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Séchage thermique

des boues urbaines et industrielles

État de l’art

• Quelle est la place du séchage thermique dans le processus de traitement des


eaux urbaines et industrielles ?

• Les technologies aujourd’hui disponibles sont-elles équivalentes en termes


d’efficacité et de rentabilité ?

• Quel est l’impact environnemental du séchage thermique ?

Telles sont les questions auxquelles Gaz de France, l’ADEME et l’Agence de


l’Eau Seine Normandie se sont efforcés de répondre au travers d’un état de
l’art sur le séchage thermique associé à une importante série de campagnes de
mesures.
Introduction

Du point de vue de l’assainissement, les boues résiduaires correspondent aux résidus issus de la séparation
liquide-solide à la sortie des unités de traitement de l’eau. Leurs caractéristiques varient beaucoup en
fonction des effluents concernés.

• Les effluents urbains, riches en matières organiques, résultent des activités des particuliers.
• Les effluents industriels sont liés à la nature de l’activité concernée et sont essentiellement organiques,
assimilables aux effluents urbains, ou minéraux.

La nature des boues dépend du type de traitement mis en œuvre :


• Les boues biologiques, constituées majoritairement de matières organiques, proviennent de la décanta-
tion des effluents liquides après épuration biologique. En France, la quantité de boue générée par ce
procédé avoisine 30 à 60 grammes de matière sèche par habitant et par jour.
• Les boues physico-chimiques résultent de l’ajout de réactifs minéraux ou organiques destinés à favoriser
la coagulation et la floculation des particules non décantables. Ce traitement conduit à une augmentation
significative de la production de boues, qui peut atteindre 180 grammes de matière sèche par habitant et
par jour.

Le séchage thermique est un des procédés de traitement des boues : ce n’est pas une fin en soi mais une
étape entre la production des boues et la destination finale (épandage, mise en centre de stockage, valo-
risation matière…). La valorisation matière consiste à réintégrer les boues dans un produit (briques, céra-
miques, ciments…) ou, pour certaines boues industrielles, à les réutiliser comme matière première.

Le séchage s’intègre à toutes les grandes voies de traitement des boues. Son intérêt principal est de préser-
ver l’ensemble des possibilités d’élimination dans les différentes filières.

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Évolution des caractéristiques des boues
en fonction de leur siccité

La consistance des boues évolue au cours du séchage. À partir de 55-60 % de matière sèche, elles deviennent très
visqueuses et collantes (phase plastique) entraînant parfois de gros préjudices à l’installation (colmatage, usure des
pièces mécaniques, combustion des boues…).

On distingue dans les boues l’eau libre de l’eau liée. L’eau libre, faiblement absorbée, s’élimine par déshydratation
mécanique. L’eau liée est chimiquement attachée par des liaisons très fortes aux bactéries ou aux autres particules et
ne peut être éliminée que par séchage thermique au-delà de 105 °C.

Le séchage thermique des boues


Le séchage est un transfert de masse et de chaleur visant à évaporer l’eau contenue dans les boues.

L’apport d’énergie peut se faire de trois façons :


• Séchage par conduction : l’énergie thermique nécessaire au chauf-
fage est apportée par contact avec une paroi chauffée ; les vapeurs
dégagées par le produit durant le séchage sont aspirées ou entraî-
nées par un gaz de balayage.
• Séchage par convection : il consiste à mettre en contact un gaz
chaud et le produit.
• Séchage par rayonnement : l’énergie est apportée au produit à
sécher par des ondes électromagnétiques. Les rayonnements utili-
sés en séchage sont les infrarouges ou les micro-ondes.

Les différents types de sécheurs

Il existe trois types de sécheurs dont la technologie est liée au mode de transfert de l’énergie :
• Les sécheurs à contact direct : les gaz chauds sont en contact direct avec les boues, il s’agit essentiellement de séchage
par convection.
• Les sécheurs à contact indirect : le séchage se fait principalement par conduction.
• Les sécheurs mixtes : ils utilisent à la fois les propriétés du sécheur direct et indirect ; la paroi est chauffée et l’air
chaud permet l’évaporation de l’eau des boues.
Dans tous les cas, la vapeur d’eau générée par le séchage est condensée par refroidissement. Les condensats sont
renvoyés en tête de station et les incondensables sont recyclés dans le sécheur ou renvoyés dans l’atmosphère après
désodorisation éventuelle. Les matériels utilisant le mode de transfert thermique par rayonnement peuvent être des
sécheurs de type direct ou indirect selon que les boues sont en contact ou non avec les produits de combustion.

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Les sécheurs indirects

Sécheurs à palettes (ou sécheurs malaxeurs) : Buss-Rovactor, GMF, List

Les sécheurs à palettes disposent d’une double


enveloppe extérieure immobile et d’un ou plu-
sieurs rotors sur lesquels sont fixées les palettes.
Le fluide caloporteur circule dans la double en-
veloppe, les rotors et les palettes.

Sécheurs à disques : Atlas, KHD, Kvaerner, MSE, Procalex, SIL, Stord

Ces sécheurs sont conçus de la même façon que


les sécheurs à palettes, mais des disques rem-
placent les palettes. Le malaxage des boues est
donc moins important et le temps de séjour al-
longé.

