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VERS LA CONSTRUCTION D'UN CADRE D'ANALYSE DE LA CROISSANCE

ENDOGÈNE LOCALISÉE
Une revue de littérature sur les nouveaux modèles de représentation des
phénomènes d'agglomération et de leur évolution

Michel Dimou

Armand Colin | « Revue d’Économie Régionale & Urbaine »

2003/5 décembre | pages 755 à 772


ISSN 0180-7307
DOI 10.3917/reru.035.0755
Article disponible en ligne à l'adresse :
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Revue d'Économie Régionale et Urbaine n" 5 [2003]

VERS LA CONSTRUCTION D'UN CADRE D'ANALYSE DE


LA CROISSANCE ENDOGÈNE LOCALISÉE*
une revue de littérature sur les nouveaux modèles de représentation des
phénomènes d'agglomération et de leur évolution.

TOWARDS A LOCAL ENDOGENOUS GROWTH APPROACH


A study of the new theories of agglomemton through some
recent Iiterature review

par
MichelDIMOU
Maltre de Conférences
CE.R.E.S.U.R.
Université de la Réunion
44, Rue des Mimosas
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F - 97410 SAINT PIERRE - LA RÉUNION
dimou @ univ-reunion.fr

Mots-clés: Croissance endogène, économie géographique, agglomération,


extemalités.

Key-words: Endogenous growth, Economic geography, agglomeration, external


economies.

Classification JEL : Ll1. Rl1. R12. R30.

* hemière version aott 20û2, version révisée mai 2003

RERU 2003,V,pp. 7 55-772


756 Vers la construction d'un cadre d'analyse de la croissance endosène localisée

.INTRODUCTION

En vogue depuis les années quatre-vingt-dix, l'économie géographique


alterne rigueur et souplesse dans ses propositions d'étude des phénomènes
spatiaux. Plutôt qu'une théorie issue d'une démarche scientifique rigide et
uniforme, l'économie géographique représente un ensemble ou une nébuleuse
d'analyses aux contours flous et mal définis, animées par un seul objectif : l'étude
de la concentration spatiale des activités économiques et la formation des
agglomérations. Elle propose aujourd'hui une série de modèles capables de
décrire des frajectoires de croissance localisée différenciées conduisant à la
formation d'une variété de paysages économiques : des quartiers spécialisés à
I'intérieur même des grandes agglomérations (les bouquinistes de St.Martins
Court à Londres, Chinatown à New York ou Korea City à Los Angeles, aux
complexes commerciaux ou aux centres de services situés à la périphérie des
agglomérations (les cités lisières ou << edge-cities >>), des incubateurs hightech du
type Silicon Valley aux systèmes d'activité lraditionnelle tels que la ville
georgienne de Dalton, capitale historique de la fabrication de tapis aux États-Unis
qui rappelle, selon KRUGMAN (1991), les districts industriels du dix-neuvième
siècle observés par MARSHALL.

Les questions posées par l'économie géographique sont évidemment


anciennes au sein de la science régionale, mais I'originalité de sa démarche réside
sur la façon de les aborder. FUJITA, KRUGMAN et VENABLES, (2001) les
spécifient au sein de deux programmes de recherche, entrepris depuis plusieurs
années :

-Le premier cherche à déterminer les raisons qui rendent un équilibre


spatial symétrique instable. Il s'agit d'identifier d'une part les facteurs qui
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suscitent I'apparition de processus de polarisation au sein d'un espace global
initialement homogène caractérisé par une distribution uniforme des agents et des
ressources productives, et comprendre d'autre part les mécanismes qui favorisent
le renforcement (ou I'affaiblissement) de ces processus.

- Le deuxième s'interroge sur les facteurs qui permettent à une


concenftation spatiale de perdurer dans le temps. Ce programme dépasse le cadre
statique de l'allocation spatiale des ressources ponr formuler un projet plus
ambitieux : celui de lier, en dynamique, croissance industrielle et processus
d'agglomération, en transposant ainsi les préoccupations formulées par les auteurs
de la croissance endogène (sustainable growth) dans le domaine de l'économie
spatiale (sustainable c onc entration).

L'objectif de ce papier est de revisiter, dans une perspective historique et


analytique, la progression des modèles d'économie géographique en monfant que
vers la fin des années quatre-vingt-dix, s'opère un glissement de la première vers
la seconde question. À partir de ce moment, l'économie géographique retrouve
des références exclusivement marshalliennes et apparuît comme I'applicaton
spatale des théories de la croissance endogène.

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Cette réflexion est construite en deux temps : il convient tout d'abord de


rappeler les origines de l'économie géographique et les caractéristiques des
premiers modèles de ce courant qui étudient la concentration spatiale ; puis dans
un deuxième temps, sont présentées les limites et ambiguilés de ces modèles
avant d'aborder des approches plus récentes qui modifient le Fojet initial de
l'économie géographique en cherchant à mettre en évidence la nature endogène
des processus de croissance économique au sein d'une agglomération donnée.

