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Encyclopédie Médico-Chirurgicale 22-009-B-10

22-009-B-10

Phonation et orthodontie
E Ameisen
C Auclair-Assad
ML Rolland
Résumé. – Les muscles de la sphère orofaciale jouent un rôle dans l’articulation des sons, dans la mimique,
mais aussi dans la morphogenèse des arcades dentaires, d’où la relation étroite entre la phonation et
l’orthopédie dento-maxillo-faciale. Ce rôle a été mis en évidence par l’examen aux jauges d’extensométrie.
Il est primordial, devant tout trouble d’articulé, de faire un examen clinique complet et de rechercher des
anomalies fonctionnelles responsables.
Un traitement étiologique bien conduit, éducation de la musculature, doit être entrepris, l’âge idéal du
patient étant de 8 à 12 ans pour obtenir une automatisation des praxies de phonation (et de déglutition) afin
d’éviter une récidive.
Ce ne sont pas les anomalies d’articulé dentaire qui sont responsables des anomalies d’articulation des
consonnes, mais l’inverse.
Alors que les troubles audibles motivent souvent des consultations en orthophonie, ce sont les troubles non
audibles, le plus souvent, qui entraînent des anomalies d’articulé.
D’autre part, le dépistage systématique des troubles de la phonation ne signifie pas toujours éducation.
Certaines positions d’articulation des sons vont dans le sens des compensations alvéolaires d’un décalage des
bases : on se garde de les corriger.
© 2003 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : phonation, orthodontie, sons, praxies, jauges d’extensométrie, orthophonie.

Introduction orthodontique, pour permettre un traitement étiologique bien


conduit et en améliorer le pronostic, en assurant sa stabilité par une
éducation.
La phonation est une fonction à but de communication. Elle
nécessite la participation de plusieurs unités anatomiques,
permettant tout d’abord l’inspiration, puis l’expiration de l’air plus
ou moins modulées, aboutissant à la formation de phonèmes.
Anatomie
Ce sont les muscles de la cavité buccopharyngée qui permettent de Deux caractères anatomiques méritent d’être soulignés.
transformer cet air expiré en sons audibles et compréhensibles.
D’une part, il faut, bien plus que ne le font les descriptions
Or, les muscles de la sphère buccale, par l’intermédiaire des anatomiques, distinguer les « procès alvéolaires », gaine osseuse qui
pressions qu’ils exercent sur les dents, vont modeler la forme des entoure les racines dentaires, du corps des maxillaires. Alors que le
procès alvéolaires. Ces muscles agissent aussi pendant le temps de corps des maxillaires appartient au squelette, les procès alvéolaires
déglutition et en position de repos. Le temps de déglutition a déjà dépendent des dents : ils se forment lors de l’éruption dentaire et se
fait l’objet d’une étude par Deffez [18] et ne sera donc pas détaillé résorbent après leur chute. Il n’existe pas de procès alvéolaire chez
dans ce chapitre. Nous nous attacherons à la phonation tout en l’anodonte et ils se résorbent chez l’édenté. Produits par l’activité
sachant qu’il faut garder présent à l’esprit que déglutition et ostéogénique des ligaments qui se comportent comme un périoste,
phonation font partie d’un ensemble de fonctionnement. ils font partie du système dentaire et ne donnent insertion à aucune
Il est important de noter que les anomalies orthodontiques fibre musculaire. Les lésions de l’os alvéolaire appartiennent à la
cliniquement visibles, dans le cas où elles seraient imputables à des pathologie du système dentaire.
anomalies de la phonation, ne sont pas audibles. C’est dire D’autre part, les muscles de la cavité buccale peuvent être répartis
l’importance de l’examen clinique précis dans l’étude de la en deux groupes d’après leur rapport avec le système dentaire : les
phonation. Celle-ci est indispensable dans le cadre d’un diagnostic muscles de la sangle labiojugale sont situés en dehors, et ceux de la
langue en dedans. Cette disposition évoque la notion d’un
antagonisme entre ces deux groupes de part et d’autre des procès
alvéolaires. Mais il ne s’agit pas d’un antagonisme vrai comme il en
Eva Ameisen : Professeur adjoint du département d’orthodontie pédiatrique de l’UFR de stomatologie de la existe au niveau des os longs des membres car dans le tronc cérébral,
Pitié-Salpêtrière, chef de service de l’Institut George Eastman, 11, rue George-Eastman, 75013 Paris, le noyau XII est situé sur le prolongement de la colonne somitique
France.
Catherine Auclair-Assad : Chef de département d’orthodontie pédiatrique de l’UFR de stomatologie de la motrice alors que les noyaux du IX, du VII et du V moteur sont
Pitié-Salpêtrière. situés dans le prolongement de la colonne branchiomotrice. Ce
Marie-Laure Rolland : Professeur adjoint du département d’orthodontice pédiatrique de l’UFR de
stomatologie de la Pitié-Salpêtrière.
« pseudoantagonisme » est à l’origine d’une pathologie particulière
Département d’orthodontie pédiatrique de l’UFR de stomatologie de la Pitié-Salpêtrière. du système dentaire.

