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Département : Langue française

Master  : Langue et communication


Module  : Phonologie

Travail sous le thème :

Les phénomènes prosodiques en français

Préparé par : Tarik Aouda


Encadré par : M. Mustapha Khiri

Année universitaire : 2019 /2020

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Le plan :

● Introduction

1. Définitions

2. Le rythme et ses constituants :

2.1. La syllabe

2.2 Les groupes rythmiques

  2.3. L’accentuation

3. L’intonation

3.1. Fonctions de l’intonation 

3.2. Caractéristiques acoustiques de l’intonation

● Conclusion.

● Bibliographie.

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● Introduction.

Les recherches en prosodie essaient de proposer des modèles qui rendent compte
de phénomènes aussi variés que l'accentuation et le rythme, l'intonation et la
formation des constituants prosodiques.
Depuis ces quinze dernières années, de nombreux travaux se sont appuyés sur les
informations linguistiques, notamment sur l'analyse syntaxique, pour générer la
structure accentuelle et intonative des énoncés en français, et aussi dans d'autres
langues. Cela s'explique par le fait que la prosodie remplit plusieurs fonctions à
caractère linguistique.
Les modèles prosodiques basés sur la linguistique donnent des résultats
satisfaisants, mais incomplets. D'une part, ils ne proposent généralement qu'une
seule réalisation possible pour un énoncé donné.
D'autre part, ils ne peuvent pas toujours rendre compte de phénomènes tels que
l'alternance syllabique (syllabe forte vs syllabe faible), la récurrence de patrons
accentuels et intonatifs, l'équilibrage syllabique entre les constituants.

1. Définitions.

La prosodie selon LAROUSSE (2008 :828) est la « partie de la phonétique


qui étudie l’intonation, l’accentuation, les tons, le rythme, les pauses, la durée des
phonèmes. Cette définition de la prosodie nous donne un aspect dictionnairique
général, non impacté de traité spéculatif et donc n’atteint pas la plénitude
scientifique de notre étude. Il n’en vaudrait pas mieux quant à l’aspect adjectival
du terme pour la simple raison qu’il sera présenté par le même auteur comme tout
ce qui est relatif à la prosodie (prosodique ou suprasegmental).

En deuxième lieu, GALISSON et COSTE (1976 :538) disent d’un phénomène


qu’il est prosodique ou parasegmental tout « fait phonique ne se conformant pas
à la double articulation et affectant un élément du discours supérieur au
phonème. » En outre, ils affirment que "tout ce qui n’entre pas dans la
segmentation monématique et phonématique peut être dit prosodique ou
suprasegmental. L’intonation, la durée, les accents sont des faits prosodiques ou
suprasegmentaux."

Dans le Petit Larousse, le terme de prosodie est défini de trois façons


différentes, selon le domaine auquel il s’applique.
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 en littérature, « la prosodie est l’ensemble des règles relatives à la
quantité des voyelles qui régissent la composition des vers, notamment
dans les poésies grecques et latines ». Dans la poésie française, la
prosodie s’entend comme « l’ensemble des règles et des usages du
compte syllabique» ;
 dans le domaine de la linguistique, la prosodie se définit comme « la
partie de la phonétique qui étudie l’intonation, l’accentuation, les tons,
le rythme, les pauses et la durée des phonèmes» ;
 en musique, la prosodie correspond à « l’étude des règles de
concordance des accents d’un texte et de ceux, forts ou faibles, de la
musique qui l’accompagne.»

2. Le rythme et ses constituants :

Le rythme parolier est un phénomène très complexe et difficile à définir.


Trois mots clé sont à la base du rythme du la parole :

-Périodicité

- Temporalité

- Structuration

2.1. La syllabe :
C’est une unité
- prosodique minimale
- d’autonomie vocale
- rythmique pulsionnelle
• en production
• en perception

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En français :
- structures syllabiques très régulières
- frontières syllabiques claires

2.2 Les groupes rythmiques :

Groupes rythmiques groupes de souffle

Commentaire à partir de l’exemple d’une phrase longue:

La charmante jeune personne écoute le distingué narrateur avec un grand intérêt.

