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POURQUOI L’EXÉCUTION
DE LA STRATÉGIE
ÉCHOUE – ET QUELLES
SONT LES SOLUTIONS ?
par Donald Sull, Rebecca Homkes et Charles Sull
1 Harvard Business Review Décembre 2015-janvier 2016
HBRFRANCE.FR
D
ŒUVRE D’ART Yayoi Kusama, Infinity Mirrored Room – The Souls of Millions
of Light Years Away, 2013, bois, métal, miroirs, plastique, panneau acrylique, caoutchouc,
lumières LED et balles en acrylique, 2,87 m x 4,15 m x 4,27 m
à la seule stratégie et ils ont tendance est toujours en cours mais offre déjà de précieuses in-
formations, la plus importante étant la suivante : plu-
à se concentrer sur la tactique ou sieurs croyances très répandues quant à la manière de
PAGE CI-CONTRE : YAYOI KUSAMA. AVEC L’AIMABLE AUTORISATION DE DAVID ZWIRNER, VICTORIA MIRO GALLERY, OTA FINE ARTS, KUSAMA ENTERPRISE
cas particulier. Que savons-nous donc idées reçues parmi les plus pernicieuses et les rempla-
çons par un point de vue plus exact qui aidera les ma-
vraiment de l’exécution de la stratégie ? nagers à exécuter la stratégie de manière efficace.
Peter Drucker sur le management par objectifs, et à fois sur trois, ils sont mal gérés, c’est-à-dire réglés
présent nos connaissances sur l’alignement sont avec un certain retard (38% des cas), réglés rapide-
vastes. Nos travaux montrent que les bonnes pratiques ment mais de manière i nefficace (14%), ou simple-
sont bien établies dans les entreprises d’aujourd’hui. ment laissés latents (12%).
Plus de 80% des managers déclarent que leurs objec- Même si les managers associent souvent l’exécu-
tifs sont limités en nombre, spécifiques et mesurables, tion à l’alignement, ils reconnaissent toutefois l’im-
et qu’ils disposent des ressources nécessaires pour les portance de la coordination lorsque la question leur
atteindre. Si la plupart des entreprises agissent conve- est directement posée. Lorsqu’on leur demande
nablement en matière d’alignement, pourquoi ont- d’identifier leur plus grande difficulté pour exécuter
elles des difficultés à exécuter leurs stratégies ? la stratégie de leur entreprise, 30% citent le manque
Pour le savoir, nous avons demandé aux per- de coordination entre les unités, juste derrière l’inca-
sonnes interrogées si elles peuvent compter sur les pacité d’assurer l’alignement (40%). Les managers
autres pour honorer leurs engagements – une ma- estiment également que le risque de ne pas atteindre
nière fiable de mesurer si ces engagements sont — leurs o
bjectifs de performance est nettement plus lié
effectivement tenus (voir « Promise-Based Manage- à un manque de soutien des autres unités qu’à l’inca-
ment: The Essence of Execution », de Donald N. Sull pacité de leur propre équipe à obtenir des résultats.
et Charles Spinosa, édition américaine de HBR d’avril Alors que les entreprises disposent de processus
2007). 84% des m anagers estiment qu’ils peuvent efficaces pour relayer les objectifs à tous les niveaux
toujours ou presque toujours compter sur leur chef hiérarchiques, leurs systèmes de management des
ou leurs collaborateurs directs – un résultat qui objectifs horizontaux manquent de pertinence. Plus
plairait à Peter Drucker mais qui n’explique pas vrai- de 80% des entreprises que nous avons étudiées sont
ment pourquoi l’exécution échoue. Lorsque nous dotées d’au moins un système formel pour gérer les
posons des questions sur l’engagement dans les fonc- objectifs entre les différents silos (comités interfonc-
tions et les business units, la réponse d evient claire. tionnels, accords inter-services, bureaux centralisés
Seuls 9% des managers déclarent qu’ils peuvent de gestion de projets), mais seuls 20% des managers
toujours compter sur les collègues des autres fonc- jugent que ces systèmes fonctionnent toujours ou
tions et unités, et seulement 50% estiment qu’ils presque toujours bien. Plus de la moitié d’entre eux
peuvent compter sur eux la plupart du temps. De souhaitent davantage de structure dans les processus
manière générale, l’engagement de ces collègues de coordination des activités entre les unités – deux
n’est pas plus fiable que les promesses des partenaires fois plus que ceux qui désirent d avantage de structure
extérieurs (distributeurs, fournisseurs). dans le système de management par objectifs.
