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Fischer Georges. La souveraineté sur les ressources naturelles. In: Annuaire français de droit international, volume 8, 1962.
pp. 516-528;
doi : https://doi.org/10.3406/afdi.1962.985
https://www.persee.fr/doc/afdi_0066-3085_1962_num_8_1_985
avance qu'il n'exercera pas ses fonctions avec impartialité, étant donné la
politique qu'il a poursuivie jusqu'alors. Plusieurs exemples récents de
décolonisation ont montré à quel point il est difficile de reconnaître à la
procédure d'autodétermination un caractère véritablement objectif, étant
donné les conditions mêmes dans lesquelles la décolonisation s'accomplit. On
peut se demander si les termes de l'accord du 15 août 1962 n'ont pas encore
aggravé ces conditions : mettant fin à un colonialisme européen, était-il
nécessaire qu'ils laissent la porte ouverte à un impérialisme asiatique ?
LA SOUVERAINETE
SUR LES RESSOURCES NATURELLES
G. FISCHER
II
(13) V. Ass. Gén., 7e session, 3e Commission, 443e, 444e, 445e séances; cf. aussi Rapport de
la Commission des Droits de l'Homme sur sa 8e session, 1952.
(14) Rappelons que suivant la C.P.J.L, l'agriculture « est incontestablement l'industrie du
monde la plus ancienne et la plus considérable ». Série B, n° 2.
(15) Déclaration du membre suédois, M. Petren, A/AC. 97/SR. 22.
(16) Cf. F. Pebhoux, L'Anglo-Iranian Oil Cy et les effets de domination, Economie
appliquée, janvier-mars 1952, notamment p. 158.
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LA SOUVERAINETÉ SUR LES RESSOURCES NATURELLES 521
internationale tout entière, ne peut être poursuivi avec succès sans que
soient bouleversées des structures économiques mises en place, par des
étrangers au profit de capitalistes étrangers, pendant la période coloniale ou
semi-coloniale caractérisée par l'inégalité des rapports entre pays. Il y a donc
deux périodes : avant et après, et la plus grande liberté doit être reconnue
à l'Etat de changer ou bouleverser les contrats intervenus, les concessions
accordées, les droits acquis pendant la première période. Le délégué de la
Yougoslavie a, d'une façon symptomatique, fait écho à cette thèse en
déclarant qu'il s'agissait d'un problème d'émancipation économique. Il a affirmé
qu'on ne pouvait pas « traiter de la même manière la propriété étrangère
acquise au moment où les deux Etats intéressés étaient souverains et la
propriété étrangère acquise quand l'un des Etats était souverain et l'autre non.
On ne saurait automatiquement appliquer à une situation où la plupart des
pays sont indépendants, les normes du droit international qui étaient
appliquées lorsque la moitié du genre humain vivait dans un état de
dépendance ». Le même délégué faisait appel à la compréhension des pays
développés, en soulignant le contraste qui existait entre le domaine des fonds publics
où la souplesse prévalait (prêts à long terme et à très faible taux d'intérêt)
et le domaine des investissements privés, régi encore par des conceptions
trop rigides (exigence par les Etats développés d'une indemnisation prompte,
effective et satisfaisante en cas de nationalisation) (18).
Les autres éléments qui, suivant les pays en voie de développement,
découlent du principe de la souveraineté permanente pourraient être
indiqués comme suit. En cas de nationalisation ou d'expropriation une indemnité
est due, mais le montant de celle-ci et les conditions dans lesquelles elle est
versée sont fixées par la loi nationale (19) . Le droit interne régit aussi tous les
contrats conclus par l'Etat avec une entité non étatique. Les différends qui
naîtraient d'un tel contrat sont de la compétence des tribunaux nationaux.
Lorsque, pour sauvegarder ses intérêts nationaux, un pays est obligé de
modifier un contrat conclu avec un étranger ou d'acquérir, nationaliser ou
exproprier les biens d'un étranger, l'Etat dont relève cet étranger ne devrait
intervenir ni sous la forme de la protection diplomatique ni sous une autre
forme quelconque. L'aide économique et technique fournie par un Etat à un
autre ne devrait comporter aucune condition incompatible avec ce qui
précède (20).
démarche américaine réclame que le principe de l'indemnisation, reconnu par Ceylan, reçoive
un commencement d'exécution, mais qu'elle n'insiste, ni sur le montant de l'indemnité ni sur
les modalités de l'indemnisation.
