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Revue de botanique appliquée et

d'agriculture coloniale

Les Bases de la Sélection de la Pomme de terre (à suivre).


S. M. Bukasov

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Bukasov S. M. Les Bases de la Sélection de la Pomme de terre (à suivre).. In: Revue de botanique appliquée et d'agriculture
coloniale, 20ᵉ année, bulletin n°222, février 1940. pp. 97-116;

doi : https://doi.org/10.3406/jatba.1940.1498

https://www.persee.fr/doc/jatba_0370-3681_1940_num_20_222_1498

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— 97 —

Nous pourrions citer encore d'autres Guttifères dont les fruits


peuvent être utilisés; les graines de certaines espèces fournissent
aussi une graisse que savent extraire et qu'emploient les indigènes
de plusieurs colonies. Mais tous les arbres et arbustes fruitiers que
nous venons d'énumérer, à l'exception du Mangoustan, vivent
exclusivement à l'état spontané dans les forêts, et il n'est pas
douteux que leurs fruits trop délaissés pourraient être grandement
améliorés par la culture et la sélection.

Les Bases de la Sélection de la Pomme de Terre.


D'après S. M. BUKASOV.

Ce travail est le résumé des travaux et en particulier de l'article


de S. M. Bukasov paru dans le troisième volume des Bases
théoriques de la Sélection publiées sous la direction de N. I. Vavilov. On
y trouvera la mise au point de ce qui a été fait en U.R.S.S. et en
Allemagne sur la sélection de la Pomme de terre. Nous y avons
joint des indications sur la résistance au Doryphore, qui nous ont
été aimablement communiquées par M. B. Trouvelot. Nous n'avons
pas pu joindre M. R. Diehl, actuellement mobilisé, qui s'est occupé
pendant de longues années d'étudier les collections envoyées en
France par S. M. Bukasov, et dont nous avons utilisé la récente
monographie sur la Pomme de terre, pour la synonymie des
variétés (1). André Haudricourt.

Lorsqu'on a commencé, à la fin du xvme siècle, à s'occuper de


l'amélioration de la Pomme de terre, on savait tout juste que c'était
une plante d'origine américaine. Parmentier, voulant faire venir
de nouvelles variétés, écrivit aux Etats-Unis.
En fait, c'est seulement vers 1850, après l'invasion du Phytoph-
tore que le sélectionneur anglais Goodrich reçut une variété
chilienne Rough Purple Chili et l'employa.
En 1875, à l'Exposition internationale de la Pomme de terre
d'Altenbourg, on pouvait voir de nombreuses variétés chiliennes
avec les noms qu'elles portent encore aujourd'hui dans leur patrie.

(1) Le texte est uniquement basé sur les documents russes; les notes
sont au contraire basées sur des renseignements français.
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II ne semble pas pourtant que les premiers sélectionneurs


allemands : Richter, Paulsen, Cimbal les aient employées.
Le Bureau d'Introduction du Département de l'Agriculture aux
Etats-Unis avait rassemblé des collections de Pommes de terre sud-
américaines qui n'ont été ni décrites ni utilisées. Les collections
andines de Wight et Cook et mexicaines de Rydberg ont péri, ne
formant pas de tubercules sous le climat des Etats-Unis, les jours
d'été étant trop longs. Pour conserver une collection sous nos
latitudes, il faut raccourcir artificiellement le jour en couvrant la plante
matin et soir de manière à ne lui laisser que 9 à 10 heures de
lumière.
Les expéditions russes ont commencées avec S. M. Bukasov qui
a été aux Antilles, au Mexique et en Colombie (1925-26). Ensuite
S. V. Juzepczuk a été au Pérou, en Bolivie et au Chili (1927-29).
Enfin Vavilov a refait ces itinéraires en 1931-32. Les Etats-Unis ont
envoyé les expéditions de D. Reddick (1930), de Macmillan et Er-
i-anson (1932). Les Allemands ont envoyé dans les Andes, Schick
(1930).
Les expéditions russes, étant les premières en date, ont fait plus
de découvertes que les expéditions suivantes mais celles-ci ont été
loin d'être inutiles et il y a certainement encore beaucoup de
choses à trouver.

LES POMMES DE TERRE SAUVAGES ET LEUR ROLE


DANS LA SELECTION (1)

Les Pommes de terre au sens large du mot comprennent toutes


les espèces de la section « Tuberarium » du genre Solarium. Elles
ont toutes un pédoncule articulé plus haut que la base, et la plupart
forment des tubercules. On doit cependant en écarter l'espèce S. po-
cota Hieron. de Tucuma (Argentine) qui forme des tubercules mais
qui par tous ses autres caractères s'éloigne de la section «
Tuberarium ».
D'après S. V. Juzepczuk la section « Tuberarium » se divise en
les sept groupes suivants :

(1) Dans la valeur des espèces pour la sélection, sont surtout indiquées
les qualités; lorsqu'on n'aura pas indiqué la résistance à une maladie, on
en conclura que l'espèce en question est sensible.
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1. Etuberosa. — L'articulation du pédoncule est à la partie


inférieure de celui-ci, parfois même à la base. Ce sont des espèces du
Chili, vivaces, qui ne forment pas de tubercule. D'après S. V. Ju-
zEPcauK elles seraient les plus primitives de la section. Elles sont
diploïdes (24 chromosomes), fortement attaquées par le Phytoph-
tore. On n'a pas pu les hybrider avec les autres groupes.
S. Fernandezianum Phil, de Mas a Tierra (Iles Juan Fernandez)
est la seule qui forme des baies sous notre climat.
S. brevidens Phil. d'Araucanie, habitat forestier.
S. Looserii Juz. des environs de Santiago, xérophyte.

2. Juglandifolia. — Ces espèces ont des tiges ligneuses rampantes;


vivent au Pérou, en Colombie, en Equateur et en Amérique
centrale. La formation de tubercules est très douteuse. On n'a pu
observer aucune de ces espèces à l'état vivant.