Toute référence à cet article doit porter la mention : Ameisen E, Auclair-Assad C et Rolland ML. Phonation et orthodontie. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés),
Stomatologie/Odontologie, 22-009-B-10, 2003, 10 p.

150 608 EMC [257]


22-009-B-10 Phonation et orthodontie Stomatologie/Odontologie

A I OU 1 Langue pour A, I, OU.


Position de la langue pour l’articulation des A, I, OU.

Rappel de physiologie est une consonne sourde émise sans vibration du larynx, alors que
« B » est une consonne sonore émise avec vibration du larynx.
La phonation est un phénomène très complexe qui intéresse les Les phonèmes se classent en voyelles et en consonnes. Les voyelles
poumons, le pharyngolarynx, les cavités sus-glottiques, nasales, la sont des sons musicaux. Les consonnes sont des bruits ou sons
cavité buccale (langue, dents, joues et lèvres) [16]. amusicaux auxquels sont parfois associés des sons musicaux.

¶ Voyelles
SONS PRIMAIRES
Les voyelles sont prononcées voile fermé.
Ils se forment au niveau du pharyngolarynx. Ils sont modifiés dans
Nous avons vu que le son laryngé primaire est chargé d’un certain
leur timbre en traversant les cavités sus-glottiques et parfois nasales
nombre d’harmoniques qui déterminent le timbre. C’est par le
et transformés en phonèmes au niveau de la cavité buccale. L’oreille,
timbre que les voyelles se reconnaissent. Le renforcement des
récepteur des sons, transmet au système nerveux les informations
harmoniques se fait au niveau de deux zones qui sont des caisses de
qui permettent de modifier et d’ajuster les sons.
résonance : la cavité buccale pour le formant aigu et la cavité
– L’émission des sons est possible grâce à la mise en vibration de pharyngée pour le formant grave. Ces cavités sont séparées l’une de
l’air sous-glottique au niveau du larynx [27]. l’autre par le dos de la langue par rapport au palais qui détermine
le point d’articulation de la voyelle.
– Jusqu’en 1950, la théorie myoélastique d’Ewald affirmait que le jet
d’air venu de la sous-glotte était le générateur du son. La vibration La cavité buccale comme la cavité pharyngée peuvent être modifiées
des cordes vocales qui se comporteraient comme des « anches à dans leur forme comme dans leur dimension par la position du voile
bourrelet » se ferait sous la pression de l’air expiré. du palais, la forme de la langue, des lèvres qui peuvent s’étirer vers
l’avant, la position de la mandibule entraînant une ouverture plus
– À cette théorie s’oppose la théorie neurochronaxique exposée par ou moins grande de la cavité buccale.
Husson [26, 31]. Les vibrations des cordes vocales ne sont pas créées
mécaniquement par le passage du jet d’air, mais provoquées par la Articulation des trois voyelles A, I, Ou (fig 1)
contraction des muscles du larynx qui reçoivent des influx nerveux
transmis par les nerfs récurrents. Le « A » est prononcé bouche grande ouverte, la langue au plancher.
Ce sont des influx moteurs issus du système nerveux central Le « I » et le « Ou » sont prononcés avec rapprochement des
transmis par les nerfs récurrents qui provoquent la contraction des mâchoires. Ce sont des voyelles fermées. Le point d’articulation est
muscles thyroaryténoïdiens internes. Cette contraction attire les antérieur pour le « I », postérieur pour le « Ou » (« I » est aigu,
cordes en dehors et la glotte s’ouvre en laissant passer un jet d’air « Ou » est grave).
sous-glottique. L’influx nerveux de courte durée disparaît. La Le « I » est obtenu avec étirement des commissures labiales, alors
contraction musculaire cesse et les cordes vocales reviennent à leur que le son « Ou » est obtenu avec étirement vers l’avant des lèvres,
position antérieure. augmentant l’espace.
La glotte se ferme pour se rouvrir lors du passage de nouveaux
Les trois phonèmes « A », « I », « Ou » représentent le système
influx nerveux. La fréquence des stimuli détermine la fréquence des
vocalique de base. Les autres voyelles sont des voyelles
vibrations et donc la hauteur du son laryngé.
intermédiaires.
L’intensité du son dépend de la puissance du jet d’air expiré.
Le timbre du son, correspondant à sa richesse plus ou moins grande L’abaissement du voile entraîne la nasalisation :
en harmoniques, est déterminé par le tonus des cordes vocales. Le – « É » donne « In »
son primaire laryngé est ensuite modifié par son passage dans une
série d’organes qu’il va traverser. – « Eu » donne « Un »
– « O » donne « On »
ARTICULATION DES SONS – « A » donne « An »
Les sons élémentaires du langage sont des phonèmes qui ne se ¶ Consonnes
superposent pas exactement aux lettres du langage écrit. Le
phonème « Gn » s’écrit avec deux lettres du langage écrit, alors que Les sons consonantiques sont des bruits, des sons non musicaux,
la lettre « X » correspond à deux phonèmes « XS ». Certains auxquels peuvent s’ajouter des sons musicaux. Dans les premiers
phonèmes voisins se différencient par leur sonorité. C’est le cas, par cas, les consonnes sont dites sourdes : P, T, K, F, S, Ch. Elles
exemple, des phonèmes « P » et « B ». Ce sont des phonèmes correspondent au seul bruit obtenu par ouverture brusque ou par
explosifs, bilabiaux, ayant le même point d’articulation mais « P » rétrécissement du conduit de passage de l’air expiré.

