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Le Droit Saisi Par La Photographie 2001
Le Droit Saisi Par La Photographie 2001
BERNARD EDELMAN
LE DROIT SAISI
PAR LA PHOTOGRAPHIE
suivi de
Flammarion
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CHAPITRE PREMIER
Lén ineou,
droit, faisait dupdréfère,
si l'on roit, c'est-à-dire qu'il
qu'il lui donn ait« son
anim« ait
âm »e le
»
rapports de production,
concrètement d'autre
et de sanctionner part,
les idées dese
que
refléter
font
les hom m es de leurs rapports sociaux.
Cela, le m arxisme nous l'enseignait. Il nous ensei-
gnait aussi que les catégories juridiques disent sans
dire la réalité des rapports dont elles sont l'expres-
sion. Il nous enseignait plus encore : le mouvement
nécessaire par lequel ces catégories devienne nt relative-
ment autonomes, et la raison pour laquelle elles sont
pensées — j'entends dans leur fonctionnement —
com m e totalem ent autonom es, à leur façon.
C'est-à-dire qu'il nous donnait la théorie du
contenu concret de l'illusion anthropologique du
droit, qui croit tenir un discou rs éternel sur l'hom m e
éternel.
Par là, le droit prenait son ampleur véritable. Il
rem plissait l'espac e politique . Je veu x d ire qu'il sanc-
tionnait le pouvoir politique pour sanctifier la pro-
priété privée. En retour, il légitim ait <4 l'essence d e
l'homme ». Je dis en retour, car l'homme en est le
prix.
Je ne m'étendrai pas sur ces résultats acquis. Ils
nous sont acquis, à nou s tous qu i travaillons concrè-
tement à découvrir quotidiennement le réel pour le
transformer. Je ne m'étendrai pas non plus sur la
nécessité de la <4 critique d es arm es ». Le g laive de la
leur Archives
Les de philosophie
volume annuel de 1971du droitlepeuven
sous t publier
titre « Le Droit
investi par la politique », nou s autres, m arxistes, nous
n'en avons cure, puisque nous organisons des col-
loques où personne n e vient. Nou s autres, m arxistes,
nous préférons nous consacrer à la tâche urgente
d'assassiner nos a lliés ; Pasuk anis — dont il est temps
de reconnaître le génie — est accusé froidement du
crime « d'abstraction », « ce qu i l'inscrit inévitablem ent
en con tradiction a vec toutes les données de la b ataille
contemporaine où les analyses idéologiques ont leur
référence et leur problématique très concrètes 8».
Cette entreprise sans précédent est ravalée au rang
d'un e « illusion infantile 9 ». Voilà nos textes « théori-
ques » contem porains. C'est peu et c'est beau coup, si
l'on tient pour important le « sym ptôm e ».
La tâche qu e je me su is dévolue devient la suivante.
La con science du juriste est une m auvaise conscience,
sa m oralité, une im m oralité, son ordre pu blic, l'ordre
de la propriété privée, son « âme », c'est-à-dire son
illusion de ten ir les rappo rts juridique s pou r les rap-
ports humains, est l'âme d'un propriétaire et d'un
rentier, ses con cepts, l'exp ression nécessa ire du cap i-
tal. Et pu isque j'ai parlé de so n âm e, j'ajoute q ue j'en
parle pour ne plus en parler : « Le fait que l'âme et
la conscience interviennen t dan s le droit est, pour le
"critique", une raison suffisante de p arler de l'âm e et
de la conscience, là où il est question du droit, et de
7. Ibid., p. 108.
8. M. et R. Weyl, <■ Idéologie juridique et lutte des classes s, La
Nouvelle Critique, janv. 1972, n° 49.
9. Ibid.
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5/10/2018
dogmrend
faire atique
re juridique
l'âm e au d°. » Ou
roit p lutôt
et que so nje« dirai qu'il
âm e », faut
c'est sa
pratique.
théologie qui donne constamment aux idées
« La
bous
craint».laElle s'entoure
pollution d'un cordon
du politique sanitaire.
; pis que Elle
ça, de l'éco-
nomie.
Sa crainte désigne sa fonction.
Elle est l'indice de sa censure, pu isque sa cen sure
est elle-mêm e. Elle déno nce la politique dans son « a-
politisme 1 4 », l'économique dans l'abstraction même
de la loi, le théorique dans son empirisme. Elle se
dénonce d ans les formes m êm es qu'elle est contrainte
de prendre. Je songe à la forme sujet de droit. On y
reviendra.
Qu 'il suffise de dire notre ultime p rojet théo rique :
tenir un d iscours scien tifique su r le droit, c'est auss i
tenir le discours des conditions de la production
nécessaire des catégories juridiques d ans la pratique
du droit.
CHAPITRE II
L'ACTE DE NAISSANCE
DE L'IDÉOLOGIE JURIDIQUE
J'ai ddit
sence à l'instant
éniée. Je veuxqupréciser
e la dénég ation app elait la pré-
l'essentiel.
L'idéologie juridique se dénonce en dressant son
acte de naissance. Et son acte de naissance, c'est la
postulation que l'homme est naturellement un sujet
de droit, un propriétaire en puissance, puisqu'il
est de son essence d e s'app roprier la natu re.
L'« illusion » est universelle dans la p hilosophie sp é-
culative. Il s'ag ira de ten ir alors le discours de l'appro-
priation privative' de la nature, dans sa com binatoire
historico-sociale. Les deux « bonshommes » dont
parle Engels fixent le rapport idéal de l'échange, du
droit et de la politique. La robinsonnade est le « lieu
commun
théorie du» de l'économie
droit. La seulepolitique classique
différence et de la
: les juristes y
croient encore.
I. L'INTRODUCTION JURIDIQUE
Pour le droit,
personnalité le droit débute
juridique par laexiste
de l'homme personne
par :elle-
« la
m êm e et indépendam m ent de la possibilité pou r l'être
humain considéré de former une volonté 5 ». « On
appe lle person ne, dans la langu e juridique, des êtres
capables d'avoir des droits et des obligations. Plus
brièvement, on dit que la personne est tout sujet de
droit. L'idée d e personn alité, nécessaire pour donn er
un su ppo rt aux droits et aux ob ligations [...] est indis-
pensab le dans la conception traditionnelle du d roit 6 . »
« Dep uis l'ab olition de l'esclavag e, tout être hum ain
est une p ersonne. Il n'est pas nécessaire qu'il ait pleine-
ment conscience de lui-même et soit doué d'intelli-
ment de sa volonté
J'étudierai même.
plus avant le contenu concret de cette
forme sujet. Je voudrais simplement ici décomposer
la postulation juridique du sujet de droit.
Les textes disent : le sujet de droit est l'expression
générale et abstraite de la personne humaine ; ils
disent aussi : ce qui rend cette expression efficace,
c'est la capacité générale de l'hom m e à s'appa rtenir et
don c à acqu érir. Ils disent enfin : que si cette capacité
est le mode d'être du sujet, c'est que le sujet peut/
veut/ co nsen t/ est libre de s'appartenir et d'acqu érir.
Je peux alors avancer cette proposition en toute
rigueu r : la libe rté est la capacité juridique à s 'appar-
tenir,
peu à être propriétaire
x préciser de érir
: la liberté d'acqu soi (par
est laessence). Je
conséqu ence
juridique d e la libre propriété de soi-mêm e. L'esclave,
« objet de propriété, ne peu t guère être conçu com m e
sujet de droit 8 » ; la personn e, sujet de prop riété, peu t
être conçue comme sujet de droit.
À ce point, je pose la question : qu'est-ce qui est
interpellé dans le sujet de droit par l'idéologie juridi-
que ? Je laisse la question provisoirement en suspens.
Tel est l'état de cette toute première lecture.
7. Planiol, ibid., n 0 7.
8. Ibid., note 1.
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l'analyse de la
a constitué, marchandise,
pour forme
Marx, le point deélémentaire de cettel'immense
départ, de même, richesse »
édifice législatif et jurispru den tiel de ces m êm es sociétés s'ann once,
pour sa plus grande part, comme un prodigieux développement du
sujet de droit, l'élément le plus simple et le plus achevé du rapport
juridique.
10. Traité de droit rom ain, 1840, t. I, p. 326-327.
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11. L'Esprit du droit romain, 1878, t. IV, p. 319.
avancer
tire, d'un
comm g rand
e un pa s la science
p restidigitateur unjuridique,
lapin de sonM ichoux
cha-
pea u, cette d éfinition : le d roit sub jectif, « c'est l'inté-
rêt d'un homme ou d'un groupe d'hommes
juridiquement protégé au moyen de la puissance
reconnue à une volonté de le représenter ou de le
défendre 1 4 ».
On a fait descendre la volonté du ciel du Droit
romain à la terre du Code Napoléon et, sur cette
terre, la terre des hommes, on l'interroge « concrète-
ment ». Que veut la volonté ? Et la volonté, bonne
fille, répon d : je veux ce q ue je suis, ton intérêt. Et si
la société an ony m e l'interroge, elle répond tout aussi
sereinem ent : je veux votre intérêt qui est le m ien.
Ripert. — Le d roit sub jectif est un pouvo ir reconnu
el'instinct
dès la deuxième an ob
de tenir un née,
jet se
et man
de leifeste graduellem
défend ent
re, ainsi que
15. Planiol, Traité élém enta ire de d roit civil, éd. 1956, t. I, n" 4,
648.
16. Flexible D roit, <■ Pour une sociologie du droit sans rigueur »,
Libr. gén. de droit et de jurisprudence, 1969.
17. Ibid., p. 107.
18. Ibid., p. 108.
19. « Un chien, écrivait Stirner, qui voit un os au pouvoir d'un
autre ne s'écarte que s'il se sent trop faible. L'homme, lui, respecte
le droit de l'autre sur son os. » (L'Idéologie allemande, op. cit.,
p. 398.) Marx ironise : « Certes, un chien n'a jamais transformé un
os en phosphore, en poudre d'os, ni en chaux, pas plus qu'il ne
s'est jamais "rien fourré dans la tête" relativement au "droit" qu'il
a sur un os. Saint Sancho, lui non plus, ne s'est jamais "mis en
tête" d'analyser si le droit que les hommes revendiquent sur un os,
et que les chiens ne revendiquent pas, ne dépend pas du parti que
les hommes tirent de cet os dans la production, et que les chiens
ne tirent pas. » (Ibid., p. 399.) Notre saint national pulvérise saint
Sancho, après plus d'un siècle de réflexion : le chien s'était bel et
bien « fourré dans la tête » qu'il avait un droit sur son os... comme
le loup su r l'agneau .
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24. Ibid.
25. Althusser, op. cit. , p. 35.
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non pasCe
anime. dequi
lesfait
animer,
gigotermais de montrer ce
les marionnettes sequi les
trouve
toujours en cou lisses.
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CHAPITRE III
ouvrir
de la pralatique
voie,juridique.
à préciser le concept fondamental
A présent, ce dont je vais parler sem blera être un e
question infime, minuscu le, sans rap port avec l'am bi-
tion que je prétendais avoir. Il va être question en
effet du droit de la photographie et du cinéma, c'est-
à-dire d'une question plus que modeste : celle des
problèmes juridiques posés, soulevés par l'irruption
technique et économique du cinéma et de la photo-
graphie. Or, on va le découvrir, dans cette question
infime , il y a tout le droit en condensé, toutes les form es
qui le gouvernent, les visibles et les invisibles. Il y
a aussi des questions d'esthétique, d'économie et de
philosophie. Mais, tout
révélera, se formera cedes
dans dont il sera question
concepts se
juridiques.
C'est dire que nous nous contenterons de faire tenir
au droit le discours qui est le sien. Mieux : nous
tâcherons de le « surprendre » dan s son discours « sur-
pris » par la photographie et le cinéma. Nous le sur-
prendrons dans sa formation même, dans sa
décomposition/re-composition, dans son processus
d'absorption de ces nouveaux mod es d'appréhension
du réel.