3. Pinnatisecta. — Espèces tubérifères à corolle étoilée. On les


rencontre sur le versant atlantique, elles manquent sur la côte
Pacifique et dans les parties correspondantes des Andes. On n'en
connaît pas d'espèce cultivée.
Ces espèces se rangent en deux sous-groupes :
a) Le sous-groupe sud-américain, relativement homogène.
Ces espèces sous le climat de Leningrad sont très fortement
attaquées par le Phytophtore et ne forment pas de baies.
En bordure du Rio de la Plata, on trouve S. Commersonii Dun.
résistante à la gelée mais triploïde. Les espèces voisines sont 5. Hen-
ryi diploïde et S. Ohrondii Carr. Dans le N de l'Argentine, le
Paraguay et les confins du Brésil se trouve S. chacoense Bitt. diploïde,
une forme voisine serait S. Millanii Buk. triploïde. Une espèce
connue des sélectionneurs sous le nom de S. Caldasii var. glabrescens
serait en réalité S. subtilius Bitt. (ou pseudo-subtilius) . On a
récemment décrit : S. Parodii, S. dolichostigma, S. Knappei (1).
b) Le sous-groupe mexicain se caractérise par une bonne
résistance au Phytophtore. S. coyoacanum Buk. est triploïde et forme des
tubercules même par les longs jours d'été de nos latitudes; elle est
proche de S. cardiophyllum Lindl. Le diploïde S. Jamesii se ren-

(1) S. Henryi est résistant au Doryphore, S. Commersonii est plus ou


moins résistant selon les lignées, S. chacoense non résistant paraît
transmettre une résistance aux hybrides, et S. Caldasii ne résiste que parce
que le Doryphore n'y reste pas (d'après des Auteurs Allemands selon
B. Trouvblot).
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contre au N du Mexique et dans les régions avoisinantes des Etats-


Unis (1).

4. Bulbocastana. — Les feuilles sont entières. La corolle est étoi-


lée comme chez les Pennatisecta. Il y a des tubercules. Ce sont des
espèces sauvages du Mexique. Par la structure de sa fleur, l'espèce
diploïde S. Bulbocastanum Dun. est voisin de S. coyoacanum Buk.
dont elle partage la résistance au Phytophtore.

5. Oxycarpa. — Les baies ovoïdes ou coniques se terminent en


pointe. Ce sont des espèces sauvages et pour la plupart on ne sait
si elles sont tubérifères. Elles sont surtout répandues au Mexique,
au Costa Rica, à Panama, en Colombie et au Venezuela. On en
connaît en Bolivie.
A l'état vivant on ne connaissait jusqu'à ces derniers temps que
S. colomb ianum Dun. espèce tétraploïde, assez proche
morphologiquement de la section Tuberosa.

6. Tuberosa. — Ce sont des espèces pour la plupart à feuilles pen-


nisequées, avec une articulation plus ou moins nette vers le milieu
du pédoncule floral, et ayant une corolle rotacée. Elles sont
tubérifères. C'est à ce groupe que l'on doit rapporter toutes les espèces
cultivées. Les espèces sauvages peuvent se diviser en quatre sous-
groupes géographiques :
a) Le sous-groupe Andin comprend deux espèces des hauts
plateaux du Pérou :
S. aracc-papa Juz. est une espèce polymorphe, une variété fut
recueillie par Juzepczuk (expédition russe), les autres par Kauf-
mann (expédition allemande). La variété étudiée, diploïde se
croise bien avec les formes cultivées mais elle a surtout des
caractères négatifs, aucune résistance au Phytophtore, et des petits
tubercules au bout de longs stolons qui ne se forment même pas sous
les longs jours de nos étés (2).
S. Bukasovii Juz. se distingue de la précédente par une
articulation du pédoncule floral située vers le tiers supérieur et une
résistance à la gelée transmissible par hybridation.
Malheureusement on n'a pu croiser cette espèce diploïde qu'avec les espèces de
même nombre chromosomique.
b) Le sous-groupe du littoral pacifique. Ces espèces seraient in-

(1) S. Jamesii est très résistant au Doryphore (T.).


(2) S. aracc-papa est sensible au Doryphore (T.).
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téressantes surtout en raison de la singularité du climat, peu de


précipitations (48 mm. par an) mais de très fréquents brouillards.
S. medians Bitt. triploïde et S. Wittmackii Bitt. tétraploïde, sont
trop attaquées par le Phytophtore pour être facilement conservées
vivantes. Plus résistante est 5. Vavilovii Juz. et B. diploïde, mais
on ne peut l'hybrider par suite de sa mauvaise floraison sous nos
climats.
c) Le sous-groupe Chilien. S. maglia Schlechtd. triploïde, croît
dans un climat humide et forme assez de tubercules, mais elle est
fortement attaquée par le Phytophtore, comme les espèces tétra-
ploïdes voisines plus méridionales S. Molinae Juz. (S. Fonckii
Phil.) et S. leptostigma Juz. Ces dernières forment même leurs
tubercules sous les jours longs de nos étés, elles sont proches de
S. tuberosum (1).
d) Le sous-groupe Mexicain. Si l'on sépare S. Fendleri A. Gray
tétraploïde, du N du Mexique et des E.-U., qui se distingue par ses
pétales étroits et sa non-résistance au Phytophtore, le reste des
espèces se rencontre dans la région de Mexico et forme une série
polyploïde (24-36-48-60-72 chr.). Elles sont apparentées par leur
morphologie et leur commune résistance au Phytophtore.
Le diploïde S. polyadenium Greenm. est encore proche de Fen-
deri et des Pinnasecta. Le diploïde S. verrucosum Schlechtd. et le
triploïde S. Vallis-Mexici Juz. sont proches des tétraploïdes groupés
dans l'espèce collective S. longipedicellatum Bitt. comprenant :
S. Antipoviczii Buk., 5. nesaniipoviczii Buk., S. Martinezii Buk.,
S. Reddickii Buk., S. ajuscoense Buk., S. candelarianum Buk. On
connaît une espèce pentaploïde S. semidemissum Juz. Enfin S. de-
missum Lindl. est une espèce hexaploïde dont on connaît un grand
nombre de variétés.
Cette dernière espèce est très importante pour la sélection grâce
à sa résistance au gel, au Phytophtore et grâce à la facilité avec
laquelle on la croise avec les espèces cultivées, en particulier avec
S. tuberosum.
On connaît dans les collections une forme pentaploïde : S. edi-
nense Berth, résistante au Phytophtore, assez résistante à la gelée.
Son origine est inconnue, il est probable qu'il s'agit d'un hybride
entre S. demissum et S. tuberosum (2).
(1) Ce sous-groupe est très sensible au Doryphore (B. Trouvelot).
(2) S. polyadenium est résistant au Doryphore, S. Antipoviczii et S.
ajuscoense assez résistants, S. demissum résistant, par contre S. edinense
sensible (B. Trouvelot).
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7. Acaulia. — Ce serait d'après S. V. Juzepczuk le groupe le plus