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Stomatologie/Odontologie Phonation et orthodontie 22-009-B-10

Tableau I. – Consonnes utilisées dans la langue française d’après la conduite normale utilisée pour leur articulation.

Continues Explosives

Sourdes Sonores Sonores Sourdes

Nasales

Bilabiales M B P

Labiodentales F V

Linguodentales S Z

Linguopalatales latérales Ch J

Linguopalatales antérieures Ri N D T

Linguopalatales moyennes L Gn

Linguopalatales postérieures G K

D, T, N L S, Z 2 Position de la pointe de la langue pour l’articulation


des D, T, N, L, S, Z.

Les quatorze autres consonnes sont dites sonores car au bruit


s’ajoute un son laryngien musical (B, D...) (tableau I). 3 Position transversale
Fieux distingue les consonnes explosives, appelées à tort occlusives de la langue pendant l’arti-
culation des palatales anté-
par certains auteurs, des consonnes continues aussi dites rieures.
constrictives.
Les consonnes explosives sont obtenues par ouverture brusque du
conduit de passage de l’air expiré (P, B), alors que les consonnes
continues correspondent à un écoulement continu de l’air expiré (F,
V). Cet écoulement peut être prolongé à volonté et est freiné par un
rétrécissement du conduit de manières différentes et à des niveaux
variables.
Le point d’articulation est le lieu de l’obstacle ou de rétrécissement
opposé au passage de l’air expiré. Il peut être bilabial (B, P, M),
labiodental (F, V), linguodental inférieur (S, Z), linguopalatal latéral
œuvre et neurologiquement distincts : les poumons, la trachée, le
(Ch, J), linguopalatal antérieur (N, D, T), linguopalatal moyen (L,
larynx et le pharynx innervés par le pneumogastrique d’une part, et
Gn), linguopalatal postérieur (G, K) (fig 2).
les muscles des effecteurs buccaux innervés par les nerfs crâniens,
Il n’y a pas de point d’articulation linguodental supérieur ou V, VII, IX et XII d’autre part.
apicodental.
L’orthopédie dento-maxillo-faciale (ODMF) s’intéresse surtout aux
Normalement, chez l’adulte, la langue ne prend jamais appui sur les praxies articulatoires qui aboutissent à l’émission de phonèmes. Ces
incisives supérieures pour la prononciation des phonèmes. En praxies sont l’ensemble d’activités motrices qui concourent à
revanche, chez le jeune enfant ayant une déglutition primaire, le l’émission de sons. Ce sont des mouvements complexes coordonnés
point d’articulation pour les explosives « D » et « T » ainsi que pour soumis au contrôle de la volonté. Les éléments grâce auxquels
les continues « N », « L » et « Ni » est apicodental et parfois s’élaborent ces actes sont les unités motrices actives. Chacune
linguodental inférieur. Il est important de noter que ces points comprend un motoneurone et ces unités motrices reçoivent des
d’articulation différents correspondent à des sons identiques. Les stimulations différentes en provenance de plusieurs sources :
consonnes continues « F » et « V » se prononcent grâce au passage
de l’air dans un canal rétréci au niveau des lèvres. L’air passe par – le cortex cérébral, centre nerveux supérieur qui décide de
une fente horizontale comprise entre la lèvre supérieure et les l’exécution des mouvements ;
incisives inférieures. – les centres sous-corticaux, en relation avec le cortex cérébral,
Le « S » et le « Z » sont obtenus par le passage de l’air dans un canal décident du programme d’exécution du mouvement et coordonnent
étroit, arrondi, avec une cavité antérieure très petite. ce mouvement ;
La langue ne s’interpose jamais entre les arcades dentaires (fig 3). – les récepteurs [3] qui transmettent des informations sur le
Jinkine, en 1953, fait remarquer la dualité des mécanismes moteurs déroulement du programme et sa progression pour les praxies
de la parole. Ils correspondent aux deux systèmes d’organes mis en articulatoires sont :

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1 Cortex 4 Schéma simplifié du


cérébral système moteur des effec-
teurs buccaux.
ATM : articulation tempo-
romandibulaire.
Cervelet 5

Centres
2 sous-corticaux

Noyaux bulbaires Récepteurs


3 Vestibulaires
moteurs
ATM
Musculaires
Parodontaux 6
Muqueuse buccale

Muscles oro-
4
faciaux

– les récepteurs musculaires ; 5 Appui de la langue à la papille palatine.

