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Île-de-France - Quels potentiels fonciers pour la production de logements ?

Atelier ORF – EPFIF - IAU-RIF

Une politique publique à inscrire dans les dispositifs d’action foncière :


produire le foncier de l’habitat adapté pour les familles de Gens du voyage.
1
Contribution de François Godlewski , Association Gens du voyage en Yvelines, IGPEF, à la demande de la
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FNASAT et de l’ANGVC .

« Foncier et Gens du voyage » : une équation complexe .................................................... 2


Une « minorité oubliée » de franciliens repoussés par les dispositifs d’urbanisation ................................ 2

Observer le foncier des familles franciliennes de Gens du voyage : l’exclusion par la planification spatiale
et thématique produit des fractures territoriales et des inégalités sociales ............................................... 3

La solution : développer dans tous les dispositifs une sous-politique distincte pour
produire l’habitat adapté aux besoins des familles de Gens du voyage .............................. 4
Remettre ces familles de plein droit dans les politiques d’urbanisme et de logement ............................... 4

Produire le foncier de l’habitat adapté aux familles de Gens du voyage, et au besoin en assurer le
portage......................................................................................................................................................... 4

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En Île-de-France, la production d’un habitat spécifique pour les familles de Gens du voyage est très limitée
voire anecdotique, en comparaison avec d’autres régions.
Le lien avec les problématiques foncières est évident. Si l’Île-de-France a ses propres spécificités au regard de
la tension foncière, la population des familles de Gens du voyage, et la manière dont elle est ignorée dans les
dispositifs d’urbanisation, sont elles-mêmes très spécifiques à plusieurs titres en matière de foncier.
Au moment où se mettent en place des dispositifs à l’échelle du Grand Paris et de la région, on voit que cette
population est à prendre en compte de plein droit dans tous ces mécanismes.
De victime de l’urbanisation, la population des Gens du voyage doit être identifiée comme bénéficiaire des
projets futurs, au même titre que les autres populations.
Pour cela, elle doit être prise en compte directement dans les politiques foncières mises en place pour
permettre le développement harmonieux de la métropole francilienne.

1
AGVY78@gmail.com
2
FNASAT : Fédération nationale des associations solidaires d'action avec les Tsiganes et les Gens du voyage
3
ANGVC : Association nationale des Gens du voyage catholiques
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Rappelons que l’installation des « Gens du voyage » dont la résidence mobile et la vie en famille élargie constituent leur mode de vie, doit
être abordée en fonction de deux cas de figure :
 pour les ménages en phase d’itinérance par le biais de l’offre publique en équipements obligatoires : les « aires d’accueil »,
 pour les ménages en phase de résidence dans leur territoire d’ancrage, ou sédentaires, par le biais d’une offre d’habitat
adapté à leurs besoins : « terrains familiaux, habitat-caravane, … ».
En effet, les « aires d’accueil » ne peuvent s’apparenter à une solution d’habitat pour les Gens du voyage.

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« Foncier et Gens du voyage » : une équation complexe

Une « minorité oubliée » de franciliens repoussés par les dispositifs d’urbanisation

Les familles de Gens du voyage ont une longue antériorité de présence dans la région, souvent sur plusieurs
générations.

Les localisations de leurs habitats peuvent être décrites comme une succession d’implantations précaires sur
des espaces en mutation, des friches urbaines, ... . Pour certaines familles, le processus débouche sur une
installation durable mais dans un secteur non urbanisable. Pour d’autre, sur un séjour toléré dans des aires
d’accueil pour familles itinérantes, dont la conception et les règles de gestion ne sont pas ajustées aux besoins
d‘habitat des familles franciliennes.

Souvent classée parmi les « catégories particulières de la population » (avec les étudiants, personnes âgées, ...),
mais aussitôt laissée de côté dans la suite des analyses, la population des familles de Gens du voyage,
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« minorité oubliée », présente des besoins relativement distincts :

 les formes d’habitat à produire sont spécifiques : « habitat-caravane », « terrain familial », « habitat
adapté ».

o De densité comparable à un tissu urbain pavillonnaire, elles ne s’insèrent cependant pas


facilement dans toutes les formes urbaines ; les exemples d’installation réussie en tissu
pavillonnaire sont d’autant plus intéressants à analyser.

 les filières de production d’habitat destinées à répondre à ces besoins sont très peu structurées ;

 la méconnaissance de ces besoins particuliers est largement répandue chez presque tous les acteurs,
comme on le voit jusque dans les documents les plus officiels liés à l’élaboration des SDRIF, SCOT, PLH,
PLU, …

 plus largement, cette population vulnérable subit des formes propres de discrimination et de rejet qui
se traduisent par leur éviction à la fois

o physique : l’action des acteurs de l’urbanisation la repousse de place en place sans inscrire
dans les projets leur flagrant besoin de relogement ;

o et juridico-institutionnelle : elle n’est pas protégée juridiquement contre ces formes


d’éviction, et elle n’est pas prise en compte dans des dispositifs de planification. En
particulier, ses besoins en habitat sont ignorés jusque dans la plupart des programmes locaux
de l’habitat ! : ces derniers renvoient aux « aires d’accueil », qui sont des équipements publics
pour familles itinérantes, loin de répondre aux besoins d’habitat des familles franciliennes.

o enfin, cette population est également en quelque sorte « exclue des politiques de lutte
contre l’exclusion »

5
Pour reprendre le titre de l’excellent document d’une organisation caritative britannique RoofTopGroup : The Forgotten Minority

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Observer le foncier des familles franciliennes de Gens du voyage : l’exclusion par la
planification spatiale et thématique produit des fractures territoriales et des
inégalités sociales

Soulignons la fragilité de cette population, ainsi que sa précarité grandissante dans les territoires ruraux et
périurbains. Les discriminations en rapport avec leur statut particulier, issu de la loi n° 69-3 du 3 janvier 1969,
impactent tous les domaines : emploi, scolarité, santé, habitat.