Car, ce dont il va être fondam entalemen t question,
c'est de la production juridique du réel. Qu'on m'en-
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production d'un ne
et dont l'activité sujet dont
peut l'essence
être est
que celle la propriété
d'un proprié-
taire privé de l'autre côté, l'activité spécifique du
susceptible de contestation
des produ ctions du génie 7 . »est,
« Lasans
plus contredit,
sa crée, la celle
plus
légitime, la plus inattaqu able et, si je pu is parler ainsi,
la plus personnelle de toutes les propriétés, est l'ou-
vrage, fruit de la pensée d'un écrivain 8 . »
—Les écrivains :
Lamartine : l'idée générale. «La propriété et la
société se sont tellemen t identifiées l'une à l'au tre que
[...] le philosoph e reconn aît à des signe s certains que
l'absence, l'imperfection ou la décadence de la pro-
priété chez u n peu ple, sont partout la m esure exacte
de l'absence, l'imperfection ou la décadence de la
société 9 . »
droit.leNou
vue s tâcheronsqui
mouvement de anime
le construire, sans perdre
notre scène de
: le sujet
de d roit remet e n cau se ce qu 'il avait nécessairement
consen ti à « l'objectivité » du réel : sa prop re négation.
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I. DE L'HOMME-MACHINE...
d'autres
un e liberté que l'on ne
absolue saurait pa
n'est-elle mettre en images.conce-
s techniquement Aussi
vable 3 8 . »
est moyen et
s'affirmer, et non plus
que le fin ne
sujet en peut
soi, permet au que
s'affirmer sujetpar
de
la médiation d'une technique qui lui permet d'investir
le réel et d'en faire son dom aine privatif. La subjectivi-
sation de la machine renverse le rapport fin-m oyen. Le
travail de la machine devient travail du sujet, et ce
travail n'est qu'un moyen de la création elle-même.
La création n'est plus subordonnée aux « moyens » de
la création, ce sont les m oyens qu i sont subordonnés
à la finalité de la création. Autant dire alors que la
machine perd son « être » et qu'elle devient le moyen
d'être du sujet. C'est à cette condition qu'elle
devient digne de p rotection « en tant qu e prod uit uti-
lisable du ttravail
cha ngean
4 6 ». Et l'ineffable La m artine pou vait,
de montu re, s'écrier sans vergogne qu e la
ph otographie, « c'est mieux q u'un art, c'est un p héno-
protection
m légale qu'à
arqu e intellectuelle de la
son« acondition de porter
uteur, em preinte la
indis-
pensab le pour donner à l'oeuvre le caractère d'indivi-
du alité nécessa ire pour qu'il y ait création 4 8 ». Mieux
même : l'oeuvre doit refléter la personnalité de son
auteur et révéler « l'effort et le travail personnel de
celui-ci susceptible de l'individu aliser 4 9 ».
C'est dire que, si l'appareil ph otograph ique est bien
rentré dans la mouvance du sujet, il en subit à son
tour la dom ination : ici comm e là, le réel n'app artient
au sujet qu e si celui-ci l'investit.
Le processus est signifiant : la machine ne revient
au su jet que d ans les limites du rapport fondam ental
sujet/création
le du plus
réel n'apparaît réel. comme
À telle enseigne qu e,lesitôt
« créé » par que
sujet, la
m achine retrouve magiquem ent sa fonction prem ière
de rep rodu ction. Si j'utilise, sur un b illet de banq ue,
une photographie aérienne de la Cité en l'intégrant
dans un n ouvel ensemble, on ne peut m e le reprocher
puisqu'il n'y a eu que re-production d'un site natu-
rel 5 0 ; si je me contente de prendre la photographie
d'un lac où voguaient, par hasard, six voiliers, il y a
certes, là, un choix heu reux, mais qui est plus du res-
Et cette
toute réalisation
produ ction est prend la forme
produ ction d'unmême
su jet.du
Unsujet
sujet,:
c'est-à-dire, plus précisément, cette catégorie où le
dans lespar
C'est rapports
là qu ede
je pcomm
roduction.
encerai.
I. ÉCONOMIE ET CINÉMA
56. Ibid., p. 3.
Elle
en deauxporté, en ce qu
d irections : mi onop
concerne le cinéma
olisation a m éricain,
de la matière pre-
mière intellectuelle — ach at de livres, de nou velles, de
best-sellers — et fondam entalement m onopolisation de
la main-d'oeuvre intellectuelle par contrat. « Les compa -
gnies constituèrent un véritable pool du talent et se
prêtèrent des stars, des réalisateurs, des scéna ristes,
des techniciens 5 9 . » Le contrat apparaît comme l'ins-
5 7 . Huret, Droits d'auteur et ciném a, thèse, Paris, 194 5.
5 8. Première Chambre civile, Cour de cassation allemande,
16 juin 1923, cité par Brecht, op. cit., p. 197 .
5 9 . Mercillon, op. cit., p. 197.
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désigne de
qu'objet la droit.
mercantilisation
Le star systemde
en l'homme en tant
est un e illustration
parfaite. Les contrats sont draconiens : la vedette sous
contrat perd une grande partie de sa liberté ; il y est
prévu non seulement l'organisation de sa vie
publique, mais aussi de sa vie privée. La rupture du
contrat entraîne l'inscription sur une liste noire 6 6 ...
Quant aux salaires extravagants, ils ne sont qu'une
pièce idéologique de ce systèm e.
En bref, le film est une marchandise qui subit la
« loi du profit « et tous ceu x qu i y participen t se trou-
vent soumis à la structure monopoliste du cinéma.
« Le film n'est pas un p roduit pour lui-mêm e, ce n'est
pas
permuet
nm oyen
aux d'expression
finan artistique.
ciers un p laceme Sa ppou
nt utile roduction
r leurs
capitaux, elle est industrielle au tant que faire se peut,
et la standardisation du produ it m ontre qu'un critère
commercial réside à tous les stades de l'indu strie 6 1 . »
Ce q ue je relève de cette analyse, pour m on propos
particulier, c'est le procès fondamental suivant : la
structure monopoliste du capital financier et indus-
triel entraîne la monopolisation de la matière pre-
mière intellectuelle. Je veu x aller plus loin, et dégager
le rapport entre cette structure m onopoliste et la caté-
gorie du sujet créateur collectif; mais je dois au para -
vant engager u ne rapide controverse.
P. Lebel,
tend que « ladans son ouvrage
production Cinéma
de cinéma et Idéologie,
n'est pré-
qu'une pro-
duction de spectacle, et cette production, malgré la
matière qu'elle met en oeuvre et la matière sur
laquelle elle s'inscrit, n'entre pas dans le processus
d'appropriation matérielle du monde par les hom-
mes 6 2 ». Selon lui, en effet, « l'infrastructure com plexe
du cinéma » appartiendrait à « la sphère des super-
structures ° «. Si Marx avait lu ce texte, les yeux lui
63. Ibid.
sujet
La collectif.
classe ouvrière ne s'était pas trompée sur le
caractère monopoliste de la protection cinématogra-
phique. La CGT avait mis sur pied en 1937 un plan
de nationalisation des m oyens de production cinéma -
tograph iques (laboratoires et stud ios) et des grand es
entreprises de distribution 64.
II. LE CAPITAL-AUTEUR
naux rreconnaissaient
auteu du film, compte le producteur
tenu comme l'unique
des responsabilités finan-
cières qui lui incombaient. Mais la lutte menée par
les auteurs pour faire reconnaître leurs « droits » de
créateurs intellectuels a fait apparaître en clair la
combinaison de la production intellectuelle et de la produc-
tion industrielle. Elle a fait « apparaître » un sujet col-
lectif entraîné « dans le processus de la technique,
considéré comme un processus de production de
marchandise 6 5 », et dont les intérêts moraux sont
subordonnés en d ernière instance au profit ma ximal
du produit film. Cette apparition-révélation qui fai-
sait entrer dans la « sphère de la création » le scéna-
riste, le dialoguiste, le metteur en scène, etc., a
produit pour le droit un effet esthétique révolution-
cinéma.
Je n'ignore pas que les détours que je décris sont
profonds. Mais ces détours sont ceux-là mêmes que
le droit a em pru ntés, et ils sont signifiants. Ils prou-
vent la perpétuelle contradiction entre les représenta-
tions idéologiques que véhicule le discours juridique,
et la pratique de ce discours lui-même. Et ils prou-
vent ce fonctionnement même de l'idéologie juri-
dique q ue B recht décrivait génialemen t : « Ce qu i est
drôle, c'est que eux (justement eux !) ne pourraient
plus exercer leur pratique ni s'ils aban donna ient leur
idéologie ni s'ils la concrétisaient 6 6 . »
un cerveau etdans
confondent u n talent particulier,
le produit ma is dont 6tous
de l'ensemble se
8 . » Ce
texte de juriste est un texte matérialiste, indu bitable.
La description métaphorique est, en même temps,
description du procès réel de la création cinéma togra-
phique.
Le procès de production est l'essence (bourgeoise)
du film. L'art est tout à la fois « produit » et « mo-
men t » du ca pital. « Le film n'est pas produ it pour lui-
du
en procès duce
elle, que capital,
soit lapuisque le capital
catégorie se réalise
du sujet, que ceaussi
soit
celle de la création. L'oeuvre cinématographique a son
« auteur », même si l'auteur n'est plus un sujet mais un
procès. Les documents sont irréfutables, et ils sont
d'une importance inouïe : le droit va avouer ce que
nous n'aurions jamais espéré qu'il puisse avouer : le
véritable sujet créateur, c'est le capital. Cet aveu, il va
l'incarner dans l'idéologie même du sujet : le capital
devient la person ne m êm e qu 'il interpelle, et il prend
le masque du sujet, il s'anime, parle, et passe des
contrats. Le capital ne peu t se passer de son cher sujet
de d roit, puisque le su jet de droit est son sujet.
Je le dis, les docu m ents sont irréfutables.
La Cour de Paris, le 1 6 ma rs 1 9 3 9 , statuait en ces
termes : « Considérant que la protection légale de la
propriété artistique p eut, dan s la catégorie toute spé-
ciale et encore nouvelle de la création cinématogra-
phique, être pleinement assurée aux producteurs,
puisque, sans son travail intellectuel, l'oeuvre n'existe-
rait pas [...] ; que le producteur, c'est-à-dire la per-
sonne physique ou morale dont la profession est de
réaliser des ouvrages cinématographiques, se mani-
feste incontestablemen t par un e activité créatrice dans
l'ordre de l'intellect, conforme à celle que l'on exige
de tout au teur ; qu'il im agine et exprime les idées qui
constitueront le canevas, qu'il exerce sur toute la mise
en scène et l'exécution une influence déterminante, et
nelle,
tiples soit par délégation
auxiliaires qu'il
spécialisés, l'exercerémunérés
dûment sur les mul-
au
fixe ou au forfait, et d'ailleurs interchangeables avec
d'autres employés de même spécialité, qui vont pro-
céder à la besogne plus ou moins intellectuelle ou méca-
nique qui leur est impartie ; que la répartition par le
prod ucteur du travail intellectuel [...] ne saura it avoir
pour conséquence de donner à tous ceux qui contri-
buent à faire parcourir à l'oeuvre ses étapes succes-
sives, un droit personnel sur l'exploitation du film
[...] »
Le producteur est le propriétaire de la « création »
qu'il produit. Le sujet capital est affublé du masque
de la création
fluence à toutes
déterminante du les étapes
capital industrielles.
devient, L'in-
pour le droit,
l'influence créatrice ; la direction financière, une direction
créatrice ; les auteurs, des prolétaires payés à la tâche
qui accomp lissent une oeu vre-« besogne » et non un e
activité créatrice, à mi-chemin entre l'homme et la
m achine, et qu'on peu t m ettre à la porte s'ils ne d on-
nent pas satisfaction. Le capital prend le visage de
l'Art, mais garde les méthodes nécessaires du capital :
celles d'acheteurs de la force de travail, celles de
gardes-chiourme, celles de contractants privilégiés.