jeune. Il se caractérise par une articulation du pédoncule peu nette
et située à sa partie supérieure. La seule espèce connue est 5. acaule
Bitt. tétraploïde, avec les feuilles en rosette. Elle est tubérifère et
vit sur les hauteurs des Andes d'Argentine, de Bolivie et du Pérou.
On connaît trois variétés, toutes supportent la gelée jusqu'à — 8° et
plus. Les tubercules ne se forment que par jours courts, ils sont
petits et au bout de longs stolons. Le Phytophtore les attaque
fortement (1).
Le croisement se fait facilement avec les espèces diploïdes de
Tuberosa, il est beaucoup plus difficile avec les espèces cultivées
tétraploïdes (S. tuberosum). En tout cas la Fi est résistante à la
gelée. On n'obtient pas d'hybrides en pollinisant avec le pollen de
S. acaule car le style de cette espèce est très court, de sorte que le
tube pollinique de S. acaule n'arrive pas à parcourir le style des
autres espèces.

LES POMMES DE TERRE CULTIVEES D'AMERIQUE,


ET LEUR ROLE EN SELECTION

Les Pommes de terre cultivées appartiennent toutes au groupe


Tuberosa, dont nous avons passé en revue les espèces sauvages.
Comme ces dernières elles forment une série polyploïde. Les variétés
productives qui forment la majorité des Pommes de terre cultivées
du Nouveau Monde sont toutes tétraploïdes (à 48 chr.). Les autres
formes, rares et à aire restreinte, sont les espèces primitives, elles
sont diploïdes, triploïdes et pentaploïdes.
Nous allons les passer en revue en allant du N au S :

Espèces primitives diploïdes. — S. Rybinii Juz. et Buk. croît aux


environs de Bogota à 2 500 m. d'altitude; elle a des tiges très
rameuses, les feuilles peu découpées, même parfois entières, la corolle
blanche assez découpée, le filet des étamines épais et le style court.
Elle se distingue des autres espèces primitives par une plus grande
résistance aux maladies à virus. Les tubercules sont bons à manger
quoique petits, ils n'ont pas de période de repos, ce qui permettrait
d'avoir deux récoltes par an dans la région méditerranéenne. Cette

(1) S. acaule est sensible au Doryphore.


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espèce a été utilisée dans des croisements en Laponie pour obtenir


des variétés précoces (1).
5. boyacense Juz. et Buk. est une espèce voisine, également di-
ploïde qui en diffère par ses feuilles plus découpées, ses sépales
plus longs ses anthères moindres et une corolle colorée. Elle est
aussi précoce.
S. Kesselbrennerii Juz. et Buk. diffère de la précédente par des
feuilles moins découpées, une floraison abondante et un pédoncule
lloral plus mince ayant une articulation décalée vers le haut souvent
à moins de 4 mm. du calice. Espèce de l'Equateur, diploïde et
précoce.
S. canariense Juz. et Buk. Cette espèce a le feuillage de S.
boyacense avec des folioles longues et pointues. Le pédoncule floral a une
articulation colorée, à environ 8 mm. du calice; celui-ci est à deux
lèvres avec des longs muerons. La corolle d'abord blanche devient
lilas. Espèce également cultivée en Equateur.
S. stenotomum Juz. et Buk. est cultivé en Bolivie et au Pérou. Elle
a des feuilles très découpées avec des folioles étroites, le calice a de
longs sépales assymétriques, les filets des étamines sont très minces
et la corolle violet clair.
S. goniocalyx Juz. et Buk. du Pérou central est très proche de
l'espèce précédente elle en diffère seulement par des folioles plus
larges, des filets plus épais et une corolle blanche.
Ces trois dernières espèces n'ont pas à retenir l'attention du
sélectionneur.
S. Erlansonii Juz. et Buk. a été trouvée en Bolivie par une
expédition américaine.
S. phureja Juz. et Buk. est une plante haute, avec des folioles
étroites, un calice bilabié coloré par de l'anthocyanine, et une
corolle peu découpée d'un rouge violacé caractéristique. Elle est
considérée en Bolivie comme précoce mais elle est cultivée à l'altitude
de 1 000 m. (tandis que les autres espèces vivent au-dessus de
2 000 m.) . C'est surtout la chaleur du climat qui agit et il serait
intéressant de l'essayer dans une région subtropicale. Ses
tubercules sont assez gros mais colorés avec des yeux enfoncés et peu
de fécule (environ 10%).

(1) Lors d'une invasion de Doryphore dans les collections Vilmorin,


M. Mëumssier en 1939 a constaté que S. Rybinii était très peu attaquée.
Des études sont nécessaires pour préciser dans quelles circonstances se
manifeste cette résistance relative.
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S. ajanhuiri Juz. et Buk. est cultivée sur les hauts plateaux de
Bolivie. Elle a des folioles étroites et pointues, un calice petit
(6 mm.), avec des sépales courts; les filets sont fins et la corolle
bleue. Elle est résistante à la gelée mais ne se croise que
difficilement avec les tétraploïdes productifs.