Tambours rotatifs : Andritz, Comessa, Elino, Mannesman, Maguin, Vadeb, Mitchell Lödige

Ils sont constitués d’un cylindre tournant dont


l’axe est légèrement incliné par rapport à l’ho-
rizontale pour favoriser l’avancée des boues. La
rotation lente du tambour partiellement rem-
pli assure le renouvellement du produit sur la
surface d’échange.

Sécheurs à couche mince : Buss DAS, Duprat, GEA Canzler, GMF

Ce sont des sécheurs utilisés depuis longtemps


dans l’industrie pour le séchage de produits dif-
Schémas d’après « Les procédés de séchage dans l’industrie » (ADEME éditions, 2000)

ficiles. Les boues sont disposées en fines couches


sur un cylindre chauffé, selon différents procé-
dés.
En fin de rotation, les boues séchées sont ra-
clées par un couteau.

Autres sécheurs indirects


• Sécheurs couplant déshydratation mécanique • Sécheurs sous vide (Lödige) dans une cuve cy-
et séchage indirect (Bertrams, Ashbrook) : les lindrique horizontale chauffée dans laquelle est
boues circulent sur un filtre chauffé. inséré un agitateur muni de pales.
• Sécheurs à plateaux : sécheurs multi-étages à • Sécheurs radiatifs (Hytec) : un convoyeur de
plateaux chauffés. séchage dirige les boues sous des émetteurs in-
frarouges gaz ou électriques.

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Les sécheurs directs

Tambours rotatifs : Andritz, Comessa, KHD, Maurer Söhne, Promeca, Swiss Combi, Vadeb

Les éléments constitutifs de ces sécheurs sont les


mêmes que dans le cas des sécheurs indirects,
mais les parois en contact avec les boues ne sont
pas chauffées.
Le séchage s’effectue par une circulation d’air
chaud dans le même sens ou en sens inverse des
boues.

Sécheurs à bandes : Mabarex, Sevar, STC

Généralement, le produit est d’abord mis en


forme dans une extrudeuse ou un granulateur
pour augmenter la surface d’échange. Les boues
sont ensuite disposées sur des bandes transpor-
teuses où elles sont soumises à un écoulement
d’air chaud parallèlement ou perpendiculaire-
ment à leur sens de déplacement.

Sécheurs à transport pneumatique : Andritz, Barr Rosin, CQVB

Sécheurs à lit fluidisé Sécheurs flash


Sécheurs à lit fluidisé : Ils sont composés d’un Sécheurs flash ou atomiseurs : la matière à sé-
caisson étanche à deux compartiments séparés cher est transportée jusqu’à l’entrée du sécheur
par une sole de fluidisation sur laquelle est dis- où elle est dispersée dans le réacteur par un in-
posé le produit à sécher. L’air ou la vapeur sur- jecteur. Le courant d’air chaud transporte en-
chauffée est injectée par le bas, ce qui fragmente suite les particules, puis le produit sec est sé-
et fluidise le produit. paré des buées.
Schémas d’après « Les procédés de séchage dans l’industrie » (ADEME éditions, 2000)

Autres sécheurs directs

• Sécheurs utilisant l’énergie solaire : les boues • Séchage par injection directe de gaz chaud
sont épandues sur une épaisseur d’environ dans les boues à traiter.
30 cm. Elles doivent être régulièrement mélan-
gées.

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Les sécheurs mixtes

Conductif + Convectif : Radiatif + Convectif :


Alpha-Vomm, Comessa, Va Tech Nabag Nesa
Les boues déshydratées mécaniquement et extru-
• Sécheurs s’apparentant à des sécheurs à palet- dées sont déposées sur une bande transporteuse.
tes à circulation d’air. Elles sont ensuite séchées par le rayonnement pro-
• Sécheurs associant la technologie du lit fluidisé venant de la paroi chauffée par des gaz de com-
bustion et par de l’air chaud circulant dans la
à un chauffage des parois.
chambre d’évaporation.

Avantages et inconvénients
des différents types de sécheurs

Séchage indirect (par conduction) Séchage direct (par convection)

Avantages : Avantages :
• Quantité de gaz à épurer faible • Conception simple
• Buées condensables • Souplesse d’adaptation aux variations de
• Possibilité de traitement des siccité en entrée
incondensats au niveau du brûleur • Capacités importantes
• Traitement aisé des odeurs
• Risques d’explosion et d’inflammation Inconvénients :
faibles • Quantité de buées à épurer
• Grande taille des installations
Inconvénients : de traitement des odeurs
• Construction compliquée • Moins rentable pour les petites
• Usure/Maintenance installations
• Inertie thermique

Séchage mixte

Avantages :
• Meilleure efficacité thermique
• Durée de séjour réduite
• Produit sec non obligatoirement recyclé

Inconvénients :
• Quantité de phase gaz importante
• Grande taille des installations de
traitement des odeurs

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L’offre technologique

Présentation des capacités évaporatoires des différents sécheurs répertoriés

La capacité évaporatoire cor-


respond au débit d’eau éva-
porée et s’exprime en tonne
d’eau évaporée par unité de
temps (Tev/h).