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 pause (réelle ou virtuelle)

La charmante jeune personne écoute le distingué narrateur / avec

un grand intérêt // La charmante jeune personne / écoute le

distingué narrateur/ avec un grand intérêt //

 glissando tonal

La charmante jeune personne écoute le distingué narrateur avec


un grand intérêt
La charmante jeune personne écoute le distingué narrateur avec un
grand intérêt

 variations de durée

La charmante jeune personne écoute le distingué narrateur avec un


grand intérêt.

2.3. L’accentuation

Lorsque nous parlons d’accent, nous ne devons pas abandonner le relief


sonore qui est le fruit d’un ensemble de comportements analysables et
hiérarchisables.
Pour désigner ce que les romanistes appellent ‘accent tonique’, les
phonéticiens et les linguistes disent accent car le mot tonique signifie ‘de
hauteur’, et il n’est pas souhaitable de lier un terme de fonction à un terme de
réalisation.
Selon Martinet ‘L’accent est la mise en valeur d’une syllabe et d’une seule
dans ce qui représente, pour une langue donnée, l’unité accentuelle’. Pour les
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linguistes, en général, l’accent établit une hiérarchie de syllabes, un contraste
sur l’axe syntagmatique et a une fonction démarcative ou distinctive dans
certaines langues.
Certains auteurs affirment que les langues à accent fixe sont des langues
sans accent. Le principal argument qui soutient cette thèse est que l’accent
n’assume pas de fonction distinctive dans les langues à accent fixe. Hjelmslev
(1943) fut l’un des premiers à considérer la langue française comme langue
sans accent. Togeby (1965: 31-37 et 53) considère que l’accent fixe du français
ne peut assumer de fonction sémantique et morphologique et, qu’il n’est donc
pas phonologiquement distinctif. Pilch (1973: 54) considère que le français est
une langue où l’accent n’a pas de fonction linguistique.
L’accentuation dans une langue est définie comme étant la « (...) mise en
valeur (d’)une ou (de) plusieurs syllabe à l’intérieur d’un mot ou d’un groupe
de mots en les prononçant avec une caractéristique phonique qui les distingue
des autres mots. » (Dictionnaire de linguistique, Paris, Librairie Larousse)

Cette évaluation de la "prépondérance" d’une syllabe est évidemment basée


sur une évaluation par un locuteur sur une échelle relative qui repose
essentiellement sur une perception auditive.
Ex. en français:
un beau bateau
un beau bateau bleu
un beau bateau bleu vogue sur l’eau.

Nature phonétique de l’accentuation

En général, c’est une combinaison des trois indices acoustiques suivants qui
produit l’impression accentuée d’une syllabe :

a) durée (mesurée en sec)


b) intensité (mesurée en dB)
c) la variation mélodique (mesurée en Hz)

La fonction première de l'accent en français en est une démarcative. Cela


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veut dire qu'il est utilisé pour démarquer des éléments dans la phrase, soit la
plupart du temps des unités de sens ou des groupes syntaxiques, comme à la fin
du groupe nominal sujet (-teau, bleu, rouge) dans les exemples ci-dessous):

Le bateau vogue sur la mer.


Le petit bateau vogue sur la mer.
Le petit bateau bleu vogue sur la mer calme.
Le petit bateau bleu blanc et rouge vogue sur la mer calme.
Le petit bateau de bleu blanc et rouge de ma soeur Bernadette vogue sur la
mer calme.

Cet accent peut occasionnellement aider à lever les ambiguïtés de type


syntaxiques (liées à la structure de la phrase):

Ex.:
a) Le juge a dit: « L’avocat est incompétent. »
(le juge déclare que l’avocat est incompétent)
b) « Le juge, » a dit l’avocat, « est incompétent. »
(l’avocat déclare que le juge est incompétent)

La deuxième fonction de l'accent en français en est une d'insistance. Dans


cette fonction, il sert à mettre en relief une unité de l’énoncé dans le but
d’attirer l’attention du locuteur sur une partie particulière du message.

