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Dr. Ir. P.

Boeraeve Cours de Béton Armé 7-1

Chapitre 7. Adhérence des armatures


(sources : Eurocode 2 et Cours de béton armé de J.P. Guissart, Institut Gramme, 2000)

7.1 Nature de l'adhérence


On désigne sous le nom d'adhérence les forces de liaison qui s'opposent au glissement des
armatures par rapport au béton qui les enrobe.
Cette adhérence est principalement due:
- à des forces d’origine chimique correspondant à
un "collage". Ces forces sont de valeur médiocre
et peu fiables.
- à des forces de frottement dues aux irrégularités
de surface naturelles de la barre. Ces forces, plus
importantes, sont encore assez limitées. C’est le
principal mode d’adhésion des barres lisses.
- à des forces d'engrènement mécanique dues aux
saillies et aux aspérités des barres dites à haute
adhérence HA (voir ci-contre). Ces forces
mettent en jeu la résistance du béton en
compression et au cisaillement à proximité de la
barre.

Barres à haute adhérence (HA)

7.2 Rôle fondamental de l'adhérence


Sans adhérence, armer le béton serait inutile. P1
Pour s'en convaincre, examinons le mécanisme
de ruine d'une poutre sur 2 appuis soumise à
flexion par une charge ponctuelle centrale.
a) La poutre 1, avec un trou à l’emplacement σt = fctm
des armatures, atteint l'état de ruine lorsque la P2
contrainte de traction dans le béton atteint sa δ
valeur maximale fctm.
La force P1 qui y correspond est donc très σt = fctm
faible.
P3 σc = fcd
b) La poutre 2, qui comporterait une armature
lisse et graissée (donc sans adhérence),
atteindrait la rupture pour une charge P2 = P1.
σt = fyd
En effet, lorsque la contrainte de traction
atteint fctm, il y a ouverture d'une fissure et séparation du béton en deux blocs que l'armature,
glissante, ne retient pas.

c) La poutre 3, avec armatures adhérentes ou crochets d'extrémité, ne se ruine pas sous l'effet de P1.
En effet, lorsque la fissuration du béton se produit pour fctm, l'armature, solidaire des deux blocs de
béton assure un rôle de tirant. Ce dernier reprend seul tout l'effort de traction qui assure l'équilibre.
En continuant à charger, le diagramme bitriangulaire de contraintes de départ évolue vers un
diagramme parabolique en compression et une force ponctuelle en traction. A noter que lorsque la
charge augmente il y a fissuration dans les sections voisines. Pour une charge P3, la rupture se
produit enfin, soit par défaut de résistance de l'acier en traction, soit par défaut de résistance du
béton en compression.

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Ceci suppose que l'adhérence est suffisante pour transmettre jusqu'à ces modes de ruine la charge de
traction du béton à l'acier. Il est donc essentiel de se prémunir de toute rupture par défaut
d'adhérence.

7.3 Contrainte d'adhérence


7.3.1 Essais
L'adhérence est une contrainte de cisaillement qui varie avec le type de barre et la nature du béton.
Elle peut se déterminer par des essais appropriés en laboratoire.
Il y en a de deux types:
- Le Pull-out test, qui donne des résultats un peu favorables à cause d'un effet de voûte.
- Le Beam-test, plus sophistiqué mais plus correct.
Dans l'un et l'autre cas, on détermine la contrainte d'adhérence par arrachage de la barre.
Par ces approches expérimentales, on a pu déterminer que la contrainte d'adhérence augmente:
- si le diamètre de la barre diminue
- si la longueur d'adhérence diminue
- si la densité d'armatures transversales augmente

PULL-OUT TEST BEAM TEST

Tests d'adhérence

La rugosité de surface augmente l'adhérence. Cette rugosité peut être naturelle. Elle est notamment
due à la rouille à condition que celle-ci soit elle-même adhérente. L'oxyde de fer réagit avec le
ciment sans altérer l'adhérence.
La rugosité est de type artificielle si elle est due à des empreintes, crénelures, torsades etc... Dans le
cas de barres à haute adhérence, les crochets d'extrémité ne sont plus nécessaires.
Pour transmettre les contraintes d'adhérence dans le béton, une certaine épaisseur d'enrobage,
correspondant au moins au diamètre de la barre, est nécessaire.
7.3.2 Valeurs de calcul
La norme fournit un tableau des valeurs de calcul de la contrainte d'adhérence fbd (voir MC 13.2.1)
7.3.3 La force d'adhérence
La force d'adhérence est directement proportionnelle à la surface extérieure des barres. Dés lors à
égalité de section droite, la force d'adhérence augmente avec le nombre de barres.
En effet, le périmètre d'une barre de diamètre D vaut: p = π.D
Quant au périmètre de n barres de diamètre d, il vaut: p' = n. π .d.
π .D 2 n.π .d 2 4. A 4. A
Pour une même section droite A = = , on a: D = ou d =
4 4 π n.π
Donc p = 2 A.π < p ' = 2 A.n.π

La force est évidemment directement fonction de la longueur d'ancrage.