L’idée en bref
LE PROBLÈME L’ÉTUDE LES RECOMMANDATIONS
Il existe des milliers d’ouvrages Les dirigeants attribuent la Pour exécuter leur stratégie,
sur la manière de développer mauvaise exécution à un manque les entreprises doivent encourager
une stratégie, mais très peu d’alignement et à une culture la coordination entre les
sur la manière de l’exécuter de la performance insuffisante. unités et instaurer la souplesse
concrètement. Et la difficulté Il s’avère cependant que, dans nécessaire pour s’adapter
d’atteindre l’excellence en la la plupart des entreprises, à l’évolution du marché.
matière est un obstacle majeur les activités sont bien alignées
dans la plupart des entreprises. sur les objectifs stratégiques et
que les personnes qui réalisent
leurs objectifs chiffrés
sont toujours récompensées.
cabinet Bain & Company, qui enquête régulièrement sentent ou d’atténuer les menaces qui émergent
sur les outils de management utilisés par les grandes (29%), soit elles réagissent rapidement mais perdent
sociétés du monde entier, la planification stratégique de vue leur stratégie (24%). De même qu’ils sou-
est l’un des premiers outils cités. Après avoir investi haitent davantage de structure dans les processus de
beaucoup de temps et d’énergie dans l’élaboration coordination, les managers en désirent également
d’un plan et de son budget associé, les dirigeants plus dans les processus utilisés pour s’adapter aux
considèrent tout écart comme un manque de disci- évolutions du marché.
pline qui réduit la valeur de l’exécution. Il existe une solution apparemment facile qui
Malheureusement, aucun diagramme de Gantt ne consisterait à être plus efficace en matière d’alloca-
résiste à la réalité. Aucun plan ne peut anticiper tous tion des ressources. S’il va sans dire que l’allocation
les événements susceptibles d’aider ou de freiner des ressources est cruciale dans l’exécution, le terme
une entreprise dans la réalisation de ses objectifs lui-même est trompeur. Sur les marchés instables,
stratégiques. A chaque échelon, les managers et les l’affectation des ressources financières, humaines et
employés doivent s’adapter à la réalité du terrain, temporelles ne dépend pas d’une décision ponc-
surmonter des obstacles imprévus et exploiter les tuelle : elle exige au contraire des ajustements conti-
occasions qui se présentent. L’exécution de la straté- nuels. Selon une étude réalisée par le cabinet McKin-
gie, telle que nous la définissons, consiste à saisir les sey, les entreprises qui ont redistribué de manière
opportunités qui soutiennent ladite stratégie tout en réactive des dépenses d’investissement entre les
assurant la coordination continue avec les autres business units obtiennent une rentabilité moyenne
p arties de l’entreprise. Lorsque les managers pour l’actionnaire supérieure de 30% à la moyenne
trouvent des solutions créatives à des problèmes des entreprises qui sont plus lentes à le faire.
imprévus ou qu’ils tirent parti d’opportunités inat- Au lieu de se concentrer sur l’allocation des res-
tendues, ils n’entravent pas la mise en œuvre systé- sources (et la notion de choix ponctuels qu’ils y
matique : ils assurent une exécution optimale. mettent), les managers devraient se concentrer sur la
Ces ajustements en temps réel demandent que les redistribution fluide des fonds, des personnes et du
firmes fassent preuve d’agilité. Dans les sociétés que temps. Nous avons observé une tendance parmi les
nous avons étudiées, le manque d’agilité est un obs- sociétés de notre échantillon : les ressources sont
tacle majeur à une exécution efficace. Lorsqu’on leur souvent affectées à des utilisations peu productives.
demande quel sera le plus grand défi auquel leur Moins d’un tiers des managers estiment que le redé-
entreprise se heurtera dans les années à venir en ploiement adéquat des fonds est suffisamment ra-
matière d’exécution de la stratégie, pratiquement un pide dans leur entreprise pour être efficace. C’est
tiers des managers citent les difficultés à s’adapter à encore pire en matière de redéploiement des res-
l’évolution du marché. Ce n’est pas que les entre- sources humaines. Seuls 20% des managers déclarent
prises ne parviennent pas du tout à s’adapter : seul que leur entreprise parvient à transférer des collabo-
un manager sur dix considère que c’est là le pro- rateurs d’une unité à une autre pour soutenir les prio-
blème. Mais, dans la plupart des cas, soit les entre- rités s tratégiques. Les autres indiquent que les trans-
prises réagissent t ellement lentement qu’elles ne ferts entre unités sont rares (47%) ou, lorsqu’ils ont
sont pas capables de saisir les occasions qui se pré- lieu, qu’ils perturbent les unités (33%).