(21) Cf. J. Castaneda, The underdeveloped Nations and the development of International
Law, International Organization, XV, 1 (1961), pp. 38-48.
(22) Suivant un tribunal arbitral, le principe du respect des droits acquis est l'un des
principes fondamentaux du droit international public et du droit interne de la plupart des
pays civilisés (Arbitration between Saudi Arabia and Aramco, Award, 1958, p. 101) . On peut
se demander si cette constatation est conforme à l'évolution récente des faits, de la pratique
et de la doctrine. Cf. Kuhn, A.J.I.L., 1951, pp. 709-12; Annuaire de l'I.D.I., vol. 43-1, 1950,
pp. 42 s., et vol. 44-11, 1952, pp. 251 s.; P. de Visscher, R.G.D.I.P., 1958, pp. 400-443; Unesco/
SS/ Coop. /Inter 1, Annexe 4 (1958) ; Lachs, A.F.D.I., 1961, pp. 43-66.
(23) Cf. Hyde, A.J.I.L., 1956, pp. 854-867.
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(24) A/PV. 1193 et 1194. Les 41 pays ayant voté en faveur de l'élimination du paragraphe
comprennent notamment les Etats occidentaux, presque tous les pays d'Amérique latine et
d'autres pays en voie de développement tels que le Pakistan, les Philippines, Trinidad et Tobago,
la Turquie, la Malaisie, la Grèce. Les 38 pays ayant donné leur appui au paragraphe
comprennent les Etats du bloc soviétique, la Jordanie, le Liban, la Libye, la Mauritanie, le
Maroc, le Nigeria, Panama, l'Arabie Séoudite, le Sénégal, Sierra Leone, la Syrie, le
Tanganyika, le Togo, la Tunisie, l'Ouganda, la R.A.U., le Yemen, la Yougoslavie, l'Afghanistan,
l'Algérie, la Birmanie, le Cambodge, Ceylan, le Congo (Léopoldville) , Cuba, la Guinée,
l'Indonésie, l'Iran et l'Irak.
(25) A/PV. 1193.
(26) Cf. Leith, Exploitation and world progress, Foreign Affairs, octobre 1927; Politis,
Le problème des limitations de la souveraineté et la théorie de l'abus des droits, R.C.A.D.I.,
vol. 6, 1925, pp. 34-35; Ph. M. Brown, A.J.I.L., 1945, pp. 85-86; Nitze, Department of State
Bulletin, 16 février 1947, pp. 300-302; Wilson, A.J.I.L., 1954, pp. 355-79.
(27) Cf. Fischer, Problèmes internationaux relatifs aux pays sous-développés, Cours de
l'Institut des Hautes Etudes Internationales, Paris, 1954-55, pp. 39-85.
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(28) Cf. Nurske, Problems of capital formation in underdeveloped countries, Oxford, 1953,
p. 153; Clairmonte, Le libéralisme économique et les pays sous-développés, Genève-Paris,
1958, pp. 26 s.
(29) V. sur ces problèmes Fischer, Un cas de décolonisation : Les Etats-Unis et les
Philippines, Paris, 1960, pp. 287 s.
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(30) Art. 24. V. le texte dans Chamisso, Une politique économique d'hémisphère, Paris,
1953, pp. 599 s.
(31) II peut paraître absurde de faire intervenir le droit international après avoir reconnu
le droit discrétionnaire de l'Etat d'édicter les normes régissant les investissements à venir.
Mais le problème a pu être soulevé au sujet de la clause Calvo. Shea, The Calvo Clause,
Minneapolis, 1955.
(32) Cf. C.I.J., Recueil 1952, p. 112.
(33) R.G.D.I.P., 1958, pp. 436-39.
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(34) A/C.2/SR.835.
(34b is) y. aussi supra, note 19.
(35) A/AC.97/L.5 et Rev. 1.
(36) A/C.2/L.691.
(37) A/C.2/SR.858 et A/P.V.1194.
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fait que le texte n'est pas l'œuvre de juristes. Les contrats semblent bien être
visés aussi, puisque d'après le paragraphe 9 seuls « les accords... librement
conclus... seront respectés de bonne foi ». Le terme librement pourrait se
prêter d'ailleurs à des interprétations variées.
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