« Les auteurs du film sont tous ceux qui, dans leur
participation à l'élaboration de l'oeuvre ciném atogra-
ph ique, manifestent activité créatrice, à condition
une pas
toutefois qu'ils ne soient subordonn és au produc-
teur par des contrats de louage d'ouvrage ou de servi-
ces ". » La révélation est étonnante : l'activité
créatrice — ce qui exprime « la personnalité de
l'homme » — peut être soumise à un contrat. Autre-
ment dit, il suffit de clau ses contractuelles pour trans-
former une activité créatrice en dépense pure et
simple de force de travail. Le contrat n'est plus un
acte de volonté pure et simple, il permet, dans son
noblesse du verbe
croissement désignait
des forces le temps du
productrices cinéma
dans . L'ac-
l'industrie
cinéma tograph ique socialisait le sujet créateur. Et le
sujet collectif capitaliste désignait ce qu'était le cinéma. Je
ne veux pas d ire que le producteur sera évacué dans
cette dialectique, car ce serait évacuer le capital, je
veux dire que la lutte pour la reconnaissance d'un
sujet créateur dévoile la vérité dialectique du procès
cinématographique : la coexistence forcée de l'art et
de l'industrie, qui ne peut exister que sous la forme
sujet. Et je pourrais ajouter que cette conscience
nécessaire de la coexistence n'est rien d'autre que le
dévoilement objectif de la socialisation objective des
forces productives.
80. Chez Brecht, la rhétorique du sujet est évacuée par l'évacua-
tion même de la parole sujet. e Ce ne sont pas les mots qui, en
dernier ressort, effectuent la critique, ce sont les rapports et les
non-rapports internes de force entre les éléments de la structure de
la pièce. » Althusser, Pour Marx, Maspero, 1965, p. 143.
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tuellement l'idéologie
cinéma « bourgeois bourgeoise.
», c'est Ce
tout à la qui
fois ladétruit le
catégorie
du sujet de droit créateur par l'avènement du sujet
collectif et l'épan ouissem ent esth étique de cette caté-
gorie par l'avènement de « l'essence » du ciném a.
La phase industrielle de la production cinémato-
graph ique produ it sa contradiction : l'oeuvre (avouée)
collective. Le sujet de droit créateur est pulvérisé en
sujets de droit créateurs d'un procès artistique : le
film. La loi française du 1 1 mars 1 9 5 7 prend acte de
ce sujet. Si elle adm et bien en effet, en son article 1 4 ,
qu'ont « la qualité d'auteur d'une oeu vre ciném atogra-
ph ique » la ou les personnes ph ysiques qui réalisent la
création intellectuelle de cette oeuvre, et que « sont
présumées, sauf preuve contraire, coauteurs d'une
oeuvre ciném atograph ique réalisée en collaboration :
1°) l'auteur du scénario, 2°) l'auteur de l'adaptation,
3°) l'auteur du texte parlé, 4°) l'auteur des composi-
tions m usica les [...], 5 °) le réalisateur [...] », elle subor-
donne doublement
de cette les auteurs
subordination à la l'articulation
désigne production. Laessen-
place
tielle du procès. D'une part, « [ es auteurs de
l'oeuvre cinématograph ique [...] sont liés au x p roduc-
teurs par un contrat qui, sauf clause contraire,
emporte cession à son profit du droit exclusif d'ex-
ploitation cinématographique [...] » (article 17) ;
d'autre part, « si l'un des au teurs refuse d'achever sa
contribution à l'oeuvre cinématographique [...], il ne
pourra s'opposer à l'utilisation, en vue de l'achève-
ment de l'oeuvre, de la partie de cette contribution
déjà réalisée [...] » (article 15).
C'est le langage même — noblesse oblige — d'un
avocat général. « L'oeuvre cinématographique fait
appel au travail, à l'imagination, au sens artistique
d'un grand nom bre, en m ême tem ps qu'à la science,
et enfin à la puissance financière. C'est le "facteur
économique" qui exerce par nécessité une influence
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contrat entre
réservons producteur
le droit et réalisateur.
de procéder « Nous nous
à toute modification
ou coupu re qu e nou s jugerions nécessaires [...] ; sauf
impossibilité, vous serez consulté au sujet de ces
m odifications ; toutefois, si un désa ccord de q uelqu e
nature qu'il soit devait persister avant, pendant ou
après la produ ction, nous resterions seuls juges de la
décision finale. Tou jours en ce cas, nous no us enga -
geons, sur votre demande éventuelle, à retirer votre
nom du générique et de la p ublicité. » Il peut, dans sa
logique, condamner le producteur à des dommages
et intérêts pour préjudice « moral » ; mais, dans sa
logique qui est d'assurer le bon fonctionnem ent de la
production,
ploitation deil son
peutfilm.
abandonner au producteur
Le droit moral disparaîtl'ex-
au
lement en choses
toutes ces scène, indispensables
mais de transposer
86 Ildans la «réalité
donne la vie ».
2. Histoire et création
il y a la réalité
lorsqu'il et il y aau
se transporte le coeur
« coeurm»ême
de la
de réalité. « C'est
la réalité que
l'art télévisuel s'épanou it dans un dom aine qu 'il est le
seul à p ouvoir parfaitemen t explorer 9 8 . » On va dire :
montrer la réalité telle qu'elle est, c'est encore la
<
4créer ». Un tribunal en fait l'expérience amère et
ingénue. Ayant à juger si une émission de télévision
pou vait être légalemen t protégée par la législation sur
les droits d'auteur, il s'exprim e en ces term es. « Il suf-
fit, dit-il, d'assister à quelqu es scènes de m ontagnes,
prises dans des paysages suggestifs et bien choisis, où
on voit des paysans dans leur chalet ou encore au
marché de fromages échangeant ceux-ci contre de
l'argent avec un courtier typique, bien vivant et pris
sur le vif, etc., pour être convaincu qu'il s'agit bien
d'une création 9 9
. out ce dont on est convaincu »
» <
4
perm
sur ceettre
q ui d'articuler
sem blerait leêtre
concept de su
le m oins r-app ropriation
susceptible d'ap-
propriation privée : l'histoire.
Le problème concret s'est posé en ces termes : un
cinéaste am ateur avait tourné, par hasard, l'assassinat
de Kenned y, film de 4 80 images en 8 m m qu'il s'était
empressé de vendre à l'éditeur de Life Magazine.
Ultérieurement, un livre fut écrit sur cet événement
(Six Seconds in Dallas par Josuah Thompson), qui
reproduisait illicitement 22 images du film. Un pro-
cès fut engagé, et Th omp son soutint pour sa défense
trois ordres d 'argum ents : 1 . Il s'agissait d'un événe-
ment d'actualité ; 2. sur lequel aucune création ne
s'était effectuée ; 3. et qui ne pouvait être approprié
98. Ibid.
9 9 . Tribunal de grande instance, 28 avril 1971, Revue internatio-
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L'histoire
abstraite est le fond,
de toute le domaine
propriété, public, l'expression
et l'auteur lui donne
forme, c'est-à-dire qu'il donne la forme de la pro-
priété privée à un fond considéré comme propriété
privée.
La sur-appropriation du réel se constitue par le
simple enregistrement du réel. On ne saurait aller
plus loin 102.
J'ai « mobilisé » les contradictions « au sein des
choses et de s événeme nts » et j'ai ma intenu « les évé-
nem ents eux-m êmes en m ouvement pendant toute la
durée des recherches 1 0 3 ». L'idéologie du sujet, je l'ai
prise au mot, pour en signer la faillite ; mais c'est une
cette faillite
faillite
même qui « ambiguë ». JeCa
la fait vivre. veux
r le dire que
sujet, c'est
loin d e craindre la
contradiction, en fait son pain quotidien. En retour-
nant contre le sujet ses propres armes, il faut savoir
que ces arm es périront avec lui.
CHAPITRE IV
direQua ndplement
sim je dis qu
qu'ile fau t clore
l'hom m e, alors
dans le
sa procès, je veux
description de
l'h om m e, ne rencontre plus qu'une essen ce privative
qui le renvoie à lui-même, que la propriété privée du
ph otograph e ne rencontre plus q ue la p ropriété privée
du photographié ; je veux dire que, dans ce réel pré-
constitué en prop riété privée, la prop riété privée s'est
incorporée « dans l'homme lui-même ». Je veux dire
encore qu e la reprod uction du réel re-produ it la pro-
priété privée comme « essence » de l'homme, et que
l'objectivité historique de la propriété est radicale-
ment supp rimée.
La juridicité du réel s'accomp lit comm e produ ction
du réel dans la détermination de la propriété elle-
même.
J'ai dit que le procès créateur est le procès de la
propriété privée elle-mêm e. Je voud rais préciser plus
avant. Ce procès ne devient total qu'en produisant sa
concurrence. Je dirais plus : cette concurrence est la
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p aire
de produire en soi, en sa Forme même, le
rapport de la personne à elle-même, le rapport du
sujet qui se prend lui-même comme objet. Ce carac-
tère tout à fait étonnant désigne le rapport juridique
de soi à soi ; il désigne que l'hom me investit sa propre
volonté dans l'objet qu'il se constitue, qu'il est à lui-
même u n produit des rapports sociaux. Ce que je vais
donc décrire en définitive, c'est la nécessité pour la
personne h um
c'est-à-dire en aine de prendre
dernière la de
instance Forme Sujet
prend de Forme
re la Droit,
générale de la marchandise 2.
Je m'occuperai, en juriste, des conditions juri-
diques de cette Forme, et je m'occuperai encore des
contradictions qui s'y développ ent.
Car, si le discours du sujet de droit sur l'histoire
telle qu'elle a pu se u produire » — et j'entends par
là les conditions juridique s du d iscours historique —
s'avoue comm e le discours même d u procès de la pro-
priété privée, il se dép loie d ans la contradiction la plus
cruciale. En une seule proposition, je pourrais dire
que, dans le même temps que l'homme est proprié-
taire de son
dépasse histoire, l'histoire
la propriété privée. Lade pratique
l'homme juridique
achève et
enregistre la contrad iction. On verra com m ent elle la
résout.
buts
droit »existence
de sa personnalité, i. e.nom
sociale : son ce qui
, sondonne
droit au sujetson
moral, de
h onneu r, son imag e, sa vie privée... et dans le mêm e
moment où ce capital est formé il produit les conditions
de sa circulation. La personne hu ma ine est propriétaire
d'elle-même et donc de ses attributs. Aussi, lorsque
l'un de ces attributs lui est arraché sans son consente-
ment, lorsqu'un tiers s'en empare comme objet,
Leçons de droit civil, 4' éd., 1970, t. I, n° 622.) Et ces auteurs ont
cette phrase magnifique : s Le droit français répare le dommage
moral, et cette réparation, dans presque tous les cas, est ordonnée
en argent ; comment concevrait-on qu'une valeur pécuniaire soit
ainsi introduite, à titre de réparation, dans le patrimoine, si elle ne
venait y remplacer une autre valeur, pécuniaire ou morale, qui a
disparu [...] » ! (Ibid.) C'est génial, mais honnête ! En effet : si le
dommage moral est réparable en argent, cela veut bien dire que la
perte morale est une perte d'argent tout autant qu'une perte d'ar-
gent est une perte morale !
7 . Marx, Le Capital, op. cit., liv. I, t. I, p. 178.
8. Ibid., p. 95 .
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faite
Et de
s'il lui-m
a été êm e : il», ac'est
« volé été qu
« volé ». libre d e lui-mêm e,
'il est
sa liberté lui permettant tout à la fois d'aliéner ses
attributs et de les revendiquer.