-I-
. LE PROJET DE L'ÉCONOMTE GÉOGRAPIilQI-IE

1.1. Des origines théoriques diverses

Quatre influences théoriques majeures conditionnent la naissance de


l'économie géographique :

-
Tout d'abord les travaux des auteurs de la croissance endogène qui
réfutent le postulat néoclassique d'une convergence inexorable de tous les
systèmes économiques, malgré des rythmes d'accumulation différents, vers un
sentier de croissance équilibrée. En suivant les intuitions d'ARROW (1962), ces
auteurs montrent que le volume de I'investissement privé engagé (ROMER, 1986,
1990 ; REBELO, 7991),la constitution du capital humain (LUCAS, 1988), la
mise en place de politiques institutionnelles spécifiques (BARRO, 1990 ;
BARRO et SALA-I-MARTIN, 1992, 1995), le progrès technique endogène
(ROMER, 199A : GROSSMAN et HELPMAN, 1991 ; AGHION et HOWITT,
1998) ou même le développement du commerce international (IIELPMAN et
KRUGMAN, 1985 ; ROMER, 1986) conduisent, à travers la formation privée de
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connaissances spécifiques, à I'apparition d'externalités marshalliennes qui
empêchent la décroissance de la productivité marginale des facteurs au sein d'un
système économique. Ceci conduit à I'apparition d'un régime de rendements
croissants où le taux d'innovation est une variable inhérente à chaque système,
dans un univers de concurrence monopolistique étudiée à travers une
formalisation de type DIXIT et STIGLITZ (1977) ou ETHIER (1982) (ROMER,
1994; AUTUME et MICHEL, 1993 ; LORDON, 1995).
- Ensuite, une analyse microéconomique qui tient compte des
comportements stratégiques des acteurs dans des situations proches à celle du
duopole spatial de HOTELLING. C'est en reprcnant le modèle de ségrégation
simple de SCFIELLING (1978) que KRUGMAN (1996) aborde les décisions de
localisation des agents, dotés à la fois d'une mémoire du passé et d'une
anticipation du futur. Véritable introduction sociologique à la théorie des jeux, le
modèle de SCFIELLING est construit sur les choix résidentiels des citoyens
américains et véhicule deux conclusions : en premier lieu, il suggère que
I'importance que les agents accordent à leur voisinage modifie leur comportement
(résidentiel) ; en second lieu, il montre qu'un seul petit mouvement sur l'échiquier
(résidentiel) suffit pour créer un effet boule de neige et conduire à la formaton
d'un espace hautement structuré au sein duquel se distinguent des quartiers de
communautés séparées.

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758 Vers la construction d'un cadre d'analyse de la croissance endogène localisée

- En noisième lieu, une partie de I'analyse urbaine qui, à travers le


modèle mono-centrique de VON THUNEN (HURIOT, 1994) et ses
prolongements au sein des approches du Central Business District (ALONSO,
1968 ; IMAI,1982; FUJITA et OGAWA, 1982 ; PAPAGEORGIOU et SMITH,
1983 ; FUIITA, 1989) examine la disfibution des agents économiques autour
d'un centre en fonction de leurs préférences et contraintes (coûts de transport,
rente foncière). Mais, comme le rappelle DERYCKE (2002), le paradigme
concurrentiel ne peut pas expliquer la formation d'agglomération sans recourir à
une hypothèse de préexistence d'hétérogénéités spatiales fortes. Dans I'analyse
mono-centrique, I'agglomération est une hypothèse de départ et non pas un
aboutissement et les forces motrices sont les forces centrifuges incitant à la
dispersion des activités économiques ; les forces centripètes, celles qui conduisent
à la constitution d'un centre urbain, sont par contre ignorées. Dès lors,
KRUGMAN (1995) et un certain nombre d'auteurs vont chercher à << inverser le
modèle de VON THUNEN > et étudier la formation des agglomératons à partir
des comportements stratégiques des agents dans un contexte de concurrence
localisée (SCOTCHMER et THISSE,1993; IIURIOT et THISSE, 2000).

- Enfin, I'approche évolutionniste et les modèles de dépendance du passé,


initialement développés dans l'étude de I'histoire des technologies et transposés
par ARTHUR (1989) dans le domaine de l'économie régionale. ARTHUR
cherche à comprendre comment à partir d'un << accident historique >> (small event),
responsable d'une perturbation dans la distribution spatiale des facteurs de
production, un site peut, grâce à I'apparition de rétroactions positives localisées,
monopoliser une industrie, en attirant toutes les nouvelles ressources à l'échelle
globale (devenir un lieu-aimant au sens de MARKUSEN, 2000), tout en sachant
que les préférences intrinsèques de certaines agents auraient dt initialement les
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conduire à I'adoption d'un aute site. Il met en évidence une relation récurrente
qui montre l'<< enfennement>> (lock in) des agents économiques tout au long d'une
trajectoire dont les situatons d'équilibre n'obéissent pas aux seuls signes du
marché (les prix), mais également aux choix antérieurs effectués par les autres
agents. Ces derniers permettent I'apparition d'externalités de réseau dont les
agents présents ne peuvent bénéficier que si leur choix est conforme
aux exigences établies par leurs prédécesseurs. Il y a donc un phénomène
d'irréversibilité marshallienne liée à I'appariton d'externalités d'agglomération.