– les récepteurs vestibulaires ;


– le caractère des lèvres (hauteur, épaisseur), le rapport des lèvres
– les récepteurs de la muqueuse buccale ;
entre elles (stomion), le rapport des lèvres avec les dents ;
– les récepteurs parodontaux ;
– le caractère de la partie antérieure de la langue : volume, posture
– les récepteurs de l’articulation temporomandibulaire (ATM). de repos, rapport avec les dents ;
Si le mouvement ne correspond pas tout à fait au programme, des – le caractère des bords de la langue.
compensations se font. La transmission se fait par des voies qui
descendent des centres nerveux jusqu’au niveau des motoneurones, Il faut écarter les commissures labiales le plus doucement possible
voies pyramidale et extrapyramidale (fig 4). pour éviter tout mouvement parasite.
Les mouvements volontaires résultent d’un apprentissage ; lorsqu’ils Si l’audition suffit à mettre en évidence l’articulation défectueuse du
sont fréquemment répétés, ils deviennent automatiques. C’est le cas phonème « S », responsable du zézaiement ou du chuintement, c’est
des mouvements volontaires aboutissant à l’articulation des uniquement l’examen à contre-jour qui permet de préciser où se fait
phonèmes. Lorsque ces mouvements ne sont pas conformes, il est l’appui lingual dans l’articulation du « D » ou du « T » [28].
possible de les modifier par un apprentissage et d’obtenir une La palpation des lèvres puis des joues permet d’apprécier le tonus
automatisation des nouveaux mouvements. C’est le but de de la sangle orojugale en se gardant de confondre une hypertonie
l’éducation musculaire. avec des muscles contractés.

Défauts d’articulation ayant une incidence sur la croissance


Retentissement physiologique des procès alvéolaires
Parmi les nombreux troubles de l’articulation des sons, seuls ceux
MISE EN ÉVIDENCE DE L’ACTION DE LA MUSCULATURE des consonnes dont l’émission peut entraîner des rapports
anormaux des muscles buccaux avec le système dentaire intéressent
¶ Examen clinique les praticiens faisant les traitements d’orthopédie maxillo-dento-
faciale [6, 14, 29].
Technique de l’examen Schématiquement, on peut énumérer ces anomalies de la façon
suivante :
Il est effectué sur un enfant assis, mis en confiance, regardant
l’horizon. Il faut prêter une grande attention à l’installation de – consonnes D, T, N : au lieu de prendre contact avec la papille
l’enfant sur le fauteuil : palatine (fig 5), la pointe de la langue prend appui sur la face
palatine des incisives supérieures (fig 6) ou sur les incisives
– le dossier doit être redressé au maximum, la têtière légèrement
inférieures (fig 7A, B) ou s’interpose entre les dents (fig 8). Parfois,
avancée ;
les bords de la langue s’interposent entre les molaires (fig 9, 10) ;
– dans certains cas, il peut être préférable de l’asseoir
– consonne L : la pointe de la langue peut prendre les mêmes appuis
transversalement, les jambes pendantes, le dos non soutenu, de
anormaux que pour l’articulation des D, T, N ;
façon à pouvoir l’examiner sous différents angles.
Il est souvent difficile d’obtenir un véritable relâchement. Il faut – consonne S, Z : la pointe de la langue s’interpose entre les incisives
répéter de nombreuses fois l’examen pour retrouver une attitude ou se relève derrière les incisives supérieures. Parfois, les bords de
naturelle. Il faut arriver à faire parler ou lire l’enfant suffisamment la langue s’interposent entre les molaires ;
longtemps pour détourner son attention. Souvent, sinon toujours, – consonnes F, V : la lèvre inférieure s’interpose entre les incisives
l’examen musculaire est mené sans ordre, en revenant plusieurs fois (fig 11, 12).
sur un même temps de fonction.
Soulignons une fois de plus que la plupart de ces troubles moteurs
sont associés à des anomalies des praxies de la déglutition et qu’ils
Inspection
ne produisent aucun défaut audible d’articulation, alors qu’ils sont
Elle permet d’observer : nocifs pour le système dentaire.

4
Stomatologie/Odontologie Phonation et orthodontie 22-009-B-10

8 Appui sur les incisives et interposition des bords de la langue.

6 Appui sur les incisives supérieures et interposition des bords de la langue au cours
de l’articulation des palatales antérieures.

9 Appui à la papille palatine et interposition des bords de la langue au cours de l’ar-


ticulation des palatales antérieures.
*
A

*
B

7 A. Appui de la langue sur les incisives inférieures.


B. Appui de la langue sur les incisives inférieures.

¶ Examen en cinématographie sous amplificateur


de brillance de Fieux [21, 23, 25]
Cet examen a permis d’étudier la cinétique de la déglutition et de la
phonation et a montré que pendant l’articulation des phonèmes, la 10 Interposition totale de la langue.
langue et les lèvres se rapprochaient ou s’écartaient des incisives
par des mouvements exactement opposés.
déplacement des dents lorsqu’elles sont soumises à une force. Il n’est
¶ Jauges d’extensométrie pas nécessaire que cette force soit importante pour entraîner un
déplacement. Plusieurs tentatives ont été effectuées depuis 1950,
La clinique et la pratique des traitements mécaniques pour mesurer les forces musculaires exercées sur les dents à l’aide
orthodontiques nous ont permis de connaître le mécanisme du de divers manomètres, dont les jauges d’extensométrie. Elles n’ont

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13 Jauges d’extensomé-
trie. 1. Jauges d’extensomé-
trie ; 2. joue ; 3. dent ; 4.
langue ; 5. voltmètre.