Ex.:
a) Mettez vos livres sous votre chaise. (oppos. à "sur")
b) Mettez vos livres sous votre chaise. (oppos. à "sa")
c) Mettez vos livres sous votre chaise. (oppos. à "bottes")
d) Mettez vos livres sous votre chaise. (oppos. à "ses")
e) Mettez vos livres sous votre chaise. (oppos. à "bureau")

Il est donc possible de mettre l'accent d'insistance sur à peu près n’importe
laquelle des syllabes de l’énoncé.
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La troisième fonction de l'accent en français en est une: distinctive de la
place de l’accentuation.
En cela, l'anglais diffère du français fondamentalement par le fait qu’en
anglais, l’accent lexical a une fonction distinctive qui nous permet d’opposer
deux mots par la présence d’un accent sur une syllabe différente. Par exemple,
les mots suivants s’opposent par la place de l’accent, opposition qui est
impossible à faire en français (syllabes accentuées en caractères gras):

Anglais:
subject(n) ~ subject(v) / objet(n) ~ object(v) / record(n) ~ record(v)

Français:
bateau = bateau
téléphone = téléphone = téléphone
En anglais, il est même possible de faire une distinction entre certains mots
composés:

• a greenhouse (une serre) ~ a green house (une maison verte)


• a blackbird (un merle) ~ a black bird (un oiseau noir)

En français, la situation est-elle semblable dans les mots suivants?

• un coffre fort (de bonne qualité) ~ un coffre-fort (un coffre à l’épreuve des
voleurs)
• une robe dernier cri ~ le dernier cri entendu.

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 L’accentuation primaire :

 Place de l’accent primaire.

L’accent primaire, également appelé oxytonique en français, tombe


toujours sur la dernière syllabe d’un mot lorsque le mot est produit en
isolé (par exemple : nation [na.ˈsjɔ]̃ , national [na.sjɔ.ˈnal], nationalité
[na.sjɔ.na.li.ˈte]). En revanche, dans la parole continue, les mots ne sont
pas tous accentués. Seule la dernière syllabe du groupe accentuel est
accentuée.

Ainsi, nous proposons d’observer l’exemple suivant : "Le plus petit des trois
cambrioleurs a été aperçu à l'extérieur de la gare à huit heures moins le quart".
Cette unité peut être divisée en quatre groupes accentuels, donc chacun portera à
la fin un accent : [lə.ply.pəti.de.tʁwɑ.kɑ̃bʁijɔ.ˈlœʁ] [a.e.te.a.pεʁ.ˈsy]
[a.lεk.ste.ʁjœʁ.də.la.ˈgaʁ] [a.ɥit.œʁ.mwε̃.lə.ˈkaʁ] Ou en deux groupes rythmiques
: [lə.ply.pəti.de.tʁwɑ.kɑ̃bʁijɔ.lœʁ.a.e.te.a.pεʁ .ˈsy]
[a.lεk.ste.ʁjœʁ.də.la.gaʁ.a.ɥit.œʁ.mwε̃.lə.ˈkaʁ] Ou bien cette unité peut avoir
seulement un accent à la fin. Elle représente alors un groupe de souffle :
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[lə.ply.pəti.de.tʁwɑ.kɑ̃bʁijɔ.lœʁ.a.e.te.a.pεʁ.sy.a.lεk.ste.ʁjœʁ.də.la
.gaʁ.a.ɥit.œʁ.mwε̃.lə.ˈkaʁ] En français, la position de l’accent est dite "fixe", par
opposition aux langues à accent "libre", puisqu’il se situe toujours sur la dernière
syllabe d’un groupe accentuel. Ainsi, lorsque l’on allonge le groupe accentuel en
ajoutant un mot, l’accent se déplace à la nouvelle dernière syllabe du groupe
accentuel (Gak, 1989 : 67). Par exemple, dans la phrase : "La vérité est dure."
[la.ve.ʁi.te.ε.ˈdyʁ], l’accent tombe sur [dyʁ], mais si l’on y ajoute le mot
"encourageante" [ɑ̃ .ku.ʁa.ˈʒɑ̃ t], l’accent primaire se déplacera à la nouvelle fin
de ce groupe accentuel et, maintenant, la syllabe [ʒɑ̃ t] sera accentuée : "La vérité
est dure et encourageante." [la.ve.ʁi.te.ε.dyʁ.e.ɑ̃ .ku.ʁa.ˈʒɑ̃t]. Ainsi, si l’on
continue en étendant ce groupe avec le mot "stupéfiante" [sty.pe.ˈfjɑ̃ t], nous
observons de nouveau que l’accent primaire tombera sur la nouvelle dernière
syllabe du groupe qui sera [fjɑ̃ t] : "La vérité est dure, encourageante et
stupéfiante." [la.ve.ʁi.te.ε.dyʁ.ɑ̃ .ku.ʁa.ʒɑ̃ t.e.sty.pe.ˈfjɑ̃t] Dans les langues à
accent "libre", comme en russe, en anglais ou en allemand, chaque mot plein (ou
lexical) porte un accent. L’accent remplit donc une fonction distinctive, car il sert
à distinguer deux mots entre eux. En anglais, par exemple, l’accent permet de
différencier le nom du verbe : contract [ˈkɑn.trækt] est le nom et [kɑn.ˈtrækt] est
le verbe.
 Accentuation secondaire :

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 Place de l’accent secondaire.