En intégrant I'ensemble de ces apports et en admettant I'hypothèse d'une


sffucture de marché pertinente caractérisée par la conculrence parfaite et les
rendements croissants, KRUGMAN (1991.,1995, 1996) propose, en premier, un
modèle d'équilibre général spatial.

1.2, L'étude du processus de concentration spatiale par l'économie


géographique

Dans ses premiers modèles d'économie géographique, KRUGMAN


(1991b, 1996) pan d'une situation d'équilibre << instable >> avec une distribution
des ressources (ou des firmes) aléatoire et dispersée, puis montre comment une
perturbation initiale, même très faible, -par exemple, le choix de localisation

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d'une firme- peut conduire à un paysage hautement structuré avec la


concentration des ressources dans certaines localités. Il décrit par-là un
phénomène d'auto-organisation (self-organizing economy), c'est-à-dire
d'ém"rgenc" d'ordre à partir d'une croissance aléatoire, en transposant ainsi
certaines parties des théories de la complexité et du chaos (PRIGOGINE et
STENGER, 1984) dans le domaine de l'économie.

La formation de deux agglomérations à partir d'une croissance aléatoire

Source : KRUGMAN,1996.

L'agglomération apparaît alors comme un système complexe, hautement


ordonné, et doté d'un mécanisme d'auto-renforcement qui est fonction de
I'interaction entre forces centrifuges (qui conduisent à la dispersion des
ressources) etforces centripètes (qui conduisent à leur regroupement). La tension
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entre ces deux forces permet de définir le << marché potentiel > de I'agglomération
æAPAGEORGIOU et THISSE, 1985 ; FUJITA, 1989 ; ARTHUR, 1994)' En
faisant << tournel > son modèle, en modifiant les paramètres à plusieurs reprises et
surtout en introduisant une hypothèse fondamentale selon laquelle les forces
centrifuges et centripètes diminuent de façon exponentielle avec la distance mais
la portée des forces centrifuges reste supérieure à celle des forces centripètes,
fnUCUeN 0996) a:rive à définil non seulement la taille d'une agglomération
mais également ses frontières et sa distance par' rapport aux autres
aggloméiations. Sur une échelle généralisée, ceci conduit à la formation d'une
hiérarchie urbaine conforme à une loi de rang-taille.

Dans ses modèles à deux régions et deux secteurs, moderne (à rendements


croissants) et traditionnel (à rendements constants), KRUGMAN (1996) et les
auteurs en économie géographique définissent trois facteurs déterminants du
processus d'agglomération :

a) tout d'abord les cotts de transport qui sont supposés prendre la forme de
l'iceberg de SAMUELSON. Confrairement aux théories de << désenclavement >>

en matière d'aménagement du territoire, KRUGMAN soutient que des cotts de


transport faibles conduisent au renforcement des processus d'agglomération

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existants. car les firmes agglomérées peuvent écouler leur production sur
I'ensemble du territoire sans craindre la concurrence d'agents isolés, localisés sur
un auffe site, qui captent leur marché de proximité grâce à un prix concurrentiel
non encombré par les cotts de transport ;

b) en second lieu, la proportion de la population du secteur


industrievmoderne dans la population totale, considérée comme mobile par
rapport à une population du secteur agricole/traditionnel qui est, elle, immobile.
La population industrielle est seule capable de permettre à la demande finale
localisée d'atteindre une masse critique nécessaire à I'apparition d'externalités
pécuniaires au sein d'un marché local ;

c) enfin, en dernier lieu, l'élasticité de substitution entre produits qui


traduit la préférence des agents pour la diversité, caractéristique des agréments de
la vie urbaine. En I'introduisant par une formalisation de type DIXIT-STIGLITZ,
I'accent est mis sur le fait que les biens créés sont complémentaires au lieu d'être
des substituts (FUJITA et THISSE, 1997) et ceci est à I'origine de I'apparition
d'économies d'échelle. Cependant, coûlme le soulignent de nombreux
économistes, le fait qu'un seul et unique paramètre mesure I'ensemble de ces
variables constitue une approximation analytique et une limite importante de ces
approches et de leurs applications sur des cas réels (BAUMONT, COMBES.
DERYCKE et JAYET, 2000).

Selon FUJITA et THISSE (2001), parmi les conclusions du modèle de


KRUGMAN, la plus séduisante et intéressante à la fois est certainement la
considération originale du rôle des coûts de transport dans la formation des
agglomérations. Selon ces deux auteurs, cette variable a un caractère dominant :
des faibles cotts de transport conduisent quasi inexorablement à un regroupement
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des firmes même si la part de la population industrielle ou la préférence pour la
diversité des consommateuls sont relativement faibles et inversement. des coûts
de transport importants semblent prohibitifs à la formation des agglomérations.

Le modèle canonique de KRUGMAN restitue un processus d'organisation


et de formation endogène de centres urbains compatble avec un équilibre génê;ral
spatial où règne la concurrence imparfaite et les rendements croissants. Ce qui
rend ce modèle élégant si familier et accessible pour les chercheurs en économie
régionale est le fait qu'il semble pouvoir intégrer la quasi-totalité des apports
scientifiques précédents dans ce domaine : I'apparition des places centrales, le
rôle du potentiel de marché, les externalités marshalliennes, les effets
d'entraînement cumulatifs, la hiérarchie urbaine, les choix de localisation
individuels dans les modèles mono-centriques.