Espèces triploïdes et pentaploïdes. — Certaines plantes triploïdes


ne diffèrent pas morphologiquement des diploïdes, c'est le cas pour-
certains individus que l'on doit rapporter à S. goniocalyx et à 5. ste-
notomum.
D'autres en sont très proches, tels S. chaucha Juz. et Buk. qui ne
diffère de 5. phureja que par des étamines plus grosses et une
corolle plus claire; tel S. riobambense Juz. et Buk. intermédiaire
entre S. Kesselbrenneri et S. stenotomum.
D'autres enfin sont plus individualisées :
S. cuencanum Juz. et Buk. du S de l'Equateur. C'est une plante
robuste aux nœuds colorés, aux folioles assez larges, au pédoncule
floral et au calice coloré, avec des poils très courts. La couleur de
la corolle est caractéristique : bleu violacé sombre. Cette plante est
remarquable par la rapidité de croissance de ses tubercules. Il est
possible que ce soit un hybride de S. Kesselbrenneri avec un tétra-
ploïde.
5. tenuifilamentum Juz. et Buk. Elle se caractérise par des filets
très fins terminés par des anthères droites, un style court et une
corolle bleu violacé.
S. mammilliferum Juz. et Buk. Elle se distingue par un gros
stigmate, des sépales larges et une corolle peu découpée ayant des plis
nectarifères à la base entre les filets.
5. chocclo Juz. et Buk. Elle est proche de S. mammilliferum par sa
fleur mais sans nectaires. Elle est cultivée depuis la Bolivie jusqu'en
Equateur.
Ces trois espèces ne présentent pas d'intérêt pour le sélectionneur.
S. Juzepczukii Buk. cultivée en Bolivie pour le chuno (amidon de
pomme de terre gelée), est très spéciale. C'est une plante en rosette,
le pédoncule floral n'est pas nettement articulé, le calice est petit
et régulier, la corolle bleu violacé rappelle demissum, les filets très
fins sont surmontés d'anthères petites. C'est une espèce résistante à
la gelée, malheureusement on n'a pas réussi à la croiser avec les
autres espèces; elle ne forme presque pas de tubercules sous les
longs jours et souffre beaucoup des maladies à virus.
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L'espèce pentaploïde : S. curtilobum Juz. et Buk. est proche de


l'espèce précédente. Elle en diffère par des fleurs plus grosses, la
netteté de l'articulation du pédoncule floral et la facilité avec
laquelle elle s'hybride avec les tétraploïdes productifs.

Espèces productives tétraploïdes. — S. andigenum Juz. et Buk. se


distingue surtout de l'espèce suivante par son port. Elle a des tiges
plus longues, des feuilles plus découpées avec des folioles moins
grosses, à angle aigu de la tige; le pédoncule floral est très
nettement distinct du calice, les étamines sont complètes, et les plantes
le plus souvent fertiles. C'est de beaucoup la plus répandue des
Pommes de terre cultivées dans les Andes. Elle pousse entre 2 000 m.
et 4 500 m. d'altitude depuis les montagnes d'Argentine, de Bolivie,
du Pérou, de l'Equateur, de Colombie, jusqu'au Guatemala et au
Mexique.
A la différence des espèces précédentes qui sont rares et
présentent peu de variétés, elle en contient des centaines (1).
Elle se croise facilement avec les variétés sélectionnées et donne
une descendance à haut rendement. En champ d'essai un hybride
a atteint 238 q. à l'ha. soit 88 % de plus que la variété standard de
la région. Une graine de la ¥t a donné un plant produisant jusqu'à
1 280 gr. de tubercules, une graine de F2 a même donné 1 800 gr.
En Laponie on a obtenu jusqu'à 1 kg. par graine.
L'immunité à la galle verruqueuse se rencontre chez des variétés
de provenance les plus diverses depuis la Bolivie jusqu'au Mexique.
S. tuberosum L. sensu-stricto. C'est une plante plus basse, plus
fournie grâce à ses entre-nœuds plus courts et ses feuilles plus
horizontales. La partie supérieure du pedicelle est épaissie et pas
nettement distincte de la base du calice. Les filets des étamines sont
souvent plus épais et jaunâtres. Le style est plus épais et légèrement
tordu en spirale. Le pollen est souvent stérile. Les tubercules se
forment bien même pendant les étés à jours longs.
Cette espèce est cultivée au Chili, à l'île de Chiloë et dans les
basses vallées d'Araucanie. Il y a là de nombreuses formes non
encore décrites (2). C'est la souche des Pommes de terre européennes.
Les Pommes de terre chiliennes sont fortement attaquées par le

(1) 74 formes sont décrites par S. M. Bukasov dans son ouvrage : The
potatoes of South America.
(2) S. M. Bukasov décrit 41 formes chiliennes.
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Phytophtore, malgré cela c'est un matériel de choix pour la


précocité et le rendement.
Les Pommes de terre européennes occupent une place à part et
forment la var. europeum. Il y a bien au Chili des formes
identiques aux variétés européennes Early Rose, Fin de Siècle, mais on
ne sait pas si elles sont autochtones, car on les rencontre
également au Guatemala et aux Etats-Unis.
D'après leur introduction en Europe les variétés de Pommes de
terre peuvent se classer en 7 groupes (suivant von Rathlef (1)).
1. Le vieux groupe Anglo-Américain qui provient des premières
introductions vers 1580-1600 en Irlande et en Angleterre et arriva
en Amérique du N avec les emigrants irlandais vers 1720. Ce
groupe comprend beaucoup de variétés locales Scandinaves et les
premières variétés sélectionnées : Victoria Paterson et Peach blow,
elles ont très peu d'immunité contre le Phytophtore et les virus.
2. Le vieux groupe d'Europe Continentale vient des premières
introductions en Espagne vers 1580-1600. On doit y rapporter :
Belle de Fontenay, Institut de Beauvais, Ronde Jaune d'Auvergne,
Violette du Forez, Vitelotte, Erste von Nassengrund, et peut-être,
Zwickau friïhe.
H. von Rathlef suppose qu'elles proviennent de S. andigenum
du Pérou multipliées par semence et soumises à la sélection
naturelle du climat européen.
3. Le groupe Rough Purple Chili provient d'une introduction
faite par Goodrich en 1849. Il comprend la majorité des variétés
actuelles. H. von Rathlef suppose que Goodrich reçut ses
échantillons de Panama et qu'ils provenaient en réalité de Guatemala
ou de Colombie.
4. Le groupe Daber-Wohltmann aurait été importé d'Amérique
du S vers 1830. Il se caractérise par ses inflorescences pigmentées.
5. Le groupe à feuilles de Frêne a été isolé et décrit à la fin du
xvme siècle. On doit y rapporter Myatts Ashleaf (= Hollande de
Roscoff) et Juli.
6. Le groupe Hôrnchen (— Cornichon — Ratte), vieux et
original mais peu utilisé en sélection. Il est résistant à la galle, fertile,
mais peu productif; les tubercules ont de nombreux yeux, les
feuilles sont très découpées avec de petits lobes. H. von Rathlef
le rapproche de formes péruviennes.
(1) Die stammtafeln des Weltsortiments der Kartoffel (Kûhn Archiu.
Bd 33, 1932).
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7. Le groupe Franschen (= Jaune d'Or), cultivé en Hollande,


