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École pratique des hautes études.

4e section, sciences historiques


et philologiques. Livret

Histoire de l'Afrique dans le monde gréco-romain


Jehan Desanges

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Desanges Jehan. Histoire de l'Afrique dans le monde gréco-romain. In: École pratique des hautes études. 4e section, sciences
historiques et philologiques. Livret 12. 1996-1997. 1998. pp. 88-89;

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88 Rapports sur les conférences 1996-1997 — Jehan DESANGES

HISTOIRE DE L'AFRIQUE
DANS LE MONDE GRÉCO-ROMAIN

Directeur d'études : M. Jehan DESANGES

Programme de l'année 1996-1997 : I. Les références éparses à l'Afrique et à l'Ethiopie dans /'Histoire
Naturelle de Pline l'Ancien (suite). — II. Les rivages africains de la mer Rouge et de l'océan Indien d'après le
Périple de la mer Erythrée (suite et fin), les jeudis de 16 h à 18 h.

I. On a pris en considération, cette année, les nombreux fragments « africains et


éthiopiens » du livre VIII (animaux « terrestres », ce qui, dans l'esprit de Pline, exclut les oiseaux
et les insectes, animaux « aériens ») et ceux du livre IX (animaux aquatiques).
Dans le livre VIII, c'est évidemment dans les développements consacrés aux animaux
sauvages et exotiques (§ 1-141) que l'on trouve le plus d'Africana et d'Aethiopica (une
quarantaine de passages, dont certains sont étendus). Au sein de cet ensemble, les sections
consacrées à l'éléphant et au lion, empruntées pour l'essentiel à Juba II (cf. les travaux de M.
Wellmann, F. Mûnzer, P. Ahlgrimm), ont une particulière importance. Le recours au traité Sur
la nature des animaux d'Élien s'impose souvent, car Élien a lui-même très largement emprunté
au roi de Maurétanie (M. Wellmann). Au reste, à propos de l'aptitude des pachydermes à
délivrer l'un des leurs tombé dans une fosse (§ 24), c'est Plutarque (Soll. anim., 17, 1) qui
désigne expressément Juba II comme la source de l'observation. Mais dès lors, compte tenu des
nombreux emprunts faits par Juba à la littérature hellénistique, et surtout alexandrine, les
épisodes relatés ne sont pas à situer nécessairement en Afrique du Nord. Ainsi, au § 25,
l'expression reges pourrait se rapporter aux rois lagides et non aux rois maures ou numides. Le
thème de l'éléphant implorant la pitié humaine en ramassant et agitant une branche d'arbre,
une touffe d'herbe, voire seulement de la poussière (Strabon, XVII, 3, 8, C. 829), est déjà
exploité par Tanusius, probablement antérieur à Juba IL
Deux remarques de détail parmi toutes celles qui se sont imposées. Au § 48, à propos de la
clémence des lions, il faut avec C. Mayhoff et F. Mûnzer, contre A. Ernout, lire crédit Iuba, et
non crédit Lïbya, puis audiuit (ms. a) et non audiui. Il s'agit, comme le prouve la comparaison
avec Solin, 27, 6, d'un témoignage vécu de Juba II et non de Pline lui-même. Le roi de
Maurétanie était alors apparemment en campagne contre les Gétules. Ce point sera développé dans
une contribution aux Hommages à Georges Souville. D'autre part, au § 227, les grenouilles qui
chantent, importées à Cyrène e continente, ne sont pas « venues du continent » (traduction d'A.
Ernout), mais de la « ligne de rivage » ou « front de terre », en l'occurrence de Batrakhos dans
le golfe de Bomba, à 60 km à l'ouest d'Antipyrgos (Tobrouk), cf. Stadiasme, 40-41, à un
emplacement où J.-R. Pacho vit en 1824 « une prodigieuse quantité de grenouilles » (Pour ce
sens particulier de continens, que nous avons méconnu dans notre édition, cf. H.N., V, 28).
Dans le livre IX, au § 173, on a montré que les escargots Solitanae (cf. aussi Varron, R., III,
14, 4) viennent en réalité de loi (Cherchel, en Algérie) et sont donc Iolitanae comme en H.N.,
XXX, 45. S'ils sont ici opposés à ceux d'Afrique, c'est qu'ils sont maurétaniens ; mais en XXX, 45,
ils sont considérés comme africains au sens large du terme.
II. On a mené à bien, avec l'étude minutieuse des §§ 15-18, la relecture de la partie
africaine du Périple de la mer Erythrée. L'évocation des « courses » de l'Azanie (la « Côte des
ports » des Arabes) a été confrontée aux indications données sur cette partie du littoral par
Ptolémée, Géogr. I, 17, 5, dans sa polémique avec Marin de Tyr. On a montré qu'au § 15,
l'expression « un peu au-dessus du libs » (le vent du sud-ouest) pourrait signifier au sud sud-
ouest plutôt qu'à l'ouest sud-ouest. On comprend dès lors que l'île de Menouthias (ici sans doute
Pemba) apparaisse au couchant du navire, engagé depuis l'archipel de Lamou dans une
navigation hauturière. Nous nous écartons ici de l'interprétation de L. Casson. Ptolémée,