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-II-
DE L'ÉCONOMIE CÉOCru.prnQUE À LA CROISSANCE
ENDOGÈNE LOCALISÉE

2.1. Limites et ambiguïtés des modèles de l'économie géographique

Les modèles de l'économie géographique sont empreints d'une série


d'ambiguités analytiques dans trois domaines : la nature de I'espace et la
définition de la distance, les mécanismes de la croissance et enfin le processus de
concentration spatiale.

2.1.1. La nature de I'espace et la défÎnition de la distance

Les modèles d'économie géographique perçoivent un espace initial


fondamentalement homogène avec une définition de la distance (et de la
proximité) réduite aux coûts de transport. Les industries se localisent à partir d'un
hasard initial puis, par le seul jeu des forces du marché (les coûts de transport et
les extemalités pécuniaires d'agglomération), cherchent à se rapprocher ou à
s'éloigner les unes des autres, selon une logique de concurrence oligopolistique
(BENKO et LIPIFIZ. 2000). Ceci conduit à I'apparition d'une configuration
spatiale de type centre - périphérie, avec une région qui concentre la plus grande
partie de I'activité moderne, I'activité traditionnelle, elle, étant équitablement
partagée enfe les deux régions.

Cette configuration centre - périphérie, inhérente à ces modèles,


expliquerait alors une certaine régularité dans la distribution des grandes
métropoles au sein de I'espace global. KRUGMAN (1991) I'utilise dans son
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interpiétation de la formatiàn tristorique du manufacturing belt des États-Unis,
tandis que d'aufes auteurs (KIM, 1995 ; DOBKINS et IOANNIDES, 1996 ;

ELLISON et GLAESER, 1997) I'emploient, avec plus ou moins de perspicacité,


dans l'étude de l'évolution de la hiérarchie urbaine américaine. Ce schéma
correspond aux caractéristiques de I'industrialisation et urbanisation américaines
développées dans un territoire vierge, en prenant I'allure d'une véritable
<<conquête de I'ouest >> ; il ne convient cependant guère au paysage européen où
la formation des villes, d'origine mercantile, a précêdé et souvent conditionné le
processus de I'industrialisation.

En Europe, le << sens d'appartenance >> à une communauté ou une localité


est beaucoup plus élevé qu'aux États-Unis, et ceci modifie sensiblement les
comportements migratoires et les calculs de localisation des agents. Les
économies d'agglomération sont ici antérieures aux économies d'échelle qui
accompagnent la concentration urbaine contrairement aux modèles de l'économie
géographique. Celles-ci concernent plus particulièrement 19! externalités
d'iniormation. comme le soulignent GI-IILLAIN et HURIOT (2000), dans les
modèles de l'économie géogfaphique, on suppose I'homogénéité des informatons
échangées, de même que I'on considère que celles-ci sont accessibles à toutes les
firmeJ localisées au sein d'une même agglomération; on met ainsi I'accent
davantage sur un effet densité. En rappelant I'ancienne distinction fondamentale
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de POLANYI (1962) enre information explicite (exprimée sous forme


standardisée et conventionnelle afin d'être accessible à tous) et information tacite
(contextuelle et codifiée ne transitant qu'à travers des échanges de proximité
physique et de confiance personnalisée), GUILLAIN et HURIOT mettent en
évidence également l'effet diversité. L'échange d'informations tacites crée une
forme d'externalité (diffiiilement quantifiable) qui ne peut êrre pntagée que pax
certains groupes ou sous-groupes au sein d'une agglomération ; il repose sur des
<< liens faibles > (GRANOVETTER, 1985) qui émanent des règles er des

conventions historiquement établies au niveau local et qui redéfinissent la


distance et la proximité. Celles-ci apparaissent dès lors comme des concepts
complexes dont les cotts de transport ne sont qu'une composante parmi d'autres
(AKERLOF, 1997).

Cette ambiguilé se confirme lorsqu'on étudie le couple < spécialisation


productive - processus d'agglomération >>. Ainsi, certains secteurs ou filières
semblent plus propices à I'agglomération et ceci n'est pas uniquement lié à leur
complexité industrieuse ou aux conditions de transport qui les caractérisent (c'est
le cas du textile, de I'aéronautique et de I'infomratque contrairement à I'industrie
agtoalimentaire et I'automobile). D'aufe part chaque agglomération spécialisée
semble définir une << aire d'influence > différente. Certaines localisations
(évidemment I'exemple le plus illusne est la Silicon Valley, avec la production
informatique) arrivent à une position de quasi-monopole mondial, tellement leur
pouvoir d'atfaction est important ; d'autres partagent des ressources régionales à
une distance très proche l'une de I'autre (les systèmes textiles du Veneto, en Italie,
ou de la région Midi- Pyrénées, en France), sans que cela ne conduise à une seule
et grande agglomération d'activités similaires. Il y a alors une juxtaposition de
systèmes avec une faible aire d'influence. Dans ces contextes la distance et la
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proximité jouent des rôles fondamentalement différents qui ne peuvent surtout
pas être réduits à une mesure des coûts de transport.