Le graphique ci-contre illus-


tre le nombre de construc-
teurs disposant d’une techno-
logie donnée à capacité
évaporatoire fixée. Plus la
zone est foncée, plus l’offre
technologique est impor-
tante.

L’offre la plus importante se


situe autour d’une tonne par
heure.

Aspect économique
Comparaison des coûts d’investissement et des consommations spécifiques
des différents sécheurs de boues

Une installation de séchage de boues est constituée, non seulement du sécheur proprement dit, mais éga-
lement d’un nombre important d’équipements annexes (stockages, système d’alimentation et de mise en
forme des boues séchées, dispositif de traitement des odeurs, etc.). Ces derniers conditionnent, pour une
part importante, la qualité du fonctionnement de l’installation. Le coût des équipements périphériques est
souvent du même ordre de grandeur que celui du sécheur proprement dit.

Aucune catégorie de sécheur ne se distingue parti-


culièrement en terme d’investissement ou de con-
sommation spécifique. Le choix de la technologie
est donc principalement lié au type d’exploitation
et aux boues à traiter, ainsi qu’à la destination fi-
nale envisagée.

L’énergie représente généralement entre 1/3 et 1/2


du coût total du séchage, le reste correspond aux
frais de maintenance et de main d’œuvre. Il existe
néanmoins des écarts importants selon les procédés.

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Campagnes de mesures

Ces résultats sont issus d’une première campagne de mesures réalisée par Gaz de France
en partenariat avec l’ADEME et l’Agence de l’Eau Seine Normandie portant sur 8 sécheurs
et d’une seconde campagne de mesures effectuée par Gaz de France portant sur 4 sécheurs.

Installations étudiées

Comparaison entre les siccités des boues brutes


en entrée et en sortie des différents sécheurs
(résultats expérimentaux issus des campagnes de mesures)

Le séchage thermique est un procédé fortement


énergivore. Le besoin thermique nécessaire pour dés-
hydrater les boues est d’autant plus important que
leur siccité initiale est faible. Le séchage est donc
appliqué sur des boues de siccité en entrée supé-
rieure à 15-20 %.
Une partie des boues séchées est parfois recyclée à
l’entrée du sécheur et mélangée avec les boues hu-
mides. Ainsi le sécheur travaille au-delà de la phase
plastique.
Pour des boues de siccité élevée, la déshydratation
s’effectue avec un apport d’énergie plus réduit, mais
dans ce cas, les procédés sont beaucoup plus déli-
cats à mettre en œuvre.
La siccité des boues séchées dépend plus de la desti-
nation finale envisagée que des caractéristiques in-
trinsèques du sécheur considéré.

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Enjeux

La production française de boues devrait connaître • Hygiénisation.


une forte croissance dans les années à venir. Dans
• Mise en forme du produit final.
un contexte réglementaire de plus en plus contrai-
gnant, notamment au niveau de l’aspect sanitaire, • Amélioration des propriétés fertilisantes des boues
la valorisation des boues par séchage thermique pré- par ajout de nutriments (valorisation en filière agri-
sente un intérêt certain pour la filière. cole).
• Atteinte des minima légaux de siccité pour l’ad-
Les atouts de ce procédé sont nombreux : mission en décharges.
• Réduction du poids et du volume (stockage et trans- • Augmentation du pouvoir calorifique en vue de
port). l’incinération.
• Stabilisation et diminution des nuisances olfacti-
ves des boues.

Conclusions

Le séchage thermique est un procédé intermédiaire Les coûts d’investissement et de fonctionnement


de traitement des boues qui ouvre des possibilités sont très variés.
d’élimination dans l’ensemble des filières.
Les équipements périphériques revêtent une grande
Les campagnes de mesures réalisées ont permis de importance au niveau tant économique (coûts d’in-
tirer les conclusions suivantes : vestissement, de fonctionnement…) que technique
• Il n’existe pas intrinsèquement de « bon sécheur » (fiabilité, nuisances…).
ou de sécheur meilleur que les autres mais unique- Il convient d’être attentif à certaines contraintes in-
ment des sécheurs plus ou moins bien adaptés ou hérentes au séchage thermique :
exploités.
• Un coût énergétique important.
• Le choix du sécheur doit s’opérer en fonction des
contraintes locales : destination des boues séchées, • Des risques de polluants (poussières, fumées, buées)
énergie disponible, capacité et mode de fonction- et d’odeurs.
nement de l’installation, caractéristiques des boues, • Une problématique sécurité de l’installation.
contraintes locales d’implantation.
• Globalement, les performances constatées sur le
terrain sont conformes à celles annoncées par les fa-
bricants de sécheurs.

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Séchage thermique des boues
urbaines et industrielles

1 édition juin 2004 - Réf. ADEME : 4955 - Photo : AESN - Schémas d’après « Les procédés de séchage dans l’industrie » (ADEME éditions, 2000)

Pour en savoir plus

GAZ DE FRANCE AGENCE DE L’EAU SEINE NORMANDIE ADEME

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re

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