3
1

4
2

11 Accrochage de la lèvre inférieure pour les F, V.

particulier pendant la phonation, mais ne permet pas de préciser si


les pressions exercées par la langue sont bien exactement
compensées par celles exercées en même temps par les muscles de
la sangle labiojugale.
Les jauges d’extensométrie ont permis de mesurer chez certains de
nos patients une position d’équilibre musculaire différente au repos
et en fonction. Chez ces sujets, la croissance des procès alvéolaires
s’effectue dans une position intermédiaire entre celle qu’ils auraient
s’ils étaient toujours au repos, et celle qu’ils auraient s’ils parlaient
continuellement. Les dents reçoivent alors sans cesse une pression
perpendiculaire à leur axe, une force résultante tantôt vestibulaire,
tantôt linguale, dont on peut mesurer l’intensité. Lors de l’examen
aux jauges d’extensométrie, on constate que la courbe dévie pendant
12 Interposition partielle de la lèvre inférieure pour les F, V. la déglutition et la phonation, soit dans un sens soit dans l’autre. La
déviation correspond à des forces de 20, 30 et parfois même de
permis de mesurer que, soit l’action de la langue, soit l’action des 40 g/cm2. Il est possible de savoir si l’anomalie d’articulé présentée
lèvres ou des joues sur les couronnes dentaires. Parfois, seule la par la plupart de ces patients a pour étiologie des anomalies
moyenne des forces, pendant un temps donné, a été mesurée. musculaires constitutionnelles ou des anomalies musculaires
C’est à Cauhépé [15] que revient le mérite d’avoir, en 1958 et 1960, fonctionnelles, de meilleur pronostic car pouvant être corrigées par
étudié les conditions d’équilibre des dents et d’avoir prouvé que une éducation musculaire [4, 30].
chez l’individu normal, les positions d’équilibre musculaire sont les Chez l’adulte, le déséquilibre dentaire transmis au ligament
mêmes au repos qu’en fonction (déglutition et phonation), de telle alvéolodentaire peut provoquer, à plus ou moins brève échéance une
sorte que les dents ne subissent aucun effet perpendiculaire à leur alvéolyse.
axe. On peut donc affirmer que les anomalies musculaires des fonctions
Un grand nombre de mesures ont ensuite été faites [20] et plus de déglutition et de phonation, qui ne perturbent pas les sons eux-
particulièrement par les membres de l’équipe de l’Institut de mêmes, (les sons étant généralement normaux), provoquent des
stomatologie de la faculté de médecine de Paris : Coutand, Bouvet, troubles de la morphologie des arcades dentaires et compromettent
Netter, Sasaki, Deneuville [8, 11, 17]. l’existence même du système dentaire.
Le dispositif utilisé est composé de deux minuscules jauges
d’extensométrie (d’une taille inférieure à celle des boîtiers
orthodontiques) collées l’une du côté vestibulaire, l’autre du côté Morphogenèse des arcades dentaires
lingual de la même dent. Ces jauges sont montées dans un pont de
Wheatstone (fig 13). L’ensemble est relié à un ordinateur. Le système dentaire est formé de trois organes [11, 13] :
Lorsque ces dynamomètres sont déformés par la pression des
muscles, leur résistance varie. Les variations de résistance sont – la dent ;
directement proportionnelles aux variations de pression. Le pont de – le procès alvéolaire ;
Wheatstone n’est plus équilibré et le courant passe par le
galvanomètre. Une force exercée du côté vestibulaire fait dévier le – le ligament alvéolodentaire, qui dépose le cément sur les racines
galvanomètre dans un sens et une force exercée du côté lingual dans et édifie le procès alvéolaire.
l’autre. Si des forces égales sont exercées sur les jauges, le Il se comporte donc comme un périoste (phénomènes
galvanomètre reste au zéro. Le galvanomètre est réglé au zéro d’apposition-résorption).
lorsque le sujet examiné est au repos. L’ensemble est relié à un Chez le nouveau-né, les dents temporaires sont alignées sous la
ordinateur qui permet de créer une courbe représentative des forces gencive, le long des crêtes des maxillaires. Elles sortent lorsque le
opposées qui s’exercent sur les dents. On le fait parler et il déglutit ligament alvéolodentaire édifie le procès alvéolaire. Chaque
spontanément sa salive. Chez un sujet normal, la courbe reste sur le couronne se trouve alors située entre la langue en dedans, les joues
zéro pendant toute la durée de l’expérimentation. Celle-ci peut durer et les lèvres en dehors et se retrouve soumise aux forces opposées
30 à 60 minutes. de ces muscles. Elle les transmet au ligament qui ajuste son activité
L’examen clinique permet de remarquer l’existence d’anomalies et dirige la croissance du procès alvéolaire de telle sorte que l’axe de
musculaires chez certains de nos patients au repos et en fonction, en la dent se confonde avec la résultante des forces qu’elle subit.

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Stomatologie/Odontologie Phonation et orthodontie 22-009-B-10

La dent temporaire pousse donc dans un couloir musculaire et est


alors en équilibre. Le même phénomène se reproduit au moment de
l’éruption des dents définitives.
La courbe des arcades dentaires objective la ligne le long de laquelle
les forces opposées de la langue et de la sangle orojugale se
neutralisent.
Pour aboutir à un engrènement dentaire efficace, il faut une
adaptation du système dentaire dans les trois sens de l’espace,
adaptations verticale, sagittale, transversale.