La non prise en compte, par les politiques publiques d’urbanisme et d’habitat, de la possibilité pour ces familles
franciliennes d’avoir un lieu de vie stable et d’y vivre en caravane en fait une victime directe de l’urbanisation
de la métropole francilienne, et engendre de nombreux effets pervers.

Ainsi,

 des ménages se retrouvent en difficulté du fait qu’aucune zone, sur certaines communes, ne soit prévue au
sein des documents locaux de planification pour permettre l’implantation de caravanes de manière
permanente ; une énergie répressive considérable est dilapidée dans des contentieux liés à l’installation
des caravanes sans autorisation, ou au-delà de trois mois.

 de nombreux ménages (dont les plus précaires) sont aujourd’hui en situation d’itinérance forcée (ou
d’errance) au sein de territoires constituant leur lieu de vie depuis plusieurs générations (scolarisation des
enfants, bassin d’emploi, suivi social et médical).

 faute d’offre en habitat adapté dans la succession des opérations d’urbanisation, des familles achètent
des terrains et s’installent au sein d’espaces non voués à l’habitation (zones agricoles, naturelles,
protégées ou de dangers et nuisances), ce qui participe au mitage de ces espaces ; ces installations sont
souvent accompagnées de conditions de vie indignes (non accès à l’eau, à l’électricité, à l’assainissement),

La quasi absence de prise en compte de l’habitat des Gens du voyage dans les PLU, mais aussi bien avant
dans les POS, participe de longue date à disqualifier de très nombreuses et anciennes installations de Gens
du voyage propriétaires de leurs terrains par des classements en secteurs non constructibles et non
autorisés aux « résidences mobiles constituant l’habitat permanent de leurs usagers ».

Aujourd’hui, les objectifs d'utilisation économe des espaces naturels, de préservation des espaces affectés
aux activités agricoles et forestières, et de protection des sites, des milieux et paysages naturels sont mis
en avant comme nouvelle raison de disqualifier des installations préexistantes de ménages Gens du voyage
propriétaires de leurs terrains.

3
La solution : développer dans tous les dispositifs une sous-politique distincte
pour produire l’habitat adapté aux besoins des familles de Gens du voyage

Remettre ces familles de plein droit dans les politiques d’urbanisme et de logement

Les principes d’action des dispositifs de planification (SCOT, PLU, PLH, …) et d’action (CDT, urbanisme
opérationnel, programme d’habitat, …) ne trouvent en effet leur sens complet que s’ils ne sont pas une
nouvelle manière d’exclure l’habitat des Gens du voyage, mais au contraire de les inclure pleinement dans la
ville.
Ces dispositifs ne doivent plus être le mécanisme, permanent ou renouvelé, d’éviction des familles
franciliennes de Gens du voyage : tout au contraire, ils doivent les prendre en compte dans la planification,
l’action foncière, les programmes, les projets, les réalisations, l’accompagnement.
Ils doivent se traduire par la production de terrains familiaux et d’habitat-caravane adaptés :
 en pleine propriété (achat, ou régularisation de terrains existants)
 en accession à la propriété (sociale, ou non)
 en location (sociale - l’objectif à réaliser de 30% de logement locatifs sociaux doit comprendre aussi
des logements locatifs sociaux et adaptés au mode de vie des Gens du voyage - ou non)

Produire le foncier de l’habitat adapté aux familles de Gens du voyage, et au besoin


en assurer le portage

L’évidence première est bien que le foncier est au cœur du sujet.


De cette constatation découle la seule politique possible :

 de victime de l’urbanisation, la population des Gens du voyage doit être identifiée comme bénéficiaire
des projets futurs, au même titre que les autres populations ;

 pour cela, elle doit être prise en compte directement dans les politiques foncières mises en place pour
permettre le développement harmonieux de la métropole.
La vision d’ensemble donnée par l’atelier « Quels potentiels fonciers pour la production de logements ? » sur
les disponibilités foncières et les blocages fonciers à dépasser doit donc prendre en compte les besoins
particuliers des populations de Gens du voyage.
Au demeurant, les quantités à produire sont de deuxième ordre dans chaque territoire : quelques terrains
familiaux, voire quelques dizaines, contre des milliers de logements affichés comme objectifs dans les contrats.
Les choix de réservations foncières à opérer passent par des analyses urbaines et sociales fines : interstices,
délaissés d’urbanisation, diffus en quartiers peu denses, certains projets de quartiers …
Les propriétaires publics (Défense, SNCF, APHP, …), les EPCI, les opérateurs fonciers (EPF, agence des espaces
verts, SAFER, …), les aménageurs (EPA, AFTRP, …) doivent disposer d’une meilleure connaissance de ces
situations. Ils détermineront, en meilleure concertation avec les collectivités concernées et les associations
spécialisées, les conditions les plus adaptées
 d’habitat des ménages actuels et futurs,
 y compris la relocalisation de ceux implantés en secteur réellement inapproprié, avec rachat de leur
bien pour leur fournir un apport personnel dans une opération d’accession à un terrain familial
 ou enfin, le cas échéant, de maintien encadré d’un certain nombre de situation d’habitat pré-
existantes (régularisation, « pastillage », …).

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