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CM Expérience scolaire des élèves 3 (F.

Burban)

Les épreuves dans le monde scolaire

Introduction

Épreuve = expérience à laquelle on soumet une qualité d’une personne ou d’une chose et qui est
susceptible d’établir la valeur positive de cette qualité. Définition qui se rattache à un champ lexical
à plusieurs niveaux : fait de mettre à l’épreuve (elle est un moment de vérité) dans une situation
concrète, l’épreuve marque l’individu, l’idée de faire ses preuves (montrer aux autres ce dont on est
capable).

Importance de l’épreuve dans le monde scolaire (évaluation). Elle a des incidences sur le bien-être à
l’école. Enquêtes internationales comme PISA (Programme International pour le Suivi des Acquis des
élèves) qui visent à comparer les systèmes scolaires à partir de certains indicateurs comme
l’apprentissage de la grammaire, de l’orthographe ou des mathématiques. Elles montrent un haut
niveau d’anxiété des élèves français en situation d’évaluation particulièrement en mathématiques.
L’évaluation est à considérer comme une des épreuves majeures dans le système scolaire.

I. La notion d’épreuve

1. Épreuve et justice

Travaux de Boltanski et Thévenot qui partent d’une question : à partir de quelles conditions une
épreuve de contrôle de connaissances peut être considérée comme juste ? Quelles sont les limites
à ce principe de justice ? Ce qui suppose une égalité des conditions de passation, l’impossibilité de
la triche, le fait que le contrôle de connaissances porte uniquement sur ce qui a été vu en cours, et
le fait que cela soit réalisable.

Principe de justice chez Boltanski et Thévenot : typologie avec différents principes de justice. Travail
avec des textes depuis l’Antiquité et jusqu’au monde contemporain. Ils ont cherché à identifier
quelles étaient les valeurs de référence dans différents mondes, et ils les ont ensuite catégorisées et
regroupées (7 cités différentes les unes des autres).
 Exemple : dans la Cité inspirée (de l’artiste), on retrouve l’inspiration, la création,
l’imagination et l’infériorité. Valorisation de l’insolite, de la passion, du merveilleux, de la
spontanéité et de l’émotion. Ils vont dévaloriser les habitudes, les signes extérieurs et le
réalisme. Sujets valorisés sont l’enfant, l’artiste, la fée, le fou, le génie et l’illuminé. Épreuves
modèles concernent la création à partir d’une feuille, l’aventure intérieure et le vagabondage
de l’esprit.

Maternelle qui va valoriser les deux premières cités = Cité inspirée (apprentissage par le jeu,
expression par le dessin ou par la musique) et Cité domestique (famille, enseignant est une figure
d’autorité pour le jeune enfant = indistinction entre la figure de l’enseignant et celle du parent).

Cité civique (collectivité, démocratie, solidarité, équité) = qui va émerger au niveau de l’adolescence
et qui va évoluer pendant le lycée.

Toutes les dimensions sont portées différemment par tous les individus. On a donc une pluralité de
principes de justice et des systèmes de justification de l’action (cités). On peut dire que le principe
d’égalité ou de méritocratie renvoie au monde civique, par ailleurs la standardisation des épreuves
renvoie au monde industriel. Validation par un maître qui accompagne un élève sur la réalisation
d’une tâche qui est dans le monde domestique.

D’où une forme d’incertitude et des possibilités de conflits (conflit entre un principe de justice ou
d’équité entre les élèves et un principe de performance par rapport aux résultats d’une évaluation).
L’épreuve c’est ce qui permet de trancher, d’arbitrer et de s’accorder sur l’importance relative d’un
être ou d’un objet. Une épreuve renvoie par définition à une conception de la justice. Mais elle est
également contestable en tant que telle.

2. Épreuve et expérience

Travaux de Martuccelli dans un ouvrage Forgés par l’épreuve (2006). Épreuve qui a toujours existé
historiquement mais elle prend une signification particulière dans le monde contemporain. Notion
d’épreuve trouve son sens dans la société moderne, qui à l’inverse des sociétés traditionnelles, met
au premier plan l’individu. L’épreuve est à la fois vécue par la personne. Elle est donc l’objet de
discours de la part de cette personne sur sa façon d’affronter l’épreuve. Elle est aussi un outil
d’analyse pour comprendre l’articulation entre des histoires singulières avec des phénomènes
sociaux.

Il veut replacer la notion d’épreuve dans une perspective socio-historique : «  Les épreuves sont des
défis historiques, socialement produits, inégalement distribués, que les individus sont contraints
d’affronter  ». Il parle de succession d’épreuves dans le parcours des individus qui sont fortement
déterminées par l’environnement social mais qui sont aussi issues des épreuves plus contingentes
(= part que chacun apporte ou reçoit, celle qui est liée à l’histoire individuelle). Chaque étape
personnelle est notamment déterminée par la précédente. Tout individu passe par un système
standardisé d’épreuves dans les différents domaines de sa vie (école, travail, famille).

Ces épreuves inscrivent l’individu dans les différentes dimensions du lien social : le rapport à
l’histoire (perspective temporelle lointaine, histoire du groupe), le rapport au collectif, le rapport aux
autres, le rapport à soi-même.

Particularité de l’épreuve scolaire : elle joue un rôle majeur dans la sélection sociale. Caractère plus
ou moins durable de l’empreinte du jugement scolaire. Par ailleurs, la massification scolaire et
l’allongement de la durée des études ont transformé profondément les épreuves (place du
baccalauréat, Loi Debré). Importance du contexte sociétal et des politiques éducatives sur les
épreuves vécues par les élèves.

L’ensemble de l’évaluation scolaire construit une forme institutionnelle de confiance en soi (quand il
y a un parcours de réussite et ce même partiellement). À l’inverse, l’échec, même s’il est relatif, peut
être vécu comme un manque durable.

Part d’indétermination de l’épreuve scolaire : c’est ce que l’auteur appelle «  l’échec par la réussite  »
c’est, par exemple, un parcours scolaire qui est dénué de sens, ou marqué par une absence de
projet. On a aussi le phénomène de «  la réussite par l’échec  » c’est, par exemple, le thème de la
revanche scolaire (B.Bergier et G.Francequin avec l’ouvrage La revanche scolaire, des élèves multi-
redoublants devenus sur-diplômés) = tout n’est pas dans le déterminisme.

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