M ais je voudrais préciser ici le concept. Il ne p rend
son efficace réelle qu'en mettant aussi en circulation
marchande la liberté de l'homme. Et il faut introduire
l'exigence idéologique qui double et clôt la forme
sujet de droit : le sujet est à lui-même objet de droit
tout en dem eurant « libre » de soi-mêm e. La liberté se
prouve par l'aliénation de soi, et l'aliénation de soi
par la liberté. Je veux dire par là que l'exigence idéo-
logique de la liberté de l'homme se déploie dans la
structure du sujet de droit constitué en objet de droit,
ou en core, se déploie dan s l'essence de l'hom m e « qui
est lui-même placé dans la détermination de la pro-
priété 9 ». C'est précisément parce que la propriété
app araît dans le droit comm e essence de l'homme que
l'homme, objet de contrat, va prendre la forme juri-
dique du contrat lui-même qu'il est censé produire
librement I °. En d'autres termes, l'homme, en se
patrimonialisant, en se d onnan t sous la forme sujet/
attributs, loin de se dire esclave de sa patrimoniali-
sation, y trouve sa véritable liberté juridique : sa
capacité. Et je dirai mieux : l'homme n'est véritable-
ment libre que dans son activité de vendeur : sa
liberté, c'est se vendre, et se vendre réalise sa
liberté 11.
la vendeten
même debloc une
libre fois
qu'il pour
était se toutes, il se vend
fait esclave, lui-
de mar-
chand ma rchandise 1 3 . »
personnalité. (Principes
juridique, qui »n'a de la philosophie
certainement lu ni Marxdunidroit,
Hegel,§ 67.) Un auteur
retrouve spon-
tanément le même rapport : u [...] abandonner pour toujours sa vie
privée [...] serait aussi contraire à la liberté de l'individu que de
céder à vie son travail. » (Badinter, Le Droit au respect de la vie
privée, op. cit.)
1 6 . Tribunal civil, Yvetot, 2 mars 1932, Gazette du Pa lais, 1932,
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Il est temps
pénétrer ensemdble
e « faire
dansunlespeu de droit
arcanes ». Nousdire
— j'allais allons
les
entrailles — de la doctrine. Je voudrais vous montrer
comm ent on raisonne dans la « théorie pure du droit »,
ou plutôt comm ent on ne raisonne pas en cet espace uni-
versitaire qui est aussi l'espace politique d'un certain
savoir. Et vous verrez alors se déployer l'extraordinaire
subtilité « inefficace » de s juristes, qui prennen t leurs
raisonnem ents... pour de l'argent comptant !
Ce q ue d it la doctrine définit ce qu 'est la doctrine :
l'appendice professoral du capital. Il faut opérer ce
corps malade d e sa propre indigence.
La doctrine, en justifiant le sujet de droit, défend
son bifteck.
nourrit Il n'importe
de son qu'il
cadavre. Ce soit faisandé
qu'elle : elle
veut, c'est se
légiti-
mer un sujet qui soit tout à la fois libre de son âme
et de son corps, qui puisse vendre son corps en
conservant son âme. On a compris sans peine que
c'est aussi d'elle-même qu'il s'agit.
Nous retrouvons en bonne place notre Du Gues-
clin du D roit, notre « sociologu e sans rigueur », notre
chevalier Carbonnier, sans peur et sans reproche, qui
a revêtu l'armure étincelante de la dogmatique. Le
Ch evalier écrit, sans sourciller et sans céder un pou ce
de terrain, que notre Droit a repoussé depuis long-
temp s l'idée que l'être hum ain fût propriétaire de son
corps,
absurdeparce qu el'objet
entre cette idée
et leimp liqu de
sujet ait droit
une confusion
17 . ette
rigueur dans la non-rigueur aurait de quoi surprendre
dernières lignes
tendances : « Lindividualistes,
d'abord e libéralism e lui-mêm e, avec fait
a beaucoup ses
pour mettre en valeur l'idée de Personne. » Tenez-
vous bien : « Cette notion pose de grands problèmes
philosophiques. » Voyez ses références : Huisman et
Vergez, Métaphysique (F. Nathan, p. 130-136). Je
continue : « Cependant, le personnalisme, dont le
véritable fondateur est E. Mounier, synthétisant
toutes les idées émises [pas plus I], voit dans la per-
sonne une liberté engagée dan s le monde et parmi les
p. 119 .
sant
d'un au p ouvoir
d roit de l'hom me sur
de la personnalité son pcorps
ayant le d'assurer
our fin caractère
la protection des intérêts moraux et matériels de
l'hom me par rapport à son corps 2 5 ». Ce qu i veut dire
en bon français : l'hom me peut se vend re, à condition
qu 'il le fasse au n om ... d'un droit de la personna lité !
La m ontagne a accouché d'une souris.
Je n'irai pas plus loin, car le lecteur doit être fatigué
de ces exhumations, et je laisserai le reste — qui est
immense — à la « critique rongeuse des souris ».
J'ajouterai simp lement deux choses.
Ces p rises de p osition qui se veulent théoriques sont
contredites par la pratique la plus vulgaire du d roit. En
effet, si on m e « vole
de la revendique r, car», on
disons, mon sans
m 'utilise image, j'aiconsen-
m on le droit
tement. Le p réjudice qu e je subis s'analyse juridique-
men t en une violation de mon consentement. Le droit
instaure ainsi un rapport nécessaire consentement/
préjudice. Car, si l'homme n'est pas propriétaire de
lui-mêm e, au nom de qu oi pourrait-il subir un p réju-
dice qui le lèse dan s sa prop re représentation de lui-
m ême ? La pratique condu it à cette analyse juridique
imparable : tous les « attributs » de la personne sont
des droits contractuellement protégés.
Q uant à la « ma uvaise conscience » de la Doctrine,
je peux la repérer da ns son discours latent, qui pose
l'adéquation « de droit naturel » de la personne
humaine et du sujet de droit. L'interpellation idéolo-
gique — toute personne est sujet de droit — en deve-
nant catégorie éternitaire — le sujet de d roit est toute
personne — plonge la doctrine dans un affreux
embarras. Car, si la Forme Sujet est bien la forme
nécessaire de l'hom m e écha ngiste et producteur, elle
est par ailleurs cette Forme dans laquelle doivent
aussi se réaliser la liberté et l'égalité. Et, pour « eu x »,
le dilemm e devient le suivant : le sujet de d roit réalise
gique.
L'Histoire légitime l'existence du sujet, dans
l'exacte mesure où elle fait retour au Sujet. Le Sujet
est la p ropriété privée s'historicisant q ui se d istribue
dans les sujets de l'histoire. Et si je donne le contenu
concret de ce procès, je peux dire alors que dans la
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histoire,
sujets del'Histoire
droit. Parest
ce nécessairement
procès mêm e, leladroit
propriété
tout àdes
la
fois sanctionne les rapports de production au sein
même de l'individu — et nous retrouvons la forme
ma rchand e du su jet — et révèle le rapport imaginaire
des individus aux rapports de production — la pro-
priété privée est « réellem ent » l'« essence h istoriqu e »
de l'hom me. M ais ce rapport imaginaire devient à son
tour efficace da ns la p ratique m ême : l'individu se vit
et agit réellement comme si la propriété privée était
son « essence historique », et les tribunaux lui « dé-
m ontrent » qu 'il a raison, puisqu 'il en a « le droit ».
Ce que je vais donc aborder m aintenant, c'est la pré-
tention h istorique
triplement, i.e. dande la trois
s les Formfigures
e Su jet.oùJej'ai
la pu
dévoilerai
la sur-
prendre. La première figure du ballet est un carrousel,
celui des cadets de Sau mu r. Il va désigner ce fait éton-
nant : l'appropriation privée d'un événement histo-
rique. La deuxième figure est plus sinistre : une da nse
de mort à Haïti. Elle désignera ce fait plus étonnant
encore : un sujet propriétaire de sa politique. La troi-
sième figure se pare d'un voile mystique p our cacher sa
nud ité. C'est la danse des voiles, mais là est sa contra-
diction m ême : si en effet, l'Hom me est propriétaire de
l'Histoire, l'histoire de l'homme réalise et dépasse la
propriété privée. O n verra a lors que le voile m ystique
dont leprécisément
n'était sujet se parait,
quepud iquement
le voile et juridiquem
de la morale. ent,
Ce sera le
dernier acte de « notre drame », l'ultime m étamorph ose
de notre Forme. Et il restera, pour clore définitivem ent
le procès, à démontrer qu 'en dernière instance, ce n'est
plus l'homm e qu i signifie la propriété, mais la propriété
qui signifie l'hom me.
I. LE CARROUSEL
et de fiction.etDans
exceptionnel le cadreles
au thentique, d'un haut ont
auteurs fait introduit
d'armes
une aventure am oureuse pu rement imaginaire et créé
divers personnages dont les traits ph ysiques ou intel-
lectuels ne reproduisent pas ceux des combattants
vivants ou morts qui ont participé à l'événement. Il
en est ainsi tout particulièrement du comm anda nt de
l'École qui ne rappelle le véritable commandant que
par ce que le rôle a retenu des qualités de courage,
d'autorité, de décision, de lucidité et de compétence
dans l'art militaire, qui furent celles de l'officier de
1940 2 6 .
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29. Ibid.
risme
l'État. de la « haute » banque, l'autre Nom : celui de
Alors, ce que je voudrais prouver, pièces en main,
c'est ce transfert qui permet de sauver de la main
droite ce que l'on tue de la main gau che.
L'épouse de Lambrakis assigne en justice Costa-
Gavras, le réalisateur du film Z, et Vassilikos, l'auteur
du roma n d 'où le film fut tiré. Elle sou tient qu e, mise
directement en cause dans ces deux oeuvres, sa vie
privée a été violée. Tel est le lieu juridique. Il est aussi
un lieu historique : peut-on interdire, au nom d'un
droit de propriété, un discours historique ? Je vous
donne les m otifs du jugem ent du tribuna l de Pa ris, je
vous
Lesles commdu
motifs enterai ensuite.
tribunal sont de deux ordres. Dans
une première, série, il chante la mort du sujet de droit.
« La vie et la m ort de Lam brakis appartiennent à l'his-
toire politique d e la Grèce [...] ; il s'agit d'événe m ents
qui ap partiennen t désorma is à l'histoire, et dont nul
ne sa urait interdire le récit 3 1 . »
Je traduis. L'Homme, en même temps qu'il s'ap-
partient en tant que su jet, appartient au « patrimoine
public », à l'Histoire. Cette appartenance ne se
construit plus sur le concept de propriété, mais sur
celui d'histoire objective. L'histoire n'est plus le pro-
cès de la propriété privée, i.e. le procès d'un individu
qui n'est que le représentant de sa m archand ise, mais,
Forme m archande
Je donne du sujet.
m a seconde série de m otifs.
« Le héros du film manifeste en réalité pour son
épouse un amour profond et durable ; son image le
suit dans ses voyages, et ses pensées vont vers elle
dans les mom ents qui précèdent sa m ort, tandis que
la femme de Lambrakis, sous les traits d'une actrice
grecque, Irène Papas, impose l'admiration et le res-
pect. »
« De toute façon, dit le tribunal, non seulement le
personnage de Z, inspiré de Lambrakis, est évoqué
avec sympathie, respect et admiration, mais sa
compagne est décrite comm e un m odèle de tendresse
et Et
de le
dignité. » nous fait cet aveu : la loi du genre
tribunal
comporte « nécessairement une part d'interprétation
subjective ».
Je vais essayer d e « saisir sur le vif » le passage du
sujet de droit à la morale, sur le terrain même où il
se produit. Le tribunal nous dit : puisque l'Homme
appartient à l'Histoire, on peut utiliser sa vie en se
passant de son consentement, ou du consentement
de ceux qui ont été mêlés à sa vie. Mais il nous dit,
dans un même mouvement : on se passe de ce
consentem ent, à condition qu e les choses soient pré-
sentées dignem ent, respectueusem ent..., sinon, tant
le livre que le film au raient pu se voir frapp és d'inter-
diction.
Autrement dit, le tribunal se réserve un droit au
nom de la m oralité.
