AMANDINE

Une histoire audio

Par @cthu.lau



 Chapitre 1

Le snégül rampait avec dif culté. Ses longues pattes azurées couvertes
de boue glissaient sur le sol humide. Amandine t un pas en arrière. Elle
savait que, malgré la mauvaise posture dans laquelle la créature se
trouvait, elle était loin d’être en sécurité. Alors que les deux gros yeux
gluants la xaient avec intensité, elle se permit un coup d’œil derrière
elle.

Première erreur.

Avec l’une de ses pattes avant, la bête prit appui sur un rocher et se
rua sur Amandine qui n’eut pas le temps de réagir. La gueule grande
ouverte du snégül laissait apparaître quatre rangées de dents acérées,
d’où gouttaient plusieurs lets de bave gluants. Malgré cette vue
cauchemardesque, Amandine ne t pas un geste. Les paroles de
l’Architecte lui revinrent à l’esprit.

«  Les snégüls sont des créatures puissantes aux sens surdéveloppés,

mais complètement stupides. Arrête de bouger, et ils oublieront que tu es
là. »

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 Allongée sous le corps d’apparence frêle de la bête, elle retenait son
souf e. Tenant compte de l’haleine infecte qui envahissait l’air, ne pas
respirer était en quelques sortes un jeu d’enfant.

Après quelques secondes, le snégül releva lentement la tête et détacha

ses yeux du corps qu’il maîtrisait. Son abdomen relâcha sa pression, suivi
de ses pattes. Lorsqu’il se fut déplacé quelques mètres plus loin,
Amandine reprit son souf e à travers de petites bouffées silencieuses. Je
l’ai échappé belle, pensa-t-elle. Elle observa la bête dont la mâchoire était
toujours pendante. Son long corps écailleux brillait à la lumière de la
lune. Dans ces plaines marécageuses, l’obscurité n’engloutissait jamais
complètement le paysage.

Amandine se releva. Elle devait trouver un moyen de partir d’ici. Le

snégül n’avait pas bougé de sa position et ne semblait pas décidé à le
faire. Elle regarda autour d’elle. Il fallait trouver un moyen de le leurrer.
Ses yeux s’arrêtèrent à quelques centimètres de son pied droit où elle
remarqua, au milieu de branches mortes, un petit caillou. Elle se baissa
a n d’attraper la pierre. Fatiguée de son altercation avec la créature, elle
ne t pas attention au sol bourbeux, toujours glissant.

Deuxième erreur.

Ses chaussures dérapèrent et ses genoux heurtèrent la terre

inconsistante. Amandine se rattrapa de justesse avec ses mains, évitant de
se retrouver face contre boue. Lorsqu’elle releva la tête, le snégül lui
faisait face. Ses gigantesques pupilles étaient rivées sur elle. Avec un peu
d’imagination, elle aurait même pu dire qu’il souriait.

Mais elle n’avait pas le temps d’imaginer quoi que ce soit.

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 Lorsque la grande gueule commença à s’ouvrir à nouveau, Amandine

sentit la panique l’envahir. Ré échis, ré échis, ré échis. Vite  ! Le monde
tournait au ralenti. Elle pouvait voir chacune des dents apparaître l’une
après l’autre, la suivante toujours plus pointue que la première. Alleeez !
Impossible de retenir sa respiration — sa chute l’avait essouf ée. Son
cœur tambourinait dans sa poitrine comme les percussions d’un
orchestre funeste.

Pas le choix.

Elle devait fuir.

Amandine rassembla ses dernières forces, avança sa jambe droite

devant elle et prit appui pour se projeter en avant. Sans se retourner, elle
courut de toutes ses forces.

Troisième erreur ?

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