nid d’abeilles) des défauts de type fissures,
porosité12, délaminages et dommages suite à un impact11.

Contrôle par couplage air – gauche : délaminage dans prepreg CFRP ; droite : délaminage dans nid
12
d’abeilles

SHEAROGRAPHIE

Principe de la shearographie

La shearographie est une méthode interférométrique utilisant la lumière laser comme source
lumineuse. Le gradient du déplacement de la surface provoquée par la mise sous
contraintes de la pièce est mesuré puis analysé et présenté sous forme d’une cartographie
des déformations de la surface. Cette cartographie est le résultat de la comparaison
d’images obtenues par mesure des variations géométriques à la surface des échantillons
sous test à différents intervalles de temps13.
Les contraintes appliquées peuvent être thermiques, vibratoires ou pneumatiques
(dépression)13,14.
Cette méthode est sans contact et permet une mesure globale donc rapide de la surface
analysée.

Un système de contrôle shearographique comprend une caméra CCD, un laser (ou diode
laser), un système optique permettant de réaliser un cisaillement du champ vu par la caméra
et une unité de traitement des données.

Shearographie par contraintes thermiques

Pour détecter les défauts de façon optimale, la contrainte appliquée doit être correctement
adaptée au type de contrôle.
En raison de la haute sensibilité de la shearographie, la charge appliquée est très petite. En
appliquant une contrainte thermique par l’intermédiaire de lampes halogènes ou lampes
flash, la variation de température de quelques degrés suffit pour provoquer des déformations
de surface de l’ordre du micromètre13,15.

Ainsi, pour le contrôle de délaminages de structures composites monolithiques, Clergent 13


conseille l’utilisation de contraintes thermiques avec lampes halogènes. Dans le cadre d’un

-8-
projet de développement industriel de l’IS, un contrôle par shearographie a été réalisé sur
des plaques en matériau composite monolithique carbone / époxy et sur une structure en nid
d’abeilles. Les résultats obtenus sont illustrés sur la figure ci-dessous.

Contrôle shearographique d’une structure composite monolithique (gauche) et en nid d’abeille (droite)

Shearographie par contrainte pneumatique (dépression)16

La shearographie par dépression permet de manière précise de détecter différents types de


défauts dans les matériaux composites, notamment les délaminages. La différence de
pression entre l’air contenu dans les défauts et la contrainte à la surface du matériau crée
une déformation. La dépression exercée est très faible (de l’ordre de quelques Pascal) et
suffit pour pouvoir enregistrer les déformations engendrées à la surface. La pression
appliquée dépend des caractéristiques mécaniques du matériau et le rapport
largeur/profondeur des défauts à détecter. Il est possible de prédire la dépression à
appliquer grâce un modèle de calcul par élément-fini. Pratiquement la dépression est
souvent exercée à l’aide d’une ventouse.

16
Principe de la Shearographie par dépression

16
Shearographie par dépression pour des décollements de degré différent .

-9-
Shearographie par excitation vibrationnelle

Dans cette configuration de contrôle, un traducteur piézoélectrique est attaché à l’arrière de


la pièce. Il génère des ondes ultrasonores de fréquences différentes (comprise entre 0 et
100 kHz) provoquant la vibration de l’échantillon à une certaine fréquence17. A cette
fréquence d’excitation, les défauts tels que les délaminages dans une structure composite en
carbone époxy monolithique sont détectables. En effet, les ondes guidées (onde de Lamb)
sont très sensibles à la présence de défauts18.

17
Cartographie d’un matériau composite CFRP obtenue par shearographie à excitation vibrationnelle

Dans le cas général, les défauts apparaissent clairement sur l’interférogramme lorsque la
fréquence d’excitation atteint la fréquence de résonance du défaut (beaucoup plus élevée
que la fréquence de résonance de la pièce)13,19,20.
Cependant contrairement à l’excitation thermique ou dépressive, l’excitation vibrationnelle
engendre deux états statiques de vibration de l’objet. L’onde de Lamb nominale peut être
isolée à l’aide d’un filtre optique, le stroboscope, pour ne voir que l’interaction des ondes
avec les défauts18.

Cartographie d’un matériau composite stratifié obtenue par shearographie par excitation
18
vibrationnelle .

- 10 -
LA THERMOGRAPHIE

La thermographie infrarouge est basée sur la mesure du flux thermique ou rayonnement


électromagnétique émis par une pièce dans l’infrarouge. Ce flux est directement
proportionnel à la température de surface de la pièce au facteur d’émissivité près. Ainsi, à
l’aide d’une caméra infrarouge, une représentation thermique de la pièce peut être
reconstituée. La méthode thermographique la plus utilisée pour le contrôle de structures
aéronautiques consiste à appliquer une impulsion thermique externe au matériau. Les
défauts sont alors mis en évidence par l’étude de la propagation du flux thermique21.