2.1.2. Les mécanismes de la croissance

Dans les modèles canoniques de l'économie géographique, le processus de


concentration spatiale est auto-entretenu selon une logique kaldorienne où les
rendements croissants localisés sont déterminés, de façon organique, par la taille
du marché (local). Cependant le processus de croissance, lui, n'est pas endogène
au sens propre du terme ; il dépend au contraire de trois variables indépendantes
telles que la distance plus ou moins modifiée par les infrastructures de
communication (les coûts de ûansport), les tendances démographiques (la taille
de la population industrielle) et les goûts des agents (la préférence pour la
diversité).

Ceci implique l'existence d'une évenfuelle limite dans la croissance


industrielle et la concenfration spatiale des activités liée au volume même de la
demande finale. Si on considère les coûts de transports comme donnés (relatifs
aux infrastrucfures de communication sur place) et les tendances démographiques
stabilisées, la boucle rétroactive favorable à la croissance de I'agglomération
fonctionne tant qu'il reste des ressources productives et notamment une
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population industrielle (mobile) à I'extérieur de la région centrale. Une fois la


polarisation spatiale atteinte, avec la concentration de I'ensemble de la populaton
industrielle au sein d'une agglomération, il n'y a aucune possibilité d'entretenir la
croissance face à la stagnation inexorable des externalités pécuniaires.

À ceci s'ajoute une autre question relative aux mécanismes de croissance, à


savoir comment aborder le cas de la formation d'une agglomération spécialisée
qui ne bénéficie pas de sa propre demande finale mais exporte la majorité de son
produit fini, comme c'est le cas de la quasi-totalité des districts industriels
contemporains et des systèmes localisés de production spécialisée ? La distorsion
spatiale entre le marché final et le système de production reste une caractéristique
majeure du paysage économique contemporain que les premiers modèles
d'économie géographique semblent ignorer.

2.1.3. Le processus de concentration spatiale

Le processus de concenftation spatiale est lié aux choix de localisation des


agents qui s'appuient sur leurs anticipations, susceptibles, selon KRUGMAN, de
se transformer en prophéties auto-réalisatrices. Ceci implique que les agents
économiques possèdent toute I'information - notamment concernant, les cotts de
transport, les tendances démographiques et les gotts des consommateurs - et
peuvent asseoir leur décision de localisation sur la base d'un calcul économique
précis. Dans un tel environnement, la réversibilité des processus de concentration
ipatiale n'est pas exclue. Il suffit, d'ailleurs, que les cotts de transport s'élèvent
dàns le long terme -hypothèse certes invraisemblable mais pas impossible - poul
qu'une agglomération se désagfège au profit d'une dispersion des agents et des
activités.
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Cette question conduit à s'interroger sur la nature même de I'organisation
d'une agglomération. Car, de la simple concentration des ressources au système
compleie caractérisé par des relations organiques fortes entre ses membres, il
existe plusieurs configurations organisatonnelles qu'un espace donné peut
adopter, selon la nature même de I'information produite et de sa circulation au
niveau local, synonyme d'externalités technologiques d'agglomération. Ainsi au-
delà de la taille de I'agglomération -génératrice d'externalités pécuniaires-, c'est
son fonctionnement plus ou moins concurrentiel et I'existence d'externalités
technologiques qui déterminent son ouvefture à I'extérieur et ses << barrières à
I'entrée ou à la sortie >> : plus l'échange local d'information repose sur des signaux
autes que les prix moins il est ouvert à I'arrivée d'autres concurrents ; et moins il
permet aux firmes sur place de quitter les lieux puisque leurs coûts d'ajustement
ne peuvent plus être calculés en fonction de la seule comparaison des avantages
pécuniaires enûe différentes localités. Ceci signifie que le processus d'auto-
àrganisation engagé au sein d'une agglomération peut devenir un frein à son
exiension et son renforcement une fois qu'un certain seuil de ressources -capital
et travail qualifié- est atteint et ceci non seulement pour des raisons de congestion
mais aussià cause des stratégies délibérées de certains agents pour monopoliser et
maîtriser I'information.

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ces remarques ne constituent pas véritablement des critiques envers


l'économie géographique. car elles exigent de cette approche des réponses sur un
terrain d'analyse sur lequel elle ne s'engage pas initialement, à savoir celui de la
croissance locale. Pour comprendre la différenciation des trajectoires des
agglomérations et le sens de leur évolution, il faut pouvoir comprendre la nature
du processus de croissance qui les anime. c'est vers cet objectif que s'oriente un
certain nombre d'analyses contemporaines qui cherchent à remodeler cette
approche et I'introduire dans les rouages de la croissance endogène. Leur objectif
principal devient l'étude de I'endogénéi'sation du processus de croissance au sein
d'une agglomération.