La moralité devient source du droit, mais le droit dont
elle se prétend la source est le droit mêm e de la m ora-
lité. La Forme marchande du sujet est bicéphale : la
première tête porte un bonnet blanc, la seconde tête
un blanc bonnet. Et qu and l'une se couvre, l'autre se
découvre. L'ordre suprême du sujet est la moralité,
mais cette moralité fait retour à l'homme, constitué
en objet de droit, qu'elle sanctionne, en dernière
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côté, la sur-appropriation
priétaire permet
« par l'esprit » de la de de
matière, se l'autre
rendre côté,
pro-
cette ma tière hum aine ou naturelle possède la m ême
structure que cette sur-appropriation. Il s'agit ainsi
d'une bipolarisation d'un réel constitué en objet de
droit, et dont chaque terme est la condition de
l'autre.
Pour en terminer, et c'est une fin qui sera retour
aux sources, je voudrais vous faire assister au d ernier
avatar de notre personnage. On savait que l'homme
signifiait la propriété, on va app rendre, noir sur blanc,
qu e la propriété signifie l'hom m e, que les « attributs »
de l'homme, ses « émanations » peuvent être un
immeuble, une maison, des murs. Cela voudra dire,
concrètemen t, que non seulement l'hom m e se repré-
sente dans la ch ose, mais que la chose est, concrète-
ment, l'essence de l'homme.
taines conditions.
Or, ces conditions existent, elles sont m atérialisées
sur le billet d'entrée. Lisons-le. On y a interdit « la
photographie de l'immeuble ainsi que les croquis et
peintures qui prendraient cet im m eub le pour sujet en
vue d e la comm ercialisation de s produits obtenus ».
Le peintre croit avoir gain de cause. Si l'on parle
de « reproductions », cela ne peut concerner « une
peinture où l'immeuble n'est qu'un sujet transformé
par l'inspiration artistique ». Et si l'on parle de
tout3 7 aussi
et Un
si aucun droitestd'auteur n'est enmais
cau se . »
troisième plus profond, mys-
tifié. « En vérité, dit-il, voici que le droit à l'image
fait de nouvelles et singulières conquêtes ! Reconnu
et défendu com me un d roit de la p ersonnalité, le voici
qui s'insinue parmi les prérogatives du droit de pro-
priété et vient défendre les choses et non plus seu le-
ment les personnes... 3 8 . » C'est assez bien vu, ma is les
juristes sont décidément indécrottables. « Tenu » à la
justification juridiqu e, notre au teur fait alors ap pel à
la notion d'usage abusif d'un droit de reproduction
qui discréditerait le propriétaire. On peu t donc abu ser
d'une m aison com m e on abu serait... d'une femm e !
En définitive, on a posé l'adéquation homme/
chose, de telle sorte que la chose signifie tout au tant
l'« essence » de l'hom m e que l'« essence » de l'hom m e
signifie la chose.
Je suis parvenu au terme de mon analyse « juridi-
que ». Il m'apparaît à présent nécessaire d'en
Bredin.
repren dre les résultats pou r les porter plus loin, c'est-
à-dire pou r les situer dans leur lieu véritable.
L'introduction des techniques modernes de repro-
duction du réel m'a permis de repérer le fonctionne-
ment du droit sur un terrain vierge, de décrire
comm ent un continent nouveau p assait sous la coupe
juridique. Ce que j'ai voulu démontrer, c'est que la
constitution de ce nouvel objet de droit, le réel, s'est
effectuée dans la catégorie juridique prédéterminée
du sujet. Autrement d it, le procès décrit est « apparu »
comme le procès d'un sujet (de droit). Certes, si j'ai
fait surgir la nécessité économique d 'un tel procès, ce
surgissemen t s'est, en qu elque sorte, dissous dans les
catégories juridiques. Il fallait montrer cette dissolu-
tion, car elle signifiait aussi le rôle du fonctionnem ent
de l'idéologie juridique. Il fallait montrer que tout
s'était « toujours-déjà » passé, et que ce « toujours-
déjà », qui est aussi d'une certaine façon un e aller-
retour », est le toujours-déjà » du su jet, c'est-à-dire
<4
ployeur
salaire « «librement
libre », de» travailleur « libre
débattu, pour », et» de
« juger du «travail,
libre »
de m êm e lui a-t-il suffi, pour « p rodu ire » un droit du
cinéma et de la ph otographie, de mettre en oeuvre les
catégories de propriété (littéraire) et d'attributs de la
personnalité, qui renvoient en dernière analyse à la
catégorie du sujet de d roit.
Cette « continuité » juridique, il fallait la faire fonc-
tionner sur son propre terrain, pour en abstraire les lois de
son fonctionnement. Mais, ces lois elles-mêmes, il ne
suffit pas de les constater ; encore faut-il explique r la
dernière instance de leur fonctionnement. Il faut en partir
pour y revenir. Aussi je termine ici, en ann onçant déjà
le Je
terrain
tiensdàe préciser,
m a reprise : la théorie
d'entrée de jeude la e,valeur.
, qu sur ce ter-
rain nouveau, je parlerai et ne parlerai plus de ma
dém onstration juridique, ou plutôt, j'en parlerai « en
silence ». Je ne rep rendrai pas, en tant que telle, mon
analyse, mais je la supposerai présente tout au long
du discours que j'annonce ici. Je dem ande au lecteur
cet « effort », qu i sera le dern ier.
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III
http://slide pdf.c om/re a de r/full/e de lma ndroit-sa isi-pa r-la -photogra phie 90/185
2. Ibid.
dou ble
par titre : d'une
lesquelles pa rt, les
sont fixés dans lesorts
rapp formes nécessaires
sociaux, d'autre
part dans le fait que ces Form es ne fonctionnent que
pour la produ ction. Et elle n'apparaît pas à un d ouble
titre aussi : d'une pa rt, parce q ue ces Form es néces-
saires peuvent formellement prétendre à la suffisance
d'elles-mêmes, et d'autre part, parce que leur fonc-
tionnem ent occulte, si je puis dire, dan s son fonction-
nem ent m ême, ce p our qu oi elles fonctionnent.
Et si je « concrétise » rapidement ces détermina-
tions, je dirai d'un côté que c'est la Forme sujet de
droit qui fixe les rapports sociaux et perm et de m ettre
en circulation le « réel » en tant qu'objet de droit, et,
de l'autre côté que cette Forme « apparaît » comme
catégorie autonom e, indépenda m m ent de toute « his-
toire ».
THÈSES 105
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CHAPITRE V
THÈSE I 107
chandise.
Cette sphère nous découvre ainsi ses lois imma-
nentes : chaq ue individu est propriétaire (du fruit de
son travail ou de son travail en puissance), et son tra-
vail est un travail social, quoique isolé, un travail
qui, bien qu'étant particulier, participe à l'universel.
« D'où, en produisant pour la société, dont chacun
travaille à son tour pour moi da ns une autre sph ère,
je ne produ is que pou r moi 2 . » H egel ne dit pas au tre
chose : le système des besoins réalise, malgré
l'égoïsme individuel, l'universalité de la société civile.
Alors, on peut dans l'idéologie du droit affirmer
que tout se passe d ans cette sphère ; que l'essentiel,
ce sont
l'H om m eles échanges,
; que et que
les formes les échanges
juridiques réalisent
qu 'impose la cir-
culation sont les formes mêmes de la liberté et de
l'égalité ; que la Forme Sujet déploie la réalité de ses
déterminations dans une pratique concrète : le
contrat ; que la circulation est un procès de sujets.
Ce que je me propose de démontrer en laissant
volontairement de côté ce qui se passe « ailleurs »,
dans le « laboratoire secret de la production », c'est
qu e le Droit prend la sphère de la circulation com m e
donné n aturel ; que cette sphère, prise en soi comm e
absolu, n'est rien d'autre que la notion idéologique
qui porte le nom hobbesien, rousseauiste, kantien ou
hégélien, de société
la circulation, ne faitcivile ; et que le Droit,
qu promulguer en fixant
les décrets des
droits de l'homme et du citoyen ; qu'il écrit sur le
front de la valeur d'échange les signes de la prop riété,
de la liberté et de l'égalité, ma is que ces signes, dans
le secret « ailleurs », se lisent en exploitation, escla-
vage, inégalité, égoïsme sacré.
Ce que je vais donc aborder maintenant, ce sont
les déterminations de la sph ère de la circulation,
le « statut » concret/idéologique d e la p ropriété, de la
liberté et de l'égalité. Et on verra que le droit fixe ce
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2. Ibid., p. 214 .
THÈSE I 109
4. Ibid., p. 224.
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5. Ibid., p. 225.
THÈSE I 111
minations objectives
concrète de de la valeur
toute idéologie est lad'échange. La base
valeur d'échange.
Qu'a fait d'autre Hegel, en développant l'Idée de
droit, que donner l'expression pure du mouvement
de la valeur ? Et la « dialectique » des Principes de la
philosophie du droit, qu'est-elle d'autre sinon la mani-
festation d e plus en plus abstraite de la valeur ? Car,
en fin de compte, l'Idée de droit hégélienne — ou,
plutôt, ce qu'est l'Esprit dans le Droit — c'est la
valeur en attente d'elle-m ême .
Dès lors que le procès de la valeur d'échan ge est le
procès m êm e de la liberté et de l'égalité, dès lors que
les individus ne sont qu e des « éq uivalents vivants »,
le procès
sujet, de procès
et le la valeur
dud'échan
sujet, ge devient de
le procès le procès du
la valeur
d'écha nge. Autrem ent dit, dans la sph ère de la circu-
lation, tout se passe (et ne se passe p as) entre sujets,
qui sont aussi les sujets de ce grand Sujet qu'est le
capital. Et comme, par ailleurs, la circulation esca-
mote (en la révélant) la prod uction, on peut dire alors
que toute produ ction se ma nifeste comme p roduction
d'un sujet.
Je peux alors répondre à la question ouverte par
Althusser : s'il est vrai que toute idéologie interpelle
les individus en sujets, le contenu concret/idéologique
de l'interpellation bourgeoise est le suivant : l'indi-
vidu est interpellé comm e incarnation d es détermina-
tions de la valeur d'échange. Et je peux ajouter que
le sujet de droit constitue la forme privilégiée de cette
interpellation, dans la mesure même où le Droit
assure et assume l'efficacité de la circulation.
Mais comme, par ailleurs, la circulation ne peut
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THÈSE I 113
THÈSE I 115
Elle embrasse
industrielle l'ensemble
d'une étape et dde la vie
éborde commerciale
par et
là mêm e l'État
et la na tion, bien qu 'elle doive, par ailleurs, s'affirm er
à l'extérieur com m e na tionalité et s'organiser à l'inté-
rieur comme État. Le terme de société civile apparut
au xviii e siècle, dès que les rapports de propriété se
furent dégagés de la communauté antique et médié-
vale. La société civile en tant que telle ne se développe
qu'avec la bourgeoisie ; toutefois, l'organisation
sociale issue directement de la production et du
commerce, et qui forme en tout temps la base de
l'État et du reste de la su perstructure idéaliste, a été
constam men t désignée sous le même nom ". »
Ces deux textes permettent de spécifier la notion
de société civile qui, contrairement aux premières
appa rences, ne désigne rien d'autre que la sph ère de
la circulation.
Dès L'Idéologie allemande, Marx décrit la « société
civile » comme une notion idéologique. En effet, d'une
part, ce terme recouvre « l'ensemble des rapports
matériels des individus à l'intérieur d'un stade de
développement déterminé des forces productives » ;
d'autre part, il recouvre aussi « toute l'organisation
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Mais
lieu decepassage.
lieu de rencontre est, en même temps, un
En e ffet, toutes les catégories qu i fond ent la notion
de « société civile » — prop riété privée, sujet, volonté,
liberté, égalité — sont « spécifiées » par l'idéologie
juridique. Le sujet est spécifié en sujet de droit ; la
produ ction du sujet en production du su jet de droit ;
la liberté et l'égalité, en liberté et égalité de tout su jet
de droit. Mais, dans le même moment, cette spécifi-
cation est contraignante. Ce qui veut dire que, si
l'idéologie juridique ne fait que spécifier « juridique-
ment » l'idéologie bourgeoise, dans le même mouve-
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THÈSE I 1 1 7
THÈSE I 1 19
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16. Ibid.