Les entreprises ont également des difficultés à pourraient o btenir d’importantes ressources pour
ésinvestir. Huit managers sur dix estiment que leur
d exploiter des opportunités intéressantes sans rapport
firme ne parvient pas assez rapidement à se séparer de avec leurs objectifs stratégiques. Cela peut sembler
ses activités en déclin ou à abandonner les initiatives une bonne nouvelle pour un manager, mais pour une
ratées. Ce gaspillage de ressources qui pourraient être entreprise cela pose problème et conduit à lancer plus
redéployées ailleurs nuit de toute évidence à l’exécu- d’initiatives qu’il n’est possible de soutenir. Seuls 11%
tion. Les désengagements trop lents freinent l’exécu- des managers que nous avons interrogés estiment
tion de manière plus insidieuse encore : les hauts diri- que les priorités stratégiques de leur entreprise sont
geants consacrent trop de temps et d’attention aux dotées des ressources financières et humaines
business à potentiel réduit et y envoient des managers nécessaires à leur succès. Un pourcentage frappant
de talent qui se brûlent souvent les ailes en tentant de qui signifie que neuf managers sur dix jugent que
sauver des activités qui auraient dû être abandonnées certaines initiatives majeures de leur société vont
ou vendues plusieurs années auparavant. Plus les échouer faute de ressources suffisantes.
hauts dirigeants traînent des pieds, plus ils risquent de A moins de sélectionner leurs opportunités en
perdre la confiance de leurs managers intermédiaires, fonction de la stratégie de l’entreprise, les managers
dont le soutien constant est essentiel à l’exécution. consacreront inutilement du temps et de l’énergie à
Attention : les managers ne devraient pas invoquer des initiatives périphériques, tandis que les plus
le principe d’agilité comme excuse pour suivre toute p rometteuses d’entre elles seront privées des
opportunité qui se présente à eux. Nombre d’entre- ressources nécessaires à leur succès. L’agilité est
prises de notre échantillon manquent de rigueur stra- cruciale en matière d’exécution de la stratégie, mais
tégique lorsqu’elles décident quelles nouvelles op- elle ne doit pas dépasser les limites stratégiques.
portunités suivre. L a moitié des managers Autrement dit, la souplesse doit être mise en balance
intermédiaires que nous avons étudiés pensent qu’ils avec l’alignement.
%
Transférer des fonds entre différentes unités Ils pourraient obtenir des ressources pour
%
pour soutenir la stratégie exploiter des opportunités intéressantes sans
30% rapport avec leurs objectifs stratégiques
51%
Transférer des effectifs entre différentes unités
pour soutenir la stratégie
20% %
Toutes les priorités stratégiques de
Abandonner des activités en déclin leur entreprise sont dotées des ressources
et/ou des initiatives ratées nécessaires à leur succès
22% 11%
TROISIÈME IDÉE REÇUE r esponsabilité est très préoccupante, mais c’est en-
Communiquer signifie comprendre core pire ailleurs. Moins d’un tiers des collaborateurs
De nombreux dirigeants pensent que le succès passe directs des hauts dirigeants comprennent clairement
par une communication permanente sur la stratégie. les liens entre les priorités de l’entreprise, une part
La P-DG d’une société de services professionnels basée qui tombe à 16% chez les superviseurs de terrain et
à Londres avait pour habitude de réunir son équipe de les chefs d’équipe.
direction en début de mois et de toujours commencer Les hauts dirigeants sont souvent frappés de
par un rappel de la stratégie et des grandes priorités de constater à quel point leur stratégie est mal comprise
l’année. Elle fut ravie d’apprendre dans une enquête dans leur entreprise, car ils estiment passer beaucoup
sur l’engagement des salariés que 84% des membres de temps à communiquer cette stratégie, dans un flux
du personnel étaient d’accord avec l’affirmation : « Je ininterrompu de courriers électroniques, de réunions
comprends clairement les grandes priorités de l’entre- de direction et de rencontres informelles. Or, ce n’est
prise ». Ses efforts semblaient payer. pas la quantité de la communication qui importe :
Son équipe de direction a ensuite répondu à notre presque 90% des managers intermédiaires estiment
enquête, qui leur demandait de décrire la stratégie de que la haute direction communique bien assez. Com-
l’entreprise selon leurs propres termes et d’en énu- ment une communication aussi fréquente peut-elle
mérer les cinq grandes priorités. Moins d’un tiers de générer une compréhension aussi faible ?