En français, outre l’accent primaire, il existe un autre type d’accent, appelé


accent secondaire, ou d’insistance. Il permet, comme Léon (2009 : 154) le relève,
"une mise en relief d’une unité généralement plus petite que le groupe accentuel"
(Léon, 2009 : 154).
Carton (1974 : 121) souligne que la place de l’accent secondaire n’est pas
complètement libre ni tout à fait fixe, mais qu’elle "dépend de celle de l’unité à
mettre en valeur". Léon (2009 : 154) est quant à lui plus précis puisqu’il
mentionne que l’accent d’insistance "se manifeste généralement sur la première
syllabe de l’unité linguistique".
 Caractéristiques acoustiques de l’accent secondaire.

Selon Léon et Léon (2013 : 77), différents processus permettent de marquer


l’accent secondaire, en regard de la fonction que celui-ci remplit. En effet, quand
"on renforce la première syllabe et dit ce que l’on pourrait écrire :
"FFFFOORmidable !" [f ̌ɔ̌ʁ.mi.ˈdabl], c’est la consonne initiale qui devient plus
longue, plus forte, et la voyelle qui la suit possède une fréquence fondamentale
plus importante. Techniquement, du point de vue acoustique, on parle de
l’accroissement de la durée, de l’amplitude de la consonne initiale (= attaque) et
de la fréquence fondamentale de la voyelle (= noyau). De plus, selon Léon et
Léon (2013 : 77), nous pouvons percevoir l’accent secondaire par le biais
d’autres procédés, par exemple en augmentant la fréquence fondamentale de la
voix, comme cela est réalisé sur la figure 5. "S’il n’y a pas d’attaque (= consonne
initiale), on en fabrique une : le coup de glotte. Au lieu de prononcer «Encore !»
[ɑ̃ .kɔʁ] on peut ajouter le son [ˀ] au début et prononcer alors [ˀɑ̃ .kɔʁ] en
contractant brusquement nos cordes vocales. De plus, on peut aussi utiliser une
consonne de liaison, comme le [t], par exemple dans : «C’est idiot !»
[sε.``ti.djo]." (Léon et Léon, 2013 : 77)

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 L’accent libre

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3. L’intonation :

L’intonation correspond aux variations mélodiques se développant


parallèlement à l’axe temporel du discours. Elle est portée dans le discours
par les morphèmes intonatifs dont l’organisation dans la chaîne parlée
produira la ligne mélodique porteuse du sens de la phrase. Elle est ainsi un
phénomène suprasegmental qui se superpose à la construction
morphosyntaxique d’un énoncé dont elle enrichit le sens. L’intonation est
traduite dans la langue française par une variation des niveaux de hauteur
dans la voix du locuteur, portant sur des éléments segmentaux de la phrase
afin de les mettre en exergue ou au contraire de les fondre dans le continuum
sonore de la phrase prononcée. Elle correspond, au niveau acoustique, aux
variations de la fréquence fondamentale, qui peuvent être associées à des
variations de durée, voire d’intensité. Ces variations de la ligne mélodique de
l’énoncé, traditionnellement décrites par quatre niveaux de hauteur
(Delattre, 1966), traduisent le type de l’énoncé (modalité, aspect
informationnel du discours, implicite), ainsi que l’implication du locuteur en
termes d’attitude, d’intention dans son message et fournissent ainsi les
aspects pragmatique et expressif du message (Di Cristo, 1988 in Simon,
2004).
L’intonation est généralement définie comme des « variations de hauteur du
ton laryngien qui ne portent pas sur une syllabe, mais sur une suite plus
longue (mot, suite de mots) et forment la courbe mélodique de la phrase. »
(Dictionnaire de linguistique, Larousse)

Elle se manifeste par une montée de la voix qui est causée par une
augmentation de la vitesse de vibrations des cordes vocales. Les voix de
femmes sont généralement un octave supérieur à celles des hommes.