2.2. Vers la construction des modèIes de croissance endogène localisée

Dans I'abondante littérafure relative à la croissance endogène, seule une


petite minorité de travaux traite directement de la question régionale. cependant,
si I'espace national semble être la référence nahrrelle de cette littérature, la plupart
des résultats théoriques obtenus admettent facilement un changement d'échelle
spatiale et peuvent s'appliquer à l'économie régionale. THISSE (1997) rappelle
ainsi que, dans ses travaux fondateurs sur la croissance endogène, LUCAS (1988)
s'interroge d'emblée sur la nature et les causes des processus qui conduisent à
I'agglomération des activités et des agents économiques.

Dans les approches qui traitent de la croissance endogène localisée, on


trouve à peu près le même type de modèles qu'en économie géographique
(paysages à deux régions, économies composées de hois ou quafe secteurs,
distinction entre un travail qualifié mobile et un travail non qualifié immobile,
préférence des consommateurs pour la diversité), mais deux éléments semblent
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les différencier du point de vue méthodologique :

- le rôle des coûts de transport est nettement moins déterminant dans la


décision de localisation des firmes, quelques modèles allant jusqu'à considérer
que ceux-ci n'existent pas pour l'échange de cerûains types de biens ou même pour
I'ensemble de l'économie :

- le rôle de la demande finale est relégué dans un deuxième plan, les


sources de la croissance résidant plutôt dans les facteurs qui augmentent le stock
des connaissances dans la zone considérée et empêchent I'apparition de coûts de
production croissants au niveau de I'entreprise.

De façon générale, les travaux sur la croissance endogène localisée


la croissance (formation du
transposent l'étude des quatre grandes sources de
capital physique, formation du capital humain, progrès technique, politiques
publiques) au niveau régional.

RERU 2003,V,pp. 7 55-772


Michel DIMOU 765

2.2.L. La fonnation du capital physique et la demande de biens


intermédiaires

KRUGMAN et VENABLES (1995, 1997) proposent une complexification


du modèle canonique de l'économie géographique en divisant le secteur moderne
en deux sous-secteurs spécifiques afin d'étudier la formation d'agglomérations
spécialisées. VENABLES (1996) émet même I'hypothèse de I'existence d'un
secteur de production d'un bien final et d'un secteur de production de biens
intermédiaires au lieu de considérer deux secteurs industriels produisant des biens
finaux. En premier lieu, ceci permet de dépasser la contrainte stricte d'une
demande locale exclusivement liée à la consommation finale et examiner le cas
où c'est la demande entre firmes qui domine un marché local. En foncton de la
nature de cette demande (intra-sectorielle ou intersectorielle), et donc des
économies d'échelle qui en découlent, mais aussi de la pression respective sur le
taux de salaire dans chaque sous-secteur, il y aura formation d'une seule
agglomératon globale ou de deux agglomérations spécialisées.

Sur cette même voie, des ffavaux plus récents explorent la relation enfre
localisation et spécialisation, en se focalisant sur le rôle des coûts de transport.
Ainsi PUGA (1996) étudie la spécialisation des agglomérations en fonction du
niveau global des coûts de transport, tandis que KILKENNY (1998) insiste plutôt
sur la valeur relative de ces coûts pour chaque sous-secteur. BRAKMAN et alii
(1996), THISSE (1,997), HELPMAN, (1998) et TABUCHI (1998) mettent, quant
à eux, en évidence le fait qu'au sein d'une agglomération existent également des
coûts de transport et d'échange internes (congestion) responsables de I'appariton
d'externalités négatives. Dans leurs choix de localisation, les firmes mesurent
surtout I'importance des coûts de transport externes par rapport aux coûts internes.
Ceci expliquerait le choix de certaines firmes de se situer en dehors d'une
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agglomération, où le rendement du capital est plus grand, tout en sachant que les
faibles cotts de transpoft entre la région périphérique et la région centrale leur
permettent d'approvisionner facilement les consornmateurs de cette dernière. La
diminution de l'accessibilité locale, qu'elle soit liée à la congestion des échanges
et des déplacements dans un marché local du travail ou aux pressions spéculatives
foncières, implique donc la migration de certaines firmes et tavailleurs en
périphérie de I'agglomération. Ceci peut conduire à la formation d'un équilibre
spatial multi-centrique avec la concenffation de certaines activités, services et
populations dans des périphéries plus ou moins proches du centre-ville el
I'apparition des fameuses cités-lisières ou << edge-cities > (GARREAU, 1991 ;

KRUGMAN. 1996).

En second lieu, ces travaux se recentrent sur la question de la croissance


des agglomératons, en se rapprochant du cadre d'analyse de la croissance
endogène. Ainsi, ENGLMANN et WALZ (1995) etWALZ (1996) développent
un modèle où les sources de la croissance résident dans la formation du capital
fixe et l'investissement léalisé dans un secteur de recherche - développement. Ce
secteur emploie des travailleurs qualifiés et permet I'accumulation de
connaissances ; il produit des biens intermédiaires < immobiles >> différenciés,
nécessaires au processus de production du bien industriel final. ENGLMANN et
RERU 2003,V,pp. 7 55-7 7 2
766 Vers la construction d'un cadre d'analyse de la croissance endogène localisée

W ALZ montrent alors que les unités produisant ces biens différenciés se situent
dans la région avec la dotation initiale la plus importante en inputs intermédiaires
et en tavailleurs qualifiés. Ce mouvement est cumulatif, dans le sens où le
différentiel d'investissement dans le secteur de production de biens intermédiaires
immobiles entre deux régions conduit à un avantage comparatif et une croissance
plus forte dans une région par rappofi à I'autre et, donc, à la persistance d'une
structure spatiale de type centre - périphérie (RICCI, 1999).