serait d'origine française. Il se caractérise par des feuilles très
divisées et des germes colorés en bleu.
Il est difficile d'apprécier la valeur de cette classification car on
n'a pas étudié la descendance d'hybridation inter-groupe. En tout
cas rien ne confirme les suppositions de H. von Rathlef sur le
rôle des Pommes de terre péruviennes dans la formation des
variétés européennes. Les descriptions de Bauhin (1620), de Clu-
sius (1588 et 1601), de Jean Bauhin (1651) se rapportent à S. tu-
berosum s. str. Le Rough Purple Chili est bien une variété
chilienne. La stérilité des formes européennes ne prouve rien, car
au Chili S. iuberosum présente des formes stériles, tandis que S.
andigenum n'en présente qu'au Mexique et en Argentine (1).
Les variétés européennes sont si proches des chiliennes qu'il esl
impossible de les grouper toutes en une sous-espèce géographique.
La var. europeum ne comprend que les formes à style épais et à
androcée irrégulier (le style pouvant être droit : Roode Star, ou
courbe; Fin de siècle, Shamrock). Les variétés Switez, Excelsior,
Magnum bonum, par exemple ne peuvent pas être séparées de
variétés chiliennes (var. chilotanum).

(1) S. M. Bukasov tient beaucoup à la distinction entre S. andigenum


et S. tuberosum. Nombre d'autres spécialistes considèrent au contraire
que ce sont des sous-espèces géographiques, voire des formes écologiques
de la même espèce. En fait il y a actuellement un hiatus géographique
entre S. andigenum d'Argentine du N W et S. tuberosum du Chili central.
Cependant Parodi (dans Relation de la agricultura prehispanica )
indique que l'agriculture andine arrivait jusqu'aux environs de Mendoza,
à la hauteur du Chili central.
Au point de vue historique, on peut se représenter l'origine du S.
tuberosum de la façon suivante. Il existait au Chili, des Solanum vivaces du
groupe « Etuberosa » qui n'ont sans doute pas grand'chose à voir avec-
nôtre Pomme de terre. L'agriculture en Araucanie n'est pas indigène, elle
est venue de l'Amérique Centrale par la région des Andes avec le Maïs. Or
les Pommes de terre sauvages sont des mauvaises herbes des champs de
Maïs, au Mexique comme au Pérou. C'est ce qui explique que nombre
d'espèces sauvages rudérales soient triploïdes (S. maglia, S. Commer-
sonii) ; l'Homme a d'abord propagé involontairement les tubercules. Les
Pommes de terre sauvages, qui ont pénétrées au Chili avec les champs de
Maïs, étaient déjà hybridogènes (S. maglia triploïde, S. Fonckii tétra-
ploïde).
Lorsqu'ensuite la Pomme de terre cultivée (S. andigenum) est
descendue, consciemment cultivée de Bolivie en Argentine et d'Argentine au
Chili, elle s'est mêlée aux Pommes de terre mauvaises herbes déjà
adaptées au climat chilien.
La sélection du climat a peu à peu éliminé S. andigenum au profit de
formes également tétraploïdes, mais issues de S. Fonckii, qui constituent
maintenant S. tuberosum s. str. A. H.
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VARIETES SELECTIONNEES

On peut se baser sur les expériences d'un siècle de sélection pour


indiquer ce qui est intéressant.
Voici d'après H. von Rathlef la valeur des variétés
sélectionnées par familles :
La Famille Joseph Rigault-Juli donne des bonnes variétés de
table, à goût allemand, précoces, à chair jaune, mais ne transmet
pas de résistance à la Galle verruqueuse.
La Famille Zwickauer frùhe donne des variétés de table mais
attaquées par la Galle verruqueuse. H. von Rathlef recommande
comme productive Goldball, Citrus et Werder.
La Famille Kaiser Krone ne transmet pas ses bonnes qualités.
On peut tout juste utiliser la souche : Kaiser Krone et Seydlitz pour
leur résistance à la Galle verruqueuse, Lucya pour sa bonne forme
de tubercule.
La Famille Simson, dont la souche est très productive, a donné
naissance à de nombreuses variétés moyennement précoces et à
chair blanche.
La branche Helios a donné naissance à Busola et aux variétés
Dolkowski intéressantes par leur bon goût et leur chair blanche.
La branche Industrie transmet bien sa chair jaune et un goût
allemand.
La Famille Phôbus-Fùrstenkrone est surtout intéressante par
Fiirstenkrone très utilisée par la sélection russe. Elle transmet un
bon goût; peu d'exigence pour le sol et des facteurs latents de
résistance à la Galle; son principal défaut est de transmettre une
forme de tubercule allongée.
La Famille Erste von Frômsdorf comprend de très nombreuses
variétés tardives à chair et à peau blanche. Les branches
intéressantes pour la sélection sont les suivantes :
Aima qui peut donner des variétés précoces, de bon goût mais
attaquées par la Galle verruqueuse.
Dans la branche Vesta, Centifolia est intéressante par son pollen
abondant et fertile qui peut servir à féconder les variétés
autostériles.
La branche Bismarck contient des gènes de haute teneur en
fécule et de résistance à la Galle. Les variétés intéressantes sont :
Mirabilis, Scharnhorst, Werner et Lùtzow.
— 109 —
La branche Wilhelm Kôrn a de nombreuses variétés intéressantes
à goût allemand : Flora, Neue Imperator, Werner (1), Odenwâlder
blaue.
La branche Wohltmann donne des variétés industrielles à peau
rouge résistantes au Phytophtore. La variété de table Roode Star
est particulièrement intéressante. Mais il est difficile de travailler
avec cette branche, il y a des gènes léthaux et on obtient des
plantes naines.
La branche Ella ne présente pas d'intérêt comme géniteur; peut-
être pourrait-on en tirer des variétés précoces par autofécondation.
La Famille Early rose comprend : Early rose, excellente pour
transmettre la précocité; Tannenberg assez précoce, féculière et
résistante à la Galle. Imperator a engendré beaucoup de bonnes
variétés mais cette branche adaptée aux terrains sableux n'a pas
de résistance à la Galle verruqueuse.
Provenant comme Imperator de Victoria Paterson il faut citer :
Magnum Bonum et Up to date (= Fin de Siècle), car Rathlef ne
s'occupe que des variétés d'origine allemande. Il ne cite que les
deux familles américaines Early rose et Kaiser Krone (= Early
puritain) comme pouvant apporter du « sang anglais » aux
variétés continentales. C'est que la chair blanche ne convient pas au
goût allemand et pour cette raison Up to date n'est pas compté au
nombre des géniteurs intéressants quoiqu'il puisse fournir de
bonnes variétés de table.
La branche Maerker a donné de bonnes sortes féculières telle
que Erfolg; d'un autre croisement provient Vater Rhein pour les
sols lourds et froids.
La Famille Victoria Augusta-Jubel comprend des variétés à chair
blanche, souvent bonnes féculières et résistantes à la Galle. Jubel,
Hindenburg, Parnassia, Pepo et Beseler sont surtout intéressantes.
Cette famille a une grande variété écologique : Pepo, Belladona
Ragis X sont hydrophiles, Tann, Roon, Pirola sont xérophiles,
Parnassia tropophile avec une grande plasticité, Deodara spécialisée
pour les sols sableux. Il est remarquable que Pepo, Pirola, Parnassia
proviennent du même croisement Deutsches Reich X Jubel; cette
famille est particulièrement intéressante pour la sélection.