CHAPITRE VI
THÈSE
ET EN II : LE
FIXANT DROIT, DONNÉ
COMME EN ASSURANT
NATUREL
LA SPHÈRE DE LA CIRCULATION,
REND POSSIBLE LA PRODUCTION
THÈSE II 121
contrat que
valentes : Docelles contenues
ut des, dans
do ut facias, do les formules
ut des et faciojuridiquemen
ut facias. (Jet donne
équi-
pour que tu donnes, je donne pour que tu fasses, je fais pour que
tu donnes, je fais pour que tu fasses). » (Le Capital, liv. I, t. II,
p. 211.) Et Marx, dans le même passage, montre comment le
salaire, dans la mesure même où il prend la forme du rapport
monétaire « rend invisible le rapport réel entre capital et travail et
en montre précisément le contraire ». (Ibid.)
Dan s la mesure où la valeur d'échang e est devenue la base réelle
de la production, le Droit peut jouer alors le rôle primordial de
sanctionner les rapports économiques du procès lui-même.
Le rôle du droit, dans un mode de production déterminé, ren-
voie donc au rapport circulation/production, i.e., en dernière ins-
tance, au rapport que la valeur d'échange entretient avec la base
réelle de la production.
2. Marx, Un chapitre inédit du Capital, La Pe nsée, op. cit.
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THÈSE II 123
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CONCLUSION
le
rie,sens
sonde la lutte idéologique,
« contenu il nousdes
réel » : l'abolition en donne la Tou
classes. théo-
te
revendication prolétarienne de l'idée bourgeoise
d'égalité vise, en dernière instance, l'abolition des
classes.
Et c'est là que je rejoins enfin la faillite de la « science
bourgeoise » du droit, et la théorie d'une pratique th éo-
rique du droit : le droit, retourné contre lui-même,
nous livre les contradictions de sa pratique, et, conjoin-
tement, les limites de sa « science ».
CONCLUSION 127
La frontière idéologique :
Lorsque, en France et en A ngleterre, « la bourgeoisie
s'empa re du pouvoir politique, dès lors, dans la théorie
et dans la pratique la lutte des classes revêt des formes
de plus en plus accusées, de plus en plus menaçantes.
Elle sonne le glas de l'économie bourgeoise scienti-
fique. Désorma is, il ne s'agit plus de savoir si tel ou tel
théorèm e est vrai, m ais s'il est bien ou m al sonnan t,
agréable ou non à la police, utile ou nuisible au capital.
La recherche désintéressée fait place au p ugilat payé,
l'investigation consciencieuse à la mauvaise
conscience, aux m isérables subterfuges de l'apologéti-
que 4 ».
Si la science bourgeoise du droit remplit tout l'es-
pace politique, cet espa ce politique lui-mêm e est celui
de la lutte des classes. Le Droit reproduit cet espace
lui-même dans la sérénité à jamais troublée de ses caté-
gories.
La science bourgeoise du droit a vécu. Elle est ph ilo-
sophiquement morte avec Kant et Hegel ; elle est
chaq ue jour enterrée dans le cercueil de sa p ratique ,
car « la pratique veille au che vet de toutes les idéolo-
gies, au pied de leur berceau et de leur cercueil 5 ».
Je voudrais achever sur la leçon que Brecht avait
tirée de son expérience avec les tribunau x.
« En essayant de défendre nos "droits" dans une
6 . Brecht, ibid.
7. Ibid., p. 215.
8. Althusser, Pour Marx, op. cit., p. 14, n. 1.
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CONCLUSION 1 29
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2. Le nom du personnage
le M ais, du
nom parpersonnage.
a illeurs, l'auteu r peut
« Le dépôtlui-mêm
commee marque
déposer
d'un nom tiré de la littérature et du ciném a est parfai-
tement licite «, dit le tribunal de Paris. « La marque
nom inale ainsi déposée doit être protégée contre l'uti-
lisation commerciale, pour des produits similaires,
d'une dénomination identique ou semblable » (Trib.
grande inst. Paris, 3 janv. 1978, Rev. internat. dr.
auteur, avr. 197 8.11 9).
Le nom du personnage peut donc s'autonomiser,
devenir à lui seul une marque qui, à son tour, désignera
n'importe quel autre produit. Ou, mieux encore, ces
produits deviendront une marqu e du personnage. Par
exem ple, qui
un d épôt
la société qu i exploite
« comporte une nom
Tarzan peu tdeinvoquer
enclature plus de
cent produits et services, souvent désignés par des
termes génériques, depuis les "produits chimiques
destinés à l'industrie", jusqu 'aux "travaux de spécia-
listes avec ou sans rapport avec la conduite des
affaires", en passant par les armes à feu, la m outarde,
les pantou fles, le tabac, l'hôtellerie, les "maisons pour
enfants et convalescents", etc. ; qu'en fait tous les pro-
duits et services que l'on peut imaginer de comm ercia-
liser sont couverts par la marque Tarzan » (Trib.
grande inst. Paris, 3 janv. 19 7 8, préc.).
Le personnage peut, enfin, bénéficier d'une vie
privée.
3. La vie privée du personnage
héritiers
annonceurs eux-mêmes
à u tiliser «leautorisant
personnagelargement
à d es finsd'autres
pu blici-
taires, leur préjudice moral, qui apparaît ainsi comm e
de p ur p rincipe, sera entièremen t réparé pa r l'alloca-
tion d'une somme purement symbolique » (Trib.
grande inst. Paris, 21 janv. 1 9 7 7 , préc.).
Enfin, à l'occasion d'un film parodique tiré des
aventures de Tarzan, celui-ci s'indigne : ce film pré-
senterait « de très nomb reuses séquen ces obscènes »,
et leur accumulation risquerait de blesser la pudeur
des spectateurs (Trib. grande inst. Paris, 3 janv.
1978, préc.). Et le tribunal prend soin de répondre
qu'eu égard au caractère parodique de l'oeuvre « ex-
cluant tout risque
des thèmes, d'assimilation
l'intégrité des épique
de la création personnages et
de Bur-
rough s ne peut se trouver com prom ise, ni son myth e
légendaire ébranlé ».
La doctrine a d'ailleurs curieusement désavoué le
tribunal. « À juste titre, dit M. Desbois, Burroughs
aurait pu être offusqué et ses héritiers le furent...
Point n'est besoin de rech ercher si le droit moral, au
sens de l'art. 6, a été violé ; le débat se situe au-delà
des frontières du droit d'auteu r, dans le dom aine des
droits de la personnalité » (note Desbois au D.
1979.99)
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défendre son
bénéfices qu'iloeuvre,
pouva itmen
aisretirer
n'était; pas
qu'ilind
a aifférent
ccepté uaux
ne
formule tenant compte des deux objectifs qu'il pour-
suivait simultanément... » (Paris, 23 nov. 1970, Rev.
internat. dr. auteur, juill. 19 7 1.7 4 ).
Qu e résulte-t-il de ces analyses ? Le personnage est
un être bloqué, voué à la répétition ; ce qu i lui donne
existence produit aussi sa propre mort, puisqu'il ne
peut cha nger sous peine de devenir un autre et donc
de se perdre. Or, c'est précisément le « même » dans
lequel il évolue qui lui donne sa force ; c'est le senti-
m ent de sécu rité qu'il procu re qu i lui donn e sa réali-
té ; sa permanence rassure puisqu'il est toujours
reconnaissable.
C'est pou rquoi il est l'aboutissem ent, la réalisation
d'une certaine écriture. En lui l'écriture se clôt sur
elle-même, et, à la limite, l'auteur disparaît. Il s'est
aliéné dans la machine infernale qu'il a créée de ses
propres mains. L'écriture se représente dans autre
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Ainsi, lede
mesures fait de reprodu
Carmen, ire dan
l'opéra de sBizet,
une chan son deu x
ne constitue
point une contrefaçon, dit le tribunal de commerce
de la Seine, dès lors que l'effet obtenu est parod ique :
« que bien loin d 'exercer la m oindre concurrence, soit
artistique, et alors préjudiciable à la réputation du
compositeur Bizet, soit commerciale, et alors dom-
mageable aux intérêts de son éditeur... le succès de
la chanson de Mireille et Franc-Nohain souligne en
quelque sorte celui de Carmen » (Trib. com. Seine,
26 juin 193 4, Gaz. Pal. 1 9 3 4 .2.5 9 4 ; Cf. aussi : Trib.
grande inst. Paris, 9 janv. 1970, D. 1 9 7 0 .6 7 9 ; JCP
19 7 1.11.16 64 5 , note Françon, Erratum 1 6 6 7 1 bis).
Telles sont « les lois du genre » d e la pa rodie ou, si
l'on préfère, les obstacles qu'elle doit franch ir. Alors,
elle peut retrou ver sa fonction transgressive, sa faculté
de dénoncer, « avec la permission du législateur [...]
tous les ridicules [d'un au teur] sans qu oi il n'y aurait
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gestes
tral épiques
; qu'on dont T arzan
l'y retrouve, deest toujours
roman le hérosoucen-
en roman de
bande dessinée en bande dessinée, sous ses attributs
perm anen ts qui sont la force, la beauté, le coura ge, la
générosité ; que, s'il recourt pa rfois à la violence, c'est
afin de redresser des torts et pour la défense des
opprimés ; que certes, et malgré son extraordinaire
force physique et morale, il lui advient, rarement du
reste, d'être vaincu, mais que finalement il sort tou-
jours triomphant de ses épreuves ; qu'il est sinon à
l'abri de toute tentation de la chair, du moins invaria-
blement m aître de ses sens et, tel un ch evalier m édié-
val, poursuit ses aventures errantes en restant fidèle à
sa dam e,
séparé. » Jane, son épouse, dont il est le plus souvent
On peut relever dans ces motifs ce qui constitue
l'essence du héros : des qualités positives perma-
nentes — force, beauté, courage, générosité ; l'utilisa-
tion de la violence à bon escient ; la maîtrise de la
cha ir, aisémen t supp ortée par l'éloignem ent où il est
de sa femm e.
Ainsi se dessine un héros « positif », qui condense
un certain idéal collectif. Cette positivité, d'ailleurs,
est antinom ique d 'une am bivalence ; en effet, c'est le
manque total de contraire qui donne au héros son
essence héroïque.
Parétat
d'un ailleurs, TarzanC'est
de nature. ressuscite
ce quelerelève
rêve nostalgique
le tribunal
dans une seconde série de motifs. « Attendu qu'à
l'évidence, ainsi du reste que le héros l'explique lui-
mêm e dans l'un des rom ans, Tarzan puise sa vigueur
ph ysique et m orale dans le milieu primitif où il a vécu
enfan t et où, le plus souve nt, il continuera à vivre, et
dans l'existence ascétique et très proche d e la natu re
qu'il y mène ; que son cadre de vie, parmi les indi-
gènes et les animaux, avec lesquels il comm unique et
dont il est le protecteur attitré, est toujours em preint
de merveilleux et souvent de fantastique (châteaux
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même
déga ge »àreprésente cet idéal
peine de l'état du moi
de nature primitif, qui» se
« préhistorique de
la horde sauvage.
Or, la parodie, imaginée par les cinéastes, va
reprendre trait pour trait cet infantilisme, et le tour-
ner en dérision par un su rprena nt travail du n égatif.
http://slide pdf.c om/re a de r/full/e de lma ndroit-sa isi-pa r-la -photogra phie 132/185
b) La liberté parodique
sexuel,
et dont est essentiellem
la survie ent épreuves
dans les l'anti-héros voujamais
n'est é à l'échec,
due
qu'au h asard ; que Jane, jeune mégère braillarde, sen-
suelle, dominatrice, est l'opp osé d e la d ouce et fidèle
épouse de Tarzan... ; que le singe Chitoon, lubrique
et tout mépris pour l'impuissant Tarzoon, est évi-
dem me nt la réminiscence inversée de la dévouée Chi-
ta ; que par le retournement des personnages et de
leur rôle, l'auteu r a, bien évidemm ent, non pas calqué
m ais parodié les éléments em pruntés à l'oeuvre origi-
nale, créant par le contraste — lequel est l'un des
grands ressorts psychologiques du rire — les effets
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2. La subversion du sens
«efficace,
Voici le héros le froussard
le plus plus laid, lequi
plussegrotesque, le moins
puisse imaginer.