l’équipe a pu en citer ne serait-ce que deux. La P-DG Une partie du problème tient au fait que les diri-
fut consternée : elle discutait de ces objectifs à geants évaluent la communication en termes d’inputs
chaque réunion. Hélas, elle n’est pas la seule dans ce (nombre d’e-mails envoyés ou de réunions organi-
cas. Seulement 55% des managers intermédiaires in- sées) et non sur la base du seul indicateur qui compte
terrogés ont pu citer une seule des cinq grandes prio- vraiment, à savoir si les principaux responsables com-
rités de leur entreprise. En d’autres termes, lorsque prennent ce qu’on leur communique. Un problème
l’on demande aux responsables chargés d’expliquer connexe émerge lorsque les dirigeants diluent leurs
la stratégie aux troupes d’énumérer les objectifs stra- messages clés dans des considérations périphériques.
tégiques de leur entreprise, presque la moitié d’entre Dans une société technologique de notre échantillon,
eux ne parvient même pas à en citer un seul. par exemple, les dirigeants ont eu beaucoup de diffi-
Non seulement les objectifs stratégiques sont mal cultés à présenter la stratégie et les objectifs de l’en-
compris, mais ils semblent souvent ne pas avoir de treprise lors du séminaire annuel de la direction. Mais
corrélation entre eux et être déconnectés de la straté- ils ont ajouté onze priorités (différentes des objectifs
gie globale. A peine plus de la moitié des membres de stratégiques), une liste de compétences clés (dont
la haute direction déclare saisir clairement comment l’une assortie de neuf modèles), un ensemble de va-
s’articulent les principales priorités et initiatives de leurs corporate et un dictionnaire de vingt et un nou-
l’entreprise. Une telle découverte à ce niveau de veaux termes stratégiques à maîtriser. Pas étonnant
que les managers présents n’aient pu déceler ce qui Parce qu’une culture qui favorise l’exécution doit
importait le plus. Lorsque l’on interroge les managers reconnaître et récompenser d’autres choses égale-
intermédiaires sur les entraves à la compréhension, le ment, telles que l’agilité, le travail d’équipe et l’ambi-
trop grand nombre de priorités et d’initiatives straté- tion. Or de nombreuses entreprises ne le font pas. Au
giques est quatre fois plus cité que le manque de moment de prendre des décisions de recrutement ou
clarté dans la communication. Les hauts dirigeants de promotion, par exemple, elles attachent beaucoup
participent de cette confusion lorsqu’ils modifient moins d’importance à la capacité d’adaptation d’un
fréquemment leurs messages – un problème évoqué manager à l’évolution de la conjoncture – indiquant
par presque 25% des managers intermédiaires. qu’il a la souplesse nécessaire pour exécuter la straté-
gie – qu’à ses performances passées. Etre agile suppose
QUATRIÈME IDÉE REÇUE d’être prêt à expérimenter de nouvelles choses et de
Une culture de la performance nombreux managers évitent de le faire car ils craignent
favorise l’exécution les conséquences d’un échec. La moitié des managers
Lorsque leur entreprise ne parvient pas à traduire la interrogés pensent que leur carrière en pâtirait s’ils
stratégie en résultats, de nombreux dirigeants exploitaient de nouvelles opportunités ou des innova-
pointent du doigt une culture de la performance in- tions se soldant par un échec. Tenter de nouvelles
suffisante. Mais les chiffres disent autre chose. Il est choses suppose inévitablement des ratés, mais discu-
vrai que, dans la plupart des sociétés, la culture offi- ter franchement des difficultés augmente les chances
cielle (les valeurs fondamentales publiées sur le site de réussite à long terme. Pour autant, les cultures d’en-
Web, par exemple) ne favorise pas l’exécution. C’est treprise encouragent peu les discussions franches né-
lorsque les managers font des choix difficiles que les cessaires à la souplesse. Moins d’un tiers des managers
vraies valeurs d’une entreprise se révèlent. Et à cet indiquent qu’ils peuvent discuter de manière franche
égard, nous avons découvert que lorsque la perfor- et ouverte sur les questions les plus difficiles, tandis
mance est une priorité, elle influence les comporte- qu’un autre tiers estime que beaucoup de sujets im-
ments au quotidien. portants sont considérés comme tabous.