(1) La même variété peut être citée dans deux branches ou familles
différentes quand elle provient de croisement : ainsi Werner qui est issue
de Bismark X Wilhelm Kôrn, ou Wohltmann issue de Daber X Erste
von Frômsdorf.
Revue de Bot. Appl. 0
— 110 —

La famille Eigenheimer (comprenant la Géante bleue) est utilisée


par la sélection néerlandaise; ce sont des variétés exigeantes quant
au sol, souvent résistantes au Phytophtore mais sensibles à la Galle
verruqueuse.
La famille Daber présente d'intéressantes variétés féculières,
tardives et souvent peu attaquées par le Phytophtore. Une des
branches les plus nombreuses provient de Reichskanzler très bon
producteur féculier avec Silesia et aussi Hero, Wohltmann (1) et
Switez.
En ce qui concerne la résistance à la Galle verruqueuse de Daber
comme de Jubel, on doit se rappeler qu'il est rare qu'elle se
soutienne sur plusieurs générations (en absence de contrôle du
sélectionneur).
Malheureusement H. von Rathlef ne parle pas des variétés
américaines et anglaises (telle Royal Kidney). Ces groupes sont
pourtant intéressants par leur précocité et par leur contenu génétique
différent des variétés allemandes. Les variétés américaines
productives et précoces sont : Triumph, Cobbler, Early Ohio. Parmi
les variétés anglaises Epicure, grâce à sa précocité et la résistance
des tubercules au Phytophtore, est devenue l'une des variétés
standard de Russie.

PRATIQUE DE LA SELECTION

Autofécondation. — La Pomme de terre étant une plante à


multiplication végétative, les variétés ne sont pas des lignées pures
homozygotes mais des clones hétérozygotes. Une des méthodes de
sélection consistera à employer la multiplication sexuée et à
étudier la ségrégation.
C'est seulement chez certaines espèces sauvages où doit dominer
la multiplication sexuée que l'on rencontre des individus
homozygotes dont la descendance ne présente pas de ségrégation.
Tels sont : le groupe Etuberosa, peut-être Acaulia, une forme de
S. demissum et peut-être S. verrucanum. Mais il faut avouer que
nos connaissances sont incomplètes étant donné le nombre
d'espèces stériles.
Cette stérilité peut être phénotypique, c'est-à-dire tenir au climat.
Ainsi sont stériles à Leningrad : S. brevidens, S. Looseri, S. bulbo-
castanum, S. colombianum. Il y a des variétés cultivées qui ne fleu-

(1) Loc. cit.


— Ill —

rissent pas. Sauf quand les fleurs tombent en bouton il n'y a


jamais stérilité de l'ovaire. Chez S. Molinae et les diploïdes cultivés
le pollen étant stérile à Leningrad, on obtient de temps à autre des
graines qui doivent être dues à un apport de pollen étranger.
La stérilité est génotypique quand elle se manifeste dans tous les
climats. C'est le cas des triploïdes et des pentaploïdes, ce doit être
le cas de quelques diploïdes cultivés qui peuvent être des hybrides
interspécifiques. Le pollen est anormal par suite de la mauvaise
réduction chromatique.
. Les contradictions entre les Auteurs à propos de la fertilité d'une
espèce proviennent soit des différences de climat soit d'une
mauvaise détermination (confusion d'un diploïde avec un triploïde).
L'autopollinisation est habituelle chez les variétés européennes
qui ont généralement moins de pollen que les tétraploïdes sud-
américaines. R. N. Salaman estime que dans les variétés
sélectionnées il n'y a pas plus de 3 % des graines qui proviennent de la
fécondation croisée.
Si l'on effectue l'autopollinisation forcée pendant plusieurs
générations pour obtenir des lignées pures, on obtient des plantes très
faibles. R. N. Salaman a pu aller jusqu'à 10 générations. La stérilité
domine, ainsi Krantz sur 1 162 graines de Irish Cobbler, 13
seulement ont donné des baies; il les croisa avec Irish Cobbler et la Fi
fut normalement fertile. En cas de stérilité de Fi on
recommencerait le back-cross. Il faut se méfier des hautes températures :
Sakamura et Stow indiquent qu'elles augmentent la stérilité du
pollen. Krantz est parvenu par autopollinisation à obtenir à l'état
homozygote : la couleur et la forme des tubercules, la profondeur
des yeux, la longueur et le nombre des stolons, le nombre de
tubercules par stolons, le port de la plante.
La précocité n'a pas pu être obtenue par Krantz à l'état
homozygote, la stérilité obligeant à des back-cross.
L'autopollinisation doit être suivie ensuite du croisement des
lignées pour obtenir un clone hétérozygote car l'hétérosis augmente
la vigueur et la productivité d'après East et Jones.