Snoopy est l'anti-héros, le h éros qui ne donn e pa s de
complexe à ses admirateurs. Et l'on peut en rire à
l'aise : ce chien hydrocéphale réunit toutes les qua-
lités de l'individu m oyen m ais poussées à l'extrêm e...
Sa niche est le centre du monde, elle est le monde :
soleil, lune, étoiles, saisons, nuages, ciels bleus s'y
succèdent. La n iche de Snoopy est l'axe de l'univers »
(B. Frappat. « Snoopy, l'anti-héros », in Le Monde,
6 déc. 1974).
On connaît ses sentences péremptoires : « Mordre
ou ne pas mordre, telle est la question. » Snoopy est
le petit-bourgeois
devan absolu
t sa pâtée, Lu cy l'adm:oneste
lorsqu'il danse de
sévèrement : «joie
Tu
ne serais pas si gai si tu savais tout ce qui se passe
dans le monde ! » ; « Ne me le dis pas, répond
Snoopy, pou r vivre heu reux vivons stupide. »
Snoopy est donc tout le contraire de Ta rzan, tout le
contraire du h éros positif; il est par excellence l'anti-
héros. De ce fait la parodie ne peut consister qu'en
un déplacement interne du sens.
L'ouvrage litigieux fut attaqué sur deux fronts :
1 ° les dema ndeurs soutenaient qu'un grand nom bre
de ces dessins constituent une atteinte à la personna-
lité de l'oeuvre d e S chu lz, et en d onnent une vision le
plus souvent
avec son espritpornograph ique ensérie
; 2° une seconde contradiction
de d essinstotale
por-
terait atteinte aux droits de reproduction de l'oeuvre
elle-même, puisque certains des illustrateurs se
seraient contentés d'em pru nter à Ch arles Sch ulz ses
personnages en les recopiant purement et simple-
m ent, à tel point que le lecteur ne p ourrait distingu er
le dessin contrefaisant du dessin original (Trib.
grande inst. Paris, 1 9 janv. 1 9 7 7 , Rev. internat. dr.
auteur, avr. 1 9 7 7 . 1 6 7 ) .
Le tribunal définit d'abord, en l'espèce, les pro-
cédés parodiques : « Attendu qu'il n'est pas contes-
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CONCLUSION
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1990,parelative
ture à «d'auteu
r le droit la protection
r » ' estd es
pouoeuvres
r nous d'architec-
un e excel-
lente occ asion de faire le point sur le rapport en tre le
droit d'auteur et la « rue ».
En effet, l'art. 704 a ), paragr. 120 (a), de cette loi,
dispose qu e « le droit d'auteur sur une oeu vre d'archi-
tecture qui a été c onstruite ne c omp rend pas le droit
d'interdire la fabrication, la distribu tion ou la présen -
tation au pu blic d'images, de peintures, de photogra-
phies ou d'autres représentations picturales de
l'oeuvre, si la construction dans laquelle l'oeuvre est
incorporée est située dan s un lieu pu blic ou dans un
endroit normalement visible d'un lieu public » 2 . Par
voi rejeté par Civ. 1", 7 janv. 1992, D. 1992.IR.47 ; pour l'affaire
par exem
ser la ple) — le droit
reproduction ou laabsolu d'autoriser
représentation ou de
de son oeurefu-
vre.
Tout se passe com m e si l'espace qu e l'oeuvre occup e
était provisoirement affecté par le droit de propriété
littéraire, qu'il s'agisse d'espac e p ub lic ou privé.
Néanmoins, on constate une exception remar-
qua ble à cette approp riation : lorsqu'un sp ectac le est
un événement, ou lorsqu'un monument tient lieu
d'événement, les droits d'auteur s'effacent, totale-
m ent ou p artiellem ent. On a alors le sentimen t d'une
sorte d'ex ceptio historiae : le public reconqu iert sa rue,
son p avé, et la collectivité son em pire.
3 — On notera d'ailleurs que, dans toute cette
affaire, le carac tère person na liste du droit d'auteu r se
fait jour sous les ausp ices de l'anthropomorphisme. Les
tribunaux ont tendance à protéger la « maison » à
l'instar de la person ne o u la person ne à l'instar de la
maison. Ici comme là, on est en présence d'un droit
à l'image. Lorsqu'un e oeuvre arch itecturale est située
dans un espace privé, on défend son intimité ; lors-
qu'elle est située da ns u n espace p ublic, on retrouve
les mêmes règles protectrices que celles appliquées
aux personnes ; enfin, lorsqu'une oeuvre — ou un
spectacle — constitue un événement, on voit encore
qu e le droit lui con fère le m êm e régime qu 'à une p er-
sonne historique ou à un symbole.
du T héâtre des C ham ps-Ely sées TGI Paris, 4 avr. 1990, RIDA juill.
1990.386 ; et, sur appel, Paris, 11 juill. 1990, ibid. oct. 1990 .299.
3. J. Ginsburg, Les Nouvelles lois des États-Unis, RIDA janv.
1991.366.
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A . L'espace privé
protection
retrouve les de
mêmlaesvie privéelorsqu'il
m arques et au droit
s'agitàdel'image
proté-
ger la « maison ».
6 — On con naît les décisions rendu es sur le fonde-
ment de l'art. 9 c. civ. ou, antérieurement à la loi du
17 juill. 19 70, sur le fondem ent d e l'art. 1382 c . civ.,
aux termes desquelles le domicile appartient au
domaine de la vie privée. Ainsi a-t-on vu successive-
ment juger que la reproduction de photographies
prises dans l'hôtel particulier d'une personne sans son
autorisation portait atteinte à sa vie privée 7 ; qu'il en
était de même de la simple adresse d'une résidence
secondaire 8 ; d'une ph otograph ie prise au téléobjectif
9
d'une
dan personne
s un jugem entsur son bateau
relativement et,t,mieux
récen encore,
le Tribunal de
Bordeaux n 'hésitait pas à affirmer qu e le droit de p ro-
priété met obstacle à ce qu'un tiers capte et repro-
et 8. Paris,
H.M. ; 1415 mai 1988,
mars 1970, D.
D. 1970.466, concl. Cabannes, note P.A.
1988./R.104.
9. Paris, 5 juin 1979, jCP 1980.11.19343, note Lindon. Cf.
pourtant, Civ. 2', 29 juin 1988, Bull. civ. 11, n° 160, qui semble
freiner un peu le mouvement en cassant l'arrêt attaqué qui avait
jugé que la photographie d'une résidence secondaire portait
atteinte à la vie privée de son propriétaire alors que, a en statuant
de la sorte, sans préciser en quoi la publication de cette photogra-
phie portait atteinte à la vie privée de M. Balestre par la révélation
de faits ayant le caractère d'intimité », la cour n'a pas donné de
base légale à sa décision. — Adde Paris, 22 janv. 1991, D.
1991./R.56, qui a jugé que la publication de photographies d'une
habitation ne peut constituer une atteinte à la vie privée dès lors
que le reportage photographique, ou le commentaire, ne permet-
tent d'établir ni la localisation de l'habitation ni l'identification du
propriétaire.
http://slide pdf.c om/re a de r/full/e de lma ndroit-sa isi-pa r-la -photogra phie 144/185
qu'<■ il n'est
peuvent pas dou
manquer teux qu eles
d'identifier leslieux
lecteurs
et devoisins ne
considé-
rer avec surprise que la darne Lem oiner a p ermis que
sa propriété serve de cadre au tournage d'un roman
en forme de film, dont l'esprit est difficilement
com patible avec sa personn alité » 12.
La doc trine s'était ém ue de cette décision. Pour les
un s l'idée de dom aine pu blic devait s'opp oser à cette
solution : « sous réserve des droits procédant de la
notion de propriété artistique, ce qui est à la vue de
tout un ch acun n'est-il pas, en quelque sorte, dans le
dom aine pub lic... 1 3 ». D'autres mettaient l'accent, en
outre, sur l'absence d'interdiction : Il n'y a aucune
faute à photographier une maison privée qui se pré-
sente aux yeux de tous, et pas davantage à publier
cette photo, du moins si aucune interdiction appa-
rente ne le défend et si aucu n droit d'auteu r n'est en
cause 1 4 . » D'autres, enfin, insistaient su r la spéc ificité
B. L'espace public
à cet égard,
timent propremen
aigu que préhistorique.
la rue « tappartenait Onp avait
» au ublic,lesinon
sen-
même au citoyen. Période idyllique pour les photo-
graphes : non seulement l'objectif photographique
était assimilé à l'oeil humain et en avait la même
liberté, mais encore la rue n'était pas devenue l'es-
pace d'un m arché éc onom ique. On avait alors le sen-
timent collectif qu'elle était inappropriable, vouée à
la fête, à la révolution, à la commémoration, bref à
l'éch ange h um ain, semblable en cela à l'« oeuvre de la
nature » qui peut être librement reproduite 23 . En
deux mots, la rue était « naturelle » : elle s'inventait,
fournissant à l'artiste, au p romen eur, au badau d, sa
matière
vente première
rien au sens :strict
car « du
l'auteur neais
m ot, m crée rien nià n'in-
se borne pu i-
ser dans l'observation de la nature et des hom mes des
matériaux qu'il rassemble dans un ouvrage détermi-
né » 2 4.
11 — De là ces décisions aussi naïves et émou-
vantes qu'un album de ph otographies jaunies : on n e
peut contester, dira un antique tribunal de paix du
Sud-Ouest, « le droit de vue qu'a tout individu sur
tout ce qu'il y a dans la rue : façades qui la bordent,
sur toutes
droit les scènes
de prendre q ui s'ysur
un cliché déroulent
tout ceet, parvoit
qu'il suite, le
pour
le reproduire sur cartes postales illustrées ou sur
bandes ciném atographiques » 25.
C'est donc
convient dans ce contexte
de considérer ce qu'estbien précis
devenu qu'il
l'espace
pu blic. Il n'est donc pas ininté ressant d'exam iner les
arguments qui opposent les marchands des cartes
postales et les auteurs, avant de faire état du droit
positif.
2. Le principe de la protection
Cour
de de de
jeux Bourges, qui
lumière avait estimé que
accompagnant le réalisateur
l'exécution des
<« très riches h eures de C ham bord », devait être quali-
fié de coauteur de l'oeuvre, avec le rédacteur du livret
et le com positeur de la partition 36.
17 — Cela dit, on p eut s'interroger, justemen t, sur
la qualification d'une telle oeuvre. On sait que Des-
bois avait vertement c ritiqué, en son tem ps, l'arrêt de
la Cour de B ourges : le « metteur en lumière », disait-
il, ne saurait être « investi de la qualité d 'auteur vis-à-
vis des jeux lum ineux, qui ressortissent à l'exécu tion
(du livret et de la musique), non à l'élaboration de
l'oeuvre ». En deux m ots, sa prestation, « com me celle
du metteur en scène
à l'interprétation dede l'oeuvre non
l'oeuvre, dramatique, ressortit
à la création de
l'oeuvre interprétée et enregistrée » 3 7 . Cette critique
n'était pas très pertinente : d'un côté, on ne voyait
pas pourquoi un jeu de lumière — et, a fortiori, une
mise en scène de théâtre 38 -ne répon drait pas aux
34. Paris, 1" ch. A., 1 1 juin 1990, Sté Éditions de l'Est cl Sté La
M o d e e n im a g e , Ju r is d a t a n° 023127.