L'intonation a comme rôle linguistique d'ajouter ou de compléter le sens des


mots. En particulier, les variations d’intonation sont utilisées pour indiquer
les frontières d’unités ou de groupes de sens (fonction de démarcation).

Dans certains cas, l'intonation permet aussi d'opposer certaines phrases en


donnant un sens totalement différent à l’énoncé (fonction de modalisation):

Il neige. (question)
Il neige. (déclaration)

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Également, l'intonation permet de nuancer le sens de l’énoncé; par exemple,
lorsqu’on ordonne les syntagmes selon leur ordre d’importance dans
l’énoncé (fonction de hiérarchisation):

Le médecin {forte montée} n’est jamais là {légère montée} quand on


l’appelle. {descente}

Le professeur du cours {forte montée} a démontré {légère montée} qu’il est


facile {forte montée} d’apprendre la linguistique. {descente}.

3.1. Fonctions de l’intonation :

Selon Léon et Léon (2013 : 85), l’intonation ajoute une signification qui ne
peut parfois pas être véhiculée par les mots seuls. La fonction de l’intonation
est donc dite "significative". Ainsi, une même séquence de mots "tu"
"fermes" "la" "porte" peut être interprétée de différentes manières, selon la
mélodie qui accompagne la prononciation de la séquence sonore : Avec une
intonation montante, il s’agit d’une interrogation (une question), qui à l’écrit,
est marquée par un signe de ponctuation (un point d’interrogation) : "Tu
fermes la porte ?". Avec une intonation qui descend en douceur, il s’agit
d’une affirmation, qui à l’écrit, se marque par la présence d’un point : "Tu
fermes la porte". Avec une intonation qui descend plus brusquement, il s’agit
d’une injonction ou d’un ordre, et qui est marqué, à l’écrit, par la présence
d’un point d’exclamation : "Tu fermes la porte !". Léon et Léon (2013 : 85)
remarquent que le nombre d’informations que l’intonation peut véhiculer est
limité, et les répertorient sous le terme patrons, "c’est-à-dire des schémas
mélodiques significatifs, reconnus par tout le monde" (Léon et Léon, 2013 :
85). Delattre (1966a : 4) en a notamment déterminé dix "fondamentaux" :

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Tableau 3 : Dix intonations françaises les plus fréquentes et leur représentation schématique à l’aide de quatre
niveaux de hauteur avec des exemples (Delattre, 1966a : 4-5)

Les trois premiers patrons de ce tableau (3) remplissent une des fonctions
linguistiques de l’intonation appelée par Léon (2009 : 179) la fonction de
structuration et hiérarchisation : les deux premiers montrent qu’il y aura une
suite à l’énoncé (énoncés continuatifs) et le troisième que celui-ci est
terminé. Il paraît utile de souligner qu’au niveau linguistique toujours, les
sept autres patrons intonatifs aident à opposer "des types phrastiques non
marqués grammaticalement" (Léon, 2009 : 179), c’est-à-dire à apporter une
signification que les sons eux-mêmes ne véhiculent pas, ce qui désigne la
fonction significative de l’intonation, que nous avons déjà présentée dans la
présente section. Enfin, une autre fonction importante de l’intonation est la
fonction expressive, grâce à laquelle on exprime, entre autres, nos
sentiments, les nuances du sens liées au contexte du discours (Gak, 1989 :
66), ce qui est convenablement illustré par Passy (1980), cité par Léon (2009
: 195), sur l’exemple du mot "oui" (tab. 4).

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Tableau 4 : Représentation de la fonction impressive de l’intonation. Exemples repris de Léon (2009 : 195). └ -
registre haut ; ┌ - registre bas ; / et \ – la direction de la mélodie.