Données sur la Génétique des Pommes de terre. — D'après R. N.


Salaman, la couleur rouge des tubercules dépend de deux facteurs
D et R, et il y a trois types de tubercules rouges :
DDRR qui donne toujours une descendance rouge.
DdRR et DDRr de couleur presque semblable aux précédents,
qui se ségrèguent : 1 blanc contre 3 rouges.
— 112 —

DdRr de couleur rose pâle (tel Flourball) qui se ségrègue 9


rouges contre 7 blancs.
Les tubercules violets ont en plus des facteurs précédents le
facteur P, la « couleur de betterave» (1), qui est produite par une
modification de ce facteur (voir pour plus de détails : R. N. Sala-
MAN, ASSEIEVA et KRANTZ) .
Les fleurs colorées sont un caractère dominant chez S. tubero-
sum comme chez S. demissum, S. Bukasovii, S. ajanhuiri. La forme
des tubercules dépend selon Salaman, de deux facteurs et sauf
exception le long domine.
Les variétés à yeux enfoncés ne donnent pas de ségrégation pour
ce caractère. De même le croisement de deux parents ayant ce
caractère. D'après East la dominance des yeux profonds est
contestable.
Pour Sal aman, la chair jaune dépend d'une paire de facteurs :
la chair jaune domine la chair blanche, les hybrides sont jaune
clair. Il ne faut jamais choisir de géniteur à chair jaune pour
obtenir une variété à chair blanche.
La nidation dépend de la longueur des stolons. Les longs stolons
dépendent de plusieurs facteurs, dominent et sont difficiles à
éliminer. Salaman a étudié la forme des tiges. Les tiges couchées
protègent le sol de la dessiccation, les tiges dressées sont
favorables à la mécanisation de la culture. Il y a trois facteurs qui n'ont
pas d'influence sur la forme des tubercules : les tiges dressées
dominent, les hétérozygotes sont intermédiaires.
Pour choisir à coup sûr un clone hétérozygote R. N. Salaman
pense qu'on peut se baser sur les différences de coloration de la
tige et des tubercules, par exemple choisir parmi les tubercules
blancs ceux qui ont les germes violets.
A première vue la productivité ne semble pas héréditaire,
cependant on trouve un plus fort pourcentage de formes productives
dans la descendance de variétés productives que dans celle de
variétés à faible rendement. En aucun cas on ne doit éliminer
comme géniteur une variété intéressante par certains caractères
mais à faible rendement.
La précocité dépend de 2 ou 3 paires de facteurs selon R. N.
Salaman. La tardivité domine suivant K. 0. Muller. D'après R. N.
Salaman (mais pas pour Krantz) la précocité est récessive et ne se

(1) La couleur rouge de la chair.


— 113 —

ségrègue pas. Les variétés tardives et moyennes sont hétérozygotes


sauf quelques tardives pures. Mais les variétés précoces donnent
une très faible descendance, quelques-unes sont non seulement
stériles mais fleurissent peu, rendant les croisements difficiles; d'où
la difficulté de la sélection pour la précocité.
Il y a des contradictions entre les Auteurs au sujet de l'hérédité
de l'immunité contre la Galle verruqueuse et le Phytophtore.
L'immunité contre la Galle verruqueuse est dominante et on a pu
en quelques années créer des centaines de variétés résistantes.
Cette dominance peut être masquée par d'autres facteurs.
R. N. Salaman distingue quatre génotypes résistants à la Galle :
1) Qui ne ségrèguent pas;
2) Qui ségrèguent 15 résistants pour 1 sensible dans le
croisement avec une variété sensible;
3) Qui ségrèguent 3 résistants pour 1 sensible (tels seraient selon
Jorstad et Lunden : Jubel, Hindenburg, Pepo, Seydlitz, Tannenberg
et Flourball) ;
4) Qui ségrèguent 9 résistants contre 7 sensibles.
Les variétés sensibles se rangeraient en trois catégories :
1) Qui n'ont aucun facteur de résistance;
2) Qui ont des facteurs de résistance mais pas le facteur
complémentaire;
3) Qui ont des facteurs inhibiteurs. Les variétés de ce dernier
type, hétérozygotes pour le facteur inhibiteur donnent par
autopollinisation 43 % de plantes résistantes. Elles donnent également des
variétés résistantes par croisement avec des variétés sensibles ou
non. Tels sont : Hollande de Roscoff et Président.
Au contraire Centifolia en autopollinisation ne donne que des
formes sensibles, et en croisement avec des résistantes, souvent
autant de sensibles que de résistantes (d'après Jorstad et Lunden).
La génétique de la résistance au virus n'a pas été étudiée; on
évite simplement d'employer des géniteurs trop sensibles.
La stérilité des étamines serait dominante d'après R. N. Salamax
et Leslie.
Il n'y a jamais d'incompatibilité entre les variétés, on peut
croiser n'importe lesquelles ensemble.

Technique des croisements. — Les variétés stériles n'ont pas


besoin d'être castrées. Pour les variétés fertiles on opère de la
façon suivante, on garde sur chaque inflorescence 4 à 5 boutons au
— 114 —