35. Paris, 13 mars 1986. D. 1987. Somm. 150, obs. Colombet ;
Gaz. Pal. 1986.1.238. [Voir s u p r a . ]
36. Bourges, 1" juin 1965, D. 1966.44, note H. Delpech ; a d d e
B. Edelman, De la nature des oeuvres d'art d'après la jurispru-
dence, D. 1969. Chron. 61 .
37. H. Desbois, L e D r o it d 'a u t e u r e n F r a n c e , Dalloz, 2' éd., 1966,
n°186, noteSeine,
38. TGI 1. 2 nov. 1965, JCP 1966.11.14577, note Boursi-
got ; RTD com. 1966.577, obs. Desbois ; Paris, 8 juill. 1971, RIDA
janv. 1973.134 ; RTD com. 1973.100, obs. Desbois ; sur le respect
dû, par le metteur en scèn e, au droit moral de l'auteur dram atique,
Bruxelles, 29 sept. 1965, JCP 1966.11.14820, note A. Françon ;
TGI Paris, 27 nov. 1985, RIDA juill. 1986.163, n o t e A. Françon ;
J. Matthyssens, Metteurs en scène et droit d'auteur, RIDA oct.
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exploitation 39 .
18 — Le second développement original a trait à
l'extension, tout de mêm e surprenan te, du principe de
protection. Desdépliants publicitaires, reproduisant
deux photographies aériennes de la cité lacustre de
Port-Grimau d, avaient été saisis par les sociétés p ro-
m otrices de l'opération imm obilière : elles avaien t fait
valoir, en effet, que l'architecte leur avait concédé
l'exclusivité du droit de reproduction. Pour leur
défense, les entreprises éditrices avaient soutenu non
seulement q ue « l'on n e saurait contester à tout hab i-
tant ou à tout voisin le droit de reproduire des vues
de Port-Grimaud, village qui a le caractère d'une
agglomération,
référencée constituéeaux
à l'annuaire, avec les etc.
PTT, bâtiments
», maispu blics,
encore
que « c e village avec rues, places, m agasins, banqu es,
services de toutes sortes, est un site géographique
étendu dont le spectacle est res communis... ».
Le tribunal a écarté ces moyens par des motifs
assez étonnants : « l'établissement dans le fond du
19 — Celaurbain
ensemble est fort —
bien v u agglomération
une : u ne p rivatisation—d'un
est
con traire à la notion m ême de vie sociale. Dan s cette
espèce nous frôlons l'absurde dans la mesure même
où le droit d'auteur se soum et la « rue » elle-m ême.
Mieux encore : c'est l'idée même d ' u r b a n i s a t i o n qui
est ruinée en son principe. Car si un « paysage
urba in » peut être aussi privatisé, c'est notre culture
qui est atteinte.
On conçoit que cette solution extrême — restée
R .S.
3. L'exception à la protection
figurant suraules
quaient p as affiches
p ublic litigieuses
des traits ne communi-
caractéristiques origi-
naux de la fontaine créée par M. Agam » 4 3 . De la
même façon, la carte postale reproduisant la rue de
Rennes, la nuit, ne saurait être déclarée contrefai-
sante de la tour M ontp arnasse : « s'agissant d'un é lé-
ment d'un ensemble architectural qui constitue le
cadre de vie de nom breux hab itants d'un qu artier de
Paris, et ayant été con struite pour être habitée et mise
à la disposition de tiers, le droit à protection cesse
lorsque l'oeuvre en q uestion est reproduite non p as en
tant qu'oeuvre d'art mais par nécessité, au cours
d'une prise de vue dans un lieu public ; or, sur la carte
postale litigieuse, la tour Montparnasse n'a pas été
retourn e à selon
Certes, ses légitimes
les cas,« le
prop riétaires
peuple » : le peu
recouvre ple.ou
plus
moins ses droits : de la rue « hap pening » à la rue révo-
lutionn aire, il y a toute u ne d istance. M ais le principe,
néanmoins, est solidement ancré : l'« égoïsme » du
droit d'auteur c ède le pas à la foule.
A. La rue « happening »
leurs
pou droits
r un de représentation
m ontan et de
t forfaitaire, à l'étab reproduction,
lissem ent pub lic
chargé de gérer la bonne exploitation du monument
d'autres domaines,
scientifique on rencon
4 9 , artistique 5 0 ou tre un « fonds com mu n »
linguistiques'
Ce p hén omèn e est assez remarquable et je voudrais
simplemen t en m arquer l'originalité pou r mieux faire
comprendre le contexte de l'affaire Goude.
s ing, Inc. 32 App. Div. 2d 632, 300 N.-Y. 8, 2nd 441 (1969)).
Kerever.
2. La rue et la révolution
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L 'O E IL D U D R O IT :
NATURE ET DROIT D'AUTEUR
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comme dans
l'esprit qu l'autre,
'à cond elleluineimp
ition de devient
oser laune oeuvre
m arque d'unde
e
personnalité ou si l'on préfère, de l'individualiser, de
la faire sortir de son « détachement désintéressé ».
Faute de quoi, elle retrouvera son statut de « res
communis ». Toutes ch oses égales d'ailleurs, la nature
pour le droit a le même statut que la langue : tout le
m onde parle mais seul l'auteur crée son style.
Deux séries de jurisprudence nous feront
comprendre cette situation paradoxale qui trouve sa
résolution dans le conc ept d'individualisation.
Un artiste — Jean Verame — avait peint des
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coutu rier ayant fait poser des man nequ ins devant ces
rochers pour tirer des photos p ublicitaires, l'artiste en
avait demandé la saisie : il s'agissait, disait-il,
d'oeuvres de l'esprit qui ne pou vaient être reprodu ites
sans son consentement. Le tribunal de Paris lui a
donné satisfaction : « on ne peut empêcher qui-
conque, dit-il en substance, de jouir, contempler et
même reproduire un "ensemble naturel" ; en
revanche,
d'un ne peuvent
p aysage être
da ns lequ el considérés comm eetéléments
ils s'inséreraient don t ils
ne seraient que l'accessoire des rochers désertiques,
aux formes monumentales et inhabituelles, utilisés
par un artiste comm e support de travaux picturaux et
qui entrent dans la catégories des oeuvres de l'es-
prit 2 1 . »
21. TGI Paris, 22 juin 1988, D., 1990 Som. Com. 49, obs.
Colombet.
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paysage lui-mêm
une invitation e non pas
à interven ir 2 2un e représentation, m ais ».
le paysage
comme là, naturel vaut pour de
c'est la révélation le paysage
la natureurbain : ici
de l'objet
qui en constitue l'individualisation : et il en sera de
m êm e de la tour Eiffel, « révélée » par un specta cle de
son et lumière, dès lors que les moyen s mis en oeuvre
l'avaient été « suivant une conception originale qui a
eu p our résultat de faire déc ouvrir, en les soulignant
par des jeux de lumière habilement composés, les
Colombet.
seLa jurisprudence
borne estnature
à recopier la à peu «près
tellecohérente : sionl'on
qu'elle est », ne
peut faire reproche à autrui de vous avoir vous-mêm e
recopié : la copie de la nature c'est, encore et tou-
jours, la nature. Une espèce très intéressante a été
jugée par les tribunaux. Une lithographie représen-
tant la « vue de l'exposition du Havre » avait été
copiée. Le tribunal correctionnel avait condamné
l'adaptateu r aux m otifs que l'artiste « a u n droit exclu-
sif sur la forme de sa reproduc tion », s'agît-il mêm e de
la reproduction d 'un lieu, et que « ce droit est surtout
incontestable alors que l'artiste ne s'est pas borné à
un e reproduc tion rigoureusem ent fidèle de la natu re,
mais qu'il a apporté dans la disposition des lieux
reproduits des chan gemen ts et des modifications qui
ne sont q ue l'oeuvre de l'imagination... 2 5 Cette déc i- »
blance, d'une
sente l'un sim ilitude
deux, absolue, par
individualisé le dessin
l'artiste q ui qui
repré-
l'a
exécuté, n'en constitue pas moins pour celui auquel
il app artient un e prop riété exclusive [...] 3 5 . »
L'oeil qui voit au travers d'un modèle esthétique
déterm ine la natu re : il ch oisit et, ch oisissant, indivi-
dualise. Du général, il fait surgir du particulier, par
un travail inverse à celui du concept qui saisit l'uni-
versel dans le singulier.
Il en est évidemm ent de m ême pou r les sites : « si la
nature appartient à tout le mon de, dira le tribunal de la
Seine, et si deux artistes pensen t reproduire le m ême
site, à la même heure, au même endroit, et dans les
mêm esposant
en sup circonstanc
qu 'ilses, il est difficilet àd'admettre,
appartiennen la m ême écmême
ole et
aient les mêmes idées en art, que l'exécution soit
pareille et l'interp rétation identique [...] 3 6 . »
Ainsi individualisée, la n ature, tout en app artenant
à tout le monde, peut être l'objet du droit d'auteur
et, par là même, arrachée non pas à la jouissance spé -
culative des tiers mais à la jouissance commerciale.
Autrement dit, en faisant d'une portion de la nature
un e oeuvre de l'esprit, on la soustrait à l'exploitation
commerciale d'autrui. Personne, sans l'autorisation
de l'auteu r, ne p eut dé sormais en tirer profit par des
cartes p ostales, films publicitaires, reproduc tions, etc.
Mais, concilier
va-t-on et telle estces
la deux
dernière question
principes en— comment
apparence
37. TGI Paris, 8 janv. 1986, D., 1987 Som. Com., 138, obs.
Amson et Lindon.
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38. Paris, 5 juin 1979, jCP, 1980, II. 19343, note Lindon.
39. TGI Bordeaux, D., 1989, Som. Com. 93.
40. Tribunal civil Seine, 1" avril 1965, jCP, 1966, II 14372,
note Amson et Lindon.
41. TGI Paris, 10 févr. 1971, RIDA, avril 197 1.237.
42. B. Edelman, Le Droit saisi par la photographie, Maspero,
1973, et cf. supra dans ce même volume.
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propriété
dire la libreartistique ne peut
reproduction avoir pour
d e l'oeuvre effet d'inter-
p rotégée, lorsque
celle-ci s'intégrant dans un ensem ble naturel dont elle
fait pa rtie, cette interdiction au rait pour effet de p or-
ter atteinte à la jouissance comm une de c ette oeuvre. »
Mais si l'on reproduit, comme tels, des rochers
peints, la contrefaçon est établie 43.
TABLE
I. La pratique théorique du droit 9
I. LES RAISONS D'UNE ABSENCE 11
II. L'ACTE DE NAISSANCE DE L'IDÉOLOGIE
JURIDIQUE 19
Section I. La vie « doctrinale » du sujet de droit 21
I. L'introduction juridique 21
II. L'explication juridique 22
Section II. Idéologie et sujet de droit 26
IL La production juridique du réel 31
III. LA FORME MARCHANDE DE LA CRÉATION 33
Section I. La sur-appropriation du réel 35
Section II. L'homme et la machine 41
I. De l'homme-machine 42
II. ... au sujet créateur 49
Section III. Procès du capital et procès
créateur 54
I. Économie et cinéma 55
II. Le
III. capital-auteur
Création et sujet collectif 58
64
IV . LA FORME MARCHANDE DU SUJET 74
Section I. La forme sujet de droit 76
Section II. La croisade des chevaliers du droit
ou l'histoire d'une doctrine juridique 82
Section III. Les figures du sujet de droit 86
I. Le carrousel 87
II. La danse de mort 90
III. La dan se des voiles 91
IV. La propriété mène la danse 95
V. L'amour mène la danse
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96 184/185
200 TABLE
Conclusion 152
LA RUE ET LE DROIT D'AUTEUR 153
I. L'auteur et l'espace a rtistique 157
II. L'espace — Événement 171
L'OEIL DU DROIT :
NATURE ET DROIT D'AUTEUR 179
Prem ier principe
turelle : la
est un bien nature hum aine et na- 182
commun
Deuxièm e principe : l'individualisation de la
nature 186
Troisième principe : conciliation de la nature
et du droit d'auteur 194
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