2.2.2. La formation d'un capital humain localisé

Les processus d'apprentissage et les efforts de formation professionnelle


engagés par les firmes sont perçus cornme une deuxième source de croissance
endogène d'une agglomération. Deux cas de figure apparaissent :

- d'une part, ces processus sont fonction de la croissance passée et de


I'accumulation du capital physique dans les finnes d'un secteur donné. Ils
conduisent à I'apparition de connaissances seclorielles spécifiques (assimilables à
un capital humain localisé). Leurs effets, purement locaux, améliorent la
productivité gén&ale des facteurs de production du secteur mais ne peuvent pas
êne internalisés par les firmes individuelles ; ils prennent donc la forme d'une
externalité marshallienne de localisation (leaming spillover effect). Ceci conduit
au tenforcement du couple << croissance localisée - spécialisation industrielle >
(PREMER etWALZ,1994).

- d'autre part, ces processus sont liés à la diversité du tissu régional et à la


production de biens différenciés. Dans les modèles de MARTIN et OTTAVIANO
(1999), I'accent est mis sur le fait que les avancées technologiques réalisées dans
le secteur de recherche - développement permettent I'apparition d'un savoir
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générique localisé qui est à I'origine d'une baisse permanente des cotts de
production dans les autres secteurs de production et par-là même d'une croissance
régionale soutenue.

2.2.3. L'apparition d'un progrès lsshnique localisé

La troisième source de croissance endogène localisée réside dans le


progrès technique. En faisant I'hypothèse qu'il existe une préférence des firmes
industrielles pour la
variété, identque à celle des agents pour les biens de
consommation finale, CATIN et GHIO (2000) montrent que tout accroissement
du nombre des biens intermédiaires non échangeables au sein d'une localité peut
êre assimilé à un progrès technique qui augmente I'utilité des firmes résidant
dans cette localité. Cette approche fut initialement conçue à travers une
formalisation de concurrence monopolistique où I'inventeur conserve
perpétuellement son avantage. Puis ont été ajoutées des variantes qui introduisent
des possibilités d'imitation des auhes producteurs et régions. À travers cette
analyse, CATIN et GHIO (2000) montrent que mis à part I'interaction entre
croissance et concentration, il existe un lien important entre la << géographie de la
production >> et la << géographie de I'innovation >>. Ils tentent alors la construction
d'un modèle de développement permettant de passer d'étape en étape, d'une
région à industrie banalisée à une agglomération spécialisée à la production d'un
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Michel DIMOU 767

bien technologique et enfin à une région métropolitaine caractérisée par la


quantité et la variété des services proposés aux firmes (CATIN et GHIO, 1999).

2.2.4. Le rôle des politiques publiques locales

La dernière source de croissance endogène d'une agglomération se trouve


dans certaines politiques publiques locales. Deux types d'analyses prédominent :

- En suivant la voie ouverte par ASCHAUER (1989), une première série


de favaux identifie le rôle des politiques locales à la mise en place d'un stock
d'infrastructures publiques et plus particulièrement d'infrastructures de transport
(THISSE et WILDASIN, 1992 ; FUJITA et MORI, 1996). Selon MARTIN et
ROGERS (1995), les coûts de transport sont une fonction décroissante des
infrastructures régionales de transport. Car les changements observés dans les
technologies de transport depuis plusieurs décennies, à savoir la hausse des coûts
fixes et la baisse relative des coûts variables, réduisent le cott unitaire des
tansports et les coûts d'échange au sein d'une agglomération, mais aussi entre une
agglomération et sa périphérie. MARTIN et ROGERS montrent alors que la seule
présence d'un équipement public ou d'un næud de transport (transportation hub)
joue en faveur des forces centripètes et constitue une incitation pour les
producteurs et les consommateurs à se regrouper au sein d'une seule
agglomération. (THISSE, 1997 ; VENABLES, 2000).

-Une seconde série de travaux insiste davantage sur le rôle << catalyseur >>

que peuvent avoir cerlaines politiques publiques sur la croissance locale. Ainsi,
MARTIN (1998) montre que tout en tenant compte du besoin de financement de
I'effort institutionnel (qui pèse nécessairement sur les agents et les firmes
économiques par I'intennédiaire de l'imposition), certaines politiques locales,
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évaluées par la dotation infrastructurelle en capital public, peuvent induire un
processus de croissance endogène au sein d'une région. Ces politiques conduisent
à la mise en place d'infrastructures spécialisées ou à un allégement des cotts de la
recherche-développement et créent par-là des externalités positives dont
bénéficient les firmes résidant dans la région concemée. De leur côté, CHARLOT
et COMBES (2000) montrent qu'en influençant directement la productivité des
entreprises, les infrastructures publiques pèsent également sur les choix de
localisation des firmes. Elles ont ainsi un rôle fondamental dans la détermination
des limites des forces centripètes qui jouent en faveur de la concenEation spatale
et donc dans la détermination des véritables << frontières >> d'une agglomération et
de son aire d'influence. Ces politiques, qui peuvent être assimilées à l'émergence
d'une véritable << gouvernance locale >>, peuvent ainsi conduire à une progressive
homogénéisation entre I'espace économique et I'espace institutionnel local.

