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PRESENTATION

CITES INTERCULTURELLES
19 avril 2011

Maison des Associations


Salle Mahatma Gandhi, rue des Savoises 15

Mesdames, Messieurs,

Je ne vous apprends évidemment rien en vous disant que Genève est une
ville multiculturelle. Selon les données fournies par l’Office cantonale de la
statistique, presque toutes les nationalités du monde sont représentées sur le
territoire cantonal (soit près de 190 nationalités étrangères en 2010, contre
153 en 1989). 39,7% de la population du canton a un passeport étranger. En
Ville de Genève ce chiffre se monte à 46,4%, soit 0,6% de plus que l’an
dernier. Certains quartiers de la ville comme celui de Pâquis-Navigation
compte même près de 60% d’étranger-ère-s (59.3% au 31 décembre 2010)
et celui de Sécheron – Prieuré près de 58% (57.9% au 31 décembre 2010).
Peu de villes dans le monde peuvent se targuer de connaître une telle
diversité des origines et des pourcentages d’étranger-ère-s aussi élevés.

On a un peu pris l’habitude de dire qu’il n’y a pas de vrais problèmes liés à la
diversité à Genève. C’est effectivement une impression que l’on peut avoir.
Le canton de Genève est un canton riche, qui ne connaît pas de zones
particulièrement défavorisées. Nous n’avons pas de cités dortoirs où une

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population d’origine étrangère « mono ethnique » s’entasse dans une relative
pauvreté comme c’est le cas de certaines banlieues de pays voisins. Dans
les milieux politiques, certains n’hésitent d’ailleurs pas à dire qu’il ne faut
surtout pas développer de politique liée à la diversité pour ne pas pointer du
doigt un problème qui n’existerait pas.

Je pense pour ma part qu’il est irresponsable de raisonner de cette manière.


En tant membre d’un exécutif d’une des villes les plus diversifiées au monde,
je considère qu’il est, au contraire, de notre devoir de développer une
réflexion et une politique qui intègre la diversité de sa population. Ceci
d’abord parce qu’il ne faut pas se voiler la face. Il existe des lieux où la
présence étrangère pose problème. Deux exemples seulement : bon nombre
de nos écoles font face à une importante affluence d’élèves d’origine
étrangère, ce qui ne va pas sans créer des tensions entre ceux qui sont déjà
là et celles et celles et ceux qui viennent d’arriver. Dans certains quartiers de
la ville, il arrive que des jeunes issu-e-s de l’immigration créent des situations
difficiles à gérer, ceci à la grande exaspération des habitant-e-s.

Ces situations, et bien d’autres, participent à alimenter à Genève comme


ailleurs en Suisse et en Europe, un discours anti-étranger-ère-s. Je ne vais
pas faire ici l’analyse des raisons pour lesquelles ce discours se développe,
ni s’il est pertinent ou non. Gardons simplement à l’esprit qu’il est facile de
développer une peur de l’autre. Faire croire aux autochtones que nous
sommes en état de guerre intérieure contre l’étranger-ère est un message qui
passe très facilement. Tout récemment encore, Blocher a déclaré qu’ « en
période de guerre », « on va chercher les vieux généraux ». Ce qui en dit
long sur son état d’esprit. Pour ma part, si j’ai le sentiment que nous sommes
en guerre, c’est surtout contre ces personnages, qui comme lui, ne cessent
de monter des groupes les uns contre les autres, par un discours de peur.

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L’histoire fourmille d’exemples qui montrent l’efficacité de ce discours. Face à
la propagande, la plus mauvaise des solutions est de se taire. C’est pourquoi
j’ai décidé qu’il fallait que notre Ville se dote d’une politique de la diversité.

Cette volonté est aussi partagée par le Conseil municipal de notre Ville
puisque dans une motion acceptée le 16 novembre 2009, il demandait au
Conseil administratif de mettre en place une politique d’intégration
municipale.

Mais développer une telle politique n’est pas simple. Le nombre d’acteurs
déjà engagés sur ce terrain est extrêmement important, surtout à Genève. En
ce qui concerne l’Administration municipale, pas moins de 20 services sont
concernés par cette question. Les autres acteurs, cantonaux, associatifs ou
experts, sont aussi très nombreux. Citons le Bureau de l’intégration des
étrangers et le Département de l’instruction publique. Du côté associatif, on
recense pas moins 300 associations s’occupant à un titre ou un autre de
questions liées à la diversité des origines.

Le nombre de domaines de l’action publique concernés par la diversité des


origines est lui aussi très important. Ce serait trop fastidieux de les énumérer
tous. Nous en avons recensé pas moins de 23, qui vont de la santé publique
jusqu’au logement en passant par la sécurité et la politique d’accueil.
Certains de ces domaines ne relèvent que des compétences de l’Etat,
d’autres essentiellement des milieux associatifs, d’autres encore que
l’Administration municipale. D’autres domaines encore relèvent de plusieurs
niveaux de compétences à la fois.

C’est parce que la situation est complexe et intriquée et que le nombre


d’acteurs et de domaines est très important, qu’il nous a semblé essentiel de

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s’informer sur ce qui se fait ailleurs en matière de gestion de la diversité.
C’est en cherchant ces informations et ces « bonnes pratiques » que nous
avons découvert le programme « Cités interculturelles » du Conseil de
l’Europe et de la commission européenne.

« Cités interculturelles » part tout d’abord du double constat que les sociétés
européennes sont diverses et que, si cette diversité ne va pas sans poser
des problèmes, elle constitue aussi une chance, voire un atout pour les cités.
Le programme « Cités interculturelles » fait aussi le constat que la diversité
constitue aujourd’hui une donnée factuelle de nos sociétés, une réalité qu’il
ne s’agit plus de nier, mais à intégrer dans les politiques publiques.

Le programme « Cités interculturelles » apporte aux villes un soutien dans la


mise en place de leurs politiques publiques en matière de diversité. Il propose
une approche transversale et intégrée de la question en mobilisant
localement le plus grand nombre d’acteurs possibles. Il privilégie une
définition participative de la gestion de la diversité en y associant les acteurs
politiques, administratifs et associatifs. Enfin, « Cités interculturelles » réunit
des villes qui partageant le souci de développer des politiques ciblées en
matière de diversité et qui veulent échanger leurs expertises, leurs bonnes
pratiques, comme leurs interrogations.

Pour ma part j’ai été convaincue de l’intérêt de ce programme pour Genève.


J’ai donc proposé au Conseil administratif d’y adhérer. Ce qu’il a accepté
dans sa séance du 1er décembre dernier.

Si nous nous retrouvons ici aujourd’hui, à la maison des associations,


employé-e-s de l’Administration municipale, employé-e-s de l’Administration
cantonale, partenaires associatifs et experts, c’est parce que nous avons

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entamé le processus proposé par le programme « Cités interculturelles ».
Celui-ci se déroule en plusieurs étapes, qui vous seront présentées par les
expert-e-s de ce programme dans un instant. La première débute aujourd’hui.

Mesdames, Messieurs, je vous remercie infiniment d’avoir accepté de


participer à ce processus qui a démarré avec notre adhésion à Cités
interculturelles. Votre collaboration est très précieuse. Elle contribuera à la
mise au point de la politique de la diversité de la ville de Genève. Je suis
convaincu de la nécessité d’une telle politique, qui doit être lisible,
pragmatique, humaine et largement partagée par la population. Avec 46,4%
d’étrangers, Genève ne peut pas faire l’économie de la réflexion sur la
manière dont elle entend gérer sa diversité.

Je vous remercie.

Sandrine Salerno
Maire de la Ville de Genève

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