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NOTE SUR L'EPIDEMIOLOGIE DU BAYOUD

EN AFRIQUE DU NORD

G. TOUTAIN

SonlnraIRE
Génératnes
Progression de la lusariose en Alrique du Nora
Allure de la progression
Causes de la dispersion du bayoud
La variété Deglet-Nour menacée
Conclusion

Généralités

La fusariose du Palmier Dattier, maladie cryptogamique appelée


< bayoud >), est un véritable fléau des zones phoenicicoles d'une partie
de I'Afrique du Nord. Très probablement originaire de la vallée du Draa
au Maroc, elle a progressé depuis le siècle dernier à la fois en direction
de I'est et de I'ouest, décimant les palmeraies marocaines et atteignant
certaines oasis algériennes.

Le bayoud s'attaque à de très nombreuses variétés de palmiers


dattiers, dont certaines paraissent plus résistantes au parasite que d'au-
tres. Malheureusement,nous constatonsque les variétés cultivées jusqu'ici

Al Awamia, 15, pp. 37-45, avril 1965.


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pour la production de dattes de qualité supérieure* sont très sensiblesà


la maladie. Ainsi, les variétés Bou Feggous et Mehjoul ont presque dispa-
ru du Maroc, et ce pays qui était exportateur de dattes au 18" siècle,
est devenu importateur. Les observateurs s'accordent à dire que la pal-
meraie marocaine a été détruite au.x2/3 par le bayoud durant le siècle
dernier.

Progression, de la fusariose e,lr Afrique du Nord

D'après les renseignementset observations en notre possession,nous


pouvons établir la progression approximative du bayoud dans les palme-
raies. Les dates indiquées ci-après n'ont pas une valeur absolue, mais
sont les premières constatations de bayoud dans les différentes oasis.

Progression du bayoud dans les différentes palmeraies

Progression vers I'ouest Progression vers I'est

MAROC MAROC ALCERIE


Dne.l Dn,r.L Nono-Oursr sÀHÀRrEN
Foum Zguid 1900 Tazzarine Beni Ounif 1898
Agadir Tissint 1900 Ait Saidane Colomb-Béchar 1900
Tata 1904 Alnif Beni Abbès 1908
Tarjicht 1920 Tafilalet 1870 Tabelbala 19t2
Icht 1954 Ziz 1875 Taghit r923
Foum e[ Hassane1960
OUED RHERIS TIDIKELT
Goulmima 1900 Foggaret el Arab 1902
Tadighoust 1910 Sillafene 1904
Timesguit 1920 Haenoune 1906
Arnsed 1930 Foggaret ez Zoa l9l0
Hsi el Hadjar 1,94O
SUD-Esr MlnoclrN In Salah 1941
Bou Den,ib 1890 Igostene 1943
Figuig 1898 El Barka 1943
Sahela 1950
GoURRÀRA
Fatis 1,9t2
Adjir t9t2
ToUAT
Bouda 1934
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Metlili t949

'3 Tout au moins pour la présentationet le goût demandéspar le marché européen.


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Allure, de la progression

Les indications précédentespermettent de suivre la progression du


bayoud : vers I'ouest, la contamination des premières palmeraies (Foum
Zguid) n'est signalée qu'en 1900, et en vingt ans la maladie a franchi
300 km (Tarjicht). Vers l'est, la progression de la fusariose est beaucoup
plus spectaculaire.Du Draa, le bayoud gagne le Tafilalet (1870), en conta-
minant au passageles palmeraiesde Tazzarine, Aït Saïdaneet Alnif. Tren-
te années plus tard, on le signale dans la vallée de I'oued Rheris, qui est
totalement atteinte, et dans I'oasis algérienne de Colomb-Béchar. Les
palmeraies des environs de ce centre sont bayoudées dans les vingt ans
qui suivent, et dix ans après - soit en 1934 - c'est le tour d'Adrar au
Touat (Bouda).