La thermographie pulsée

Dans le cas de la thermographie pulsée, une impulsion thermique est appliquée à sa


surface. En mode pulsée, les sources d’excitation couramment utilisées sont les lampes
flash et halogènes ou le Laser. La durée de l’impulsion varie de la microseconde à la
seconde en fonction de l’épaisseur du matériau et de ses propriétés thermiques (notamment
la conductivité). Le système thermographique peut être appliqué en mode transmission ou
en réflexion22.

23
Schéma de montage de la thermographie pulsée

Après l’impulsion thermique émise, la variation de température est très rapide en raison de la
propagation du front thermique par diffusion en dessous de la surface et à cause des pertes
par radiation et convection. En présence de défauts, l’impédance thermique augmente.
Concrètement, les défauts freinent le flux thermique dans la pièce et se traduit sur l’image
thermique par l’apparition d’un gradient thermique. L’image de la surface du matériau est
traitée à l’aide d’une caméra infrarouge.
Le contraste observé à la surface du matériau dépend de la taille du défaut, de sa distance
par rapport à la surface et de la température appliquée. Un exemple de résultats fournit par
le laboratoire TREFLE dans le cadre d’un projet collaboratif de R&D avec l’IS, est présenté
ci-dessous.

- 11 -
Thermogrammes de structures en matériau composite monolithique avec lampe halogène (gauche) et
lampe flash (droite)
Le contrôle des matériaux composites avec la thermographie pulsée permet notamment de
détecter dans les structures monolithique ou stratifié, les délaminages, les porosités, les
décohésions fibre / matrice, les inclusions et les fissures. Pour les matériaux composites en
structure sandwich, les délaminages, les fissures mousse et Nida, les inclusions et la
recherche d’eau sont détectables de cette manière.

La thermographie lock-in

Les mesures en thermographie sont souvent influencées par les paramètres


environnementaux du contrôle. Pour s’affranchir du bruit environnant qui pourrait perturber la
mesure, la caméra infrarouge est équipée d’un module lock-in qui va permettre de la
synchroniser au signal thermique émis. Ce module n’existe pas en thermographie pulsée. Il
permet d’obtenir une résolution inférieure à 0,1 K24.
L’inconvénient de cette technique est qu’il est nécessaire de connaître au préalable les
caractéristiques thermiques du matériau à tester afin de définir les fréquences du signal
thermique émis. En effet, chacune de ces fréquences correspond à une et une seule
profondeur d’inspection. La figure ci-dessous illustre ce type de contrôle.

Images de phase en thermographie lock-in sur matériau composite monolithique carbone / époxy à
deux fréquences différentes

La vibrothermographie

D’autres techniques nouvelles sont issues de la thermographie lock-in. Le couplage de la


thermographie lock-in et des ultrasons en est l’une d’elle, connue également sous le nom de
vibrothermographie. L’excitation photothermique est remplacée par une excitation
ultrasonore par le biais d’un traducteur ultrasonore qui entraine la propagation d’ondes
acoustiques dans le matériau. En présence d’un défaut, les ondes entrainent des
mouvements microscopiques de la matière et génèrent un échauffement local détecté par la
caméra infrarouge muni d’un module lock-in25.

- 12 -
26
Principe de mesure en vibrothermographie

La vibrothermographie est employée pour le contrôle de structure en matériau composite


dans le domaine aéronautique. Elle permet de détecter des défauts tels que des
délaminages, des dommages suite à un impact. La figure suivante montre des résultats de
contrôles par vibrothermographie de pièces CFRP avec des défauts de types délaminages
créé suite à un impact et d’origine naturel.

26
Contrôle par vibrothermographie, plaque CFRP avec dommages suite à un impact et
27
délaminage (droite)

CONCLUSION

Un aperçu des différentes techniques de contrôle non destructif des matériaux composites
pour l’aéronautique est présenté dans ce document. La technique ultrasonore mono-élément
peut être à moindre coup optimisée pour s’adapter à la production. La technologie phased
array permet un contrôle plus rapide des pièces. Les récentes évolutions liées au traitement
des données issues des acquisitions SPA, augmentent la sensibilité de détection et la
résolution du contrôle.
Lorsque le contact avec la pièce n’est pas possible, le contrôle de matériau composite peut
être effectué sans contact grâce notamment à la technique du laser ultrasonore et par
l’utilisation de traducteur avec couplage à l’air.
D’autres techniques plus globales telles que la shearographie et la thermographie se
révèlent être très performantes pour un contrôle rapide et sans contact.
La tendance actuelle montre que le couplage des techniques (shearographie et ultrason et
thermographie et ultrason) permet d’augmenter la sensibilité de détection des défauts.

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REMERCIEMENTS

Les équipements de CND évoqués dans cette publication sont propriétés d’Iseetech (Institut
Supérieur Européen de l’Entreprise et de ses Techniques). Ils ont bénéficiés du soutien
financier de l’Europe (Feder), de l’Agence Nationale de la Recherche (ANR), du Conseil
Régional de Lorraine, du Conseil Général de la Moselle et de Total Petrochemical France.

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