École pratique des Hautes Études (Sciences historiques et philologiques), Livret-Annuaire 12, 1996-1997
Rapports sur les conférences 1996-1997 — Jehan DESANGES 89

comme Pline (cf. H.N., VI, 203), « descend » la rosé des vents dans le sens des aiguilles d'une
montre, alors que nombre de marins font « remonter » le vent dans ce sens.
Ont été ensuite discutées la localisation du comptoir ultime qu'est Rhapta ; l'organisation
de la région en une multitude de chefferies (et non pas l'existence d'un individualisme
anarchique suggéré par L. Casson, qui cependant adopte la conjecture faisant de ces indigènes
des agriculteurs) ; l'obscure expression « le royaume d'Arabie devenu [ou : constitué] le
premier ». C'est le premier sens : « devenu » qui est le plus vraisemblable selon nous, et il faut
faire intervenir le § 23 qui insiste sur la puissance de Charibaël : il règne à la fois sur deux
nations (les Homérites et les Sabéens) et cultive l'amitié des empereurs romains, dont il
pourrait bien tenir sa souveraineté sur Eudaimôn Arabia (Aden), cf. § 26.
Pour finir, on a discuté la traduction du début du § 18 par L. Casson, moins heureuse en cet
endroit que celle de W.H. Schoff. Epeiros, qui a été escamoté, signifie ici « littoral », comme
parfois le latin continens (cf. supra). Ensuite, le Périple se contente de rejeter plus au sud la
conception traditionnelle d'un océan méridional imaginaire tronquant le continent africain.
Ont assisté avec assiduité aux conférences : Mmes et MM. A. Blot, N. Boudouhou
(Marocaine, doctorat), M.-J. et R. Gourio, Cl. Lallier, J.-P. Molina, G. Piron, V. Regnot, Ch.
Samb (Sénégalais), M. Sebaï (Tunisienne), A. Touderti (Marocain) ; en quelques occasions : P.
de Bruyn, N. Chebbi (Tunisienne, doctorat), P. Schneider (agrégé, doctorat).

Activités et publications du directeur d'études :


Le directeur d'études a pris part au 7e Colloque de la Villa Kérylos, organisé par l'Institut
de France, avec une communication intitulée « Regards de géographes anciens sur l'Afrique
Mineure » (Beaulieu-sur-Mer, 4-5 octobre 1997). — II a exercé la présidence scientifique du
121e Congrès national des Sociétés historiques et scientifiques (ex-Sociétés savantes), à Nice
du 26 au 31 octobre, et prononcé le discours d'ouverture sur le thème : « La commission dite 'de
l'Afrique du Nord' au sein du C.T.H.S. : origines, évolution, perspectives ». — II a participé à la
Table ronde sur « Les frontières et les limites géographiques de l'Afrique du Nord antique »,
organisée au Centre G. Glotz de la Sorbonne par l'Université de Paris-X (2-3 mai 1997), avec
une communication : « Réflexions sur l'organisation de l'espace selon la latitude dans
l'Afrique du Nord antique ». — Du 5 au 20 mai, il a donné des conférences d'histoire de
l'Afrique antique aux Universités de Poznan, Torurî et Varsovie, ainsi qu'au musée
archéologique de Varsovie. — Les 25 et 26 juillet, il a présidé le 1er Colloque des études gréco-
orientales et gréco-africaines à Néapolis de Laconie, y donnant une communication.
Il a publié :
— « Sur la mer hippale, au souffle du vent hippale », dans Topoi, VI-2, 1996, p. 665-670.
— « Géographie de l'Afrique et philologie dans deux passages de la Chorographie de
Mêla», dans L'Africa romana,Xl/l, Sassari, 1996, p. 343-350.
— « Sur un épisode de la vie du poète africain P. Annius Florus », dans B.C.T.H, n. s.
Afrique du Nord, XXIV, 1993-1995, p. 83-88.
— Divers articles dans l'Encyclopédie berbère, XVII, 1996.

École pratique des Hautes Études (Sciences historiques et philologiques), Livret-Annuaire 12, 1996-1997

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