Jusqu'ici la progression s'est faite de proche en proche, en suivant


la plupart du temps les vallées, mais pour les palmeraies du Sahara
central, la fusariose du Palmier Dattier progresse par bonds désordonnés
de région à région géographiquement éloignées. On peut constater la
rapidité avec laquelle le bayoud s'est propagé au Tidikelt (1902).Il suffit
de quatre années après i'entrée de la maladie en Algérie (Beni Ounif,
1898) pour que l'oasis de Foggaret (Tidikelt) soit atteinte, ce qui repré-
sente un bond de 700 km. Fatis (palmeraie du Gourrara) fut contaminée
en L972, c'est-à-dire 12 ans après Colomb-Béchar dont elle est distante
de 300 km. La dernière étâpe connue est de 700 km : In Salah (1941),
Metlili des Chambas (1949) au sud du M'Zab.

Causes de la dispersion du bayoud

La dispersion de la maladie paraît être assurée par le transport de


parties végétalesde palmiers dattiers bayoudés (palmes, bois, rejets, objets
confectionnés avec nervures, folioles de palmes, lif, etc.).

On peut constater que la progression du bayoud au Sahara suit les


grands axes commerciaux entre oasis. Elle emprunte en effet le chemin
parcouru par les commerçants et les transporteurs, et les voies habituelles
des caravaniers qui efiectuent les échanges traditionnels des produits
(troc) entre les diftérentes régions sahariennes.Les liaisons entre oasis
marocaines et algériennes ont toujours existé, nous n'en voulons pour
preuve que I'existence de vieux sujets Bou Feggous (variété marocaine
du Draa) à El Golea. Ceci nous rend intelligibles les bonds surprenants
que le bayoud a faits en ce début de siècle au Sahara. La dernière con-
tamination de palmeraie constatée est celle de Metlili des Chambas ; elle
Symptômes de début d'attaque d'un arbre
(à droite, palmes hémiplégiqueset desséchées)

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Symptômes avancés de la maladie Phase terminale de la maladie


(bouquet central encore indemne)
Photos INRA - J.F. BpnNlnu
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est probablement liée aux importations traditionnelles de cordages de lif,


et de bâts de djerids qui se font en provenance du Tidikelt-Est.

La variété Deglet-Nour menacée

Metlili des Chambas est le poste avancé du front bayoud. La maladie


est à la porte du M'Zab, à 250 km de Ouargla et à 300 km de Toug-
gourt. L'oued Righ, les Zibans, le Souf, royaumes de la Deglet-Nour,
se trouvent maintenant directement menacés par la fusariose du Palmier
Dattier. Ces régions comportent près d'un million de sujets Deglet-Nour *
qui produisent annuellement 40 000 tonnes de fruits environ, dont 24 000
tonnes sont exportées hors d'Algérie. La valeur d'achat de la récolte
représenteapproximativement deux milliards d'anciens francs. On mesure
les conséquencessocio-économiquesqu'aurait l'apparition du bayoud dans
les oasis du Sud constantinois qui sont les plus peuplées du Sahara. La
menace est d'autant plus grave que la variété Deglet-Nour s'est révélée
extrêmement sensible à la fusariose dans nos parcelles expérimentales
du Tidikelt, dans I'oasis de Metlili des Chambas, ainsi que pour d'ancien-
nes introductions au Maroc (Rissani, etc.). Si les échangesde Metlili avec
les oasis du Sud constantinois sont extrêmement limités, il n'en est pas
de même avec le }.[{'Zab; ce pays de commerçants pourrait très bien
devenir la future base de départ de la maladie vers l'est. Les nomades
Chambas, propriétaires des jardins de Metlili, et dont les terrains de
parcours touchent les grandes régions de la Deglet-Nour, pourraient être
aussi des agents vecteurs du bayoud.

En évoquant le précédent marocain, on peut craindre que la variété


Deglet-Nour, à I'image de la Mehjoul et de la Bou Feggous, ne disparais-
se, détruite par la fusariose, et que son fruit, universellement apprécié, ne
déserteprogressivementles marchés internationaux comme I'a fait la datte
marocaine qui, au 18" siècle, ayant conquis le marché de Londres devait
l'abandonner au siècle suivant.