même stade de développement. Pendant que l'on tient le bouton


entre le pouce et l'index, on écarte la corolle avec une pince
stérilisée à l'alcool et on arrache les étamines. Lorsqu'on a castré tous
les boutons conservés, on enferme l'inflorescence dans un sac de
gaze ou de papier parcheminé.
Pour obtenir le pollen des géniteurs mâles on gratte avec un
scalpel soigneusement passé à l'alcool, chaque sac pollinique de
chaque étamine. On peut obtenir le pollen plus rapidement en
secouant les fleurs sur du papier glacé noir, d'après Ferguson, ce
pollen serait plus fertile car ce sont les grains les plus lourds qui
tombent.
Pour polliniser on met le pollen dans un tube de verre ou un
brin de paille, la méthode la plus rapide pour les croisements
massifs consiste à employer une pipette compte-goutte que l'on
remplit à moitié — en évitant de tasser le pollen (car ce lui ferait
perdre sa faculté germinative) — et que l'on ferme avec un
bouchon de résine.
Si on opère avec des variétés à anthères stériles que l'on n'a pas
besoin d'isoler, un homme, en 8 heures de travail peut féconder
2 000 fleurs (d'après Lopatine) . Si on isole les fleurs et si on leur
met des étiquettes on ne peut en faire que 300 à 400 par jour.
Dans les croisements avec les espèces sauvages, S. demissum, S.
Bukasovii, S. acaule, il est d'abord préférable de les cultiver dans
des pots ou sur un talus pour pouvoir opérer plus facilement. Après
la castration on peut isoler en enfilant le pistil dans un brin de
paille de seigle fermé avec de l'ouate à l'autre extrémité.

Appréciation des produits obtenus. — Dès la pépinière on peut


apprécier la résistance au Phytophtore. Au moment du repiquage
on peut observer la longueur des stolons, la couleur des tubercules
et la précocité de la tubérisation. Au cours de la végétation, on se
rend compte du port de la plante. A la récolte on observe si les
tubercules se détachent bien des stolons, s'il y a eu résistance aux
maladies, on examine la couleur de la chair et le goût des
tubercules.
Krantz estime que la première année il est impossible
d'apprécier la précocité et le rendement. En fait cette appréciation est
très délicate; il faut tenir compte des conditions météorologiques
de l'année, des inégalités de fertilité du champ d'expérience.
Pour Schick quelques variétés, surtout les précoces, supportent
— 115 —

mal le repiquage, d'autres au contraire n'en souffrent pas : nouvel


élément d'incertitude. I. A. Veselovski pense que pratiquement le
nombre de tubercules par pied (pas moins de 20) et le poids total
du pied (par exemple 500 gr. en Laponie ou 1 kg. à Leningrad)
suffit pour choisir. On peut conserver un tubercule des pieds
éliminés pour vérifier l'année suivante.
La première année de multiplication végétative doit être faite en
quatre ou cinq endroits différents au point de vue climat et sol.
Il faut également essayer la iarovisation (germination en chambre
froide) .
La multiplication par graines et la multiplication par tubercules
sont difficilement comparables parce que les graines germent vers
20° et les tubercules vers 8°, et que les tubercules ont une réserve
importante d'eau et d'hydrates de carbone.
C'est pourquoi pour pouvoir apprécier dès la première année les
variétés produites il faudrait avoir une variété étalon homozygote
qui puisse se reproduire par graines et dont on connaisse le
rendement en multiplication de tubercules.
Dans les régions plus méridionales on peut hâter la sélection en
faisant deux générations par an (T. D. Lysenko). Après des
semailles très hâtives on peut récolter les tubercules avant les
chaleurs de l'été. On replante ensuite ces tubercules en serre et l'on
fait un éclairage complémentaire pendant l'hiver.
On augmente aussi la vitesse de multiplication par le forçage
et la section des tubercules. Ainsi une variété fut multipliée en
deux ans de 20 tubercules à 40 tonnes.

Hybridations réalisées. — La majorité des variétés actuelles a


été obtenue par hybridation, mais on ne choisissait que des Fi.
Krantz a montré qu'il faut au moins aller en F2.
Actuellement on sème tous les ans en Russie 300 000 graines
provenant de croisements, en Allemagne on en sème 500 000. On
commence seulement à se servir des espèces américaines cultivées
ou sauvages. K. O. Muller suppose que les variétés du genre de
Wohltmann proviennent d'un croisement avec S. andigenum ou
que les variétés résistantes au Phytophtore ont du « sang » de
S. demissum. Ces suppositions n'ont pas de fondement.
Pratiquement les diploïdes, les tétraploïdes et l'hexaploïde se
croisent les uns avec les autres; les échecs enregistrés peuvent
être imputables au climat, il faut essayer les croisements dans
— 116 —

différents pays. Les triploïdes et pentaploïdes sont plus difficiles


à croiser, en tout cas il ne faut pas employer leur pollen qui est
le plus souvent stérile.
Les résultats les plus intéressants ont été obtenus avec le
croisement 5. demissum X Variété sélectionnée avec back-cross. Ainsi
Sidorov a obtenu (S. demissum X Aima) X Aima, dont les
tubercules résistent au Phytophtore et qui en 1936 a donné 1 380 gr.
par pied. Alsmik et Necziporczuk ont obtenu des trihybrides
intéressants de S. demissum X Var. sélectionnée X S. andigenum
ou S. phureja. Kovalenko a obtenu : 5. curtilobum X Var.
sélectionnée en back-cross, qui est productif et résistant au froid,
mais sensible au Phytophtore.
Dans les croisements entre espèces éloignées il se produit de
l'allopolyploïdie, c'est-à-dire une augmentation du nombre des
chromosomes. Ainsi S. Antipoviczii qui a les mêmes qualités que
5. demissum est beaucoup plus difficile à croiser; cependant
Sidorov en croisant cette espèce tétraploïde avec S. tuberosum
également tétraploïde a obtenu un hybride hexaploïde. De même S.
acaule tétraploïde produit souvent quand on le croise avec des
diploïdes cultivés, des hybrides hexaploïdes qui sont ensuite plus
faciles à croiser avec S. tuberosum.
(à suivre).

NOTES & ACTUALITÉS

Un ennemi du Giroflier à Madagascar.


Par Edm. FRANÇOIS.
Inspecteur Général de l'Agriculture dans les Colonies.

Les peuplements de Girofliers s'étendent au long de la côte-


orientale de Madagascar, mais les arbres sont particulièrement
nombreux dans les districts de Fénérive, Soanierana-Ivongo, Mana-
nara et dans l'île de Sainte-Marie.
Des dégâts avaient été déjà observés dans la région W de la
Pointe à Larée en 1933. Une larve (de Coléoptère, pensait-on)
creusait des galeries dans le bois des branches principales et du tronc
des arbres; ceux-ci portaient dès lors des rameaux morts et
parfois l'arbre entier périssait.

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