ADAPTATION VERTICALE 1
Il existe, au repos, un espace entre les dents, plus ou moins
3
important suivant le type morphologique de la face, défini pour
2
chaque enfant, constant au cours de la croissance et tout au long de
la vie. Cet espace correspond à la position de repos de la mandibule
et s’exprime cliniquement par l’espace libre molaire, c’est-à-dire
4
l’espace entre les dents de 6 ans supérieures et inférieures, lorsque *
A
l’enfant est examiné au repos.
Conséquences de ces caractères normaux : l’espace libre molaire est
de 1 à 2 mm.

ADAPTATION SAGITTALE 3
1
L’adaptation du système dentaire se fait d’une part grâce à la 4
tonicité et à la forme des lèvres et, d’autre part, à la posture et au 2
volume de la langue. *B
Conséquences de ces caractères normaux : engrènement dentaire 14 Diagnostic des anomalies alvéolaires transversales.
normal dans le sens sagittal. A. De face. 1. Sinus maxillaire ; 2. dent de 6 ans inférieure ; 3. dent de 6 ans su-
périeure ; 4. direction du rayon (perpendiculaire au plan de morsure).
– Inclinaisons alvéolaires moyennes : lorsqu’il n’y a pas de décalage B. Incidence verticale de Bouvet. 1. Image en coupe de la dent de 6 ans supérieure ;
des bases, I/F = 107° ; i/M = 90° ; I/i = 135°, avec un engrènement 2. limite inféro-interne du sinus ; 3. image en coupe de la dent de 6 ans inférieure ;
dentaire normal. 4. rebord interne de la mandibule.

– Inclinaisons compensatrices d’un décalage des bases dans le sens


sagittal, par exemple : rétroalvéolie supérieure et/ou proalvéolie
inférieure compensatrices d’un décalage des bases dans le sens
d’une mandibule en retrait.
Il est important de noter que les inclinaisons alvéolaires moyennes
varient en fonction de l’âge. En effet, au moment de la puberté, on
observe une augmentation du tonus qui provoque l’ouverture de
l’angle I/i (l’effet contraire se produit au moment de la ménopause).

ADAPTATION TRANSVERSALE
L’adaptation du système dentaire se fait d’une part grâce à la
tonicité des joues et, d’autre part, à la posture et au volume de la
langue.
Conséquences de ces caractères normaux : engrènement dentaire
normal dans le sens transversal.
Inclinaisons alvéolaires moyennes. Lorsqu’il n’y a pas de décalage des
bases, le point le plus interne de la face palatale de l’image en coupe
de la dent de 6 ans supérieure se situe à 0,5 mm en dehors de la
limite inféro-interne du sinus maxillaire. Le point le plus interne de
la face linguale de l’image en coupe de la dent de 6 ans inférieure se 15 Infraclusie incisive par interposition de la pointe de la langue.
situe à 1 mm en dedans du bord interne de la mandibule (moyenne
droite et gauche) (fig 14).
– l’infra-alvéolie molaire : l’interposition des bords de la langue au
repos entre les arcades entraîne un défaut de croissance alvéolaire
CONSÉQUENCES MORPHOLOGIQUES qui se constate par l’augmentation de l’espace libre molaire.
¶ Dans le sens vertical ¶ Dans le sens sagittal
– l’infra-alvéolie incisive peut être due à deux mécanismes : – La proalvéolie incisive supérieure est due à l’appui de la langue
– l’interposition de la partie antérieure de la langue, au repos ou sur les incisives supérieures au repos et en fonction [33] alors que les
en fonction (fig 15) ; lèvres, pour des raisons généralement d’ordre constitutionnel,
exercent des pressions moindres. La résultante des forces est donc
– l’existence de pressions concomitantes de la langue et des lèvres
dirigée en avant ;
au moment de la déglutition et de la phonation [9] (étant donné
l’anatomie des incisives supérieures) entraîne un défaut de – la proalvéolie incisive inférieure est plus souvent due à des
croissance alvéolaire incisive. La résultante des forces est dirigée anomalies constitutionnelles qu’à un appui de la langue en fonction
vers le haut (fig 16, 17) ; sur les incisives inférieures. Il en est de même de :

7
22-009-B-10 Phonation et orthodontie Stomatologie/Odontologie

16 Mécanismes de l’infra-alvéolie inci-


sive. 1. Pression de la langue ; 2. résul-
tante des forces ; 3. pression de la lèvre.

1 2

19 Endoalvéolie supérieure avec linguoclusie molaire unilatérale.

Ces anomalies alvéolaires peuvent être isolées ou associées


(biproalvéolie, birétroalvéolie, etc).