Conlusion

Le bayoud, maladie vasculaire du Palmier Dattier, occasionné par


un champignon du sol FusqriLtm oxysporum (ScHnn) SN. ez H. albedinis
MIIENçoN n'est pas une affection guérissablecurativement, elle est dans
ce sens analogue à celles provoquées par les mêmes cryptogames sur

*' Tous ne sont pas en pleine production; il y a de vieilles et de jeunes plantations


(180 000 palmiers jeunes).
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d'autres plantes cultivées : Tomate, Bananier, Melon, Palmier à huile,


etc. Le parasite, présent dans le sol jusqu'à de très grandes profondeurs,
ne peut pas être pratiquement détruit. Il faut vivre avec lui et pour
cela utiliser des variétés de Palmier résistantes.Celles-ci existant, nous
avons sur beaucoup d'entre elles de nomb.reuxrenseignements,mais ils sont
encore incomplets car nous ne savons pas si un arbre subsistantdans une
zone dévastéeest encore sain grâce à sa résistanceou si, pour une raison
inconnue, le champignon ne l'a pas attaqué. De plus, nous n'avons
pas la possibilité de ,tester directement sa résistance, tous les essais
d'inoculation sur un sujet adulte ayant échoué.

Actuellement le Maroc, se basant sur les recherches antérieures


ainsi que sur de nombreuses observations, a entrepris une expérimenta-
tion conduite de façon telle que, d'ici à un nombre réduit d'années com-
parativement à la vie d'un palmier, nous saurons avec certitude quelles
sont les variétés qui résistent efiectivement à I'attaque du parasite. Ce
sont ces variétés qui pourront être utilisées pour reconstituer les palme-
raies dévastées,et celles donnant des dattes de qualité apporteront aux
régions de phoeniciculture traditionnelle, en dehors des possibilités vivriè-
res, d'importantes ressourcespar leur vente à I'extérieur.
Manuscrit déposéle 11.12.64

cÉ.tr-
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(Fusarium oxysporurné-à)t ;Li LL-19 J-'=JJ çjbll ee=)l .È:" =:-3-


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RÉsuuÉ
Note sur l'épidémiologie du bayoud en Afrique du Nord

Le bayoud, maladie vasculaire du Palmier Dattier causée par un


champignon du sol (Fusarium oxysporum albedinis), détruit un nombre
NOTE SUR L,EPIDEMIOI-OGIE DU BAYOUD EN AFRIQUE DU NORD 45

considérable d'arbres, en particulier les sujets produisant les meilleures


dattes. Originaire de la vallée du Draa, il a envahi les palmeraies maro-
caines puis algériennes; sa progression durant les 80 dernières années
est indiquée , actuellement le bayoud menace les centres algériens pro-
duisant la datte Deslet-Nour.

RrsuuEN
Nota sobre la epidemiologiadel bayoud en Africa del Norte

El bayoud es una enfermedad vascular de la Palma Datilera, oca-


sionada por un hongo del suelo (Fusarium oxysporum albedinis), que
destruye un nirmero considerable de ârboles, en particular los que pro-
ducen los mejores dâtiles. Originario del valle del Draa, ha invadido las
plantaciones de Marruecos y después las de Argelia. Se indica su pro-
gresidn durante los ultimos 80 aflos ; actualmente, el bayoud amenaza
los centros argelinos que producen el dâtil Deglet-Nour.

Suruulnv
Note on the epidemiology o'f the bayoud diseasein North Africa

The bayoud disease, a vascular disorder of the Date Palm, caused


by a soil fungus (Fusarium oxysporum albedinis), destroys a considerable
number of trees, in particular those producing the best dates. Starting
from the Draa valley, it invaded the Moroccan date-groves and then the
Algerian plantations ; its progress during the last 80 years is indicated ;
at present, the bayoud diseaseis threatening the Algerian districts where
the Deglet-Nour dates are produced.

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