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7.4 Longueur d'ancrage


7.4.1 Longueur d'ancrage de référence.
La longueur d'ancrage de référence lb,rqd nécessaire pour ancrer l'effort As.fsd qui règne dans une
barre droite est déterminée en écrivant l’équilibre de la barre, soumise à :
• un effort de traction Fs = fsd .πφ²/ 4 Fadh
• un effort d’adhérence exercé par le béton :
Fadh = fbd .πφ. lb,rqd, si on suppose la contrainte Fs
d’adhérence constante sur la longueur d’ancrage lb,rqd

Par conséquent, on obtient : lb,rq

lb,rqd = (φ/ 4) (fsd / fbd) où

où :
• fbd est la valeur de calcul de la contrainte d'adhérence (donnée par l’Eurocode en fonction de
la classe de béton : voir tableau dans MC §11)
• fsd est la contrainte de calcul de la barre dans la section à partir de laquelle on mesure
l'ancrage.

A titre d'ordre de grandeur, l'ancrage d'une barre en φ 20 en S500 sollicitée au maximum (fyd)dans
un béton de classe 20/25 vaudra:
20 500 1.15
lb , rqd = . = 945 mm
4 2.3

En flexion simple, on peut prendre lb,rqd


fsd = fyd. As,req/As, prov où
• As,req (« required »)est la section 2∅16 2∅16
d’armatures requise, C
• As, prov (« provided »la section
d’armatures réellement mise en
place. Diagramme de traction (Moment)
En effet, la section d’armatures requise est B
calculée par : MEd=z.As,req.fyd, et si on A
admet que z, bras de levier des efforts Résistance en Traction
internes, change peu lorsque As varie, on a
MEd=z.As,req.fyd= z.As,prov.fsd
(Dans l’exemple de la figure ci-contre, As,req = 2∅16 et As,prov = 4∅16). Au point A, 4∅16 sont
nécessaires pour résister à MEd,A. Au point B, 2∅16 sont suffisant pour résister à MEd,B. Par
conséquent la longueur d’ancrage des 2∅16 que l’on arrête sera lb,rqd =( 16/4) . (fyd / 2)/fbd).

La résistance des barres sur leur longueur lb,rqd


d'ancrage peut être prise en compte en
supposant une variation linéaire de l’effort. 2∅16 2∅16
On peut donc, dans le même exemple,
mettre les barres renfort à partir de
l’endroit où les barres déjà en place ne Diagramme de traction (Moment)
suffisent plus pour autant que l’effort B
résistant (représenté par la ligne en E
A
Résistance en Traction
D
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pointillés) soit toujours supérieur à l’effort sollicitant(courbe en trait plein).
Pour le calcul de lb,rqd on peut, dans ce cas, faire l’hypothèse sécuritaire que fsd = fyd, donc :

lb,rqd= (φ/ 4) (fyd / fbd).

Remarques :
1. cette hypothèse n’entraîne aucune conséquence économique, puisque les barres renfort
doivent débuter au point B quelle que soit la valeur de lb,rqd.
2. le diagramme de la force reprise par l’armature est pratiquement proportionnel au
diagramme du moment, or on a vu que ce diagramme devait être « décalé » à cause du
fonctionnement en treillis de la poutre suite à la fissuration due à l’effort tranchant. En toute
rigueur, les considérations ci-dessus s’appliquent bien sûr à ce diagramme décalé. C’est
dans un souci de simplification des figures que le principe d’arrêt des barres a été vu sur un
diagramme non décalé. L’illustration suivante, extraite de l’EC2 montre bien l’utilisation du
diagramme décalé pour la détermination des arrêts de barres.

7.4.2 Longueur d'ancrage de calcul (voir MC 13.3.2)


Lorsqu’on manque de place pour faire un ancrage droit, par exemple en bout de poutre, on peut
recourir à des ancrages composés de coudes, boucles, crochets ou barres transversales soudées (voir
figure ci-après). L’EC2 donne une formule tenant compte de ces types d’ancrage.

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7.5 Jonction des barres


Il est fréquent qu'une armature doive transmettre un effort sur une longueur plus grande que sa
propre longueur de barre. On est alors amené à réaliser un transfert de force d'une barre vers une
autre. Il existe pour ce faire plusieurs approches:
7.5.1 Jonction par manchon fileté ou par soudure
Ces méthodes sont onéreuses et ne se justifient que dans des cas particuliers.
- Les extrémités des barres sont filetées et raccordées par vissage sur des manchons.
- Les barres sont soudées par un cordon dont la longueur est calculée pour reprendre avec sécurité
la totalité de l'effort
7.5.2 Jonction par recouvrement
C'est la méthode la plus conventionnelle. Elle consiste à faire passer la force de traction d'une barre
à l'autre par l'intermédiaire de l'adhérence au béton. On se référera à l’Eurocode2 (§8.7) pour le
calcul des longueurs de recouvrement.

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