Les décisions relatives au personnel sont parmi Lorsque l’accent est mis de manière excessive sur la
les plus difficiles à prendre. Lorsque nous nous performance, cela peut nuire à l’exécution d’une autre
intéressons aux facteurs qui influencent le recrute- façon, subtile mais non négligeable : quand les mana-
ment, la reconnaissance, les promotions et les licen- gers font passer la réalisation d’objectifs chiffrés avant
ciements, nous observons que la plupart des entre- tout le reste, ils ont tendance à prendre des engage-
prises p arviennent à déceler et à récompenser les ments prudents en matière de performance. Lorsqu’on
performances. Les performances passées sont de loin leur demande quel conseil ils donneraient à un nou-
le premier facteur cité dans les décisions de promo- veau collègue, les deux tiers d’entre eux répondent
tion (par deux tiers des managers). Bien qu’elles qu’ils recommanderaient de prendre des engagements
soient plus difficiles à évaluer chez les nouvelles qu’ils sont sûrs de pouvoir honorer. Ils sont moins d’un
recrues, elles figurent aussi parmi les trois principaux tiers à recommander de viser plus haut. Cette tendance
facteurs qui influencent le recrutement. Un tiers des à jouer la sécurité peut conduire les managers à préfé-
managers estiment que la performance est égale- rer les réductions de coûts à une croissance risquée,
ment t oujours ou presque toujours reconnue sous par exemple, ou à exploiter à fond un business existant
forme de récompenses non financières, par exemple au lieu d’expérimenter un nouveau business model.
les compliments en privé ou en public et l’accès à des Toutefois, le problème le plus urgent en matière de
offres de formation. Une chose est sûre : il est encore culture corporate est que, bien souvent, elle n’encou-
possible d’améliorer les choses, en particulier en rage pas la coordination, pourtant essentielle à l’exécu-
matière de gestion des collaborateurs qui réalisent tion. Les entreprises font constamment fausse route en
des contre-performances. Sur cette question, la la matière. Dans les procédures de recrutement, de
majorité des entreprises que nous avons étudiées promotion ou de reconnaissance non financière, les
remettent l’action à plus tard (33%), traitent la contre- performances passées ont deux ou trois fois plus de
performance de manière incohérente (34%) ou la to- chances d’être récompensées que le fait d’avoir fait ses
lèrent (11%). Dans l’ensemble, toutefois, les sociétés preuves en termes de collaboration. La performance
de notre échantillon disposent d’une solide culture est cruciale, certes, mais si elle est prise en compte aux
de la performance – mais elles ont du mal à exécuter dépens de la coordination, elle peut mettre à mal
leur stratégie. Pourquoi ? l’exécution. Nous avons demandé ce qui se passerait
pour un manager qui atteindrait ses objectifs mais ne i nterventions fréquentes et directes de la haute direc-
réussirait pas à collaborer avec des collègues d’autres tion encouragent les managers intermédiaires à faire
unités. Seuls 20% des managers que nous avons in- remonter les conflits au lieu de les résoudre eux-
terrogés ont répondu que ce problème serait vite mêmes et, au fil du temps, ils perdent leur capacité à
traité, tandis que 60% estimaient qu’il serait résolu régler les problèmes avec leurs collègues des autres
de m anière incohérente ou reporté, et 20% que ce unités. Par ailleurs, si les hauts dirigeants insistent
comportement serait toléré. pour prendre eux-mêmes les décisions difficiles, ils
réduisent les compétences décisionnelles des
CINQUIÈME IDÉE REÇUE managers intermédiaires, leur esprit d’initiative et
L’exécution doit être menée leur a
ppropriation des résultats.
par la direction Dans les grandes organisations complexes, l’exé-
Dans son best-seller « Execution », Larry Bossidy décrit cution dépend d’une équipe que nous appelons des
comment, en tant que P-DG d’AlliedSignal, il a person- « leaders partagés » (« distributed leaders », en anglais,
nellement négocié les objectifs de performance avec concept né en management dans les années 2000,
les managers situés plusieurs échelons en dessous de NDLR). Cette équipe est composée non seulement de
lui et comment il a suivi leurs progrès. Ce type de dé- managers intermédiaires qui gèrent les principaux
marche renforce l’image du P-DG dynamique siégeant business et fonctions, mais aussi d’experts tech-
en haut de l’organigramme et dirigeant l’exécution. niques et spécialisés qui occupent des postes clés