RETENTISSEMENT PATHOLOGIQUE

¶ Sur la prononciation
Certains troubles de l’articulation phonétique apparaissent isolés
sans qu’il existe aucune perturbation morphologique maxillofaciale.
Ils sont dus à des anomalies du comportement musculaire, en
particulier lingual, dont le point d’articulation se trouve dévié :
– le sigmatisme interdental : (zozotement ou zézaiement), la pointe
de la langue prend appui sur les incisives supérieures ou passe entre
les arcades dentaires ;
17 Infraclusie incisive par appui simultané de la pointe de la langue et de la lèvre su-
périeure. – le sigmatisme latéral : au lieu d’un écoulement d’air médian, il se
produit un écoulement unilatéral ou parfois bilatéral. Dans le
premier cas, le sujet met en contact la langue, la région palatale
antérieure et un côté de l’arcade dentaire, ce qui ne laisse à l’air
2 qu’un étroit passage de l’autre côté, entre la langue, les dents et les
joues. Ce défaut est appelé chuintement ;
– le sigmatisme dorsal : le point d’articulation devient trop
postérieur et le sujet, au lieu de creuser sa langue sur la ligne
médiane, tout en relevant la pointe, la relève en dôme ; l’air est ainsi
3
1 poussé dans un orifice étalé entre la langue et le palais dur ;
– le sigmatisme nasal : le sujet obture par erreur la voie buccale ;
l’air ne peut plus s’écouler que par le nez.

¶ Sur l’articulé [1]

Les troubles d’articulé ne sont que des signes cliniques d’anomalies


18 Mécanisme de l’endoalvéolie supérieure. 1. Pression des joues sur les dents de 6 alvéolaires.
ans supérieures ; 2. résultante des forces ; 3. interposition des bords de la langue.
Les couronnes sont sollicitées entre deux positions, celle qui
– la rétroalvéolie supérieure ; correspond à l’équilibre des muscles au repos et celle qui est définie
par le rapport des forces en fonction. La direction de la croissance
– la rétroalvéolie inférieure.
alvéolaire peut être ainsi déviée. La dent s’incline alors dans une
¶ Dans le sens transversal position intermédiaire où elle reste toujours déséquilibrée. La gaine
osseuse alvéolaire s’édifie dans une inclinaison anormale et l’arcade
– L’endoalvéolie supérieure [21] est due à l’interposition des bords dentaire est déformée. Un trouble alvéolaire est constitué qui pourra
de la langue entre les molaires en fonction alors qu’il existe une se traduire cliniquement par une anomalie d’articulé.
contraction des muscles buccinateurs augmentant la pression des
joues de dehors en dedans. La résultante des forces est dirigée en Dans le sens vertical
dedans (fig 18, 19).
Les anomalies alvéolaires suivantes sont plutôt d’origine – Au niveau des incisives :
constitutionnelle : – l’infraclusie est un signe clinique de l’infra-alvéolie incisive ;
– l’endoalvéolie inférieure ; – la supraclusie est un signe clinique de la supra-alvéolie incisive
– les exoalvéolies supérieure et inférieure. ou de l’infra-alvéolie molaire.

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Stomatologie/Odontologie Phonation et orthodontie 22-009-B-10

– Au niveau des molaires : doigt a généralement une incisive supérieure plus haute que les
autres. Le doigt sucé a un cal ou bien, parfois, la peau est plus
– il n’existe pas de défaut d’articulé dans le sens vertical dû à des
épaisse, plus rugueuse à la palpation comparativement à la peau du
anomalies alvéolaires.
même doigt de l’autre main. L’éducateur devra donc convaincre
Dans le sens sagittal l’enfant de cesser sa mauvaise habitude à l’aide d’une
psychothérapie élémentaire [9].
– La vestibuloclusie des incisives supérieures peut correspondre à
une proalvéolie supérieure ou à une rétroalvéolie inférieure isolée. ¶ Contre-indications liées aux parents
– La linguoclusie des incisives supérieures peut correspondre à une
rétroalvéolie supérieure ou à une proalvéolie inférieure isolée. Lorsque les parents, non motivés, ne comprennent pas la nécessité
d’un tel traitement.
Dans le sens transversal
– La linguoclusie molaire supérieure peut correspondre à une CONDUITE DE L’ÉDUCATION NEUROMUSCULAIRE [32, 34]