Vers la fin des années quatre-vingt-dix, on constate donc une imbrication


croissante des nouvelles théories de I'agglomération et de la croissance endogène
autour d'une série de modèles visant à étudier de façon combinée le triptyque
<< concentration spatiale
- croissance industrielle - spécialisation productive >>.
Deux éléments doivent être néanmoins signalés :

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768 Vers la construction d'un cadre d'analyse de la croissance endogène localisée

1/ Tandis que dans l'équilibre général spatial proposé par KRUGMAN et


l'économie géographique, les régions sont fondamentalement concurrentes et
cherchent chacune à attirer les ressources productives (firmes et travailleurs
mobiles), les modèles de croissance endogène localisée cherchent plutôt à savoir
quelles sont les sources de la croissance dans le long terme, mais aussi quelles
sont les possibilités pour que cette croissance se diffuse d'une région à I'autre.
Dans certains cas de figure et sous certaines conditions, les régions peuvent alors
évoluer d'une relation de concurrence vers une relation de complémentarité.

% La réversibilité des processus est nettement moins affirmée dans les


approches de la croissance endogène localisée que dans les modèles de
l'économie géographique, car les sources mêmes de cette croissance impliquent
une transformation quasi-irréversible des conditons de production régionale. Il
peut y avoir une modification -voire une inversion- des taux de croissance entre
deux régions mais ceci ne conduit pas à une réversibilité, au sens strict, des
processus de développement.

. CONCLUSION.

En réintégrant les apports de la croissance endogène, les nouveaux


modèles de représentation de I'agglomération s'enrichissent considérablement
et permettent à la fois l'étude d'un plus grand nombre de configurations
organisationnelles spatiales (systèmes de type centre - périphérie avec mono-
spécialisation, systèmes multicentriques, agglomérations multispécialisées, etc.)
et celle d'une pluralité de processus de croissance localisée (multiplicité des biens
intermédiaires, formation du capital humain, politiques publiques locales).
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Ces approches analysent non seulement le processus d'agglomération mais
aussi son << sens d'évolution >> en ternes de combinaison des ressources

productives. Elles ouwent aujourd'hui de nouvelles brèches dans l'étude des


phénomènes de localisation, d'agglomération et de mobilité des facteurs de
production. Il reste maintenant à combiner ces analyses avec d'autres approches
en science régionale afin de pouvoir les appliquer de façon plus concrète à
I'interprétation de la réalité économique.

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R]îSUMÉ
L'économie géographique et les nouvelles théories de I'agglomération bâtissent
un cadre d'analyse théorique original en économie spatiale compatible avec un
environnement caractérisé par les rendements croissants et Ia concurrence impafaite,
Dans ce courant d'analyses, deux programmes essentiels de recherche apparaissent : le
premier cherche à déterminer les raisons qui rendent un équilibre spatial symétique
instable. Il s'agit d'identifier d'une part les facteurs qui suscitent I'apparttion de
processus de polarisation et de concentration des ressources au sein d'un espace global
initialement homogène et de comprendre d'autre part les mécanismes qui favortsent le
renforcement (ou I'affaiblissement) de ces processus. I'e deuxième s'interroge sur les
facteurs qui permettent à une concentration spatiale de perdurer dans le temps. Ce
programme dépasse le cadre statique de I'allocation spatiale des ressources pour
formuler un projet plus ambitieux : celui de lier, en dynamique, croissance industrielle
et processus d'agglomération, en trensposant ainsi les préoccupations formulées par les
auteurs de la croissance endogène dans le domaine de I'économie spatiale. L'obiectif de
ce papier est de revisiter dans une perspective histortque et analytique et à travers une
revue sélective de littérature, la progression des modèles d'économie géographique et
des nouvelles théories d'agglomération en monftant leur glissement continu de la
première vers la seconde question. IIs reioignent ainsi définitivement Ie cadre
résolument mnrshallien des nouvelles théories de croissance endogène.

SUMMARY
Economic geography and the new urban theories create an original analytical
framework in spatial economics in order to study location issues within Qn environment
© Armand Colin | Téléchargé le 05/12/2021 sur www.cairn.info (IP: 160.178.89.234)

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of increasing returns and imperfect competition. Two research topics are related : the
first one wonders when a symmetric equilibrium, without spatial concentration, is
unstable. The work related to this topic tries to identify the reasons for concentration
and polariZation in manufactuing and the forces that strengthen this process. The
second one wonders whether a spatial concentration of economic activity is sustainable.
This topic overpass the problem of the static allocations or resources within global
space and tries to study the couple < industrial growth - spatial concentration ". This
paper aims to prove, through some selective literature review, that the models of the new
economic geography slowly evolve from the first to the second question. They enter,
thus, within the larger domain of endogenous growth's models, while still working on
re gional development issues,

RERU 2@3,V,pp.755-772

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