Comme nous l’avons vu, les trois premières intonations permettent de


structurer un énoncé. Ainsi, comme l’expliquent Léon et Léon (2013 : 86),
dans une phrase plus longue, l’intonation aide à distinguer les groupes
continuatifs, marqués par une intonation montante, des groupes finaux,
marqués par une intonation descendante. L’exemple suivant (tiré de Jean-
Jacques Rousseau) : "Un homme ne doit jamais rougir d’avouer qu’il a tort,
car, en faisant cet aveu, il prouve qu’il est plus sage aujourd’hui qu’hier",
peut être divisé en huit groupes accentuels : "[Un homme] [ne doit jamais
rougir] [d'avouer qu'il a tort ;] [car,] [en faisant cet aveu,] [il prouve] [qu'il
est plus sage aujourd'hui] [qu'hier]". L’intonation est montante à la fin des
sept premiers groupes (les groupes continuatifs) pour indiquer que la phrase
continue, et descendante à la fin du dernier groupe (le groupe final) pour
indiquer que la phrase est terminée. Le mouvement principal de l’intonation
(ascendant ou descendant) se place généralement sur la fin de chaque
groupe, ce qui rend l’intonation difficile à séparer de l’accentuation, qui se
place sur la dernière syllabe d’un groupe. Le sujet du syncrétisme de
l’intonation et de l’accentuation sera développé dans la section 1.3.4. Nous
allons maintenant examiner plus précisément les caractéristiques acoustiques
qui permettent de marquer l’intonation.
3.2. Caractéristiques acoustiques de l’intonation

L’intonation a été définie de manière perceptive comme une variation de la


courbe mélodique et donc de la hauteur de la voix. La variable acoustique
impliquée dans l’intonation est donc la fréquence fondamentale. Les autres
paramètres acoustiques, l’amplitude, la durée physique et la composition
spectrale, jouent également un rôle, toutefois mineur, au niveau de
l’intonation. Ainsi, par exemple, Grundstrom (1973), cité par Léon (2009 :
189), note qu’"un accroissement brusque d’intensité et un raccourcissement
de la voyelle finale d’un énoncé" peuvent remplacer un changement au
niveau de la mélodie dans la perception d’une question. Selon d’autres
études mentionnées par Léon (2009 : 189), un débit accéléré "tend à jouer le
rôle de marque de questionnement", la pause ou la chute d’intensité
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permettent de repérer l’incise, une intonation montante, ondulée, produite à
un tempo rapide, donne une impression de joie. Enfin, selon Léon (2009 :
194) toujours "la courbe mélodique de la plainte est plane, plus basse et à
tempo ralenti". En conclusion, nous devons souligner que malgré le fait que
l’intonation est "une donnée complexe et une approche paramétrique" (Léon,
2009 : 176), englobant l’ensemble des paramètres prosodiques, ce sont les
variations de fréquence fondamentale qui constituent le paramètre le plus
important pour marquer l’intonation.

● Conclusion:
La question que nous traitons dans le présent travail est relative aux phénomènes
suprasegmentaux ou prosodiques dans la langue française. Notre analyse s’est
faite sous un angle morphosyntaxique, c'est-à-dire les manifestations de ces
phénomènes prosodiques ou suprasegmentaux à travers des constructions
phrastiques, représentatives de la langue française. En réalité, notre étude a
présenté les faits relatifs au thème d’étude, puis a défini les notions de prosodie
ou de suprasegmental ou bien de morphosyntaxe, enfin elle s’est consacrée aux
exploitations et implications morphosyntaxique et sémantique. Après quoi, il en
ressort que le français, est sujet à une ambigüité, ambigüité qui du reste n’est pas
un défaut, une faiblesse, mais une richesse, une variété du fait des phénomènes
qui le traversent et ou le bouleversent et qui lui impriment un caractère
dynamique.

● Bibliographie.

GARDES-TAMINE, J. (1990) : La grammaire, phonologie morphologie,


lexicologie, deuxième édition, revue et corrigé, éd. Armand Colin, Paris, 152 p.

GARDES-TAMINE, J. (1990) : De la grammaire à la linguistique, l’étude de la


phrase, éd. Armand Colin, 2ème édition, Paris, 165 p.

18
DELL, F. et. al. (1984): Forme sonore du langage. Structure des représentations
en phonologie. Paris: Hermann.

GARDE, P. (1968): L’accent. Paris: Presses Universitaires de France. (Coll.


‘Sup’, série ‘Le linguiste’).

LACHERET-DUJOUR, A; BEAUGENDRE, F. (1999): La prosodie du français.


Paris: Éditions du CNRS.

DELAIS-ROUSSARIE E. (2000), « Vers une nouvelle approche de la structure


prosodique », Langue française 126, 92-112.

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