endoalvéolie supérieure ou une exoalvéolie inférieure isolée. Bouvet en a expliqué la technique dès 1955. Habituellement, une
série de douze à quinze séances suffit. Il faut que l’enfant prenne
conscience du geste anormal et connaisse le but recherché.
Thérapeutique
Pendant la première séance, on lui fait percevoir la position de la
pointe de sa langue lors de la déglutition de la salive et au cours de
INDICATIONS DE L’ÉDUCATION DE L’ARTICULATION l’articulation phonétique des D, T, N, L. On lui explique le
PHONÉTIQUE [4, 19] mouvement de déglutition souhaité en le ralentissant et le
L’éducation de l’articulation des consonnes palatales antérieures doit décomposant dans ses principaux temps. L’enfant doit placer la
toujours être associée à l’éducation de la déglutition [9]. pointe de sa langue à la papille palatine. À l’aide d’un doigt, on lui
Elle doit être entreprise chaque fois que l’on modifie la forme de montre l’endroit convenable. Il doit ensuite mettre ses arcades en
l’arcade dentaire, que ce soit à l’aide d’un appareil d’orthodontie ou contact. On lui fait remarquer, grâce à une main posée sur sa joue, la
par intervention chirurgicale. contraction du muscle masséter. Cette contraction doit se prolonger
Elle peut être le seul traitement si le trouble de l’articulé est de faible pendant toute la durée du mouvement de déglutition. On lui
amplitude ou dans les infra-alvéolies incisives. demande de joindre ses lèvres sans les contracter. Il avale sa salive
sans entrouvrir ses arcades dentaires, sans déplacer la pointe de sa
Elle peut succéder à un traitement mécanique si le trouble d’articulé
langue, sans contracter l’orbiculaire des lèvres. On peut, à l’aide de
est plus important, gênant la spontanéité des mouvements de
deux doigts, entrouvrir délicatement ses lèvres afin de contrôler la
déglutition et de l’articulation phonétique.
position de la pointe de sa langue.
[2]
Au cours de la deuxième séance, on entreprend l’éducation de
CONTRE-INDICATIONS l’articulation des phonèmes D et T, en les associant aux différentes
L’éducation de l’articulation phonétique et de la déglutition ne doit voyelles. On vérifie que le mouvement de déglutition est
pas être entreprise si l’articulé dentaire est satisfaisant, surtout si les correctement compris et fait.
anomalies alvéolaires constatées compensent un décalage des bases Au cours de la troisième séance, on s’attache à l’articulation des N,
osseuses. Gn, L.
¶ Contre-indications liées aux appareils d’orthodontie Entre chaque séance, l’enfant doit faire des exercices biquotidiens
amovibles qu’il contrôle en les effectuant devant un miroir.
Pendant les séances suivantes, on lui demande de prononcer des
L’éducation doit toujours être faite, les appareils d’orthodontie étant
mots. Les premiers mots ne comprennent que des phonèmes
en bouche. Il serait en effet illusoire de penser obtenir un
correspondant aux voyelles faisant l’objet de l’éducation l’objet de
automatisme des mouvements de déglutition si l’enfant ne peut faire
sa rééducation (natte, date, dindon, tartine). Les suivants sont faits
des exercices que pendant quelques minutes chaque jour, en
de phonèmes variés (étui, édredon, tasse, etc). On laisse à l’enfant le
l’absence d’appareil.
choix des mots car il est important qu’il prenne une part active à sa
Celui-ci doit donc être suffisamment échancré pour permettre un rééducation.
contact de la pointe de la langue avec la papille palatine. Dans le cas
contraire, l’éducation sera impossible. Certaines contre-indications Par la suite, on lui fait lire des phrases puis on passe à la lecture
interdisent l’éducation de la musculature ainsi que toute contrôlée. On lui demande ultérieurement de lire tout haut et de
thérapeutique mécanique visant à modifier la forme des arcades. réciter ses leçons chaque soir en plaçant correctement sa langue. Il
C’est le cas des contre-indications suivantes car elles seraient suivies faut que, progressivement, il abandonne les exercices pour passer à
de récidives. une nouvelle habitude de prononciation dans ses actes courants.
Lors des dernières séances, on demande à l’enfant de réciter une
¶ Contre-indications liées au patient récitation. On contrôle qu’il a bien acquis le mode d’articulation des
D, T, N et L et que les mouvements spontanés de la déglutition sont
Enfant non motivé corrects.
L’âge idéal pour faire cette éducation se situe entre 8 et 12 ans.
Dans le cas d’un enfant ayant un retard scolaire important ou
suivant une autre éducation pour dyslexie ou dysorthographie, il Conclusion
est important que l’enfant axe ses efforts sur ses progrès scolaires
plutôt que sur la correction de la forme de son arcade dentaire. De Les muscles de la sphère orofaciale jouent un rôle dans l’articulation des
même pour un enfant ayant un quotient intellectuel inférieur à la sons, dans la mimique, mais aussi dans la morphogenèse des arcades
moyenne. dentaires, d’où la relation étroite entre la phonation et l’orthopédie
dento-maxillo-faciale. Ce rôle a été mis en évidence par l’examen aux
Enfant suceur d’un doigt jauges d’extensométrie.
Le réflexe de succion doit avoir totalement disparu quand on Il est primordial, devant tout trouble d’articulé, de faire un examen
entreprend l’éducation. Il n’est pas possible que notre petit patient clinique complet et de rechercher des anomalies fonctionnelles
ait à la fois un comportement d’adulte et d’enfant. Le suceur de responsables.

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Un traitement étiologique bien conduit : éducation de la musculature, Alors que les troubles audibles motivent souvent des consultations en
doit être entrepris, l’âge idéal du patient étant de 8 à 12 ans pour orthophonie, ce sont les troubles non audibles, le plus souvent, qui
obtenir une automatisation des praxies de phonation (et de déglutition) entraînent des anomalies d’articulé.
afin d’éviter une récidive. D’autre part, le dépistage systématique des troubles de la phonation ne
signifie pas toujours éducation. Certaines positions d’articulation des
Ce ne sont pas les anomalies d’articulé dentaire qui sont responsables sons vont dans le sens des compensations alvéolaires d’un décalage des
des anomalies d’articulation des consonnes mais l’inverse. bases : on se garde de les corriger.

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